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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/436/2019

ATA/1442/2019 du 01.10.2019 ( NAT ) , REJETE

Descripteurs : ACQUISITION DE LA NATIONALITÉ;NATURALISATION;DROIT TRANSITOIRE;DROIT D'ÊTRE ENTENDU;PRINCIPE DE LA BONNE FOI;ÉGALITÉ DE TRAITEMENT
Normes : LN.50; LNat.7.al1; LNat.12; RNat.11; RNat.13.al6; Cst.29.al2; Cst.9; Cst.8; Cst.5.al3
Résumé : Recours contre la décision de l'OCPM refusant d'engager la procédure de naturalisation sous l'ancien droit, refus fondé sur le non-respect du délai de dépôt et des conditions de recevabilité de la demande. Le recourant avait entamé la procédure avant l'entrée en vigueur de la nouvelle loi. Il estimait que l'arrondissement de l'État civil de sa commune l'avait mal renseigné et qu'il devait être protégé en tant qu'administré induit en erreur par une entité administrative. Le recours est rejeté.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/436/2019-NAT ATA/1442/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 1er octobre 2019

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Yves Rausis, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS



EN FAIT

1) Monsieur A______ est né le ______1980 à Cotonou, au Bénin. Sa compagne est Madame B______, mère de ses deux enfants, C______ et D______, nés respectivement les ______2013 et ______ 2017, tous domiciliés à E______ depuis le 1er août 2009.

2) Arrivé sur le territoire suisse à l'âge de dix-sept ans afin d'y accomplir ses études, il a été mis au bénéfice d'un permis de séjour (permis B) régulièrement renouvelé jusqu'au 30 mai 2009.

3) Le 21 janvier 2009, l'office cantonal de la population, devenu depuis lors l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) lui a précisé qu'il ne pourrait prétendre à l'octroi d'un permis d'établissement (permis C) qu'à compter du 30 mai 2010. L'OCPM était prêt à étudier une demande de remise anticipée d'un tel permis pour autant que l'intéressé dispose d'un emploi stable.

4) Depuis le 1er novembre 2011, le recourant est fonctionnaire de l'Union internationale des télécommunications (ci-après : UIT). Il a ainsi été mis au bénéfice d'une carte de légitimation régulièrement prolongée jusqu'au 5 février 2023.

5) Au mois d'octobre 2014, l'intéressé a contacté l'OCPM et s'est fait remettre un dossier de naturalisation. Il a passé le test de langue le 21 janvier 2015.

Le 25 février 2015, il a sollicité de l'arrondissement de l'état civil de la commune de E______ son inscription dans le registre informatisé de l'état civil suisse, en qualité de candidat à la naturalisation.

Le 3 mai 2016, il a, d'une part, signé l'ensemble de son dossier de demande de naturalisation et, d'autre part, versé à la mairie de E______ la somme de CHF 1'200.- à titre d'avance de frais concernant la légalisation des documents nécessaires.

Il n'a toutefois pas déposé le dossier, car la mairie lui avait indiqué qu'il devait attendre la réception de l'acte tiré d'état civil, le dossier ne pouvant être déposé que s'il était complet.

6) Le 7 décembre 2017, l'ancien département de la sécurité et de l'économie, devenu depuis lors le département de la sécurité, de l'emploi et de la santé (ci-après : DSES) a émis un communiqué de presse dans lequel il indiquait qu'exceptionnellement le dépôt des dossiers de naturalisation sans l'acte d'état civil devait être accepté. En effet, un grand nombre de candidats allait manquer le délai d'échéance dû à l'extrême difficulté d'obtenir les documents d'état civil étrangers nécessaires à l'établissement de l'acte précité. Cette exception était soumise aux conditions suivantes : dès le 1er janvier 2018, la personne ne devait plus être éligible à la naturalisation, la demande de naturalisation devait être déposée jusqu'au 22 décembre 2017, enfin le dossier devait être complet au sens de l'art. 11 al. 1 du règlement d'application de la loi sur la nationalité genevoise du 13 juillet 1992 (ci-après : RNat) à l'exception de l'acte d'état civil.

7) Le 1er janvier 2018 est entrée en vigueur la nouvelle loi sur la nationalité suisse du 20 juin 2014 (LN - RS 141.0), abrogeant la loi fédérale sur l'acquisition et la perte de la nationalité suisse du 29 septembre 1952 (aLN).

8) Le 5 mars 2018, l'officier de l'état civil de E______ a remis à l'intéressé un certificat relatif à l'état de famille, délivré en vue de naturalisation.

9) Par courriel du 13 avril 2018, le recourant a envoyé à l'OCPM une lettre non signée requérant sa naturalisation, accompagnée de plusieurs pièces soit : une copie de son certificat d'assurance AVS-AI, un acte tiré du registre de l'état civil suisse daté du 5 mars 2018, une copie de l'attestation de réussite au test de validation des connaissances d'histoire, de géographie et des institutions suisses et genevoises établie le 22 janvier 2015, un extrait du registre des poursuites établi le 16 mars 2018, un extrait du registre judiciaire suisse destiné à des particuliers établi le 23 mars 2018 puis une lettre de la section « examens » (devenu secteur autorisations) de l'OCPM du 21 janvier 2008 lui indiquant qu'il ne pouvait prétendre à l'octroi d'un permis C qu'à compter du 30 mai 2010.

10) Le 10 juillet 2018, l'OCPM a informé M. A______ de son intention de ne pas engager la procédure de naturalisation, ni en application de l'ancien droit car il avait déposé sa demande après l'entrée en vigueur de la LN, ni en application du nouveau droit car il ne disposait pas d'une autorisation d'établissement mais bénéficiait d'une carte de légitimation.

11) Le 20 septembre 2018, le recourant a fait valoir qu'il n'avait pas pu obtenir une autorisation d'établissement uniquement en raison de son engagement auprès d'une organisation internationale. D'autre part, il s'était fié de bonne foi aux déclarations erronées des autorités communales quant au moment auquel il devait déposer sa demande de naturalisation auprès du secteur naturalisations (ci-après  : SN). Il sollicitait l'engagement de la procédure de naturalisation.

Le 24 octobre 2018, il a encore transmis au SN une copie de deux récépissés établis par la commune de E______ attestant du paiement de CHF 1200.-, soit CHF 1'000.- pour « avance de frais procédure légalisation », CHF 150.- pour « certificat état famille CREFE » et CHF 50.- pour « référence SAISI NATU A______ ».

12) Par décision du 21 décembre 2018, déclarée exécutoire nonobstant recours, l'OCPM a refusé d'engager la procédure de naturalisation en faveur de M. A______ en application de l'art. 50 LN et 11 al. 6, let. b RNat du 13 juillet 1992.

M. A______ n'avait pas déposé de demande de naturalisation avant le 1er janvier 2018.

Il n'avait, par ailleurs, jamais été au bénéfice d'une autorisation d'établissement.

Les renseignements erronés communiqués par une collaboratrice de la mairie de E______, auxquels le recourant se serait fié pour ne pas déposer sa demande de naturalisation ordinaire auprès du SN, n'engageaient pas la responsabilité de ce dernier car ils avaient été communiqués par une autorité communale incompétente en matière de recevabilité des demandes de naturalisation ordinaire.

13) Par acte posté le 1er février 2019, M. A______ a interjeté un recours contre cette décision auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative). La décision devait être annulée. L'OCPM devait engager la procédure de naturalisation.

La décision attaquée ne reprenait qu'une partie des faits. Seule la longueur de la procédure auprès de l'arrondissement d'état civil, liée à des documents non conformes, était exposée. Elle ne faisait en revanche pas mention des correspondances et entretiens téléphoniques entre le SN et l'arrondissement d'état civil de E______, de la correspondance du SN au recourant du 10 juillet 2010 et de la correspondance de la mairie de E______ du 8 juin 2018.

Contenues aux art. 12 LNat, 13 al. 6 RNat et 5 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), les conditions de fond quant à l'obtention de la nationalité suisse, étaient remplies. Cela aurait dû permettre de relativiser une éventuelle erreur du recourant et de ne pas lui imputer le dépôt de son dossier après le 31 décembre 2017.

Concernant la violation des principes de la bonne foi et de l'égalité de traitement, M. A______ avait entrepris ses démarches de naturalisation auprès du SN depuis octobre 2014. À partir de cette date, le recourant avait toujours été en contact avec l'arrondissement de l'état civil de E______ afin d'y accomplir les démarches en vue d'obtenir sa naturalisation. Il s'était alors fié de bonne foi aux assurances de l'autorité cantonale qui lui avait assuré que son dossier ne pouvait pas être déposé sans être complet et qu'il pouvait être remis postérieurement au 31 décembre 2017. Il avait découlé de cette erreur commise par une entité administrative et de la confiance que l'administré avait placé en elle, un refus d'engagement de la procédure de naturalisation du SN. Le recourant n'aurait jamais manqué d'introduire sa demande de naturalisation avant l'entrée en vigueur du nouveau droit de la nationalité au 1er janvier 2018 s'il avait été correctement informé, d'autant plus qu'il effectuait les démarches pour ce faire depuis des années.

Par ailleurs, le SN avait, à titre exceptionnel, permis aux administrés de déposer leur dossier même sans l'acte tiré de l'état civil et octroyé un délai allant jusqu'au 31 décembre 2018, soit plus d'un an pour produire ledit document, conscient des difficultés liées à son obtention. M. A______, n'avait pas eu connaissance de cette information et avait déposé son dossier de naturalisation en retard. Le principe de l'égalité de traitement par rapport aux autres administrés, informés, avait été violé.

14) Le 11 mars 2019, l'OCPM a conclu au rejet du recours. Sa décision du 21 décembre 2018 ne portait que sur les conditions de recevabilité de la demande de naturalisation en vertu de l'ancien droit. M. A______ avait sollicité sa naturalisation ordinaire en application de l'aLN, laquelle a été abrogée le 1er janvier 2018, déjà pour ce motif, le recours devait être rejeté.

Le droit cantonal prévoyait expressément que la procédure de naturalisation n'était engagée que si l'ensemble des documents visés à l'art. 11 al. 1 RNat accompagnait le formulaire officiel ad hoc prévu à l'art. 7 LNat. Tel n'avait pas été le cas en l'espèce.

L'art. 13 al. 6 RNat n'était pas applicable en l'espèce car la « procédure » devant le SN n'avait jamais été engagée, conformément à l'art. 11 al. 6 RNat.

Le principe de la bonne foi n'avait pas été violé, le SN étant la seule autorité compétente pour engager la procédure de naturalisation. Les éventuelles déclarations erronées qu'aurait tenues une autorité communale incompétente en matière de recevabilité des demandes de naturalisation ordinaire ne lui étaient pas imputables.

Enfin, le principe de l'égalité de traitement avait été respecté. M. A______ n'avait pas déposé son dossier avant le 22 décembre 2017 et celui-ci n'était manifestement pas complet, au-delà de la dérogation concernant l'acte d'état civil. Par conséquent, les conditions n'étant pas remplies, le recourant ne pouvait pas bénéficier de l'allègement du communiqué de presse du 7 décembre 2017 et se trouvait dans une situation différente.

15) Dans sa réplique, le recourant a persisté dans son argumentation et ses conclusions.

16) Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le recourant se plaint d'une violation de son droit d'être entendu en tant que l'autorité intimée n'aurait ni mentionné ni pris en compte dans sa décision certains éléments de fait mis en avant lors de l'exercice du droit d'être entendu.

a. Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes (arrêts du Tribunal fédéral 2C_545/2014 du 9 janvier 2015 consid. 3.1 ; 2D_5/2012 du 19 avril 2012 consid. 2.3), de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 138 I 154 consid. 2.3.3 ; 138 V 125 consid. 2.1 ; 137 II 266 consid. 3.2).

Par ailleurs, le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. implique notamment pour l'autorité l'obligation de motiver sa décision. Selon la jurisprudence, il suffit que l'autorité mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidée et sur lesquels elle a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause. Elle n'a pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais elle peut au contraire se limiter à ceux qui lui paraissent pertinents (ATF 138 I 232 consid. 5.1 et les arrêts cités).

b. En l'espèce, les éléments mis en avant par le recourant ont été évoqués dans l'exposé en fait de la décision litigieuse. Au vu de la solution juridique retenue par l'autorité intimée, ils n'avaient pas à être exposés avec plus de détails, leur pertinence étant limitée. En particulier, les démarches et contacts que le recourant a eus avec l'état civil de la commune de E______ n'avaient pas à être analysés avec plus de détails, l'OCPM ayant retenu que cette commune n'avait pas de compétences pour engager l'autorité cantonale en application du principe de la bonne foi.

En conséquence, ce grief sera rejeté.

3) L'entrée en vigueur, le 1er janvier 2018, de la LN a entraîné l'abrogation de l'aLN, conformément à l'art. 49 LN (en relation avec le chiffre I de son annexe). Selon la disposition transitoire figurant à l'art. 50 LN, l'acquisition et la perte de la nationalité suisse sont régies par le droit en vigueur au moment où le fait déterminant s'est produit (al. 1). Les demandes déposées avant l'entrée en vigueur de ladite loi sont traitées conformément aux dispositions de l'ancien droit jusqu'à ce qu'une décision soit rendue (al. 2).

En l'espèce, la demande de naturalisation de l'intéressé ayant été envoyée par courriel le 13 avril 2018 à l'OCPM, soit après l'entrée en vigueur de la LN, elle doit être traitée en application de cette dernière et non selon l'aLN, laquelle a été abrogée.

4) a. Dans la procédure ordinaire de naturalisation, si les conditions formelles et matérielles sont remplies, le secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM) accorde l'autorisation fédérale de naturalisation et la transmet à l'autorité cantonale, qui rend la décision de naturalisation (art. 13 al. 3 LN). La naturalisation cantonale et communale est octroyée en fonction des conditions et des règles de procédure déterminées par la législation du canton concerné (art. 15 al. 1 LN).

Au niveau fédéral, les conditions de la naturalisation sont énoncées aux art. 9 (conditions formelles) et 11 (conditions matérielles) LN.

b. À Genève, le candidat à la naturalisation doit remplir les conditions fixées par le droit fédéral et celles fixées par le droit cantonal (art. 1 let. b de la loi sur la nationalité genevoise du 13 mars 1992 - LNat - A 4 05, dans sa teneur actuelle et dans sa teneur antérieure à la dernière modification législative entrée en vigueur le 4 avril 2018). Selon l'art. 210 al. 2 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 (Cst-GE A 2 00), l'État facilite la naturalisation des personnes étrangères. La procédure est simple et rapide. Elle ne peut donner lieu qu'à un émolument destiné à la couverture des frais.

En vertu de l'art. 54 al. 1 LNat, le Conseil d'État est chargé d'édicter le règlement d'application de la LNat.

c. Selon l'art. 7 al. 1 LNat, le candidat adresse sa demande au département chargé d'appliquer la présente loi sur une formule ad hoc.

Sous l'intitulé « Introduction de la requête », l'art. 11 RNat (inchangé depuis le 1er juin 2017 sous réserve de modifications de dénominations) précise les documents qui doivent obligatoirement accompagner la demande de naturalisation (al. 1 à al. 5). Parmi ces documents figurent notamment une photographie (let. b), une attestation de l'administration fiscale, datant de moins de 3 mois, certifiant qu'il a intégralement acquitté ses impôts (let. d) ainsi qu'une attestation de connaissance orale de la langue nationale, correspondant à un niveau équivalent ou supérieur au niveau A2 (intermédiaire) du Cadre européen commun de référence pour les langues, publié par le Conseil de l'Europe (let. f).

À teneur de l'art. 11 al. 6 RNat, la procédure de naturalisation est engagée si : la durée du séjour répond aux normes fédérales et cantonales (let. a) ; tous les documents requis sont présentés (let. b) ; le candidat est au bénéfice d'un titre de séjour valable (let. c) ; le séjour en Suisse du candidat n'a pas subi d'interruption de fait de plus de six mois (let. d).

En l'espèce, le recourant a transmis sa demande uniquement par courrier électronique le 13 avril 2018, sans utiliser le formulaire officiel. Il n'a pas respecté la forme prescrite par la loi. Par ailleurs, il manquait à sa requête les pièces suivantes : une photographie, une attestation de l'administration fiscale datant de moins de trois mois démontrant le paiement intégral de ses impôts, et une attestation de connaissance orale de la langue nationale correspondant à un niveau équivalent ou supérieur au niveau A2 (intermédiaire). Les conditions de recevabilité n'étant pas remplies, la procédure de naturalisation ordinaire dans le canton de Genève ne pouvait pas être engagée valablement par le SN que ce soit au regard de la LN ou de l'aLN, au regard de cette dernière, la demande étant tardive de surcroit.

5) Le recourant soutient que, en application du principe de la bonne foi, sa demande devrait, malgré tout, être traitée en application de l'ancien droit dès lors qu'il ne l'a déposée en 2018 que parce qu'il aurait été induit en erreur par les informations communiquées par la commune de E______ et le temps mis par cette dernière à lui remettre l'acte d'état civil nécessaire.

a. Le principe de la bonne foi entre administration et administré, exprimé aux art. 9 et 5 al. 3 Cst. exige que l'une et l'autre se comportent réciproquement de manière loyale. En particulier, l'administration doit s'abstenir de toute attitude propre à tromper l'administré et elle ne saurait tirer aucun avantage des conséquences d'une incorrection ou insuffisance de sa part (ATF 138 I 49 consid. 8.3 ; 129 I 161 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_227/2015 du 31 mai 2016 consid. 7 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2ème édition, 2018, n. 568).

Le principe de la bonne foi protège le citoyen dans la confiance légitime qu'il met dans les assurances reçues des autorités lorsqu'il a réglé sa conduite d'après des décisions, des déclarations ou un comportement déterminé de l'administration (ATF 141 V 530 consid. 6.2 ; 137 I 69 consid. 2.5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_934/2016 du 13 mars 2017 consid. 3.1). Conformément au principe de la confiance, qui s'applique aux procédures administratives, les décisions, les déclarations et comportements de l'administration doivent recevoir le sens que l'administré pouvait raisonnablement leur attribuer en fonction des circonstances qu'il connaissait ou aurait dû connaître (arrêt du Tribunal fédéral 2P.170/2004 du 14 octobre 2004 in RDAF 2005 I 71 ; Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 569 s).

Selon la jurisprudence, les assurances ou les renseignements erronés donnés par les autorités confèrent des droits aux justiciables lorsque les cinq conditions cumulatives suivantes sont remplies. Tout d'abord, on doit être en présence d'une promesse concrète effectuée à l'égard d'une personne déterminée. Il faut également que l'autorité ait agi dans le cadre et dans les limites de sa compétence, que la personne concernée n'ait pas été en mesure de se rendre compte immédiatement de l'inexactitude du renseignement fourni, qu'elle se soit fondée sur ce renseignement pour prendre des dispositions qu'elle ne peut ensuite modifier sans subir de préjudice et, enfin, que la loi n'ait pas subi de changement depuis le moment où la promesse a été faite (ATF 137 II 182 consid. 3.6.2 ; ATA/1262/2018 du 27 novembre 2018 consid. 4b).

b. En l'espèce, comme il a été précisé par l'autorité intimée dans la décision litigieuse, seul le SN est compétent en matière de recevabilité des demandes de naturalisation ordinaire. L'arrondissement de l'état civil de E______ n'avait pas de compétences pour engager l'autorité cantonale. Il s'ensuit qu'aucune responsabilité ne pouvait être imputée à la partie intimée pour d'éventuelles déclarations erronées émises au sein d'une autorité communale incompétente en application du principe de la bonne foi.

6) Le recourant se plaint d'une violation du principe de l'égalité de traitement, au motif que les personnes qui avaient déposé, avant le 1er janvier 2018, une demande de naturalisation sans le certificat d'état civil avaient pu bénéficier d'une ouverture de la procédure de naturalisation, traitée selon l'ancien droit, qui lui a été refusée.

a. Une décision ou un arrêté viole le principe de l'égalité de traitement garanti par l'art. 8 Cst. lorsqu'il établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou lorsqu'il omet de faire des distinctions qui s'imposent au vu des circonstances, c'est-à-dire lorsque ce qui est semblable n'est pas traité de manière identique et lorsque ce qui est dissemblable ne l'est pas de manière différente. Cela suppose que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante. La question de savoir si une distinction juridique repose sur un motif raisonnable peut recevoir une réponse différente selon les époques et suivant les conceptions, idéologies et situations du moment (ATA/1090/2018 du 16 octobre 2018 et les références citées).

b. En l'espèce, la situation du recourant n'est pas comparable avec celle des personnes qu'il prend en référence : ces dernières ont déposé leur demande avant le 22 décembre 2017, ce qu'il n'a pas fait. Au demeurant, elles remplissaient les conditions du communiqué de presse du 7 décembre 2017, contrairement au recourant, comme cela a été analysé antérieurement. Les éventuelles indications erronées que lui aurait communiquées la commune de E______ ne sont pas aptes à modifier cette appréciation, comme cela a été analysé sous l'angle du principe de la bonne foi.

Partant, ce grief sera aussi rejeté.

7) Vu ce qui précède, c'est de façon conforme au droit que le SN a refusé d'engager la procédure de naturalisation de l'intéressé au motif que la demande n'avait pas été déposée à temps pour être traitée selon l'aLN et que les conditions de recevabilité n'avaient pas été respectées.

Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté.

8) Aucun émolument ne sera perçu (art. 87 al. 1 LPA), la procédure étant gratuite s'agissant d'une décision en matière de naturalisation (art. 12 al. 1 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Vu l'issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 1er février 2019 par Monsieur A______ contre la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 21 décembre 2018 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Yves Rausis, avocat du recourant, ainsi qu'à l'office cantonal de la population et des migrations.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, MM. Thélin, Pagan et Verniory, Mme Cuendet, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :