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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4503/2017

ATA/1581/2017 du 07.12.2017 ( MARPU ) , REFUSE

Parties : ODIER EXCURSIONS SA / RATP DEV SUISSE SA ET AUTRES, TRANSPORTS PUBLICS GENEVOIS, GENÈVE-TOURS SA
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4503/2017-MARPU

" ATA/1581/2017

 

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Décision du 7 décembre 2017

sur effet suspensif

 

dans la cause

 

ODIER EXCURSIONS SA
représentée par Me Jean-Charles Lopez, avocat

contre

GENÈVE-TOURS SA
RATP DEV SUISSE SA
représentées par Me Christian Reiser, avocat

et

TRANSPORTS PUBLICS GENEVOIS
représentés par Me Bertrand Reich, avocat

 

 

Attendu, en fait, que :

1) Par avis publié dans la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) et sur la plateforme www.simap.ch le 28 juin 2017, les Transports publics genevois (ci-après : les TPG) ont lancé un appel d'offres en procédure ouverte et soumis aux traités internationaux pour un marché de services sous le titre « sous-traitance de lignes TPG – 4 marchés ».

Le marché 1 concernait la « sous-traitance de l’exploitation de lignes – LOT 1 – lignes 35 – 36 -54 – P – W – X.

Le marché 2 concernait la sous-traitance de l’exploitation de lignes – LOT 2 – lignes 28 – 51 – 57 – scolaires 93 - 94.

Le marché 3 concernait la sous-traitance de l’exploitation de lignes – LOT 3 – lignes 41 – 43 – 44 – 45 – scolaire 92.

Le marché 4 concernait la sous-traitance de l’exploitation de lignes – LOT 4 – lignes 47 – L - S.

Les quatre marchés faisaient l’objet d’une brève description.

Le « début de l’exécution et la date de la fourniture étaient fixés, pour les quatre marchés, au 11 décembre 2017, le début de l’exécution étant agendé à la veille, soit le 10 décembre 2017 ».

La durée du marché, de l’accord cadre ou du système d’acquisition dynamique était de soixante mois depuis la signature du contrat pour tous les marchés, à l’exception du marché 2 qui était de vingt-quatre mois.

Le délai pour poser des questions à l'adjudicateur était fixé au 17 juillet 2017, celui de dépôt des offres au 28 août 2017 à 16h00. Le dossier d'appel d'offres était disponible à partir du 28 juin 2017. Il serait procédé à l’ouverture publique des offres le 29 août 2017 à 10h00.

Un cahier des charges, pour chaque lot, décrivait sur plus de vingt pages principalement les besoins fonctionnels des lignes concernées et les conditions d’exploitation appliquées aux TPG.

Le formulaire de soumission, de plus de quinze pages, listait, notamment, les critères d’adjudication (point 1.2.18), à savoir :

« - adéquation de l’offre au cahier des charges : 30 points

- offre commerciale dont le prix, rabais et exigences contractuelles :

40 points

- organisation du travail / compétences du personnel / références :

20 points

- critères sociaux et respect des principes de développement durable :

10 points ».

Il précisait l’échéancier, soit les dates du 30 octobre 2017 pour l’adjudication, du 30 novembre 2017 pour la signature du contrat et du 10 décembre 2017 pour la mise en œuvre du projet – début de la réalisation.

2) Odier Excursions SA (ci-après : Odier) est une société inscrite au registre du commerce à Genève depuis le 2 mai 1984 et dont le siège est sis à Plan-les-Ouates. Elle a pour but l’organisation d’excursions, de voyages, de déplacements divers en cars, minibus, voitures ou tout autre moyen de transport de personnes.

3) Dans le délai imparti au 17 juillet 2017, Odier a adressé une liste de questions aux TPG, auxquelles les TPG ont répondu le 28 juillet 2017.

4) Le même jour, estimant que plusieurs questions étaient restées sans réponse, Odier a, à nouveau, interpellé les TPG.

Par réponse du même jour, les TPG ont indiqué que la période des questions était close.

5) Odier a déposé, dans le délai du 28 août 2017, une offre pour la sous-traitance de l’exploitation du lot 3, pour le prix, hors TVA de CHF 26'477'063,66.

L’offre détaillée comprend plus de cent-trente pages, annexes non comprises.

Elle avait rejoint le groupe Alsa-National Express en 2017. Odier disposait de deux sites dans le canton de Genève, soit à Plan-les-Ouates et à Vernier.

S’agissant des véhicules, elle avait pré-commandé dix véhicules neufs, en fonction des lignes. La commande ferme de la flotte serait passée lors de la signature du nouveau contrat le 30 novembre 2017. Elle s’engageait à exploiter le service avec la flotte nécessaire le 10 décembre 2017.

Elle confirmait avoir pris bonne note des échéanciers et garantissait être en mesure de les respecter.

6) Par décision du 31 octobre 2017, les TPG ont informé ODIER que son offre n’avait pas été retenue et avoir adjugé le marché relatif au lot 3 au consortium Genève-Tours SA, RATP Dev Suisse Transports publics SA (ci-après : le consortium) sur la base d’un montant hors TVA de CHF 26'552’817.59. Odier était classée au deuxième rang sur trois offres évaluées. Ladite décision contenait une synthèse des critères d’adjudication indiquant les points obtenus par chaque soumissionnaire :

 

Critères

Adéquation de l’offre au cahier des charges


30 points

Offre commerciale




40 points

Organisation au travail, compétences personnel & références

20 points

Qualité, sécurité, environnement



10 points

Score total

Classement

Genève-Tours/

RATP

20.00

38.18

13.20

6.8

78.18

1

Odier

17.20

38.40

12.80

6

74.40

2

Globe Limo

20

33.22

13.80

7

74.02

3

 

7) À la demande d’Odier, deux entretiens se sont déroulés avec les TPG, respectivement les 1er et 7 novembre 2017.

8) a. Par acte du 13 novembre 2017, Odier a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision d’adjudication.

Elle a conclu préalablement à la restitution de l’effet suspensif au recours et ce qu’elle soit autorisée à produire des pièces complémentaires, à compléter son recours, à répliquer, à ce qu’il soit ordonné à Genève-Tours SA et à RATP Dev Suisse Transports publics SA de produire l’intégralité de leur dossier d’appel d’offres. Principalement, la décision d’adjudication devait être annulée et le marché lui être adjugé. Les TPG devaient être condamnés en tous les frais, y compris une indemnité de procédure. Des conclusions subsidiaires en renvoi de la cause aux TPG pour nouvelle décision étaient formulées.

Sur restitution de l’effet suspensif, Odier indiquait qu’il n’y avait aucune urgence ni aucun risque de préjudice commandant de refuser l’effet suspensif. Les TPG savaient depuis sept ans déjà que le marché querellé devait être attribué pour le mois de décembre 2017. En publiant l’appel d’offres le 28 juin 2017 et en rendant une décision le 31 octobre 2017 pour une mise en exploitation en décembre 2017, les TPG avaient délibérément tardé à procéder.

Enfin, les TPG avaient modifié le quatrième critère : le libellé original en « qualité, sécurité, environnement » était devenu « critères sociaux et respect des principes de développement durable ». Dans le cadre des entretiens, les TPG avaient reproché à la recourante que le dossier d’appel d’offres ne contenait rien en rapport avec la satisfaction du personnel, ce qui pouvait potentiellement conduire à des grèves ou autres types de nuisances. Ce fait était inexact. La notation du premier critère n’était dès lors pas correcte et devait être augmentée puisque les TPG n’avaient, à tort, pas tenu compte de cet élément.

Les TPG avaient par ailleurs reproché à la recourante un environnement conducteurs insuffisant, s’agissant notamment des salles de repos, des toilettes, etc., plus spécifiquement de ne pas disposer d’une infrastructure suffisamment grande, estimant que le site de Plan-les-Ouates ne serait pas suffisamment adapté. Or, dit environnement avait été détaillé dans le dossier d’appel d’offres. Pour une raison inexpliquée, les TPG n’avaient pas tenu compte dans leur notation du second site de Vernier. La notation du critère s’étant uniquement basée sur la moitié de l’offre faite, elle devait être augmentée.

Enfin, les TPG avaient indiqué qu’il n’était pas réaliste d’entrer dans le marché pour le 10 décembre 2017 sans disposer préalablement de tous les véhicules nécessaires. Or, l’appel d’offres avait été publié le 28 juin 2017 et la décision d’adjudication n’était intervenue que le 31 octobre 2017. Les TPG ne pouvaient reprocher à un candidat de disposer d’un bref délai d’un mois, compris entre la décision d’adjudication et la date de mise en exploitation, pour acquérir les véhicules nécessaires à l’exécution du marché. La recourante avait de surcroît anticipé ce problème en pré-commandant tous les véhicules nécessaires. À suivre la logique des TPG, il n’était pas possible à un nouvel acteur d’entrer dans le marché sauf si celui-ci acquérait, à ses risques, un nombre important de véhicules onéreux dont il n’aurait pas l’usage à défaut d’attribution du marché. Il était précisé que les lignes du lot 3 objet de l’appel d’offres querellé étaient sous-traitées aux adjudicataires depuis le mois de décembre 2010, soit depuis sept ans.

b. Le même jour, elle a aussi recouru contre des décisions de non-adjudication des lots 1 et 4 pour lesquels elle avait soumissionné.

9) Par observations sur effet suspensif du 30 novembre 2017, les TPG ont conclu au rejet de la requête. Ils produisaient un chargé de pièces, ainsi qu’un bordereau séparé comprenant le « tableau d’évaluation lot 3 » lequel devait être soustrait à la consultation.

La recourante entendait substituer son appréciation à celle de l’autorité adjudicatrice alors qu’elle n’en avait pas le pouvoir. Elle avait indiqué dans son offre qu’elle était installée dans la zone industrielle de Plan-les-Ouates où elle avait regroupé ses locaux administratifs, son parc d’autocars et de mini-bus, et ses installations d’entretien de véhicules. Le site de Vernier était celui de la société Alpybus, à l’usage de bureaux uniquement et regroupait l’ensemble des services administratifs du groupe Alsa en Suisse. La recourante ne serait pas en mesure d’assumer les conséquences de l’admission, ne fût-ce que d’un seul de ses trois recours, ne disposant pas des véhicules nécessaires à l’exploitation des lignes. De l’expérience des TPG, les constructeurs des véhicules n’acceptaient pas de pré-commande. Même à considérer que tel soit le cas, le délai de livraison de ce type de véhicules était de cinq à six mois. Il était en conséquence impossible que la recourante dispose des véhicules nécessaires en cinq semaines seulement, soit le délai séparant l’adjudication de celui de l’exécution du marché. La recourante ne le prétendait d’ailleurs pas. Les TPG, ayant identifié cette difficulté, avait indiqué mettre en location leurs propres véhicules en cas de besoin de l’adjudicateur. La recourante n’avait toutefois pas saisi cette possibilité. La recourante aurait aussi pu convenir avec les actuels sous-traitants de reprendre leurs véhicules. Un tel accord n’avait pas été conclu par la recourante. À l’inverse, l’offre de la recourante laissait apparaître un risque de non fourniture des prestations pendant quatre à cinq mois, ce qui n’était pas envisageable s’agissant de l’exploitation de lignes de transports publics. Les critères avaient été évalués avec bienveillance compte tenu de ce qui précédait. L’offre des concurrents était meilleure pour tous les critères autres que le prix, en particulier au niveau de l’adéquation au cahier des charges.

10) Par observations du 30 novembre 2017 sur effet suspensif, Genève Tours SA et RATP Dev Suisse SA ont conclu au rejet de la requête. La recourante n’avait pas d’infrastructures propres à Vernier, mais avait uniquement disposé d’une « option sur la location d’une surface de garage ». Les locaux évoqués de 2'000 m2 étaient aujourd’hui aménagés en garde-meubles, des travaux considérables étaient nécessaires pour les transformer en locaux liés à l’exploitation de lignes de bus. L’offre de la recourante n’intégrait d’ailleurs pas le coût de location de telles surfaces à Vernier, coût assurément élevé. La recourante ne pouvait se prévaloir de la structure, juridiquement indépendante, d’Alpybus Sàrl. Elle ne fournissait d’ailleurs aucune pièce probante relative aux prétendues pré-commandes de véhicules. La recourante répondait à l’offre en y intégrant la reprise du matériel roulant de l’exploitant actuel des lignes afin d’assurer une partie de l’exploitation. Or, aucun échange n’avait jamais existé à cet égard entre elles et Odier. L’exploitation de lignes de transport public répondait assurément à un critère d’intérêt public. La mise en service des lignes devait intervenir le 10 décembre 2017 au plus tard, soit dès l’entrée en vigueur des nouveaux horaires des transports publics à l’échelon national. Accorder l’effet suspensif imposerait aux TPG de se trouver face à des incertitudes évidentes tant en matière de logistique financière que relativement aux conditions d’exploitation des lignes litigieuses dès lors que le service public devrait être assuré sans que l’on ne sache précisément avec quel prestataire et à quel coût supplémentaire vu les courts délais. À la lumière d’une première analyse rapide et non exhaustive de l’argumentation de la recourante, les chances de succès n’étaient pas telles qu’elles justifieraient la restitution de l’effet suspensif. Le grief selon lequel les indications relatives aux sous-critères manquaient, que les délais du processus de soumission auraient été irréalistes, que la recourante n’aurait pas pu obtenir de réponses aux questions soulevées étaient irrecevables, voire tardifs, certains des griefs devant être soulevés dans le cadre d’une contestation de l’appel d’offres.

11) Par courrier du 4 décembre 2017, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger sur effet suspensif.

 

Considérant, en droit, que :

1) Le recours, interjeté en temps utile devant l'autorité compétente, est prima facie recevable de ces points de vue, en application des art. 15 al. 2 de l'accord intercantonal sur les marchés publics du 25 novembre 1994 (AIMP - L 6 05),
3 al. 1 de la loi autorisant le Conseil d’État à adhérer à l’accord intercantonal sur les marchés publics du 12 juin 1997 (L-AIMP - L 6 05.0) et 56 al. 1 du règlement sur la passation des marchés publics du 17 décembre 2007 (RMP - L 6 05.01).

2) Aux termes des art. 17 al. 1 AIMP et 58 al. 1 RMP, le recours n’a pas d’effet suspensif. Toutefois, en vertu des art. 17 al. 2 AIMP et 58 al. 2 RMP, l’autorité de recours peut, d’office ou sur demande, restituer cet effet pour autant que le recours paraisse suffisamment fondé et qu’aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s’y oppose.

L’examen de la requête suppose une appréciation prima facie du bien-fondé du recours ; le but est alors de refuser l’effet suspensif au recours manifestement dépourvu de chances de succès, dont le résultat ne fait aucun doute ; inversément, un diagnostic positif prépondérant ne suffit pas d’emblée à justifier l’octroi d’une mesure provisoire, mais suppose de constater et de pondérer le risque de préjudice (ATA/446/2017 du 24 avril 2017 consid. 2 ; ATA/62/2017 du 23 janvier 2017 consid. 2 ; ATA/793/2015 du 5 août 2015 consid. 2 ; ATA/701/2013 du 22 octobre 2013 consid. 2 ; Benoît BOVAY, Recours, effet suspensif et conclusion du contrat, in Jean-Baptiste ZUFFEREY/Hubert STÖCKLI, Marchés publics 2010, Zurich 2010, pp. 311-341, p. 317 n. 15).

La restitution de l’effet suspensif constitue cependant une exception en matière de marchés publics, et représente une mesure dont les conditions ne peuvent être admises qu’avec restriction (ATA/446/2017 précité consid. 2 ; ATA/62/2017 précité consid. 2 ; ATA/793/2015 précité consid. 2 ; ATA/60/2013 du 30 janvier 2013 consid. 5).

3) a. L’AIMP a pour objectif l’ouverture des marchés publics, notamment des communes (art. 1 al. 1 AIMP). Il poursuit plusieurs objectifs, soit assurer une concurrence efficace entre les soumissionnaires (art. 1 al. 3 let. a AIMP), garantir l’égalité de traitement entre ceux-ci et assurer l’impartialité de l’adjudication
(art. 1 al. 3 let. b AIMP), assurer la transparence des procédures de passation des marchés (art. 1 al. 3 let. c AIMP) et permettre l’utilisation parcimonieuse des données publiques (art. 1 al. 3 let. d AIMP). Ces principes doivent être respectés, notamment dans la phase de passation des marchés (art. 11 AIMP, notamment let. a et b AIMP).

b. Le principe de l’égalité de traitement entre soumissionnaires oblige l’autorité adjudicatrice à traiter de manière égale les soumissionnaires tout au long du déroulement formel de la procédure (art. 16 RMP ; ATA/1005/2016 du 29 novembre 2016 consid. 3 ; ATA/51/2015 du 13 janvier 2015 et jurisprudence citée ; Jean-Baptiste ZUFFEREY/Corinne MAILLARD/Nicolas MICHEL, Droit des marchés publics, 2002, p. 109 ; Benoît BOVAY, La non-discrimination en droit des marchés publics in RDAF 2004, p. 241).

4) Aux termes de l’art. 24 RMP, l'autorité adjudicatrice choisit des critères objectifs, vérifiables et pertinents par rapport au marché ; elle doit les énoncer clairement et par ordre d'importance au moment de l'appel d'offres.

a. Le principe de la transparence garanti par les art. 1 al. 3 let. c AIMP et 24 RMP exige du pouvoir adjudicateur qu'il énumère par avance et dans l'ordre d'importance tous les critères d'adjudication qui seront pris en considération lors de l'évaluation des soumissions, en spécifiant clairement l'importance relative qu'il entend accorder à chacun d'eux. Ceux-ci doivent être objectifs, vérifiables et pertinents par rapport au marché Le principe de la transparence interdit de modifier de manière essentielle, après le dépôt des offres, la présentation des critères. Il n'exige toutefois pas, en principe, la communication préalable d’éléments d’appréciation ou de catégories, tels des sous-critères, qui tendent uniquement à concrétiser le critère publié, à moins que ceux-ci ne sortent de ce qui est communément observé pour définir le critère principal auquel ils se rapportent ou que l'adjudicateur ne leur accorde une importance prépondérante et leur confère un rôle équivalent à celui d'un critère publié. De la même manière, une simple grille d'évaluation ou d'autres aides destinées à noter les différents critères et éléments d’appréciation utilisés (telles une échelle de notes, une matrice de calcul, etc.) ne doivent pas nécessairement être portées par avance à la connaissance des soumissionnaires, sous réserve d'abus ou d'excès du pouvoir d'appréciation (ATF 130 I 241 consid. 5.1 ; ATA/695/2015 du 30 juin 2015 ; ATA/368/2015 du 21 avril 2015 ; ATA/972/2014 du 9 décembre 2014).

b. Ainsi, en vertu de l’art. 43 RMP, l'évaluation est faite selon les critères prédéfinis conformément à l'art. 24 RMP et énumérés dans l'avis d'appel d'offres et/ou les documents d'appel d'offres (al. 1) ; le résultat de l'évaluation des offres fait l'objet d'un tableau comparatif (al. 2) ; le marché est adjugé au soumissionnaire ayant déposé l'offre économiquement la plus avantageuse, c'est-à-dire celle qui présente le meilleur rapport qualité/prix ; outre le prix, les critères suivants peuvent notamment être pris en considération : la qualité, les délais, l'adéquation aux besoins, le service après-vente, l'esthétique, l'organisation, le respect de l'environnement (al. 3) ; l'adjudication de biens largement standardisés peut intervenir selon le critère du prix le plus bas (al. 4).

c. La jurisprudence reconnaît une grande liberté d’appréciation au pouvoir adjudicateur (ATF 125 II 86 consid. 6), l’appréciation de la chambre administrative ne pouvant donc se substituer à celle de ce dernier, seul l’abus ou l’excès de pouvoir d’appréciation devant être sanctionné (ATF 130 I 241 consid. 6.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_418/2014 du 20 août 2014 consid. 4.1).

5) En l’espèce, le cahier des charges précisait que la mise en service/exploitation des lignes concernées devait être effective dès le 10 décembre 2017. Les échéanciers étaient rappelés sous point 10 dudit cahier des charges. Outre que la recourante connaissait ces délais depuis juin 2017, elle n’a pas souhaité recourir contre l’appel d’offres. Elle est est dès lors malvenue, prima facie, de contester la brieveté du délai entre l’adjudication et la mise en œuvre du projet.

Par ailleurs, l’essentiel des griefs de la recourante consiste à substituer sa propre appréciation à celle du pouvoir adjudicateur. S’il est exact que la recourante mentionne, dans son offre, le site de Vernier, elle fait notamment état « d’une option sur la location d’une surface de garage (disponible) de 2'000 m2 adaptée aux activités de transport de voyageurs et d’ateliers ». Par ailleurs, les dix premières lignes de son offre, portant sur la présentation d’Odier Excursions, font exclusivement mention d’une installation dans la zone industrielle de Plan-les-Ouates.

De même, la recourante ne conteste pas qu’elle ne possède pas ce jour les véhicules nécessaires. RATP Dev Suisse Transports publics SA ainsi que Genève Tours SA contestent avoir été approchées pour une éventuelle reprise de leur matériel roulant et la recourante n’allègue pas avoir pris contact avec elle. Aucune pièce du dossier ne contredit, à première vue, cette allégation des intimées. Il en ressort que la recourante n’a, de prime abord, ni les véhicules ni aucune solution alternative immédiate permettant d’assurer le marché concerné aux dates prévues, soit dans trois jours. Aucune des critiques formulées par la recourante contre la façon dont son offre a été évaluée, ne permet d’admettre, à ce stade de la procédure, que l’évaluation de l’offre comporterait des éléments de traitement contraire à la loi. S’il est exact que l’intitulé du quatrième critère a été modifié, et que les TPG reconnaissent qu’il prête à confusion, il conviendra dans l’examen au fond d’analyser précisément si le contenu dudit critère a été modifié, ce qui, de prime abord, n’apparait pas être le cas s’agissant dans les deux intitulés de critères portant sur le développement durable, la sécurité au travail et les attestations et certifications demandées.

Enfin, il existe un intérêt public évident à ce que les dessertes concernées puissent être assurées en évitant des surcoûts liés à l’incertitude de la présente procédure. Cet intérêt prévaut largement sur l’intérêt privé du recourant à bloquer l’exécution de la décision d’adjudication jusqu’à droit jugé sur le fond du litige.

En conséquence, la restitution de l’effet suspensif ne pouvant s’effectuer que si le recours paraît suffisamment fondé et qu’aucun intérêt public prépondérant ne n’y oppose, étant rappelé que dite restitution doit être exceptionnelle, il ne peut être donné suite à la requête de restitution de l’effet suspensif de la recourante.

6) Il n’est pas nécessaire de statuer, en l’état de la procédure, sur la demande de conserver confidentielles certaines pièces étant rappelé qu’en application de l’art. 45 al. 3 loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), une pièce dont la consultation est refusée à une partie ne peut être utilisée à son désavantage que si l’autorité lui en a communiqué par écrit le contenu essentiel se rapportant à l’affaire et lui a donné en outre l’occasion de s’exprimer et de proposer les contre-preuves.

7) Le rejet de la requête lève l’interdiction de conclure le contrat d’exécution de l’offre prononcée par la chambre de céans le 17 novembre 2017.

8) Le sort des frais sera réservé jusqu'à droit jugé au fond.

Vu le recours interjeté le 13 novembre 2017 par Odier Excursions SA contre la décision d’adjudication des Transports publics genevois du 31 octobre 2017 ;

vu l’art. 66 al. 3 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ;

vu l’art. 9 al. 1 du règlement de la chambre administrative du 20 septembre 2017 ;

 

LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

refuse de restituer l’effet suspensif au recours ;

réserve le sort des frais de la procédure jusqu’à droit jugé au fond ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique la présente décision, en copie, à Me Jean-Charles Lopez, avocat de la recourante, à Me Bertrand Reich, avocat des TPG ainsi qu'à Me Christian Reiser, avocat de RATP Dev Suisse SA et Genève Tours SA.

 

 

 

 

La vice-présidente :

 

 

 

Ch. Junod

 

 

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :