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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/658/2019

ATA/1389/2019 du 17.09.2019 ( MARPU ) , REJETE

Descripteurs : MARCHÉS PUBLICS;APPEL D'OFFRES(MARCHÉS PUBLICS);PROCÉDURE D'ADJUDICATION;SOUMISSIONNAIRE;PRIX;COMPARAISON DE PRIX;DROIT D'ÊTRE ENTENDU;FORMALISME EXCESSIF;POUVOIR D'APPRÉCIATION;ADJUDICATEUR
Normes : L-AIMP.3.al3; L-AIMP.3.al4; AIMP.18.al2; Cst.29.al2; RMP.41; RMP.42.al1.lete; RMP.39.al1; RMP.32.al1; RMP.42.al1.letb; AIMP.1.al3.letc; RMP.24
Parties : ARTEFERRO SUISSE SA / VILLE DE GENÈVE - DÉPARTEMENT DES CONSTRUCTIONS ET DE L'AMÉNAGEMENT, GENERAL DE METALISTERIA, MAQUETAS Y DISENOS SL DE VALENCINA (ESPAGNE)
Résumé : Rejet du recours d’un soumissionnaire arrivé en deuxième position. La question de l’existence d’une offre anormalement basse peut souffrir de rester ouverte, dès lors que l’autorité adjudicatrice a demandé des renseignements complémentaires au soumissionnaire concerné. Contrairement à ce que prétend la recourante, toute les attestations nécessaires ont été fournies avec l’appel d’offre de l’adjudicataire et celle-ci a proposé des prestations conformes à l’appel d’offres. L’utilisation de sous-critères concrétisant un critère principal ne nécessite pas de communication obligatoire préalable de la part du pouvoir adjudicateur.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/658/2019-MARPU ATA/1389/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 17 septembre 2019

 

dans la cause

 

ARTEFERRO SUISSE SA
représentée par Me Bénédict Fontanet, avocat

contre

VILLE DE GENÈVE - DÉPARTEMENT DES CONSTRUCTIONS ET DE L'AMÉNAGEMENT


et

GENERAL DE METALISTERIA MAQUETAS Y DISEÑOS SL

représentée par atelierd21, mandataire


EN FAIT

1) Le 8 juin 2018, par publication dans la Feuille d'Avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) et sur le site www.simap.ch des marchés publics romands, la Ville de Genève (ci-après : la ville) a lancé un appel d'offres, en procédure ouverte, portant sur « les ouvrages métalliques courants
CF 272.2 » pour la Nouvelle Comédie. Le marché était soumis à l'accord GATT/OMC sur les marchés publics du 15 avril 1994 (AMP - RS 0.632.231.422) et aux traités internationaux.

Outre les éléments de construction métallique, le cahier des charges prévoyait également des travaux relatifs à des éléments de vitrages intérieurs et de plafonds suspendus.

2) Par décision du 3 septembre 2018, la ville a informé les soumissionnaires que la procédure publique devait être interrompue, dès lors que toutes les offres étaient supérieures au montant du budget prévu et octroyé.

3) a. Le 19 octobre 2018, la ville a procédé à un nouvel appel d'offres, par publication dans la FAO et sur le site www.simap.ch, ne portant que sur des
« ouvrages métalliques courants (serrurerie) CF 272.2 », les éléments de vitrages intérieurs ayant notamment été écartés. Le marché, également soumis à l'AMP et aux traités internationaux, était devisé à CHF 800'000.-. La sous-traitance était admise. Les soumissionnaires étaient invités à déposer leur offre complète d'ici au 4 décembre 2018.

b. Le dossier d'appel d'offres récapitulait, en page 3, la liste des attestations qui devaient obligatoirement être présentées, soit : « AVS/AI/APG (retraite), allocations familiales (AF), prévoyance professionnelle - 2ème pilier (LPP - retraite complémentaire), assurance accidents (Suva/CNA) - LAA, convention collective de travail de Genève ou OCIRT, impôt à la source, engagement du respect de l'égalité entre femmes et hommes ». Pour être valables, les attestations ne devaient pas être antérieures de plus de trois mois à la date fixée pour leur production, sauf dans les cas où elles avaient, par leur contenu, une durée de validité supérieure.

Le marché serait adjugé au soumissionnaire ayant présenté l'offre économiquement la plus avantageuse, soit celle présentant le meilleur rapport qualité/prix. Les critères de l'adjudication étaient au nombre de quatre : le prix, pondéré à 30 % ; les références, pondérées à 25 % ; l'organisation, pondérée à
25 % ; et la qualité technique, pondérée à 20 %. Le prix était évalué conformément à la méthode « T2 ». Un facteur de crédibilité pouvait être utilisé pour pondérer la note du critère du prix (dossier d'appel d'offres, p. 11).

S'agissant des moyens de preuve relatifs au critère des références, il était précisé que les références indiquées seraient vérifiées par téléphone. La note donnée se baserait à la fois sur les documents fournis, notamment la documentation graphique des ouvrages dont les détails devaient avoir une complexité similaire à celle demandée en soumission, et sur les informations téléphoniques reçues. Les éventuelles expériences antérieures du maître d'ouvrage pourraient également être prises en compte (dossier d'appel d'offres, p. 12).

4) Trois offres sont parvenues à la ville et ont été évaluées sous l'angle des critères d'aptitudes. Il s'agissait des offres présentées par :

-          General de Metalisteria, Maquetas y Diseños SL (ci-après : Metalisteria), société espagnole sise à Séville, pour CHF 713'531.89 ;

-          Arteferro Suisse SA (ci-après : Arteferro), société ayant son siège à Satigny, pour CHF 1'150'236.- ;

-          Metaloid SA (ci-après : Metaloid), ayant son siège à Genève, pour
CHF 1'778'572.53.

5) Par décision du 6 février 2019, la ville a informé Metalisteria qu'elle avait adjugé le marché en sa faveur, son offre ayant été jugée économiquement la plus avantageuse.

En vue d'établir le contrat et de régler les détails d'adjudication, il lui était demandé de fournir, dans les quinze jours, pour elle-même et tous ses sous-traitants, une attestation confirmant être à jour avec « le paiement de [ses] impôts et de [ses] cotisations sociales (AVS, AF, LAA, OCIRT ou CTT de Genève, impôt à la source, Registre du commerce ou équivalent, respect de l'égalité entre hommes et femmes) datant de moins de [trois] mois ».

Le tableau comparatif des offres était joint et faisait partie intégrante de la décision. En résumé, il présentait les résultats suivants :

 

Montant de l'offre TTC

Critère 1 :

Critère 2 : références et qualité

Critère 3 : organisation

Critère 5 : qualité technique

Total

Rang

Qualité économique

 

 

Note

Points

Note

Points

Note

Points

Note

Points

 

 

Metaloid

1'778'572.53

0,80

24,14

3,08

77,00

3,50

87,50

3,00

60,00

248,64

3

Arteferro

1'150'236.00

1,92

67,72

3,72

93,00

3,50

87,50

3,00

60,00

298,22

2

Metalisteria

713'531.89

5,00

150,00

6,68

92,00

3,00

75,00

3,00

60,00

377,00

1

Un « critère 4 » relatif à la formation des apprentis figurait dans le tableau mais n'avait fait l'objet d'aucune notation.

6) Par décisions du même jour, la ville a informé Arteferro et Metaloid de ce que le marché avait été adjugé à Metalisteria.

Le tableau comparatif des offres était également joint.

7) Par acte expédié le 18 février 2019, Arteferro a interjeté recours contre la décision d'adjudication précitée par-devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) en concluant, à titre superprovisionnel, à ce qu'il soit fait interdiction à la ville de conclure tout contrat avec Metalisteria portant sur l'adjudication litigieuse avant droit jugé sur sa demande d'effet suspensif. L'effet suspensif devait par ailleurs être octroyé à son recours. Sur le fond, il devait préalablement être ordonné à la ville de produire l'intégralité de l'offre déposée par Metalisteria, en caviardant au besoin les éléments relevant du secret d'affaires et lui être octroyé un délai pour compléter ensuite son recours. À titre principal, la décision d'adjudication devait être annulée et le marché public adjugé en sa faveur. Subsidiairement, elle a conclu à l'annulation de la décision querellée et au renvoi à la ville pour adjudication en sa faveur, et plus subsidiairement encore, au constat de l'illicéité de l'adjudication et à ce qu'un délai lui soit imparti pour formuler ses prétentions en indemnisation.

L'effet suspensif devait être octroyé à son recours. Il n'y avait pas d'urgence à attribuer le marché litigieux dès lors que les travaux devaient être terminés au mois de septembre 2019. Elle était en mesure de les réaliser en quatre mois, de sorte qu'il n'y avait pas d'urgence à les commencer.

Sur le fond, l'offre de l'adjudicataire était anormalement basse et aurait dû, pour ce motif, être écartée. Le prix proposé était en effet 30 % meilleur marché que celui qu'elle avait offert, 50 % moins cher que la moyenne des autres offres et 60 % moins onéreux que celui du concurrent arrivé en troisième position. En présence de pareils écarts, le pouvoir adjudicateur avait l'obligation d'interpeller l'adjudicataire sur la crédibilité du prix proposé et de lui demander des explications. Or, la ville n'avait rien fait de tel. Cela était d'autant moins compréhensible que les conditions générales de l'offre précisaient qu'un facteur de crédibilité pouvait être utilisé pour pondérer la note du critère du prix. Le fait que le prix offert par l'adjudicateur soit assez proche du prix estimé du marché ne permettait pas à la ville, au vu des écarts de prix très importants avec les deux autres offres, de faire l'économie d'investigations supplémentaires pour s'assurer que le prix offert était réaliste et ne cachait pas une tentative de sous-enchère salariale.

Les soumissionnaires devaient produire avec leur offre l'attestation confirmant qu'ils s'engageaient à respecter l'égalité entre les femmes et les hommes. Or, ce document, contrairement à toutes les autres attestations requises, ne figurait pas dans le dossier qu'elle avait pu consulter auprès de la ville en date du 15 février 2019. L'absence de ce document était par ailleurs confirmée par la ville, cette dernière ayant expressément octroyé un délai de quinze jours à l'adjudicataire dans la décision d'adjudication du 6 février 2019 pour produire cette attestation. À teneur du règlement sur la passation des marchés publics du
17 décembre 2007 (RMP - L 6 05.01), l'exclusion d'office était la règle en cas de non-présentation de cette attestation. Compte tenu du caractère très formaliste du droit des marchés publics, l'offre de l'adjudicataire aurait dû être écartée d'office.

Enfin, le critère des références avait été, de manière inadmissible, scindé en deux sous-critères, à savoir « adéquation des références », pondéré à 5 % et
« qualité des références », pondéré à 20 %. Or, le pouvoir adjudicateur n'avait pas annoncé l'existence de ces deux sous-critères dans les documents d'appel d'offres, contrevenant ainsi au principe de transparence.

Le pouvoir adjudicateur aurait ainsi dû, d'entrée de cause, exclure l'offre de Metalisteria. La décision d'adjudication était ainsi illicite. Arrivée en deuxième place, le marché devait lui être adjugé.

8) Par décision du 20 février 2019, la chambre de céans a fait interdiction à la ville de conclure le contrat d'exécution de l'offre, jusqu'à droit jugé sur la requête de restitution de l'effet suspensif.

9) Par courrier du 28 février 2019, Metalisteria a indiqué qu'elle considérait que les critiques d'Arteferro contre la décision d'adjudication du 6 février 2019 n'étaient pas fondées et devaient être écartées.

10) Dans ses observations du 1er mars 2019, sur effet suspensif et sur le fond, la Ville de Genève a conclu au rejet tant du recours que de la requête d'effet suspensif. Préalablement, la consultation du chargé de pièces confidentielles remis à la chambre administrative, contenant l'offre non-caviardée de Metalisteria, devait être refusée.

Le chantier de la Nouvelle Comédie avait démarré au début de l'année 2017 et devait impérativement s'achever simultanément à la mise en service du CEVA, le 15 décembre 2019. La remise du bâtiment devait se faire début février 2020. Il existait des risques financiers importants en cas de retard dans la remise du bâtiment. Les éléments de serrurerie devaient être installés de façon coordonnée avec l'avancement du chantier. Certains éléments devaient être posés en mars 2019, afin d'éviter des retards pour le chantier, de sorte qu'il convenait de refuser l'octroi de l'effet suspensif.

L'essentiel des ouvrages mis en soumission étaient des ouvrages métalliques très spécifiques, qui devaient être faits sur mesure, puis intégrés dans le bâtiment. Il s'agissait notamment des garde-corps et des mains courantes des huit cages d'escaliers de secours, qui représentaient environ 40 % du marché. Il s'agissait également de la fourniture et de la pose des quatre exutoires de désenfumage qui étaient de dimensions exceptionnelles et devaient être faits sur mesure. Enfin, le marché concernait la mise en place de caissons de désenfumage, particulièrement importants. Les éléments à réaliser se rapportaient donc à la sécurité du bâtiment et protégeaient du risque de circulation (garde-corps) et d'incendie. La mise en place de ce dispositif était soumise à l'approbation de la police du feu, laquelle devait délivrer un permis d'exploiter.

La recourante se contentait de constater d'importants écarts de prix, sans démontrer en quoi ni sur quelle base il fallait considérer que l'offre de Metalisteria était anormalement basse. Diverses spécificités expliquaient cette différence de prix. D'une part, la partie la plus importante du marché devait être effectuée en atelier, en Espagne, seule la prise des mesures et la pose des pièces commandées devant avoir lieu à Genève. Or, il était notoire que les salaires espagnols étaient inférieurs à ceux prévus par les conventions collectives en vigueur à Genève. Metalisteria avait produit la liste de ses employés et de leurs salaires bruts, dont il ressortait que le salaire moyen brut était de EUR 1'775.- par mois, alors que le salaire moyen minimum dans le domaine de la serrurerie à Genève s'élevait à
CHF 4'550.- versé treize fois par an. D'autre part, le mode de production expliquait les écarts de prix. L'adjudicataire prévoyait de faire réaliser les pièces de serrurerie nécessaires dans ses propres ateliers, par ses employés. Il n'avait ainsi pas été considéré que l'offre de l'adjudicataire était anormalement basse. Cela étant, la ville avait néanmoins requis des explications de la part de l'adjudicataire, notamment par rapport au prix de son offre. Une rencontre avait eu lieu à Genève le 19 décembre 2018 entre elle, le bureau d'architecte mandaté pour le projet et des représentants de Metalisteria, dont elle produisait le
compte-rendu. Il en ressortait notamment que cette dernière s'engageait à respecter les salaires prévus par la convention collective pour tous les travaux à effectuer à Genève. Ainsi, même s'il fallait considérer l'offre de Metalisteria comme étant anormalement basse, elle avait interpellé l'adjudicataire pour lui poser des questions spécifiques.

Contrairement à ce que prétendait la recourante, Metalisteria avait produit l'attestation d'engagement à respecter l'égalité entre femmes et hommes. Son courrier dans lequel elle sollicitait à nouveau la remise de ce document s'inspirait d'une lettre-type du guide romand. Il n'était pas inusuel de redemander à nouveau des documents figurant déjà dans l'offre, compte tenu de l'écoulement du temps entre la remise des offres et la décision d'adjudication.

Enfin, même à considérer qu'elle avait procédé à l'utilisation de sous-critères pour noter le critère de la référence, ceux-ci n'avaient pas d'autre objet que de concrétiser le critère tel que publié et très précisément décrit dans le cahier des charges.

Étaient joints aux observations, un chargé de pièces, à l'attention de toutes les parties, ainsi qu'un chargé de pièces confidentiel, à l'attention de la chambre administrative, comprenant notamment le détail des prix de la soumission de l'adjudicataire.

11) Le 28 mars 2019, Arteferro a indiqué n'avoir pas d'observations complémentaires à formuler, tant s'agissant de l'effet suspensif que du fond.

12) Par décision sur effet suspensif du 1er avril 2019, la chambre administrative a rejeté la requête de restitution d'effet suspensif et réservé le sort des frais de procédure jusqu'à droit jugé au fond.

13) Interpellée par la chambre administrative, Metalisteria a indiqué, par courrier du 3 avril 2019, donner son accord à la transmission non caviardée de son offre à la recourante.

14) En date du 4 avril 2019, l'offre non caviardée de Metalisteria a été transmise à la recourante.

15) Par courrier du même jour, reçu par la chambre administrative le 5 avril 2019, Metalisteria a indiqué qu'elle n'était pas d'accord pour la transmission des prix unitaires de son offre, dès lors que cela relevait du secret commercial.

16) Le 18 avril 2019, la ville et Metalisteria ont conclu le contrat portant sur les travaux d'ouvrages métalliques de la Nouvelle Comédie.

17) Dans son écriture complémentaire du 20 mai 2019, Arteferro a conclu, préalablement, à ce qu'il soit ordonné à la ville de produire tout document démontrant que les trappes d'accès, objet du poste 861.027 de la soumission, étaient homologuées en Suisse et répondaient aux exigences de la norme de protection incendie EL (recte : EI) 90, et, principalement, à ce qu'il soit constaté que la décision du 6 février 2019 adjugeant le marché à Metalisteria était illicite et à ce que la ville soit condamnée à lui verser une indemnité de CHF 17'677.65.

Après avoir analysé point par point les postes de l'offre de Metalisteria, un élément était particulièrement frappant : s'agissant du poste 861.027 de la soumission, portant sur la fourniture et la pose de huit « trappes d'accès aux boîtes à ressort », le prix unitaire proposé par Metalisteria s'élevait à CHF 604.80 HT, tandis que celui qu'elle proposait s'élevait à CHF 10'640.-, main d'oeuvre comprise. Pour être admis, les éléments métalliques devaient répondre aux exigences de la norme EL (recte : EI) 90 de l'association des établissements cantonaux d'assurance incendie (ci-après : AEAI). Pour formuler son offre, la recourante s'était approvisionnée auprès de l'entreprise Wibatech, comme suggéré dans l'appel d'offre, laquelle lui avait proposé un prix unitaire de CHF 7'800.- HT par trappe. Il était dès lors incompréhensible que l'adjudicataire ait pu proposer un prix unitaire, incluant de surcroît la main d'oeuvre, plus de dix fois moins cher que celui proposé par la société fournissant l'objet prévu dans la soumission. Dès lors, soit le produit proposé n'était pas conforme à celui attendu par la ville, soit il ne répondait pas aux normes requises par la soumission. Pour cette raison, l'offre de Metalisteria aurait dû être écartée et la décision d'adjudication était illicite.

Par ailleurs, au vu des malfaçons commises par une entreprise italienne qui avaient été découvertes récemment en lien avec un chantier des transports publics genevois (ci-après : TPG), le pouvoir adjudicateur se devait de prendre toutes les mesures visant à obvier ce genre de comportement qui faussait la concurrence et portait préjudice aux employés étrangers ayant à intervenir sur des chantiers en Suisse. Or, dans le cas concret, rien n'indiquait que le pouvoir adjudicataire ait pris des mesures suffisantes. Les écarts de prix avec les offres des deux autres soumissionnaires faisaient naître des doutes quant à la crédibilité du prix proposé par l'adjudicataire, notamment au regard du poste 861.027. L'analyse de la ville avait manqué de rigueur, sans quoi l'offre de l'adjudicataire aurait été écartée.

S'agissant de son indemnisation, il convenait de prendre en compte les frais d'avocat qu'elle avait dû supporter en lien avec cette procédure, soit
CHF 10'177.65, ainsi qu'un montant de CHF 7'500.- pour le dommage découlant de la préparation de la soumission, soit un total de CHF 17'677.65.

18) Dans ses observations du 20 juin 2019, la ville a conclu au rejet des conclusions d'Arteferro lui ordonnant de produire tout document démontrant que les trappes d'accès, objet du poste 861.027 de la soumission, étaient homologuées en Suisse et répondaient aux exigences de la norme de protection incendie El 90 ainsi qu'au rejet du recours.

La recourante, qui considérait que l'offre de l'adjudicataire était anormalement basse, ne critiquait en réalité qu'un seul prix, à savoir celui du poste 861.027 concernant la fourniture et la pose de huit trappes. Or, si la recourante envisageait de faire appel à un fournisseur ayant son siège en Suisse pour la fourniture desdites trappes, soit Wibatech, Metalisteria les ferait réaliser dans ses propres ateliers, par ses ouvriers. Compte tenu des écarts de charges entre la Suisse et l'Espagne, notamment salariales, le coût des pièces était plus élevé en cas de production en Suisse. Il y avait par ailleurs un écart de près de
30 % entre l'offre de Wibatech et le prix offert par la recourante. Elle s'était ainsi réservée une marge de 10 à 15 %, ce qui expliquait également la différence de prix avec l'offre de l'adjudicataire.

Sur les cinquante pages de prix qui devaient être complétées par les soumissionnaires, la recourante ne critiquait qu'un seul prix. Même si le prix pour ce poste devait être considéré comme étant anormalement bas, ce qui n'était pas le cas, cela ne justifiait pas d'écarter l'offre de Metalisteria pour ce seul motif.

C'était par ailleurs à tort que la recourante prétendait que les trappes proposées n'étaient pas homologuées ni conformes au cahier des charges. L'adjudicataire lui avait au contraire confirmé que les trappes seraient fournies selon les spécificités demandées, et cela au prix annoncé dans son offre. Au vu des dimensions inhabituelles des trappes requises, ni celles figurant dans l'offre de la recourante ni celles de l'adjudicataire n'étaient, en l'état, homologuées par l'AEAI. L'homologation des trappes de l'adjudicataire pouvait être faite en Espagne, ce qui était à nouveau un élément permettant de justifier la différence de prix.

Elle n'entendait au surplus pas se déterminer s'agissant de la situation constatée sur le chantier des TPG, laquelle n'avait aucun lien avec cette affaire.

Elle s'en rapportait à justice concernant le dommage allégué par la recourante, relevant toutefois qu'aucune justification n'avait été apportée par la recourante pour justifier les frais allégués par rapport à l'élaboration de l'offre.

19) Par courrier du 27 juin 2019, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

20) Le contenu des écritures des parties sera repris, en tant que de besoin, de manière plus développée dans la partie en droit du présent arrêt.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable sur ces aspects (art. 15 al. 1, al. 1bis let. e et al. 2 de l'accord intercantonal sur les marchés publics du 25 novembre 1994 - AIMP - L 6 05 ;
art. 3 al. 1 de la loi du 12 juin 1997 autorisant le Conseil d'État à adhérer à l'AIMP - L-AIMP - L 6 05.0 ; art. 55 let. e et 56 al. 1 RMP ; art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05).

2) a. La qualité pour recourir en matière de marchés publics se définit en fonction des critères de l'art. 60 al. 1 let. a et b de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), applicable sur renvoi de l'art. 3 al. 4 L-AIMP. Elle appartient aux parties à la procédure qui a abouti à la décision attaquée, chacune de celles-ci devant néanmoins être touchée directement par la décision et avoir un intérêt personnel digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée. Tel est le cas de celle à laquelle la décision attaquée apporte des inconvénients qui pourraient être évités grâce au succès du recours, qu'il s'agisse d'intérêts juridiques ou de simples intérêts de fait (ATA/1019/2018 du 2 octobre 2018 consid. 3a et les références citées).

b. En matière de marchés publics, l'intérêt actuel du soumissionnaire évincé est évident tant que le contrat n'est pas encore conclu entre le pouvoir adjudicateur et l'adjudicataire, car le recours lui permet d'obtenir la correction de la violation commise et la reprise du processus de passation. Mais il y a lieu d'admettre qu'un soumissionnaire évincé a aussi un intérêt actuel au recours lorsque le contrat est déjà conclu avec l'adjudicataire, voire exécuté, car il doit pouvoir obtenir une constatation d'illicéité de la décision pour pouvoir agir en dommages-intérêts (art. 18 al. 2 AIMP ; art. 3 al. 3 L-AIMP ; ATF 137 II 313 consid. 1.2.2; ATA/516/2018 du 29 mai 2018 consid. 2b). Il dispose d'un intérêt juridique lorsqu'il avait, avant la conclusion du contrat des chances raisonnables de se voir attribuer le marché en cas d'admission de son recours (ATF 141 II 14 consid. 4.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_203/2014 du 9 mai 2015 consid. 2.1). Cet intérêt existe notamment lorsque le soumissionnaire évincé avait été classé au deuxième rang derrière l'adjudicataire et qu'il aurait, en cas d'admission de son recours, disposé d'une réelle chance d'obtenir le marché (ATF 141 II 14
consid. 4.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2D_39/2014 du 26 juillet 2014 consid. 1.1 et 2C_346/2013 du 20 janvier 2014 consid. 1.4.1).

c. En espèce, la recevabilité du recours, interjeté dans le délai légal, de la recourante, arrivée au second rang, est acquise. En effet, en tant que soumissionnaire évincé, et bien que le contrat ait déjà été conclu, elle conserve un intérêt actuel à recourir contre la décision d'adjudication au sens de l'art. 60 let. b LPA. Son recours étant à même d'ouvrir son droit à une indemnisation (ATF 125 II 86 consid. 5b) ce à quoi elle a d'ailleurs conclu elle dispose de la qualité pour recourir. Ainsi, le recours est recevable de ce point de vue également.

3) La recourante sollicite la production par la ville de tout document démontrant que les trappes d'accès, objet du poste 861.027 de la soumission, sont homologuées en Suisse et répondent aux exigences de la norme de protection incendie « EI 90 ».

a. Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) comprend notamment le droit pour l'intéressé de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, d'avoir accès au dossier, de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 135 I 279 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_585/2014 du 13 février 2015 consid. 4.1). Le droit de faire administrer des preuves découlant du droit d'être entendu n'empêche pas l'autorité de mettre un terme à l'instruction, lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa conviction et que, procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude que ces dernières ne pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF 140 I 285
consid. 6.3.1 ; 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 134 I 140 consid. 5.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_635/2016 du 3 août 2017 consid. 4.2).

b. En l'espèce, l'apport des pièces relatives à l'homologation des trappes proposées par l'adjudicataire et faisant l'objet du poste 861.027 de la soumission vise à vérifier, aux dires de la recourante, si ces dernières répondent aux exigences de la norme « EI 90 » de l'AEAI. Or, le pouvoir adjudicateur a apporté un certain nombre d'explications relatives à l'homologation desdites trappes qui seront rappelées ci-après de sorte que l'apport des pièces sollicitées n'est pas nécessaire. Le dossier comprenant les éléments nécessaires pour statuer, il ne sera pas donné suite à la demande de la recourante.

4) L'AIMP a pour objectif l'ouverture des marchés publics, notamment des communes (art. 1 al. 1 AIMP). Il vise à harmoniser les règles de passation des marchés et à transposer les obligations découlant de l'accord GATT/OMC ainsi que de l'accord entre la communauté européenne et la Confédération suisse (art. 1 al. 2 AIMP). Il poursuit plusieurs objectifs, soit assurer une concurrence efficace entre les soumissionnaires (art. 1 al. 3 let. a AIMP), garantir l'égalité de traitement entre ceux-ci et assurer l'impartialité de l'adjudication (art. 1 al. 3 let. b AIMP), assurer la transparence des procédures de passation des marchés (art. 1 al. 3
let. c AIMP) et permettre l'utilisation parcimonieuse des deniers publics (art. 1
al. 3 let. d AIMP). Ces principes doivent être respectés, notamment dans la phase de passation des marchés (art. 11 AIMP, notamment let. a et b AIMP).

5) La jurisprudence reconnaît une grande liberté d'appréciation au pouvoir adjudicateur (ATF 125 II 86 consid. 6), l'appréciation de la chambre administrative ne pouvant donc se substituer à celle de ce dernier, seul l'abus ou l'excès de pouvoir d'appréciation devant être sanctionné (ATF 130 I 241
consid. 6.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2P.111/2003 du 21 janvier 2004
consid. 3.3). En outre, pour que le recours soit fondé, il faut encore que le résultat, considéré dans son ensemble, constitue un usage abusif ou excessif du pouvoir d'appréciation (décision de la Commission fédérale de recours en matière de marchés publics du 29 juin 1998, publiée in JAAC 1999, p. 136, consid. 3a).

6) Dans un premier grief, la recourante reproche au pouvoir adjudicateur de ne pas avoir écarté l'offre anormalement basse offerte par l'adjudicataire. Elle lui fait également grief de ne pas avoir procédé à des vérifications plus poussées sur les raisons de cette offre anormalement basse. Elle critique en particulier le prix annoncé par l'adjudicataire pour le poste 861.027 de la soumission, portant sur la fourniture et la pose de huit « trappes d'accès aux boîtes à ressorts ».

7) a. En présence d'une offre qui serait anormalement basse, l'autorité adjudicatrice a l'obligation, selon l'art. 41 RMP, de demander des renseignements complémentaires au soumissionnaire concerné (arrêt du Tribunal fédéral 2D_44/2009 du 30 novembre 2009 consid. 4 ; ATA/1299/2019 du 13 août 2019 ; ATA/633/2008 du 16 décembre 2008), et cela dans la forme prévue à l'art. 40 al. 2 RMP, soit en principe par écrit, et s'ils sont recueillis au cours d'une audition, en établissant un procès-verbal signé par les personnes présentes. C'est seulement si le soumissionnaire n'a pas justifié les prix d'une telle offre, conformément à
l'art. 41 RMP, que son offre doit être écartée d'office et qu'elle ne participe pas à la phase d'évaluation des offres (art. 42 al. 1 let. e RMP). Une offre particulièrement favorable, le cas échéant même si elle est inférieure au prix de revient, n'est pas impérativement à exclure si les renseignements fournis par le soumissionnaire permettent de conclure qu'il est capable d'exécuter à satisfaction les travaux mis en soumission et qu'il remplit les critères d'aptitude et les conditions légales réglementant l'accès à la procédure (ATF 141 II 353
consid. 8.3.2 ; 130 I 241 consid. 7.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_876/2014 du 4 septembre 2015 consid 8.3.2 ; Etienne POLTIER, Droit des marchés publics, 2014, p. 195 n. 313 ; Peter GALLI/André MOSER/Elisabeth LANG/Marc STEINER, Praxis des öffentlichen Beschaffungsrecht, 2013, p. 517).

Si le prix proposé apparaît trop bas, en particulier parce qu'il s'écarte de plus de 30 % de la moyenne des offres rentrées ou du prix « juste » déterminé à l'avance par le pouvoir adjudicateur, le soumissionnaire doit être formellement interpellé pour s'expliquer et justifier le prix avantageux qu'il offre ; dans l'hypothèse où les renseignements obtenus de sa part ne sont pas convaincants et laissent apparaître un risque d'insolvabilité, leur offre pourra être écartée (Bertrand REICH, le prix, in Aktuelles Vergaberecht 2016 / Marchés publics 2016, n. 61 p. 440). L'élément essentiel pour fonder la décision est la capacité du soumissionnaire à exécuter l'offre dans le respect de l'appel d'offres et des exigences légales, et non pas la couverture de ses frais (ATA/1229/2019 du
13 août 2019 consid. 4 ; arrêt ADM 119/2012 de la Cour administrative du canton du Jura du 21 novembre 2013, cité par DC/BR 2014 p. 204).

b. Dans un arrêt récent du 18 décembre 2018, la chambre administrative a relevé que les offres anormalement basses au sens des art. 41 et 42 al. 1
let. e RMP se comprenaient comme les prix totaux et non comme les postes de prix particuliers à l'intérieur des offres (ATA/1357/2018 consid. 7c).

La chambre de céans a également jugé que le pouvoir adjudicateur n'a pas l'obligation d'exclure une offre si celle-ci s'avère anormalement basse. Il est uniquement tenu de demander des précisions, conformément au droit d'être entendu, lorsqu'il envisage d'exclure une offre. Dans un tel cas, il faut permettre au soumissionnaire visé de s'expliquer et de justifier le prix avantageux qu'il offre (ATA/914/2018 du 11 septembre 2018 consid. 6c).

8) En l'espèce, il n'est pas contesté que l'écart de prix entre l'offre de l'adjudicataire et celle de la recourante est important. Il apparaît effectivement que l'offre de l'adjudicataire est environ 30 % moins chère que celle de la recourante et 60 % moins chère que celle du troisième soumissionnaire. Le pouvoir adjudicateur considère toutefois que cela ne permet pas de retenir l'existence d'une offre anormalement basse, la différence de prix étant justifiée par certaines spécificités de l'adjudicataire.

La question de savoir si le pouvoir adjudicateur devait considérer que l'offre de l'adjudicataire paraissait anormalement basse peut souffrir de rester indécise compte tenu de ce qui suit.

Contrairement à ce que prétend la recourante, le pouvoir adjudicateur ne s'est pas abstenu d'interpeller l'adjudicataire sur la crédibilité de ses prix. Il ressort en effet des explications du pouvoir adjudicateur que trois représentants de Metalisteria ont été auditionnés en date du 19 décembre 2018 par des représentants de la ville et du bureau d'architecte mandaté sur le projet. Le
21 janvier 2019, le bureau d'architecte a également adressé à l'adjudicataire un document dénommé « synthèse clarification de l'offre » comprenant treize questions. À teneur dudit document, dûment complété, l'adjudicataire a notamment confirmé qu'il avait bien compris et pris en compte, au niveau financier, des spécificités liées à l'exécution du marché en Suisse, soit notamment celles liées aux salaires minimaux, aux treizième salaire et aux vacances, qu'il lui faudrait respecter pour tout le travail effectué en Suisse. Il a également confirmé la faisabilité du planning provisionnel, relevant qu'au vu du délai assez court, il était envisageable de prévoir deux équipes en même temps pour accélérer la pose des garde-corps des cages d'escaliers. Il a encore certifié qu'aucune sous-traitance n'était prévue et que les prix seraient maintenus, même en cas d'augmentation des « sections structurelles ». L'adjudicataire a également fourni un certain nombre de renseignements concernant des questions techniques qui lui ont été posées.

Par ailleurs, il ressort de l'offre de Metalisteria et des explications apportées par l'autorité intimée que la différence de prix est justifiée, à tout le moins en grande partie, par certaines spécificités de l'adjudicataire, à savoir la réalisation par celle-ci, dans ses propres ateliers, de toutes les pièces commandées alors que la recourante prévoyait de les commander à une entreprise tierce , la part réduite du travail réalisé à Genève environ 1/3 du temps de travail prévu, les 2/3 restant devant avoir lieu en Espagne et les écarts de salaires importants entre la Suisse et l'Espagne. La recourante ne conteste d'ailleurs pas ces différents éléments.

Après avoir pu consulter l'intégralité de l'offre de l'adjudicataire, et notamment ses listes de prix, la recourante, dans son écriture de réplique, ne fonde son grief relatif à l'existence d'une offre anormalement basse que sur un seul prix, soit celui concernant le poste 861.027 relatif à la fourniture et la pose de huit
« trappes d'accès aux boîtes à ressort », pour lesquelles il était exigé une classe de résistance au feu « EI 90 ». Or, comme susmentionné, une offre anormalement basse au sens des art. 41 et 42 al. 1 let. e RMP s'examine au regard des prix totaux et non des postes de prix particuliers à l'intérieur des offres (ATA/1357/2018 précité consid. 7c). Cela étant, l'écart de prix pour ce poste s'explique comme pour l'offre dans son ensemble par la méthode utilisée respectivement par l'adjudicataire et par la recourante. S'agissant du premier, il a indiqué que les pièces devaient être réalisées par ses propres employés, dans son atelier en Espagne, pays dans lequel la main d'oeuvre est notoirement moins chère, tandis que la seconde prévoyait de se fournir auprès d'un tiers, en Suisse, en prenant une marge sur celles-ci.

Enfin, aucun élément ne laisse à penser que l'adjudicataire ne respectera pas les conventions collectives et autres spécificités du marché du travail suisse. Au contraire, elle s'est expressément engagée à respecter ces points.

Pour le surplus, il est vrai que le document d'appel d'offres mentionnait qu'un facteur de crédibilité pouvait être utilisé pour pondérer la note du critère du prix. Toutefois, le pouvoir adjudicateur a estimé, selon le pouvoir d'appréciation qui était le sien, que le prix de l'adjudicataire était parfaitement crédible, de sorte qu'aucun facteur de réduction lié à la crédibilité n'a été appliqué.

Les griefs de la recourante ne permettent ainsi pas de mettre en cause la réalité des prix proposés par l'adjudicataire.

Au vu de ce qui précède, le pouvoir adjudicateur s'est conformé à la jurisprudence en s'assurant que l'offre de l'adjudicataire n'était pas anormalement basse.

Ce grief est dès lors infondé.

9) La recourante considère par ailleurs qu'au vu du prix annoncé par l'adjudicataire pour le poste 861.027 de la soumission, portant sur la fourniture et la pose de huit « trappes d'accès aux boîtes à ressorts », lesdites trappes ne correspondaient pas au produit attendu par la ville ou ne répondaient pas aux normes « EI 90 » comme requis par l'appel d'offres.

a. Lors de l'examen des offres, l'autorité adjudicatrice examine la conformité des offres au cahier des charges et contrôle leur chiffrage (art. 39 al. 1 RMP).

b. En l'espèce, à teneur du dossier d'appel d'offres, le poste 861.027 concerne huit « trappes d'accès aux boîtes à ressort ; châssis et cuivre en acier galvanisé chanfreiné à froid, zingué à chaud, type Wibatech BV-90 ou similaire », pour lesquels il est exigé une classe de résistance au feu « EI 90 ». À titre préalable, il convient de relever que si le dossier d'appel d'offres faisait effectivement référence à des trappes, de « type Wibatech BV-90 », rien n'obligeait les soumissionnaires à proposer des éléments de cette marque, la possibilité leur étant laissée de prévoir des trappes de type « similaire ». La ville a par ailleurs précisé dans ses observations du 20 juin 2019 que l'adjudicataire lui avait confirmé téléphoniquement que les trappes demandées seraient fournies selon les spécificités mentionnées dans le dossier d'appel d'offres, et cela au prix annoncé dans son offre.

S'agissant de l'homologation « EI 90 », il ressort des explications de l'autorité intimée qu'au vu des dimensions spécifiques prévues par l'appel d'offres, il n'était pas possible d'acquérir des trappes faisant déjà l'objet d'une homologation AEAI, cette dernière devant alors être sollicitée auprès des offices compétents, une fois les trappes réalisées. Cet élément est conforté par la lecture du devis de la société Wibatech figurant au dossier, lequel révèle, contrairement à ce que prétend la recourante, que les trappes « EI 90 » faisant l'objet du devis, et par conséquent de son offre, étaient livrées « sans certification AEAI ». Comme le relève l'autorité intimée, l'offre de la recourante prévoit d'ailleurs spécifiquement, s'agissant du poste 861.027, qu'il sera nécessaire de faire certifier le couvercle à la résistance au feu selon AEAI par le service d'urbanisme compétent ou par l'autorité responsable du bâtiment. Dans ces circonstances, la recourante ne saurait exiger la production d'un certificat d'homologation aux exigences de la norme « EI 90 » des trappes de l'adjudicataire, ni tirer aucun argument de l'absence de ce document.

Concernant enfin la différence de prix entre l'offre de l'adjudicataire et de la recourante s'agissant des trappes précitées, elle s'explique par les raisons exposées au considérant précédent.

Compte tenu de ce qui précède, rien ne permet de considérer que les trappes faisant l'objet du poste 861.027 de l'offre de l'adjudicataire ne seraient pas conformes à l'appel d'offres et justifieraient l'exclusion de l'adjudicataire du marché.

Ce grief sera dès lors également écarté.

10) La recourante reproche par ailleurs au pouvoir adjudicateur de ne pas avoir écarté l'offre de l'adjudicataire, au motif qu'elle n'aurait pas remis, dans les délais, l'engagement écrit à respecter l'égalité entre hommes et femmes.

11) a. Aux termes de l'art. 32 al. 1 RMP, ne sont prises en considération que les offres accompagnées, pour le soumissionnaire et ses sous-traitants, des documents suivants : a) attestations justifiant que la couverture du personnel en matière d'assurances sociales est assurée conformément à la législation en vigueur au siège du soumissionnaire et que ce dernier est à jour avec le paiement de ses cotisations ; b) attestation certifiant pour le personnel appelé à travailler sur territoire genevois : 1° soit que le soumissionnaire est lié par la convention collective de travail de sa branche, applicable à Genève, 2° soit qu'il a signé, auprès de l'office cantonal, un engagement à respecter les usages de sa profession en vigueur à Genève, notamment en ce qui concerne la couverture du personnel en matière de retraite, de perte de gain en cas de maladie, d'assurance-accident et d'allocations familiales ; c) attestation de l'autorité fiscale compétente justifiant que le soumissionnaire s'est acquitté de ses obligations en matière d'impôt à la source retenu sur les salaires de son personnel ou qu'il n'a pas de personnel soumis à cet impôt ; d) déclaration du soumissionnaire s'engageant à respecter le principe de l'égalité entre femmes et hommes.

b. En vertu de l'art. 42 al. 1 let. b RMP, l'offre est écartée d'office lorsque le soumissionnaire ne répond pas aux conditions pour être admis à soumissionner ; les offres écartées ne sont pas évaluées ; l'autorité adjudicatrice rend une décision d'exclusion motivée, notifiée par courrier à l'intéressé, avec mention des voies de recours (al. 3).

12) Le droit des marchés publics est formaliste, comme la chambre de céans l'a déjà rappelé à plusieurs reprises et c'est dans le respect de ce formalisme que l'autorité adjudicatrice doit procéder à l'examen de la recevabilité des offres et à leur évaluation (ATA/420/2016 du 24 mai 2016 consid. 5c ; ATA/1216/2015 du 10 novembre 2015 consid. 5b).

L'interdiction du formalisme excessif interdit d'exclure une offre présentant une informalité de peu de gravité. C'est dans ce sens que des erreurs de calcul et d'écriture peuvent être rectifiées (art. 39 al. 2 RMP) et que des explications peuvent être demandées aux soumissionnaires relatives à leurs aptitudes et à leurs offres (art. 40 et 41 RMP). Le principe d'intangibilité des offres remises et le respect du principe d'égalité de traitement entre soumissionnaires impliquent de ne procéder à ce type de questionnement que de manière restrictive, et seulement lorsque l'offre est, au demeurant, conforme aux conditions de l'appel d'offres (Jean-Baptiste ZUFFEREY/Corinne MAILLARD/Nicolas MICHEL, in Droit des marchés publics, 2002, p. 110 ; Olivier RODONDI, La gestion de la procédure de soumission in Droit des marchés publics, 2008, p. 186 n. 63).

Lors de la phase d'examen de la recevabilité des soumissions, l'autorité adjudicatrice doit examiner si les offres présentées remplissent les conditions formelles pour participer à la procédure d'évaluation proprement dite et il est exclu d'autoriser un soumissionnaire à modifier la présentation de son offre, à y apporter des compléments ou à transmettre de nouveaux documents. En outre, en matière d'attestation, l'autorité adjudicatrice peut attendre d'un soumissionnaire qu'il présente les documents requis, rédigés d'une manière qui permette de déterminer, sans recherche complémentaire, interprétation ou extrapolation, si celui-ci remplit les conditions d'aptitude ou d'offre conformes à ce qui est exigé dans le cahier des charges (ATA/1300/2018 du 4 décembre 2018 consid. 3b ; ATA/1216/2015 précité consid. 5c ; ATA/291/2014 du 29 avril 2014 consid. 5, confirmé par arrêt du Tribunal fédéral 2C_418/2014 du 20 août 2014).

13) En l'occurrence, contrairement à ce que soutient la recourante, il ressort du dossier que toutes les attestations requises ont été fournies par l'adjudicataire dans les délais. S'agissant en particulier de l'engagement de l'adjudicataire à respecter l'égalité entre femmes et hommes, il a été signé le 20 novembre 2018 et figure en page 4 de l'offre de ce dernier. Le fait que le pouvoir adjudicateur ait sollicité à nouveau la production de ce document, parmi d'autres, dans la décision d'adjudication adressé à l'adjudicataire en date du 6 février 2019, ne constitue en particulier pas la preuve de la non-remise de cet engagement. Comme exposé par l'autorité intimée, sans qu'aucune critique ne puisse être formulée à cet égard, il est usuel de solliciter à nouveau la remise de différentes attestations, compte tenu de l'écoulement du temps entre la remise des offres et la décision d'adjudication.

Le grief de la recourante est dès lors infondé.

14) La recourante considère que le pouvoir adjudicateur aurait violé le principe de transparence en s'abstenant de communiquer dans les documents d'appel d'offres l'existence de ses deux sous-critères relatifs au critère des références.

a. Le principe de la transparence garanti par les art. 1 al. 3 let. c AIMP et
24 RMP exige du pouvoir adjudicateur qu'il énumère par avance et dans l'ordre d'importance tous les critères d'adjudication qui seront pris en considération lors de l'évaluation des soumissions, en spécifiant clairement l'importance relative qu'il entend accorder à chacun d'eux. Ceux-ci doivent être objectifs, vérifiables et pertinents par rapport au marché. Le principe de la transparence interdit de modifier de manière essentielle, après le dépôt des offres, la présentation des critères. Il n'exige toutefois pas, en principe, la communication préalable d'éléments d'appréciation ou de catégories, tels des sous-critères, qui tendent uniquement à concrétiser le critère publié, à moins que ceux-ci ne sortent de ce qui est communément observé pour définir le critère principal auquel ils se rapportent ou que l'adjudicateur ne leur accorde une importance prépondérante et leur confère un rôle équivalent à celui d'un critère publié. De la même manière, une simple grille d'évaluation ou d'autres aides destinées à noter les différents critères et éléments d'appréciation utilisés (telles une échelle de notes, une matrice de calcul, etc.) ne doivent pas nécessairement être portées par avance à la connaissance des soumissionnaires, sous réserve d'abus ou d'excès du pouvoir d'appréciation (ATF 130 I 241 consid. 5.1 ; ATA/492/2018 du 22 mai 2018 consid. 10d ; ATA/695/2015 du 30 juin 2015 consid. 4c ; ATA/368/2015 du
21 avril 2015 consid. 4c).

b. Dans un récent arrêt (2D_31/2018 du 1er février 2019 consid. 5.2), le Tribunal fédéral a rappelé que le principe de la transparence commande que l'appel d'offres mentionne les critères d'aptitude et d'adjudication. Ces critères ne peuvent en principe être modifiés par la suite. Les critères d'adjudication doivent être indiqués selon leur pondération en pourcent ou au moins dans leur ordre d'importance. L'indication des sous-critères n'est en revanche pas requise d'un point de vue constitutionnel, pour autant qu'ils ne fassent que concrétiser les critères principaux (ATF 143 II 553 consid. 7.7), en étant inhérents à ceux-ci. Ainsi, le principe de transparence n'exige pas, en principe, la communication préalable de sous-critères ou de catégories qui tendent uniquement à concrétiser le critère publié, à moins que ceux-ci ne sortent de ce qui est communément observé pour définir le critère principal auquel ils se rapportent ou que l'adjudicateur ne leur accorde une importance prépondérante et leur confère un rôle équivalent à celui d'un critère publié. De la même manière, une simple grille d'évaluation ou d'autres aides destinées à noter les différents critères et sous-critères utilisés (telles une échelle de notes, une matrice de calcul, etc.) ne doivent pas nécessairement être portées par avance à la connaissance des soumissionnaires, sous réserve d'abus ou d'excès du pouvoir d'appréciation. Savoir si l'on se trouve en présence d'un sous-critère dont la publication est nécessaire dépend d'une appréciation de l'ensemble des circonstances du cas, soit notamment des documents d'appel d'offres, du cahier des charges et des conditions du marché (ATF 130 I 241 consid. 5.1 ; ATA/995/2019 du 11 juin 2019 consid. 9 et les références citées).

La chambre de céans, dans un arrêt du 20 mai 2014, a également relevé que l'autorité intimée qui, pour permettre une appréciation des critères d'adjudication de l'appel d'offres, avait scindé lesdits critères en divers sous-critères auxquels elle avait attribué une pondération spécifique en fonction de la complexité des techniques, lui permettant alors une notation objective et une concrétisation des critères déjà annoncés, avait procédé à un mode d'évaluation autorisé par la jurisprudence (ATA/360/2014 consid. 7).

15) En l'espèce, le document d'appel d'offres prévoyait, s'agissant du critère des références, pondéré à 25 %, que les références indiquées seraient vérifiées par téléphone. La note donnée se baserait à la fois sur les documents fournis, notamment la documentation graphique des ouvrages dont les détails devront avoir une complexité similaire à celle demandée en soumission, et sur les informations téléphoniques reçues (p. 12). Les soumissionnaires devaient en particulier donner des précisions relatives au maître d'ouvrage, à l'année, au lieu, au coût des travaux du lot et au coût total des opérations, ainsi qu'une brève description des travaux effectués (p. 13-14).

Il ressort effectivement du dossier que l'autorité intimée a tenu compte, lors de l'évaluation du critère des références, de deux sous-critère, dénommés tantôt « référence » (sous-critère A) et « qualité des références » (sous-critère B) dans le tableau d'évaluation des offres, tantôt « adéquation des références » « (sous-critère A) et « qualité des références » (sous-critère B) dans le tableau d'analyse comparative du critère des références. Le poids respectif de ces sous-critères était de 20 % pour le premier et 5 % pour le second. Or, rien ne permet de considérer que le pouvoir adjudicateur aurait violé le principe de la transparence en introduisant ces deux sous-critères d'évaluation des références. En effet, ce faisant, l'adjudicateur n'a pas introduit de critères étrangers à celui de l'évaluation des références mais a concrétisé cette évaluation au moyen de sous-critères en adéquation avec les références requises. Par ailleurs, la portée de sous-critères doit être fortement relativisée puisqu'il apparaît, au vu du dossier, que les mêmes éléments ont été examinés dans les deux sous-critères. Ainsi, à teneur de la fiche d'évaluation tant de la recourante que de l'adjudicataire, l'adéquation des références au marché a en réalité été examinée dans les deux sous-critères. Enfin, comme susmentionné, le fait pour un pouvoir adjudicateur de prévoir des
sous-critères permettant une concrétisation des critères déjà énoncés en leur donnant une pondération spécifique relève d'un mode d'évaluation autorisé.

Ainsi, les sous-critères A et B du critère des références se limitent à concrétiser le critère principal et sont inhérents à celui-ci, ce que la recourante ne conteste d'ailleurs pas. Compte tenu de la jurisprudence précitée, la communication préalable de ces sous-critères n'étaient pas obligatoire.

Ce grief sera dès lors écarté.

16) Les considérants qui précédent conduisent au rejet du recours. La décision d'adjudication étant conforme au droit, le contrat d'exécution y relatif est également conforme au droit. Dans ces circonstances, la demande d'indemnisation de la recourante sera également rejetée.

17) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 2'500.- sera mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA). Il ne sera alloué d'indemnité de procédure ni à l'autorité intimée, qui agit par son propre service juridique (art. 87 al. 2 LPA ; ATA/492/2018 précité consid. 18), ni à Metalisteria qui n'y a pas conclu et n'a pas allégué avoir supporté de frais pour sa défense.

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 18 février 2019 par Arteferro Suisse SA contre la décision de la Ville de Genève du 6 février 2019 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de Arteferro Suisse SA un émolument de CHF 2'500.- ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 et ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du
17 juin 2005 (LTF-RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public :

si la valeur estimée du mandat à attribuer n'est pas inférieure aux seuils déterminants de la loi fédérale du 16 décembre 1994 sur les marchés publics ou de l'accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse et la Communauté européenne sur certains aspects relatifs aux marchés publics ;

s'il soulève une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les
art. 113 et suivants LTF ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'article 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Bénédict Fontanet, avocat de la recourante, à atelierd21, mandataire de General de metalisteria maquetas y diseños SL, à la Ville de Genève ainsi qu'à la commission de la concurrence (COMCO).

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, M. Thélin, Mme Krauskopf,
MM. Pagan et Verniory, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

K. De Lucia

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

Genève, le la greffière :