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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4557/2008

ATA/98/2012 du 21.02.2012 sur DCCR/739/2009 ( LCI ) , ADMIS

Descripteurs : QUALITÉ POUR RECOURIR; INTÉRÊT ACTUEL; PERMIS DE CONSTRUIRE; INDICE D'UTILISATION; EXCEPTION(DÉROGATION); ACCÈS À LA ROUTE ; ÉQUIPEMENT(CONSTRUCTION)
Normes : LPA.60.letb ; LCI.59.al4 ; LAT.19.al1 ; LAT.22.al2.letb
Parties : CHATELAIN Gérald et autres, ELIETTE DIT HERMANN Philippe, CACI Gianfranco, SCHULTHESS Marc, ZINNER Delphine, ZINNER Dominique, LAVOREL Gilles, BAUMGART Claire, PAYOT Christa, PAYOT Daniel, LEYSSEN Nicole, GOUVERNE Frank, MAZLOUM Antoine, MAZLOUM Régine, MAITRE Réginald, MURRAY Alison, MURRAY Michael / BUCHER & MORET SARL, DEPARTEMENT DES CONSTRUCTIONS ET DES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION, MIFFON Claude, MIFFON Françoise et Claude, BRECCOLINI Edmond
Résumé : L'indice d'utilisation du sol d'un projet consistant dans la construction de 16 villas contiguës avec garages couverts et piscines peut être calculé sur la base de la surface totale des parcelles concernées. Lorsque cet indice se situe entre 20% et 25%, une dérogation au rapport de surfaces de la zone villa peut être octroyée aux conditions prévues par la loi. En l'espèce, l'autorisation de construire délivrée doit être annulée, la réalisation des voies d'accès aux différentes parcelles n'étant pas juridiquement garanties.
En fait
En droit

 

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4557/2008-LCI ATA/98/2012

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 21 février 2012

 

dans la cause

 

Madame Claire BAUMGART

Monsieur Gianfranco CACI

Monsieur Gérald CHATELAIN

Monsieur Philippe ELIETTE dit HERMANN

Monsieur Frank GOUVERNE

Monsieur Gilles LAVOREL

Madame Nicole LEYSSEN

Monsieur Réginald MAÎTRE

Madame Régine et Monsieur Antoine MAZLOUM

Madame Alison et Monsieur Michael MURRAY

Madame Christa et Monsieur Daniel PAYOT

Madame Pascale et Monsieur Marc SCHULTHESS

Madame Delphine et Monsieur Dominique ZINNER

représentés par Me Christian Grosjean, avocat

contre

DéPARTEMENT DES CONSTRUCTIONS ET DES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION

et

BUCHER & MORET S.à r.l. - GP HP S.A.

représentée par Me Pascal Pétroz, avocat

 

et

Madame Françoise et Monsieur Claude MIFFON

_________


Recours contre la décision de la commission cantonale de recours en matière administrative du 23 juillet 2009 (DCCR/739/2009)


EN FAIT

1. Par acte notarié du 13 juin 2007, Messieurs Jean-Philippe Bucher et Jean-Michel Moret du bureau Bucher & Moret S.à r.l. - GP HP S.A. (ce dernier étant devenu, le 19 février 2010, l'Agence Immobilière Gérard Paley & Fils S.A. ; cf. http://ge.ch/dares/registre-du-commerce/recherche_entreprises-1064.html, consulté le 12 janvier 2012) ont obtenu tous pouvoirs aux fins de déposer toutes demandes en autorisation de construire sur les parcelles nos 6028 à 6033, propriétés de l'Hoirie de Monsieur Roland Breccolini, ainsi que sur les parcelles nos 6034 à 6040, propriétés de Monsieur Edmond Breccolini, feuille 43, de la commune de Thônex.

2. Classés en 5ème zone de construction, ces biens-fonds sont accessibles par l'Impasse de Mon-Idée, chemin privé d'environ 150 m de long qui a été aménagé sur les parcelles nos 4685 à 4699, feuille 43, de la commune de Thônex en vue d'accéder aux quinze villas s'y trouvant depuis la route de Mont-Idée.

3. Le 16 août 2007, Bucher & Moret S.à r.l. - GP HP S.A. (ci-après : les promoteurs) a déposé auprès du département des constructions et des technologies de l'information (ci-après : le département ou le DCTI) une requête en autorisation de construire vingt-huit villas contiguës avec couverts à voitures sur les parcelles précitées nos 6028 à 6040 (DD 101'477-2), correspondant à un indice d'utilisation du sol (ci-après : IUS) de 32,11 %.

S'agissant de l'accès aux nouvelles constructions, la requête renvoyait à une servitude de passage à véhicules inscrite au registre foncier sous numéro RS 332 et grevant les parcelles nos 4685 à 4687, 4689, et 4693 à 4699, feuille 43, de la commune de Thônex à l'endroit de l'Impasse de Mon-Idée, ainsi qu'à une servitude de passage à véhicules inscrite au registre foncier sous numéro RS 57095 et grevant les parcelles nos 6028, 6030 à 6032, et 6034 à 6037.

4. Lors de l'instruction de la requête, ce premier projet a suscité diverses réactions, dont notamment :

a. un préavis favorable sans observation particulière émis le 20 août 2007 par l'office cantonal de la mobilité (ci-après : OCM), devenu la direction générale de la mobilité ;

b. une demande de complément du 21 août 2007 de la commission d'architecture concernant les aménagements extérieurs, puis une demande de modification du 18 septembre 2007 visant à améliorer l'accès aux dernières villas sises au nord du périmètre, ainsi qu'à éviter une surélévation générale du terrain naturel ;

c. une demande de complément du 27 août 2007 concernant les sorties des caves, suivie d'un préavis favorable sous six conditions relatives à la qualité technique des installations du 25 septembre 2007, émis par la police du feu ;

d. un préavis défavorable du 18 septembre 2007 de la commune de Thônex, en raison de la densité du projet, de considérations techniques tenant à l'évacuation des eaux et des déchets, ainsi que du caractère exigu et contraignant pour les habitants actuels et futurs de la voie d'accès ;

e une demande de modification du projet émise par le domaine de l'aménagement du territoire du 12 novembre 2007 en rapport avec la proximité du Foron.

5. Le 15 janvier 2008, les promoteurs ont déposé auprès du département un projet modifié enregistré sous la même numérotation (DD 101'477-2) et portant sur la construction de seize villas contiguës avec garages couverts et piscines sur les parcelles nos 6028 à 6040 de la commune de Thônex.

Ce nouveau projet prévoyait d'édifier quatre groupes de deux villas de type A contiguës par les garages sur les parcelles nos 6036 à 6040, deux groupes de deux villas de type B contiguës par les abris de jardin sur les parcelles nos 6030 à 6033 et quatre villas de type C contiguës par les garages sur les parcelles nos 6028, 6029, 6034 et 6035, correspondant à un indice d'utilisation du sol s'élevant à 23,8 %.

La requête en autorisation de construire comportait en outre un projet de mutation parcellaire n° 29/2007, établi le 12 décembre 2007 et prévoyant la création de nouvelles parcelles délimitées en fonction des futures villas. Ledit projet prévoyait également la création de servitudes d'eaux claires et d'eaux usées, ainsi que de distances et vues droites selon un dernier plan établi le 4 août 2008 et dernièrement modifié le 29 août 2008.

6. Le 22 janvier 2008, le département a accusé réception de cette requête et sollicité que des modifications soient apportées aux villas de type A, conformément aux exigences de l'art. 28 du règlement d'application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 27 février 1978 (RCI - L 5 05.01) en matière de vues droites croisées.

Le 28 février 2008, les promoteurs ont remis au département une nouvelle version du plan 103A relatif aux villas de type A et comportant les modifications requises en matière de vues droites croisées.

7. Par courrier de leur architecte du 23 janvier 2008, les promoteurs ont expliqué au département que le niveau moyen du rez-de-chaussée des futures villas avait été placé à 90 cm environ au-dessus du terrain naturel en raison du caractère inondable de la zone et de la nécessité de prémunir les futures habitations contre un tel risque.

8. La seconde requête en autorisation de construire des promoteurs a été publiée dans la Feuille d'Avis Officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) du 28 janvier 2008. Elle a suscité de nombreuses oppositions de la part des voisins.

9. Concurremment soumis à une nouvelle enquête technique, le projet portant sur la construction de seize villas contiguës a notamment suscité les réactions suivantes :

a. un préavis favorable de l'administration fédérale des douanes, région gardes-frontière VI, du 31 janvier 2008 ;

b. un préavis favorable du 5 février 2008 de la commission d'architecture, compte tenu de l'évolution de l'expression architecturale et de la qualité générale du projet. La surélévation du terrain projetée était acceptable au vu des explications fournies par les promoteurs dans leur courrier du 23 janvier 2008 et la dérogation à l'art. 59 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) pour une densité à 0,25 pouvait être accordée ;

c. un préavis favorable sans observation du 14 février 2008 rendu par l'OCM. Ce dernier a répondu, le 5 mars 2008, aux courriers que Monsieur Claude Miffon, copropriétaire d'un bien-fonds voisin, lui avait adressés les 18 septembre 2007, 11 et 28 février 2008 au sujet du projet. Les problèmes de propriété foncière ne le concernaient pas et relevaient du registre foncier, tandis que les accès aux futures villas permettaient dans le cas d'espèce une desserte adéquate du quartier, raison pour laquelle il avait préavisé favorablement la demande définitive en autorisation de construire ;

d. un préavis favorable de la police du feu du 15 février 2008, réservant les conditions 1 à 6 de son précédent préavis du 25 septembre 2007, ainsi que les prescriptions AEAI en vigueur en matière d'installations thermiques ;

e. une demande de complément du domaine nature et paysage émise le 28 février 2008 et sollicitant la production d'un plan des aménagements paysagers ;

f. un préavis favorable de la commune de Thônex du 4 mars 2008, sous réserve que l'implantation des bennes pour les déchets, comprenant un container à verre et un à papier, soit figurée sur le plan de masse dans un local couvert fermé sur 3 côtés. Le conseil administratif y prenait en outre note de la nécessité d'octroyer une dérogation au rapport des surfaces, selon l'art. 59 al. 4 LCI, compte tenu de l'IUS de 23,8 % ;

g. un préavis favorable sous trois conditions énumérées émis par le service cantonal de l'énergie (ci-après : le ScanE) le 13 mai 2008 ;

h. un préavis favorable du 19 juin 2008 du domaine de l'aménagement du territoire sous réserve d'inscription au registre foncier d'une servitude de passage à pied le long du Foron, ainsi que de l'aménagement d'un espace pénétrant de verdure sur la zone inconstructible de 30 m à compter dudit cours d'eau, conformément au plan directeur communal de Thônex.

10. Donnant suite au préavis du domaine nature et paysage du 28 février 2008, les promoteurs ont transmis au département un plan général n° 101F relatif aux rez-de-chaussée et aménagements extérieurs du projet le 4 avril 2008.

11. Par décision du 9 septembre 2008, le ScanE a délivré aux promoteurs une autorisation énergétique pour la mise en place de seize installations de chauffage par capteurs solaires, destinées au chauffage des seize piscines prévues pour chacune des villas.

12. Par décision du même jour, publiée dans la FAO du 15 septembre 2008, le département a délivré l'autorisation de construire requise par les promoteurs (DD 101'477-2), sous réserve notamment des conditions figurant dans les préavis de la police du feu du 25 septembre 2007, du domaine nature et paysage du 11 février 2008, du domaine de l'eau du 12 mars 2008, du ScanE du 13 mai 2008 et du domaine de l'aménagement du territoire du 19 juin 2008.

13. Par acte du 15 octobre 2008, Madame Françoise et Monsieur Claude Miffon, copropriétaires de la parcelle n° 4517, feuille 34, de la commune de Thônex, ont recouru auprès de la commission cantonale de recours en matière de constructions, devenue le 1er janvier 2009 la commission cantonale de recours en matière administrative (ci-après : la commission), puis le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), contre l'autorisation de construire du 9 septembre 2008, en concluant à son annulation.

Les conditions d'octroi d'une dérogation au rapport de surfaces au sens de l'art. 59 al. 4 LCI n'étaient pas remplies. Le secteur de Mon-Idée était en outre situé en zone inondable. Or, le projet prévoyait l'implantation de villas à 35 m du Foron, ce qui ne correspondait pas aux mesures de protection préconisées par « l'étude MICA », laquelle prévoyait des levées de terre à une distance de 50 m des rives de ce cours d'eau. L'OCM ne s'était enfin pas penché sur les problèmes de sécurité et de circulation tenant à la configuration de l'Impasse de Mon-Idée.

14. A cette même date, Monsieur Gérald Chatelain, copropriétaire de la parcelle n° 4509, feuille 43, de la Commune de Thônex, a également recouru contre l'autorisation de construire DD 101'477-2, concluant à son annulation pour les mêmes motifs que les époux Miffon.

15. Le 15 octobre 2008 également, Mesdames et Messieurs Philippe Eliette dit Hermann, Gianfranco Caci, Pascale et Marc Schulthess, Delphine et Dominique Zinner, Gilles Lavorel, Claire Baumgart, Christa et Daniel Payot, Alison et Michael Murray, Nicole Leyssen et Frank Gouverne, Régine et Antoine Mazloum, ainsi que Réginald Maître, respectivement propriétaires ou copropriétaires des parcelles nos 4685, 4686, 4687, 4688, 4689, 4690, 4692, 4694, 4697, 4698 et 4699, feuille 34, de la commune de Thônex, ont conclu à l'annulation de l'autorisation de construire DD 101'477-2, reprenant les griefs des époux Miffon et de M. Chatelain.

16. Le 15 octobre 2008 encore, le département a transmis à la commission un courrier des époux Murray daté du 29 septembre 2008 qu'il avait reçu le 6 octobre 2008. Ceux-ci y indiquaient qu'ils se désolidarisaient du recours de l'Association de défense des intérêts Mon-Idée - Lacolat - Tourterelles, eux-mêmes n'étant pas opposés au projet de construction de seize villas au bout de l'Impasse de Mon-Idée.

Par courrier du 29 octobre 2008, l'avocat des époux Murray a confirmé à la commission que ceux-ci l'avaient formellement mandaté pour recourir contre l'autorisation de construire DD 101'477-2, joignant à son courrier deux procurations signées par ses clients le 13 octobre 2008.

Les époux Murray ont ensuite reçu copie, à leur domicile élu, de toute la correspondance de la commission concernant l'instruction des recours pendants devant elle contre l'autorisation de construire litigieuse.

17. Le 17 novembre 2008, les promoteurs ont conclu à l'irrecevabilité de l'un des recours et au rejet des autres.

Les constructions projetées étaient bien implantées en ordre contigu, dans la mesure où elles étaient reliées entre elles par des garages ou des abris de jardin. Les conditions de dérogation aux rapports de surface étaient donc remplies. S'agissant de l'accès par l'Impasse de Mon-Idée, tant l'OCM que la commune de Thônex avaient préavisé favorablement le projet. En outre, des servitudes de passage sur les parcelles affectées par le projet existaient d'ores et déjà. S'agissant enfin du risque d'inondation, le domaine de l'eau avait relevé dans son préavis favorable du 12 mars 2008 que le périmètre du projet se situait en zone de faible danger, tandis que le Foron n'avait pas été en crue depuis quarante ans au moins. Le document sur lequel se fondaient les recourants (l'étude MICA) n'était qu'une étude privée dépourvue de force légale.

18. Le 2 juillet 2009, la commission a tenu une audience de comparution personnelle des parties.

Les discussions ont notamment porté sur la question de savoir si l'IUS devait être calculé par rapport à la surface totale des parcelles ou plutôt parcelle par parcelle, ainsi que sur la question de l'accès au périmètre visé par l'autorisation de construire litigieuse.

19. Par décision du 23 juillet 2009, le TAPI a rejeté les recours des époux Miffon, et de MM. Chatelain et Eliette dit Hermann et consorts. Elle a considéré en outre que les époux Murray avaient, par courrier du 29 octobre [recte : septembre] 2008, retiré leur recours et que ce dernier avait été rayé du rôle.

Au fond, le département avait correctement appliqué l'art. 59 al. 4 LCI, en octroyant la dérogation prévue par cette disposition pour la construction d'un projet dont l'IUS s'élevait à 23,8 %, soit inférieur aux 25 % autorisés. Il avait correctement calculé cet indice en se basant sur la surface totale des parcelles nos 6028 à 6040, la position des recourants consistant à exiger que l'IUS soit calculé parcelle par parcelle ayant été rejetée par la jurisprudence (Arrêt du Tribunal fédéral 1A.105/2005 du 29 novembre 2005, consid. 5.3). Il importait en outre peu que la mutation parcellaire n'ait pas encore été inscrite au registre foncier. Le projet autorisé respectait enfin la définition de constructions en ordre contigu figurant à l'art. 58 al. 2 LCI et aucun élément du dossier ne permettait de considérer que l'autorité intimée avait excédé ou mésusé de son pouvoir d'appréciation en suivant les préavis favorables de la commune et de la commission d'architecture quant à l'esthétique des futures villas.

La distance des constructions par rapport au Foron respectait l'art. 15 al. 1 de la loi sur les eaux du 5 juillet 1961 (LEaux-GE - L 2 05) dans la mesure où elle était supérieure à 30 m. Tant le domaine de l'aménagement du territoire que le domaine de l'eau avaient préavisé favorablement le projet, dans la mesure où celui-ci se situait dans une zone de danger faible de crues. Les recourants n'étaient pas fondés à invoquer « l'étude MICA », dont la validité n'avait pas été démontrée, pour exiger le respect d'une distance de 50 m à compter de la limite du cours d'eau. L'autorisation de construire réservait enfin sous ch. 4 l'obligation d'aménager un espace de verdure dans la zone inconstructible du Foron, conformément au plan directeur communal.

Il n'était pas démontré que l'étroitesse du chemin ne permettrait pas d'absorber l'augmentation du trafic sur l'Impasse de Mon-Idée induite par la construction de seize villas supplémentaires. Le seul fait que la circulation soit sensiblement augmentée ne suffisait pas à établir l'existence d'inconvénients graves et durables au sens de l'art. 14 let. a et e LCI. Il n'était de même pas établi que ce surcroît de trafic empêcherait ou gênerait de manière sensible une intervention des services publics, notamment en cas d'incendie, l'OCM, la police du feu et la commune de Thônex n'ayant émis aucune réserve en la matière dans leurs préavis favorables. Quant à l'argument selon lequel les camions de chantier ou de différentes entreprises (déménagement, livraison de fuel) allaient nécessairement porter atteinte aux droits des propriétaires des parcelles nos 4688, 4690, 4691 et 4692, qui n'étaient pas grevées d'une servitude de passage en faveur des parcelles nos 6028 à 6040, il relevait exclusivement du droit privé et, partant, des juridictions civiles.

20. Par acte du 27 août 2009, Mmes et MM. Baumgart, Caci, Chatelain, Eliette dit Hermann, Gouverne et Leyssen, Lavorel, Maître, Mazloum, Murray, Payot, Schulthess et Zinner (ci-après : les recourants) ont recouru auprès du Tribunal administratif (ci-après : le Tribunal), devenu depuis le 1er janvier 2011, la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision précitée de la commission, reçue le 28 juillet 2009. Ils concluent à son annulation de même qu'à celle de l'autorisation de construire litigieuse, sous suite de frais et dépens.

Parties à la procédure ayant abouti à la décision querellée, les recourants disposaient tous de la qualité pour recourir au sens de l'art. 60 let. a LPA. Il en allait en particulier ainsi des époux Murray, lesquels n'avaient jamais renoncé à leur recours devant la commission et avaient été systématiquement informés par celle-ci du déroulement de la procédure. Leur cause avait donc été rayée à tort du rôle de cette juridiction.

Sur le fond, le projet de construction litigieux ne pouvait être autorisé en application de la dérogation au rapport de surfaces prévue par l'art. 59 al. 4 LCI. Les futures villas ne représentaient pas des constructions entièrement contiguës, mais étaient au contraire groupées en plusieurs blocs, à savoir celui des parcelles nos 6039-6040, celui des parcelles nos 6037-6038, celui de la parcelle n° 6036, celui des parcelles nos 6032-6033, celui des parcelles nos 6030-6031 et enfin celui regroupant les parcelles nos 6029-6028-6035-6034. Le calcul de l'IUS aurait dû être effectué pour chacun de ces groupes de constructions et non en tenant compte de la surface totale des parcelles concernées. Il aurait abouti à la constatation d'une violation de l'art. 59 al. 4 LCI, tant la densité de certaines parcelles (notamment les parcelles nos 6036 à 6040 atteignant les 30 %) était importante, soit largement supérieure à l'IUS de 25 % autorisable en application de cette disposition. La commission avait en outre méconnu un principe fondamental pourtant admis par la jurisprudence, celui de la cession des droits à bâtir. Si un propriétaire pouvait convenir avec son voisin que ce dernier mette à sa disposition, pour le calcul de la surface constructible, une surface de terrain qui n'avait pas déjà servi à un tel calcul pour un bâtiment existant, il importait que cette surface voisine mise à contribution pour le calcul de la surface constructible ne puisse plus servir ultérieurement à un tel calcul, ce qui impliquait en pratique qu'elle soit grevée d'une servitude de non-bâtir au profit de la collectivité (ATF 101 Ia 289 ; ATA P. du 28 juin 1994 ; ATA M. du 14 juin 1989). Dans le cas d'espèce, les promoteurs n'avaient pas démontré avoir effectué un tel report des droits à bâtir entre les différentes parcelles visées par leur projet et l'autorisation de construire querellée ne contenait pas une telle condition.

S'agissant de l'accès par l'Impasse de Mon-Idée, la commission s'était uniquement fondée sur le préavis favorable rendu par l'OCM pour en conclure que le projet querellé n'induirait pas d'inconvénients graves pour les usagers, le voisinage ou le public, respectivement ne provoquerait pas de danger ou de gêne durable pour la circulation au sens de l'art. 14 LCI. Elle n'avait pas perçu l'erreur commise par ce service, lequel avait considéré que les accès garantissaient une desserte adéquate du quartier, alors qu'une seule voie permettait de desservir les futures villas. Faute de s'être rendue sur place, la commission n'avait pas pris la mesure du caractère exigu de l'Impasse de Mon-Idée.

Il s'agissait d'un chemin privé extrêmement étroit et dépourvu de visibilité en plusieurs endroits. Une telle voie n'avait à l'évidence pas été créée pour accueillir une circulation plus importante que celle induite par les quinze villas bordant déjà ce chemin. Or, le projet litigieux prévoyait la construction de seize garages pouvant accueillir chacun deux véhicules, soit un total de trente-deux véhicules supplémentaires. Les services publics rencontraient de nombreuses difficultés pour accéder aux constructions existantes, comme l'attestaient les photographies et le CD-ROM versés à la procédure et relatif au passage d'un camion-poubelle à l'endroit le plus large de l'Impasse, soit le virage non concerné par le projet de construction querellé et aboutissant sur un portail fermé sis sur les parcelles nos 4689 et 4687. Les entreprises de livraison de mazout ne pouvaient pas accéder directement à l'ensemble des villas et étaient obligées de bloquer l'impasse durant leurs interventions. En outre, et bien qu'il s'agisse d'une pure question de droit privé, les parcelles nos 4688, 4690, 4691 et 4692 n'étaient grevées d'aucune servitude de passage en faveur des parcelles nos 6028 à 6040. Les propriétaires concernés s'opposeraient fermement à ce qu'une partie de leur terrain, correspondant à la moitié de la largeur de l'impasse, soit utilisée par les potentiels acquéreurs des futures villas. Cette situation engendrerait de sérieux problèmes de circulation dans l'impasse. En cas d'incendie ou d'autres événements dommageables d'importance, les services d'intervention seraient entravés de manière inadmissible, augmentant d'autant le danger pour les propriétaires et habitants concernés. La commission ayant totalement ignoré ces éléments, les recourants sollicitaient un transport sur place.

21. Le 12 octobre 2009, les époux Miffon se sont ralliés aux conclusions des recourants compte tenu de l'insuffisance de la desserte pour un nombre d'habitations aussi important que celui prévu par le projet. L'accès initial aux parcelles nos 6028 à 6040 se faisait directement depuis la route de Mon-Idée grâce à une servitude de passage sur la parcelle n° 4695. Feu M. Breccolini y avait lui-même renoncé en construisant sur ce bien-fonds une villa supplémentaire, alors même qu'il ne s'était pas encore rendu acquéreur des parcelles, objet de la promotion litigieuse.

22. Le département s'est déterminé le 14 octobre 2009, concluant au rejet des recours et, partant, à la confirmation de la décision de la commission du 23 juillet 2009 et de l'autorisation de construire DD 101'477-2.

La juridiction administrative avait déjà confirmé la légalité de sa pratique consistant à calculer l'IUS sur la base de la surface totale des parcelles concernées par un projet, plutôt que pour chaque parcelle prise séparément (ATA/361/2003 du 13 juin 2003). Quoiqu'il en soit, il n'avait pas d'objection à modifier le libellé de l'autorisation de construire querellée de manière à ce qu'elle prévoie expressément, comme cela ressortait clairement des préavis, que toute construction ultérieure susceptible d'augmenter le rapport des surfaces ne puisse être envisagée que dans le cadre d'un projet d'ensemble valant pour tous les propriétaires. Il faisait sien le raisonnement développé par la commission concernant l'accès aux constructions projetées.

23. Le 14 octobre 2009, les promoteurs ont conclu au rejet des recours sous suite de frais et dépens.

Le département avait correctement appliqué l'art. 59 al. 4 LCI en octroyant une dérogation au rapport de surfaces. Les futures villas répondaient pleinement à la définition de constructions en ordre contigu au sens de l'art. 58 al. 2 LCI. L'IUS de 23,8 % avait été correctement calculé sur la base de la surface totale des parcelles concernées. Il n'avait rien d'exceptionnel et était régulièrement pratiqué par les communes genevoises. Dans le cas d'espèce, tant la commune de Thônex que la commission d'architecture avaient préavisé favorablement la dérogation sollicitée, sans réserve, particulièrement s'agissant du mode de calcul de l'IUS. L'une des conditions de l'autorisation de construire était en outre la mutation parcellaire (projet de mutation parcellaire n° 29/2007), si bien que le parcellaire final, soit celui prévalant au moment de la construction des villas, ne serait pas le même que le parcellaire existant. L'exigence des recourants tenant à ce que l'IUS soit calculé pour chaque parcelle confinait donc à l'absurde, ce d'autant qu'un remaniement parcellaire pourrait conduire à la réunion en une seule parcelle des terrains concernés, coupant ainsi court à toutes discussions sur le calcul de l'IUS.

L'OCM avait préavisé favorablement l'accès par l'Impasse de Mon-Idée sans émettre de réserve. Les conditions permettant de refuser la délivrance d'une autorisation de construire au titre de l'art. 14 LCI n'étaient donc pas remplies. Les recourants exagéraient le trafic induit par le projet. Si le projet prévoyait bien la construction de deux places de parking pour chacune des futures villas, celles-là étaient non seulement destinées aux habitants mais également aux visiteurs. Il n'y aurait pas soixante véhicules supplémentaires circulant quotidiennement sur l'Impasse de Mon-Idée. L'accès aux futures villas ne se ferait pas par les parcelles nos 4688, 4690, 4691 et 4692, de sorte qu'aucune servitude de passage sur celles-ci ne serait nécessaire. S'agissant des parcelles qui seraient utilisées, les servitudes de passage existaient déjà. Selon le plan de servitude dressé le 11 septembre 2009 par Monsieur Christian Haller, géomètre officiel, l'assiette de la servitude de passage grevant les parcelles nos 4685, 4686 et 4689 n'était pas respectée par les propriétaires de celles-ci. A cet endroit, la servitude garantissait un accès de 3,16 m de large, soit un accès suffisant pour laisser passer des camions de chantier de 2,30 à 2,50 m de large. La commission avait correctement apprécié les faits en la matière, en se fondant sur les plans de servitude attestant de la largeur du chemin, ainsi que sur les photographies et le CD-Rom versés à la procédure par les recourants.

24. Le 4 décembre 2009, le juge délégué a procédé à un transport sur place en présence des parties, duquel ont résulté les constats suivants :

a. L'Impasse de Mon-Idée, composée de trois segments perpendiculaires les uns vis-à-vis des autres depuis la route de Mon-Idée, constituait la seule voie d'accès aux parcelles nos 6028 à 6040.

b. Au niveau de la première section, des véhicules étaient parqués le long de la parcelle n° 3666 et rendaient la circulation de deux véhicules difficile sur ce tronçon. L'assiette de la route correspondait sur cette section à celle de la servitude de passage précitée telle que relevée par M. Haller dans le plan du 11 septembre 2009.

Une recourante a relevé qu'avant la construction de la villa sise sur la parcelle n° 4695, l'accès aux parcelles nos 6028 à 6040 se faisait au travers de celle-là.

c. Sur la deuxième section, le chemin existant débordait l'assiette de la servitude de passage. Des garages, accessibles par des rampes à la déclivité importante, se trouvaient sous les bâtiments nos 2195 et 2200 (parcelles nos 4695 et 4696), de sorte qu'il n'était pas possible d'en sortir sans souffrir d'une mauvaise visibilité sur les véhicules arrivant du fond de l'impasse.

d. Sur la troisième section, le chemin existant était étroit et ne permettait pas le croisement de deux véhicules. Son tracé était inférieur à celui de l'assiette de la servitude, telle que ressortant du plan de M. Haller du 11 septembre 2009, en raison de l'avancée d'une haie située le long de la parcelle n° 4699.

25. Par courrier de leur avocat du 22 janvier 2010, les promoteurs ont renoncé à se prévaloir de l'autorisation de construire DD 101'477-2. La procédure était dès lors sans objet.

26. Le 25 janvier 2010, le juge délégué a indiqué aux parties qu'il entendait rendre une décision prenant acte de la renonciation de la recourante à se prévaloir de l'autorisation de construire délivrée par le département et déclarant sans objet le recours qu'elle avait interjeté. Il leur a imparti un délai au 5 février 2010 pour se déterminer à ce sujet et pour formuler d'éventuelles autres conclusions.

27. Le 5 février 2010, les recourants ont persisté dans les termes et conclusions de leur recours. Ils n'entendaient aucunement renoncer au bénéfice de la procédure pendante. Les parties avaient été malencontreusement interverties dans la correspondance du Tribunal du 25 janvier 2010. Les intimés avaient formellement renoncé à se prévaloir de l'autorisation de construire visée par la procédure, leur courrier du 22 janvier 2010 ayant valeur de passé-expédient. Ils avaient, ce faisant, adhéré aux conclusions des recourants, de sorte qu'il appartenait au Tribunal d'annuler la décision rendue par la commission le 23 juillet 2009, ainsi que l'autorisation de construire DD 101'477-2.

28. Par courrier du 11 février 2010, l'avocat des intimés s'est plaint de ce que les recourants confondaient la renonciation de ses mandants à se prévaloir de l'autorisation de construire litigieuse avec un acquiescement à leurs conclusions tendant à l'annulation de celle-ci.

Ses mandants n'avaient à aucun moment indiqué qu'ils se ralliaient aux conclusions des recourants, mais uniquement qu'ils ne se prévaudraient pas de la décision querellée. Le but du courrier du 22 janvier 2010 était de faire cesser l'instruction d'une cause qui n'avait plus de raison d'être. Les recourants tentaient quant à eux d'obtenir ni plus ni moins qu'une indemnité de procédure, ce à quoi ils s'opposaient. La cause devait être déclarée sans objet et rayée du rôle.

29. Le 12 février 2010, les recourants ont invité la juridiction de céans à rendre une décision dans le sens de leurs conclusions du 5 février 2010. La problématique des dépens restait pour le surplus entière et devait être tranchée.

30. Le 16 avril 2010, le juge délégué a tenu une audience de comparution personnelle des mandataires.

L'avocat des intimés a expliqué en cette occasion que ses mandants avaient changé d'avis. Ils continuaient à se prévaloir de l'autorisation de construire querellée et demandaient en conséquence à ce que le litige soit tranché.

L'avocat des recourants a persisté dans sa position selon laquelle le courrier du 22 janvier 2010 constituait un passé-expédient, soit un aveu judiciaire. Il a en outre demandé à ce que les intimés établissent qu'ils disposaient bien de l'autorisation des propriétaires du terrain de poursuivre la procédure. Il avait en effet eu vent de ce que l'accord initialement donné par ceux-ci était arrivé à échéance en fin d'année 2009.

L'avocat des intimés a indiqué que l'accord entre les propriétaires et ses mandants avait effectivement été conclu jusqu'à fin 2009, mais que des discussions concernant sa prolongation étaient en cours. Ces discussions relevaient du droit privé et n'affectaient en rien la validité de l'autorisation de construire délivrée.

Le représentant du département a pour sa part déclaré qu'il n'avait pas eu connaissance d'un désaccord entre les propriétaires et les intimés, aucun de ceux-là ne lui ayant fait part d'une renonciation à l'autorisation de construire querellée.

31. Le 25 juin 2010, le juge délégué a tenu une audience de comparution personnelle des parties et d'enquêtes.

a. Selon M. Breccolini, propriétaire des parcelles nos 6034 à 6040, entendu à titre de renseignement, MM. Bucher et Moret avaient été autorisés, par acte notarié du 13 juin 2007, à déposer, en leur propre nom et à leurs frais, une demande d'autorisation de construire sur ses parcelles. La situation n'avait pas changé. Les héritiers de son frère avaient également autorisé les intimés à déposer une requête en autorisation de construire. Lui-même ne se rappelait pas qu'on lui ait parlé du courrier adressé par MM. Bucher et Moret au Tribunal le 22 janvier 2010. A son sens, le dossier continuait et le projet aurait déjà dû être construit.

b. Selon M. Maître, propriétaire de la parcelle n° 4699, les risques que la densification projetée induirait pour la sécurité des personnes résidant dans le voisinage de la route d'accès étaient préoccupants. On dénombrait actuellement quatorze enfants, tandis que l'accès était étroit. A la hauteur des parcelles nos 4690 à 4692, celui-ci l'était particulièrement et une bonne partie de la zone goudronnée empiétait sur ces biens-fonds. Une servitude de passage sur cette bande grevait bien les parcelles nos 4690 à 4692, mais elle bénéficiait exclusivement aux propriétaires de l'Impasse de Mon-Idée, à l'exclusion des parcelles de la famille Breccolini.

c. Selon M. Eliette dit Hermann, propriétaire de la parcelle n° 4685, l'étroitesse de l'Impasse de Mon-Idée était également problématique. Celle-ci formait un S et comportait trois points critiques à angle droit. Le premier se situait au débouché de la route très passante de Mon-Idée. Aux heures de pointe, il y aurait certainement un engorgement à cet endroit du fait des véhicules voulant sortir. Tel était déjà le cas en proportion. A l'angle de la parcelle n° 4695 ensuite, il n'y avait pas de visibilité et deux villas disposaient de garages dont les accès étaient extrêmement pentus. Le chemin était si étroit que deux véhicules de taille moyenne ne pouvaient se croiser, à l'heure actuelle déjà, sans une extrême attention. Le même problème se posait enfin à l'angle de la parcelle n° 4689. Vu l'étroitesse de ce dernier tronçon, qui ne permettait pas à deux véhicules de se croiser, il craignait qu'on veuille rapidement élargir le chemin et empiéter sur son terrain.

d. Selon M. Schulthess, propriétaire de la parcelle n° 4687, l'élément fondamental de son opposition au projet tenait dans le passage de onze à vingt-sept familles utilisant l'Impasse de Mon-Idée. S'agissant des garages en pente précédemment évoqués, ils imposaient à leurs propriétaires de manoeuvrer à deux pour prendre de l'élan, en arrêtant la circulation. Les pompiers étaient venus faire un exercice et n'avaient pas réussi à entrer dans le dernier bout de chemin. On ne pouvait pas imaginer ce qui se passerait si des pompiers devaient intervenir dans le nouveau lotissement. Les mêmes problèmes se posaient avec les camions-poubelles, qui n'arrivaient pas à accéder dans la dernière partie du chemin.

e. Se référant au plan établi par M. Haller le 11 septembre 2009 et relevant l'assiette de la servitude de passage bénéficiant aux parcelles nos 6028 à 6040, M. Bucher a souligné le fait que les haies empiétaient sur ladite assiette. La servitude de passage en question faisait 2,70 m de large au minimum, alors qu'un camion mesurait 2,20 m de large au maximum. Le même type de chemin desservait tous le quartier de villas construites par M. Breccolini. La tendance actuelle était d'aménager plutôt des voies d'accès étroites pour éviter que les gens aillent trop vite.

32. Le 27 septembre 2010, le juge délégué a tenu une nouvelle audience de comparution personnelle des parties et d'enquêtes.

a. Monsieur Florian Baciocchi, entendu comme témoin en sa qualité d'associé gérant de l'entreprise Baciocchi Transports S.à r.l. mandatée par la commune de Thônex pour procéder au ramassage des poubelles dans la zone villas située entre la route de Jussy et la route de Mon-Idée, avait effectué le jour-même à 6h30 le ramassage des poubelles dans l'Impasse de Mon-Idée. Une levée dans ce secteur durait environ trois minutes. Il y en avait deux le lundi, une ou deux le mercredi, une le jeudi et une le vendredi. L'accès y était étroit, mais il n'avait en règle générale pas de problème pour circuler dans ce chemin et ne devait pas y effectuer de manoeuvres. Les habitants connaissaient les horaires de son passage et faisaient en sorte que leurs voitures soient bien parquées. Il pénétrait dans l'impasse par un accès muni d'une barrière fermée à clé, qui se trouvait entre le bâtiment de la douane suisse et celui de la douane française. Il longeait ensuite la parcelle n° 4689, effectuait une boucle et ressortait par l'accès entre les parcelles nos 4693 et 3666. Il ne pénétrait pas dans le segment du chemin situé entre la parcelle n° 4699 et les parcelles nos 4685 et 4686, les habitants de ces villas amenant leurs poubelles sur son trajet.

Une année auparavant, la mairie l'avait convoqué avec son plus gros camion (2,55 m de large - 3,10 m en comptant les rétroviseurs - pour 9 m de long) dans l'Impasse de Mon-Idée. La démarche était liée à un projet d'autorisation de construire sur les parcelles non bâties à l'intérieur de la zone villa. La mairie voulait vérifier s'il pouvait manoeuvrer jusqu'au bout du chemin situé entre les parcelles nos 4699, 4685 et 4686. Il avait effectué une manoeuvre en marche arrière et avait réussi à accéder au fond de l'impasse après trois manoeuvres d'alignement. Il y était parvenu en profitant de ce que deux places de parc sur la parcelle n° 4686 étaient libres. Si des véhicules s'y étaient trouvés, il n'aurait pas pu le faire. Lors de cette réunion avec la mairie, on lui avait indiqué qu'il était prévu de construire un local à containers à l'entrée des parcelles non bâties. Si tel était le cas, ses camions devraient effectuer une marche arrière pour procéder au chargement. Cela ne serait pas très aisé en raison de l'absence d'éclairage, l'idéal étant d'avoir une place pour manoeuvrer à l'entrée des parcelles à construire.

Il reconnaissait son camion de 2,50 m de large et de 8,5 m de long sur les photographies versées à la procédure par les recourants. Celles-ci avaient été prises dans le virage situé entre les parcelles nos 4689 et 4687, alors qu'un véhicule y était parqué. Le chauffeur avait en l'occurrence pu passer sans effectuer de manoeuvre, mais en frottant la haie, ce qui abîmait la carrosserie. Il était possible de croiser dans la partie du chemin situé entre les parcelles nos 3666 et 4693, ainsi que dans la partie principale de l'impasse. Dans cette dernière, le croisement avec son camion impliquait de mordre sur la partie engazonnée. L'un des propriétaires avait construit un muret en retrait de l'alignement de gazon, de sorte que le croisement était possible s'il n'y avait pas de véhicule parqué à cet endroit. L'Impasse de Mon-Idée n'était pas pourvue de trottoirs. Dans le quartier de villas où se situaient les parcelles en question, certains chemins en avaient un, d'autres pas.

b. Délié de son secret de fonction, le témoin Fabien Héritier était l'auteur du préavis rendu par l'OCM à l'égard de la requête en autorisation de construire DD 101'477-2. Son service fondait ses préavis sur les normes de l'Association suisse des professionnels de la route et des transports (ci-après : normes VSS) qui donnaient des caractéristiques en fonction de l'usage. La configuration des lieux en rapport avec la problématique de la sécurité routière des divers usagers (véhicules motorisés, piétons, vélos) était prise en compte. Lorsque la voie d'accès appartenait au domaine public, le service était garant de la sécurité. Si elle appartenait au domaine privé, c'était au requérant de s'assurer que la sécurité y soit garantie.

Il ne s'était pas rendu compte, lors de l'instruction du dossier, que l'Impasse de Mon-Idée était un cheminement sur fonds privé et l'avait traitée selon les critères applicables au domaine public. Globalement, il considérait qu'il était en l'espèce possible d'aménager cette voie d'accès de manière à assurer la sécurité et son fonctionnement ou du moins de gérer la circulation de manière à garantir ceux-ci. Dans son courrier du 5 mars 2008 aux époux Miffon, il avait indiqué que les accès permettaient une desserte adéquate du quartier. Il entendait par-là que le chemin d'accès permettait de desservir les nouveaux quartiers en garantissant la sécurité et son fonctionnement sans entrave. Dans son état actuel, l'Impasse de Mon-Idée remplissait déjà ces conditions. L'idéal aurait été de l'élargir un peu sur certains points pour atteindre 5 m de large, mais elle était d'ores et déjà fonctionnelle. Lui-même ne s'était pas rendu sur place, mais avait travaillé sur la base de photos aériennes. A l'entrée sise entre les parcelles nos 3666 et 4693, la largeur de l'impasse était d'environ 6,50 m. Dans la partie principale, elle variait entre 4 et 5 m. Dans le dernier segment enfin, entre les parcelles nos 4699 et 4685/4686, elle était plus étroite, soit 3,50 m environ. Ces mesures correspondaient aux surfaces bitumées actuelles. Dans son courrier du 5 mars 2008, il s'était référé aux deux cheminements permettant d'accéder à la route de Mon-Idée, dont celui existant entre les parcelles nos 4689 et 4687, mais n'était pas allé plus loin. Il n'avait pas visé un cheminement en boucle, les deux accès fonctionnant à son sens. Le nombre de véhicules empruntant le chemin n'était pas indifférent mais en l'occurrence le fait qu'il y ait trente-deux ou quatre-vingt véhicules n'avait pas d'incidence. Il s'agissait d'un nombre de véhicules pour lesquels la procédure était la même. Pour établir son préavis, il ne s'occupait enfin pas des aspects de droit civil, en particulier de la question de savoir si des servitudes autorisaient le passage ou non. Si le dossier contenait bien un plan de servitudes, il l'avait pris comme tel sans en vérifier l'exactitude ou la portée.

c. Le témoin Marcel Constantin, commandant des pompiers de la commune de Thônex, n'était pas intervenu dans le cadre de la décision attaquée, ni ne connaissait l'Impasse de Mon-Idée. Les pompiers qu'il commandait depuis 17 ans n'avaient jamais eu à intervenir dans cette impasse avec de gros moyens. Ils n'auraient aucun problème à le faire pour un feu sur les parcelles nos 4685, 4686 et 4499, dans la mesure où celles-ci étaient occupées par des villas et compte tenu du plan de servitude n° RS 332. Dans un tel cas, il n'était pas nécessaire d'intervenir avec une grande échelle, des tuyaux pouvant être tirés et des échelles de 13 m amenées à dos d'homme. S'agissant du projet de construction des seize villas, il ne lui appartenait pas de se prononcer sur les aspects de police du feu, des services étant intervenus en la matière dans le cadre de l'examen de la requête en autorisation du construire. Les pompiers interviendraient si un sinistre venait à y éclater.

d. Le témoin Haller, ingénieur-géomètre breveté, était l'auteur du plan de servitude du 11 septembre 2009 versé à la procédure. Sa démarche initiée par les intimés avait consisté à superposer la servitude de passage existante avec l'emprise du chemin goudronné, tel qu'il se présentait à cette époque. Selon ses relevés, le chemin n'occupait pas la totalité de l'assiette de la servitude entre les parcelles nos 4699 et 4685, tandis que la situation inverse se présentait entre les parcelles nos 4694 et 4695/4696. Les relevés effectués sur place avaient une précision de plus ou moins 3 cm. Le report de l'assiette de la servitude avait quant à lui été effectué à partir du plan original graphique, tracé au 500ème. L'assiette de la servitude avait donc une précision de plus ou moins 5 cm. Il avait contrôlé l'exactitude de son relevé en le comparant avec la couche d'information du SITG reportant les servitudes. Il était officier public et disposait en conséquence du droit de signer des plans cadastraux.

33. Le 11 octobre 2010, le juge délégué a tenu sa dernière audience de comparution personnelle et d'enquêtes.

Le témoin Denis Ciaravella, chauffeur employé par la société Portalès & Bonnet, livrait du mazout à M. Eliette dit Hermann, propriétaire de la parcelle n° 4685, au moyen d'un camion à trois essieux de 6 à 6,50 m de long pour 2,5 m de large. Il empruntait pour ce faire la totalité de l'Impasse de Mon-Idée depuis la parcelle n° 4693. Il s'y était rendu deux fois en quatre ans. Il s'agissait d'un chemin étroit où l'on ne pouvait pas croiser. Pour procéder à la livraison, il devait fermer la rue à l'entrée avec un cône durant vingt minutes. Arrivé à la parcelle de M. Eliette dit Hermann, il ne pouvait pas manoeuvrer et pouvait à peine ouvrir les portes de son camion. A cet endroit, le chemin devrait avoir 1,50 m de largeur en plus pour qu'il puisse sortir sans problème de son véhicule. Il entrait en marche avant jusqu'à la parcelle n° 4687, d'où il manoeuvrait pour s'engager en marche arrière sur le dernier tronçon du chemin. Il ressortait ensuite en marche avant, faute de pouvoir faire demi-tour dans l'impasse. Lorsqu'il manoeuvrait en marche avant, il n'avait pas de problèmes de visibilité et ne s'était pas trouvé dans l'impossibilité d'effectuer sa livraison.

34. Dans ses observations après enquêtes du 13 octobre 2010, M. Miffon a rappelé qu'il n'avait pas formellement recouru contre la décision de la commission du 23 juillet 2009, mais qu'il se ralliait à la position et aux griefs des recourants.

A la lecture des procès-verbaux d'audition, il avait été frappé par la légèreté de la direction générale de la mobilité, laquelle avait délivré son préavis positif en totale méconnaissance des réalités du terrain, en se contentant de photos aériennes et sans se préoccuper de la possibilité légale ou non d'utiliser une certaine desserte existante, mais impraticable. Il ne faisait aucun doute que l'Impasse de Mon-Idée n'était à elle seule pas apte à desservir les habitations prévues dans ce périmètre. Les parcelles concernées constituaient désormais une sorte d'enclave, relativement inaccessible, et que M. Breccolini avait lui-même créée en renonçant à la servitude initialement constituée au travers de la parcelle n° 4695 pour y construire une villa supplémentaire.

35. Dans leurs observations après enquêtes du 1er novembre 2010, les recourants ont persisté dans leurs conclusions des 27 août 2009 et 5 février 2010.

Par courrier du 22 janvier 2010 ayant valeur de passé-expédient, les intimés avaient formellement renoncé, sous la plume de leur avocat, à se prévaloir de l'autorisation de construire querellée. Le 11 février 2010, toujours sous la plume de leur avocat, ils avaient une nouvelle fois déclaré qu'ils renonçaient à se prévaloir de cette autorisation, la cause pouvant être déclarée sans objet et rayée du rôle. Les intimés avaient donc par deux fois adhéré aux conclusions des recourants tendant à l'annulation de cette autorisation de construire, dont ils ne souhaitaient plus bénéficier. Plaider le contraire reviendrait à avouer qu'ils avaient tenté de tendre un piège procédural aux recourants pour que ceux-ci renoncent à la procédure et laissent l'autorisation de construire querellée devenir définitive et exécutoire sans nouvel examen par le Tribunal. Celui-ci n'avait ainsi d'autre choix que de faire pleinement droit à leurs conclusions en annulation de la décision de la commission du 23 juillet 2009, ainsi que de l'autorisation de construire du 9 septembre 2008.

Une autorisation de construire ne pouvait être délivrée que si le terrain était équipé (art. 22 al. 2 de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 22 juin l979 - LAT - RS 700), c'est-à-dire desservi d'une manière adaptée à l'utilisation prévue au sens de l'art. 19 al. 1 LAT. Pour qu'une desserte soit adaptée, il fallait que la sécurité soit garantie, que le revêtement soit adéquat, que la visibilité et les possibilités de croisement soient suffisantes et que l'accès des services de secours et de voirie soit assuré. Selon la norme VSS 640 045, le type « route d'accès » devait être appliqué pour la desserte de zones habitées jusqu'à 150 unités de logements. Ses caractéristiques devaient être les suivantes : une ou deux voies de circulation, stationnement libre, présence d'un trottoir, place de rebroussement si la route est sans issue et capacité de laisser croiser deux véhicules de tourisme à vitesse réduite. Le type « chemin d'accès » n'entrait en l'espèce pas en ligne de compte, au motif qu'il ne visait, d'une part, que des chemins mesurant entre 40 et 80 m de long, soit inférieurs à celui de l'Impasse de Mon-Idée, et qu'il ne s'appliquait, d'autre part, pas aux voies d'accès desservant plus de 30 unités de logements. En droit jurassien, lorsqu'une voie d'accès empruntait la propriété d'un voisin, le requérant de l'autorisation de construire devait démontrer que son terrain était au bénéfice d'un droit de passage dont les conditions permettaient la réalisation d'un accès suffisant au sens de l'art. 19 al. 1 LAT, ou du moins, que le propriétaire du fonds servant avait donné son accord formel à la création d'un tel accès.

Ces conditions permettant d'admettre l'existence d'un accès suffisant au sens de l'art. 19 al. 1 LAT n'étaient en l'espèce pas réalisées. Entaché d'erreurs, le préavis de l'OCM était, à cet égard, dépourvu de portée. Les véhicules des services publics, comme ceux de la voirie, n'accédaient que difficilement dans l'Impasse de Mon-Idée au prix de manoeuvres importantes. Les livreurs de mazout devaient manoeuvrer pour atteindre le dernier segment de l'impasse, notamment sur un segment dénué de toute servitude de passage en faveur des constructions projetées. Il n'était pas possible de croiser dans les deux virages à 90° et dans le troisième segment de l'impasse. Dans le second segment de l'impasse, les croisements entre véhicules légers étaient malaisés et n'étaient rendus possibles que grâce à la bonne volonté des propriétaires bordiers qui acceptaient à bien plaire que les conducteurs se rangent sur leurs parcelles ou empiètent sur leurs jardins privatifs. Cet esprit de tolérance ne se manifesterait pas à l'égard des automobilistes se rendant au nouveau lotissement projeté. Exception faite de l'entrée de l'impasse, aucun endroit n'avait été aménagé pour permettre aux véhicules de se croiser ou de faire demi-tour, et le chemin était dépourvu de trottoirs. Dans ces circonstances, l'annulation de la décision de la commission et de l'autorisation de construire querellée s'imposait également au titre de l'art. 14 LCI.

36. Dans leurs observations après enquêtes du 1er novembre 2010, les intimés ont également persisté dans leurs conclusions.

Le 22 janvier 2010, ils avaient renoncé à se prévaloir de l'autorisation de construire litigieuse, en raison du fait qu'ils n'avaient alors pas encore obtenu des propriétaires des terrains le renouvellement de leur accord à la poursuite de la procédure. Ils n'avaient toutefois jamais acquiescé aux conclusions des recourants, comme leur avocat l'avait signifié au Tribunal par courrier du 11 février 2010. Lors de l'audience du 16 avril 2010, leur avocat avait finalement indiqué qu'ils continuaient à se prévaloir de l'autorisation de construire querellée, ayant dans l'intervalle obtenu la prolongation de l'accord conclu avec les propriétaires des parcelles concernées. Les représentants du DCTI et des propriétaires présents à l'audience avaient par ailleurs confirmé qu'ils n'avaient pas eu connaissance d'un renoncement des intimés à se prévaloir de l'autorisation de construire. En définitive, ils n'avaient jamais admis les conclusions des recourants par le biais d'un passé-expédient.

Tous les témoignages recueillis au cours des enquêtes démontraient pour le surplus que la desserte des villas projetées pourrait s'effectuer sans problème et que la sécurité des usagers de l'Impasse de Mon-Idée serait garantie. M. Héritier avait notamment confirmé que l'étroitesse du chemin ne constituait pas un obstacle à l'absorption du léger surcroît de trafic induit par la construction des villas litigieuses. Enfin, et bien que la question relève du droit privé, il était établi que les parcelles nos 6028 à 6040 bénéficiaient d'une servitude de passage à tous usages à charge des recourants leur garantissant l'accès à la route de Mon-Idée.

37. Dans ses observations après enquêtes du 1er novembre 2010 également, le département a persisté dans ses conclusions. Les témoignages de MM. Baciocchi, Héritier, Constantin et Haller avaient clairement démontré que l'édification des constructions projetées ne serait pas de nature à compromettre l'accès par l'Impasse de Mon-Idée.

38. Le 16 novembre 2010, M. Eliette dit Hermann a vendu la parcelle n° 4685, feuille 34, de la commune de Thônex à Madame Elizabeth et Monsieur Stephens Rosas, selon les indications figurant sur le site des publications foncières de l'Etat de Genève (cf. http://www.ge.ch/registre_foncier/publications foncieres.asp?query=detail&annee=2010&numero=11985&requisit=23032, consulté le 12 janvier 2012). Il n'en a pas informé le Tribunal.

39. Par courrier du 30 novembre 2011, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

40. Par courrier du 20 décembre 2011, le juge délégué a prié la direction générale de la mobilité de bien vouloir verser à la procédure la ou les normes VSS à l'origine du prévis rendu par l'OCM le 14 février 2008 à l'égard de l'autorisation de construire litigieuse, lesdites normes n'étant pas accessibles par internet, contrairement aux renseignements donnés en audience. Copie de ce courrier a été transmis aux parties pour information, avec l'indication que la cause était gardée à juger.

41. Le 3 janvier 2012, la direction générale de la mobilité a transmis à la chambre administrative la norme VSS SN 640 291a, traitant de la disposition et de la géométrie des installations de stationnement, de même que la norme VSS SN 640 050 concernant les accès riverains. Lesdites normes ont été transmises aux parties par courrier du 4 janvier 2012.

42. Par courrier du 17 janvier 2012, le juge délégué a enfin sollicité de la direction générale de la mobilité la production des normes VSS SN 640 040b relative aux différents types de route, respectivement SN 640 045 relative aux routes de dessertes, dont il a reçu copie le 19 janvier 2012. Ces pièces ont été transmises aux parties pour leur information par courrier du 31 janvier 2012.

EN DROIT

1. Depuis le 1er janvier 2011, suite à l'entrée en vigueur de la nouvelle loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), l'ensemble des compétences jusqu'alors dévolues au Tribunal administratif a échu à la chambre administrative, qui devient autorité supérieure ordinaire de recours en matière administrative (art. 132 LOJ).

Les procédures pendantes devant le Tribunal administratif au 1er janvier 2011 sont reprises par la chambre administrative (art. 143 al. 5 LOJ). Cette dernière est ainsi compétente pour statuer.

2. Interjeté en temps utile devant la juridiction alors compétente, le recours est recevable de ce point de vue (art. 56A de la loi sur l'organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - aLOJ ; 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10, dans sa teneur au 31 décembre 2010).

3. A teneur de l'art. 60 let. a et b LPA, les parties à la procédure qui a abouti à la décision attaquée et toute personne qui est touchée directement par une décision et a un intérêt personnel digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée, sont titulaires de la qualité pour recourir (ATA/77/2009 du 17 février 2009, et les références citées). La chambre administrative a déjà jugé que les let. a et b de la disposition précitée doivent se lire en parallèle : ainsi, le particulier qui ne peut faire valoir un intérêt digne de protection ne saurait être admis comme partie recourante, même s'il était partie à la procédure de première instance (ATA/5/2009 du 13 janvier 2009, et les références citées).

Il résulte de la jurisprudence que seuls les voisins dont les intérêts sont lésés de façon directe et spéciale ont l'intérêt particulier requis par la loi (ATF 133 II 249 consid. 1.3.1 p. 252 ; 133 II 409 consid. 1 p. 411; Arrêt du Tribunal fédéral 1C_158/2008 du 30 juin 2008 consid. 2). Le recourant doit ainsi se trouver dans une relation spéciale, étroite et digne d'être prise en considération avec l'objet de la contestation. La qualité pour recourir est en principe donnée lorsque le recours émane du propriétaire ou du locataire d'un terrain directement voisin de la construction ou de l'installation litigieuse (ATF 121 II 171 consid. 2b p. 174 ; Arrêts du Tribunal fédéral 1C_7/2009 du 20 août 2009 consid. 1 ; 1C_125/2009 du 24 juillet 2009 consid. 1 ; 1A.222/2006 et 1P.774/2006 du 8 mai 2007, consid. 5 ; ATA/321/2009 du 30 juin 2009 consid. 2 ; ATA/331/2007 du 26 juin 2007 consid. 3d ; sur le cas d'une personne qui va devenir voisine de la construction litigieuse : ATA/450/2008 du 2 septembre 2008 consid. 3). La qualité pour recourir peut être donnée en l'absence de voisinage direct, quand une distance relativement faible sépare l'immeuble des recourants de l'installation litigieuse (ATF 121 II 171 consid. 2b p. 174 ; ATA/331/2007 précité, et la jurisprudence citée). La proximité avec l'objet du litige ne suffit cependant pas à elle seule à conférer au voisin la qualité pour recourir contre la délivrance d'une autorisation de construire. Celui-ci doit en outre retirer un avantage pratique de l'annulation ou de la modification de l'arrêt contesté qui permette d'admettre qu'il est touché dans un intérêt personnel se distinguant nettement de l'intérêt général des autres habitants de la commune (ATF 133 II 249 consid. 1.3.1 p. 252 ; 133 II 181 consid. 3.2.3 ; Arrêts du Tribunal fédéral 1C_503/2008 du 10 février 2009 et 1C_158/2008 du 30 juin 2008 consid. 2).

Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, un intérêt digne de protection suppose un intérêt actuel à obtenir l'annulation de la décision attaquée (ATF 135 I 79 consid. 1 p. 82 ; 131 II 361 consid. 1.2 p. 365 ; 128 II 34 consid. 1b p. 36 ; Arrêts du Tribunal fédéral 1C_33/2009 du 4 juin 2009 consid. 3 ; 1C_76/2009 du 30 avril 2009 consid. 2 ; 6B_34/2009 du 20 avril 2009 consid. 1.3 ; H. SEILER, Handkommentar zum Bundesgerichtsgesetz [BGG], Berne 2007, n. 33 ad art. 89 LTF p. 365 ; K. SPUHLER / A. DOLGE / D. VOCK, Kurzkommentar zum Bundesgerichtsgesetz [BGG], Zurich/St-Gall 2006, n. 5 ad art. 89 LTF p. 167). L'existence d'un intérêt actuel s'apprécie non seulement au moment du dépôt du recours, mais aussi lors du prononcé de la décision sur recours ; s'il s'éteint pendant la procédure, le recours, devenu sans objet, doit être simplement radié du rôle (ATF 125 V 373 consid. 1 p. 374 ; 118 Ib 1 consid. 2 p. 7 ; Arrêt du Tribunal fédéral 1C_76/2009 du 30 avril 2009 consid. 2 ; ATA/195/2007 du 24 avril 2007 consid. 3 et 4 ; ATA/175/2007 du 17 avril 2007 consid. 2a ; ATA/915/2004 du 23 novembre 2004 consid. 2b) ou déclaré irrecevable (ATF 123 II 285 consid. 4 p. 286 et ss. ; 118 Ia 46 consid. 3c p. 53 ; Arrêt du Tribunal fédéral 1C.69/2007 du 11 juin 2007 consid. 2.3 ; ATA/192/2009 du 21 avril 2009 ; ATA/195/2007 du 24 avril 2007 ; ATA/640/2005 du 27 septembre 2005).

4. En l'espèce, M. Eliette dit Hermann a vendu sa parcelle n° 4685 en cours de procédure, sans en informer la chambre administrative (ATA/289/1999 du 11 mai 1999). Il n'a donc plus d'intérêt actuel à l'admission de son recours, lequel sera déclaré irrecevable.

S'agissant des autres recourants, ils ont incontestablement tous la qualité pour recourir au sens de l'art. 60 let. b LPA, dans la mesure où ils sont propriétaires de biens-fonds soit directement voisins des parcelles concernées par le projet de construction litigieux, soit situés à faible de distance de celui-ci, de part et d'autre du seul chemin permettant d'y accéder.

La qualité pour recourir des époux Murray doit également être admise, bien que la commission ait rayé leur cause du rôle en cours de procédure de première instance. La chronologie des pièces au dossier montre en effet que si ces personnes ont, dans un premier temps, annoncé au département qu'elles ne s'opposeraient pas au projet de construction litigieux, elles ont, dans un second temps, bel et bien recouru contre l'autorisation de construire DD 101'477-2, par l'intermédiaire d'un avocat qu'elles avaient dûment mandaté à cet effet et qui a agi en temps utile. N'ayant pas retiré leur recours par la suite, les époux Murray ne pouvaient ainsi pas se voir dénier la qualité de partie à la procédure de première instance.

5. Les recourants soutiennent que les promoteurs auraient, en cours de procédure, acquiescé à leurs conclusions de sorte qu'il reviendrait à la chambre administrative d'annuler sans autre analyse la décision querellée du 23 juillet 2009, respectivement l'autorisation de construire précitée.

La LPA n'indique pas expressément quelles sont les conséquences procédurales résultant d'un acquiescement (ou passé-expédient ; B. BOVAY, Procédure administrative, 2000, p. 429), ni ne définit cette notion. Dans la doctrine relative à la procédure administrative, certains auteurs considèrent l'acquiescement comme une forme de transaction et distinguent - tout au moins en procédure de recours, à l'exclusion de l'action de droit administratif - l'acquiescement et la transaction, d'une part, du retrait du recours, et des cas où la procédure devient sans objet, d'autre part : alors que, dans ces dernières hypothèses, l'autorité judiciaire peut rendre une décision formelle de classement, elle doit, en présence d'une transaction ou d'un acquiescement, rendre une décision sur le fond, laquelle peut toutefois être sommairement motivée. Cette distinction est justifiée notamment par le fait que le prononcé d'une décision de classement laisse subsister et entrer en force la décision attaquée, ce qui n'est voulu qu'en cas de retrait du recours (ATF 2C_299/2009 du 28 juin 2010, consid. 1.3.3, publié in RDAF 2010 II p. 494, et les références doctrinales citées). D'autres auteurs ne font pas la distinction mentionnée ci-dessus. Parmi ceux-ci, certains relèvent que le désistement ou l'acquiescement ne sont admissibles et ne lient l'autorité judiciaire - laquelle rend une décision formelle de classement - que dans la mesure où les parties peuvent disposer de l'objet du litige (ibidem).

En l'espèce, les promoteurs ont déclaré le 22 janvier 2010 qu'ils renonçaient à se prévaloir de l'autorisation de construire DD 101'477-2. Immédiatement après, soit le 11 février 2010, ils se sont toutefois opposés à ce que leur renonciation soit considérée comme un acquiescement aux conclusions des recourants. A l'audience de comparution personnelle des mandataires convoquée aux fins d'éclaircir la situation, leur avocat a enfin expliqué que les propriétaires des terrains en cause avaient renouvelé leur accord à la poursuite du projet et que les intimés entendaient à nouveau se prévaloir de l'autorisation de construire querellée.

La question se pose de savoir si le fait pour les promoteurs d'avoir temporairement renoncé à se prévaloir de l'autorisation de construire DD 101'477-2 doit être considéré comme un acquiescement et, auquel cas, si celui-ci ne pouvait être révoqué au point que la chambre administrative devrait désormais accorder aux recourants le plein de leurs conclusions sans autre examen. Ces questions peuvent toutefois souffrir de demeurer indécises en l'espèce, compte tenu de l'issue du litige.

6. Les recourants allèguent une violation de l'art. 59 LCI. Le département n'aurait à leur sens pas dû calculer l'IUS en se basant sur la surface totale des parcelles concernées par le projet, mais en considération des différents groupes de constructions contiguës prévues par celui-ci. Or, certains de ces groupes auraient un IUS largement supérieur à 25 %, de sorte que la dérogation prévue par l'art. 59 al. 4 LCI ne pouvait être octroyée. Aucun report des droits à bâtir n'aurait en outre été effectué entre les différentes parcelles, ni ne figurerait en condition de l'autorisation de construire délivrée, en violation du principe de la cession des droits à bâtir.

A teneur de l'art. 59 al. 1 LCI, la surface d'une construction, sise en zone villa et exprimée en m2 de plancher, ne doit en principe pas excéder 20 % de la surface de la parcelle. Lorsque les circonstances le justifient et que cette mesure est compatible avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier, le département peut toutefois autoriser, après consultation de la commune et de la commission d'architecture, un projet de construction en ordre contigu dont la surface de plancher habitable n'excède pas 25 % de la surface du terrain (art. 59 al. 4 let. a LCI). L'édification de deux maisons au moins, réunies par un mur mitoyen ou par une construction de peu d'importance et disposant chacune de son propre accès de plain-pied, est réputée en ordre contigu (art. 58 al. 2 LCI).

Selon la jurisprudence, rien n'empêche le propriétaire d'une parcelle quelconque, petite ou moyenne, d'acquérir une parcelle contiguë pour pouvoir augmenter la surface constructible de sa propriété ; et s'il peut acquérir une nouvelle parcelle dans ce but, il peut aussi, dans le même but, adopter cette autre solution qui consiste à convenir avec un propriétaire voisin que ce dernier mette à disposition, pour le calcul de la surface constructible, une surface de terrain qui n'a pas déjà servi à un tel calcul pour un bâtiment existant. Une telle manière de faire est admise en droit suisse, même sans disposition expresse, l'essentiel étant que la surface voisine mise à contribution pour le calcul de la surface constructible ne puisse plus servir ultérieurement à un tel calcul, ce qui implique pratiquement qu'elle soit grevée d'une servitude de non bâtir au profit de la collectivité. En d'autres termes, une surface de terrain qui a déjà été prise une fois en compte pour le calcul d'une surface bâtie ne peut plus l'être par la suite (ATF 101 Ia 289 = JT 1977 I 93 ; ATA/453/2011 du 26 juillet 2011, consid. 11 ; ATA/568/2006 du 31 octobre 2006 ; ATA/361/2003 du 13 mai 2003 ; ATA P. du 28 juin 1994 ; ATA M. du 14 juin 1989).

La constitution d'une servitude n'est toutefois pas indispensable pour empêcher la prise en compte ultérieure, lors d'un calcul de densité, de droits à bâtir cédés ou déjà utilisés, l'essentiel étant qu'une telle cession soit connue du département chargé de la délivrance des autorisations de construire (ATA P. du 28 juin 1994, consid. 2 in fine).

En effet, l'interdiction d'utiliser, pour le calcul de la surface constructible, tout ou partie de la surface ayant déjà servi à un tel calcul existe, à l'instar des autres restrictions de droit public à la propriété, indépendamment de son inscription au registre foncier en vertu de l'art. 680 al. 1 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CCS - RS 210 ; cf. ATF 111 Ia 182, consid. 4 p. 83 ; Arrêts du Tribunal fédéral 1P.586/2004 du 28 juin 2005, consid. 4.6 publié in ZBl 107/2006 p. 369 ; 1P.143/1996 du 5 août 1996, consid. 3b/aa reproduit in JAB 1997 p. 220 ; 2A.116/1994 du 21 décembre 1994, consid. 3c reproduit in RDAT 1995 II n° 57 p. 151 ; 1P.762/1993 du 25 mai 1994, consid. 3cb ; 1P.423/1992 du 12 janvier 1993, consid. 3a). Les cantons peuvent certes prévoir que de telles restrictions fassent l'objet d'une mention au registre foncier, conformément à l'art. 962 al. 1 CCS, pour leur assurer une certaine publicité, mais une telle mention n'est pas exigée et n'a qu'une portée déclaratoire (D. PIOTET, Le transfert du coefficient d'utilisation ou d'occupation du sol et le droit privé fédéral, DC 2000 p. 41 ; Arrêt du Tribunal fédéral 1P.806/2006 du 10 mai 2007, consid. 3.4 in fine). L'argument tiré de la violation des règles de la bonne foi tombe, pour sa part, à faux, dans la mesure où une restriction de droit public à la propriété est opposable à l'acquéreur de bonne foi, même sans inscription au registre foncier (Arrêt du Tribunal fédéral 1P.806/2006 du 10 mai 2007, consid. 3.5, et les références citées).

La juridiction de céans a déjà eu à connaître d'un cas dans lequel le département avait refusé une autorisation de construire portant sur une parcelle dont les droits à bâtir n'étaient pas épuisés, au motif que ceux des constructions existantes avaient été calculés sur la base d'une autre parcelle dont les droits à bâtir avaient été épuisés, avant qu'elle ne soit divisée. Elle a dans ce contexte appuyé la position du département selon laquelle tout nouveau projet de construction devait nécessairement être examiné en relation avec les autres parcelles issues du morcellement, alors qu'aucune inscription au registre foncier n'en faisait état (ATA/586/2006 du 31 octobre 2006).

7. Selon le formulaire statistique rempli par l'intimée et dûment vérifié par le département, le projet querellé prévoit en l'espèce la construction de 3'348 m2 de surface brute de logements sur les 14'040 m2 que comptent les parcelles n° 6028 à 6040. Le rapport de surface, arrêté à 23,8%, a donc bien été calculé sur la base de la surface totale des parcelles concernées par le projet.

Au vu de la jurisprudence précitée, la méthode de calcul utilisée n'est pas critiquable. Elle n'imposait pas d'inscrire au registre foncier les restrictions aux droits de propriété en résultant pour les parcelles ayant servi à augmenter la surface constructible de certaines autres. La construction des seize villas litigieuses a été conçue comme un projet d'ensemble et a été appréhendée comme tel par le département, lequel est parfaitement conscient de la nécessité d'examiner tout nouveau projet de construction dans le secteur en relation avec les autres parcelles visées par l'autorisation de construire DD 101'477-2. Dans ses déterminations du 14 octobre 2009, l'autorité intimée a d'ailleurs offert de modifier le libellé de l'autorisation de construire litigieuse pour en faire expressément état. Ainsi, les futurs propriétaires des parcelles, dont les droits à bâtir auront servi à augmenter la surface constructible des biens-fonds voisins, ne pourront pas utiliser une seconde fois ces droits, sauf à s'exposer à un refus du département d'autoriser un projet les prenant en compte.

En outre, il aurait été démesuré d'exiger un report des droits à bâtir entre les différentes parcelles concernées dans le cas d'espèce, dans la mesure où le projet implique de procéder à une mutation parcellaire expressément visée par l'autorisation de construire querellée et qui en fait partie intégrante. Un tel report aurait engendré des complications excessives et particulièrement inutiles, compte tenu de l'engagement pris par le département d'apprécier toute construction ultérieure susceptible d'augmenter le rapport des surfaces dans le cadre d'un projet d'ensemble, c'est-à-dire valant pour tous les propriétaires du secteur.

La commission n'a donc pas erré en admettant le calcul du rapport des surfaces à l'origine de l'autorisation de construire DD 101'477-2. Sa conclusion selon laquelle le département n'a pas excédé ni abusé de son pouvoir d'appréciation en octroyant la dérogation prévue par l'art. 59 al. 4 LCI, doit de même être confirmée, compte tenu des avis favorables émis en la matière par la commune de Thônex et la commission d'architecture.

Le grief des recourants sera, partant, rejeté.

8. Les recourants soutiennent que le projet ne pouvait être autorisé en raison d'un défaut d'équipement en voie d'accès, respectivement parce que sa réalisation induirait de graves problèmes de circulation au sein de l'Impasse de Mon-Idée.

a. Selon l'art. 22 al. 2 let. b LAT, aucune construction ne peut être autorisée si le terrain n'est pas équipé. Un terrain est réputé équipé lorsqu'il est desservi d'une manière adaptée à l'utilisation prévue par des voies d'accès notamment (art. 19 al. 1 LAT).

b. Pour qu'une desserte routière soit adaptée au sens de cette dernière disposition, il faut d'abord que la sécurité des automobilistes et des autres utilisateurs soit garantie, que le revêtement soit adéquat en fonction du type de véhicules qui vont l'emprunter, que la visibilité et les possibilités de croisement soient suffisantes, et que l'accès des services de secours (ambulances, service du feu) et de voirie soit assuré. La règle de l'art. 19 al. 1 LAT poursuit ainsi des buts de police, tandis qu'il appartient au droit cantonal de régler avec plus de précision les caractéristiques des voies d'accès selon leur fonction (A. JOMINI, Commentaire de la Loi fédérale sur l'aménagement du territoire, 2010, ad. art. 19, p. 8 n.19 ; ATA/434/1998 du 28 juillet 1998 ; ATA G.-R. du 20 juillet 1993).

c. Une voie d'accès est en outre adaptée à l'utilisation prévue lorsqu'elle peut accueillir tout le trafic de la zone qu'elle dessert. Un bien-fonds ne peut pas être considéré comme équipé si, une fois construit, son utilisation entraîne un accroissement du trafic qui ne peut être absorbé par le réseau routier et s'il provoque des atteintes nuisibles ou incommodantes dans le voisinage (A. JOMINI, op. cit., ad. art. 19, p. 8 n. 20).

d. L'art. 14 LCI prévoit dans ce contexte que le département peut refuser les autorisations prévues à l'art. 1 LCI lorsqu'une construction ou une installation peut être la cause d'inconvénients graves pour les usagers, le voisinage ou le public (let. a), ne remplit pas les conditions de sécurité et de salubrité qu'exige son exploitation ou son utilisation (let. b), ne remplit pas les conditions de sécurité ou de salubrité suffisantes à l'égard des voisins ou du public (let. c) ou peut créer, par sa nature, sa situation ou le trafic que provoque sa destination ou son exploitation, un danger ou une gêne durable pour la circulation (let. e). Cette disposition appartient aux normes de protection qui sont destinées à sauvegarder les particularités de chaque zone, en prohibant les inconvénients incompatibles avec le caractère d'une zone déterminée. Elle n'a toutefois pas pour but d'empêcher toute construction dans une zone à bâtir qui aurait des effets sur la situation ou le bien-être des voisins (ATA/100/2011 du 15 février 2011, et les références citées). La construction d'un bâtiment conforme aux normes ordinaires applicables au régime de la zone ne peut en principe pas être source d'inconvénients graves, notamment s'il n'y pas d'abus de la part du constructeur. Le problème doit être examiné par rapport aux caractéristiques du quartier ou des rues en cause (ATA/453/2011 du 26 juillet 2011 ; ATA/649/2002 du 5 novembre 2002, et les arrêts cités.)

e. Enfin, un terrain est équipé au sens du droit fédéral non seulement lorsque l'aménagement d'un accès suffisant aux futures constructions est techniquement possible, mais également lorsqu'il est juridiquement garanti. S'agissant des voies d'accès empruntant un immeuble appartenant à autrui, il faut apporter la preuve que leur réalisation soit juridiquement assurée (ATF 136 III 130 = JdT 2010 I 291, consid. 3.3.2 in fine, et les références citées). Pour qu'un terrain soit considéré comme équipé, celui-ci doit en d'autres termes être raccordé soit à une route du domaine public, soit à une route privée que les utilisateurs des futures constructions ont le droit d'emprunter (chemin en copropriété, servitude de passage) et qui soit techniquement suffisante (A. JOMINI, op. cit., ad. art. 19, p. 10 n. 23 ; P. ZEN-RUFFINEN / CH. GUY-ECABERT, Aménagement du territoire, construction, expropriation, 2001, p. 326 n. 705 ss).

9. En l'espèce, le département puis la commission se sont fondés sur le préavis favorable rendu par l'OCM le 14 février 2008 pour en conclure que le projet n'induirait pas d'inconvénients graves ou durables au sens de l'art. 14 let. a et e LCI et bénéficiait, partant, d'un équipement suffisant en voie d'accès.

Selon une jurisprudence bien établie, chaque fois que l'autorité administrative suit les préavis des commissions consultatives, l'autorité de recours doit s'imposer une certaine retenue, fonction de son aptitude à trancher le litige (ATA/100/2005 du 1er mars 2005 ; T. TANQUEREL, La pesée des intérêts vue par le juge administratif in C. A. MORAND, La pesée globale des intérêts, Droit de l'environnement et aménagement du territoire, Bâle et Francfort-sur-le-Main, 1996, p. 201, et les références citées). Les autorités de recours se limitent à examiner si le département ne s'écarte pas sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l'autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d'émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/453/2011 du 26 juillet 2011 ; ATA/646/1997 du 23 octobre 1997). Lorsque la commission s'écarte des préavis, la chambre administrative peut revoir librement l'interprétation des notions juridiques indéterminées (ATA/648/2006 du 5 décembre 2006). Elle est également libre d'exercer son propre pouvoir d'examen lorsqu'elle procède elle-même à des mesures d'instruction, à l'instar d'un transport sur place (ATA/23/2007 du 23 janvier 2007, consid. 5 ; ATA/440/2006 du 31 août 2006, consid. 4c ; ATA/59/2004 du 20 janvier 2004, consid. 5 ; F. PAYCHERE, Pouvoir d'examen et pouvoir de décision du Tribunal administratif, RDAF 2000 I, p. 543, et les autres références citées).

La chambre de céans a procédé à un transport sur place, respectivement a auditionné l'auteur du préavis du 14 février 2008, dont les conclusions demeuraient contestées par les recourants. Cette instruction a révélé que des erreurs d'appréciation avaient été commises. Au moment où il a rendu son préavis à l'égard du projet querellé, l'OCM croyait en effet que l'Impasse de Mon-Idée appartenait au domaine public, alors qu'il s'agit en réalité d'un cheminement sur fonds privés. Ne s'étant pas transporté sur place et ayant exclusivement travaillé sur la base de photographies aériennes, ce service n'avait de même pas conscience que le tronçon du chemin compris entre les parcelles nos 4689, 4687 et 4688 était fermé par un portail pour des raisons douanières et qu'il n'offrait donc pas de débouché sur la route de Mon-Idée.

Rendu attentif à ces éléments en audience, l'auteur du préavis du 14 février 2008 a indiqué qu'il était, à son sens, possible d'aménager l'Impasse de Mon-Idée de manière à assurer la sécurité et le bon fonctionnement de cette voie d'accès ou, à tout le moins, d'y gérer la circulation de manière à les garantir. Il a également confirmé que ce chemin offrait d'ores et déjà des garanties suffisantes en la matière, même si, idéalement, il aurait été souhaitable de l'élargir à 5 m sur certains tronçons.

Compte tenu des circonstances dans lesquelles le préavis du 14 février 2008 a été rendu (erreurs d'appréciation sur l'affectation au domaine privé, respectivement sur la configuration de l'Impasse de Mon-Idée, absence de transport sur place, mesures effectuées sur la base de photographies aériennes), la chambre administrative ne peut toutefois faire siennes les conclusions de l'OCM, sans en vérifier le bien-fondé par rapport aux prescriptions techniques que ce service a appliquées en l'espèce.

10. Pour s'assurer de l'adéquation de l'Impasse de Mon-Idée par rapport à l'utilisation prévue par le projet, l'OCM s'est basé sur les normes VSS 640 291a et 640 050 traitant de la disposition et de la géométrie des installations de stationnement, respectivement des accès riverains.

Cette pratique, admise par la doctrine et la jurisprudence, a cours dans plusieurs cantons (A. JOMINI, op. cit., ad. art. 19, p. 10 n. 18). Elle se justifie d'autant plus à Genève que le droit cantonal est muet s'agissant des caractéristiques techniques applicables aux différentes voies d'accès. Les normes VSS fixent quant à elles des standards de largeur des routes en fonction de leur utilisation. Si les services spécialisés peuvent s'y référer, elles n'ont toutefois pas force de loi et leur application dans un cas d'espèce doit en toute hypothèse respecter les principes généraux du droit, dont en particulier celui de la proportionnalité (P. ZEN-RUFFINEN / CH. GUY-ECABERT, op. cit., p. 326 n. 703, et les références citées).

La norme VSS 640 050 fixe les caractéristiques techniques des accès riverains, définis comme des raccordements destinés à l'usage de véhicules routiers (entrées et sorties privées) entre une route publique prioritaire et un bien-fonds générant un trafic de faible intensité (ch. 1). Les recommandations qu'elle contient se réfèrent à des biens-fonds ne comportant pas plus d'une quarantaine de cases ou de places de stationnement pour voitures. Les biens-fonds générant davantage de trafic ainsi que les parcs pour deux-roues légers sont régis par les normes sur le stationnement (ch. 3 ; soit la norme VSS 640 291a). La norme VSS 640 050 distingue trois types d'accès riverains (A, B ou C) qu'elle soumet à des exigences géométriques et d'exploitation spécifiques (ch. 7, tableau 2). Les accès riverains de type A n'exigent par exemple pas qu'un croisement soit possible dans la zone de débouché, au contraire des types B et C. La largeur minimale exigée, lorsqu'il y a circulation dans les deux sens, est en outre de 3 m pour les accès riverains de type A, de 5 m pour ceux de type B et de 5,50 m pour les accès riverains de type C. Le type d'accès riverain déterminant dépend du nombre de places de stationnement que compte le bien-fonds à raccorder d'une part et, d'autre part, du type de la route de destination au sens défini par la norme VSS 640 040b (ch. 5, tableau 1).

En l'espèce, il s'agit de raccorder seize villas supplémentaires à la route de Mon-Idée, via l'impasse du même nom. Le projet prévoit la construction de deux places de parking pour chacune de ces villas, soit de trente-deux places de stationnement au total, lesquelles viendront s'ajouter à la quinzaine de places de stationnement existant déjà de part et d'autre du chemin. Le maximum de quarante places de stationnement délimitant le champ d'application de la norme VSS 640 050 étant atteint, c'est à raison que l'OCM s'est également assuré de la compatibilité du projet avec la norme VSS 640 291a relative aux installations de stationnement. Ce service n'a, pour le surplus, pas précisé quel type d'accès riverain il avait retenu pour l'Impasse de Mon-Idée. En raison de sa nature et de ses caractéristiques, la route de Mon-Idée peut être qualifiée de route de desserte de quartier, soit de route desservant une zone habitée jusqu'à 300 unités de logements selon la norme VSS 640 045. En considération du nombre de places de stationnement existant et de celles induites par le projet, ce sont donc les exigences géométriques et d'exploitation des types A/B qui sont déterminantes pour garantir la sécurité et le bon fonctionnement de l'Impasse de Mon-Idée (normes VSS 640 050, ch. 5, tableau 1).

Se fondant sur des photos aériennes, l'OCM a retenu que l'Impasse de Mon-Idée disposait d'une largeur d'environ 6,50 m sur son premier tronçon (entre les parcelles nos 4693/4694 et 3666), de 4 à 5 m sur son tronçon principal et enfin de 3,5 m sur son dernier tronçon (entre les parcelles nos 4685/3686 et 4699) et qu'elle respectait donc les exigences de la norme VSS 640 050 préconisant une largeur de 3 à 5 m pour les accès riverains de types A ou B avec circulation dans les deux sens. Ces mesures correspondent à peu de chose près à celles que le géomètre officiel mandaté par l'intimée a retenues après avoir effectué un levé d'état des lieux, si ce n'est que l'emprise exacte du chemin goudronné aurait, selon lui, une largeur de 6 m sur le premier tronçon et de 2,96 m sur le dernier (cf. plan de servitude du 11 septembre 2009).

11. Ces constatations faites en regard de la surface bitumée de l'Impasse de Mon-Idée ne permettent toutefois pas de conclure, sans autre analyse, au caractère suffisant de la desserte prévue par le projet querellé. En présence d'un cheminement sur fonds privés, les art. 22 al. 2 lit. b et 19 al. 1 LAT commandent en effet non seulement de vérifier que le chemin existant constitue un accès suffisant d'un point de vue technique, mais également que les usagers des parcelles nos 6028 à 6040 disposent bien du droit de l'emprunter.

Or, le seul droit de passage existant actuellement en faveur des parcelles visées par le projet fait l'objet d'une servitude inscrite au registre foncier sous numéro RS 332, dont l'assiette ne correspond pas à celle du chemin existant et lui est inférieure en plusieurs endroits. La servitude en question ne grève notamment pas les parcelles nos 4692, 4691 et 4690, dont deux sont la propriété de recourants qui se refusent à laisser les habitants des futures villas empiéter sur leurs biens-fonds. A teneur du plan dressé le 11 septembre 2009 par M. Haller sur la base du plan original graphique déposé au registre foncier, la servitude n° RS 332 dispose d'un angle de giration inférieur à celui du chemin existant au niveau de la parcelle n° 4694. Sur le tronçon qui suit, elle a une largeur de 4,03 m, puis de 2,70 m seulement jusqu'au second virage à 90°. En bout d'impasse enfin, sa largeur est de 3,8 m, soit légèrement supérieure à celle du chemin existant (2,96 m).

Le droit de passage bénéficiant aux parcelles nos 6028 à 6040 n'atteint ainsi pas les standards préconisés par la norme VSS 640 050 pour le type d'accès riverain dont il est question. Sur 59 m de long, il dispose en effet d'une largeur inférieure au minimum de 3 m exigé. Son tracé particulier, qui comporte notamment deux angles à 90°, induit en outre un manque de visibilité et des possibilités de croisement restreintes qui en compromettent l'utilisation. L'accès au projet querellé par des véhicules de la voirie n'apparaît de même pas garanti juridiquement, puisque ceux-ci devraient, pour atteindre le fond de l'impasse en marche arrière, manoeuvrer sur une portion de la parcelle n° 4687, respectivement empiéter sur des biens-fonds, que la servitude n° RS 332 ne grève pas.

Le seul accès aux parcelles nos 6028 à 6040 qui soit juridiquement garanti revêt ainsi des caractéristiques techniques insuffisantes pour assurer la desserte du nouveau quartier de villas dont il est question en l'espèce. Il s'avère inférieur au cheminement existant, lequel semble avoir d'ores et déjà atteint ses limites de capacité compte tenu des divers témoignages recueillis lors de l'instruction. Un réaménagement de cet accès dans un sens conforme aux prescriptions techniques appliquées par le service spécialisé ne peut au demeurant pas être retenu comme probable, compte tenu de l'opposition au projet des divers propriétaires de l'Impasse de Mon-Idée. La présente espèce se distingue à cet égard de celle examinée dans l'ATA G.-R. du 20 juillet 1993 qui concernait un chemin privé grevé d'une servitude de passage détenu par des copropriétaires, dont la majorité d'entre eux avait d'ores et déjà donné leur accord à son réaménagement.

Le recours sera donc admis sur ce point et la décision querellée du 23 juillet 2009 de même que l'autorisation de construire DD 101'477-2 seront annulées en raison d'un défaut d'équipement des parcelles nos 6028 à 6040 en voie d'accès compte tenu de l'utilisation prévue.

12. Un émolument de CHF 3'000.- sera mis à la charge des promoteurs, qui succombent. Malgré l'issue du litige, aucun émolument ne sera en revanche mis à la charge du DCTI (art. 87 al. 1 LPA dans sa nouvelle teneur dès le 27 septembre 2011). En outre, une indemnité de procédure de CHF 3'000.- sera allouée aux recourants à la charge des promoteurs, d'une part, à hauteur de CHF 1'500.-, et de l'Etat de Genève, d'autre part, à hauteur de CHF 1'500.-.

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare irrecevable le recours interjeté le 27 août 2009 par Monsieur Philippe Eliette dit Hermann contre la décision de la commission cantonale de recours en matière administrative du 23 juillet 2009 ;

déclare recevables les recours interjetés le 27 août 2009 par Mesdames et Messieurs Claire Baumgart, Gianfranco Caci, Gérald Chatelain, Frank Gouverne, Gilles Lavorel, Nicole Leyssen, Réginald Maître, Régine et Antoine Mazloum, Alison et Michael Murray, Christa et Daniel Payot, Pascale et Marc Schulthess, ainsi que Delphine et Dominique Zinner contre la décision de la commission cantonale de recours en matière administrative du 23 juillet 2009 ;

au fond :

les admet ;

annule la décision DCCR/739/2009 rendue par la commission cantonale de recours en matière administrative le 23 juillet 2009 ;

annule l'autorisation de construire DD 101'477-2 délivrée par le département des constructions et des technologies de l'information le 9 septembre 2008 ;

met à la charge de Bucher & Moret S.à r.l. - GP HP S.A. un émolument de CHF 3'000.- ;

alloue aux recourants une indemnité de procédure de CHF 3'000.- à la charge de l'Etat de Genève à hauteur de CHF 1'500.- et de Bucher & Moret S.à r.l. - GP HP S.A. à hauteur de CHF 1'500.- ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Christian Grosjean, avocat des recourants, à Me Pascal Pétroz, avocat de Bucher & Moret S.à r.l. - GP HP S.A., à Madame Françoise et Monsieur Claude Miffon, au département des constructions et des technologies de l'information, ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeants : M. Thélin, président, Mmes Hurni et Junod, MM. Dumartheray et Verniory, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste:

 

 

C. Derpich

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :