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Décisions | Chambre civile

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C/26524/2014

ACJC/807/2019 du 28.05.2019 sur JTPI/12415/2018 ( OO ) , JUGE

Recours TF déposé le 10.07.2019, rendu le 25.05.2020, CASSE, 4A_350/2019
Descripteurs : ACTION EN RESPONSABILITÉ;AVOCAT;ACTION EN DIVORCE;IMMEUBLE;RÉGIME MATRIMONIAL
Normes : CO.97.al1; CO.398.al2; CO.44.al1; aCC.140; CL.22.ch1
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/26524/2014 ACJC/807/2019

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du mardi 28 mai 2019

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______, appelante d'un jugement rendu par la 19ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 17 août 2018, comparant par Me Adriano Gianinazzi, avocat, boulevard des Tranchées 36, 1206 Genève, en l'étude duquel elle fait élection de domicile,

et

Monsieur B______, domicilié ______, intimé, comparant par Me Albert Rey-Mermet, avocat, place du Molard 3, 1204 Genève, en l'étude duquel il fait élection de domicile.


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/12415/2018 du 17 août 2018, notifié le 22 août 2018 aux parties, le Tribunal de première instance a débouté A______ de ses conclusions en paiement dirigées contre B______, au titre de la responsabilité de mandataire
(ch. 1 du dispositif), arrêté les frais judiciaires à 15'400 fr. (ch. 2), mis à la charge de A______ et compensés avec les avances de frais fournies par celle-ci (ch. 3), ordonné aux Services financiers du Pouvoir judiciaire de restituer l'avance de frais effectuée par B______ en 200 fr. (ch. 4), condamné A______ à payer à B______ 19'200 fr. à titre de dépens (ch. 5) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 6).

B. a. Par acte déposé au greffe de la Cour de justice le 20 septembre 2018, A______ a formé appel de ce jugement et sollicité son annulation. Cela fait, elle a conclu à ce que la Cour condamne B______ à lui payer 147'716 euros 06 avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 1er juillet 2001, 11'174 euros 06 avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 28 août 2013 et 23'356 fr. 70 avec intérêts moratoires à 5% dès la date moyenne du 18 mars 2011, sous suite de frais et dépens.

b. B______ a conclu au rejet de l'appel et au déboutement de A______ de toutes ses conclusions, sous suite de frais et dépens.

c. A______ n'ayant pas répliqué, la Cour a informé les parties de ce que la cause était gardée à juger le 9 janvier 2019.

C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier :

a. A______ et C______ se sont mariés le ______ 1986, sans conclure de contrat de mariage.

b. Au début de l'année 2001, les époux, envisageant un divorce d'accord, se sont adressés à B______, avocat inscrit au barreau de Genève, pour qu'il mette par écrit les termes de la convention concernant leur divorce.

A______ - qui a déclaré avoir été menacée par son mari afin d'accepter les termes de l'accord - et C______ ont signé la convention rédigée par B______ le
12 février 2001.

Aux termes de cette convention, C______ s'est engagé à verser à A______
3'000 fr. par mois à titre de contribution d'entretien, ainsi qu'à céder sa part de copropriété d'un immeuble soumis au régime de la propriété par étages, sis au D______ [GE], dont il s'est engagé à assurer le paiement de toutes les charges, et à couvrir les primes d'une assurance-vie souscrite par A______. Moyennant le respect des dispositions de la convention, les époux ont convenu avoir liquidé leur régime matrimonial et n'avoir plus aucune créance à faire valoir l'un envers l'autre.

c. Le 16 février 2001, B______ a déposé cette convention avec une requête commune en divorce devant le Tribunal de première instance. Ce faisant, il s'est formellement constitué pour la défense des intérêts de A______.

Le Tribunal a entendu les époux séparément à une date indéterminée, puis ensemble, sur les points essentiels de la convention.

d. Par acte notarié établi à Genève le 10 mai 2001, A______ et C______ se sont partagé la propriété de quinze biens immobiliers situés dans le canton de Genève, qui appartenaient à la masse matrimoniale des acquêts et dont treize étaient inscrits au nom de C______ seul, le solde étant détenu en copropriété. Celui-ci est devenu, au terme de l'accord, propriétaire de quatorze biens immobiliers, un seul - le même immeuble que celui visé dans la convention de divorce - revenant à A______. Aucune contrepartie financière n'était prévue entre les parties si ce n'est le paiement des frais de logement de A______ par C______, comme déjà convenu au stade du divorce.

Cet acte notarié n'a pas été soumis au juge du divorce.

e. Le 22 mai 2001, A______ et C______ ont chacun signé une déclaration adressée au Tribunal dans laquelle ils confirmaient leur volonté de divorcer ainsi que les termes de la convention de divorce du 12 février 2001.

f. Par jugement du 14 juin 2001, le Tribunal a prononcé le divorce des époux et ratifié la convention signée le 12 février 2001.

Aucune partie n'a interjeté appel contre ce jugement.

g. A une date indéterminée, A______ et C______ ont consulté B______, car ils souhaitaient régler le sort de biens immobiliers qu'ils détenaient en copropriété à parts égales et situés à E______, province de F______ (Italie). Ils ont ainsi signé un "avenant à la convention de divorce" (ci-après : l'avenant), non daté, rédigé par B______.

Selon le rapport d'expertise du 18 juillet 2017, obtenu par commission rogatoire ordonnée par le Tribunal, les biens immobiliers susvisés sont un entrepôt, une habitation sur trois niveaux d'une superficie de 298 m2 et plusieurs terrains agricoles. Le bâtiment, constitué d'un corps de ferme vétuste, est en mauvais état de conservation et entièrement abandonné. L'expert a ainsi constaté d'abondantes infiltrations d'eau pluviales qui ont détérioré le bâtiment. Il en a conclu que la valeur vénale des immeubles au moment de l'expertise s'élevait à 147'716 euros 06, tandis qu'elle était de 133'608 euros 06 en 2001 selon ses estimations.

Les parties s'opposent sur la date à laquelle la question des biens immobiliers italiens a été abordée devant B______. A______ a déclaré devant le Tribunal que la signature de l'avenant avait eu lieu le même jour que la convention de divorce, voire le jour suivant. B______ a reconnu dans un courrier du 23 septembre 2009 que l'avenant avait été signé en sa présence. S'agissant de la date de cette signature, B______ l'a située, dans sa réponse, postérieurement au dépôt de la requête en divorce. Puis, il a déclaré en audience que la question lui avait été soumise après le dépôt de la convention et que, durant la procédure de divorce, il ignorait ce qu'il était advenu de cet avenant. Enfin, il a déclaré ignorer si l'avenant était signé au moment du prononcé du jugement de divorce et qu'il n'avait jamais été mis en possession d'une copie signée de ce document.

Selon les termes de cet avenant, C______ s'est engagé à céder en pleine propriété à A______ "la propriété [- il n'est pas mentionné qu'il y en aurait plusieurs -] qu'il possède" à E______. L'avenant prévoyait que C______ procéderait aux démarches nécessaires en vue du transfert de sa part de propriété dès l'entrée en force du jugement de divorce.

L'avenant n'a pas été produit dans le cadre de la procédure de divorce. Les parties s'opposent ici encore sur la raison de ce choix. Selon les allégués de A______ dans sa demande, B______ ne l'avait pas informée qu'il n'allait pas produire l'avenant simultanément à la convention de divorce. Elle a déclaré en audience devant le Tribunal que C______ lui avait expliqué que, les biens immobiliers italiens n'étant pas déclarés au fisc suisse, ils ne devaient pas apparaître dans la convention de divorce. La solution de l'avenant avait donc été adoptée, mais elle n'avait pas compris "ce qui l'attendait" du fait que l'avenant n'était pas soumis au juge du divorce. Elle avait d'ailleurs d'abord cru que l'avenant serait soumis au juge - ce qui était important pour elle -, puis s'était rendue compte devant celui-ci que tel n'avait pas été le cas. Pourtant, elle n'avait rien dit au juge, "car [elle pensait] stupidement que l'avenant était annexé à la convention." Si on lui avait expliqué que l'avenant "ne valait rien", elle n'aurait pas accepté de signer la convention de divorce, puisqu'elle voulait à tout prix les immeubles italiens. Selon les allégués de B______, les époux avaient intentionnellement soustrait le partage des immeubles italiens à la convention de divorce pour des raisons fiscales (immeubles non déclarés au fisc genevois et refus de s'expliquer sur les avoirs utilisés pour les acquérir). Ainsi, l'instruction lui avait été donnée de ne pas soumettre l'avenant au juge du divorce.

A______ reproche à B______ de ne pas lui avoir exposé que l'avenant était dépourvu d'effet juridique contraignant vis-à-vis de C______.

h. C______ ne s'étant pas conformé aux engagements pris dans l'avenant, les conseils choisis après le divorce par chacun des ex-époux ont échangé plusieurs correspondances, entre octobre 2004 et juin 2009, dans le but de trouver un arrangement amiable.

i. A______ a ouvert une procédure devant le Tribunal de F______ (Italie), afin d'obtenir le transfert de la part de copropriété de son ex-époux conformément à l'avenant.

Par jugement du 13 août 2013, le Tribunal de F______ a rejeté cette demande, considérant qu'en vertu du droit suisse applicable à l'avenant, ce dernier n'était pas valable car, en tant que complément à la convention sur les effets du divorce, il n'avait pas été homologué par le juge suisse du divorce.

Aucun recours ou appel n'a été formé contre cette décision.

Les frais engagés par A______ dans cette procédure se sont élevés à 11'174 euros 06.

j. Les 28 janvier 2011, 15 décembre 2011 et 3 mai 2013, B______ a signé des déclarations de renonciation à la prescription à l'égard de A______, valables en dernier lieu jusqu'à fin juin 2015.

k. L'activité extrajudiciaire développée par l'avocat suisse de A______ du
19 décembre 2008 au 19 janvier 2012 lui a coûté 23'356 fr. 70.

l. Par acte déposé au greffe du Tribunal de première instance le 28 mai 2015, A______ a assigné B______ en paiement de 200'000 euros, plus intérêts moratoires à 5% l'an dès le 1er juillet 2001, correspondant au dommage causé par le fait qu'elle avait été empêchée d'obtenir la pleine propriété des biens immobiliers sis en Italie, de 11'174 euros 06, plus intérêts moratoires à 5% l'an dès le 28 août 2013, correspondant aux frais de procédure et honoraires de l'avocat italien intervenu dans la procédure ayant abouti au jugement du 13 août 2013 du Tribunal de F______ et 23'356 fr. 70, plus intérêts moratoires à 5% l'an dès la date moyenne du 18 mars 2011, correspondant aux honoraires de son avocat actuel jusqu'au dépôt de la demande.

m. Dans sa réponse du 5 octobre 2015, B______ a conclu au rejet de la demande.

n. Par ordonnance du 29 septembre 2016, le Tribunal a constaté que C______ avait refusé de comparaître en tant que témoin, faisant usage de son droit de refus absolu de collaborer (art. 165 al. 1 let. a CPC).

o. Dans leurs plaidoiries finales écrites des 8 et 28 juin 2018, les parties ont persisté dans leurs conclusions.

D. Dans le jugement entrepris, le Tribunal a retenu que le contrat de mandat liant A______ et B______ avait été violé par celui-ci, car, bien que celle-là avait compris que l'avenant litigieux n'avait pas été produit devant le juge du divorce, ce qui ne résultait pas d'un oubli, l'avocat avait violé son devoir d'informer et de conseiller utilement sa cliente à ce sujet. Il n'avait pas allégué avoir attiré l'attention de sa cliente sur les risques potentiels liés au choix de ne pas produire cet avenant dans la procédure de divorce, soit notamment l'absence de validité légale de l'accord. La cliente ne pouvait donc pas comprendre la portée de sa décision, prise en concertation avec son futur ex-époux. Dans ce cadre A______ - compte tenu de la possibilité d'une procédure unilatérale en divorce à l'issue incertaine - n'était pas parvenue à démontrer, au degré de la vraisemblance prépondérante, qu'une information suffisante reçue de son avocat lui aurait permis d'obtenir le transfert de la part de copropriété de son ex-époux, de disposer de ce bien et d'éviter le dommage allégué.

EN DROIT

1. 1.1 Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable contre les décisions finales lorsque la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 1 et 2 CPC).

Dès lors qu'en l'espèce les conclusions prises en dernier lieu par l'appelante devant le premier juge tendaient au paiement de sommes en capital s'élevant à un total de plus de 200'000 fr., la voie de l'appel est ouverte.

1.2 L'appel a été interjeté dans le délai de trente jours (art. 311 al. 1 et 145 al. 1 let. a CPC) et suivant la forme prescrite par la loi (art. 130, 131, 311 al. 1 CPC). Il est ainsi recevable.

1.3 La Cour revoit la cause en fait et en droit avec un plein pouvoir d'examen
(art. 310 CPC). En particulier, elle contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par le juge de première instance (art. 157 CPC en relation avec l'art. 310 let. b CPC). Elle applique la maxime des débats et le principe de disposition
(art. 55 al. 1 et 58 al. 1 CPC).

2. L'appelante estime que la responsabilité de l'intimé, en tant que mandataire, a été écartée à tort par le Tribunal.

2.1
2.1.1
En sa qualité de mandataire, l'avocat est tenu à la bonne et fidèle exécution du mandat (art. 398 al. 2 CO). Il répond à l'endroit de son mandant s'il lui cause un dommage en violant ses obligations de diligence et de fidélité
(ATF
134 III 534 consid. 3.2.2; 127 III 357 consid. 1b et les références). Savoir si la manière d'agir d'un avocat doit être qualifiée de conforme ou non à son devoir de diligence résulte d'une pesée appréciative entre, d'une part, le risque engendré par le métier d'avocat et, d'autre part, l'autorité renforcée dont il est revêtu à l'égard de son mandant (ATF 134 III 534 consid. 3.2.2; 127 III 357 consid. 1c; arrêt du Tribunal fédéral 4A_558/2017 du 29 mai 2018 consid. 5.3.2). L'avocat n'est pas tenu à une obligation de résultat, il ne répond pas des aléas entourant la reconnaissance d'une opinion juridique déterminée et il incombe au client de supporter les risques du procès (ATF 134 III 534 consid. 3.2.2; 117 II 563
consid. 2a; arrêt du Tribunal fédéral 4D_59/2017 du 7 mars 2018 consid. 2.6.2). Du devoir de fidélité découle en particulier pour l'avocat l'obligation d'informer suffisamment son mandant sur les difficultés que représente son affaire, afin qu'il puisse avoir pleine conscience des risques qu'il devra assumer (ATF 127 III 327 consid. 1d; arrêt du Tribunal fédéral du 4A_380/2016 du 1er novembre 2016 consid. 4.1).

2.1.2 La responsabilité du mandataire est subordonnée aux quatre conditions suivantes (art. 97 al. 1 CO) : la violation du contrat, le dommage, le rapport de causalité (naturelle et adéquate) entre la violation contractuelle et le dommage, ainsi que la faute. Le mandant supporte le fardeau de la preuve (art. 8 CC) des trois premières conditions (ou faits pertinents), ce qui signifie que, si le juge ne parvient pas à une conviction, n'est pas à même de déterminer si chacun de ces faits s'est produit ou ne s'est pas produit, il doit statuer au détriment du mandant (ATF 132 III 689 consid. 4.5; 129 III 18 consid. 2.6; 126 III 189 consid. 2b). En revanche, il incombe au mandataire, dont la faute est présumée, de prouver la quatrième condition, à savoir qu'aucune faute ne lui est imputable ("à moins qu'il ne prouve..."); il supporte ainsi le fardeau de la preuve des faits libératoires pour le cas où le juge ne serait pas convaincu de l'absence d'une faute (renversement du fardeau de la preuve; arrêt du Tribunal fédéral 4A_352/2018 du 25 février 2019 consid. 3.3).

Il y a causalité naturelle entre deux événements lorsque, sans le premier, le second ne se serait pas produit; il n'est pas nécessaire que l'événement considéré soit la cause unique ou immédiate du résultat. L'existence d'un lien de causalité naturelle entre le fait générateur de responsabilité et le dommage est une question de fait que le juge doit trancher selon la règle de la vraisemblance prépondérante lorsque, par la nature même de l'affaire, une preuve stricte n'est pas possible ou ne peut être raisonnablement exigée de celui qui en supporte le fardeau (état de nécessité en matière de preuve); tel est en particulier le cas de l'existence d'un lien de causalité hypothétique (cf. ATF 133 III 81 consid. 4.2.2, 462 consid. 4.4.2).

La vraisemblance prépondérante suppose que, d'un point de vue objectif, des motifs importants plaident pour l'exactitude d'une allégation, sans que d'autres possibilités ne revêtent une importance significative ou n'entrent raisonnablement en considération (ATF 133 III 81 consid. 4.2.2 et les arrêts cités). 

Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral à propos de la causalité en cas d'omission (cf. ATF 132 III 715 consid. 2.3), pour retenir une causalité naturelle en pareil cas, il faut admettre par hypothèse que le dommage ne serait pas survenu si l'intéressé avait agi conformément à la loi. Un lien de causalité naturelle ne sera donc pas nécessairement prouvé avec une exactitude scientifique. Le rapport de causalité étant hypothétique, le juge se fonde sur l'expérience générale de la vie et émet un jugement de valeur. En règle générale, lorsque le lien de causalité hypothétique entre l'omission et le dommage est établi, il ne se justifie pas de soumettre cette constatation à un nouvel examen sur la nature adéquate de la causalité. Ainsi, lorsqu'il s'agit de rechercher l'existence d'un lien de causalité entre une ou des omissions et un dommage, il convient de s'interroger sur le cours hypothétique des événements (arrêt du Tribunal fédéral 4A_297/2015 du
7 octobre 2015 consid. 4.2).

En matière médicale, c'est au médecin qu'il appartient d'établir qu'il a suffisamment renseigné le patient et obtenu le consentement éclairé de ce dernier préalablement à l'intervention (arrêt du Tribunal fédéral 4P.265/2002 du 28 avril 2003 consid. 4.2 et les références; cf. aussi ATF 117 Ib 197 consid. 5a;
ATF 113 Ib 420 consid. 4; ATF 108 II 59 consid. 3). En l'absence de consentement éclairé, la jurisprudence reconnaît au médecin la faculté de soulever le moyen du consentement hypothétique du patient. Le praticien doit alors établir que le patient aurait accepté l'opération même s'il avait été dûment informé. Le fardeau de la preuve incombe là aussi au médecin, le patient devant toutefois collaborer à cette preuve en rendant vraisemblable ou au moins en alléguant les motifs personnels qui l'auraient incité à refuser l'opération s'il en avait notamment connu les risques. En principe, le consentement hypothétique ne doit pas être admis lorsque le genre et la gravité du risque encouru auraient nécessité un besoin accru d'information, que le médecin n'a pas satisfait. Dans un tel cas, il est en effet plausible que le patient, s'il avait reçu une information complète, se serait trouvé dans un réel conflit quant à la décision à prendre et qu'il aurait sollicité un temps de réflexion. Selon la jurisprudence, il ne faut pas se baser sur le modèle abstrait d'un "patient raisonnable", mais sur la situation personnelle et concrète du patient dont il s'agit (ATF 117 Ib 197 consid. 5a et les références). Ce n'est que dans l'hypothèse où le patient ne fait pas état de motifs personnels qui l'auraient conduit à refuser l'intervention proposée qu'il convient de considérer objectivement s'il serait compréhensible, pour un patient sensé, de s'opposer à l'opération
(ATF 133 III 121 consid. 4.1.3; ATF 117 Ib 197 consid. 5c; arrêt du Tribunal fédéral 4A_353/2018 du 1er avril 2019 consid. 2.1).

S'il appartient au lésé de prouver la relation de causalité naturelle, l'objection du comportement de substitution licite doit être soulevée par "l'auteur" du dommage, qui doit démontrer que le préjudice serait survenu même s'il avait agi conformé-ment au droit (cf. ATF 122 III 229 consid. 5a/aa; arrêt du Tribunal fédéral 4C_156/2005 du 28 septembre 2005 consid. 3.5.6). Ainsi, en cas de violation positive du contrat, le lésé doit prouver la causalité naturelle entre la violation commise et le dommage (in casu un faux certificat médical provoquant un refus de l'assurance-invalidité de prester), que l'auteur du dommage a l'opportunité de contester, alors que celui-ci doit démontrer que le comportement de substitution licite aurait conduit au même résultat (Werro, L'objection du comportement de substitution licite, in Les causes du dommage, 2007, p. 70 et suivante).

2.1.3 A teneur de l'art. 44 al. 1 CO, le juge peut réduire les dommages-intérêts, ou même n'en point allouer, lorsque la partie lésée a consenti à la lésion ou lorsque des faits dont elle est responsable ont contribué à créer le dommage, à l'augmenter, ou qu'ils ont aggravé la situation du débiteur. Cette disposition est applicable à la responsabilité contractuelle par le renvoi de l'art. 99 al. 3 CO.

Dans la mesure où le devoir de minimiser le dommage découle des règles de la bonne foi, il s'applique également à l'auteur du dommage. Selon les circonstances, on peut ainsi attendre de ce dernier qu'il renseigne le lésé sur l'existence de ce devoir, qu'il lui prête son concours, voire qu'il le conseille sur des mesures adéquates à prendre, en particulier s'il dispose de connaissances spécialisées (arrêt du Tribunal fédéral 4C_191/2004 du 7 septembre 2004 consid. 5; Werro,
La responsabilité civile, 3ème éd. 2017, n. 1343).

De nombreux auteurs et le Tribunal fédéral estiment qu'en vue de minimiser son dommage, le lésé peut être tenu d'ouvrir une action contre un tiers ou de recourir contre une décision, si cette mesure est raisonnable. Ils précisent toutefois que, pour admettre cette incombance, il faut tenir compte des chances de réussite de l'action (Achtari, Le devoir du lésé de diminuer son dommage, 2008, n. 381 et les références citées).

2.1.4 D'après la jurisprudence, lorsque, à la suite d'une inadvertance, d'une erreur de droit ou de l'ignorance d'un fait, le juge a omis de régler une question qui devait l'être nécessairement en cas de divorce, son jugement présente une lacune et doit être complété par une nouvelle décision. Cette procédure subséquente n'est pas uniquement ouverte lorsque cette lacune se rapporte à un point que le juge du divorce aurait dû trancher d'office, sans égard aux conclusions des parties, mais aussi lorsque les prétentions qui dépendent de l'autonomie des parties n'ont pas fait l'objet d'une décision, que ce soit dans le jugement lui-même ou dans une convention homologuée (ATF 81 II 313 consid. 2; 104 II 289 consid. 3;
108 II 381 consid. 4; arrêts du Tribunal fédéral 5C_175/1991 du 22 mai 1992 consid. 2a; 5A_549/2011 du 31 mai 2012 consid. 3.1, 5A_227/2015 du
16 novembre 2015 consid. 2.2.1).

La suppression de la copropriété entre les époux et l'attribution subséquente de l'immeuble à l'un des conjoints ne sont pas des points que le juge du divorce doit nécessairement résoudre. S'il peut être opportun de régler toutes les prétentions patrimoniales entre les époux à l'occasion du divorce, la dissolution du régime matrimonial n'impose pas pour autant de procéder d'emblée au partage de la copropriété de l'immeuble, ce lien pouvant perdurer entre époux divorcés (cf.
ATF 136 V 57 consid. 5.4, au sujet d'époux propriétaires communs [art. 652 CC] après leur divorce à l'étranger; art. 205 CC; Steinauer, Commentaire Romand CC I, n. 12 ad art. 205 CC).

2.2
2.2.1
A teneur de l'art. 140 aCC - dans sa teneur en vigueur en 2001 -, la convention sur les effets du divorce n'est valable qu'une fois ratifiée par le juge. Elle figure dans le dispositif du jugement (al. 1). Avant de ratifier la convention, le juge s'assure que les époux l'ont conclue après mûre réflexion et de leur plein gré, qu'elle est claire et complète et qu'elle n'est pas manifestement inéquitable (al. 2).

Cette disposition s'appliquait à toutes les conventions relatives aux conséquences patrimoniales entraînées par le divorce, en particulier la contribution d'entretien du conjoint après le divorce, la liquidation du régime matrimonial et le règlement des dettes entres les époux. Il importait peu qu'elles aient été conclues avant ou pendant la procédure de divorce, avant ou pendant le mariage (arrêts du Tribunal fédéral 5A_501/2015 du 12 janvier 2016 consid. 3.1.1; 5A_40/2011 du 21 juin 2011 consid. 3.3; 5A_599/2007 du 2 octobre 2008 consid. 6.1, publié in FamPra.ch 2009 p. 749; 5C_270/2004 du 14 juillet 2005 consid. 4.1, publié in FamPra.ch 2006 p. 438 et les références).

Par la ratification, la convention devenait partie intégrante du jugement; elle participait à la force de chose jugée de celui-ci, de sorte que les parties n'étaient plus habilitées à la remettre en cause en dehors d'une procédure de révision cantonale (ATF 119 II 297 consid. 3b; arrêt du Tribunal fédéral 5A_464/2008 du 15 décembre 2008 consid. 2.3). La ratification par le tribunal était donc une condition de validité. Toutes les conventions qui n'étaient pas approuvées par le tribunal n'avaient aucune validité, indépendamment de ce qu'elles prévoyaient une solution plus ou moins avantageuse que celle de la convention approuvée
(ATF 127 III 357 consid. 3b).

2.2.2 Aux termes de l'art. 1 par. 2 let. a de la Convention de Lugano (CL), sont exclus du champ d'application de cette convention l'état et la capacité des personnes physiques, les régimes matrimoniaux, les testaments et les successions.

Ni la notion de régimes matrimoniaux, ni celle d'obligations alimentaires ne sont spécialement définies dans la CL. Ces notions doivent être interprétées de manière autonome (ATF 142 III 466 consid. 4.2.1).

Selon la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) - (anciennement Cour de justice des Communautés européennes [CJCE]) - rendue sous l'empire de la Convention de Bruxelles de 1968 (modifiée en 1978 et 1982), si la prestation est destinée à assurer l'entretien d'un époux dans le besoin ou si les besoins et les ressources de chacun des époux sont pris en considération pour déterminer son montant, la décision a trait à une obligation alimentaire. Mais si la prestation vise uniquement à la répartition des biens entre les époux, la décision concerne les régimes matrimoniaux et ne peut donc être exécutée en application de la convention. Ainsi, la décision rendue dans le contexte d'une procédure de divorce, qui ordonne le paiement d'une somme forfaitaire ainsi que le transfert de la propriété de certains biens d'un époux au profit de son ex-conjoint doit être considérée comme portant sur des obligations alimentaires si elle a pour objet d'assurer l'entretien de cet ex-conjoint (ATF 142 III 466 consid. 4.2.1).

La notion de "régimes matrimoniaux" n'englobe pas seulement les régimes prévus dans les droits nationaux (régime matrimonial au sens étroit), mais également toutes les relations patrimoniales entre les époux qui découlent directement du mariage ou de sa dissolution. En revanche, elle ne vise pas les relations entre époux qui reposent sur des contrats de droit des obligations ou de droits réels - lesquelles n'ont de ce fait pas de rapport particulier avec le mariage -, qui sont entièrement soumises au champ d'application de la CL, et ce même si des règles sur la liquidation des rapports patrimoniaux contractuels se trouvent dans les dispositions applicables à la liquidation du régime matrimonial. Ainsi, des contrats de société entre époux, qui pourraient être passés par des tiers - comme une société simple du droit suisse - tombent dans le champ d'application de la Convention de Lugano (ATF 142 III 466 consid. 4.2.1).

Il s'ensuit que tout le droit matrimonial, sauf les obligations alimentaires, est exclu du champ d'application de la Convention de Lugano, mais que les rapports purement obligationnels entre les époux, qui n'ont rien à voir avec le mariage et reposent sur le droit des obligations ou les droits réels, sont soumis à ladite Convention (ATF 142 III 466 consid. 4.2.1).

2.2.3 A teneur des art. 51 let. b et 63 al. 1 LDIP, le juge compétent pour connaître du divorce l'est aussi pour connaître de la liquidation du régime matrimonial.

La LDIP ne limite pas la compétence du juge du divorce, chargé de la liquidation du régime matrimonial, aux seuls biens sis en Suisse; au contraire, le principe de l'universalité de la liquidation veut que l'ensemble des biens des époux, meubles ou immeubles, soient inclus dans la liquidation où qu'ils se trouvent dans le monde, peu importe si l'Etat étranger dispose d'une compétence exclusive en vertu de son droit international et ne reconnaîtra pas la décision suisse (Widmer Lüchinger, Zürcher Kommentar zum IPRG, 3ème éd. 2018, n. 43 Vorbemerkung zu Art. 51-58).

En effet, le législateur a renoncé à étendre aux régimes matrimoniaux la réserve de compétence, instaurée en matière successorale par l'art. 86 al. 2 LDIP, qui abandonne à l'Etat du lieu de situation des immeubles la juridiction en cette matière s'il revendique une compétence exclusive (arrêt du Tribunal fédéral 5A_248/2010 du 11 juillet 2010, consid. 4.1; Othenin-Girard, Irrecevabilité d'une demande de complément d'un jugement international, Action en partage de copropriété d'un immeuble situé à l'étranger : quelques remarques à propos de l'arrêt du Tribunal fédéral 5A_227/2015, Newsletter DroitMatrimonial.ch
février 2016, p. 3). Cependant, lorsque la copropriété d'un bien n'a pas été dissoute lors du divorce et que cette dissolution intervient postérieurement à la procédure de divorce, les dispositions relatives aux régimes matrimoniaux ne sont pas applicables, de telle sorte que l'attribution de l'immeuble est justiciable des normes ordinaires (procédurales et matérielles; arrêt du Tribunal fédéral 5A_227/2015 du 16 novembre 2015 consid. 2.2.2). Dans ce cadre, en présence d'un élément d'extranéité, c'est alors la Convention de Lugano qui s'applique qui prévoit la compétence exclusive des tribunaux du lieu de situation de l'immeuble (art. 22 ch. 1 Convention de Lugano).

2.3 En l'espèce, les constatations du Tribunal sur la violation fautive des devoirs de l'intimé sont remises en cause par celui-ci. L'appelante conteste l'appréciation du lien de causalité effectuée par le Tribunal. Les deux parties remettent en cause le calcul du dommage.

2.3.1 S'agissant de la violation du contrat, le Tribunal a retenu que l'appelante avait bien compris que l'avenant portant sur les biens immobiliers en Italie ne serait pas produit dans la procédure de divorce et qu'il en allait ainsi pour des raisons fiscales. L'intimé s'était conformé à la volonté des époux de ne pas produire cet avenant : il ne s'agissait donc pas d'un oubli. Cependant, l'intimé n'avait pas mis en garde sa cliente sur les risques potentiels de procéder ainsi, de sorte que l'appelante n'avait pas pu se prononcer en connaissance de cause sur le sort de ces biens dans le divorce. L'intimé avait donc violé ses obligations de diligence et de fidélité.

L'intimé estime que le premier juge n'a pas tenu compte du fait que les époux avaient sciemment caché certains éléments de fortune au juge du divorce. Or, ce que lui reproche le Tribunal, c'est de n'avoir pas correctement conseillé l'appelante afin qu'elle décide en connaissance de cause de se comporter ainsi devant le juge du divorce. Il en découle que son argumentation sur ce point tombe à faux. L'appelante, croyant à tort et par la faute de l'intimé détenir un document lui permettant d'obtenir ce qu'elle souhaitait, n'avait aucune raison de s'opposer au processus engagé et tendant à taire pour des raisons fiscales l'existence de certains biens au juge du divorce. Mal informée, puisque l'on sait que ce document n'était pas contraignant, elle ignorait qu'elle agissait à l'encontre de ses propres intérêts. L'intimé n'a pas été en mesure d'exposer quelle motivation aurait poussé l'appelante à agir ainsi, en toute connaissance de cause.

Ensuite, l'intimé soutient que l'appelante savait qu'un transfert de propriété en Italie ne pouvait s'opérer par un simple accord écrit. Outre que cette allégation n'est pas démontrée par le seul fait que l'appelante avait acquis des biens en Italie par le passé, l'intimé ne saurait se décharger de sa responsabilité d'homme de loi en soutenant que sa cliente, laïque, disposait de connaissances juridiques aussi poussées. Au contraire, s'il était si évident qu'il fallait passer devant un notaire italien pour obtenir un transfert de propriété, l'on ne peut que conjecturer sur la raison pour laquelle l'intimé n'a pas conseillé à ses clients de procéder par cette voie.

Ainsi que l'a retenu le Tribunal, l'intimé n'a pas allégué, et encore moins démontré, avoir renseigné sa cliente sur les risques qu'elle prenait en se contentant d'un acte signé sous seing privé par son époux, que l'homme de loi a d'ailleurs rédigé.

Par conséquent - et sans même évoquer le conflit d'intérêts évident dans lequel se trouvait l'intimé, conseillant deux clients aux intérêts contradictoires (cf. art. 12 let. c LLCA, qui n'était pas en vigueur à l'époque, mais qui codifie une "règle cardinale de la profession" (Valticos, Commentaire Romand - Loi sur les avocats, 2010, n. 144 ad art. 12) dont la violation expose l'avocat à une responsabilité contractuelle à l'égard de son client (Ibid., n. 187 ad art. 12)) -, la violation contractuelle retenue par le Tribunal en raison de l'information et des conseils déficients donnés par l'intimé à sa cliente, ainsi que par la rédaction d'un avenant à la convention de divorce dépourvu de tout effet, échappe à la critique.

2.3.2 S'agissant de l'existence du dommage, les explications de l'appelante suffisent à établir qu'elle a subi un dommage correspondant à ses frais judiciaires en Italie et à l'activité extrajudiciaire de son avocat en Suisse, le rapport de causalité par rapport au comportement de l'intimé étant examiné ci-après. L'intimé ne formule aucune critique sur la façon dont l'appelante a estimé son dommage à ce titre, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'examiner ce point plus avant. Tout au plus, relève-t-il que la motivation formulée en lien avec ces deux postes du dommage serait insuffisante et que l'appel serait donc irrecevable sur cette question. Tel n'est pas le cas, puisque l'appelante y a dûment consacré un paragraphe contenant une motivation succincte mais suffisante (p. 9 de l'appel).

S'agissant de la valeur des biens immobiliers en Italie, les développements de l'appelante ne permettent pas de comprendre en quoi elle aurait subi un dommage en relation avec sa propre part de copropriété, celle-ci ayant, depuis le prononcé du divorce, augmenté de valeur. Il n'y a donc pas lieu de retenir un dommage correspondant à sa propre part de copropriété.

Par contre, à supposer qu'elle eût été nantie d'une convention exécutable et incorporant l'accord de son ex-époux de lui remettre sa part de copropriété sans contrepartie, elle aurait été enrichie d'une créance correspondant à la valeur de ladite part. Ainsi, une comparaison de son patrimoine, entre ce qu'il aurait pu être en présence d'un document exécutable et ce qu'il est en l'absence de ce document, conduit à retenir qu'elle a subi un dommage correspondant à la valeur de la part de copropriété détenue par son ex-mari. En effet, en l'état, face au refus de celui-ci de lui remettre sa part, il est prévisible qu'une liquidation de la copropriété ne pourra intervenir que contre paiement d'une soulte, laquelle sera calculée en fonction de la valeur vénale actuelle de l'immeuble. Soutenir, ainsi que le fait l'intimé, que son ex-époux pourrait lui céder gratuitement sa part de copropriété, alors qu'il s'est refusé à exécuter spontanément l'accord consacré dans l'avenant, est une vue de l'esprit.

Conformément au rapport d'expertise du 18 juillet 2017, la valeur de la part s'élève à 73'858 euros 03, ce qui correspond à son dommage actuel (147'716 euros 06 : 2).

Les critiques de l'appelante quant au raisonnement de l'expert judiciaire italien ne sont pas étayées et ne permettent pas de remettre en cause, sur la base de généralités fondées sur aucun élément concret, le raisonnement résultant du rapport d'expertise.

Enfin, les développements de l'intimé qui reproche à l'appelante de n'avoir pas procédé à une procédure en complément de divorce pour faire valoir la convention signée par son ex-époux, et diminuer ainsi son dommage, doivent être écartés pour plusieurs raisons. Tout d'abord, l'intimé a fait valoir les faits relatifs à cette objection pour la première fois au stade des plaidoiries finales, donc tardivement (art. 229 CPC). En outre, l'intimé ne démontre pas qu'une telle procédure aurait une quelconque chance de succès, étant précisé qu'il ressort de la jurisprudence que les tribunaux suisses ne se considéreraient pas compétents et, cas échéant, ne reconnaîtraient pas une telle demande comme une demande en complément de divorce. Une action similaire en Italie serait vraisemblablement vouée à l'échec en raison de l'exception de chose jugée. Enfin, l'intimé, pourtant conscient du litige opposant son ancienne cliente à son ex-époux, depuis 2011 au moins, n'a jamais suggéré à sa cliente de procéder par cette voie. Il en découle qu'il ne saurait être reproché à l'appelante de n'avoir pas entamé un procès, dont les coûts n'ont pas été estimés par l'intimé et dont les chances de succès sont faibles, dans le but de diminuer son dommage.

2.3.3 Reste à examiner l'existence d'un lien de causalité entre la contravention au contrat et le dommage.

La causalité naturelle est établie dans la mesure où il est incontesté que l'appelante avait obtenu l'accord de son ex-époux pour le transfert de la part de copropriété appartenant à celui-ci, mais que ce transfert n'a pas pu être obtenu en raison du caractère inexécutable en Italie de la convention confectionnée par l'intimé et signée par les ex-époux. Le conseil déficient de l'intimé est donc causal dans le déroulement des événements ayant conduit à la survenance du dommage.

Or, le comportement reproché à l'intimé consiste tant à avoir rédigé l'avenant dépourvu de force juridique qu'à ne pas avoir averti l'appelante des lacunes de ce document et de la faiblesse de sa position face à son ex-époux. L'on se trouve donc en présence d'un comportement mixte qui découle à la fois d'une violation positive du contrat - la rédaction d'un document dépourvu d'effet juridique - et d'une omission - l'absence de conseil utile permettant à l'appelante de prendre une décision éclairée quant à la répartition du patrimoine des époux.

Dans les deux cas, le fardeau de la preuve du fait que tout autre comportement licite n'aurait pas permis d'éviter la survenance du dommage incombe à l'intimé (preuve de "l'objection du comportement de substitution licite").

Or, le Tribunal a retenu que l'issue du cours hypothétique des événements restait douteuse, si bien que l'appelante échouait à établir, au degré de la vraisemblance prépondérante, l'existence du rapport de causalité entre la violation du contrat de mandat et le dommage allégué. Ce faisant, l'instance précédente a procédé à un renversement du fardeau de la preuve, contraire à la loi et à la jurisprudence.

Reste donc à déterminer si l'intimé apporte une preuve suffisante, sous l'angle de la vraisemblance prépondérante, qu'il n'aurait pas pu, en respectant ses devoirs contractuels, éviter la survenance du dommage.

En premier lieu, l'intimé n'allègue pas que la volonté de l'ex-époux de transférer effectivement sa part de copropriété des immeubles en Italie n'était pas réelle et qu'il aurait refusé de signer un acte le contraignant à remettre sa part de copropriété. Le simple fait de soutenir que "si [l'appelante] avait exigé que la production au juge de cet avenant signé ait lieu, il ne peut être admis dans le cours ordinaire des choses que l'époux aurait alors accepté de signer cet avenant" est à cet égard insuffisant.

En effet, les époux avaient conclu une convention de divorce, un avenant présentement litigieux et un contrat devant notaire à Genève portant sur les biens immobiliers sis dans ce canton, par lesquels l'ex-époux avait obtenu l'attribution de quatorze biens immobiliers sur seize (si l'on compte les biens immobiliers sis en Italie comme un seul lot) sans payer de soulte et alors que l'intégralité de ce patrimoine appartenait à la masse des acquêts. Dans ce contexte, et en l'absence de toute explication concrète de l'intimé sur ce point, l'appelante soutient de façon convaincante qu'elle pouvait consentir à de telles concessions pour obtenir un accord favorable de son ex-époux sur les biens immobiliers en Italie, qu'elle souhaitait obtenir à tout prix. L'intimé plaide inutilement qu'il n'avait aucune connaissance de la situation patrimoniale globale des parties, puisqu'il lui incombait de se renseigner sur leur situation avant de rédiger, à la hâte, un accord pour eux et visant clairement des biens ressortant du régime matrimonial.

L'éventualité que l'appelante aurait pu obtenir, par exemple et ainsi que l'évoque le Tribunal, la signature d'un acte notarié en Italie de son époux, voire une procuration certifiée conforme par les autorités consulaires italiennes en Suisse, lui permettant de procéder à la remise en pleine propriété des biens sis en Italie doit sérieusement entrer en considération, dans la mesure où concomitamment son époux d'alors avait obtenu d'elle la signature d'un contrat authentique équivalent portant sur quinze biens immobiliers sis en Suisse, soit des acquêts remis sans contrepartie à l'époux, dont on peut retenir que leur valeur était sensiblement supérieure à celle des biens situés en Italie.

C'est en outre à tort que le Tribunal a retenu que l'issue judiciaire d'une procédure de divorce unilatéral - dans l'hypothèse où l'époux aurait refusé de signer la convention soumise au juge - aurait vraisemblablement conduit à ce que l'appelante n'obtienne pas la remise des biens italiens. Au vu des concessions importantes qu'elle était prête à faire, il semble au contraire plus raisonnable de retenir que l'ex-époux aurait accepté de remettre lesdits biens italiens, qui n'ont qu'une valeur limitée, pour obtenir la jouissance des autres immeubles sis en Suisse.

L'argument selon lequel la date de la signature de l'avenant n'a pas été démontrée est sans portée, puisque la consultation litigieuse a eu lieu avant que les parties ne confirment leur volonté de divorcer, ainsi que l'admet l'intimé. Il en va de même de l'argument selon lequel l'appelante aurait volontairement tu devant le juge du divorce l'existence des biens italiens alors qu'elle savait que l'avenant les concernant n'était pas intégré à la procédure de divorce. S'il est établi que l'appelante avait conscience de ce que le juge du divorce n'avait pas connaissance des biens italiens, elle croyait cependant, à tort, être en possession d'un document lui permettant d'obtenir la propriété de ces biens.

Enfin, l'argument du Tribunal selon lequel la décision du juge du divorce n'aurait pas été reconnue en Italie en vertu de la Convention de Lugano, même si elle incorporait l'avenant litigieux, est erroné, puisque cette Convention est inapplicable dans ce cas. Par ailleurs, il ne ressort pas du jugement italien que les tribunaux de ce pays auraient d'emblée refusé de reconnaître une convention validée par un juge suisse.

Il sera donc retenu qu'il existe une possibilité sérieuse que l'appelante ait pu obtenir la pleine propriété des biens immobiliers situés en Italie si les conseils donnés par l'intimé avaient été conformes à ceux d'un avocat diligent. La preuve d'un comportement de substitution licite n'a donc pas été apportée par celui-ci, même au degré de la vraisemblance prépondérante.

Ainsi, la perte de la valeur de la part de copropriété de l'ex-époux est imputable au comportement de l'intimé, puisque rédiger un document dépourvu d'effet juridique et ne pas renseigner un client sur les risques encourus est, conformément au cours ordinaire des choses et à l'expérience de la vie, de nature à faire perdre l'objet de la convention au créancier. Il en va de même des frais de procès engagés en Italie et en Suisse, dans la mesure où l'intimé n'allègue pas que l'appelante aurait pu se rendre compte que le document litigieux était sans valeur avant d'initier les procédures en Italie, ni qu'elle aurait pu épargner les frais d'avocat engagés en Suisse avant le dépôt de la demande.

2.3.4 Enfin, l'intimé invoque un abus de droit (art. 2 al. 2 CC) commis par l'appelante. En résumé, il lui reproche de l'avoir manipulé en lui cachant certains éléments et de vouloir obtenir la valeur de ses biens immobiliers, tout en échappant au fisc. Ce moyen n'est pas fondé. En premier lieu, il ne saurait être soutenu qu'une cliente laïque serait en mesure de manipuler un avocat expérimenté, dont il a été reconnu qu'il avait failli dans l'exécution de son mandat. Par ailleurs, il résulte des considérants qui précèdent que les prétentions de l'appelante sont raisonnables et fondées.

2.4 Le dommage subi par l'appelante s'élève à 73'858 euros 03 au titre de dommage relatif à la copropriété située en Italie. Dès lors que la valeur actuelle des immeubles est prise en compte, il n'y a pas lieu d'octroyer à l'appelante des intérêts moratoires depuis 2001 : en effet, l'appelante n'a ni allégué, ni démontré qu'elle aurait pu retirer un quelconque rendement des biens immobiliers concernés dans l'intervalle. Les intérêts moratoires à 5% l'an seront donc octroyés dès
la date du prononcé du présent arrêt. En outre, elle a subi un dommage de 11'174 euros 06, plus intérêts moratoires à 5% l'an dès le 28 août 2013, correspondant aux frais de procédure et honoraires de l'avocat italien intervenu dans la procédure ayant abouti au jugement du 13 août 2013 du Tribunal de F______ et de 23'356 fr. 70, plus intérêts moratoires à 5% l'an dès le 18 mars 2011, correspondant aux honoraires de son avocat suisse pour son activité extrajudiciaire. L'intimé sera en conséquence condamné à payer les sommes susmentionnées à l'appelante.

2.5 Le jugement entrepris sera donc annulé et il sera statué dans le sens des considérants qui précèdent.

3. 3.1 Si l'instance d'appel statue à nouveau, elle se prononce sur les frais de la première instance (art. 318 al. 3 CPC).

Conformément à l'art. 106 CPC, les frais sont mis à la charge de la partie succombante (al. 1). Lorsqu'aucune des parties n'obtient entièrement gain de cause, les frais sont répartis selon le sort de la cause (al. 2).

En l'espèce, le montant des frais judiciaires de première instance arrêtés à 15'400 fr. n'est pas remis en cause par les parties et sera donc confirmé.

Il sera mis à charge de l'intimé à raison de 3/4, soit 11'550 fr., et de l'appelante à raison du solde, dans la mesure où celle-ci obtient gain de cause sur le principe de la responsabilité de l'intimé et qu'elle se voit allouer près de la moitié de ses conclusions de première instance.

Le montant des frais judiciaires sera compensé avec l'avance de frais versée par les parties (art. 111 al. 1 CPC), le solde de 200 fr. étant restitué à l'appelante.

L'intimé sera donc condamné à verser 11'350 fr. (11'550 fr. - 200 fr. correspondant à son avance de frais) à l'appelante à titre de restitution des frais judiciaires de première instance.

Dans la mesure où l'appelante obtient gain de cause sur le principe de ses conclusions, mais non sur leur montant, l'intimé sera condamné à lui verser 15'000 fr., TVA et débours inclus, à titre de dépens de première instance (art. 105 al. 2, 106 al. 2, 107 al. 1 let. a CPC; art. 84 et 85 RTFMC; art. 25 et 26 LaCC).

3.2 Les frais judiciaires d'appel seront arrêtés à 8'100 fr. (art. 13, 17 et 35 RTFMC), entièrement compensés avec l'avance de frais fournie par l'appelante (art. 111 al. 1 CPC) et mis à la charge des parties à raison des 3/4 pour l'intimé, soit 6'075 fr. et du solde pour l'appelante, en raison de ce qui a été exposé précédemment (art. 106 al. 2 CPC). L'intimé sera donc condamné à restituer cette somme à l'appelante (art. 111 al. 2 CPC).

Dans la mesure où l'appelante obtient gain de cause sur le principe, mais ne se voit octroyer qu'une partie de ses conclusions, l'intimé sera condamné à lui verser 6'000 fr., TVA et débours inclus, à titre de dépens d'appel (art. 105 al. 2, 106 al. 2, 107 al. 1 let. a CPC; art. 84, 85 et 90 RTFMC; art. 25 et 26 LaCC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 20 septembre 2018 par A______ contre le jugement JTPI/12415/2018 rendu le 17 août 2018 par le Tribunal de première instance dans la cause C/26524/2014-19.

Au fond :

Annule le jugement entrepris et, statuant à nouveau :

Condamne B______ à verser à A______ 73'858 euros 03, plus intérêts moratoires à 5% l'an dès le 28 mai 2019, 11'174 euros 06, plus intérêts moratoires à 5% l'an dès le
28 août 2013, et 23'356 fr. 70, plus intérêts moratoires à 5% l'an dès le 18 mars 2011.

Arrête les frais judiciaires de première instance à 15'400 fr., les met à charge des parties à raison de 11'550 fr. pour B______ et de 3'850 fr. pour A______ et les compense avec les avances de frais de parties qui demeurent acquises à l'Etat de Genève à due concurrence.

Invite les Services financiers du Pouvoir judiciaire à restituer 200 fr. à A______.

Condamne B______ à verser 11'350 fr. à A______ à titre de remboursement des frais judiciaires de première instance.

Condamne B______ à verser 15'000 fr. à A______ à titre de dépens de première instance.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 8'100 fr., les met à charge des parties à raison de 6'075 fr. pour B______ et de 2'025 fr. pour A______ et les compense entièrement avec l'avance de frais versée qui demeure acquise à l'Etat de Genève.

Condamne B______ à verser 6'075 fr. à A______ à titre de remboursement des frais judiciaires d'appel.

Condamne B______ à verser 6'000 fr. à A______ à titre de dépens d'appel.

 

 

Siégeant :

Monsieur Ivo BUETTI, président; Madame Sylvie DROIN, Madame Nathalie RAPP, juges; Madame Camille LESTEVEN, greffière.

 

Le président :

Ivo BUETTI

 

La greffière :

Camille LESTEVEN

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.