République et canton de Genève

Grand Conseil

M 2051
Proposition de motion de Mmes et MM. Christophe Aumeunier, David Amsler, Beatriz de Candolle, François Haldemann, Michel Ducret, Christina Meissner, Serge Dal Busco, Alain Charbonnier, Bertrand Buchs, François Lefort, Anne Mahrer, Olivier Norer, Christian Dandrès, Roger Golay, Guillaume Sauty pour promouvoir les zones d'activités mixtes
PL 10861-A
Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi générale sur les zones de développement industriel (LGZDI) (L 1 45)

Premier débat

Le président. Nous sommes au point 44, qui, je vous le signale, est lié au point 84. Monsieur le rapporteur, je vous donne la parole. Mesdames et Messieurs les députés, je vous rappelle - les chefs de groupe en ont été informés - que le point 43 sera traité au point 49 bis. Monsieur le rapporteur, vous avez la parole.

M. Bertrand Buchs (PDC), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Ce projet de loi, le PL 10861, est très important, puisqu'il permet de revoir le fonctionnement des zones industrielles. On s'est rendu compte en commission d'aménagement du canton, en discutant des zones industrielles, qu'il y avait un grand problème de densification de ces dernières et que, lorsqu'elles avaient été créées, des surfaces énormes avaient été consacrées principalement à entreposer des voitures et que ces surfaces énormes de zones industrielles étaient mal utilisées.

Comme Genève doit se développer - Genève doit continuer à créer des emplois et à accepter des entreprises - il était essentiel que l'on puisse augmenter la capacité des zones industrielles. Or il est très difficile de le faire en créant de nouvelles zones industrielles, car il faut trouver des terrains pour cela. Donc l'idée est de densifier les zones industrielles ou d'en créer de nouvelles où l'on puisse mélanger les activités. C'est pourquoi le Conseil d'Etat est venu avec une demande pour créer des zones de développement mixtes. On pourra alors imaginer, au niveau des zones industrielles, de mélanger des activités secondaires avec des activités tertiaires, tout en faisant extrêmement attention, en ce qui concerne les prix des terrains et les prix des activités, à ne pas provoquer de dumping. En effet, si des activités tertiaires viennent dans les zones industrielles, il faudra aussi que l'on respecte le prix du terrain.

Cette demande du Conseil d'Etat a été acceptée par la commission d'aménagement du canton. Il s'agit d'un projet très intéressant qu'il faut soutenir, qui s'inscrit parfaitement dans l'idée du développement de l'agglomération genevoise et de l'agglomération franco-valdo-genevoise. La commission d'aménagement du canton vous propose donc d'adopter ce projet de loi.

M. Christophe Aumeunier (L). Mesdames et Messieurs les députés, c'est bien unanime que la commission d'aménagement du canton a accepté le projet de loi dont vous a parlé le rapporteur Buchs. Ce faisant, la commission a souhaité que soit déposée une proposition de motion, signée par l'ensemble des membres de la commission, visant à demander au Conseil d'Etat d'étudier les périmètres de zones industrielles existants pour permettre de nouveaux déclassements, et de sorte qu'ils correspondent à des zones d'activités mixtes. C'est là l'essentiel de la proposition de motion: donner une impulsion pour que les zones d'activités mixtes ne soient pas réservées qu'à de nouveaux périmètres, mais que le Conseil d'Etat puisse muter d'anciens périmètres de zones industrielles. C'est en cela que l'unanimité de la commission invite le Grand Conseil à accepter cette proposition de motion, donc à la renvoyer au Conseil d'Etat.

M. Christian Dandrès (S). Mesdames et Messieurs les députés, les zones industrielles artisanales sont à l'honneur de notre session, puisque nous avons, la semaine dernière, voté le projet de loi de notre collègue Broggini, lequel permettait d'inclure des activités festives et culturelles en zones industrielles. Nous poursuivons avec ce projet de loi aujourd'hui. Il me semble important de rappeler qu'il y a effectivement un intérêt réel à améliorer l'utilisation des zones industrielles, pour permettre de répondre à une demande très importante des entreprises genevoises. Nous devons toutefois veiller à ne pas péjorer la situation des acteurs du secteur secondaire en faisant la part belle au tertiaire. De ce point de vue, ce projet de loi est satisfaisant, puisqu'il prévoit une cautèle: un pourcentage minimum d'industries et d'artisanats de 60%. Ce quota est un élément très important. Les socialistes saluent également un deuxième aspect de ce projet de loi, dans la mesure où il prévoit l'obligation d'une densité minimale inscrite dans le plan d'aménagement de la parcelle. De ce point de vue là, si le Conseil d'Etat fait correctement son travail, nous avons la garantie que les terrains ne seront pas gaspillés.

Mesdames et Messieurs les députés, il y a toutefois un petit bémol dans ce projet de loi: initialement, il prévoyait que le contrôle de l'Etat pouvait s'étendre tant aux activités du secondaire qu'aux activités du tertiaire. Or, en cours de travaux de commission, le Conseil d'Etat est arrivé avec un amendement qui soustrait les activités du secteur tertiaire de son contrôle. En ce sens, nous avons le sentiment qu'il y a une petite délicatesse dans la mesure où il n'est pas souhaitable que les entreprises du tertiaire puissent obtenir des loyers beaucoup plus importants que celles, concurrentes, dans des zones de développement 3. Mais, dans la mesure où il nous avait été indiqué qu'un équilibre serait établi entre secteurs tertiaire et secondaire par ce biais-là, les socialistes accepteront ce projet de loi. Ils saluent également le dépôt de cette proposition de motion et - une fois n'est pas coutume - remercient M. Aumeunier pour le dépôt et sa rédaction.

M. Roger Golay (MCG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, comme vous avez pu le constater, nous sommes également cosignataires de la proposition de motion 2051. Nous avons aussi, en commission d'aménagement, accepté le projet de loi y relatif.

Nous allons soutenir, bien entendu, ces deux textes parlementaires. Il va de soi que, pour notre groupe, cela va aussi dans le sens d'un développement de notre économie. Cette mixité d'activités, qu'elles soient secondaires ou tertiaires, et y mélanger des zones festives, est nécessaire. On en a longuement parlé par rapport au MOA; c'est une solution pour ces établissements qui causent certaines nuisances et pour épargner ces dernières aux habitants. Les zones d'activités mixtes sont l'endroit élémentaire, pratiquement, pour y placer ce genre d'établissements publics. Donc nous y sommes favorables, d'autant plus que cela permettra de délocaliser certaines industries ou bureaux administratifs du PAV, pour libérer le sol et lancer ce grand projet qu'est le PAV.

M. Olivier Norer (Ve). Mesdames et Messieurs, le groupe des Verts accueille favorablement, comme l'ensemble des groupes de ce parlement, tant le projet de loi 10861 que la proposition de motion 2051, qu'il a d'ailleurs cosignée. Effectivement, le projet de loi part du principe qu'il est nécessaire de densifier la zone industrielle actuelle et de lui permettre une mixité des activités. C'est un sens positif pour la bonne gestion de notre territoire et l'affectation de nos ressources, notamment spatiales. Malheureusement, ce projet de loi n'implique que les espaces nouveaux, donc les espaces créés ex nihilo sur notre territoire, les nouvelles zones industrielles; et celles-ci ne seront pas légion à l'avenir. Il était donc nécessaire de lui adjoindre une proposition de motion, la M 2051, qui permet d'inviter le Conseil d'Etat à transformer les zones industrielles actuelles en zones d'activités mixtes, cela afin de favoriser la densification du territoire. Le groupe des Verts vous invite donc à renvoyer ces deux objets au Conseil d'Etat.

Mme Christina Meissner (UDC). Mon préopinant a quasiment tout dit. Il est évident que le groupe de l'UDC va soutenir tant la proposition de motion que le projet de loi, car ils sont complémentaires. Ce projet de loi est véritablement bienvenu... (Brouhaha.)

Une voix. Chut !

Mme Christina Meissner. ...dans le sens où, aujourd'hui, il faut constater qu'il y a trop peu de densité dans les zones industrielles. Pour permettre à ceux qui les occupent de réaliser une meilleure densification, c'est-à-dire partir en hauteur, il est nécessaire de leur donner les moyens de rentabiliser aussi cette hauteur. Nous souhaiterions véritablement voir une densification qui va largement au-delà de 1, d'une part pour profiter de ces zones existantes, d'autre part pour éviter d'en déclasser de nouvelles, et surtout pour éviter de déclasser des zones habitées.

Il est aussi nécessaire de s'attaquer non pas uniquement, comme ce projet de loi, aux nouvelles zones, mais d'y adjoindre aussi une proposition de motion qui permettra aux zones existantes de bénéficier également de cette nouvelle mixité. Cette dernière ne va pas seulement dans le sens des bureaux et du commerce, mais également des activités festives - on sait à quel point il est difficile aujourd'hui de trouver des endroits pour ces activités festives. Il est à notre sens intéressant de pouvoir rentabiliser les zones industrielles autant le jour que la nuit, et dans des zones où, justement, les habitants ne seront pas prétérités.

Aussi, nous vous invitons à faire diligence pour que non seulement les zones industrielles existantes, mais aussi les nouvelles - que l'on espère pas trop nombreuses - bénéficient de cette nouvelle loi.

M. Serge Dal Busco (PDC). Monsieur le président, le groupe démocrate-chrétien soutiendra évidemment avec enthousiasme l'excellent projet de loi du Conseil d'Etat et, aussi, l'excellente proposition de motion émanant de la commission. Je salue d'ailleurs la volonté du Conseil d'Etat, par ce texte, de venir concrétiser les objectifs politiques qu'il a exprimés il y a quelque temps, avec la volonté de densifier. On n'en reste pas simplement à des souhaits, mais on veut concrétiser cela au niveau du Conseil d'Etat, avec un projet de loi qui matérialise vraiment et va rendre réelle cette volonté de densification.

Il y a des raisons économiques; elles ont été évoquées. Il y a également des raisons techniques; on ne peut pas envisager une densification, notamment en ajoutant évidemment des étages au seul rez-de-chaussée qui occupe aujourd'hui des zones industrielles, sans envisager dans ces étages des activités qui peuvent utiliser ces nouvelles surfaces, c'est-à-dire de l'industrie légère, du tertiaire, et du commerce ! Donc il y a une cohérence absolument parfaite de ce projet de loi avec les soucis que nous avons quant à l'aménagement du territoire et à l'utilisation rationnelle de cette denrée rare qu'est le sol !

Il y a un tout petit bémol, il faut quand même le dire, s'agissant des effets que pourrait avoir la motion, que nous soutenons évidemment, avec enthousiasme également. Certaines activités - on l'a entendu lors des auditions - ne peuvent guère, hélas, souffrir d'un voisinage moins compliqué à gérer en ce qui concerne l'aménagement du territoire. On pense à des activités lourdes telles que le recyclage de matériaux, lesquelles nécessiteront toujours, à l'avenir, des zones relativement spécifiques, quoique limitées, mais dans lesquelles des nuisances seraient provoquées, nuisances qui ne manqueraient pas d'importuner d'autres activités qui profiteraient de la mixité visées par ce projet de loi. Voilà le tout petit bémol que je souhaiterais relever. Mais c'est pour renforcer le bon aloi et la nécessité absolue d'adopter ces textes maintenant, de manière déterminée au niveau de notre parlement.

M. Serge Hiltpold (L). J'interviens brièvement, pour compléter les propos de mon collègue Christophe Aumeunier. Dans les infrastructures et la mixité, il y a un élément que j'aimerais absolument inclure dans le débat: l'arrivée des fluides, c'est-à-dire le gaz et surtout la fibre. En effet, si vous voulez densifier et installer des sociétés tertiaires, on voit que, maintenant, avec l'évolution, la fibre optique est absolument indispensable. De ce côté-là, les zones industrielles sont complètement laissées de côté, et c'est un élément à mettre également dans la balance. Dans la balance sont aussi à mettre les infrastructures, qui sont quand même le «core business» des zones industrielles, notamment le rail. On voit le Bois-de-Bay; il n'y a absolument rien. Il convient peut-être aussi de réfléchir aux voies fluviales - le Rhône - pour avoir un mode alternatif de transport de matériaux, également pour le secteur du secondaire.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le rapporteur Bertrand Buchs, pour une minute et dix secondes.

M. Bertrand Buchs (PDC), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Voici une remarque qui avait été faite en commission et qu'il est important de relever ici: il faut faire attention au déséquilibre qu'il va y avoir entre la rive droite et la rive gauche, puisque, avec la disparition de la Praille, quasiment aucune zone d'activités industrielles ne sera sur la rive gauche. Cela posera peut-être des problèmes de transport au niveau de certains matériaux. Donc il faut, si l'on veut créer de nouvelles zones d'activités industrielles, penser à la rive gauche.

M. Pierre-François Unger, président du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, ce modeste projet de loi est l'aboutissement d'une réflexion importante pour la Genève économique, mais surtout pour la Genève régionale. Ceux d'entre vous qui sont en politique depuis longtemps savent que le débat sur la mixité des zones industrielles a été un débat sans fin et auquel nous avons toujours assisté à une majorité d'oppositions, parce qu'il manquait la souplesse nécessaire à expliquer comment on ferait la différence avec la partie industrielle, dans laquelle l'Etat aide les industries à se développer par un contrôle extrêmement strict des prix des terrains.

Cela permet aux industries d'exercer leur travail dans un canton, dans un pays, où la main-d'oeuvre est chère mais où il est fondamental de diversifier l'économie. Je crois que tout le monde aura compris ces dernières années que notre diversification, que l'on nous a reprochée il y a sept ou huit ans, est en réalité un instrument fondamental d'une certaine stabilité de notre économie. Imaginez, dans la tourmente que notre secteur financier a eu à affronter ces dernières années, que nous ayons supprimé toutes les zones qui permettent aux horlogers d'accomplir les exploits industriels qu'ils réalisent ces dernières années, et même ces derniers mois. En effet, pour information, les deux premiers mois de l'année 2012, malgré la crise mondiale, qui a menacé et dont les risques semblent un tout petit peu diminuer, notre industrie d'exportation horlogère a augmenté son chiffre de 15% par rapport à l'année 2011, qui était une année de tous les records historiques. Encore une fois, cette diversification de l'économie est importante.

Mais notre territoire est petit. Nous nous sommes engagés, avec enthousiasme, dans un projet d'agglomération, et d'une agglomération qui doit avoir trois grands caractères. Un: elle doit être multipolaire. Deux: elle doit être dense. Trois: elle doit rester verte. Ces impératifs nous imposent évidemment de recréer les zones d'activités en zones mixtes, où l'on sait bien que certaines activités industrielles ne peuvent pas se faire dans des étages élevés et que, a contrario, refuser un certain nombre d'activités au simple motif qu'elles ne seraient pas industrielles impose de multiplier l'utilisation du sol, et notamment l'utilisation du sol dans des zones où l'on pourrait construire des logements ! C'est la raison pour laquelle ce modeste projet est un projet qui contribue de manière extrêmement significative à la construction de nouveaux équilibres en termes de logements, avec des libérations de terrains ou des non-utilisations de terrains pour des activités économiques et, au contraire, une densification et une diversification des activités économiques dans les zones industrielles.

Mesdames et Messieurs, là où, il y a dix ans encore, le taux moyen d'utilisation du sol en zones industrielles était inférieur à 0,8, nous pourrons rêver - et nous avons des projets dans ce sens - de densifications beaucoup plus élevées, aux alentours de 2 voire de 2,5. Cela permet d'économiser plus de la moitié du terrain dont nous avons besoin, pour garder tout à la fois des zones qui soient des poumons de notre canton et de notre agglomération, et, d'autre part, des zones pour construire des logements.

Mesdames et Messieurs, merci d'avoir compris les enjeux de ce projet. Merci de l'avoir voté et, au passage, de nous inciter, par la proposition de motion que vous déposez parallèlement, à vous proposer des redéclassements de zones actuellement industrielles en zones mixtes, de telle manière que l'on n'ait pas besoin de procéder uniquement à de nouveaux déclassements de ces poumons verts - que l'on entend garder - pour développer notre canton. Vous l'aurez compris, à travers ce petit projet, on améliore bien sûr la possibilité économique, mais on améliore aussi la possibilité de logements en épargnant des terrains qui auraient été utilisés pour autre chose. On évite probablement des problèmes de mobilité, même si, vous avez raison, il faudra y rester attentifs. Surtout, on tient notre parole de se diriger vers une agglomération dense, multipolaire et verte ! (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le président du gouvernement. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets maintenant l'entrée en matière de ce projet de loi.

Mis aux voix, le projet de loi 10861 est adopté en premier débat par 72 oui (unanimité des votants).

La loi 10861 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 10861 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 72 oui (unanimité des votants).

Loi 10861

Mise aux voix, la motion 2051 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 74 oui (unanimité des votants).

Motion 2051