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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3168/2013

ATA/699/2015 du 30.06.2015 sur JTAPI/663/2014 ( LCI ) , REJETE

Recours TF déposé le 04.09.2015, rendu le 15.04.2016, REJETE, 1C_430/2015
Parties : ANTENEN Jean-Jacques et autres, ANTENEN Joyce, CASANOVA Antoine, DE COULON Bernard, DUIN Vera, DUIN Marcel, HEPTONSTALL John, KUHNE Eric, LOCHER Peter, MOUKARZEL Walid, MOUKARZEL Zina, PILLONEL Pierre-Yves, SANNERUD REIS Erika, TONI Massimo, TUDEAU Marie-Rose, ZUMSTEIN Franz, ZUMSTEIN Gertrud, COMMUNE DE COLLONGE-BELLERIVE / ANTENEN Jean-Jacques, COMMUNE DE COLLONGE-BELLERIVE, PRO SWISS INVEST SA, DÉPARTEMENT DE L'AMÉNAGEMENT, DU LOGEMENT ET DE L'ÉNERGIE
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3168/2013-LCI ATA/699/2015§

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 30 juin 2015

2ème section

 

dans la cause

 

Madame Joyce et Monsieur Jean ANTENEN

Monsieur Antoine CASANOVA

Monsieur Bernard DE COULON

Madame Vera et Monsieur Marcel DUIN

Monsieur John HEPTONSTALL

Monsieur Eric KUHNE

Monsieur Peter LOCHER

Madame Zina et Monsieur Walid Edmond MOUKARZEL

Monsieur Pierre-Yves PILLONEL

Madame Erika REIS

Monsieur Massimo TONI

Madame Marie-Rose TUDEAU

Madame Gertrud et Monsieur Franz ZUMSTEIN

représentés par Me Gabriel Raggenbass, avocat

et

COMMUNE DE COLLONGE-BELLERIVE

représentée par Me Jean-Marc Siegrist, avocat

contre

DéPARTEMENT DE L’AMéNAGEMENT, DU LOGEMENT ET DE L’éNERGIE

et

PRO SWISS INVEST SA

représentée par Me Pascal Pétroz, avocat

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 17 juin 2014 (JTAPI/663/2014)


EN FAIT

1) Madame Patricia et Monsieur François CALVI sont propriétaires des parcelles nos 7'119, 8'743 et 9'450, feuille 80, de la commune de Collonge-Bellerive.

D’une surface de 1'740, respectivement 91 et 350 m2, ces parcelles sont situées en zone 5. Une habitation à deux logements, d’une surface de 150 m2 au sol, est érigée sur la parcelle n° 7'119, tandis que les deux autres sont vierges de construction.

2) On accède à ces biens-fonds par le chemin privé de la Vigneraie, formé des parcelles de dépendance nos 7'120 et 8'744, feuille 80, de la commune de Collonge-Bellerive, chacune grevée d’une servitude de passage à véhicules. Une part de copropriété de la parcelle n° 7'120 de 560 m2 (1/7ème) est rattachée à la parcelle n° 7'119.

Le chemin précité débouche sur celui des Usses, chemin vicinal formé des parcelles nos 7'833, feuille 79, de la commune de Collonge-Bellerive et 3'413, feuille 27, de la commune de Corsier. Une part de copropriété de cette seconde parcelle est également rattachée à la parcelle n° 7'119.

Le chemin des Usses débouche sur le chemin du Port, soit sur la parcelle n° 4'778, feuille 27, de la commune de Corsier appartenant au domaine public communal, elle-même raccordée à la route d’Hermance.

3) Le 27 février 2013, Pro Swiss Invest SA (ci-après : Pro Swiss) a déposé pour le compte des époux CALVI une demande définitive en autorisation de construire un ensemble de huit villas mitoyennes (label Minergie), avec garage souterrain et pompes à chaleur sur les parcelles nos 7'119, 8'743 et 9'450 (DD n° 105'679-1).

Le projet impliquait la démolition de la villa occupant la parcelle n° 7'119 et l’abattage de plusieurs arbres. Il consistait dans la construction de 994,55 m2 de logement, ainsi que de 998 m2 en sous-sol. Dix-huit places de parking étaient prévues, dont trois en surface.

L’indice d’utilisation du sol (ci-après : IUS) s’élevait à 0,44, moyennant le report des droits à bâtir afférents aux parcelles nos 8'743, 9'450 et 7'120.

4) L’instruction de la requête a donné lieu aux préavis suivants :

- favorable, du 11 mars 2013, de la direction des plans d’affectation et requêtes ;

- demandant des compléments, du 19 mars 2013, de la direction générale de la mobilité (ci-après : DGM ; devenue depuis lors la direction générale des transports) : la pente d’accès au parking souterrain ne devait pas excéder 5% sur les cinq derniers mètres avant le débouché sur le domaine public et des places pour les vélos devaient être prévues ;

- demandant des compléments, du 26 mars 2013, de la direction générale de la nature et du paysage (ci-après : DGNP) : l’implantation du parking, côté route d’Hermance, devait être modifiée, au motif que celui-ci entrait en conflit avec la couronne des arbres maintenus à proximité ; le 14 mai 2013, ce même service a sollicité un nouveau complément, au motif que les sauts-de-loup et les canalisations EU entraient en conflit avec le domaine vital de la végétation maintenue du côté de la parcelle n° 8'255.

- favorable sous conditions, du 8 avril 2012, de la police du feu ;

- demandant une modification du projet, du 9 avril 2013, de la commission d’architecture (ci-après : CA) : les villas devaient être implantées parallèlement aux limites nord-sud afin de dégager l’entrée par rapport au chemin de la Vigneraie. Une distance d’au moins cinq mètres entre le couvert à voiture visiteur et la villa n° 14 devait être respectée ;

- défavorable, du 16 avril 2013, de la commune de Collonge-Bellerive en raison d’une densité trop élevée, incompatible avec l’harmonie et l’aménagement du quartier ;

- favorable sous conditions et charges, du 6 mai 2013, de la direction générale de l’eau.

5) Par courrier du 21 avril 2013, l’association des propriétaires du chemin de la Vigneraie a fait part de son opposition au projet, en raison d’un accroissement important de la circulation sur le chemin précité, le chemin des Usses et le chemin du Port. L’accès aux constructions projetées devait se faire depuis la route d’Hermance.

6) Par courrier de son architecte du 30 avril 2013, Pro Swiss a justifié l’implantation des villas prévue. Le projet remplaçait celui précédemment enregistré sous n° DD 105’226-1 qu’elle avait abandonné afin de répondre au préavis négatif de la DGNP. Celle-ci avait sollicité la conservation des arbres situés dans la partie sud-est de la parcelle, à proximité de la route d’Hermance, raison pour laquelle les constructions avaient été implantées parallèlement à la limite ouest de la parcelle. Pour le reste, l’implantation de la place de stationnement extérieur qui se trouvait à proximité de la villa n° 16 avait été modifiée, conformément aux exigences de la CA.

7) Le 11 juin 2013, la CA a relevé que Pro Swiss avait répondu à son précédent préavis et qu’elle n’avait plus d’observations à formuler à l’égard du projet. Elle était d’accord avec la dérogation selon l’art. 59 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) (44%).

8) Le 28 juin 2013, la DGM a rendu un préavis favorable, précisant qu’il y avait lieu de prévoir un équipement pour les vélos les protégeant du vol.

9) Au vu des nouveaux éléments versés au dossier, la DGNP a, le 8 juillet 2013, rendu un préavis favorable sous réserve, notamment, des conditions mises à l’autorisation d’abattage n° 2013 0486.

10) Le 11 juillet 2013, Pro Swiss s’est adressée au Conseiller d’état en charge du département de l’urbanisme, devenu depuis lors le département de l’aménagement, du logement et de l’énergie (ci-après : DALE ou département).

Elle avait déposé une première requête en autorisation de construire n° DD 105'226-1 qui portait sur la construction de six villas mitoyennes, avec couverts à voiture et installation de sondes géothermiques. Ce premier projet prévoyait un accès par la route d’Hermance, impliquant l’abattage de quelques arbres. En raison du préavis de la DGNP du 31 août 2012, elle avait dû y renoncer. Le nouveau projet s’inscrivait dans le cadre de la nouvelle teneur de l’art. 59 LCI et prévoyait un accès par le chemin de la Vigneraie afin de tenir compte des exigences du service précité. Compte tenu de l’opposition manifestée par les voisins, elle sollicitait ses bons offices, afin qu’une solution satisfaisante puisse être trouvée.

11) Le 19 août 2013, le Conseiller d’état en charge du département a répondu à la requérante. Vérification faite, la DGM, instance compétente en matière de mobilité et de stationnement, avait rendu un préavis favorable au projet, comme tous les autres services consultés. Seule la commune de Collonge-Bellerive s’était déclarée défavorable au projet eu égard à sa densité, mais la CA avait accordé la dérogation nécessaire. Cela étant, il n’entendait pas s’immiscer dans des relations relevant du droit privé. Le projet étant conforme aux lois et règlements applicables, il allait faire délivrer l’autorisation de construire sollicitée.

12) Le 30 août 2013, le Conseiller d’état en charge du département a informé la commune de Collonge-Bellerive de la prochaine délivrance de l’autorisation de construire querellée.

Depuis la modification législative de l’art. 59 LCI, entrée en vigueur le 26 janvier 2013, les taux des rapports de surfaces avaient augmenté. Le taux dérogatoire avait été relevé de 27,5 à 44 %, tandis que le préavis du conseil administratif de la commune concernée était consultatif. Le projet litigieux respectait le taux dérogatoire de 44% et avait recueilli l’aval de la CA.

13) Par décision du 3 septembre 2013, publiée dans la Feuille d’avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) du 10 septembre 2013, le département a délivré l’autorisation de construire n° DD 105’679-1.

Par décision du même jour, le département de l’intérieur, de la mobilité et de l’environnement, devenu depuis lors le département de l’environnement, des transports et de l’agriculture (ci-après. DETA) a délivré l’autorisation d’abattage d’arbres n° 2013 0486.

14) Par acte du 1er octobre 2013, la commune de Collonge-Bellerive a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI ou tribunal) contre l’autorisation de construire précitée, concluant à son annulation (cause A/3168/2013).

Elle était la mieux à même de juger ce qui était conforme au caractère, à l’harmonie et à l’aménagement du quartier, condition exigée par l’art. 59 al. 4 LCI. En l’espèce, le projet litigieux prévoyait une densité et un bourrage de terrain tels que sa mise en œuvre dépareillerait totalement le quartier.

Il comportait en outre d’importantes surfaces en sous-sol totalisant 998 m2. Rapportée aux surfaces totales des parcelles nos 7'119, 8'743 et 9'450, augmentées de la quote-part de la parcelle en copropriété n° 7'120, celle des sous-sols représentait un rapport de 44,14%, en violation des alinéas 8 et 9 de l’art. 59 LCI. L’art. 59 al. 10 LCI permettait certes de déroger à ces prescriptions régissant la surface des constructions en sous-sol, mais la condition que la construction de garages en sous-sol permette de renoncer à l’édification de constructions de peu d’importance à destination de garages en surface n’était pas remplie. De telles constructions n’auraient pas pu être réalisées en surface, compte tenu de la trop forte densité des villas prévues. Enfin, et dans la mesure où l’art. 59 al. 10 LCI instituait lui aussi une dérogation, il fallait partir du principe que le dépassement autorisable en vertu de cette disposition ne devait représenter que quelques pourcents de plus que ceux retenus à l’art. 59 al.1 LCI, compte tenu de la règle figurant à l’art. 59 al. 9 LCI. Or, le projet dépassait très largement les taux fixés à l’art. 59 al. 1 LCI (entre 50 et 80 %), ce qui n’était pas admissible.

15) Par acte du 10 octobre 2013, Madame Joyce et Monsieur Jean-Jacques ANTENEN, Monsieur Antoine CASANOVA, Monsieur Bernard DE COULON, Madame Vera et Monsieur Marcel DUIN, Monsieur John HEPTONSTALL, Monsieur Eric KUHNE, Monsieur Peter LOCHER, Madame Zina et Monsieur Walid Edmond MOUKARZEL, Monsieur Pierre-Yves PILLONEL, Madame Erika REIS, Monsieur Massimo TONI, Madame Marie-Rose TUDEAU et Madame Gertrud et Monsieur Franz ZUMSTEIN (ci-après : les voisins) ont également recouru auprès du TAPI contre l’autorisation de construire n° DD 105’679-1, concluant à ce qu’un transport sur place soit ordonné, ainsi qu’à l’annulation de la décision précitée (cause A/3262/2013).

Ils étaient propriétaires des parcelles nos 7'102 à 7'108, 7'112, 7'116, 7'117, 7'138, 7'165, 7'166, sises sur le territoire de la commune de Collonge-Bellerive, et 4'445 de la commune de Corsier, biens-fonds qui bordaient le chemin de la Vigneraie, respectivement le chemin des Usses. Ils n’étaient pas fondamentalement opposés à ce que leurs voisins valorisent leurs bien-fonds, mais remettaient en cause le fait que le projet de construction autorisé, d’une ampleur et d’un type inédits dans le quartier, prévoyait un accès routier unique via des chemins privés, moyennant un détour de 682 mètres, alors qu’un accès direct depuis la route d’Hermance, distante d’une dizaine de mètres seulement, pouvait être réalisé.

Le terrain était insuffisamment équipé, en violation des art. 22 al. 2 let. b et 19 de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 22 juin l979 (LAT - RS 700). Un accès suffisant aux futures constructions n’était pas garanti d’un point du vue juridique. Contrairement au chemin de la Vigneraie, celui des Usses n’était pas une dépendance mais un simple chemin vicinal. Il ne constituait pas une dépendance de la parcelle n° 7'119 et n’était grevé d’aucune servitude en sa faveur. Certains recourants, dont les propriétés bordaient le chemin des Usses ne toléreraient en aucun cas le passage des futurs occupant sur ce tronçon.

La circulation engendrée par le projet induirait en outre de graves inconvénients pour le voisinage au sens de l’art. 14 LCI. Les villas projetées généreraient une augmentation très sensible du trafic, compte tenu d’une augmentation de 70% du nombre de véhicules empruntant le chemin privé de la Vigneraie. En sus des voitures des futurs occupants, il faudrait par ailleurs compter avec la circulation supplémentaire liée aux visiteurs et aux différents services publics, en particulier les camions-poubelles, ce alors même que les chemins concernés s’accommodaient d’ores et déjà très mal du trafic routier existant, en raison notamment de leur étroitesse. À ceci s’ajoutait que des voitures étaient souvent parquées tant le long du chemin de la Vigneraie que de celui des Usses, dont les places de parking étaient cadastrées, ce qui rendait la largeur disponible de la route inférieure aux 3 mètres préconisés par la norme de l’Union des professionnels suisses de la route VSS 640 050. La circulation engendrée par le projet aggraverait la situation et compromettrait la sécurité des habitants. Toute intervention des services publics serait très vraisemblablement entravée. Le chantier proprement dit ne manquerait pas non plus d’accroître les problèmes de circulation et de sécurité, l’acheminement des machines nécessaires via les chemins des Usses et de la Vigneraie n’apparaissant pas possible.

Le projet excédait enfin le taux de rapport de surface admissible. Les droits à bâtir des parcelles nos 8'743 et 9'450 ne pouvaient pas être reportés en faveur de la parcelle n° 7'119, au motif que ces deux premières parcelles ne disposaient pas d’un accès juridiquement garanti au chemin de la Vigneraie. Aucune construction prévoyant un accès par ledit chemin ne pouvant être autorisée sur les parcelles nos 8'743 et 9'450, il n’était pas admissible que les droits à bâtir y afférents puissent être reportés aux fins d’augmenter la densité d’un projet sur la parcelle voisine. Un report des droits à bâtir supposait que ceux-ci aient pu juridiquement être exercés en l’absence de transfert en bon respect des principes de la bonne foi et de l’interdiction de l’abus de droit. Un tel report contournerait les exigences de l’art. 22 LAT en matière d’équipement suffisant. Le calcul de densité devait donc s’effectuer en tenant uniquement compte de la surface de la parcelle n° 7'119, soit 2'261 m2, à l’exclusion de celles des parcelles nos 8'743 et 9'450. L’indice d’utilisation du sol (ci-après : IUS) s’élevait en l’espèce à 0,55 et contrevenait, partant, à l’art. 59 al. 4 LCI.

16) Le 4 novembre 2013, Pro Swiss a conclu au rejet du recours de la commune de Collonge-Bellerive.

Hormis celui de l’intimée, qui n’avait qu’un caractère consultatif, tous les préavis recueillis étaient favorables au projet, dont en particulier celui de la CA qui avait méticuleusement examiné ce dernier. C’était donc à juste titre que le département avait délivré l’autorisation de construire litigieuse. L’art. 59 al. 10 LCI avait été correctement appliqué, dans la mesure où la construction de garages en sous-sol permettait en l’espèce de renoncer à l’édification de constructions de peu d’importance à destination de garage en surface.

17) Le 15 novembre 2013, elle a conclu au rejet du recours formé par les voisins.

Ces derniers tentaient de substituer leur appréciation à celle de la DGM, soit du service spécialisé en matière de mobilité qui avait préavisé favorablement le projet. La norme VSS 640 050, qui exigeait une largeur minimale de 3 mètres pour les constructions comportant une quinzaine de place de parking, serait respectée puisque les chemins d’accès mesuraient 4,26 m à leur endroit le plus étroit et 5,74 m à leur endroit le plus large.

Les juridictions administratives devaient uniquement s’assurer de la conformité du projet présenté avec les prescriptions en matière de construction et d’aménagements intérieurs et extérieurs des bâtiments et ne devaient pas s’immiscer dans les conflits de droit privé. Elles n’avaient en particulier pas à trancher la question de la propriété d’un chemin vicinal dans le cadre d’une autorisation de construire touchant à ce chemin.

L’argumentation des recourants sur le report prétendument abusif des droits à bâtir tombait à faux. Elle méconnaissait le fait que les parcelles en cause seraient réunies, puis divisées à nouveau au moment de la vente des villas, afin que chaque propriétaire puisse disposer des droits à bâtir y afférents. Le report des droits à bâtir en cause était parfaitement légal, de même que la dérogation de densité accordée.

18) Le 18 novembre 2013, le TAPI joint la cause A/3262/2013 à la cause A/3168/2013.

19) Le 16 décembre 2013, le DALE a également conclu au rejet des deux recours.

Dans son préavis du 11 juin 2013, la CA, spécialiste en la matière, n’avait émis aucune réserve, ni soulevé d’observation à l’égard de la préservation des qualités architecturales du quartier, et s’était déclarée favorable à l’octroi d’une dérogation en matière de densité. Le but des dérogations relatives au taux d’occupation du sol était de favoriser le développement de l’habitat groupé densifié en zone villas afin de contribuer de manière efficace à la lutte contre la pénurie de logement. Pour ce faire, dans le souci d’éviter les inégalités de traitement, la loi ne requérait plus que le préavis du conseil administratif de la commune concernée pour un taux dérogatoire de 40% pour les constructions à haute performance énergétique. Aucune loi ni règlement n’imposait au département de suivre le préavis communal.

Le grief tenant dans une violation des alinéas 8 à 10 de l’art. 59 LCI était irrecevable, des voisins ne disposant pas de la qualité pour recourir contre l’indice d’utilisation d’une surface en sous-sol. Dans une jurisprudence récente, la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) avait pour le reste admis la pratique du département qui consistait à ne pas appliquer l’art. 59 al. 9 LCI, au motif que cette disposition ne tenait pas compte des évolutions législatives liées à la prise en compte des considérations énergétiques en matière de constructions (ATA/649/2012). Une dérogation au sens de l’art. 59 al. 10 LCI pouvait en outre être accordée. La construction de huit villas mitoyennes n’était pas exceptionnelle au point de représenter un « bourrage » sur une parcelle. Le projet prévoyait au demeurant la création de trois places extérieures pour les visiteurs, ce qui n’aurait pas été possible si la construction avait été trop dense. La construction d’un garage souterrain avec une couverture en toiture améliorait la qualité des espaces extérieurs avec d’avantage d’espaces verts.

C’était à bon droit qu’il avait admis un report des droits à bâtir afférents aux parcelles nos 8'743 et 9'450 en faveur de la parcelle n° 7'119. La pratique était admise en droit suisse et ne dépendait pas du respect de l’art. 22 LAT. Chaque parcelle prise individuellement ne pouvait pas remplir les exigences posées par cette disposition et il aurait été disproportionné de l’exiger.

Le chemin de la Vigneraie était large de cinq mètres, ce qui était parfaitement adapté au croisement des véhicules, à l’accès des services de secours, ainsi qu’à la voirie. La norme VSS 640 050 était donc parfaitement respectée. La construction projetée bénéficierait d’un accès suffisant, tandis que la DGM n’avait relevé aucune augmentation inhabituelle du trafic. La construction de huit villas était conforme à la zone 5 et n’engendrerait pas de graves inconvénients pour les usagers. Quant au grief tenant à l’absence d’accès juridiquement garanti pour les futurs occupants, il relevait du droit privé et était, de ce fait, irrecevable.

20) Par jugement du 17 juin 2014, le tribunal a rejeté les recours (JTAPI/663/2014).

Il n’existait pas d’obstacle empêchant le propriétaire de deux ou plusieurs parcelles contiguës de les réunir en une seule en vue de la construction d’un bâtiment. Dans un tel cas, la surface totale obtenue servait à déterminer la surface maximale constructible. Une telle manière de faire était admise en droit suisse, même sans disposition expresse, pour autant que la surface voisine mise à contribution pour le calcul de la surface constructible ne puisse plus servir ultérieurement. En l’espèce, la méthode de calcul appliquée était conforme au droit suisse, de sorte que l’IUS de 0,44% pouvait être confirmé. L’argument des voisins relatif à l’absence d’accès juridiquement garanti pour les parcelles nos 8'743 et 9'450 tombait à faux, dès lors qu’il ressortait du texte de l’art. 22 al. 2 let. b LAT que cette exigence se rapportait à un terrain et non à chacune des parcelles le composant.

L’art. 59 al. 4 LCI conférait au département une liberté d’appréciation qui n’était limitée que par l’excès ou l’abus de son pouvoir discrétionnaire. En l’espèce et dans la mesure où l’accord de la commune de Collonge-Bellerive n’était pas obligatoire, le DALE pouvait donner la prééminence au préavis de la CA chargée d’apprécier les qualités esthétiques ou architecturales d’un projet, laquelle était composée de spécialistes en matière d’architecture et d’urbanisme et disposait de connaissances spécifiques. En octroyant la dérogation au rapport de surfaces prévue par l’art. 59 al. 4 LCI, il n’avait pas excédé, ni abusé de son pouvoir d’appréciation.

S’agissant de la surface du projet en sous-sol, la commune devait être admise à soulever son caractère trop important, dans la mesure où la moitié de cette surface était dévolue à un parking souterrain dans la réalisation en sous-sol n’était pas sans lien avec l’aménagement hors-sol des parcelles. En raison d’une lacune improprement dite de la loi, la chambre administrative avait déjà admis la pratique du département qui consistait à ne pas appliquer l’art. 59 al. 9 LCI en cas de taux dérogatoire des rapports de surfaces. En l’espèce, il ressortait des plans visés que la surface en sous-sol du projet était de 998 m2, dont 542,63 m2 correspondaient au parking souterrain. Selon le département, cette seconde surface ne devait pas entrer en ligne de compte dans le calcul du rapport de surface au sens de l’art. 59 al. 9 LCI, en application de l’alinéa 10 de cette même disposition. Validé dans son principe par la jurisprudence, un tel calcul devait être suivi, de sorte que le rapport de surface en sous-sol s’élevait à 20,09% (453.49 : 2'261) et non à 44,14% (998 : 2'261) comme soutenu par la commune. La condition posée par l’art. 59 al. 10 LCI était remplie, la construction d’un parking en sous-sol permettant assurément de renoncer à l’édification de constructions de peu d’importance à destination de garages en surface. La solution retenue impliquant une couverture en toiture jardin améliorait en outre sensiblement la qualité des espaces extérieurs et l’intégration des constructions dans le site.

Les griefs de violation des art. 22 al. 2 let. b LAT et 14 LCI devaient également être rejetés. Il était en l’espèce question de raccorder huit villas (en lieu et place de celle à deux logements existante) au chemin de la Vigneraie, via les chemins du Port et des Usses. Le projet prévoyait la construction de quinze places de parking en sous-sol et de trois places visiteurs en surface, soit dix-huit places au total, qui viendraient s’ajouter à celles des onze villas riveraines. Les chemins de la Vigneraie et des Usses étaient des chemins privés se terminant en impasse. La parcelle n° 7'119 disposait d’une servitude de passage sur le premier. Le chemin du Port appartenait en revanche au domaine public communal. Ces trois chemins constituaient actuellement le seul accès aux douze villas bâties le long de celui de la Vigneraie. Selon le SITG, la largeur de ce dernier variait entre 4,71 m et 5 m, tandis que celle du chemin des Usses oscillait entre 4,26 m et plus de 6 m, déduction faite des places cadastrée, et n’était inférieure à 4 m (3,74 m) qu’à un seul endroit. Les voies d’accès en cause respectaient les exigences prévues par la norme VSS 640 050 qui préconisait une largeur de 3 m pour les accès riverains de types A ou B avec circulation dans les deux sens. Pour le reste, le département avait autorisé le projet litigieux sur la base du préavis favorable de la DGM. Les voisins se contentaient de substituer leur appréciation à celle du DALE et des spécialistes consultés, sans avancer le moindre argument permettant de s’en distancer. Dans sa forme actuelle, le projet litigieux répondait expressément aux exigences de la DGNP qui avait demandé la conservation des arbres situés dans la partie sud-est de la parcelle, proche de la route d’Hermance, s’opposant à toute construction dans le domaine vital des arbres et par voie de conséquence, à un accès depuis cette artère.

La législation genevoise en matière de police des constructions avait enfin pour seul but d’assurer la conformité d’un projet aux prescriptions en matière de constructions et d’aménagement intérieurs et extérieurs des bâtiments et des installations. Elle n’avait pas pour objet de veiller au respect des droits réels, comme les servitudes par exemple. L’argument des voisins, selon lequel les futurs occupants des villas projetées n’auraient pas le droit d’emprunter le chemin des Usses, ressortait au droit privé et échappait dès lors à la compétence du tribunal. En tout état, il apparaissait que les habitants des futures villas pourraient disposer d’un droit de passage nécessaire au sens de l’art. 694 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210), faute de disposer d’autres débouchés sur la voie publique.

21) Par acte du 14 août 2014, les mêmes voisins ont recouru auprès de la chambre administrative contre ce jugement, concluant principalement à son annulation sous suite de frais et dépens. Préalablement, l’apport du dossier de requête en autorisation de construire n° DD 105’226-1 et un transport sur place devaient être ordonnés.

Ils persistaient dans leurs griefs en violation des art. 22 al. 2 let. b LAT et 14 LCI. Le projet ne respectait pas la norme VSS 640 050 sur les accès riverains qui excluait la possibilité de raccorder un bien-fonds contenant plus de quinze places de parking à une simple route d’accès. Dans une telle hypothèse, le bien-fonds concerné devait au minimum être raccordé à une route de desserte de quartier. Selon la norme VSS 640 045, une telle route devait contenir un trottoir au moins, deux voies de circulation, ainsi que la possibilité pour un camion et une voiture de se croiser, ce qui n’était pas le cas des chemins de la Vigneraie et des Usses. La norme VSS 640 050 imposait par ailleurs une largeur supplémentaire de 20 cm de part et d’autres d’une route d’accès lorsque celle-ci longeait une haie ou une clôture. Le projet engendrerait une augmentation du nombre de villas de près de 70 % sur le seul chemin de la Vigneraie. Il impliquerait de ce fait une augmentation très sensible de nombre de véhicules empruntant ce tronçon. Une telle augmentation pouvait d’autant moins être absorbée, que le trafic existant causait déjà des difficultés, en raison d’un détour de 682 m. à parcourir sur des chemins privés exigus qui présentaient deux virages à nonante degrés à hauteur des parcelles nos 7'106 et 4'090. À cela s’ajoutait le fait que des voitures étaient souvent parquées le long du chemin de la Vigneraie ou de celui des Usses, de sorte que la largeur disponible de la route était alors largement inférieure à 3 m. Les considérations du tribunal relatives à la largeur du chemin des Usses étaient arbitraires. De même, le tribunal avait retenu à tort que la DGNP était opposée à la réalisation d’un accès depuis la route d’Hermance. Elle n’avait préavisé négativement le premier projet n° DD 105’226-1 qu’au motif qu’il prévoyait un abattage de tous les arbres sis entre la route d’Hermance et les constructions prévues. L’accès au chemin des Usses par les futurs occupants de villas n’était pas garanti d’un point de vue juridique. Ledit chemin vicinal ne constituait pas une dépendance de la parcelle n° 7'119 et n’était grevé d’aucune servitude de quelque type que ce soit en sa faveur, tandis que ses propriétaires ne toléreraient pas le passage des futurs occupants. Les considérations du tribunal relatives à l’art. 694 CC étaient à cet égard erronées. Le droit de passage évoqué n’existait pas et ne serait pas accordé par les juridictions civiles, puisqu’un accès direct sur le domaine public était possible. Si par impossible un raccordement à la route d’Hermance ne pouvait être réalisé par l’effet de prescriptions de droit public, la situation ne serait pas différente, le Tribunal fédéral ayant jugé qu’il n’appartenait pas dans un tel cas aux règles sur les rapports de voisinage de procurer à un propriétaire un accès au réseau routier.

S’agissant de la densité du projet, un report des droits à bâtir afférents aux parcelles nos 8'743 et 9'450 en faveur de la parcelle n° 7'119 n’était pas admissible au motif qu’aucune de ces deux premières parcelles ne pouvait accueillir une construction prévoyant un accès routier par le chemin de la Vigneraie, faute pour ce dernier d’en être une dépendance. Les droits à bâtir des parcelles nos 8'743 et 9'450 ne pouvaient ainsi pas servir à augmenter la taille d’un projet raccordé à ce chemin, sauf à contourner abusivement l’application de l’art. 22 LAT à l’aide de l’institution du report des droits à bâtir. La situation était la même en matière de réunion parcellaire et de droit de passage. L’art. 974b al. 2 CC prescrivait en effet que lorsque des servitudes étaient inscrites en faveur d’immeubles, ceux-ci ne pouvaient être réunis que si les propriétaires des immeubles grevés y consentaient ou si la réunion n’entraînait aucune aggravation de la charge. Il était exclu de contourner cette interdiction au moyen d’un report des droits à bâtir, institution qui supposait que les droits concernés aient pu juridiquement être exercés en l’absence de report. Le calcul de la densité du projet devait donc s’effectuer non pas sur la base de 2'261 m2, mais sur celle de 1'820 m2, soit après déduction de la surface des deux parcelles concernées. Rapporté à la surface du projet (994,55 m2), l’IUS s’élevait à 0,55, en violation de l’art. 59 al. 4 LCI.

22) Le 19 août 2014, le tribunal a transmis son dossier à la chambre de céans, sans formuler d’observations sur le recours.

23) A cette même date, la commune de Collonge-Bellerive a également recouru auprès de la chambre administrative contre le jugement du 17 juin 2014, concluant à son annulation, ainsi qu’à celle de l’autorisation de construire n° DD 105’679-1 du 3 septembre 2013, sous suite de frais et dépens.

De jurisprudence constante, le préavis communal remplissait une fonction essentielle au regard de l’appréciation des circonstances locales. Il ressortait des différents travaux préparatoires relatifs à l’augmentation des rapports de surfaces autorisés que l’objectif poursuivi par le préavis communal de l’art. 59 al. 4 LCI était de faire office de garde-fous et d’empêcher la réalisation de mauvais projets. En l’espèce, elle avait examiné avec attention l’implantation du projet et avait considéré que celui-ci n’était pas en adéquation avec le quartier. Elle s’était entourée de personnes compétentes, dont une architecte communale diplômée EPFL disposant d’une vision fiable de l’aménagement et du développement de la commune. Or, il était clair que la requérante avait péjoré la qualité du projet au profit de la quantité. Émis sur conseils avisés de spécialistes, son préavis négatif avait une valeur équivalente, voire supérieure à celui de la CA. En tant qu’autorité du lieu de situation, elle était, mieux que tout autre, habilité à juger de la conformité du projet au caractère, à l’harmonie et à l’aménagement du quartier au sens de l’art. 59 al. 4 LCI. En écartant son préavis, le département avait appliqué une solution trop schématique, consistant à donner systématiquement la prééminence au préavis de la CA, sans tenir compte des particularités liées au cas d’espèce. Il avait excédé et abusé de son pouvoir d’appréciation, au détriment du but poursuivi par le législateur.

24) Le 4 septembre 2014, la commune s’est également déterminée sur le recours interjeté par les voisins.

Le report des droits à bâtir des parcelles nos 8'743 et 9'450 en faveur de la parcelle n° 7'119 renforçait, des points de vue visuel et esthétique, l’impression d’un « bourrage de terrain ». Elle souscrivait ainsi aux arguments des voisins critiquant ce report.

25) Le 14 octobre 2014, Pro Swiss a conclu au rejet du recours des voisins sous suite de frais et dépens. Elle reprenait son argumentation de première instance pour contester le bien-fondé de leurs griefs.

Celui tenant au caractère inadmissible d’un report des droits à bâtir était particulièrement hasardeux en tant qu’il soutenait que celui-ci aurait dû donner lieu à l’inscription d’une servitude de non bâtir sur les parcelles d’origine non construites. Les recourants méconnaissaient le fait que les parcelles en cause seraient réunies, puis divisées à nouveau au moment de la vente des villas de manière à ce que chacun de leurs propriétaires disposent des droits à bâtir afférents à son bien-fonds. Les recourants appuyaient leur grief sur des considérations de droits privé, ignorant le fait que celles-ci échappaient à la compétence des juridictions administratives.

En soutenant que seule une servitude de passage sur le chemin de la Vigneraie en faveur des parcelles nos 8'743 et 9'450 constituerait un accès juridiquement garanti au sens de l’art. 22 LAT, les recourants développaient une argumentation incompréhensible. Les propriétaires de la parcelle n° 7'119 étaient en effet disposés à concéder aux futurs habitants des parcelles nos 8'743 et 9'450 le droit de transiter par leur bien-fonds pour accéder au chemin de la Vigneraie. Cela étant, aucune construction n’était prévue sur les deux parcelles en cause.

26) Le 15 octobre 2015, Pro Swiss a également conclu au rejet du recours de la commune, sous suite de frais et dépens.

Lorsque la loi prévoyait le préavis obligatoire de la CA, celui-ci revêtait un caractère prépondérant dans la mesure où elle était composée de spécialistes en architecture. Un tel préavis avait la prééminence sur celui de la commune, de sorte que le département l’avait à raison suivi.

27) À cette même date, le DALE a conclu au rejet des deux recours.

S’agissant de l’équipement des parcelles visées par le projet litigieux, la DGM avait implicitement confirmé que les chemins d’accès prévus étaient suffisants. Le Tribunal fédéral avait pour sa part souligné à plusieurs reprises qu’il fallait et qu’il suffisait que, par sa construction et son aménagement, une voie de desserte soit praticable pour le trafic lié à l’utilisation d’un bien-fonds et qu’elle n’expose pas ses usagers, ni ceux des voies publics auxquelles elle se raccorderait à des dangers excessifs. Ainsi, une voie, bien qu’étroite et sinueuse, remplissait les conditions légales du moment qu’elle permettait à tous les véhicules usuels de gagner les parcelles en cause en respectant les règles de prudence en matière de circulation routière. Un accès était suffisant lorsqu’il présentait des conditions de commodité et de sécurité (pente, visibilité, trafic) tenant compte des besoins des constructions projetées et cela même si, en raison de l’accroissement prévisible du trafic, la circulation devenait moins aisée et exigeait des usagers une prudence accrue.

La garantie d’un accès aux parcelles litigieuse était assurée d’un point de vue juridique, y compris sur le chemin des Usses. Les propriétaires de la parcelle n° 7'119, ainsi que tous ceux des biens-fonds limitrophes appartenant pour certains à des recourants, avaient de tout temps transité par ce chemin vicinal, et bénéficiaient, partant, d’un droit acquis par prescription acquisitive de passer sur celui-ci. La parcelle n° 7'119 était au surplus copropriétaire de l’une des parcelles formant le chemin de la Vigneraie (la parcelle n° 7'120). Cette dernière directement riveraine du chemin des Usses, ainsi que la parcelle n° 7'119, bénéficiaient donc des mêmes droits que ceux retenus en la matière par la jurisprudence en matière de chemin vicinal.

S’agissant du préavis consultatif communal de l’art. 59 al. 4 LCI, il n’avait jamais eu la volonté de le minimiser. Lorsque des questions techniques étaient en jeu, il lui paraissait toutefois logique de lui préférer l’avis d’instances spécialisées, indépendantes et impartiales. Cette pratique, admise par la jurisprudence, n’avait jamais été considérée comme un excès négatif de son pouvoir d’appréciation et était également suivi par les juridictions administratives. La commune de ne démontrait pas que le préavis de la CA était arbitraire, de sorte qu’il était en droit de lui donner la préférence.

28) Le 15 octobre 2014, les voisins se sont ralliés aux arguments de la commune de Collonges-Bellerive en matière de densité excessive du projet.

Le jugement querellé n’indiquait pas les raisons pour lesquelles le préavis négatif de la commune devait nécessairement céder le pas face à la position de la CA qui n’était absolument pas motivée. La démarche consistant à favoriser d’emblée l’avis non motivé de cette commission au détriment de celui de la commune était constitutif d’un excès de pouvoir d’appréciation par le département.

29) Le 26 novembre 2014, le juge délégué a procédé à un transport sur place en présence des parties. Les constats suivants ont été tirés :

a. L’accès à la parcelle n° 7'119 nécessitait d’emprunter le chemin vicinal des Usses puis le chemin privé de la Vigneraie. Ces voies d’accès ne disposaient d’aucun trottoir.

b. Sur le chemin de la Vigneraie, deux véhicules pouvaient se croiser sans difficulté sur la totalité du parcours. L’avocat des recourants a indiqué que tel n’était plus le cas lorsqu’un camion accédait au chemin, le croisement devenant plus difficile. La voisine présente a expliqué que le camion des poubelles effectuait une marche arrière pour accéder au chemin et qu’à une occasion, il avait brisé le miroir de visibilité se trouvant à l’angle du chemin des Usses. La largeur du chemin de la Vigneraie était la même sur toute sa longueur. Mesurée en un point, elle était de 5,05 m . À la hauteur d’une poubelle placée au bord de la route dans l’attente d’être vidée, la route utilisable était de 4,40 m.

c. La largueur du chemin des Usses était supérieure à 5 m, se rétrécissant légèrement à la hauteur des numéros 10 et 12. Deux véhicules étaient parqués à cet endroit sur des emplacements cadastrés. La largeur du chemin des Usses mesurée à ce niveau était de 5,10 m. à la hauteur de l’un des deux véhicules stationnés, soit un véhicule 4x4 Volvo X60, la largeur restante utilisable était de 3,8 m. Dès lors, deux véhicules automobiles ne pouvaient plus s’y croiser.

d. La parcelle n° 8'743, située au nord de la parcelle n° 7'119 montait jusqu’à la route d’Hermance. La parcelle n° 7'119 montait également en pente légère depuis la maison existante. Le projet querellé conserverait les niveaux actuels. La parcelle n° 9'450, située le long de la route d’Hermance, était arborisée et séparée de la parcelle n° 7'119 par un mur. L’ensemble des constructions érigées sur les parcelles situées de part et d’autre de la parcelle n° 7'119, le long de la route d’Hermance, disposaient d’une desserte débouchant directement sur celle-ci. Selon le représentant du département, ces parcelles n’avaient cependant pas d’accès à un chemin privé.

e. Sur la parcelle n° 7'119, plusieurs arbres étaient plantés le long du mur séparant celle-ci de la parcelle n° 9'450, un autre cordon boisé existant également la long de la parcelle voisine n° 8'255, sises au sud. Ce sont ces arbres que la DGNP ne voulait pas voir coupés en émettant son préavis négatif en rapport avec le premier projet de construction. Selon les premiers plans de la DD n° 105’226-1, l’accès devait se faire par le coin nord-est de la parcelle n° 9'450, suivi d’une route en pente longeant celle-ci qui devait desservir les six villas initialement prévues. L’architecte de Pro Swiss a indiqué qu’une telle desserte de la parcelle n° 7'119 par la route d’Hermance avait été refusée par la DGNP, ce que les voisins ont contesté. à leur sens, ce service avait uniquement posé des conditions visant à la conservation de certaines espèces d’arbres. Selon le représentant du DALE, le cordon arborisé existant sur la parcelle n° 9'450 devait être maintenu en raison du bruit du trafic sur la route d’Hermance.

En fin de transports sur place, l’architecte de la commune a expliqué que cette dernière rendait des préavis défavorables lorsque les coefficients étaient trop élevés pour une zone villas. Tel était le cas lorsque le coefficient dépassait 0,32. La commune émettait également des préavis défavorables lorsqu’il y avait des problèmes de perméabilité liés à la densité construite. Jusqu’à ce jour, des accords avaient pu être négociés avec les promoteurs. Le projet de construction initial de six villas avait reçu son aval en application de cette politique.

30) Par observations après enquêtes du 20 janvier 2015, les voisins ont persisté dans leur recours du 14 août 2014.

Il n’était pas exact de retenir que s’agissant du chemin de la Vigneraie, deux véhicules pouvaient se croiser sans difficulté sur la totalité du parcours. Comme cela ressortait du procès-verbal de transport sur place, la largeur du chemin se réduisait à 4,40 m en présence d’une simple poubelle placée sur le bord de celui-ci. Dans ces conditions, un croisement entre deux véhicules était déjà compromis, compte tenu de la largeur moyenne d’une voiture (env. 2 m). Un tel croisement devenait impossible si un véhicule stationnait sur le bord du chemin, comme cela était fréquemment le cas.

Il était de même inexact de prétendre que le projet initial (DD 105’226-1) avait été refusé par la DGNP, comme d’évoquer un quelconque préavis négatif de la part de ce service. Dans son préavis du 31 août 2012 versé à la procédure, la DNGP avait uniquement sollicité un complément d’information consistant dans la fourniture d’un plan d’aménagement paysager mentionnant notamment clairement les arbres à abattre, ceux à conserver, ainsi que les nouvelles plantations projetées. Ledit préavis indiquait encore : « le cordon arboré situé en fond de parcelle, en limite avec la parcelle n° 8'255, doit être préservé ainsi que la végétation la plus en bordure de la route d’Hermance. Dès lors, aucune construction ne doit se situer dans le domaine vital des arbres préservés (aplomb de la couronne, plus 1 m), conformément aux directives de la DNGP en vigueur) ». Il était parfaitement insoutenable de prétendre pour les seuls besoins de la cause que le département avait prétendument refusé la réalisation d’un accès aux parcelles litigieuses depuis la route d’Hermance.

31) à cette même date, Pro Swiss a formulé ses observations après enquêtes, persistant également dans ses conclusions.

Lors du transport sur place, il avait été constaté à juste titre que deux véhicules pouvaient se croiser sans difficulté sur toute la longueur du chemin de la Vigneraie. Lorsqu’une poubelle s’y trouvait, une largeur de 4,40 m demeurait disponible. Or, il avait été décidé lors d’une réunion de l’association des copropriétaires de ce chemin que les poubelles ne devaient pas s’y trouver pour en préserver l’aspect visuel.

Il avait de même été constaté qu’au niveau du véhicule stationné sur le chemin des Usses, demeurait une largeur résiduelle de 3,8 m. Or, le véhicule en cause était parqué en dehors de la place cadastrée, ce qui aurait dû figurer dans le procès-verbal. Avec un véhicule correctement stationné, la largeur résiduelle utilisable était donc supérieure à 4 m.

La chambre administrative ne pouvait pas prendre en compte la politique de la commune qui consistait à rendre un préavis défavorable en cas d’IUS supérieur à 0,32, sauf à annihiler le but poursuivi par le législateur à l’art. 59 al. 1 et 4 LCI.

32) Toujours à cette même date, la commune de Collonge-Bellerive a persisté dans ses conclusions du 19 août 2014, faisant valoir un nouveau grief.

Le 1er octobre 2014, soit postérieurement aux dernières écritures des parties (art. 68 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), le Conseiller d’état en charge du département lui avait adressé un courrier au sujet du préavis communal prévu par l’art. 59 al. 4 LCI.

Ce courrier, qu’elle versait à la procédure, avait notamment la teneur suivante :

« En premier lieu, il sied de rappeler que l’activité de l’administration dans le domaine de la délivrance des autorisations de construire est principalement régie par les principes de légalité des décisions et d’égalité de traitement.

(…)

S’agissant plus particulièrement de la mise en œuvre de l’article 59 al. 4 LCI, l’appréciation de la commission permet au surplus d’assurer une égalité de traitement au plan cantonal dans l’application de cette disposition légale.

Tout en saluant les efforts de votre commune pour s’adjoindre les services de personnes compétentes, vous comprendrez certainement que la nécessité d’une application homogène des principes susmentionnés s’impose.

Cela étant, il va de soi que le département peut suivre le préavis communal lorsqu’il apparaît que la commission d’architecture motive insuffisamment son préavis ».

Ce document révélait que sous réserve d’un préavis clairement défaillant de la CA, la pratique du département consistait à systématiquement ignorer le préavis communal et les particularités locales au nom d’une égalité de traitement à l’échelle cantonale. Si le législateur avait souhaité une telle manière de procéder, il lui eût été loisible de prévoir, à l’art. 59 al. 4 let. a LCI, que la dérogation à l’IUS ne nécessitait que la consultation de la CA. Or, il avait non seulement prévu de solliciter le préavis communal tant dans un cas de dérogation « simple » que de dérogation « qualifiée » au sens de l’art. 59 al. 4 let. b LCI, l’accord de la commune devant, dans cette seconde hypothèse, s’exprimer par voie de délibération municipale. En légiférant de la sorte, le Grand Conseil avait reconnu aux communes genevoises une sphère d’autonomie au sens de l’art. 50 al. 1 de la Constitution fédérale du 18 avril 1999 (RS 101 – Cst.). L’art. 59 al. 4 LCI ne réglait pas de manière exhaustive l’octroi de dérogations, mais laissait ce domaine en tout ou partie dans la sphère communale, conférant par-là aux autorités municipales une liberté de décision relativement importante. Dans pareilles conditions, elle était donc fondée à dénoncer un excès de compétence de l’autorité cantonale. La pratique du département, à l’échelle du canton et dans le cas d’espèce, était à la fois illégale et inconstitutionnelle.

33) Le 20 janvier 2015 encore, le département a renoncé à formuler des observations après enquêtes, persistant dans ses conclusions du 15 octobre 2014.

34) Le 21 janvier 2015, le juge délégué a imparti aux voisins, au département, ainsi qu’à Pro Swiss, un délai au 20 février 2015 pour se déterminer sur le nouveau grief de le la commune.

35) Le 20 février 2015, Pro Swiss s’est déterminée sur la question.

La commune s’était bien gardée de révéler l’existence de ce courrier jusqu’au 20 janvier 2015, soit plus de trois mois après que le Conseiller d’état en charge du déparement le lui eût envoyé, ce qui en disait long sur sa volonté d’user de moyens dilatoires.

Dans son courrier du 1er octobre 2014, le département avait relevé à juste titre : « lorsque la loi recours à des notions juridiques indéterminées, telle que l’esthétique, le département doit s’appuyer dans son évaluation sur l’avis d’experts en la matière. Elle prévoit à ce titre la consultation de commissions officielles. Dans le cas qui nous occupe, le préavis émis par la commission d’architecture, instaurée par la loi sur les commissions d’urbanisme et d’architecture (LCUA) du 24 février 1961 et composée de spécialistes indépendants de l’administration, permet d’assurer une appréciation objective de la situation ».

Dans le système de la LCI, les préavis des communes, des départements et des organismes intéressés n’avaient qu’un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi. Celle-ci ne prévoyait aucune hiérarchie entre les différents préavis requis, mais selon une jurisprudence bien établie, en cas de préavis divergents, la prééminence pouvait être donnée à celui rendu par des spécialistes. Suivre la position de la commune selon laquelle son préavis devrait l’emporter sur celui des commissions spécialisées reviendrait à annihiler le but poursuivi par l’art. 59 al. 1 et 4 LCI.

La commune avait livré une citation tronquée de la jurisprudence du Tribunal fédéral en matière d’autonomie communale. Une commune bénéficiait de la protection de son autonomie dans les domaines que le droit cantonal ne réglait pas de façon exhaustive, mais qu’il laissait en tout ou partie dans la sphère communale, conférant par-là aux autorités municipale une liberté de décision relativement importante. Or, il ne faisait aucun doute que les communes ne bénéficiaient d’aucune autonomie en matière de dérogation dite « simple » au sens de l’art. 59 al. 4 let. a LCI, leur préavis n’étant que consultatif.

36) Le département s’est également déterminé dans le délai imparti.

Comme cela ressortait des travaux préparatoires liés à la modification de l’art. 59 al. 4 LCI, le canton de Genève était depuis de nombreuses années confrontés à une crise du logement que l’exiguïté de son territoire et plus encore de sa zone à bâtir n’avait malheureusement pas permis de combattre de manière satisfaisante. La zone villas représentant une grande partie des terrains constructibles disponibles, le législateur avait décidé une utilisation plus intense de son sol, afin d’éviter des procédures de déclassement.

Pour éviter, pour des raisons d’égalités de traitement évidentes, que certaines communes opposent leur véto à cette densification, le Grand Conseil avait choisi de l’option de la simple consultation des exécutifs communaux. Les projets demeurant soumis à la CA, le département avait toujours considéré que la nouvelle teneur de l’art. 59 al. 4 LCI offrait toutes les garanties nécessaires en matière d’égalité de traitement. C’était ce que le Conseiller d’état avait voulu rappeler dans son courrier du 1er octobre 2014. Le département contestait en revanche l’interprétation selon laquelle ledit courrier révélait une pratique consistant à écarter systématiquement les préavis communaux et les particularités locales. Les propos tenus se référait uniquement à la jurisprudence constante de la chambre administrative selon laquelle la portée du préavis communal, s’il devait dûment être pris en considération, n’équivalait néanmoins pas nécessairement à l’importance du préavis de la CA, autorité technique capable d’émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères au but poursuivi par la loi.

Il n’y avait pas eu de violation de l’autonomie communale en l’espèce. Le département avait bien recueilli l’avis de la commune, même si en définitive il avait suivi la position de la CA. La modification de l’art. 59 al. 4 LCI avait eu pour effet de limiter, si ce n’était de diminuer les compétences jusque-là octroyées aux autorités communales en matière de densification de la zone villas, domaine dans lequel leur autonomie avait été passablement réduite. En outre, dans le canton de Genève, le département était seul compétent pour délivrer les autorisations de construire (art. 2 LCI), les communes ne disposant que d’un droit de préavis consultatif (art. 3 al. 3 LCI). Le département n’étant pas lié par ce dernier, les communes ne pouvaient se prévaloir d’aucune autonomie en la matière.

37) Par déterminations du 20 février 2015, les voisins ont appuyé le nouveau grief de la commune.

Dans son préavis du 11 juin 2013, postérieur à celui de la commune, la CA n’avait pas allégué que le projet serait compatible avec l’harmonie et l’aménagement du quartier, ni qu’il était justifié par les circonstances, deux conditions posées par l’art. 59 al. 4 LCI. Elle n’avait pas motivé, ni justifié d’une quelconque manière sa position. Or, le projet présentait une densité parfaitement inédite pour le quartier, en proposant un habitat groupé de huit constructions cubiques, aux toits totalement plats et entièrement érigées sur la seule parcelle n° 7'119, portant l’IUS sur celle-ci à 0,57% (994,55 m2 / 1'740 m2).

La démarche du département ayant consisté à privilégier d’emblée un préavis lacunaire et non motivé de la CA était arbitraire et entrait en contradiction avec la position exprimée dans le courrier du 1er octobre 2014. Si le législateur avait exigé l’accord préalable de la commune pour des densifications de 50% et plus, ainsi que la consultation obligatoire de la commune pour des densifications de 40% et plus, ce n’était évidemment pas pour que le département adopte une pratique revenant à écarter systématiquement le préavis communal au profit de celui de la CA, dès que ce dernier était motivé, ce qui, en l’espèce, n’était au demeurant pas le cas.

38) Le 26 février 2015, le juge délégué a adressé aux parties une copie des dernières écritures, respectivement les a informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjetés devant la juridiction compétente, les recours sont recevables de ce point de vue (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 149 LCI).

Le jugement querellé a été notifié aux parties le 18 juin 2014. Le délai de recours de trente jours (art. 62 al. 1 let. a LPA) a commencé à courir le 19 juin 2014, a été suspendu du 15 juillet au 15 août inclusivement (art. 63 al. 1 let. b LPA) et est parvenu à échéance le 19 août 2014. Déposés à cette date, respectivement le 14 août 2014, les recours ont été formés en temps utile.

2) Selon l’art. 60 let. a et b LPA, les parties à la procédure qui a abouti à la décision attaquée et toute personne qui est touchée directement par une décision et a un intérêt personnel digne de protection à ce qu’elle soit annulée ou modifiée, sont titulaires de la qualité pour recourir.

Il résulte de la jurisprudence que seuls les voisins dont les intérêts sont lésés de façon directe et spéciale ont l’intérêt particulier requis pas la loi (ATF 133 II 249 consid. 1.3.1 p. 252 ; 133 II 409 consid. 1 p. 411 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_158/2008 du 30 juin 2008 consid. 2). Le recourant doit ainsi se trouver dans une relation spéciale, étroite et digne d'être prise en considération avec l'objet de la contestation. La qualité pour recourir est en principe donnée lorsque le recours émane du propriétaire d’un terrain directement voisin de la construction ou de l’installation litigieuse (ATF 121 II 171 consid. 2b p. 174 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_152/2012 du 21 mai 2012 consid. 2.1 ; 1C_125/2009 du 24 juillet 2009 consid. 1 ; 1C_7/2009 du 20 août 2009 consid. 1 ; ATA/321/2009 du 30 juin 2009; ATA/331/2007 du 26 juin 2007; sur le cas d'une personne qui va devenir voisine de la construction litigieuse : ATA/450/2008 du 2 septembre 2008). La qualité pour recourir peut être donnée en l’absence de voisinage direct, quand une distance relativement faible sépare l’immeuble des recourants de l’installation litigieuse (ATF 121 II 171 consid. 2b p. 174 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_297/2012 consid. 2.3; ATA/220/2013 du 9 avril 2013; ATA/199/2013 précité). La proximité avec l'objet du litige ne suffit cependant pas à elle seule à conférer au voisin la qualité pour recourir contre la délivrance d'une autorisation de construire. Celui-ci doit en outre retirer un avantage pratique de l'annulation ou de la modification de l'arrêt contesté qui permette d'admettre qu'il est touché dans un intérêt personnel se distinguant nettement de l'intérêt général des autres habitants de la commune (ATF 137 II 30 consid. 2 p. 32 ss; 133 II 249 consid. 1.3.1 p. 252 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_565/2012 du 23 janvier 2013 consid. 2.1; 1C_297/2012 du 28 août 2012 consid. 2.2).

En l’espèce, les voisins à l’origine de la présente procédure ont incontestablement tous la qualité pour recourir au sens de l’art. 60 let. b LPA. Ils sont propriétaires de biens-fonds qui jouxtent directement les parcelles concernées par le projet de construction litigieux ou qui sont situés à faible distance de celui-ci, de part et d’autre des seuls chemins permettant d’y accéder.

La qualité pour recourir de la commune de Collonge-Bellerive ne fait pas non plus doute et résulte des art. 145 al. 2 LCI, respectivement 60 al. 1 let. d et e LPA.

3) Les recourants soutiennent que le projet ne pouvait être autorisé en raison d’un défaut d’équipement en voie d’accès, respectivement parce que sa réalisation induirait de graves problèmes de circulation sur les chemins des Usses et de la Vigneraie.

a.              Selon l’art. 22 al. 2 let. b LAT, aucune construction ne peut être autorisée si le terrain n’est pas équipé. Un terrain est réputé équipé lorsqu’il est desservi d’une manière adaptée à l’utilisation prévue par des voies d’accès notamment (art. 19 al. 1 LAT).

b.             Pour qu’une desserte routière soit adaptée au sens de cette dernière disposition, il faut que la sécurité des automobilistes et des autres utilisateurs soit garantie, que le revêtement soit adéquat en fonction du type de véhicules qui vont l’emprunter, que la visibilité et les possibilités de croisement soient suffisantes et que l’accès des services de secours (ambulances, service du feu) et de voirie soit assuré. La règle de l’art. 19 al. 1 LAT poursuit ainsi des buts de police, tandis qu’il appartient au droit cantonal de régler avec plus de précision les caractéristiques des voies d’accès selon leur fonction (André JOMINI, Commentaire de la Loi fédérale sur l’aménagement du territoire, 2010, ad. art. 19, p. 8 n. 19 ; ATA/98/2012 du 21 février 2012 ; ATA/434/1998 du 28 juillet 1998 ; ATA G.-R. du 20 juillet 1993).

c.              Une voie d’accès est adaptée à l’utilisation prévue lorsqu’elle peut accueillir tout le trafic de la zone qu’elle dessert. Un bien-fonds ne peut pas être considéré comme équipé si, une fois construit, son utilisation entraîne un accroissement du trafic qui ne peut être absorbé par le réseau routier et s’il provoque des atteintes nuisibles ou incommodantes dans le voisinage (André JOMINI, op. cit., ad. art. 19, p. 8 n. 20). La loi n'impose toutefois pas des voies d'accès idéales; il faut et il suffit que, par sa construction et son aménagement, une voie de desserte soit praticable pour le trafic lié à l'utilisation du bien-fonds et n'expose pas ses usagers ni ceux des voies publiques auxquelles elle se raccorderait à des dangers excessifs (arrêt du Tribunal fédéral 1C_318/2014 du 2 octobre 2014).

d.             L’art. 14 LCI prévoit dans ce contexte que le département peut refuser les autorisations prévues à l’art. 1 LCI lorsqu’une construction ou une installation peut être la cause d’inconvénients graves pour les usagers, le voisinage ou le public (let. a), ne remplit pas les conditions de sécurité et de salubrité qu’exige son exploitation ou son utilisation (let. b) ne remplit pas les conditions de sécurité ou de salubrité suffisantes à l’égard des voisins ou du public (let. c) ou peut créer, par sa nature, sa situation ou le trafic que provoque sa destination ou son exploitation, un danger ou une gêne durable pour la circulation (let. e). Cette disposition appartient aux normes de protection qui sont destinées à sauvegarder les particularités de chaque zone, en prohibant les inconvénients incompatibles avec le caractère d’une zone déterminée. Elle n’a toutefois pas pour but d’empêcher toute construction dans une zone à bâtir qui aurait des effets sur la situation ou le bien-être des voisins (ATA/801/2014 du 14 octobre 2012 ; ATA/98/2012 du 21 février 2012 ; ATA/100/2011 du 15 février 2011 et les références citées). La construction d’un bâtiment conforme aux normes ordinaires applicables au régime de la zone ne peut en principe pas être source d’inconvénients graves, notamment s’il n’y a pas d’abus de la part du constructeur. Le problème doit être examiné par rapport aux caractéristiques du quartier ou des rues en cause (ATA/86/2015 du 20 janvier 2015 ; ATA/98/2012 du 21 février 2012 ; ATA/453/2011 du 26 juillet 2011 ; ATA/649/2002 du 5 novembre 2002 et les arrêts cités).

4) En l’espèce, le département puis le tribunal se sont fondés sur le préavis favorable rendu par la DGM le 28 juin 2013 pour conclure que le projet n’induirait pas d’inconvénients graves ou durables au sens de l’art. 14 let. a et e LCI et bénéficiait d’un équipement suffisant en voie d’accès.

Selon une jurisprudence bien établie, chaque fois que l'autorité inférieure suit les préavis requis - étant entendu qu’un préavis sans observation équivaut à un préavis favorable (ATA S.I.A. du 18 janvier 1984) - la juridiction de recours doit s'imposer une certaine retenue, qui est fonction de son aptitude à trancher le litige (ATA/100/2005 du 1er mars 2005 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2011, p. 168, n° 508 et la jurisprudence citée). Les autorités de recours se limitent à examiner si le département ne s'écarte pas sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l'autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d’émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/199/2013 du 26 mars 2013 consid. 6; ATA/51/2013 du 29 janvier 2013 consid. 4d; ATA/726/2012 du 30 octobre 2012 consid. 7g; ATA/147/2011 du 8 mars 2011 consid. 14 ; ATA/227/2010 du 27 avril 2010 ; ATA/646/1997 du 23 octobre 1997). La chambre est en revanche libre d’exercer son propre pouvoir d’examen lorsqu’elle procède elle-même à des mesures d’instruction, à l’instar d’un transport sur place (ATA/98/2012 du 21 février 2012 ; ATA/23/2007 du 23 janvier 2007, consid. 5 ; ATA/440/2006 du 31 août 2006, consid. 4c ; ATA/59/2004 du 20 janvier 2004, consid. 5 ; François PAYCHERE, Pouvoir d’examen et pouvoir de décision du Tribunal administratif, RDAF 2000 I, p. 543, et les autres références citées).

Les conclusions de la DGM étant en l’espèce contestées par les recourants, la chambre administrative a procédé à un transport sur place. Elle est donc en mesure d’examiner sans retenue le caractère suffisant de l’équipement en voies d’accès du projet de construction querellé.

5) À Genève, le droit cantonal est muet s’agissant des caractéristiques techniques applicables aux différentes voies d’accès. La DGM se fonde, en général, sur les normes VSS émises par l’Union des professionnels suisses de la route. Cette pratique, qui a cours dans plusieurs cantons, est admise par la doctrine et la jurisprudence (André JOMINI, op. cit., ad. art. 19, p. 10 n. 18). Les normes VSS fixent des standards de largeur de routes en fonction de leur utilisation. Si les services spécialisés peuvent s’y référer, elles n’ont toutefois pas force de loi et leur application dans un cas d’espèce doit en toute hypothèse respecter les principes généraux du droit, dont en particulier celui de la proportionnalité (Piermarco ZEN-RUFFINEN/Christine GUY-ECABERT, op. cit., p. 326 n. 703 et les références citées).

La norme VSS 640 050 fixe les caractéristiques techniques des accès riverains, définis comme des raccordements destinés à l’usage de véhicules routiers (entrées et sorties privées) entre une route publique prioritaire et un bien-fonds générant un trafic de faible intensité (ch. 1). Les recommandations qu’elle contient se réfèrent à des biens-fonds ne comportant pas plus d’une quarantaine de cases ou de places de stationnement pour voitures, les biens-fonds générant davantage de trafic devant également répondre aux exigences des normes sur le stationnement (ch. 3 ; soit la norme VSS 640 291a). La norme VSS 640 050 fixe différents types d’exigences géométriques et d’exploitation que doit remplir un accès riverain suivant le nombre de places de stationnement que compte le bien-fonds à raccorder et la nature de la route prioritaire de destination (cf. tableau 1 ch. 5). Les accès riverains de type A n’exigent par exemple pas qu’un croisement soit possible dans la zone de débouché, au contraire des types B et C. La largeur minimale exigée, lorsqu’il y a circulation dans les deux sens, est en outre de 3 m pour les accès riverains de type A, de 5 m pour le type B et de 5,50 m pour les accès riverains de type C (ch. 7, tableau 2).

En l’espèce, il est question de raccorder huit nouvelles villas (en lieu et place de celle à deux logements existant actuellement sur la parcelle n° 7'119) au chemin du Port, via les chemins de la Vigneraie et des Usses. Le chemin du Port, qui constitue la route prioritaire de destination du projet, revêt les caractéristiques d’une route de desserte de quartier, soit d’une route capable de desservir une zone habitée jusqu’à 300 unités de logement au sens du ch. 8 de la norme VSS 640 045. Les recourants n’en critiquent pas l’aménagement, lequel répond aux exigences de la norme VSS précitée (cf. tableau 1, ch. 8 : deux voies de circulation ; trottoir sur un côté au moins, possibilité pour un camion et une voiture de se croiser à vitesse très réduite, etc.), ni ne contestent qu’il soit apte à absorber le trafic supplémentaire induit par le projet.

La qualification des accès riverains que constituent en l’espèce les chemins de la Vigneraie et des Usses est plus délicate : pris individuellement, ceux-ci présentent les caractéristiques d’un chemin d’accès au sens du ch. 8 de la norme VSS 640 045. Chacun d’eux sert en effet à desservir une petite zone habitée allant jusqu’à trente unités de logement, plus précisément 19 unités pour le chemin de la Vigneraie (en tenant compte du projet de construction querellé) et 32 unités de logement s’agissant du chemin des Usses, selon la cartographie consultable sur le SITG. Parce qu’ils sont raccordés l’un à l’autre et se terminent tous deux par une impasse, ces chemins doivent néanmoins être considérés conjointement et, ce faisant, être qualifiés de routes d’accès au sens du ch. 8 de la norme VSS 640 045 desservant une cinquantaine d’unités de logement.

Le projet querellé prévoit la construction de quinze places de parking en sous-sol et de trois places visiteurs en surface. Ces dix-huit places viendront s’ajouter à celles des onze villas riveraines qui débouchent actuellement sur le chemin de la Vigneraie, de même qu’à celles des villas raccordées au chemin des Usses. Le maximum de quarante places de stationnement étant atteint, le projet devrait respecter les exigences contenues dans la norme VSS 640 291a sur le stationnement. Au vu du préavis favorable rendu par la DGM, l’on peut considérer que tel est bien le cas en l’espèce, ce que les recourants ne contestent pas. En considération des places de stationnement existantes, de celles induites par le projet et des caractéristiques du chemin du Port équivalant à celles d’une route de desserte de quartier, ce sont dont les exigences géométriques et d’exploitation des types A/B qui sont déterminantes pour garantir le bon fonctionnement des chemins de la Vigneraie et des Usses (cf. tableau 1, ch. 5, de la norme VSS 640 050).

Il ressort des constatations faites lors du transport sur place que sur tout son parcours, le chemin de la Vigneraie mesure 5,05 m de large. Sachant que la largeur maximale d’un véhicule automobile ne peut dépasser 2,55 m (art. 64 al. 1 de la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 – LCR – RS 741.01 ; art. 94 al. 2 let. de l’Ordonnance concernant les exigences techniques requises pour les véhicules routiers du 19 juin 1995 – OETV – RS 741.41), cela signifie que deux voitures de tourisme de dimensions moyennes peuvent s’y croiser à vitesse très réduite, sous réserve que des poubelles en attente d’être vidées ne soient pas déposées au bord de la chaussée. Dans cette hypothèse, la largeur disponible s’élève encore à 4,40 m. La largeur du chemin des Usses est, quant à elle, supérieure à 5 m. Aux niveaux des places de stationnement cadastrées en bordure de route, elle diminue légèrement pour atteindre 5,10 m. Lorsqu’une voiture de type 4x4 est parquée sur l’une de ces places, la largeur disponible pour le trafic reste encore de 3,80 m. Sur tout leur tracé, les chemins de la Vigneraie et des Usses se conforment ainsi aux exigences de la norme VSS 640 050 qui préconise une largeur de 3 à 5 m pour les accès riverains de types A/B avec circulation dans les deux sens, comme ceux dont il est question en l’espèce. L’accès des services de secours et de voirie y est également assuré, la largeur minimale de 3,50 m exigée par le ch. 7.4 de la directive n° 7 du règlement d’application de la loi sur la prévention des sinistres, l’organisation et l’intervention des sapeurs-pompiers du 25 juillet 1990 (RPSSP – F 4 05.01) étant respectée.

La configuration des lieux convainc pour le reste du caractère adapté des voies d’accès en cause par rapport à l’utilisation prévue. Supérieur à 90°, l’angle de giration entre le chemin de la Vigneraie et celui des Usses permet à des voitures de se croiser et aux camions de la voirie de manœuvrer pour entrer, comme ils ont l’habitude de le faire, en marche arrière dans le premier chemin cité. Il est également possible pour des véhicules de se croiser au niveau du débouché sur le chemin du Port, lequel est marqué par un stop. Certes, il aurait été préférable que le chemin des Usses dispose d’un trottoir ou d’une voie latérale ou mixte, tel que préconisés par la norme VSS 640 045 (ch. 8, tableau 1). Mais il serait disproportionné d’empêcher la construction de huit villas supplémentaires dans la zone en question en raison de l’absence de ce seul aménagement. Les art. 22 al. 2 let. b et 19 LAT n’imposent en effet pas des voies d’accès idéales, mais requièrent uniquement que leurs usagers ne soient pas exposés à des dangers excessifs. Or, la sécurité des piétons empruntant les chemins de la Vigneraie et des Usses n’apparaît pas compromise par la réalisation du projet, compte notamment tenu de la vitesse très réduite à laquelle les automobilistes sont contraints de circuler sur ce type de voies, comme de leur tracé pratiquement rectiligne qui offre de bonnes conditions de visibilité.

Si la construction de huit villas supplémentaires aura incontestablement des effets sur la situation des voisins et leur imposera notamment de circuler avec une plus grande prudence, elle ne sera pas pour autant source d’importantes nuisances, ni n’induira un trafic supplémentaire incompatible avec les caractéristiques d’un quartier de villas qui compte déjà une quarantaine d’unités de logement.

Des considérations qui précèdent, il ressort que les conclusions de la DGM et du département peuvent être suivies. Les voies d’accès aux parcelles nos 7'119, 8'743 et 9'450 revêtent des caractéristiques suffisantes, d’un point de vue technique, pour assurer la desserte des nouvelles constructions projetées, lesquelles n’engendreront pas d’inconvénients graves au sens de l’art. 14 LCI. Les griefs soulevés en la matière seront donc rejetés.

6) a. La législation cantonale en matière de police des constructions a pour seul but d’assurer la conformité des projets présentés aux prescriptions en matière de constructions et d’aménagements, intérieurs et extérieurs, des bâtiments et des installations. Elle réserve expressément le droit des tiers. Selon les principes généraux du droit, il n’appartient donc pas à l’administration de s’immiscer dans les conflits de droit privé pouvant s’élever entre le requérant d’une autorisation de construire et un opposant, celle-ci n’ayant pas pour objet de veiller au respect des droits réels et notamment des servitudes (art. 3 al. 6 LCI ; ATA/442/2015 du 12 mai 2014 ; ATA/752/2014 du 23 septembre 2014 ; ATA/719/2013 du 29 octobre 2013).

b. Les autorités administratives n’en sont pas moins tenues de respecter les conditions spécifiques auxquelles le droit fédéral soumet la délivrance des autorisations de construire, soit les art. 22 al. 2 lit. b et 19 LAT en particulier. Or, un terrain est équipé au sens de ces dispositions non seulement lorsque l’aménagement d’un accès suffisant aux futures constructions est techniquement possible, mais également lorsqu’il est juridiquement garanti. Pour qu’un terrain soit considéré comme équipé, il doit ainsi être raccordé soit à une route du domaine public, soit à une route privée que les utilisateurs des futures constructions ont le droit d’emprunter (chemin en copropriété, servitude de passage, etc. ; André JOMINI, op. cit., ad. art. 19, p. 10 n. 23 ;
Piermarco ZEN-RUFFINEN/Christine GUY-ECABERT, Aménagement du territoire, construction, expropriation, 2001, p. 326 n. 705 ss).

c. Interprétées conjointement, ces dispositions signifient que le requérant d’une autorisation de construire doit démontrer aux autorités administratives que la voie d’accès prévue sur un immeuble appartenant à autrui dispose d’un fondement juridique (ATF 136 II 120 = JdT 2010 I 201, consid. 3.3.2 in fine et les références citées). Si les éléments de preuve fournis rendent vraisemblable que le terrain destiné à être construit dispose d’un accès suffisant en vertu du droit privé, il revient alors aux propriétaires des terrains grevés de démontrer le contraire (ATF 1C_245/2014 du 10 novembre 2014 consid. 4.1 et les références citées).

En l’espèce, le chemin privé de la Vigneraie est formé de deux parcelles de dépendance nos 7'120 et 8'744. La parcelle n° 7'119 compte parmi les immeubles principaux auxquels la parcelle n° 7'120 est rattachée, de sorte que les propriétaires de la première citée sont également copropriétaires de la seconde et ont, à ce titre, le droit de l’emprunter (art. 655a al. 1 CC ;
Paul-Henri STEINAUER, Les droits réels, Tomme II, 2012, n. 1521i ss). En outre, les parcelles de dépendance nos 7'120 et 8'744 sont chacune grevées d’une servitude de passage à véhicule, lesquelles sont toutes deux inscrites au registre foncier (sous les numéros 71'653 et 71'655) et bénéficient vraisemblablement aux parcelles riveraines, dont la parcelle n° 7'119. Les extraits pertinents du registre des servitudes n’ayant pas été versés à la procédure, cette conclusion peut se déduire de l’absence de contestation, de la part des recourants, du droit des propriétaires de la parcelle n° 7'119 d’emprunter le chemin de la Vigneraie.

Les voisins concentrent en effet leur critique sur le chemin des Usses que les propriétaires de la parcelle n° 7'119 n’auraient, à leur sens, pas le droit d’emprunter. Cette allégation, qui n’est étayée par aucun moyen de preuve spécifique, est toutefois contredite par les données du registre foncier librement accessibles sur Internet. Selon celles-ci, le chemin des Usses se compose de deux parcelles : la parcelle n° 3'413, qui débouche sur le chemin du Port, et la parcelle n° 7'833 qui donne accès au chemin de la Vigneraie. La parcelle n° 3'413 est une parcelle de dépendance dont les propriétaires de la parcelle n° 7'119 sont copropriétaires. Cette dernière figure en effet parmi la liste des immeubles principaux auxquelles la parcelle n° 3'413 est rattachée, de sorte que les propriétaires de la première peuvent également emprunter la seconde.

La parcelle n° 7'833 est quant à elle cadastrée en tant que chemin vicinal. Le droit genevois antérieur à l’entrée en vigueur du CC définissait cette institution comme un terrain servant de passage aux propriétaires de plusieurs parcelles et dont le sol n’est attribué ni à l’état, ni à la commune (art. 115 et suivants du règlement sur le cadastre du 14 octobre 1844 ; Claude AUER, Les chemins vicinaux de l’ancien droit civil genevois, SJ 1999 II p. 41). Sous le nouveau droit fédéral, un tel chemin équivaut, en principe, à une copropriété dépendante de la propriété des parcelles riveraines selon la jurisprudence du Tribunal fédéral (ATF 5A_866/2008 du 8 mai 2009 consid. 4.4 ; ATF 5C.120/1997 du 1er janvier 1997 publié in SJ 1998 P. 287). Il en résulte qu’en tant que copropriétaires des parcelles nos 7'120 et 3'413, soit de biens-fonds riverains du chemin vicinal cadastré sous n° 7’833, les propriétaires de la parcelle n° 7'119 ont également le droit d’emprunter celui-ci.

Ces considérations permettent de conclure que l’accès aux futures villas, tel qu’il est prévu par le projet de construction querellé, est non seulement suffisant d’un point de vue technique, mais également garanti d’un point de vue juridique, faute pour les recourants d’apporter la preuve du contraire. Pour le reste, il n’appartient pas à la chambre administrative de se prononcer sur la légalité et encore moins sur l’opportunité d’un hypothétique accès depuis la route d’Hermance, dans la mesure où celui-ci n’est pas prévu par l’autorisation de construire n° DD 105’679-1.

Le grief en violation des art. 22 al. 2 lit. b et 19 LAT sera, partant, écarté.

7) Les voisins invoquent également une violation de l’art. 59 al. 4 let. a LCI, au motif que la densité du projet serait trop élevée. Le report des droits à bâtir afférents aux parcelles nos 8'743 et 9'450 en faveur de la parcelle n° 7'119 contournerait abusivement l’application des art. 22 LAT et 974b al. 2 CC. La densité du projet devrait ainsi se mesurer en tenant uniquement compte de la surface de la parcelle n° 7'119 et serait, avec un IUS de 0,55, trop élevée.

a. Selon l’art. 59 al. 4 let. a LCI, lorsque les circonstances le justifient et que cette mesure est compatible avec le caractère, l’harmonie et l’aménagement du quartier, le département peut autoriser, après consultation de la commune et de la commission d’architecture, un projet de construction en ordre contigu ou sous forme d’habitat groupé dont la surface de plancher habitable n’excède pas 40% de la surface du terrain, 44% lorsque la construction est conforme à un standard de haute performance énergétique, 48% lorsque la construction est conforme à un standard de très haute performance énergétique, reconnue comme telle par le service compétent.

b. Selon la jurisprudence, rien n’empêche le propriétaire d’une parcelle quelconque, petite ou moyenne, d’acquérir une parcelle contiguë pour pouvoir augmenter la surface constructible de sa propriété ; et s’il peut acquérir une nouvelle parcelle dans ce but, il peut aussi, dans le même but, adopter cette autre solution qui consiste à convenir avec un propriétaire voisin que ce dernier mette à disposition, pour le calcul de la surface constructible, une surface de terrain qui n’a pas déjà servi à un tel calcul pour un bâtiment existant. Une telle manière de faire est admise en droit suisse, même sans disposition expresse, l’essentiel étant que la surface voisine mise à contribution pour le calcul de la surface constructible ne puisse plus servir ultérieurement à un tel calcul, ce qui implique pratiquement qu’elle soit grevée d’une servitude de non bâtir au profit de la collectivité. En d’autres termes, une surface de terrain qui a déjà été prise une fois en compte pour le calcul d’une surface bâtie ne peut plus l’être par la suite (ATF 101 Ia 289 = JdT 1997 I 93 ; ATA/98/2012 du 21 février 2012 consid. 6 ; ATA/453/2011 du 26 juillet 2011 consid. 11 ; ATA/568/2006 du 31 octobre 2006 ; ATA/361/2003 ; ATA P. du 28 juin 1994 ; ATA M. du 14 juin 1989). La constitution d’une servitude n’est toutefois pas indispensable pour empêcher la prise en compte ultérieure, lors d’un calcul de densité, de droits à bâtir cédés ou déjà utilisés, l’essentiel étant qu’une telle cession soit connue du département chargé de la délivrance des autorisations de construire (ATA P. du 18 juin 1994, consid. 2 in fine). En effet, l’interdiction d’utiliser, pour le calcul de la surface constructible, tout ou partie de la surface ayant déjà servi à un tel calcul existe, à l’instar des autres restrictions de droit public à la propriété, indépendamment de son inscription au registre foncier en vertu de l’art. 680 al. 1 CC (ATF 111 Ia 182, consid. 4 p. 83 ; arrêts du Tribunal fédéral 1P.586/2004 du 28 juin 2005 consid. 4.6 publié in ZBl 107/2006 p. 369 ; 1P. 143/1996 du 5 août 1996, consid. 3b/aa reproduit in JAB 1997 p. 220 ; 2A.116/1994 du 21 décembre 1994 consid. 3c reproduit in RDAT 1995 II n° 57 p. 151 ; 1P.762/1993 du 25 mai 1994 consid. 3cb ; 1P.423/1992 du 12 janvier 1993 consid. 3a).

En l’espèce, il n’est pas contesté que les huit villas projetées soient des constructions en ordre contigu au sens de l’art. 58 al. 2 LCI, ni qu’elles remplissent les exigences du label Minergie, soit d’un standard de très haute performance énergétique.

Pour calculer l’IUS, le département a pris en compte non seulement la surface de la parcelle n° 7'719 (1'740 m2), sur laquelle les futures constructions seront érigées, mais également celles des parcelles contiguës nos 8'743, 9'450 et 7'120 (91 m2, 350 m2 et 80 m2), en mains des mêmes propriétaires. Rapportant la surface brute de plancher des constructions hors-sol prévu par le projet (994,50 m2) à la surface totale du terrain disponible (2'261 m2), il a conclu au respect de l’IUS prévu par l’art. 59 al. 4 let. a LCI (994,50 : 2'261 = 0,44, soit un rapport de surfaces de 44%).

La méthode de calcul utilisée ne souffre aucune critique et n’apparaît pas abusive. Conformément à la jurisprudence précitée, un report des droits à bâtir afférents aux parcelles nos 8'743, 9'450 et 7'120 en faveur de la parcelle n° 7'119 peut être effectué, dans la mesure où ces biens-fonds sont contigus et actuellement détenus par les mêmes propriétaires. Le fait qu’une part de copropriété de la parcelle n° 7'120 ne soit rattachée qu’à la parcelle n° 7'119, à l’exclusion des parcelles nos 8'743 et 9'450, ne prive au demeurant pas ces dernières de leurs droits à bâtir, ni de la faculté pour un propriétaire d’en user sur le bien-fonds voisin.

Un tel procédé ne contrevient pas plus à l’art. 22 al. 2 let. b LAT qui, comme l’a relevé le TAPI, n’exige pas que chaque parcelle située en zone à bâtir soit pourvue d’un accès propre, mais uniquement que celles destinées à la construction soient équipées de la sorte. Dans le cas d’espèce, il suffit donc de constater que la rampe d’accès au parking commun sera implantée sur la parcelle n° 7'119, elle-même raccordée au chemin de la Vigneraie, pour admettre la conformité du projet au droit de la construction.

Pour le reste, il n’appartient pas à la chambre administrative de se prononcer sur la conformité à l’art. 974b al. 3 CC du projet de réunion/division des parcelles nos 7'119, 8'743 et 9'450 envisagé par l’intimée. La question de savoir si ce dernier entraînerait une aggravation des servitudes grevant les parcelles nos 8'744 ou 7'120, de sorte qu’elle serait soumise à l’accord des copropriétaires desdits biens-fonds, ressortit en effet au droit privé et n’a pas à être tranchée par les autorités administratives chargées de la délivrance d’une autorisation de construire. Comme rappelé ci-dessus, la législation en matière de police des constructions réserve expressément les droits des tiers (art. 3 al. 6 LCI) et n’a pas pour objet de veiller au respect des droits réels, comme des servitudes par exemple (ATA/442/2015 du 12 mai 2015 consid. 3 ; ATA/752/2014 du 23 septembre 2014).

Le grief tenant dans la violation de l’art. 974b al. 3 CC sera, en conséquence, écarté.

8) Pour la commune, la densité du projet querellé serait incompatible avec le caractère, l’harmonie et l’aménagement du quartier, condition posée par l’art. 59 al. 4 LCI qu’elle serait la mieux à même d’apprécier. En écartant son préavis défavorable au profit de celui rendu par la CA, le département aurait ainsi abusé de son pouvoir d’appréciation. Les courriers échangés avec le chef du département en cours de procédure attesteraient en outre d’une pratique systématique consistant à ignorer le préavis communal, en violation de la disposition précitée et de l’autonomie communale garantie par l’art. 50 al. 1 Cst.

a. L’art. 50 al. 1 Cst. dispose que l’autonomie communale est garantie dans les limites fixées par le droit cantonal. Selon la jurisprudence, une commune bénéfice de la protection de son autonomie dans les domaines que le droit cantonal ne règle pas de manière exhaustive, en lui laissant une liberté de décision relativement importante. L’existence et l’étendue de l’autonomie communale dans une matière concrète sont déterminées essentiellement par la constitution et la législation cantonales (ATF 138 I 131 consid. 7.1 ; ATF 128 I 3 consid. 2a ; ATF 124 I 223 consid. 2b).

b. L’art. 59 al. 4 let. a LCI est issue d’une modification législative qui visait à promouvoir une utilisation plus intensive du sol en zone villas pour répondre à la crise du logement sévissant à Genève (cf. l’exposé des motifs du PL 10'891 disponible sur http://ge.ch/grandconseil/data/texte/PL10891.pdf). Adoptée le 30 novembre 2012 et entrée en vigueur le 26 janvier 2013, cette modification a, tout d’abord, porté l’IUS usuellement applicable dans ladite zone de 0,2 à 0,25 (0,275 lorsque la construction est conforme à un standard de haute performance énergétique et 0,3 lorsqu’elle est conforme à un standard de très haute performance énergétique ; art. 59 al. 1 LCI). Pour les projets de construction en ordre contigu ou sous forme d’habitat groupé, le législateur a, ensuite, augmenté, dans la mesure rappelée ci-dessus, les IUS dérogatoires susceptibles d’être autorisés par le département après consultation de la commune et de la CA (art. 59 al. 4 let. a LCI). Pour des projets de même type, mais implantés sur une parcelle ou un ensemble de parcelles contiguës d’une surface supérieure à 5'000 m2, des IUS dérogatoires encore plus élevés ont été prévus (0,5, 0,55 lorsque la construction est conforme à un standard de haute performance énergétique et 0,6 lorsqu’elle est conforme à un standard de très haute performance énergétique), sous réserve que le département obtienne l’accord de la commune exprimé sous forme de délibération municipale et consulte ici encore la CA (art. 59 al. 4 let. b LCI).

Au cours des travaux préparatoires, certains députés ont regretté le fait que la densification de la zone villas prévue par l’art. 59 al. 4 let. a LCI ne soit pas soumise aux mêmes conditions que la let. b, soit à l’accord de la commune exprimé sous forme de délibération municipale. Lors des travaux en commission (cf. rapport de la commission d’aménagement du canton du 28 août 2012, PL 10’891-A, disponible sur http://ge.ch/grandconseil/data/texte/PL10891A.pdf), puis lors des débats en plénum (MGC [en ligne], Séance 9 du 30 novembre 2012 à 20h30, disponible sur http://ge.ch/grandconseil/memorial/seances/570402/9/5/), des amendements en ce sens ont été présentés, mais n’ont pas reçu l’aval de la majorité des députés. Le législateur a en effet considéré que l’accord du conseil municipal de la commune concernée ne devait être requis que pour les projets de construction de plus grande envergure, soit ceux remplissant les conditions prévues par l’art. 59 al. 4 let. b LCI. Il a considéré que dans le cas de figure prévu par l’art. 59 al. 4 let. a LCI, la nécessité d’obtenir un tel accord compromettrait l’objectif de densification poursuivi (Ibidem).

c. Avant d’autoriser un projet de construction en zone villas, dont la densité correspond à celle prévue par l’art. 59 al. 4 let. a LCI, le département doit ainsi recueillir les appréciations de la CA, respectivement celles de la commune du lieu de situation exprimées sous forme de préavis rendu par l’exécutif municipal (art. 48 let. h et 30 al. 1 let. s a contrario de la loi sur l’administration des communes du 13 avril 1984 - LAC - B 6 05).

Il résulte de cette double consultation que le législateur n’a pas attribué de pouvoir de décision aux communes concernant l’octroi d’autorisation de construire un projet présentant l’un des IUS dérogatoires prévus par l’art. 59 al. 4 let. a LCI. Conformément à l’art. 3 al. 3 LCI, la délivrance de telles autorisations de construire demeure de la compétence exclusive du département à qui il appartient de statuer en tenant compte de tous les intérêts en présence.

La problématique soulevée en l’espèce par la commune ne relève ainsi pas de la protection de son autonomie communale, mais uniquement de la question de savoir si le département a excédé ou abusé de son pouvoir d’appréciation en passant outre son opposition.

Le département aurait-il choisi d’ignorer systématiquement les préavis communaux recueillis en application de l’art. 59 al. 4 let. a LCI, qu’une telle pratique ne serait pas inconstitutionnelle, mais pourrait tout au plus aboutir à des décisions illégales que la chambre de céans ne manquerait alors pas de sanctionner à chaque fois qu’elle en serait saisie.

Au vu de ce qui précède, le grief tenant dans une violation de l’autonomie communale garantie par l’art. 50 Cst. tombe à faux et sera, partant, rejeté.

9) Il reste à déterminer si la pesée des intérêts à laquelle le département s’est livré dans le cas d’espèce n’aboutit pas à un résultat illégal.

a. Lorsque la loi autorise l'autorité administrative à déroger à l'une de ses dispositions, notamment en ce qui concerne les constructions admises dans une zone, elle confère à cette autorité un pouvoir d'appréciation qui n’est limité que par l’excès ou l’abus, la chambre de céans n’ayant pas compétence pour apprécier l’opportunité des décisions prises (art. 61 al. 2 LPA).

b. La compatibilité du projet avec le caractère, l’harmonie et l’aménagement du quartier exigée par l’art. 59 al. 4 LCI constitue en outre une clause d’esthétique, analogue à celle contenue à l’art. 15 LCI. Une telle clause fait appel à des notions juridiques imprécises ou indéterminées, dont le contenu varie selon les conceptions subjectives de celui qui les interprète et selon les circonstances de chaque cas d'espèce ; ces notions laissent à l'autorité une certaine latitude de jugement. Lorsqu'elle estime que l'autorité inférieure est mieux en mesure d'attribuer à une notion juridique indéterminée un sens approprié au cas à juger, l'autorité de recours s'impose alors une certaine retenue. Il en va ainsi lorsque l'interprétation de la norme juridique indéterminée fait appel à des connaissances spécialisées ou particulières en matière de comportement, de technique, en matière économique, de subventions et d'utilisation du sol, notamment en ce qui concerne l'esthétique des constructions (ATA/653/2014 du 19 août 2014 ; ATA/849/2005 du 13 décembre 2005 et la jurisprudence citée).

c. Dans le système de la LCI, les avis ou préavis des communes, des départements et organismes intéressés ne lient pas les autorités (art. 3 al. 3 LCI). Ils n'ont qu’un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi ; l’autorité reste ainsi libre de s’en écarter pour des motifs pertinents et en raison d’un intérêt public supérieur (ATA/51/2013 du 21 janvier 2013 ; ATA/719/2011 du 22 novembre 2011 et les références citées). Toutefois, lorsqu'un préavis est obligatoire, il convient de ne pas le minimiser (ATA/417/2009 précité ; ATA/902/2004 du 16 novembre 2004 ; ATA/560/2004 du 22 juin 2004 ; ATA/253/1997 du 22 avril 1997). Dans le système prévu par l’art. 59 al. 4 let. a LCI, tant le préavis de la commune que celui de la CA ont cette caractéristique.

En l’espèce, la CA a examiné le projet de construction querellé à deux reprises, soit le 9 avril 2013 et le 11 juin 2013. À cette seconde date, elle a considéré que les modifications apportées par l’intimée en cours de procédure répondaient à ses exigences et a donné son aval pour une dérogation en matière de densité dans la mesure prévue par le projet (44%). Bien que sommairement motivé, ce préavis favorable ne souffre aucune ambiguïté. Il signifie clairement que cette autorité technique consultative, composée de spécialistes en la matière, a jugé le projet comme étant compatible avec le caractère, l’harmonie et l’aménagement du quartier. Par préavis défavorable tout aussi sommairement motivé, la commune s’est en revanche opposée au projet, jugeant sa densité trop élevée et incompatible avec l’harmonie et l’aménagement du quartier. Elle s’est prononcée après s’être adjointe les services d’un spécialiste, soit d’un architecte communal diplômé de l’EPFL. Confronté à deux préavis obligatoires contradictoires, le département a, quant à lui, choisi de suivre celui de la CA.

Dans les circonstances d’espèce, il n’apparaît pas qu’en statuant dans ce sens, le département aurait excédé ou abusé de son pouvoir d’appréciation. Comme l’a relevé la commune, le projet querellé ne présente effectivement pas les mêmes caractéristiques architecturales que les villas individuelles bordant le chemin de la Vigneraie ou celui des Usses. Il consiste dans un autre type d’habitat, dit en ordre contigu, dont l’implantation modifiera, à terme, la configuration de la zone villas telle qu’elle s’est développée jusqu’ici. Le législateur avait toutefois pleinement conscience de cette évolution et souhaitait même encourager la réalisation de ces nouvelles formes d’habitat (groupé ou en ordre contigu), lorsqu’il a augmenté les IUS dérogatoires susceptibles d’être appliqués dans cette zone (cf. l’intervention de Monsieur Christophe AUMEUNIER, rapporteur de majorité, lors du premier débat consacré au PL 10'891, MGC [en ligne], Séance 9 du 30 novembre 2012 à 20h30, disponible sur http://ge.ch/grandconseil/memorial/seances/570402/9/5/). Il a considéré cette évolution comme une réponse utile et nécessaire par rapport aux problèmes de l’exiguïté du territoire et de la pénurie de logements et a renoncé à qu’une telle densification de la zone villas soit soumise à l’accord des communes, afin de garantir l’application de l’art. 59 al. 4 let. a LCI partout où elle pouvait avoir lieu.

Les raisons qui motivent l’opposition de la commune, à savoir le fait que le projet propose une image architecturale inédite pour le quartier et présente un IUS supérieur à la limite qu’elle considère comme admissible (0,32 selon les déclarations faites en transport sur place), ne sont pas compatibles et contreviennent au but poursuivi par le législateur. Le département pouvait donc s’en écarter au nom de l’intérêt public supérieur à ce que l’objectif de densification de la zone villas, poursuivi par le législateur, soit respecté. Il le pouvait d’autant plus que le second préavis obligatoire, rendu par une commission composée de spécialistes en matière architecturale, concluait à la compatibilité esthétique du projet.

Ce faisant, le département a correctement pesé les intérêts contradictoires en présence, le grief de violation de l’art. 59 al. 4 let. a LCI tombant également à faux.

10) En tout point mal fondé, les recours seront rejetés.

Un émolument de CHF 3'000.- sera mis à la charge des recourants, à hauteur de CHF 2'000.- s’agissant des voisins pris conjointement et solidairement et de CHF 1'000.- s’agissant de la commune de Collonge-Bellerive, puisque cette dernière n’est pas l’auteure de la décision querellée et succombe pareillement dans la présente procédure (art. 87 al. 1 LPA). Une indemnité de procédure de CHF 2'000.-, sera en outre allouée à l’intimée qui en a requis l’octroi, dont CHF 1'000.- seront mis à la charge des voisins pris conjointement et solidairement et CHF 1'000.- à la charge de la commune de Collonge-Bellerive.

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 14 août 2014 par Madame Joyce et Monsieur Jean-Jacques ANTENEN, Monsieur Antoine CASANOVA, Monsieur Bernard DE COULON, Madame Vera et Monsieur Marcel DUIN, Monsieur John HEPTONSTALL, Monsieur Eric KUHNE, Monsieur Peter LOCHER, Madame Zina et Monsieur Walid Edmond MOUKARZEL, Monsieur Pierre-Yves PILLONEL, Madame Erika REIS, Monsieur Massimo TONI, Madame Marie-Rose TUDEAU et Madame Gertrud et Monsieur Franz ZUMSTEIN contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 17 juin 2014 (JTAPI/663/2014) ;

déclare recevable le recours interjeté le 19 août 2014 par la commune de Collonge-Bellerive contre le même jugement ;

au fond :

les rejette ;

met à la charge de Madame Joyce et Monsieur Jean-Jacques ANTENEN, Monsieur Antoine CASANOVA, Monsieur Bernard DE COULON, Madame Vera et Monsieur Marcel DUIN, Monsieur John HEPTONSTALL, Monsieur Eric KUHNE, Monsieur Peter LOCHER, Madame Zina et Monsieur Walid Edmond MOUKARZEL, Monsieur Pierre-Yves PILLONEL, Madame Erika REIS, Monsieur Massimo TONI, Madame Marie-Rose TUDEAU et Madame Gertrud et Monsieur Franz ZUMSTEIN, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 2'000.- ;

met à la charge de la commune de Collonge-Bellerive un émolument de CHF 1'000.- ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 2'000.- à Pro Swiss Invest SA, à charge de Madame Joyce et Monsieur Jean-Jacques ANTENEN, Monsieur Antoine CASANOVA, Monsieur Bernard DE COULON, Madame Vera et Monsieur Marcel DUIN, Monsieur John HEPTONSTALL, Monsieur Eric KUHNE, Monsieur Peter LOCHER, Madame Zina et Monsieur Walid Edmond MOUKARZEL, Monsieur Pierre-Yves PILLONEL, Madame Erika REIS, Monsieur Massimo TONI, Madame Marie-Rose TUDEAU et Madame Gertrud et Monsieur Franz ZUMSTEIN, pris conjointement et solidairement à hauteur de CHF 1'000.-, ainsi que de la commune de Collonge-Bellerive à hauteur de CHF 1'000.- également ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de croit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Mes Gabriel Raggenbass et Jean-Marc Siegrist, avocats des recourants, au département de l'aménagement, du logement et de l'énergie, à Me Pascal Pétroz, avocat de l'intimée, ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeants : Mme Junod, présidente, MM. Dumartheray et Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

M. Vuataz Staquet

 

la présidente siégeant :

 

 

Ch. Junod

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :