Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/942/2019

ATA/1378/2019 du 10.09.2019 ( PROC ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/942/2019-PROC ATA/1378/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 10 septembre 2019

3ème section

 

dans la cause

 

Madame et Monsieur A______

Monsieur B______

Monsieur C______

Monsieur D______

Madame E______
représentés par Me Jean-Daniel Borgeaud, avocat

contre

Madame et Monsieur F______
représentés par Me Guerric Canonica, avocat

et

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE

et

COUR DE JUSTICE - CHAMBRE ADMINISTRATIVE



EN FAIT

1) Par arrêt du 29 janvier 2019, la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) a rejeté le recours que Madame et Monsieur F______ (ci-après : les époux F______) avaient formé contre un jugement du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) annulant, sur recours de Madame et Monsieur A______, de Madame E______, de Monsieur D______, de Monsieur Raphaël B______ et de Monsieur C______ (ci-après : les voisins), une autorisation de construire une nouvelle villa, en lieu et place de celle existante, sur la parcelle dont ils étaient propriétaires à G______.

Un émolument de procédure de CHF 1'500.- était mis à la charge des époux F______, et une indemnité de procédure de CHF 1'500.- était allouée aux voisins, à la charge des époux F______.

2) Le 7 mars 2019, les voisins ont réclamé contre l'indemnité de procédure qui leur était allouée.

Le relevé du travail de leur avocat indiquait 47,05 heures pour l'avocat, et 27,10 heures pour l'avocat-stagiaire, soit, au tarif horaire de CHF 500.-, respectivement CHF 185.-, un total de CHF 28'567.-. Il n'y avait pas eu particulièrement d'activité extra-judiciaire. Les époux F______ disposaient de moyens financiers significatifs.

La nature de l'affaire, sans être particulièrement complexe, nécessitait toutefois des connaissances juridiques pointues. La cause avait une importance certaine, dès lors que l'on pouvait estimer que la valeur de la propriété des voisins pouvait diminuer de CHF 1'000'000.- selon la construction voisine. Le taux horaire, soit CHF 500.- pour l'avocat et CHF 185.- pour l'avocat-stagiaire, était normal.

Ainsi, une indemnité de procédure de CHF 19'000.- à laquelle devait s'ajouter la TVA, devait leur être allouée.

Le plafonnement de CHF 10'000.- ressortant du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03) ne devait pas être appliqué dès lors qu'il s'agissait d'une norme primaire sans base légale et qu'il ne permettait pas de respecter les exigences issues de la jurisprudence.

3) Le 11 avril 2019, le département du territoire s'en est rapporté à justice sur la question.

4) Le 12 avril 2019, les époux F______ ont conclu au rejet dans la réclamation. L'indemnité fixée était conforme tant aux règles édictées par le Conseil d'État qu'au principe d'équité et de la proportionnalité.

Les voisins avaient développé de nombreux arguments, lesquels avaient été écartés par la chambre administrative. L'impact du projet des époux F______ sur la valeur des villas voisines n'était pas démontré. La situation financière des époux F______ n'était pas pertinente.

De plus, si une indemnité devait être allouée aux voisins, elle devrait être mise à la charge du département, lequel avaient toujours appuyé la position des époux F______.

5) Le 16 mai 2019, les voisins ont indiqué qu'ils renonçaient à répliquer.

6) Sur quoi, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

EN DROIT

1) La juridiction administrative qui rend la décision statue sur les frais de procédure et émoluments (art. 87 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

Elle peut, sur requête, allouer à la partie ayant eu entièrement ou partiellement gain de cause une indemnité pour les frais indispensables causés par le recours (art. 87 al. 2 LPA).

Ces questions peuvent faire l'objet d'une réclamation dans le délai de trente jours dès la notification de la décision (art. 87 al. 4 LPA).

2) Adressée en temps utile à la chambre de céans, la présente réclamation est recevable.

3) a. La juridiction administrative statue sur les frais de procédure, indemnités et émoluments dans les limites établies par règlement du Conseil d'État et conformément au principe de la proportionnalité (art. 87 al. 1 et 3 LPA ; ATA/581/2009 du 10 novembre 2009 et les références citées).

L'art. 6 RFPA, intitulé « indemnité », prévoit que la juridiction peut allouer à une partie, pour les frais indispensables occasionnés par la procédure, y compris les honoraires éventuels d'un mandataire, une indemnité de CHF 200.- à CHF 10'000.-.

b. Les réclamants soutiennent que la limite fixée par le Conseil d'État dans la disposition précitée ne serait pas applicable en l'espèce, dès lors qu'il s'agit d'une norme primaire n'ayant pas de base légale et ne permettant pas de respecter les exigences jurisprudentielles.

Tel n'est toutefois pas le cas. En effet, l'art. 87 al. 3 LPA contient une clause de délégation au Conseil d'État afin que ce dernier fixe les limites des émoluments qui peuvent être perçus ainsi que des indemnités de procédures qui peuvent être allouées dans le cadre de la procédure administrative. Dès lors qu'il s'agit précisément de fixer le maximum et le minimum des montants en question, il n'est pas soutenable de prétendre que ces limites ne disposent pas d'une base légale.

c. La juridiction saisie dispose d'un large pouvoir d'appréciation également quant à la quotité de l'indemnité allouée et, de jurisprudence constante, celle-ci ne constitue qu'une participation aux honoraires d'avocat (ATA/334/2018 du 10 avril 2018 ; ATA/1484/2017 du 14 novembre 2017), ce qui résulte aussi, implicitement, de l'art. 6 RFPA dès lors que ce dernier plafonne l'indemnité à CHF 10'000.-. Enfin, la garantie de la propriété (art. 26 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101) n'impose nullement une pleine compensation du coût de la défense de la partie victorieuse (arrêt du Tribunal fédéral 2C_152/2010 du 24 août 2010).

4) La fixation des dépens implique une appréciation consciencieuse des critères qui découlent de l'esprit et du but de la réglementation légale (ATF 107 Ia 202 consid. 3 ; arrêts 1C_435/2015 du 17 septembre 2015 consid. 3 ; 1P.63/2005 du 22 mars 2005 consid. 3). Elle s'effectue en fonction des circonstances particulières de chaque cas d'espèce, tenant compte notamment de la nature et de l'importance de la cause, du temps utile que l'avocat lui a consacré, de la qualité de son travail, du nombre d'audiences auxquelles il a pris part, des opérations effectuées et du résultat obtenu (ATF 122 I 1 consid. 3a.; arrêt 2D_35/2016 du 21 avril 2017 consid. 6.2 ; 2C_825/2016 du 6 février 2017 consid. 3.1).

5) a. En l'espèce, l'indemnité de procédure litigieuse concerne uniquement la procédure devant la chambre administrative, le jugement du TAPI du 30 novembre 2017, confirmé, traitant de la question des frais devant cette autorité.

L'importance de la cause doit être relativisée. Le litige opposait des propriétaires voisins, en cinquième zone de construction, au sujet de la démolition d'un bâtiment existant et de la reconstruction d'une nouvelle villa dont la surface brute de plancher dépassait de 11 m² celle de 22 % de la surface du terrain, autorisés dans cette zone.

La qualité des écritures des réclamants est dans la norme de ce que la chambre administrative reçoit. D'une manière générale, les mémoires produits sont peu synthétiques et difficiles à lire. Les observations du 8 mars 2018 contiennent vingt pages, dont une page de garde, une table des matières et une page de conclusions, appuyant principalement le raisonnement suivi par l'autorité judiciaire de première instance.

Les observations après enquêtes du 24 août 2018 se tiennent sur huit pages, reprenant un certain nombre d'éléments déjà traités dans l'écriture initiale.

S'agissant de l'instruction de la procédure, la chambre administrative a procédé à un transport sur place, lequel a duré 40 minutes.

S'agissant de la valeur litigieuse, l'affirmation des réclamants selon laquelle la valeur de leur propriété pourrait diminuer de 1 million de francs si la construction est réalisée ne s'appuie sur aucune pièce.

b. En procédant à une appréciation globale de ces éléments, la chambre administrative retiendra que l'indemnité de procédure allouée, de CHF 1'500.-, est conforme à la pratique et comparable à celle accordée dans des dossiers similaires (ATA/1098/2019 du 25 juin 2019, P ATA/934/2019 du 21 mai 2019).

6) Selon sa pratique courante, la chambre administrative ne percevra pas d'émolument et n'allouera pas d'indemnité de procédure dans le cadre de la présente réclamation (art. 87 al. 1 et al. 2 loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_792/2017 du 6 juin 2018 et les références citées ; ATA/912/2018 du 11 septembre 2018 et les références citées).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable la réclamation formée le 7 mars 2019 par Madame et Monsieur A______, de Madame E______, de Monsieur D______, de Monsieur B______ et de Monsieur C______ contre l'arrêt de la chambre administrative de la Cour de justice du 29 janvier 2019 ;

au fond :

la rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure dans la présente cause ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Jean-Daniel Borgeaud, avocat des réclamants, à Me Guerric Canonica, avocat de Madame et Monsieur F______, ainsi qu'au département du territoire - OAC et au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, MM. Thélin et Verniory, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

M. Michel

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :