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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/744/2010

ATA/269/2012 du 08.05.2012 sur DCCR/1581/2010 ( LDTR ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/744/2010-LDTR ATA/269/2012

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 8 mai 2012

 

 

dans la cause

 

X______
représentée par Me Yves Bonard, avocat

contre

DÉPARTEMENT DES CONSTRUCTIONS ET DES TECHNOLOGIES DE L’INFORMATION

_________


 

Recours contre la décision de la commission cantonale de recours en matière administrative du 1er novembre 2010 (DCCR/1581/2010)


EN FAIT

1. X______ (ci-après : X______) est propriétaire d’un immeuble d’habitation cadastré sous n° ______, sis ______ au Petit-Saconnex. La gérance de l’immeuble est assurée par la régie N______. (ci-après : la régie).

2. Le 24 juillet 2006, cette dernière a conclu un contrat de bail prenant effet le 15 août 2006 avec Monsieur Y______ et Madame Z______ portant sur un appartement de 4 pièces au 4ème étage de l’immeuble précité. Ils se sont également fait remettre un exemplaire complété de la formule officielle approuvée par arrêté du Conseil d’Etat du 23 juin 1993 portant « avis de fixation du loyer lors de la conclusion d’un nouveau bail » (ci-après : la formule d’avis de fixation du loyer initial), dans laquelle avait été repris le montant du loyer annuel de l’appartement, CHF 30’000.- plus CHF 2’040.- de charges, et qui rappelait le montant du loyer du locataire précédant, soit CHF 9'600.- par an.

3. Un contentieux a éclaté au sujet de travaux de rénovation effectués avant que M. Y______ et Mme Z______ n’entrent dans les locaux par X______ sans requérir d’autorisation. L’Association genevoise de défense des locataires (ci-après : Asloca), agissant au nom des locataires précités, avait dénoncé les faits au département des constructions et des technologies de l’information (ci-après : DCTI) par courrier du 21 janvier 2008, ce qui avait entraîné l’ouverture le 5 février 2008 d’une enquête de la part de celui-ci.

4. M. Y______ et Mme Z______ ont résilié leur bail pour la fin du mois d’avril 2008 et ont été remplacés par Monsieur A______ et Madame B______. Leur loyer a été fixé sans les charges à CHF 30’000.- par an du 1er mai 2008 au 30 avril 2009, puis à CHF 31’200.- du 1er mai 2009 au 30 avril 2010 et à CHF 32’400.- dès le 1er mai 2010, selon une clause d’échelonnement se référant à l’art. 269b de la loi fédérale complétant le Code civil suisse du 30 mars 1911 (Livre cinquième : Droit des obligations (CO - RS 220). Ces éléments figuraient dans un contrat de bail signé le 25 avril 2008 entre les parties. Ils avaient été repris dans la formule d’avis de fixation du loyer initial qui avait été remise aux locataires et qui mentionnait, comme dernier loyer annuel du locataire précédent, un montant de CHF 30'000.- par an.

5. Par décision du 22 mai 2008, le DCTI a ordonné à X______ de déposer dans les trente jours une requête en autorisation de construire portant sur l’ensemble des travaux effectués dans l’appartement concerné. Elle lui a infligé une amende de CHF 1’000.- en raison de ces travaux non autorisés, dont le coût, au vu des factures transmises, était arrêté à CHF 98’498.-. X______ n’a pas recouru contre cette décision.

6. Le 10 décembre 2008, l’Asloca a fait savoir au DCTI que le locataire qui avait précédé M. Y______ et Mme Z______ avait payé un loyer annuel de CHF 9’600.-, ceci depuis le 1er juillet 2002. Dans ce même courrier, elle a avisé le DCTI du départ de M. Y______ et Mme Z______.

7. Le 24 février 2009, le DCTI a délivré à la régie l’autorisation de construire requise (______). Les ch. 5 et 6 du dispositif de cette autorisation posaient les conditions suivantes :

« Les dispositions de la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d’habitation du 25 janvier 1996 (LDTR - L5 20) seront respectées.

Le loyer de l’appartement de 4 pièces au 4ème étage n’excédera pas, après travaux, CHF 13’452.- l’an soit CHF 3’363.- la pièce l’an. Ce loyer sera appliqué pour une durée de trois ans avec effet rétroactif dès la date de prise d’effet du bail, soit dès le 15 août 2006 » (ch. 6).

Cette décision n’a pas fait l’objet d’un recours.

8. Le 28 avril 2009, la régie a informé le DCTI du départ de M. Y______ et Mme Z______, sans préciser la date de celui-ci. Ceux-ci avaient résilié leur bail. Elle ne pouvait plus établir un nouveau bail lui permettant de se conformer à la décision précitée du DCTI. Elle avait remboursé CHF 26’890,50 à ses locataires, représentant le trop-perçu des loyers qu’ils avaient payés.

9. Le 12 mai 2009, le DCTI a imparti un délai de quinze jours à la régie pour établir un bail aux nouveaux locataires, conforme au ch. 6 du dispositif de sa décision du 24 février 2009. Le trop-perçu du loyer payé par ces derniers devait également leur être remboursé.

10. Après avoir requis par courriers des 2 juin et 7 juillet 2009 une prolongation du délai précité, la régie a transmis le 21 juillet 2009 au DCTI une copie d’un document intitulé « avenant n° 1 au bail à loyer du 25 avril 2008 », signé le 26 mai 2009 par la régie ainsi que par M. A______ et Mme B______, comportant la clause suivante :

« Le DCTI a décidé en date du 24 février 2009 que le loyer de l’appartement serait de CHF 13’452.- l’an du 15 août 2006 au 15 août 2009.

Compte tenu de ce qui précède, les parties conviennent de ce qui suit :

Premièrement : le loyer de l’appartement est fixé à CHF 13’452.- l’an du 1er mai 2008 au 15 août 2009, soit à CHF 1’121.- par mois, charges non comprises.

Deuxièmement : les autres clauses et conditions du contrat de bail du 25 avril 2008 restent en vigueur ».

11. Le 21 septembre 2009, le DCTI a imparti un délai à la régie pour qu’elle lui communique le nouveau formulaire officiel d’avis de fixation du loyer initial notifié à M. A______ et Mme B______, reprenant les conditions du ch. 6 du dispositif de sa décision du 24 février 2009.

12. Le conseil de X______ lui a répondu le 5 octobre 2009. Par l’établissement de l’avenant du 26 mai 2009, elle respectait le ch. 6 des conditions précitées. La requête du DCTI procédait du formalisme excessif.

13. Par pli recommandé du 27 novembre 2009, le DCTI a réitéré sa demande. Vu l’avenant précité, il ne demandait plus l’établissement d’un nouveau contrat de bail à loyer. En revanche, il exigeait celui d’une nouvelle formule officielle de fixation du loyer initial, dans le respect des conditions posées par l’_____, pour admettre le rétablissement d’une situation conforme au droit. X______ se devait de s’exécuter dans les quinze jours, sous la menace des peines prévues par l’art. 292 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0), dont la teneur était rappelée.

14. Le 14 décembre 2009, X______ a refusé de se conformer à cette demande. L’exigence de l’utilisation d’un formulaire officiel découlait de l’art. 270 al. 2 CO et elle était du ressort des juridictions civiles.

15. Par décision du 27 janvier 2010, le DCTI a ordonné à X______ de se conformer à sa décision du 24 février 2009. En application des art. 129 ss de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05), il lui infligeait une amende de CHF 2’000.- pour ne pas avoir respecté une injonction en force qu’il lui avait donnée.

16. X______ a recouru le 1er mars 2010 contre la décision précitée auprès de la commission cantonale de recours en matière administrative (ci-après : CCRA), remplacée depuis le 1er janvier 2011 par le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), concluant à son annulation. Elle avait en tous points respecté le dispositif de la décision attaquée. La LDTR n’autorisait pas le DCTI à exiger l’établissement d’une nouvelle formule officielle de fixation du loyer initial ni la conclusion d’un nouveau bail. L’établissement d’un avenant au contrat de bail du 25 avril 2008 était suffisant pour qu’elle ait rempli ses obligations. En outre, le DCTI n’avait pas le droit de lui infliger une amende en raison de ces circonstances.

17. Le 30 juillet 2010, le DCTI a conclu au rejet du recours. La seule conclusion d’un avenant au bail ne permettrait pas de remettre les parties dans la situation qui aurait été la leur si le contrat avait été respecté ab initio. L’établissement d’une nouvelle formule officielle de fixation du loyer initial, conforme aux conditions de l’autorisation délivrée, tendait à assurer aux locataires la possibilité de faire valoir leurs droits, résultant d’un contrat de bail.

18. Par décision du 1er novembre 2010, la CCRA a rejeté le recours. Le Tribunal fédéral avait jugé que la LDTR était compatible avec les dispositions du droit privé fédéral. Un contrôle des loyers limité à la première mise en location des appartements après exécution des travaux autorisés ne consacrait pas un empiètement prohibé du droit public sur le droit privé. Le Tribunal fédéral avait précisé que le loyer pris en compte pour une éventuelle majoration après la fin du contrôle cantonal devait être celui fixé par l’autorité cantonale compétente et non celui indiqué dans le contrat de bail. L’ancien Tribunal administratif, devenu le 1er janvier 2011 la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), avait lui aussi insisté sur l’importance de l’établissement d’un formulaire officiel pour permettre le contrôle du loyer à la sortie du contrôle étatique. Dès lors, le DCTI était légitimé à demander à un propriétaire d’établir un tel document pour mettre en conformité une situation consécutive à l’exécution de travaux sans autorisation. Le montant du loyer autorisé dans le cadre du contrôle devait figurer dans le formulaire officiel de fixation du loyer initial au côté des loyers prévus à la fin du contrôle, d’autant plus s’il existait des clauses d’échelonnement du loyer, pour que le locataire puisse faire valoir ses droits. Concernant l’amende, elle était proportionnée à la faute commise, compte tenu de l’obstination de la recourante à ne pas se conformer aux injonctions de l’autorité.

19. Par acte posté le 13 décembre 2010, X______ a recouru auprès du Tribunal administratif contre la décision précitée, reçue le 12 novembre 2010, en concluant à son annulation. Elle reprenait l’argumentation développée devant le TAPI. L’Etat ne pouvait effectuer un contrôle des loyers suite à des travaux de transformation ou de rénovation que pendant la période de contrôle. Le but de la formule officielle d’avis de fixation du loyer initial était de permettre au locataire de faire valoir ses droits. Aucune sanction n’était prévue à l’encontre du bailleur qui ne respectait pas ses engagements. Selon le Tribunal fédéral, le locataire n’était pas prétérité si une formule officielle de fixation du loyer initial ne lui était pas remise, car cela lui permettait de contester le loyer initial en tout temps et au plus tard un mois après que ladite formule lui a été remise. Si celle-ci était communiquée au locataire plus de trente jours après la prise de possession des locaux, elle était nulle. Il n’incombait pas à l’Etat mais au locataire de réclamer la formule officielle s’il ne l’avait pas reçue et ce n’était pas le rôle du DCTI d’en requérir l’établissement pour le compte de celui-là. Il prenait en effet des mesures qui influeraient sur une période s’étendant au-delà de la période de contrôle de trois ans. La décision du DCTI d’imposer l’établissement du bail sur formulaire officiel était contraire à la liberté contractuelle. Le recours à une formule officielle n’était prévu par le droit fédéral que lors de la conclusion d’un nouveau bail ou en cas de hausse de loyer. Le DCTI ne pouvait pas instaurer un cas supplémentaire dans lequel la formule officielle devait être utilisée. Au demeurant, l’obligation d’établir un nouveau bail sur formule officielle ne résultait pas de la décision querellée, qui ne traitait que des conditions de loyer à appliquer.

La décision était disproportionnée car il suffisait, pour atteindre le but visé, d’informer le locataire que son loyer avait été fixé à un montant inférieur durant la période de contrôle. Il reviendrait ensuite à celui-là d’entreprendre les démarches nécessaires pour faire valoir ses droits.

20. Le 2 février 2011, le DCTI a conclu au rejet du recours et à la confirmation du jugement du TAPI, qui avait correctement appliqué le droit.

21. Le juge délégué a tenu une audience de comparution personnelle des parties le 13 février 2012. L’administrateur de X______ ne s’est pas présenté. Son conseil a informé le juge délégué que M. A______ et Mme B______ avaient mis fin de manière anticipée au bail en avril 2010. La recourante, comme le DCTI, ont persisté dans leurs conclusions.

A l’issue de l’audience, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Depuis le 1er janvier 2011, suite à l’entrée en vigueur de la nouvelle loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), l’ensemble des compétences jusqu’alors dévolues au Tribunal administratif a échu à la chambre administrative, qui devient autorité supérieure ordinaire de recours en matière administrative (art. 132 LOJ).

Les procédures pendantes devant le Tribunal administratif au 1er janvier 2011 sont reprises par la chambre administrative (art. 143 al. 5 LOJ). Cette dernière est ainsi compétente pour statuer.

2. Interjeté en temps utile devant la juridiction alors compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l’organisation judiciaire du 22 novembre 1941 -aLOJ ; 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 dans sa teneur au 31 décembre 2010).

3. Le litige porte sur l’amende infligée le 27 janvier 2010 à la recourante pour ne pas avoir exécuté complètement la décision du DCTI du 24 février 2009, qui était en force, et pour ne pas s’être conformée complètement à l’ordre qu’elle contenait.

4. Selon l’art. 44 LDTR, celui qui contrevient aux dispositions de la LDTR est passible des mesures et sanctions administratives prévues par les art. 129 à 139 LCI, sous réserves des peines plus élevées prévues par le CP. Le DCTI notifie aux intéressés par lettre recommandée les mesures qu’il ordonne. Il fixe un délai pour leur exécution (art. 130 LCI). Les propriétaires ou leurs mandataires sont tenus de se conformer aux mesures ordonnées par cette autorité (art. 131 LCI).

Parmi les mesures administratives à disposition de l’autorité compétente, figure l’ordre de remise en conformité (art. 129 let. e LCI). L’objectif d’une telle mesure est de rétablir une situation conforme au droit. C’est en faisant usage de cette prérogative que le DCTI, dans sa décision du 24 février 2009 entrée en force, a posé comme condition à l’autorisation d’effectuer les travaux qu’il délivrait a posteriori, que le loyer des locataires entrés dans les locaux après l’exécution des travaux soit fixé à CHF 13'452.- l’an, conformément à l’art. 10 al. 1 LDTR, rétroactivement au 15 août 2006 et pendant une durée de trois ans. Une telle condition avait pour conséquence d’obliger la SI propriétaire à établir de nouveaux documents contractuels avec effet dès cette date, respectant le nouveau loyer maximal autorisé, et à restituer aux locataires le trop-perçu de loyer.

La recourante l’a admis puisqu’elle s’est conformée à ce volet de l’ordre de mise en conformité, tant vis-à vis des premiers que des deuxièmes locataires en place pendant la période du contrôle. Ce qu’elle conteste en revanche – et ce pourquoi elle a été sanctionnée - c’est l’obligation que lui a imposée l’intimé de notifier aux mêmes locataires un exemplaire de la formule officielle de fixation du loyer initial complétée en fonction des nouvelles conditions de loyer maximal, fixées pour la période du contrôle.

5. A teneur de l’art. 269d CO, le locataire peut contester le loyer initial dans les trente jours suivant la réception de la chose lorsque le bailleur a sensiblement augmenté le loyer initial pour la même chose, par rapport au précédent loyer (art. 270 al. 1 CO). En cas de pénurie de logements, les cantons peuvent exiger que, lors de la conclusion d’un nouveau bail, le propriétaire fasse usage d’une formule officielle de même teneur que celle mentionnée à l’art. 269d CO (art. 270 al. 2 CO). Il s’agit de celle prévue pour la notification des hausses de loyer en cours de bail. Dite formule est celle agrée par le canton. Toute situation de hausse de loyer impliquant l’utilisation de cette formule est nulle si elle n’est pas faite au moyen de celle-ci (art. 269d al. 1 CO).

Le canton de Genève a fait usage de cette faculté (art. 109 de la loi d’application du code civil et du code des obligations, du 28 novembre 2010 - LaCC - RS E 1 05, entrée en vigueur le 1er janvier 2011), mais cette règle existait sous l’égide de la LaCC du 7 mai 1981 (aLaCC – E 1 05), à l’ art. 24 de celle-ci.

Si, conformément aux art. 3 et 9 LDTR, la recourante avait sollicité une autorisation de construire du DCTI avant d’effectuer les travaux de transformation de l’appartement considéré, elle aurait dû, à teneur du droit fédéral et de la législation en vigueur à Genève à ce sujet, communiquer le 24 juillet 2006 aux premiers locataires, en sus du bail, un exemplaire de la formule d’avis de fixation du loyer initial contenant les éléments cités à l’art. 24 aLaCC, et comportant un loyer compatible avec le loyer maximal calculé par cette autorité. De même, lorsque l’appartement a été reloué le 25 avril 2008 à M. A______ et à Mme B______, la société propriétaire aurait dû adresser aux nouveaux locataires une nouvelle formule d’avis de fixation du loyer initial comportant les mêmes données, parmi lesquelles le loyer payé par le locataire précédent qui aurait été d’un montant bien inférieur à celui fixé contractuellement (CHF 13’452.- l’an au lieu de CHF 30’000.-). Tel n’a cependant pas pu être le cas puisque la décision du 24 février 2009 est tombée alors que ces derniers avaient déjà emménagé. Dans ces circonstances, lorsque le DCTI a délivré, a posteriori après avoir constaté l’existence d’une infraction à la LDTR, l’autorisation de construire ______ en arrêtant à CHF 13’452.- le montant du loyer annuel autorisé après travaux dès le 15 août 2006, il était fondé à exiger, dans le cadre de la remise en conformité, non seulement une rectification des rapports contractuels et le remboursement aux locataires des loyers versés en trop, mais également l’envoi à ces derniers d’une nouvelle formule officielle rectifiée, de façon à ce qu’ils soient informés du nouvel état de fait, ainsi que de leurs droits et du moyen de les faire valoir en fonction de la nouvelle situation juridique.

Contrairement à ce que soutient la recourante, il ne s’agit pas d’une exigence relevant du formalisme excessif, ni d’une ingérence de l’autorité administrative dans les rapports de droit privé. Ainsi que le Tribunal fédéral l’a jugé dans son arrêt 1P.20/2005 du 18 mars 2005 in SJ 2005 I p. 489, le montant du loyer fixé par le DCTI sert de base pour le calcul des hausses de loyer ultérieures, qui interviendraient après la sortie du régime de contrôle. Le but de la formule officielle, prévue par le droit fédéral, est de mettre le locataire en possession de toutes les données lui permettant d’une part, de déterminer l’importance de la hausse de loyer par rapport au dernier loyer des locataires antérieurs et d’autre part, de l’informer des voies de droit à sa disposition pour contester cette hausse. L’existence d’une telle formule officielle est encore plus importante si le contrat de bail prévoit d’ores et déjà des clauses d’échelonnement après la sortie du contrôle dès lors que les hausses de loyers devraient, à teneur de la pratique actuelle des juridictions civiles, être contestées à ce moment-là, même si elles interviennent plusieurs années après. L’autorité intimée était donc en droit d’exiger de la société propriétaire qu’elle communique aux locataires concernés le formulaire imposé par la loi, complété conformément aux conditions qu’elle avait posées dans son autorisation.

C’est donc à juste titre que le DCTI a constaté le 27 janvier 2010 que la recourante n’avait pas entièrement respecté les conditions qu’il avait posées dans l’______ en refusant de notifier aux locataires un formulaire officiel reflétant exactement la situation de loyer initial et, qu’en vertu de l’art. 44 LDTR, il l’a sanctionnée, après une mise en demeure infructueuse, pour ce comportement constituant une infraction à la LDTR.

6. Est passible d’une amende administrative de CHF 100.- à CHF 150’000.- tout contrevenant aux ordres donnés par le DCTI dans les limites de la LCI et des règlements et arrêtés édictés en vertu de celle-ci (art. 137 al. 1 let. c LCI). Cette disposition est applicable aux infractions à la LDTR (art. 44 al. 1 LDTR). Pour la fixation de l’amende, il est tenu compte du degré de gravité de l’infraction. Constituent notamment des circonstances aggravantes la violation des prescriptions susmentionnées par cupidité ou les cas de récidive. En cas d’infraction commise dans la gestion d’une personne morale, les sanctions sont applicables directement à celle-ci lorsqu’il n’apparaît pas de prime abord quelles sont les personnes responsables (art. 137 al. 4 LCI).

En l’espèce, l’intimé a fixé le montant de l’amende à CHF 2’000.-. Celui-ci respecte l’art. 137 al. 3 LCI et c’est à juste titre que cette amende a été infligée à la personne morale elle-même, dès lors qu’il n’est pas possible de déterminer quelle est la personne physique qui avait agi au sein de celle-ci. L’infraction commise revêtait une certaine gravité. Le fait que les locataires en place n’aient pas reçu en temps utile une nouvelle formule officielle de fixation du loyer initial a eu pour conséquence qu’ils n’ont pas bénéficié de toutes les informations qui leur auraient permis de décider de l’attitude à adopter vis-à-vis des hausses de loyer prévues dans les clauses d’échelonnement, supérieures à 50 % (de CHF 13’452.- à CHF 31’200.- depuis le 15 août 2009, date de la fin du contrôle). La quotité de cette amende ne peut qu’être confirmée.

7. La décision attaquée comportait également une injonction d’établir la formule officielle de fixation du loyer initial sous la menace des peines de droit prévues à l’art. 292 CP. Compte tenu du départ de M. A______ et Mme B______ en avril 2010, soit après la fin du contrôle étatique, ce dont la CCRA n’a pas été informée par la recourante, cette partie du dispositif de la décision querellée n’a plus d’objet.

8. Le recours sera rejeté pour le surplus. Un émolument de CHF 1’500.- sera mis à la charge de la recourante, qui succombe. Aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 LPA).

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette dans la mesure où il est recevable le recours interjeté le 13 décembre 2010 par X______ contre la décision de la commission cantonale de recours en matière administrative du 1er novembre 2010 ;

met un émolument de CHF 1’500.- à la charge de X______ ;

dit qu’il ne lui est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Yves Bonard, avocat de la recourante, au département des constructions et des technologies de l’information, ainsi qu’au Tribunal administratif de première instance.

Siégeants : Mme Hurni, présidente, M. Thélin, Mme Junod, MM. Dumartheray et Verniory, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière de juridiction :

 

 

M. Tonossi

 

la présidente siégeant :

 

 

E. Hurni

 

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

la greffière :