République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 11160-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat approuvant le rapport de gestion du Conseil d'Etat pour l'année 2012

Suite du deuxième débat

A - FORMATION

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous poursuivons notre examen du PL 11160-A. Nous en sommes à la politique publique A «Formation». La parole est à M. le député Bernhard Riedweg. (Exclamations.)

Une voix. Heureusement qu'il est à l'heure !

M. Bernhard Riedweg (UDC). Merci, Monsieur le président. Cette politique publique bat tous les records ! (Exclamations.) Les subventions accordées représentent le deuxième montant le plus important avec 727 millions, soit 19,4% du total des subventions en 2012. Il y a 586 subventions dans cette politique publique, dont 446 sans ligne propre, soit 19% des subventions. En 2009, les dépenses dans cette politique publique par habitant étaient de 5500 F à Genève, alors que la moyenne suisse, selon l'OCSTAT, se montait à 3800 F.

Y a-t-il un malaise, Monsieur le conseiller d'Etat Charles Beer, dans cette politique publique ? Trois fois plus de fonctionnaires sollicitent le PLEND; en 2012, et pas seulement dans la politique publique «Formation», ce sont 1106 fonctionnaires... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...contre 390 en 2011 qui ont demandé le PLEND. Et 331 demandes de PLEND émanaient du secteur de la formation, ce qui est largement au-dessus de la moyenne.

Dans cette politique publique, on multiplie le nombre de directeurs d'école primaire, lesquels bénéficient de secrétaires et peuvent compter sur des maîtres adjoints. Il y a 93 directeurs d'établissement dans le primaire qui sont uniquement dévolus à l'administratif et n'enseignent plus. Ils ont la réunionite et organisent des séminaires sur les petits-déjeuners sains, la nutrition, ses dangers et les divers moyens de prévention. Ils devraient en tout cas travailler à 50% en tant qu'enseignants.

Il y a une surenchère de revendication des responsabilités; les parents entendent se prononcer sur les devoirs, les cours, les méthodes et les notes. (Brouhaha.) Il faudrait diminuer les salaires des enseignants en comparaison des salaires d'autres cantons...

Le président. Monsieur le député, permettez-moi une petite remarque. J'aimerais demander à mes collègues, à vos collègues, de faire un petit effort d'écoute. Je sais bien qu'ils ont tous lu le rapport comme vous, Monsieur le député... (Exclamations.) ...alors peut-être qu'ils ne sont pas très intéressés par vos chiffres ? Poursuivez, Monsieur le député.

M. Bernhard Riedweg. Je vous remercie, Monsieur le président, de remettre de l'ordre dans ce parlement si tôt le matin.

Il faudrait diminuer les salaires des enseignants en comparaison des salaires d'autres cantons, et augmenter la durée du travail.

A l'Université de Genève, il y a 14 230 étudiants et 2496 enseignants, soit un rapport de 17,5%. A Zurich, ce rapport est de 13% et, à Lausanne, de 15,7%. A Harvard, université prestigieuse, qui est quand même le joyau des universités mondiales, on compte 21 000 étudiants pour 2100 enseignants, soit un rapport de 10%, contre 17,5% à Genève. Il faut se demander jusqu'où l'on veut pousser la recherche aux HUG et à l'Université de Genève afin qu'elle figure dans les cent premières universités du classement de l'Université de Shanghai. La recherche exige beaucoup de ressources financières, et les résultats sont aléatoires.

L'Etat assiste de plus en plus les citoyens pour les aider à mieux se comporter et à être plus disciplinés. Il se substitue aux parents, qui donnent naissance mais s'occupent de moins en moins de l'éducation des enfants et renoncent à leurs responsabilités. Mais la meilleure, c'est quand même celle-ci: il est proposé aux élèves un programme d'éducation nutritionnelle, la «Fourchette verte», dans 42 crèches, 62 restaurants scolaires et 21 cafétérias des établissements secondaires postobligatoires. C'est une approche sensorielle de l'alimentation, mais il y a aussi le décryptage...

Le président. Monsieur le député, je m'excuse de vous interrompre une nouvelle fois, mais est-ce que vous avez une question à poser ? (Rires. Exclamations.)

M. Bernhard Riedweg. Pas pour le moment. Mais après j'en aurai, j'arrive au bout.

Le président. En principe il faut poser des questions, Monsieur le député.

M. Bernhard Riedweg. Oui, encore une phrase et j'ai terminé. (Brouhaha.) C'est une approche sensorielle de l'alimentation, mais il y a aussi le décryptage des boissons énergisantes. Nous installons nos enfants dans un confort sans précédent et créons des enfants-rois, sans même nous en apercevoir. Merci, Monsieur le président.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Jean Romain, que l'on va écouter dans un silence absolu ! (Exclamations.)

M. Jean Romain (R). Merci, Monsieur le président. Chers collègues, j'aurai un certain nombre de questions, assez courtes mais en rafale. La première, que je poserai évidemment au président du DIP, est la suivante: est-ce que le DIP a atteint ses objectifs, Monsieur le président, notamment concernant le CO et les fameuses passerelles qui nous ont coûté, ou qui nous coûtent toujours, 30 millions ? Ma deuxième question a trait à la formation jusqu'à 18 ans: j'admets que ce n'est pas dans les comptes de l'année passée, mais j'aimerais entendre un mot à ce sujet, en particulier sur le prix que cela va nous coûter puisqu'en définitive c'est une nouveauté de la constitution. Troisième question: s'agissant des directeurs du primaire, assortis de leur cohorte de maîtres adjoints, je voudrais savoir, Monsieur le président, si c'est vraiment cette dépense qui est la plus utile et la plus importante pour notre école, à savoir pour l'école primaire. Ma quatrième question concerne les mesures d'appui: nous savons que les mesures d'appui coûtent, que ces mesures peuvent remettre le pied à l'étrier à toute une série de jeunes. Il semble que du point de vue pédagogique on en rediscuterait peut-être, mais y a-t-il un budget prévu important pour ces mesures d'appui ? Ma cinquième question est relative à la protection des mineurs. Nous pensons qu'il est du rôle de l'école d'assurer cette protection, et j'aurais voulu savoir ce qu'il en est à ce propos-là. Dernière question, Monsieur le président, chers collègues - et c'est plutôt un pronostic que je demande: puisqu'il y a une révision de l'application genevoise de l'ORM, est-ce que cette mesure d'application modifiée est de nature à nous amener des économies ? Ce serait extrêmement intéressant ! Puisqu'au fond la volonté est de réduire, de resserrer le choix des options, est-ce qu'on peut chiffrer cela du point de vue des économies pour notre Etat ? Voilà en rafale et rapidement, je m'en excuse, les questions que j'aurais eu à poser.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Jean-François Girardet. Je précise que votre groupe bénéficie encore de onze minutes quarante-cinq secondes pour le reste des politiques publiques.

M. Jean-François Girardet (MCG). Je vous remercie de me donner la parole. Ne vous inquiétez pas, je ne vais pas prendre les onze minutes. J'ai quatre questions à poser au chef du département. La première concerne les réseaux d'enseignement prioritaire, les REP: est-ce que cette expérience a atteint ses objectifs ? Je sais que le chef du département invite la commission à un bilan en septembre, et j'aurais aimé avoir les prémices de ce bilan sur les REP. (Brouhaha.)

Ma deuxième question a trait à l'IUFE, l'Institut universitaire de formation des enseignants. Nous avons appris qu'il n'y avait pas de numerus clausus à l'entrée de la formation des enseignants pour l'école obligatoire. Par contre, il existe un numerus clausus concernant les stages. Or les enseignants qui sortent d'une première année de formation doivent impérativement être reçus dans des classes par des maîtres stagiaires pour faire valider leur diplôme, et il semblerait qu'il y ait une sélection pour atteindre cette deuxième année de stage. Pouvez-vous nous en dire davantage à ce propos ?

Ma troisième question concerne toujours la formation. Il y a une dizaine d'années, l'IUFE formait des enseignants en LMRI, enseignement primaire. Ces enseignants qui ont été formés pour l'école primaire ne peuvent pas être engagés, selon des témoignages vécus. Est-ce qu'il y aurait une possibilité de reconnaître ces certificats qui ont été délivrés il y a une dizaine d'années en LMRI ?

Ma quatrième question concerne la formation jusqu'à 18 ans, puisque le MCG - vous n'êtes pas sans le savoir - a déposé un projet de loi qui est pour le moment mis au frigo, je dirais même au congélateur. Est-ce que vous pouvez donc nous donner un délai, à la commission de l'enseignement, avant qu'une nouvelle loi soit présentée en rapport avec la constitution qui est active ? Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme la députée Esther Hartmann. Il reste au groupe des Verts vingt-trois minutes et quarante-trois secondes, cela pour les trois politiques publiques qui restent. Vous avez donc du temps.

Mme Esther Hartmann (Ve). Merci, Monsieur le président. Je vais essayer de restreindre mon intervention, mais je vais quand même poursuivre dans la série des «Questions au gouvernement» que j'apprécie tant. Quand je regarde l'Assemblée nationale française, j'ai l'impression de vivre un moment équivalent ! Je vais donc continuer sur cette lancée, et après avoir entendu des questions sur les boissons énergisantes, j'aimerais savoir quel pronostic fait le Conseil d'Etat par rapport au processus d'accueil continu, à la journée, que le peuple a voté en 2009, je crois. J'aimerais savoir un petit peu où on en est au niveau de la gestion de ce projet.

Et puis j'aurai une deuxième question. Le département a consenti d'importants efforts pour intégrer les enfants à besoins spécifiques. D'après le conseiller d'Etat, que faudrait-il faire encore pour pouvoir améliorer cet accueil ? Je vous remercie, Monsieur le président.

Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. Pierre Weiss, et les libéraux bénéficient encore de trente et une minutes et trente-deux secondes pour les trois politiques publiques restantes. Vous avez la parole, Monsieur le député.

M. Pierre Weiss (L). Je vous remercie, Monsieur le président. J'ai deux questions: la première s'adresse à vous, la deuxième à M. le chef du département. Oui, Monsieur le président, j'ai une question qui s'adresse à vous, en toute amitié, et qui est la suivante: pourquoi demandez-vous à un député, qui a certes un certain sens de l'humour et un amour absolument énorme pour les chiffres, de poser des questions, quand vous ne formulez pas les mêmes requêtes à l'égard d'autres députés, voire de certains représentants de l'exécutif ? J'avoue que là, il me semble qu'il y a deux poids, deux mesures. Mais vous avez certainement de très bonnes raisons, et je ne doute pas que vous saurez tôt ou tard me les expliquer.

La question que j'adresse maintenant au chef du département est la suivante: où en est le DIP dans la reconnaissance de la délivrance des titres de maturité cantonale par des écoles privées ?

Le président. Merci, Monsieur le député. Je vais vous répondre de la façon suivante: j'ai beaucoup d'amitié pour le député Riedweg, on siège ensemble dans plusieurs commissions. Si je me suis permis de lui demander s'il avait des questions à poser, cette fois-là, c'est parce qu'il a été très actif durant ce débat et qu'il est intervenu vraiment très souvent, en démontrant qu'il avait étudié son dossier - d'ailleurs il va reprendre la parole tout à l'heure. Voilà donc la raison de mon intervention, Monsieur le député. La parole est à M. le député Patrick Saudan.

M. Patrick Saudan (R). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, j'ai une question pour le chef du département concernant la formation continue au sein de la HES-SO. J'ai lu avec intérêt que 2100 étudiants ont pu bénéficier de cette formation continue; cette dernière doit être autofinancée, il y a donc des chèques formation que l'Etat met à disposition pour ce genre de cursus. Dès lors, j'aimerais savoir quel est le coût global, ou quel est l'intervalle entre la moins chère et la plus chère de ces formations.

Et puisque j'ai la parole et que c'est votre dernière année au département, Monsieur Beer, je tiens, après avoir siégé pendant six ans à la commission de l'enseignement supérieur et avoir vu sous toit la loi sur l'université et la loi sur les HES, à rendre hommage à l'action de votre département, de vos hauts fonctionnaires et de vous-même, parce qu'au-delà de nos divergences idéologiques, je sais que la cause de l'enseignement supérieur vous tient à coeur et que vous avez toujours oeuvré, tant à Berne qu'à Genève, pour la défendre. Voilà, je vous remercie pour votre réponse.

M. Bernhard Riedweg (UDC). J'ai une petite question, puisque vous m'avez sollicité, Monsieur le président... (Rires.) ...sur l'enseignement du suisse allemand, qui est ma langue maternelle, dans les classes de dixième année au cycle d'orientation. Pensez-vous que les professeurs d'allemand redoutent d'enseigner cette langue cabossée ? Merci, Monsieur le président.

M. Charles Beer, président du Conseil d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je viens d'entendre un certain nombre de questions, mais avant cela nous avons commencé par écouter un long plaidoyer qui nous a démontré que citer des chiffres n'était pas forcément savoir les manier. Alors en premier lieu, je commencerai par évoquer la question des directions d'établissements d'enseignement primaire - élément qui est revenu régulièrement dans les propos - pour dire que nous sommes aujourd'hui très exactement à 78 directions d'enseignement primaire, après avoir démarré à pratiquement 90. Donc quand vous parlez de multiplication, en réalité il s'agit d'une division, Monsieur Riedweg, et confondre l'un et l'autre est malheureusement assez fréquent; vous le dénoncez chez un certain nombre d'élèves, je me permets de dire que ce n'est pas valable pour autant dans une enceinte parlementaire. Diminution, donc, du nombre des directions d'établissement, c'est le premier fait dont je vous prie de bien vouloir prendre note.

Le deuxième élément concerne les directions d'établissement d'une façon plus générale. J'aimerais vous dire que plusieurs parlementaires ont déposé une motion à ce sujet, que l'UDC soutient et sur laquelle vous aurez un débat le 29 août prochain. Alors moi je veux bien qu'on chauffe ainsi le débat dans la perspective des deux mois d'été; cela s'appelle de l'auto-allumage. Vous serez prêts et, je tiens à vous rassurer, le débat aura lieu dans de bonnes conditions et vous pourrez faire son procès à l'autorité, vous qui prétendez la défendre à longueur d'année.

Le troisième élément a trait aux mesures d'accompagnement. Par rapport à ce qu'évoquait, dans sa question, M. le député Romain, ce que je tiens à dire, c'est que les moyens du point de vue des enseignants chargés de soutien pédagogique sont là. A la différence de ce qui pouvait exister il y a dix ans... (Brouhaha.) ...les mesures ne sont pas, en réalité, destinées à remédier aux problèmes de ressources humaines, c'est-à-dire à favoriser des enseignants qui seraient fatigués et qui n'auraient plus envie de tenir une classe. Aujourd'hui, elles sont au contraire immédiatement dirigées vers les personnes qui sont le plus motivées, et sont très directement en lien avec ce que nous avons mis sur pied ensemble, à savoir le ciblage des mesures d'accompagnement sur les élèves qui en ont besoin, par rapport à des insuffisances relevées au niveau des notes - que nous avons, je dirais, la chance de pouvoir retrouver dans l'enseignement primaire. Voilà les deux éléments principaux sur lesquels je voulais intervenir pour ce qui est de l'enseignement primaire.

Dans le prolongement de ce sujet et en ce qui concerne le réseau d'enseignement prioritaire, qui touche maintenant également le cycle d'orientation, je voudrais vous dire qu'effectivement, Monsieur le député Girardet, nous aurons des assises au mois de septembre, nous sommes en train de les préparer, et j'aimerais attirer votre attention sur le fait que nous avons déjà quatre éléments de recherche qui ont d'ores et déjà été publiés sur le REP. Ces derniers nous montrent - soyons extrêmement modestes - un certain nombre de résultats qui méritent à la fois interrogation, développement et débat. Le premier point, c'est la question des évaluations scolaires. Nous voyons que d'une manière générale, les éléments mis en place par le réseau d'enseignement prioritaire ne permettent pas, aujourd'hui, de dire que la différence de niveau entre les établissements les plus faiblement dotés socialement et économiquement, du point de vue de la population qui les compose, se comble. En revanche, ce qui est quand même une nouvelle intéressante, c'est que l'écart qui s'était creusé pendant dix ans ne se creuse plus; il est donc contenu, grâce à des mesures qu'il convient encore de poursuivre. Autre élément très important: l'ambiance dans l'établissement s'est spectaculairement améliorée, à tel point que les enseignants qui travaillaient autrefois dans les établissements de conditions économiques et sociales difficiles ne souhaitent plus en partir. Au contraire, ils désirent plutôt, quand ils débutent leur carrière, venir dans les REP, ce qui est l'inverse du constat posé en France. En somme, l'ambiance s'améliore, les résultats scolaires ne baissent plus, nous sommes donc dans une situation qui est celle de l'interrogation par rapport à la manière dont on doit affiner un tel moyen d'intervention, dont je remarque aujourd'hui que personne ne l'a remis en cause. Il s'agit donc de questions de débats, de priorités et de capacités à affiner le dispositif, et nous en discuterons encore en septembre aux assises, auxquelles vous serez bien évidemment conviés.

Au sujet du cycle d'orientation, deux questions ont été posées. Elles méritent effectivement, par rapport aux passerelles, quelques éléments de commentaire. D'abord, il faut évoquer le fait que, oui, nous sommes contents de la manière dont fonctionnent les passerelles, mais cela en ayant une vision très partielle, Monsieur le député Romain. Pourquoi ? Parce qu'aujourd'hui nous n'avons, comme vous le savez, que deux années sur trois du cycle d'orientation. Et nous allons nous confronter à la mise sur pied, pour les dernières années du cycle d'orientation, de ces mesures d'accompagnement. Alors on sait qu'en dernière année du cycle il ne s'agit plus de changer véritablement de niveau, mais de faciliter l'insertion dans les filières de l'enseignement postobligatoire. Et je tiens à dire que s'il y a une discussion importante par rapport aux passerelles, elles méritent des moyens financiers, et l'enveloppe qui avait été annoncée est un engagement pris par les autorités vis-à-vis de la population. Vous savez que nous sommes plutôt en deçà, parce que nous formons aujourd'hui les classes de façon plus souple du point de vue de l'interaction avec la carte scolaire, mais en revanche, pour les passerelles, tout ce que nous avons prévu de mettre sur pied fonctionne, à savoir l'ensemble des mesures possibles dans chaque établissement et une manière de travailler qui varie d'un établissement à l'autre.

J'aimerais, à ce sujet, Mesdames et Messieurs les députés, vous donner deux exemples, pour vous dire qu'il n'y a pas qu'une méthode de travail qui soit à retenir. Le premier exemple, c'est un cycle d'orientation que je ne citerai pas, dans lequel on part du principe qu'en première année du cycle, il faut viser à ce que le plus rapidement possible les élèves qui en ont les moyens retrouvent le niveau supérieur, par exemple le regroupement 3. Dans un autre cycle d'orientation, au contraire, j'ai entendu, très largement portée par la direction et l'équipe des enseignants, la volonté de pouvoir plutôt compter sur une réorientation en fin d'année et pas trop rapidement. Dans les deux cas, les résultats ont été positifs. Ce qui compte, c'est qu'autour de la direction d'établissement et des enseignants il y ait le partage d'un certain nombre de méthodes, et quand on croit aux méthodes qui s'insèrent dans le cadre réglementaire, eh bien il y a forcément quelque chose qui est porté, qui est soutenu par l'équipe. Et vous savez que c'est un facteur de réussite sur le plan pédagogique, parce qu'il n'y a pas de réalité pédagogique unique.

Le deuxième élément par rapport au cycle d'orientation concerne le suisse allemand. (Commentaires.) Alors après l'exercice sur l'autorité, soit comment la remettre en question tout en la défendant, il y a comment défendre, pour un parti qui est l'UDC, les valeurs de la tradition nationale et s'attaquer, en réalité, à ce qui en fait le lien. Il y a des rapports logiques qui m'échapperont toujours ! Alors que l'UDC, régulièrement, remet en cause l'apprentissage du français dans les cantons alémaniques - pas tous ! - j'entends aujourd'hui qu'une option - parce qu'en fait c'est cela qu'est le suisse allemand, une option de développement de l'allemand facilitant, pour les élèves, une compréhension de demain de leurs compatriotes - est remise en question par un député de l'UDC. Monsieur le député, les chiffres, c'est bien, mais j'attire encore une fois votre attention sur la nécessité de développer, par les chiffres, un rapport logique, notamment entre intention politique et volonté de réalisation. Certes, je n'ai pas votre couleur politique, mais nous nous comprenons et nous avons certainement des intentions et des projets qui sont communs, donc je pense qu'il est souhaitable de pouvoir, à l'occasion d'un débat sur les comptes, poser un certain nombre de questions - vous le faites - plutôt que de développer, j'allais dire, un programme un peu hors sol, qui n'est pas directement en lien avec les éléments atteints par notre système éducatif. Notre système éducatif, Messieurs qui avez posé des questions, Mesdames et Messieurs les députés qui êtes intéressés par ces éléments-là, j'aimerais vous dire qu'il se base sur PISA. J'ai trop entendu que nous étions, entre guillemets, «l'école qui avait le plus de difficultés». Entre 2000 et 2009, sur les tests de lecture PISA auxquels on s'est référé pour clouer l'école genevoise au pilori, nous voyons des résultats qui sont très nettement à la hausse. C'est le seul canton dans lequel il y a une hausse spectaculaire entre 2000 et 2009 sur les tests de lecture, permettant ainsi de voir sur neuf ans comment les choses se sont déroulées.

Ces chiffres, ils ont leur importance également, Mesdames et Messieurs les députés, parce qu'ils nous montrent tout simplement qu'un certain nombre de choses ont changé. Non seulement elles ont changé du point de vue de la capacité, probablement, des enseignants à être confrontés à l'évaluation du système, mais elles ont aussi changé sous la logique des notes, elles ont changé sous la logique des directions, et elles ont également changé sous la logique d'un cycle d'orientation, même si les rapports de temps ne permettent pas toujours d'en voir immédiatement les résultats.

En ce qui concerne l'enseignement postobligatoire, permettez-moi de dire, s'agissant de la maturité, que l'ORRM a des objectifs de modification. Et par rapport à ceux-ci, j'aimerais attirer votre attention sur ce point, Monsieur le député Romain: il n'y a pas d'objectifs financiers. L'objectif est d'abord pédagogique, et c'est celui de pouvoir simplifier les parcours, consolider les savoirs, et en même temps retrouver un certain nombre d'éléments de solidarité par rapport au groupe-classe, par rapport à des élèves qui se voient plus souvent. Et je sais que nous partageons cet objectif. Les éléments financiers ne sont, si vous me permettez, le cas échéant, que corollaires, c'est-à-dire que ce n'est pas un objectif mais un résultat induit d'une réforme qui vise d'abord, je le répète, l'élément pédagogique. Sur ce point-là, on peut estimer, tout en considérant qu'il y a d'autres besoins dans l'enseignement postobligatoire, que cela reviendrait plutôt à une suppression de quelques dizaines de postes d'enseignants. J'aimerais donc vous dire que la logique va plutôt dans ce sens, même si parallèlement - vous le savez, c'est votre interrogation - la formation jusqu'à 18 ans va nécessiter un certain nombre de moyens supplémentaires. Nous présenterons d'ailleurs, à l'occasion de la rentrée prochaine, un plan d'action à ce sujet contenant un certain nombre de points, sur lesquels la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport pourra, en tout premier lieu, dialoguer avec moi, sachant que sa réalisation et sa concrétisation appartiendront à la législature suivante, au parlement futur, au Conseil d'Etat futur, et surtout à mon successeur. Mais il m'appartient, étant donné le vote sur la disposition constitutionnelle, de préparer d'ores et déjà un certain nombre de propositions, qui sont à ce jour également en discussion tant au niveau du département que, sur le plan financier, au niveau du Conseil d'Etat.

Vous m'avez également posé une question sur l'école inclusive, Madame la députée Hartmann, pour savoir exactement où nous en étions. J'aimerais vous dire que si nous avons une loi qui est en vigueur, si nous avons un accord intercantonal qui est en vigueur, nous sommes en train de travailler sur des expériences qui sont extrêmement intéressantes de maintien d'élèves qui sont en situation difficile, qui ont des besoins spécifiques, voire qui sont en situation de handicap, dans des établissements primaires ordinaires. Nous avons développé, dans plusieurs établissements primaires, de telles classes, pour des élèves qui hier encore partaient dans des centres médico-pédagogiques. C'est une excellente chose, pour laquelle il y a adhésion du corps enseignant, ce qui est nécessaire à la réussite de ces projets. Je pourrais citer l'école des Bossons, l'école de la Roseraie, pour ne mentionner que deux exemples et dire où nous en sommes. Il y a aussi le cycle de la Florence ou encore celui de Bois-Caran dans lesquels de tels projets sont mis en route. A terme, nous devrions avoir non pas un simple transfert des élèves en situation de handicap ou à besoins spécifiques dans les établissements ordinaires, mais une prise en charge adaptée. Certains élèves ne seront pas forcément à leur aise dans un établissement ordinaire, mais nous devons trouver les moyens de faire en sorte que l'élément intégratif, ou plutôt inclusif, soit préféré à l'élément séparatif ou, le cas échéant, ségrégatif, comme on le dit à l'égard de certaines solutions. Mais c'est encore un projet, comme la formation jusqu'à 18 ans. L'école inclusive et la formation jusqu'à 18 ans - respectivement un concept et un plan d'action - sont en préparation et vous en connaîtrez l'entière teneur à la rentrée prochaine, puisque ce sont deux éléments qui figureront en toile de fond. J'ai d'ores et déjà informé les députés de la commission du toilettage de la loi sur l'instruction publique, qui sera donc complété par des plans d'action.

Par rapport à l'IUFE, il y a un certain nombre de difficultés qui sont les suivantes: nous nous trouvons, aujourd'hui, en présence d'effectifs qui sont extrêmement hétérogènes du point de vue de nos besoins et du point de vue des aspirations des étudiants à enseigner demain. En d'autres termes, nous avons surabondance d'enseignants en histoire, mais il y a, comme vous le savez, disette en mathématiques ou, par exemple, en allemand. Nous avons donc effectivement besoin de réguler, et nous ne pouvons pas garantir, pour chaque étudiant qui désire devenir - et nous le saluons - enseignant, par exemple en histoire ou en géographie, forcément un droit au stage. Et je vous rappelle, parce que vous avez attiré mon attention sur ce point - d'ailleurs nous en avions largement discuté avec la commission de l'enseignement supérieur à laquelle vous vous êtes référé, Monsieur le député Saudan, et je vous en remercie, du point de vue de la qualité de ses travaux - que nous avions tous défendu l'idée que les stages soient des stages en responsabilité ! Ce ne sont pas des éléments fictifs ou virtuels d'enseignement, ce sont bien des mises en situation qui impliquent donc un suivi de classe de la part des enseignants qui sont en formation. Et aujourd'hui, le plus difficile - et je conviens volontiers que notre objectif n'est pas atteint sur ce point - c'est de pouvoir réguler correctement la situation, de manière qu'on ait suffisamment d'enseignants, dans l'ensemble des disciplines. Mais nous sommes dépendants d'autres types d'évolution, comme vous le savez, qui font respectivement le succès de l'allemand, des maths ou de la physique dans l'enseignement, notamment au niveau secondaire, ou alors des sciences humaines, qui connaissent un bien plus grand succès en la matière.

J'aimerais enfin évoquer la question de la formation continue au niveau de la HES-SO. Je souhaiterais, à défaut de pouvoir vous donner un chiffre - ce que je regrette - vous indiquer que toute formation continue s'inscrit, comme vous le savez, dans un catalogue à plusieurs milliers de francs. Les obligations au niveau de l'ancienne loi et des directives, encore, de l'OFFT en ce qui concerne la HES-SO sont telles que nous ne pouvons effectivement pas financer à perte une activité de ce type. Donc j'allais dire que les garanties, en même temps que les collaborations avec l'université pour un catalogue commun de formation continue, se mettent en place, et devraient nous permettre d'atteindre bientôt, je l'espère, un centre commun, complètement autofinancé, et qui permette même plutôt, le cas échéant, d'améliorer les conditions de rentabilité, voire de soutenir d'autres types de formation dont le coût est plus avéré.

Sur le taux d'encadrement de l'université, Monsieur le député Riedweg, soyons extrêmement clairs et modestes: que comparons-nous ? Si vous comparez le nombre d'enseignants, c'est-à-dire de professeurs ordinaires, ce n'est pas le cas. Si vous parlez des professeurs extraordinaires ou des professeurs invités, ce n'est pas le cas. Par contre, quand vous prenez le nombre d'assistants, d'accord. C'est un élément qui, je vous le rappelle, a été voulu par le parlement, notamment dans la mesure où, quand il a été question de hausser les taxes de cours dans l'enseignement universitaire, l'engagement pris par le Conseil d'Etat, et voté par le Grand Conseil, était le fait que cet argent soit utilisé pour une amélioration du taux d'encadrement des étudiants qui, sortant du collège, avaient besoin d'être entourés de personnes qui faisaient le lien entre le professeur et l'étudiant - c'est ce qu'on appelle des assistants. Le nombre d'assistants est élevé, j'en suis fier, et c'est l'une des qualités de notre université.

Voilà, nous arrivons à peu près au bout. Il reste deux questions qui, pour moi, sont importantes, dont la première concerne le coût du système. Et j'aimerais vous faire part, par rapport à cela, des éléments suivants: d'abord dans l'enseignement primaire, il faut savoir que, s'agissant du taux d'encadrement, tous enseignants confondus, selon le ratio entre le nombre d'élèves et le nombre d'enseignants, nous avons aujourd'hui à Genève un système qui est parmi les plus économiques au niveau romand et au niveau suisse. Chercher des économies sur ce point n'est pas forcément la solution. Et j'aimerais également vous dire, pour revenir à la question des directeurs d'établissement, que cela a été fait, comme vous le savez - et je suis passé à peu près dix-huit fois au parlement et devant les commissions en question pour le garantir - à coût constant, sans que l'on ait d'éléments supplémentaires à injecter. Il y a plus d'élèves aujourd'hui qui bénéficient d'enseignants, et le ratio entre les personnes qui enseignent et les personnes qui n'enseignent pas s'est amélioré au cours des dix dernières années, et non pas l'inverse. Je tenais à attirer votre attention sur ce point, en vous disant que les comparaisons intercantonales d'un niveau d'enseignement à l'autre varient parce que, par exemple dans l'enseignement primaire, les enseignants genevois sont mieux payés que dans le reste de la Suisse, très clairement et très nettement, et ils le sont en travaillant le même nombre de périodes d'enseignement. Au cycle d'orientation, le système qui veut que nous ayons à ce jour une classe de fonction et un système de formation fait que les enseignants du cycle d'orientation sont mieux payés. Les comparaisons intercantonales reposant d'abord sur la masse salariale, eh bien il va de soi que le coût du cycle d'orientation est plus élevé que dans les autres cantons, alors que dans l'enseignement postobligatoire les effets de cette même politique, donc de salaire unique, font que notamment au collège nous avons pratiquement le système le plus économique de Suisse - prenez-en note - en tout cas par rapport aux grands centres urbains, que ce soit le système bernois, zurichois, bâlois ou encore vaudois. Ce sont des éléments sur lesquels je tenais à attirer votre attention.

Le dernier point a trait au PLEND. Y a-t-il un malaise dans ce département ? Réponse: peut-être. Je n'ai pas envie de faire de grandes affirmations qui permettent de dire qu'il n'y a aucun malaise. Non. Il y a certainement des questions à se poser, mais je n'ai pas envie de rajouter de la polémique à la polémique, cela n'amène rien dans notre enceinte. Ce que j'aimerais dire, c'est que la mission des enseignants est une mission qui est difficile. Quand on a, pendant toute une carrière, toute une vie professionnelle, à gérer des classes d'adolescents - peut-être une dizaine en parallèle - à manier les corrections, les liens avec les parents, à maintenir la discipline dans des classes qui sont, malgré tout, de plus en plus difficiles à tenir, oui, il y a un certain nombre de difficultés. Et quand vous voyez régulièrement des enseignants qui sont l'objet d'attaques - je ne dis pas de votre part, mais d'une manière générale dans le débat politique et médiatique - qui sont régulièrement mis en cause et interrogés sur leur rémunération, alors qu'ils font face à une carrière, malgré tout, de plus en plus difficile, eh bien oui, il y a un certain nombre de difficultés, qui me font défendre entre autres - et j'aurai l'occasion de les présenter à l'avenir, je l'espère - des améliorations des conditions de carrière des enseignants, notamment dans l'enseignement secondaire, puisque là il y a un certain nombre de questions qui sont posées. Maintenant, pour être très clair sur les chiffres du PLEND, je dirai ceci: Mesdames et Messieurs les députés, nous avons vu qu'à un certain moment, au cours des débats dans cette enceinte, nous avions respectivement une absence de budget, une incertitude sur la loi sur les caisses de pension, une incertitude sur le PLEND. Les enseignants sachant particulièrement compter et établir un rapport logique... (Commentaires.) ...eh bien ils se sont posé très clairement la question de savoir si c'était le moment de partir, et beaucoup - je le déplore - ont répondu oui. En fonction non pas des agissements du département, mais d'une instabilité politique et parlementaire qui a été extrêmement nuisible à la préparation de la rentrée, je vous remercie d'en prendre note. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Je vais mettre aux voix cette politique publique. (Le président est interpellé.) Non, Monsieur le député, je ne vous passe pas la parole. (Protestations. Commentaires.) Monsieur le député, je suis désolé ! Monsieur le conseiller d'Etat, je vous repasse la parole.

M. Charles Beer, président du Conseil d'Etat. Monsieur le député, j'ai essayé de répondre à toutes les questions. Si j'en ai omis une - parce que vous serez d'accord pour dire que leur nombre était quand même relativement élevé, et les affirmations que j'ai dû démentir également - je vous remercie de me la reposer et je vous répondrai très volontiers.

M. Pierre Weiss (L). Monsieur le chef du département, si je devais vous mettre une note, je mettrais cinq et demi... (Commentaires.) ...parce que vos réponses étaient excellentes. Je ne vous mettrais pas six parce que vous avez oublié une question, qui est malheureusement celle que j'avais posée clairement. (Protestations.) La question que j'avais posée clairement, c'était celle de savoir ce qu'il en était de la reconnaissance interne des maturités délivrées par les écoles privées. J'ajoute à celle-ci, du coup, une petite punition... (Protestations.)

Le président. Non, non, non !

M. Pierre Weiss. ...une petite punition... (Le président coupe le micro de l'orateur, qui continue à s'exprimer hors micro.) Où en est-on au niveau de la survie du latin ?

M. Charles Beer, président du Conseil d'Etat. Monsieur le président, puisque je passe la question de rattrapage... (Rires.) ...j'en profiterai également pour répondre à une question de M. le député Girardet que j'ai omise. Si vous le permettez, on va reprendre en commençant par les écoles privées. Il s'agit, en fait, de leur capacité à pouvoir organiser, avec des experts et des contrôles externes, le passage, à l'intérieur des établissements et dans les limites cantonales, des examens de maturité. Ce point-là, comme vous le savez, fait l'objet de discussions, et il y a eu de nombreux travaux parlementaires. La formation des enseignants est une condition, et celle-ci doit évidemment être de niveau comparable - c'est le système adopté dans les autres cantons qui ont dit oui à cette capacité des écoles privées. Donc sous réserve de ce point, qui évidemment mérite une adaptation des établissements privés en question, il y aura une reconnaissance signée par le biais d'un accord dès la semaine prochaine ! Je ne pourrais donc pas être plus précis.

Un autre élément est la question du latin que vous avez évoquée. Nous avons remarqué, comme vous le savez, que s'agissant du plan mis en place par rapport à la promotion du latin à la fin de la première année du cycle d'orientation, nous avons engagé un certain nombre de mesures qui nous permettent probablement de retrouver pratiquement les mêmes proportions à la fin du cycle d'orientation que ce qui était le cas dans l'ancien système, en ayant moins d'élèves qui font du latin et qui arrêtent en cours de route au cycle d'orientation, élèves pour lesquels l'usage de la langue n'était visiblement pas établi. Mais j'aimerais également attirer votre attention sur le fait que nous aurons un rapport sur cette question, que nous sommes en train d'y travailler, que M. Koumrouyan est particulièrement attaché à cette question et que nous aurons donc l'occasion de faire le point de façon extrêmement précise sur le nombre d'élèves, mais également sur les choix opérés au niveau de l'enseignement postobligatoire, au collège, du point de vue des options. Parce que vous savez que faire trois ans de latin obligatoire sans autre intérêt pour des futurs collégiens, je trouve que c'est un peu vide; ce qui est important, c'est que la langue demeure, et pour que la langue demeure, au-delà des trois ans du cycle, eh bien il convient que nous la retrouvions dans l'enseignement postobligatoire. Et j'aimerais dire que si nous pouvions avoir les mêmes chiffres ou les mêmes pourcentages qu'en Valais, par exemple, ce serait une très bonne chose puisque cela voudrait dire qu'on a bien défendu la place des langues antiques, pour lesquelles je trouve qu'il y a effectivement matière à intervenir, matière à soutenir, parce qu'elles font partie du patrimoine à transmettre d'une génération à l'autre.

Je profite enfin de cette séance de rattrapage pour donner une réponse à M. le député Girardet en ce qui concerne les licences avec mention «recherche et intervention», les LMRI. Ce qu'il faut savoir, c'est qu'effectivement ces licences n'existent plus, comme vous le savez, car on a modifié le système. Ce qui est important, c'est que, du point de vue des enseignants qui ont étudié d'autres matières auparavant, par exemple celles des filières scientifiques ou d'autres aspects des sciences de l'éducation, il y ait une facilitation et une reconnaissance d'acquis, que nous devons encore systématiser au sein de l'IUFE. Je vous remercie de cette question, parce qu'elle attire mon attention sur des nécessités pour lesquelles il convient encore une fois d'asseoir une systématique de l'IUFE. Merci de votre attention.

Le président. Merci, Monsieur le président du Conseil d'Etat. Je mets maintenant aux voix cette politique publique A «Formation».

Mise aux voix, la politique publique A «Formation» est adoptée par 63 oui et 9 abstentions.

B - EMPLOI, MARCHE DU TRAVAIL

Mme Anne Emery-Torracinta (S). Monsieur le président, ce qui est magnifique avec ces rapports de gestion du Conseil d'Etat, c'est que c'est une photographie du passé. Donc quand le passé est un peu meilleur que le présent, on ne parle que du passé, et puis quand les choses vont mal dans le passé et qu'elles s'améliorent dans le présent, on parle des améliorations. Alors là, comme c'est pire maintenant que dans le passé, on se targue des résultats de l'année dernière.

Concernant le taux de chômage, on nous dit que c'est en amélioration à Genève, que les choses vont mieux aussi par rapport au reste de la Confédération, mais on oublie de nous dire que nous avons aujourd'hui le taux de chômage le plus élevé de Suisse, qu'il a baissé dans tous les cantons suisses ces derniers mois, sauf à Genève, et qu'à Neuchâtel, où ce taux était encore il y a une année au même niveau que le nôtre, il est descendu à 5%, alors que nous en sommes à 5,5%.

Le président. Madame la députée, je suis désolé, j'ai oublié de dire qu'il restait cinquante secondes à votre groupe. Vous en avez déjà utilisé trente, je vous en donne encore trente.

Mme Anne Emery-Torracinta. Oui, oui, je vais aller très vite. Deuxièmement, on nous parle de la restructuration de l'office cantonal de l'emploi. On omet peut-être de parler des dossiers qui ont été perdus. Enfin, et c'est le summum, on nous explique pourquoi les chiffres du chômage, les statistiques, sont faux, à savoir que les personnes qui sont à l'aide sociale n'ont plus besoin, pour obtenir le supplément d'intégration de la LIASI, d'aller s'inscrire à l'OCE, et qu'elles sortent donc des chiffres du chômage. Bravo, Madame la conseillère d'Etat, ce rapport est un summum digne de la «Pravda»... (Protestations.) ...ce qui m'amène à dire encore une fois que l'objectif de la prochaine législature, c'est de mettre l'emploi comme priorité du gouvernement...

Le président. Il vous faut conclure, Madame la députée.

Mme Anne Emery-Torracinta. ...avec le soutien aux entreprises, avec le soutien aux chômeurs qui souhaitent être réinsérés, et ça ne passera que par une politique transversale de l'ensemble des collectivités publiques...

Le président. Madame la députée, on arrive à la fin !

Mme Anne Emery-Torracinta. ...Etat, communes... (L'oratrice est interpellée.) ...ainsi que, bien évidemment...

Le président. S'il vous plaît !

Mme Anne Emery-Torracinta. ...les entreprises et toutes les structures de réinsertion. Je vous remercie, Monsieur le président. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. le député Bernhard Riedweg.

M. Bernhard Riedweg (UDC). Merci, Monsieur le président. Pouvez-vous me dire combien de temps il nous reste ?

Le président. Il reste à votre groupe douze minutes, pour les deux politiques publiques.

M. Bernhard Riedweg. Ce sera largement suffisant. Nous aurions les commentaires suivants à faire concernant cette politique publique, Monsieur le président: le résultat net positif en 2010 était de 8 millions, et il est devenu négatif de 67 millions. Il a donc baissé de 75 millions. Ce qui est tout de même curieux, dans cette politique publique, c'est qu'il y a eu une diminution de 46 postes. Les charges du personnel de l'Etat, en 2012, représentent 24% du total des charges de l'Etat. Selon un sondage de «Bilan», 38% des entreprises à Genève devraient diminuer le nombre de postes de travail, ce qui devrait avoir une incidence sur leur chiffre d'affaires ainsi que sur leurs bénéfices, et par conséquent sur leurs impôts. Genève est deuxième au classement des cantons connaissant le plus fort taux d'emplois publics. Enfin, le nombre d'emplois continue d'augmenter à Genève, mais le nombre de frontaliers augmente plus vite encore.

Du point de vue structurel, l'effritement de la place bancaire est à prévoir du fait de la perte de la clientèle due à la levée du secret bancaire. Ce secteur représente 20% du produit intérieur brut genevois. Il ne devrait pas y avoir de croissance. La masse salariale est en baisse, au premier semestre 2012, pour la première fois depuis 2004. Ma question à la conseillère d'Etat est donc la suivante: en matière d'emploi, pensez-vous que nous sommes arrivés au faîte du bonheur économique, et que nous nous dirigeons vers des années plus difficiles ? Merci, Monsieur le président.

M. Roger Golay (MCG). Monsieur le président - je vais m'adresser à vous - bien entendu, le Mouvement Citoyens Genevois n'est pas du tout satisfait de cette politique publique. Non seulement on estime que la gestion du Conseil d'Etat sur ce problème n'est malheureusement pas satisfaisante, mais en plus de cela la gauche - je l'ai dit hier soir - commet des attaques incessantes contre notre économie, ce qui détruit des milliers d'emplois. Oui, Madame Emery-Torracinta, vous pouvez me regarder tout étonnée, mais à force de tirer à boulets rouges sur le secteur bancaire, sur les multinationales, on en arrive bien entendu... (Brouhaha.) ...à des pertes d'emplois qui se comptent par milliers, même par dizaines de milliers à travers le pays, et vous en êtes les principaux responsables. Mais j'en ai suffisamment parlé hier soir pour ne pas revenir sur le sujet.

Ce qui nous surprend, c'est de nouveau l'augmentation des frontaliers: 10 000 en deux ans. C'est considérable, alors qu'on a un taux de chômage qui est l'un des plus élevés de Suisse. On a 1500 jeunes en rupture, soit qui ont des problèmes au niveau de la formation, soit qui ne trouvent pas d'emploi et n'arrivent pas à entrer dans le monde du travail, et ça, ça nous cause un réel souci puisque la situation ne s'améliore pas. Malgré tout, on peut constater qu'au niveau du Conseil d'Etat on continue à engager des frontaliers, notamment dans certaines directions, en tant que chefs de service, comme si on n'avait pas les personnes compétentes sur notre territoire. Et aller chercher à l'extrême bout de la France des gens pour s'occuper soit des TPG, soit d'autres domaines - je ne parle même pas du secteur sinistré de l'Hôpital cantonal - ou même d'institutions de droit public tels les Services industriels, où on continue à engager à outrance des frontaliers, ça ne va plus. Nous ne sommes pas satisfaits, la population vous regarde et constate que vous ne faites absolument rien pour tous ces jeunes, mais aussi pour toutes les personnes âgées de plus de quarante ans qui n'arrivent plus à retrouver un emploi et qui, avec les conditions au niveau des assurances sociales obligatoires, voient leur route totalement barrée quant à la possibilité de retrouver un travail si elles se sont arrêtées pendant une période. C'est souvent le cas pour les mères de famille qui veulent reprendre un emploi et qui ne trouvent rien car à quarante ans c'est toujours difficile en raison de ce que je viens de dire sur les conditions des obligations au niveau social. Là ça ne va plus, nous ne sommes pas satisfaits et nous allons refuser cette politique publique pour ces raisons.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Forni. Il reste trente-trois minutes à son groupe.

M. Michel Forni (PDC). Merci, Monsieur le président. Je ne saurais vous endormir pendant trente-trois minutes, je vais donc me cantonner à une petite invitation à une forme de psychanalyse et non pas à une ingestion de chiffres. L'emploi, tel que j'ai compris, définit une activité économique qui, reconnaissons-le, consiste à produire des richesses et, grâce à cela, à satisfaire des besoins humains. A Genève comme ailleurs, l'emploi désigne cette fraction du travail qui reçoit une rémunération, c'est le principe de ce que nous avons discuté tout à l'heure, mais qui s'inscrit aussi dans un cadre social et juridique. Alors trois éléments ressortent. Il y a bien sûr une forme de dynamique, une forme de diversité, puis un recours à des stratégies qui vont de la flexibilité à celles qui permettent de surmonter la précarité. Ça veut dire que dans le rapport qui nous a été soumis, il y a des modalités de formation, il y a des ajustements, il y a aussi une analyse fine du chômage, avec ses indicateurs. Et c'est vrai que c'est actuellement difficile à admettre, mais ça reste une problématique importante. On ne peut pas l'oublier, mais les moyens pour la traiter rapidement sont relativement minces.

Le deuxième élément, c'est la réinsertion. Cela a déjà été dit, des demandeurs d'emploi sont là, il y a du coaching, mais aussi la surveillance du marché du travail, et surtout il y a un élément qui à mes yeux ne ressort pas, celui de la compétitivité. Si on veut gagner, il faut être compétitif ! Il faut innover, il faut penser, il faut travailler. Alors ma question est simple, Monsieur le président, et je m'adresse à Mme la présidente du département: en pensant à ces jeunes, ces jeunes qui conjuguent actuellement avec le politiquement correct, mais aussi le politiquement autrement, qui ont besoin d'une stratégie, qui ont besoin d'objectifs, qui ont besoin de mesures qui leur permettent non pas d'être assistés mais d'avoir la confiance pour retrouver une activité, développer leur savoir et le mettre aussi au bénéfice de notre économie et de notre avenir, quel sera, Madame la conseillère d'Etat, ce lien avec la politique de l'autrement ? Et quelle sera votre stratégie, «bottom-up» ou «top-down» ? Merci.

M. Jacques Jeannerat (R). Je crois qu'il est important de rectifier quelques éléments et de mettre la vérité sous les projecteurs. Par rapport à ce fameux taux de chômage j'ai mes sources, et quelques chiffres qui viennent de l'office cantonal de la statistique. Au début de la crise économique, en août 2008, le taux de chômage à Genève était de 5,5%. Aujourd'hui, il est de 5,5%. Sur le plan suisse, en août 2008, il était de 2,4%. Aujourd'hui, il est de 3,1%. Donc la situation est moins dramatique à Genève, par rapport à la Suisse, qu'elle ne l'était au début de la crise. (Commentaires.) Et puis on n'arrête pas de nous dire que la loi a changé, qu'on ne compte pas de la même façon les demandeurs d'emploi qui ne touchent pas d'indemnités de chômage. Alors là c'est encore plus révélateur, parce qu'au début de la crise, le taux de demandeurs d'emploi qui ne touchaient pas d'allocations de chômage, à Genève, était de 2,4%, quand aujourd'hui il est de 1,3%. Donc il ne faut pas raconter des sottises ! (Remarque.) Ces chiffres-là je ne les ai pas inventés, Monsieur le président, je peux d'ailleurs vous envoyer un e-mail avec ces tableaux et vous pourrez vérifier ça demain matin pendant votre café-croissant. Soyons sérieux, on vit à Genève une situation économique certes difficile, mais on est privilégiés par rapport au reste de l'Europe, et on n'est pas si mal par rapport à la Suisse. J'en veux pour preuve les chiffres qui figurent sur le site internet de l'office de la statistique.

Une voix. Sans parler de la création d'emplois !

M. Jacques Jeannerat. Sans parler de la création d'emplois, qui est en augmentation dans notre canton. Nous sommes la seule région d'Europe, depuis le début de la crise, où l'on crée des emplois. Donc il ne faut pas dire des contrevérités et des sottises. (Applaudissements.)

Mme Esther Hartmann (Ve). J'espère que j'obtiendrai des réponses à mes questions, car j'ai un score d'une réponse sur cinq demandes que j'ai faites à tous les chefs de département confondus. (Commentaires.) Cela dit, je promets que je ne reviendrai pas auprès des départements pour demander des réponses après l'intervention des conseillers d'Etat; je respecte les traditions du parlement.

Maintenant, j'aimerais quand même rappeler que les Verts sont effectivement pour que chaque citoyen ait sa place au sein de notre société. J'ai en mémoire les débats budgétaires d'il y a quelques semaines, notamment s'agissant des coupes qui étaient proposées par nos amis ou plutôt collègues MCG, des coupes de 2% linéaires, et je trouve quand même assez particulier de venir ensuite se plaindre de la position des socialistes et des Verts par rapport à la politique de l'emploi.

Ensuite, j'ai deux questions. La première concerne les ARE. Nous avons constaté qu'il y avait une baisse de l'utilisation des allocations de retour en emploi. Je me rappelle que c'était une mesure phare qui était vendue par le département pour que nous acceptions le changement et le renouvellement de la loi sur le chômage, et j'aimerais des réponses plus claires sur ce qui va pouvoir être entrepris pour que ces mesures soient de nouveau utilisées comme elles le méritent. Je souhaiterais aussi savoir si le département dispose des chiffres relatifs au nombre de personnes frontalières qui ont perdu leur emploi sur Genève, et qui ne bénéficient donc pas des indemnités de chômage du canton, bien qu'elles aient cotisé sur Genève. Combien sont maintenant dans les statistiques françaises sur le chômage et non plus dans les statistiques genevoises ? Je vous remercie.

Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. le député Eric Stauffer. Je signale qu'il reste six minutes à votre groupe pour les deux politiques publiques.

M. Eric Stauffer (MCG). C'est largement assez, merci, Monsieur le président. Eh bien voilà, Mesdames et Messieurs, nous venons d'assister à une démonstration de la vraie politique des Verts, qui se soucient des frontaliers qui auraient pu être licenciés. (Commentaires.) Alors moi je vous invite, les Verts, à déposer un projet de loi pour donner des subventions aux frontaliers, parce qu'on n'en verse pas assez, et puis les Genevois, eh bien, comme dit l'adage, on s'en fout... (Protestations.) ...puisque vous, ce qui vous intéresse, c'est la région, c'est les frontaliers, c'est les emplois des Français ! La population genevoise en a pris acte et vous répondra, je n'en doute pas, le 6 octobre prochain.

Monsieur le président, j'ai quelques questions. On ne va pas parler du chômage, mais moi je trouve quand même assez ahurissant qu'on puisse entendre, dans ce parlement, qu'il y avait 5,5% de chômeurs avant la crise, qu'il y en a toujours 5,5%, que donc finalement tout va bien dans le meilleur des mondes et qu'on n'a qu'à continuer sur cette voie-là. Non. J'ai toujours dit que la résistance d'une chaîne se mesure à son maillon le plus faible, et le maillon le plus faible, eh bien ce sont ceux qui perdent leur emploi à Genève. Et surtout, je tiens à le dire, ce sont les gens qui sont établis à Genève, qui ne sont pas forcément d'origine suisse, ce sont les communautés étrangères, qui sont les premières à faire les frais de l'exagération dans l'utilisation de cette main-d'oeuvre frontalière. (Commentaires.) Donc évidemment, l'Etat doit absolument tout entreprendre... (Remarque.) ...pour redonner à ces gens le maximum de possibilités de retrouver un emploi. Et finalement ça arrangera tout le monde ! Parce que pour sortir de l'assistance sociale, que ce soit du chômage ou de l'Hospice général pour les personnes en fin de droit, la solution ce n'est pas de toucher des subventions, Mesdames et Messieurs les socialistes, c'est de retrouver un emploi, avec un salaire digne ! Ça, c'est la dignité d'un citoyen de la République et canton de Genève ! Et là, évidemment, on économisera des centaines ou des dizaines de millions de francs dans les oeuvres sociales. J'aimerais juste vous rappeler, Mesdames et Messieurs, qu'au sens de la loi, 105 000 personnes sur les 450 000 habitants de Genève ne gagnent pas suffisamment - au sens de la loi - pour payer leurs primes d'assurance-maladie, et ce n'est pas moins de 260 millions, à quelques dizaines de millions de francs près, que l'Etat verse en subsides d'assurance-maladie. Allumez un jour la lumière jusqu'au dernier étage, et vous verrez que la politique du MCG protège vraiment le tissu économique genevois.

Alors j'ai une question pour Mme la conseillère d'Etat... (Remarque.) La question, absolument ! Comme vous le savez, je dirige une PME, et j'ai constaté, depuis quelques années, que la zone des 18-25 ans était une zone sinistrée; nous recevons énormément de dossiers de jeunes qui aimeraient trouver leur premier job. Alors la politique nous l'avons mise en place, nous avons engagé beaucoup de jeunes pour leur donner cette première expérience professionnelle, mais ce n'est visiblement pas suffisant, et là nous avons un vrai problème. Et le défi de demain, le défi de l'avenir, c'est de faire en sorte que nos jeunes puissent avoir d'une part la formation adéquate, et d'autre part l'opportunité de trouver leur premier job. Parce que combien de fois on leur dit que, oui, ils ont fait des études, c'est bien, mais qu'ils n'ont pas d'expérience ! Evidemment, avec un bassin d'emploi de 3,2 millions de chômeurs en France, il est très facile pour l'employeur de trouver quelqu'un qui aura sept ans ou dix ans d'expérience. Mais encore une fois, la population genevoise, on s'en fout, on la sacrifie sur l'autel de l'économie. Et ça, ça ne va pas. Donc j'aimerais savoir une chose, Madame la conseillère d'Etat: qu'allez-vous entreprendre dans votre politique pour donner l'opportunité aux jeunes d'avoir leur premier emploi ? Ça c'est votre défi, et c'est notre responsabilité, tant au pouvoir législatif qu'au pouvoir exécutif.

Mme Isabel Rochat, conseillère d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais vous dire, pour répondre tout d'abord à la première assertion de Mme Emery-Torracinta, ce que j'aurais pu lui indiquer hier, à savoir que la colère est souvent très mauvaise conseillère et que les statistiques, au lieu d'être assénées, méritent surtout d'être vérifiées. Non, Madame, les statistiques ne sont pas fausses, et ce n'est pas parce qu'on n'est pas inscrit qu'on sort du dispositif. J'aimerais le rappeler, car je crois que cela a été dit à plusieurs reprises.

Il a été souvent opposé à ces chiffres de la politique de l'emploi qu'il y avait une baisse dans les montants. Je crois donc qu'il est important de rappeler le dispositif: nous avons les allocations de retour en emploi, et je signale que c'est une démarche volontaire des entrepreneurs. Si les chiffres de 2012 sont en baisse par rapport à 2011, ils sont tout à fait comparables à ceux de 2009 et de 2010. Il faut savoir que la situation conjoncturelle au cours de ces années était particulièrement difficile, et malgré cela le nombre de personnes en fin de droit inscrites était inférieur à celui de 2011.

S'agissant de la formation, je dirai que c'est un dispositif qui est en évolution; la LIASI a été adoptée au 1er février 2012, c'est donc un dispositif qui est maintenant en cours de développement et qui prendra son plein effet en 2013. J'évoquerai quand même ce chiffre de 104: 104 retours en emploi ont été possibles en 2012 grâce à l'application de la LIASI. Sur les emplois de solidarité, beaucoup de choses ont été dites: 30 millions au budget 2013, 27 millions au résultat 2012, et c'est une adaptation, une mise en route qui prendra également son plein effet en 2013.

J'en viens maintenant à la question du nombre de chômeurs. Monsieur Riedweg, je crois qu'il est important de rappeler que ce n'est pas la politique qui crée des emplois, mais bien l'économie. Nous avons une économie - cela a été rappelé et vous l'avez dit - qui est forte, un taux de chômage qui, même s'il est le plus élevé de Suisse, reste extrêmement bas comparé aux pays qui nous entourent, un taux de chômage qui est stable, et tous les chiffres des perspectives économiques attestent qu'il est amené à rester stable jusqu'à la fin de l'année. Puisque nous en sommes au rapport sur les comptes, je rappelle qu'il n'a jamais été aussi bas qu'en août 2012. Donc il est important de mentionner les efforts qui ont été accomplis et de dire encore une fois que la situation économique de notre canton et de l'arc lémanique en règle générale - cela a été rappelé par M. Jacques Jeannerat - est extrêmement satisfaisante. Nous suivons ces chiffres avec une très grande attention, surtout en comparaison avec les cantons qui sont comparables dans le reste de la Suisse, et nous avons une situation à Genève qui mérite qu'on lui apporte la plus grande attention s'agissant de la surveillance du marché de l'emploi.

Monsieur Golay, vous avez parlé des jeunes, et c'est une préoccupation qui est la nôtre; 1000 jeunes sont inscrits au chômage, c'est inadmissible, c'est beaucoup trop. Les mesures qui sont préconisées pour répondre au chômage de ces jeunes sont tout d'abord que la première perspective ne soit pas pour eux de pointer au chômage, mais de faire en sorte, en collaboration avec le département de l'instruction publique, que dès la rentrée nous puissions les canaliser avec un guichet unique, qui permette justement aux jeunes au sortir de leur formation, quelle qu'elle soit, d'être pris en charge tant dans le domaine de l'emploi que dans le domaine de la formation. Pour ceux qui sont le plus éloignés du marché de l'emploi, il y a des semestres de motivation qui permettent précisément de les remettre dans la perspective d'un emploi... (Brouhaha.) ...et pas de l'aide sociale.

Madame Hartmann, j'aimerais pouvoir vous apporter la deuxième réponse de votre longue série de questions. Effectivement, si le chiffre des allocations de retour en emploi par rapport à 2011 est en baisse, il est tout à fait égal à celui de 2009 et à celui de 2010.

Sur la question des frontaliers, question cruciale qui a été évoquée aussi, je rappellerai que, s'agissant des permis G - on parle bien de permis G... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...et pas de ressortissants suisses habitant en France - le taux d'engagement de ces frontaliers sur le petit Etat est de 3,4%, c'est-à-dire de 566 emplois ETP sur 16 308. Vous conviendrez que ce taux ne mérite pas qu'on lui porte une attention spéciale, ni que l'on nourrisse une inquiétude particulière.

Je crois que j'ai répondu à toutes les questions, et je terminerai par la problématique des 18-25 ans. C'est vrai que c'est une frange de la population en recherche d'emploi qu'il s'agit de surveiller avec la plus grande des attentions. Nous avons des dispositifs impliquant notamment les entrepreneurs privés avec les «Jeunes@Work», qui sont des entreprises qu'il s'agit d'encourager, d'optimiser, avec encore une fois la volonté que, pour un jeune, la première perspective ne soit pas d'être bénéficiaire de l'aide sociale ou d'aller pointer au chômage. Merci. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais voter cette politique publique B «Emploi, marché du travail».

Mise aux voix, la politique publique B «Emploi, marché du travail» est adoptée par 41 oui contre 22 non et 6 abstentions.

C - ACTION SOCIALE

M. Bernhard Riedweg (UDC). En 2009, les dépenses par habitant dans cette politique publique, à Genève, se montaient à 4200 F, alors que la moyenne suisse était de 2500 F, selon l'OCSTAT. Si on additionne aux charges les coûts des activités de support et ceux des prestations de moyen de la politique P, les coûts complets dans cette politique publique augmentent, entre les comptes 2010 et 2012, de 153 millions, soit de 32%.

Il y a une surenchère permanente d'offres dans cette politique publique. Les pauvres sont de plus en plus nombreux en ville, maintenus par des logements sociaux. Nous nous dirigeons vers l'Etat providence. En 2012, la barre des 10 000 dossiers financiers a été franchie, et l'action sociale vit sa quatrième année consécutive de forte augmentation du nombre d'usagers. L'Etat fait office de récipiendaire dans tous les cas difficiles liés à la personne: divorces, naissances, adoptions d'enfants, assistance juridique, surendettement. Le risque, dans cette politique publique, est que les bénéficiaires s'habituent à l'aide sociale. Le danger est que l'Etat social soit financé par la dette. Quel degré de confort et de dépenses le canton peut-il se permettre dans cette politique publique, au vu des engagements et de la dette de l'Etat ? Si l'heure de certaines renonciations pour raisons économiques devait sonner, ce serait dans cette politique publique.

J'aimerais maintenant poser une question difficile à la conseillère d'Etat: d'où viennent ces hautes valeurs morales que sont la compassion, la pitié, l'assistance aux plus démunis et aux plus faibles... (Protestations.) ...qui caractérisent notre canton et certains partis politiques ? Merci, Monsieur le président.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Renaud Gautier. (Remarque.) S'il vous plaît, Madame la députée ! (Un instant s'écoule.)

M. Renaud Gautier (L). Je voulais juste attendre que Mme la députée reprenne son souffle. C'est une interrogation plus qu'une question objective, mais dans cette politique, au point C02, on parle de soutien à la famille. Alors une lecture attentive, que ce soit des comptes ou du rapport de gestion, permet de mesurer les efforts de type financier qui sont faits par l'Etat par rapport à ces familles en difficulté. A titre personnel, je m'inquiète de ne trouver aucune référence à la notion des ponts intergénérationnels et à ces familles qui peuvent avoir soit des adultes âgés, soit des enfants jeunes handicapés. Il me semblerait logique que cette notion de dépendance intergénérationnelle, ou du moins d'aide intergénérationnelle, figure dans cette politique de soutien à la famille. Si ce n'est pas ici que l'on parle, par exemple, des lieux de soutien pour les personnes âgées ou des lieux de soutien et d'accueil pour les personnes handicapées, où va-t-on traiter cela ? On peut effectivement segmenter les choses en disant qu'il faut traiter le handicap en soi, qu'il faut s'occuper des personnes âgées en tant que telles. Mais si l'on ne traite pas de la dépendance intergénérationnelle, alors on ne répond qu'à la moitié de la question. Car on ne peut pas traiter les personnes âgées sans s'occuper de la famille, et on ne peut pas traiter les personnes handicapées sans s'occuper aussi de leur famille. Mon souhait est donc, tout en étant parfaitement conscient des efforts qui sont réalisés, que dorénavant ces ponts intergénérationnels dans ces lieux de souffrances, ces lieux difficiles, se retrouvent peut-être davantage et soient mieux expliqués dans la politique C02 de soutien à la famille.

Mme Esther Hartmann (Ve). Par compassion pour ce parlement, je vais poser juste une question. On a constaté qu'il y a eu une augmentation de plus de 10% des dossiers traités par assistant social à l'Hospice général. En même temps nous avons réformé le système d'aide sociale, nous avons fixé de nouveaux objectifs, de nouveaux barèmes, c'est une politique qui se veut ambitieuse, et j'aimerais savoir si réellement, avec les moyens qui sont appliqués et avec ces demandes croissantes d'aide sociale, nous pouvons appliquer cette politique ou s'il faut mettre plus de moyens humains pour accompagner les personnes dans ce processus. Merci.

M. Michel Forni (PDC). Un Etat social doit maintenir les solidarités et en construire de nouvelles. Monsieur Riedweg, j'ai été très étonné - Monsieur le président, je vous laisserai le soin de lui transmettre - qu'il y ait certains oublis dans votre analyse de situation. A chacun son péril, c'est vrai, mais il y a trois axes. Ici, dans ce canton, dans cette république, chacun a droit au secours, chacun a droit de mutualiser ses principaux risques, qui vont de la maladie à la vieillesse. Et quand on est vieux, on fait en sorte de pouvoir s'assurer de rester dans un dispositif qui permette de survivre, d'être traité et d'être comme ses semblables. C'est donc une société d'égaux et de semblables. A partir de ce moment-là, je crois que tout le monde a parfaitement décrit le soutien à la famille, les mises en oeuvre qui permettent de conduire et de respecter les actions sociales, ce qui est parfaitement bien fait par l'Hospice général, mais c'est surtout un mode redistributif qui doit être compris par la population. Ma question sera donc simple: comment peut-on mieux communiquer dans ce département, de façon à mieux expliquer ce qui s'y passe ? Merci.

M. Bernhard Riedweg (UDC). Nous sommes étonnés de ne pas avoir vu de motions d'ordre, comme nous l'avons vécu durant les comptes 2011 et le budget 2013. Il y a une très bonne discipline dans ce Grand Conseil, je tenais à le relever. Le groupe de l'Union démocratique du centre souhaiterait vous rendre hommage pour la manière dont vous menez les débats depuis votre accession à la présidence, Monsieur le président. (Brouhaha.) Nous sommes conscients qu'il n'est pas toujours aisé de conduire et d'arbitrer les séances plénières d'une manière consensuelle et harmonieuse. Nous apprécions votre courage et vous remercions pour votre engagement, Monsieur le président. Merci ! (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Eric Stauffer.

M. Eric Stauffer (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, vous l'aurez constaté, depuis maintenant bientôt quatre ans, il y a quelque chose qui ne fonctionne pas dans la répartition que le Conseil d'Etat a établie. En 2009, ce Conseil d'Etat a voulu mettre l'économie avec la santé, et l'emploi avec la solidarité. Alors est-ce à dire que l'emploi est une zone sinistrée, et que de facto on doit joindre ces deux départements ? Moi je ne veux pas y croire. Et est-ce à dire que l'économie est une zone sinistrée, et qu'il faut la joindre à la santé ? Je n'y crois pas non plus. Alors je vous le dis, Mesdames et Messieurs les députés, Mesdames et Messieurs du gouvernement... (Commentaires.) ...le MCG veillera, car nous sommes sûrs que nous entrerons au Conseil d'Etat par la présence de Mauro Poggia... (Protestations.) Non, non, je vous le dis ! Vous verrez les résultats au mois d'octobre et au mois de novembre ! Nous veillerons, au MCG, à ce que la répartition des dicastères se fasse de manière efficiente. L'emploi doit être joint à l'économie, et la solidarité - puisqu'il y a aussi les personnes âgées, avec les EMS - impérativement à la santé. Encore une fois, le Mouvement Citoyens Genevois va siffler la fin de la récréation pour remettre un petit peu de bon sens... (Commentaires.) ...dans la répartition de ces départements. Merci !

M. Patrick Lussi (UDC). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je m'en excuse auprès de vous mais je tenais à dire que, personnellement, j'ai dû subir maintes déclarations d'une personne de mon groupe qui n'ont pas été concertées ni arrangées. Mon éthique UDC ne me permet pas de rejoindre ce qui a été dit. C'est la raison pour laquelle je m'exprime personnellement pour dire que j'aurais souhaité que M. Bernhard Riedweg parle pour lui et s'exprime à la première personne du singulier et non à la première personne du pluriel par rapport à tout ce qu'il a dit. Merci. (Applaudissements.)

Mme Isabel Rochat, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs, depuis décembre 2009, depuis le discours de Saint-Pierre, il est maintenant rentré dans le langage courant que notre aide sociale, que la qualité, surtout, de cette aide se mesure à l'aune de ceux qui n'en ont pas besoin. Les efforts qui sont faits par le canton de Genève, respectivement l'Hospice général, sont non seulement quantitatifs - on le voit par la hausse des bénéficiaires - mais également qualitatifs. Pour répondre à Mme Hartmann, ce difficile équilibre entre les moyens humains et les moyens financiers est une préoccupation constante, tant du Conseil d'Etat que de l'Hospice général, qui dans leur ensemble font des efforts. Et les coûts de fonctionnement de l'Hospice général, qui restent extrêmement stables, en sont la preuve. Pour répondre à votre interrogation, je crois qu'il est surtout question non seulement de moyens humains, mais surtout de moyens financiers, et du difficile équilibre entre les deux. Les moyens humains sont là, plus de 80 nouveaux postes ont été ouverts à l'Hospice général, l'enjeu est donc surtout de pouvoir les répartir aux endroits stratégiques. A cet effet, un effort tout particulier a été mis sur les jeunes - puisqu'il en a été question lors des politiques précédentes - et un regroupement appelé «Point jeunes» a été créé.

S'agissant des ponts intergénérationnels, il est encore question de faire une autre passerelle, cette fois-ci non pas avec le DIP mais avec le DARES. L'effort tout particulier qui ressort du rapport sur les personnes âgées démontre, puisque l'on parle des politiques de la famille, que les détresses auxquelles on assiste dans les familles qui connaissent soit le handicap, soit des déficiences cognitives, la détresse des proches qui restent dans la famille de façon à pouvoir garder le plus longtemps possible un parent, un enfant handicapé ou à déficience cognitive, ainsi que le rôle du proche aidant doivent être maintenant reconnus. Alors ce soutien à la famille tel qu'il a été décrit... (Brouhaha.) ...prend en compte notamment le fait qu'une famille doit pouvoir continuer à travailler et à être aidée si elle n'arrive pas à boucler ses fins de mois, et c'est à cet effet-là que sont destinées précisément les prestations complémentaires familiales, qui ont pris leur essor et ont commencé au 1er novembre 2012, mais qui concernent essentiellement l'aspect financier. Il y a aussi l'aspect de l'encadrement qui, à mon sens, est tout aussi important que l'aspect financier, et on doit pouvoir reconnaître la valeur du proche aidant. Je crois que c'est encore une fois, en termes d'équilibre de nos finances publiques, un élément qui est extrêmement important et qui doit être pris en compte. Sous quelle forme, cela reste à déterminer, et c'est un défi - vous avez parfaitement raison, Monsieur Gautier - qui doit être relevé s'agissant de la politique de la famille. On a tout intérêt à ce que la cellule familiale puisse rester intacte. Le départ en institution... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...est toujours extrêmement douloureux, et l'on doit faire des efforts tout à fait significatifs pour que la cellule familiale puisse, je le répète, non seulement rester intacte mais aussi continuer à exercer une activité lucrative. Et c'est exactement à cet effet que les prestations complémentaires familiales ont été créées.

Mieux communiquer, effectivement ! Je rappelle que l'aide sociale est inscrite dans notre constitution genevoise, et qu'à cet effet nous nous devons et nous avons la responsabilité de ne laisser personne au bord du chemin. On le fera savoir d'une façon peut-être plus parlante et plus claire, parce que des efforts considérables sont réalisés et il s'agit de le communiquer. Merci. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais voter cette politique publique C «Action sociale».

Mise aux voix, la politique publique C «Action sociale» est adoptée par 44 oui contre 17 non et 9 abstentions.

Le président. Nous passons maintenant au vote du PL 11160 en deuxième débat.

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que l'article unique.

Troisième débat

L'article unique de la loi 11160 est adopté en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 11160 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 50 oui et 19 abstentions.

Loi 11160