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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2335/2017

ATA/1319/2019 du 03.09.2019 sur JTAPI/1350/2017 ( PE ) , REJETE

Recours TF déposé le 16.10.2019, rendu le 18.10.2019, IRRECEVABLE, 2C_877/2019
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2335/2017-PE ATA/1319/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 3 septembre 2019

1ère section

 

dans la cause

 

Madame A______
Monsieur B______

représentés par Me Samir Djaziri, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 19 décembre 2017 (JTAPI/1350/2017)


EN FAIT

1) Madame A______, née le ______ 1958, est de nationalité mauricienne.

2) De son union à Maurice, le ______ 1994, avec Monsieur C______ sont nés :

-          Monsieur D______, actuellement âgé de 29 ans ;

-          Madame E______, actuellement âgée de 26 ans ;

-          Madame F______, actuellement âgée de 22 ans ;

-          Madame G______ (aussi nommée G______), actuellement âgée de 20 ans et

-          B______, né le ______ 2001,

tous de nationalité mauricienne et nés à Maurice.

3) Le divorce du couple a été prononcé en novembre 2007.

4) Arrivée en Suisse le 12 décembre 2008 au bénéfice d'une autorisation temporaire de séjour en vue de son mariage avec Monsieur H______, ressortissant suisse, elle a épousé ce dernier le ______ 2009 à Berne.

5) Suite à cette union, Mme A______ a été mise au bénéfice d'une autorisation de séjour avec activité lucrative au titre de regroupement familial, laquelle a été régulièrement renouvelée jusqu'au 19 février 2012.

6) Par décision du 20 juin 2012, l'office de la population et des migrations du canton de Berne a refusé de prolonger l'autorisation de séjour de Mme A______ et lui a imparti un délai au 31 août 2012 pour quitter la Suisse, motif pris du fait qu'elle vivait séparée de son époux depuis le 4 février 2011 et qu'aucune reprise de la vie commune n'était envisageable.

7) Par requête du 30 septembre 2014, Monsieur I______, citoyen suisse, a sollicité auprès de l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) la délivrance d'une autorisation de séjour en faveur de Mme A______, qu'il hébergeait chez lui depuis juillet 2012 et souhaitait épouser.

Était joint à cette demande un courrier de Mme A______ daté du 30 septembre 2014, dans lequel elle indiquait notamment que, n'ayant pas eu les moyens de retourner dans son pays suite à la décision de renvoi prononcée à son encontre, elle était allée vivre chez M. I_____.

8) Après qu'elle ait été autorisée par l'OCPM, le 18 novembre 2014, à séjourner sur le territoire suisse durant la procédure préparatoire de son mariage, Mme A______ a épousé M. I______ à Genève le ______ 2014, devenant Mme I______.

9) Suite à son mariage, elle s'est vu délivrer, le 13 février 2015, une autorisation de séjour au titre de regroupement familial avec son époux, valable à compter du 17 décembre 2014.

10) À teneur du formulaire de demande de renouvellement de son permis de séjour du 4 novembre 2015, elle était employée par le Docteur J______ en qualité de secrétaire à hauteur de dix heures hebdomadaires pour un salaire mensuel brut de CHF 1'500.-.

11) Le 3 octobre 2016, elle a requis la délivrance d'une autorisation de séjour sans activité lucrative au titre de regroupement familial en faveur de son fils, B______, dont l'arrivée en Suisse était prévue le 7 novembre 2016. Elle souhaitait qu'il puisse étudier à l'Université de Genève (ci-après : UNIGE), comme son frère et sa soeur. Dès lors qu'il venait passer des vacances en Suisse en novembre, elle espérait qu'il pourrait rester, ce d'autant qu'il n'y avait pas d'ambassade suisse à Maurice.

Plusieurs pièces étaient jointes à cette requête, notamment une déclaration écrite du 10 juillet 2016 adressée à l'OCPM par le biais de laquelle M. L______ acceptait que son fils B______ reste auprès de sa mère. Un regroupement familial serait bénéfique pour cet enfant, compte tenu de son développement psychomoteur, affectif et social.

12) Le 8 novembre 2016, B______ est arrivé en Suisse et s'est installé chez Mme et M. I______.

13) Faisant suite à cette requête, l'OCPM a indiqué à Mme I______, par courrier du 12 décembre 2016, que son fils devait déposer une demande d'autorisation d'entrée en s'adressant à la représentation diplomatique suisse dont dépendait son lieu de résidence et a requis plusieurs renseignements complémentaires s'agissant de sa situation et celle de son fils.

14) En réponse à cette requête, Mme I______ a indiqué à l'OCPM, par courrier du 21 décembre 2016, n'avoir pas effectué plus tôt la demande de regroupement familial tant qu'elle n'était pas encore mariée. Comme deux de ses enfants étudiaient déjà en Suisse, elle souhaitait que B______ ait la même possibilité et qu'il puisse vivre avec elle. Ce dernier, avec lequel elle parlait tous les jours depuis qu'elle vivait en Suisse, était déjà venu dans ce pays à quatre reprises pour y passer des vacances. Elle ne possédait aucun document officiel relatif au droit de garde ou à l'autorité parentale de B______, mais avait un accord à ce propos avec M. C______. Le père et deux des soeurs de B______ vivaient à Maurice, alors que l'un de ses frères et l'une de ses soeurs séjournaient à Genève. Son salaire et la rente d'assurance invalidité (ci-après : AI) de son époux leur permettaient de prendre son fils en charge.

Divers documents étaient joints à ce courrier, notamment :

-          le certificat de naissance de B______, des documents en lien avec le parcours scolaire de ce dernier à Maurice ainsi que des certificats d'examen de langue française ;

-          deux avis de crédit en faveur de M. I______, du 5 décembre 2016 pour une rente AVS de CHF 1'880.- et du 27 septembre 2016 pour une rente AI trimestrielle de CHF 3'739.50 ainsi qu'un avis de crédit en faveur de Mme I______ d'un montant de CHF 2'109.- du Dr J______.

15) Par courrier du 18 janvier 2017 à l'OCPM, Mme I______, se référant à une conversation téléphonique du même jour avec cet office, a précisé que, dès lors qu'elle n'avait jamais été informée de l'existence d'un délai pour déposer une demande de regroupement familial, le non-respect d'un tel délai ne pouvait lui être reproché. Suite à la décision de renvoi prononcée à son encontre, elle avait vécu clandestinement durant trois ans en Suisse avec son époux actuel. Tous deux avaient décidé, après une année de mariage, de faire venir B______ en Suisse et, en l'absence de représentation suisse à Maurice et comme conseillé oralement par l'OCPM, ils avaient effectué les démarches depuis la Suisse en octobre 2016.

16) Par déclaration écrite devant la Cour suprême de Maurice du 20 janvier 2017, rédigée en anglais et portant une apostille de la Convention de la Haye, M. C______ a indiqué que, suite à son divorce d'avec Mme I______ le 30 novembre 2007, il s'était vu octroyer la garde de ses enfants alors mineurs, dont notamment B______. Ses deux enfants aînés étaient partis étudier et vivre en Suisse. B______ séjournait avec sa mère en Suisse depuis octobre 2016 et souhaitait rester auprès d'elle, ce à quoi il n'avait pas d'objection.

17) Par courriel du 8 mars 2017, Mme I______ a indiqué à l'OCPM avoir attendu que son mariage soit célébré, puis que la santé de son époux s'améliore pour déposer une demande de regroupement familial.

18) Par correspondance du 9 mars 2017, l'OCPM a informé Mme I______ de son intention de refuser la requête déposée en faveur de B______ et lui a imparti un délai pour faire usage de son droit d'être entendue.

Cette requête avait été déposée plus de huit ans après la délivrance de sa première autorisation de séjour en 2008 et plus de trois ans après que son fils ait fêté ses 12 ans, de sorte que les délais légaux n'avaient pas été respectés. Aucune raison familiale majeure au sens de la loi n'avait été alléguée, dès lors que la prise en charge de B______ pouvait être assurée dans son pays, dans lequel ce dernier avait toutes ses attaches. Les moyens financiers présentés n'étaient pas suffisants pour garantir l'entretien de son fils, son époux s'étant porté garant des frais de séjour de son fils D______ et son propre revenu n'étant pas suffisant pour assurer son entretien et celui de B______. Enfin, l'acte de naissance de ce dernier n'était pas muni de l'apostille de la Convention de la Haye.

19) Faisant usage de son droit d'être entendue, Mme I______ a indiqué à l'OCPM, par courrier du 11 mars 2017, qu'elle avait été dans l'impossibilité de requérir le regroupement familial en faveur de B______ suite à sa première union en Suisse, dès lors qu'elle avait été trompée et battue quelques mois à peine après ce mariage, qui s'était soldé par un divorce. Suite à son second mariage, son époux était tombé « gravement malade (cancer de la gorge et cardiaque) », avait été sous traitement durant un an « (chimio et radio) » avec un pronostic vital de six mois, de sorte qu'aucune demande de regroupement familial n'avait pu être déposée. S'agissant de leur capacité financière, ses deux aînés avaient « quitté le nid familial depuis longtemps » et tant elle-même que son époux n'émargeaient pas à l'aide sociale, étant précisé qu'elle ne pouvait travailler à plus de 30 %, devant s'occuper de son époux. Le père biologique de B______ ne s'opposait pas à ce qu'il vive en Suisse avec elle, dès lors qu'il n'avait plus les moyens de l'entretenir, ayant trois autres enfants à charge et ne s'entendant plus bien avec son fils. L'acte de naissance de B______ portait désormais une apostille comme demandé. Le dépôt de la requête litigieuse depuis l'étranger aurait eu pour conséquence que le précité aurait dû se rendre en Afrique du Sud, étant précisé qu'ils avaient procédé conformément aux conseils de l'OCPM.

20) Par courriel du 16 mars 2017, M. C______, a indiqué à l'OCPM qu'un refus du regroupement familial le mettrait dans une situation difficile. Il avait dû prendre à sa charge leurs cinq enfants en attendant que Mme I______ puisse déposer une demande de regroupement familial, ses difficultés conjugales de l'époque ne le lui permettant pas. Son « maigre salaire » ne lui suffisait toutefois plus pour subvenir aux besoins de sa famille et il avait dû contracter des emprunts pour financer les études de son fils aîné D______ à Genève. Il était aujourd'hui dans l'incapacité de prendre soin de B______, au vu de la détérioration de sa situation financière, des conflits permanents avec ce dernier et du fait que deux de leurs filles étaient toujours à sa charge.

Était joint un extrait de compte bancaire à son nom pour les mois de janvier à mars 2017 mentionnant un salaire ainsi qu'un remboursement de prêt.

21) Par décision du 25 avril 2017, l'OCPM a refusé la demande de regroupement familial déposée par Mme I______ en faveur de B______ et a imparti à ce dernier un délai au 30 juin 2017 pour quitter la Suisse.

Reprenant les motifs invoqués dans son courrier d'intention du 9 mars 2017, l'OCPM a précisé que, même en retenant la date du 13 février 2015, la demande de regroupement familial était hors délai de plus de sept mois. Même s'il ressortait des pièces versées au dossier que M. C______ n'avait plus les moyens financiers de garantir l'entretien de B______ et que leurs relations étaient conflictuelles, aucune preuve ne démontrait un changement important, tel qu'une modification des possibilités de prise en charge éducative. Elle n'avait pas respecté les procédures en déposant sa demande de regroupement familial depuis Genève et en ne produisant ni l'acte de naissance de son fils muni de l'apostille de la Convention de la Haye ni jugement confirmant qu'elle détenait la garde et l'autorité parentale sur son fils. Enfin, sous l'angle de l'art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101), elle n'avait pas prouvé avoir maintenu des contacts réguliers avec B______ depuis son arrivée en Suisse. Elle pourrait en tout état maintenir les contacts entretenus jusqu'à présent par le biais de visites et soutenir financièrement son fils en lui envoyant de l'argent.

22) Se référant à cette décision, Mme I______ a rappelé à l'OCPM, par courriel du 3 mai 2017, que le délai pour déposer la demande de regroupement familial n'avait pu être respecté en raison du cancer de son époux. Un collaborateur de l'OCPM lui avait expliqué oralement qu'en l'absence d'ambassade suisse à Maurice, la demande devait être déposée à Genève une fois que son fils s'y trouverait. Des pièces justificatives avaient été produites par le père de B______ pour démontrer qu'il ne pouvait plus subvenir à l'entretien de son fils, en raison du prêt contracté pour financer les études de leur fils aîné. Un « affidavit signé de l'Ile Maurice » portant l'apostille de la Convention de la Haye rédigé en anglais avait été produit.

23) Par courrier du 5 mai 2017, M. D______ a requis de l'OCPM la reconsidération de la décision de refus prononcée le 25 avril 2017 à l'encontre de son frère. Confirmant les précédentes déclarations de ses parents, il a précisé qu'il ne dépendait plus financièrement de M. I______ et ne vivait plus chez ce dernier. B______, qui aidait Mme et M. I______ dans leurs activités quotidiennes, avait souvent exprimé son souhait de venir vivre en Suisse et avait eu l'occasion de se familiariser avec la culture helvétique.

24) Par pli du 5 mai 2017, B______ a indiqué à l'OCPM qu'il souhaitait rester en Suisse principalement afin de passer davantage de temps avec sa mère, qu'il n'avait pas souvent vue malgré ses nombreux appels et visites en Suisse, et avec sa soeur, Mme E______, qui avait tenu auprès de lui le rôle de mère en l'absence de la sienne. Un renvoi à Maurice aurait ainsi pour conséquence de le priver de ses deux mères, ce d'autant que sa relation avec son père se détériorait d'année en année. Il possédait des attaches en Suisse, où vivaient son frère, sa soeur, sa mère, son beau-père, sa belle-soeur et sa grand-mère, alors que seuls son père et ses deux soeurs, pour lesquels il se sentait « comme un boulet », séjournaient à Maurice. Il s'épanouirait davantage en Suisse qu'à Maurice, où son père n'avait les moyens ni de le nourrir, ni de lui payer des études.

25) Par acte du 24 mai 2017, Mme I______ a interjeté recours devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le TAPI), en son nom personnel et en qualité de représentante de son enfant mineur, B______, contre la décision prononcée par l'OCPM le 25 avril 2017, concluant à son annulation et à l'acceptation de sa requête de regroupement familial, sous suite de frais et dépens. Sa comparution personnelle et celle de B______ étaient requises, ainsi que l'audition en qualité de témoins de M. I______, M. D______ et Mme G____

L'autorité intimée ne contestait pas, à juste titre, que les conditions du ménage commun, du logement approprié et de l'indépendance financière étaient remplies. En effet, Mme I______ envisageait d'augmenter son taux de travail à 50 %, de sorte que son salaire, additionné aux rentes de son époux, leur permettraient d'assumer l'entretien de B______, comme ils le faisaient d'ailleurs depuis plusieurs années, étant précisé qu'elle possédait l'autorité parentale et le droit de garde sur ce dernier. Celui-ci, qui avait sa propre chambre chez eux, était logé dans d'excellentes conditions. Il s'était parfaitement adapté à sa vie à Genève, où il disposait d'un cercle d'amis proches, et M. I______ envisageait d'entamer des démarches en vue de l'adopter. Il parlait parfaitement le français et l'anglais, apprenait l'allemand sur internet et ambitionnait d'étudier à l'UNIGE. M. D______, en Suisse depuis 2015 et titulaire d'une autorisation de séjour, suivait les cours de 2ème année de master à l'UNIGE après avoir obtenu un master en épidémiologie de l'Université de Bâle. Mme E______, étudiante en master en sciences de l'informatique à l'UNIGE allait prochainement épouser un ressortissant suisse qui entretenait de très bonnes relations avec B______.

Dix-huit pièces étaient jointes à ce recours.

26) Dans ses observations du 12 juillet 2017, l'OCPM a proposé le rejet du recours.

Le conflit avec le père de B______ et la survenance d'un changement important des circonstances n'avaient pas été établis et les éléments au dossier ne permettaient pas de retenir l'absence d'alternative au séjour en Suisse pour B______ ni que ce choix de vie avait été opéré dans son intérêt. La question du maintien des relations avec sa mère et du temps passé avec cette dernière depuis sa venue en Suisse n'avait pas été abordée.

27) Par réplique du 18 août 2017, Mme I______ a persisté dans ses conclusions.

Il ressortait de l'attestation établie le 18 juillet 2017 par M. C______ qu'il entretenait une relation extrêmement conflictuelle avec B______, assortie de violence verbale rendant tout dialogue impossible et provoquant le voyage du précité en Suisse. La situation financière extrêmement difficile de M. C______ avait pour conséquence qu'il ne pouvait assumer les besoins vitaux de son fils, dont il ne souhaitait plus s'occuper et qui n'avait aucun autre lieu de vie à Maurice. De plus, l'époux de Mme E______, Monsieur K______, était disposé à prendre financièrement en charge B______. Enfin, ce dernier avait séjourné à plusieurs reprises à Genève, notamment du 21 novembre 2012 au 11 janvier 2013, du 13 novembre 2013 au 10 janvier 2014 et du 30 novembre 2015 au 10 janvier 2016.

Étaient jointes à cette réplique six pièces, notamment :

- une attestation établie le 18 juillet 2017 par M. C______ confirmant les déclarations de Mme I______ et précisant qu'il n'avait plus les moyens financiers ni la volonté de s'occuper de B______ ;

- une déclaration écrite du 26 juillet 2017 de M. K______, selon laquelle il acceptait de subvenir aux besoins de B______ ;

- des extraits du passeport mauricien de B______ faisant notamment état de séjours à Genève du 21 novembre 2012 au 11 janvier 2013 et du 13 novembre 2013 au 10 janvier 2014 puis d'un séjour à Maurice du 12 avril au 1er mai 2017 ;

- un visa à entrées multiples valable du 10 avril au 3 mai 2017 délivré le 10 avril 2017 en faveur de B______ pour raisons familiales.

28) Dans sa duplique, l'OCPM a persisté dans ses conclusions.

29) Par jugement du 19 décembre 2017, le TAPI a rejeté le recours.

Mme I______ s'est vu délivrer une autorisation de séjour en Suisse le 13 février 2015. Son fils cadet, né le 8 avril 2001, avait à cette date plus de 12 ans, de sorte que la demande de regroupement familial le concernant aurait dû être déposée au plus tard le 13 février 2016. Partant, en déposant cette requête le 3 octobre 2016, elle n'a pas respecté le délai légal, ce qu'elle ne contestait pas.

S'agissant de l'allégation de cette dernière, selon laquelle elle n'avait déposé cette demande qu'à l'arrivée de son fils en Suisse, sur conseil - oral - de l'autorité intimée, fait non prouvé au demeurant, le TAPI constatait que les conditions posées par la jurisprudence pour invoquer le principe de la bonne foi n'étaient pas remplies, aucune promesse concrète n'ayant été faite à l'intéressée par l'OCPM. Ainsi, cette allégation ne pouvait valablement justifier le dépôt d'une demande de regroupement familial en-dehors du délai légal.

Il en allait de même de l'explication selon laquelle son fils n'avait pu déposer sa demande depuis Maurice, en l'absence de représentation diplomatique suisse, et aurait dû se rendre en Afrique du Sud pour ce faire. Le site internet du Département fédéral des affaires étrangères (ci-après : DFAE) indiquait l'existence d'un consulat général de Suisse à Port-Louis, situé aux Quatre Bornes, à Maurice. Il appartenait aux personnes souhaitant bénéficier d'un regroupement familial en Suisse de prendre les dispositions nécessaires pour respecter les procédures réglementées par le droit suisse, dussent-elles pour ce faire se rendre dans un pays proche de leur lieu de résidence.

S'agissant de la maladie de son époux, même en admettant qu'un empêchement d'agir à temps ait joué un rôle dans le dépassement du délai de douze mois, il n'y avait pas à teneur de la loi et de la jurisprudence de possibilité de tenir compte d'un cas de force majeure, le législateur n'ayant manifestement pas voulu ouvrir une telle brèche dans le système des délais.

La requête était tardive.

Les déclarations de l'intéressée et des membres de la famille C______ quant à l'existence de conflits père-fils et de l'impossibilité pour le premier d'assurer la subsistance du second, devaient être relativisées, à la lumière des premiers éléments versés au dossier. Ce n'était qu'après que Mme I______ ait été informée par l'OCPM, en janvier 2017, de l'existence d'un délai légal pour déposer une demande de regroupement familial, qu'il avait été allégué que B______ ne pouvait désormais plus être pris en charge par son père à Maurice en raison de difficultés financières et de conflits relationnels. Ainsi, la déclaration écrite de M. C______ du 10 juillet 2016 indiquait qu'un regroupement familial serait bénéfique au développement psychomoteur, affectif et social de son fils, sans toutefois faire état de conflits entre eux ou d'incapacité financière à assumer sa prise en charge. De même, Mme I______ avait précisé à l'OCPM, par courrier du 21 décembre 2016, que les raisons justifiant un regroupement familial étaient qu'elle souhaitait que B______ ait la possibilité d'étudier en Suisse comme son frère et sa soeur et qu'il vive auprès d'elle, sans mentionner de difficultés de prise en charge du précité par son père. L'éventuelle existence actuelle de conflits entre B______ et son père, lesquels avaient cohabité durant quinze ans, ne remplissait nullement les conditions de reconnaissance de l'existence de raisons familiales majeures.

Il en allait de même du fait que M. C______ n'aurait plus la capacité financière d'assumer l'entretien de son fils. Le fait que ce dernier ait choisi de contracter d'importants emprunts, qu'il remboursait actuellement, pour financer les études de son fils aîné, âgé aujourd'hui de près de 30 ans et qui était dans l'attente d'un second master universitaire, avec pour conséquence qu'il ne pouvait plus assumer les frais de B______, ne saurait être considéré comme une raison personnelle majeure, ce d'autant au vu du devoir légal d'éducation et d'assistance des parents envers leur enfant mineur. Il était également relevé que Mme I______ avait indiqué, dans son recours, qu'elle assumait l'entretien de B______ depuis plusieurs années, de sorte qu'il apparaissait qu'elle participait à l'entretien de son fils au côté du père de ce dernier, même si cet enfant vivait à Maurice. À cela s'ajoutait qu'au vu de l'écart entre le coût de la vie en Suisse et à Maurice, il était nettement plus facile pour elle d'assumer l'entretien de son fils B______ s'il continuait à vivre dans son pays que s'il vivait auprès d'elle.

Enfin, B______ avait vécu durant quinze ans, soit jusqu'à son arrivée en Suisse en octobre 2016, dans son pays, où il avait été scolarisé et où vivaient son père et deux de ses soeurs. Il s'y était de plus rendu dernièrement encore, du 12 avril au 1er mai 2017, à teneur du visa de retour versé au dossier. Au vu des premières déclarations de sa mère, il apparaissait que cette dernière souhaitait principalement que son fils cadet, dont elle avait vécu séparée durant huit ans et qui atteindrait prochainement la majorité, puisse bénéficier de la même possibilité que ses deux aînés d'étudier en Suisse, ce que ne constituait pas le but du regroupement familial.

Aucune raison familiale majeure au sens de l'art. 47 al. 4 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) ne justifiait le regroupement familial de B______ avec Mme I______.

Les conditions légales posées par la LEI n'étant pas remplies, l'intéressée ne saurait valablement invoquer l'art. 8 CEDH pour fonder un droit au regroupement familial.

30) Le 26 décembre 2017, M. I______ est décédé.

31) Par acte du 19 janvier 2018, Mme I______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement précité. Elle a conclu à son annulation et, cela fait, à l'octroi d'une autorisation de séjour en Suisse du mineur B______. Préalablement, le mineur devait être auditionné. Des conclusions subsidiaires en renvoi de la procédure au TAPI, voire à l'OCPM, étaient formulées.

L'époux de la recourante avait été gravement malade courant 2015. Elle avait été préoccupée par l'état de santé de son époux, raison pour laquelle elle n'avait pas déposé de demande de regroupement familial en faveur de son fils dans le délai légal de douze mois. Il s'agissait toutefois d'un cas de force majeure. En conséquence, le délai avait été respecté.

De surcroît, il existait des raisons familiales majeures nécessitant que le regroupement familial soit autorisé. Le mineur vivait préalablement avec son père à Maurice. Leur relation s'était fortement dégradée au point d'engendrer son départ de l'île pour rejoindre sa mère. Le père avait été violent verbalement avec son enfant, rendant tout dialogue impossible. Par ailleurs, financièrement, il était incapable de prendre en charge les besoins vitaux de son enfant. Il avait enfin exprimé ne pas vouloir s'en occuper. Le mineur ne disposant d'aucun autre lieu de vie à l'île Maurice, il avait été contraint de rejoindre sa mère à Genève. Il entretenait des liens avec la Suisse puisqu'il y avait régulièrement séjourné durant plusieurs semaines depuis de nombreuses années. Il avait gardé des contacts réguliers avec sa mère lorsqu'il vivait à l'île Maurice via Viber et Skype.

32) Dans sa réponse, l'OCPM a relevé que l'autorisation de séjour de Mme I______ était arrivée à échéance le 16 décembre 2017. Sa demande de renouvellement était à examiner sous l'angle de l'art. 50 LEI. Il proposait la suspension de la procédure jusqu'à droit connu sur leur décision de renouvellement dudit permis de séjour, duquel dépendait l'application éventuelle de l'art. 44 LEI en faveur de son fils.

33) Par décision du 28 février 2018, d'entente entre les parties, la procédure a été suspendue.

34) L'OCPM ayant informé la chambre de céans que l'autorisation de séjour de Mme I______ avait été renouvelée, la procédure a été reprise par décision du 4 mars 2019.

35) a. Lors de l'audience du 27 juin 2019, B______ a indiqué qu'il vivait chez sa mère chez qui il avait une chambre. Il venait de finir sa deuxième année au collège De-Saussure et avait eu des bons résultats. La dernière fois qu'il était allé à Maurice, c'était en 2017 avec M. I______, son beau-père. Ils y étaient restés deux semaines et avaient logé à l'hôtel. Il avait vu sa soeur, F______ qui était venue à l'hôtel, tout comme G______. Il n'avait plus vu son père depuis 2016. Il avait des contacts par WhatsApp avec ses soeurs à Maurice environ une fois par mois et peut-être un peu plus avec G______, mais aucun avec son père. Il faisait tout pour l'éviter. Plus il avait grandi, plus la situation s'était tendue. Ses soeurs avaient des contacts avec son père. Son frère D______ faisait un doctorat à Bâle et E______ habitait à Genève. Il la voyait environ toutes les semaines. Depuis son voyage à Maurice, G______ avait obtenu un permis pour études auprès de la Haute école de Lausanne. Elle habitait en Valais avec son copain.

Il était venu en Suisse parce que ça n'allait plus avec son père. Il se faisait toujours insulter et parfois frapper par de « bonnes gifles » qu'il recevait « assez souvent, mais pas tous les jours ». Il n'y avait pas eu un événement précis à l'origine de son départ en Suisse, mais une accumulation d'événements. Son père lui avait demandé de quitter la maison, ce qu'il n'avait pas fait. Il avait téléphoné à sa mère, qui avait alors entrepris des démarches pour qu'il vienne en Suisse. Avec son père, la situation s'était petit à petit aggravée. Il le frappait depuis longtemps, mais cela devenait de plus en plus fréquent. Son père avait fait plusieurs emprunts, y compris pour sa petite amie. Sa situation financière était catastrophique. Il était arrivé au recourant de devoir aller à l'école sans avoir mangé. La petite amie ne vivait pas à la maison s'agissant d'une femme mariée. Son père avait souvent eu des amies qui venaient durant la journée à la maison. À Maurice, il avait aussi ses grands-parents paternels. Ils étaient très âgés (88 et 78 ans) et ne savaient pas utiliser un téléphone. Il les avait vus pour la dernière fois en 2017 à Maurice. Ils n'étaient pas en mesure de s'occuper de lui, n'ayant pas beaucoup d'argent et sa grand-mère devant prochainement aller en maison de retraite.

b. Mme I______ a indiqué que son ancien patron, médecin de 73 ans, lui avait donné son congé en fin d'année dernière. Elle était au chômage. Elle avait envoyé de l'argent environ tous les mois pour l'entretien de B______, son fils lui indiquant qu'il n'avait pas à manger. Cet argent ne profitait pas à son fils et était utilisé par le père. Elle percevait aujourd'hui plus de CHF 4'000.- mensuels de rente de veuve premier et deuxième piliers.

c. B______ a produit copie d'un échange de courriels du 17 mai 2017 entre M. I______ et l'OCPM. Celui-là avait interpellé ladite administration pour connaître la marche à suivre en vue d'adopter le fils de sa conjointe. Il le considérait comme son propre fils. Âgé de 16 ans, l'enfant était d'accord avec cette démarche suite au conflit qui l'opposait à son père à Maurice. Par réponse du 17 mai 2017, l'OCPM avait précisé que l'adoption de l'enfant de son conjoint n'était possible qu'après cinq ans de mariage. La nouvelle loi qui devait entrer en vigueur dès le 1er janvier 2018 autoriserait ce type d'adoption après trois ans de mariage. Il convenait d'attendre cette date, puis de s'adresser à la Cour de justice, seule compétente pour le prononcé d'une adoption et qui pourrait le renseigner sur les démarches à entreprendre.

36) Dans le délai qui lui avait été imparti, B______ a transmis différents extraits du compte bancaire de Mme I______, lesquels faisaient état de versements de quelques nonante cinq mille francs suite au décès de son mari, et d'une fortune sur un compte épargne un an plus tard, en février 2019, de quatre-vingt mille francs. Des documents attestant de la situation de sa soeur E______ et de son époux M. K______ étaient produits. Ce dernier confirmait entretenir d'excellentes relations avec son beau-frère. M. K______ était titulaire d'un permis C, architecte spécialiste pour l'État de Genève, bénéficiait d'un traitement mensuel brut de plus CHF 8'900.- et assurait pouvoir subvenir aux besoins de B______.

37) Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (art. 61 al. 1 LPA). La chambre administrative n'a toutefois pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), à savoir notamment s'il s'agit d'une mesure de contrainte prévue par le droit des étrangers (art. 10 al. 2 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10), hypothèse non réalisée en l'espèce.

Il n'en résulte toutefois pas que l'autorité est libre d'agir comme bon lui semble, puisqu'elle ne peut pas faire abstraction des principes constitutionnels régissant le droit administratif, notamment la légalité, la bonne foi, l'égalité de traitement, la proportionnalité et l'interdiction de l'arbitraire (ATA/113/2018 du 6 février 2018 consid. 2).

3) Le 1er janvier 2019, est entrée en vigueur une modification de la loi fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr - RS 142.20), devenue la LEI. En l'absence de dispositions transitoires, la règle générale prévaut selon laquelle les conséquences juridiques applicables sont celles en vigueur au moment où les faits pertinents se sont produits (ATA/316/2019 du 26 mars 2019 consid. 6 et les références citées).

Les faits de la présente cause s'étant intégralement déroulés avant le 1er janvier 2019, ils sont soumis aux dispositions de la LEI, dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2018, étant précisé que la plupart des dispositions de celle-ci sont demeurées identiques.

4) La LEI et ses ordonnances d'exécution, en particulier l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), règlent l'entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n'est pas réglé par d'autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI).

5) a. Aux termes de l'art. 44 LEI, l'autorité compétente peut octroyer une autorisation de séjour aux enfants célibataires étrangers de moins de 18 ans du titulaire d'une autorisation de séjour s'ils vivent en ménage commun avec lui, disposent d'un logement approprié et ne dépendent pas de l'aide sociale. Cette disposition ne confère pas un droit au regroupement familial (ATF 137 I 284 consid. 1.2).

Le regroupement familial doit être demandé dans les cinq ans. Pour les enfants de plus de 12 ans, le regroupement doit intervenir dans un délai de douze mois (art. 47 al. 1 LEI ; art. 73 al. 1 OASA). Pour les membres de la famille d'étrangers, les délais commencent à courir lors de l'octroi de l'autorisation de séjour ou d'établissement ou lors de l'établissement du lien familial (art. 47 al. 3 let. b LEI ; art. 73 al. 2 OASA). Ces délais visent à permettre une intégration précoce et à offrir une formation scolaire en Suisse aussi complète que possible. Ils ont également pour objectif la régulation de l'afflux d'étrangers. Ces buts étatiques légitimes sont compatibles avec la CEDH ; ATF 142 II 35 consid. 6.1 ; ATA/751/2018 du 18 juillet 2018 et les références citées).

Passé ce délai, le regroupement familial différé n'est autorisé que pour des raisons familiales majeures (art. 47 al. 4 LEI ; art. 73 al. 3 OASA).

b. En l'espèce, la recourante est entrée en Suisse le 12 décembre 2008, suite à son mariage avec un ressortissant suisse, et a été mise au bénéfice d'un permis de séjour dès cette date. À cette date, le recourant était âgé de 7 ans. Le délai pour déposer une demande de regroupement familial en faveur de son fils a ainsi commencé à courir dès le 12 décembre 2008, pour arriver à échéance le 11 décembre 2013. Il était ainsi échu lors du dépôt de sa demande le 3 octobre 2016.

Comme l'a mentionné l'autorité intimée, même à retenir la date du 13 février 2015, soit l'obtention d'un titre de séjour lié à son second mariage, la demande aurait été hors délai. À cette date, le recourant était âgé de plus de 12  ans. Le délai était en conséquence de douze mois et arrivait à échéance le 12 février 2016.

La recourante allègue toutefois n'avoir pas été en mesure de déposer une demande dans le délai au vu de l'état de santé de son époux. Bien qu'il résulte du dossier que son époux est décédé en décembre 2017 et que la gravité de son état en 2015 n'est pas contestée, rien ne l'empêchait de déposer une demande de regroupement familial plus tôt, ce d'autant plus qu'en 2017, son époux lui-même a entrepris des démarches en vue de l'adoption de son beau-fils. Ces éléments ne permettent ainsi pas d'expliquer l'absence de démarches, ce d'autant au regard de la mésentente alléguée entre le père et le fils, de l'envoi régulier d'argent pour soutenir son enfant à l'étranger et des contacts réguliers que mère et fils disent avoir entretenus.

C'est dès lors à juste titre que l'autorité intimée et l'instance précédente ont retenu que la requête de la recourante devait être traitée comme une demande de regroupement familial différé, recevable uniquement en présence de raisons familiales majeures.

6) a. Les raisons familiales majeures au sens des art. 47 al. 4 LEI et 73 OASA peuvent être invoquées, selon l'art. 75 OASA, lorsque le bien de l'enfant ne peut être garanti que par un regroupement familial en Suisse. C'est l'intérêt de l'enfant, non les intérêts économiques (prise d'une activité lucrative en Suisse), qui prime. Selon la jurisprudence, il faut prendre en considération tous les éléments pertinents du cas particulier, ce qui correspond également à l'esprit de l'art. 3 § 1 de la convention du 20 novembre 1989 relative aux droits de l'enfant (CDE - RS 0.107 ; ATF 139 I 315 consid. 2.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1172/2016 du 26 juillet 2017 consid. 4.3.1 et les références citées). Il y a notamment lieu de tenir compte du sens et des buts de l'art. 47 LEI. Il s'agit également d'éviter que des demandes de regroupement familial différé soient déposées peu avant l'âge auquel une activité lucrative peut être exercée lorsque celles-ci permettent principalement une admission au marché du travail facilitée plutôt que la formation d'une véritable communauté familiale. D'une façon générale, il ne doit être fait usage de l'art. 47 al. 4 LEI qu'avec retenue (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1/2017 du 22 mai 2017 consid. 4.1.3 et les références citées). Les raisons familiales majeures doivent toutefois être interprétées d'une manière conforme au droit fondamental au respect de la vie familiale (art. 13 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101 ; art. 8 CEDH ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1172/2016 précité consid. 4.3.1 et les références citées).

b. Il existe une raison majeure lorsque la prise en charge nécessaire de l'enfant dans son pays d'origine n'est plus garantie, à la suite par exemple du décès ou de la maladie de la personne qui s'en occupait. Lorsque le regroupement familial est demandé en raison de changements importants des circonstances à l'étranger, il convient toutefois d'examiner s'il existe des solutions alternatives permettant à l'enfant de rester où il vit. De telles solutions correspondent en effet mieux au bien-être de l'enfant, parce qu'elles permettent d'éviter que celui-ci ne soit arraché à son milieu et à son réseau de relations de confiance. Cette exigence est d'autant plus importante pour les adolescents qui ont toujours vécu dans leur pays d'origine dès lors que plus un enfant est âgé, plus les difficultés d'intégration qui le menacent apparaissent importantes. Il ne serait toutefois pas compatible avec l'art. 8 CEDH de n'admettre le regroupement familial différé qu'en l'absence d'alternative. Simplement, une telle alternative doit être d'autant plus sérieusement envisagée et soigneusement examinée que l'âge de l'enfant est avancé et que la relation avec le parent vivant en Suisse n'est pas (encore) trop étroite (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1172/2016 précité consid. 4.3.2 et les références citées).

Le désir - pour compréhensible qu'il soit - de voir (tous) les membres de la famille réunis en Suisse, souhait qui est à la base de toute demande de regroupement familial et représente même une condition d'un tel regroupement, ne constitue pas en soi une raison familiale majeure. Lorsque la demande de regroupement familial est déposée hors délai et que la famille a vécu séparée volontairement d'autres raisons sont nécessaires (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1025/ 2017 consid. 6.1 et 6.2, et la jurisprudence citée).

7) De jurisprudence constante, en présence de déclarations contradictoires, la préférence doit en principe être accordée à celles que l'intéressée a données en premier lieu, alors qu'elle en ignorait les conséquences juridiques. Les explications données à cet égard par la recourante, selon lesquelles les imprécisions du premier courrier étaient dues à sa rédaction par un tiers, n'emportent pas la conviction au vu des détails, précisions et indications ressortant du courrier daté du 29 juillet 2013 et signé par la recourante (arrêt du Tribunal fédéral 9C_728/2013 du 16 janvier 2014 ; ATA/505/2016 du 14 juin 2016 consid. 4 et les références citées).

8) a. En l'espèce, la demande initiale de regroupement familial du 13 octobre 2016, déposée par la mère du recourant, était fondée sur la nécessité pour son fils de faire des études en Suisse. Elle a renouvelé cette explication dans sa correspondance du 21 décembre 2016.

De même, la première attestation du père du recourant, demeuré à Maurice, mentionnait qu'il était important que l'enfant reste auprès de sa mère. Elle date du 17 juillet 2016. Il a renouvelé cette demande le 20 janvier 2017.

Aucune pièce au dossier ne fait état de contacts réguliers entre la mère et le fils pendant que celui-ci résidait à Maurice. Par ailleurs, ce n'est que le 5 mai 2017, soit après la décision querellée, que, pour la première fois, une mauvaise entente entre le père et l'enfant est évoquée. Elle est renouvelée le 18 juillet 2017.

Certes, il ressort des déclarations du recourant en audience, outre les tensions avec son père, qu'il détaille, que lors de son voyage en 2017 à Maurice il n'aurait pas rendu visite à son père. Il a de même décrit qu'il avait, à cette occasion, logé à l'hôtel. Il a précisé que l'une de ses soeurs, encore à Maurice à l'époque, était venue lui rendre visite à l'hôtel. Toutefois, conformément à la jurisprudence précitée, il convient de retenir les premières déclarations des parents et de considérer que la venue en Suisse du recourant était motivée par des raisons liées aux études et non à la suite de tensions entre le père et son fils.

La requête de regroupement familial ayant pour but d'assurer au recourant de meilleures perspectives de formation et un meilleur avenir professionnel, de tels motifs ne constituent pas des raisons familiales majeures au sens de l'art. 47 al. 4 LEI.

b. Pour le surplus, il n'est pas contesté que le fils de la recourante a passé la majeure partie de sa vie à Maurice. Il y est né et y a vécu jusqu'à l'âge de 14 ans, étant arrivé en Suisse en novembre 2016. Il en parle la langue, connaît les us et coutumes de ce pays, et y a été scolarisé.

Son déplacement dans son pays d'origine en 2017 confirme que le recourant y conserve des intérêts et de la famille. Il a indiqué que l'une de ses soeurs, à qui il avait rendu visite en 2017, vivait aujourd'hui en Suisse. Elle est toutefois au bénéfice d'un permis étudiant, à savoir d'une autorisation de courte durée, à l'issue de laquelle elle devra retourner à Maurice. En l'état, restent dans son pays d'origine, une de ses soeurs, ses grands-parents - quand bien même le recourant décrit un couple de personnes âgées dont l'épouse, la plus jeune, devait prochainement entrer en EMS - ainsi que son père. Le recourant est cependant aujourd'hui majeur. Il n'a plus besoin de l'assistance des proches.

c. Certes, le recourant vit désormais en Suisse où il est scolarisé depuis plus de deux ans. Il a, pendant ce laps de temps, renforcé ses liens avec sa mère, son frère et deux de ses soeurs et s'est familiarisé avec les us et coutumes locaux. Il y a vécu, aux côtés de sa mère, la période de deuil de son beau-père à la suite d'une maladie. Ces éléments, bien que d'une importance certaine pour le développement du jeune adulte, ne sauraient cependant répondre à eux seuls aux raisons familiales impératives exigées pour l'octroi d'un regroupement familial au sens de l'art. 47 al. 4 LEI. En effet, ils sont la conséquence du fait que l'arrivée du recourant a placé les autorités devant le fait accompli et ne sauraient, à ce titre, constituer à eux seuls un élément décisif. De même, le recourant pourrait rencontrer d'éventuelles difficultés dans ses apprentissages et sa formation en cas de retour à Maurice ; il s'agit cependant là de conséquences issues du choix opéré par ses parents de le faire venir en Suisse sans s'assurer qu'il pouvait y séjourner légalement.

Compte tenu du fait que le recourant a passé la majeure partie de sa vie à Maurice avec son père et ses soeurs où il a tissé des attaches sociales et culturelles, un retour en ce pays - après un séjour d'environ trois ans en Suisse - apparaît envisageable. Rien ne s'oppose à ce qu'il puisse continuer à séjourner dans le pays dans lequel il a passé la plus grande partie de sa vie, où vit son père avec qui il a longtemps cohabité, où il a suivi sa scolarité et possède des attaches, notamment familiales et culturelles. Son bien ne semble pas compromis par son retour dans un univers, qui lui est bien plus familier que celui dans lequel il évolue depuis trois ans et qui constitue un véritable déracinement.

Le jeune homme est en bonne santé et pourra valoriser à Maurice les connaissances acquises en Suisse. Par ailleurs, la recourante et son fils pourront continuer à entretenir des relations par des visites touristiques et l'usage de divers moyens de communication, comme ils l'ont fait avant l'arrivée en Suisse de l'intéressé. En outre, la mère perçoit des rentes de veuve ainsi que des indemnités de chômage. Elle possède par ailleurs une épargne de cent mille francs environ. En l'état, elle devrait pouvoir, en tant que de besoin, continuer à contribuer à l'entretien de son fils.

Au vu de l'ensemble des circonstances, l'OCPM était fondé, tout en respectant les art. 8 CEDH et 3 CDE et sans violer le droit fédéral, de conclure à l'absence de raisons familiales majeures au sens de l'art. 47 al. 4 LEI.

9) Le renvoi d'un étranger ne peut être ordonné que si l'exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEI). L'exécution du renvoi n'est pas possible lorsque l'intéressé ne peut quitter la Suisse pour son État d'origine, son État de provenance ou un État tiers ni être renvoyé dans un de ces États (art. 83 al. 2 LEI). Elle n'est pas licite lorsque le renvoi serait contraire aux engagements internationaux de la Suisse (art. 83 al. 3 LEI). Elle n'est pas raisonnablement exigible si elle met concrètement en danger l'étranger, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (art. 83 al. 4 LEI).

En l'espèce, il n'est, à juste titre, pas allégué que l'exécution du renvoi du recourant à Maurice serait impossible, illicite ou inexigible au regard de
l'art. 83 LEI ; le dossier ne laisse pas apparaître d'éléments qui tendraient à démontrer que ce serait le cas.

Mal fondé, le recours sera donc rejeté.

10) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge des recourants, qui succombent (art. 87 al. 1 LPA). Il ne sera pas alloué d'indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 19 janvier 2018 par Madame I______ et par Monsieur B______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 19 décembre 2017 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de Madame I______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Samir Djaziri, avocat des recourants, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, MM. Thélin et Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

...

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

...

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l'entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l'admission provisoire,

4. l'expulsion fondée sur l'art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d'admission,

6. la prolongation d'une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d'emploi du titulaire d'une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d'asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l'objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

...

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l'acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

...

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l'expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l'objet d'aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l'expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.