République et canton de Genève

Grand Conseil

R 587
Proposition de résolution de MM. Stéphane Florey, Olivier Wasmer, Eric Bertinat, Antoine Bertschy, Gilbert Catelain, Philippe Guénat, Eric Ischi, Eric Leyvraz, Yves Nidegger, Jean-Michel Gros, Jean-Marc Odier, Olivier Jornot, Michel Ducret, Frédéric Hohl, Mario Cavaleri, Fabiano Forte, Ivan Slatkine, Louis Serex invitant le Conseil fédéral à s'adresser aux CFF afin que ceux-ci installent des caméras de vidéosurveillance dans leurs trains faisant la liaison entre Genève-Cointrin et Lausanne

Débat

M. Stéphane Florey (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, si cette résolution date de plus de deux ans maintenant, malheureusement la situation n'a que très peu évolué concernant la vidéosurveillance dans les trains régionaux. Juste pour rappel, la vidéosurveillance a fait l'objet d'un projet pilote qui concernait justement la liaison Genève-Lausanne mais, pour des raisons budgétaires, il peine à se mettre en place. Ce qu'il faut savoir, c'est que la vidéosurveillance dans les trains ne fait malheureusement pas partie de l'offre de base; il s'agit d'options. Même si les CFF font bien évidemment des efforts pour placer dès l'achat de nouvelles rames des caméras de vidéosurveillance, en ce qui concerne les anciennes rames, il faut des budgets, et ces trains peinent justement à en être équipés. Maintenant, vous le savez, l'utilité de la vidéosurveillance n'est plus à démontrer, elle a eu des effets plus que positifs: on le voit notamment dans les bus ici à Genève. Quand des personnes déposent plainte et demandent le visionnement des images, on s'aperçoit surtout que les individus qui commettent des larcins sont bien souvent connus des services de police, et ce système permet de les identifier facilement. Toutefois, je vous proposerai de renvoyer cette résolution à la commission judiciaire simplement pour faire le point réel de la situation actuelle, et vous aurez tout loisir de prendre la bonne décision qui s'impose quant à la suite à donner à cette résolution. Voilà ce que j'avais à dire à ce sujet. Merci.

M. Roger Golay (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, comme vous le savez, le MCG prône une sécurité absolue pour ses citoyens. Donc tout texte parlementaire qui va dans ce sens, en principe, est soutenu par le MCG.

En l'occurrence, pour cette résolution, nous allons soutenir la demande de renvoi à la commission judiciaire formulée par notre collègue M. Florey, puisqu'elle nécessite quand même une étude par rapport à l'invite disant que l'on souhaite des caméras de surveillance pour la liaison entre Genève-Cointrin et Lausanne, car cela implique d'adresser ceci comme message à la population: «Au-delà de Lausanne, à vos risques et périls !» Donc je pense que s'il doit y avoir des caméras de surveillance, il doit y en avoir sur tout le réseau suisse. Effectivement, de nos jours on constate de plus en plus d'agressions non seulement envers les passagers, mais aussi envers les contrôleurs dans les trains. C'est la raison pour laquelle, aujourd'hui, il y a une police ferroviaire qui est nécessaire vu la situation qui s'est dégradée ces dernières années et cela sur tout le réseau. Ainsi, le fait de renvoyer cette résolution en commission et de discuter de cette invite est à notre avis essentiel pour aller plus loin par rapport à la demande faite par nos collègues. Nous soutenons donc le renvoi à la commission judiciaire. Je vous remercie.

Présidence de M. Renaud Gautier, président

Mme Lydia Schneider Hausser (S). Mesdames et Messieurs les députés, l'UDC parle d'une expérience réalisée par les CFF sur la ligne Genève-Lausanne pour étayer son objet parlementaire, mais elle date de 2003. Depuis lors, les CFF, comme beaucoup d'autres transports publics, ont travaillé cette question de la sécurité et de l'insécurité - c'est ainsi qu'ils la nomment. Trouver la juste proportion entre prévention, dissuasion et répression, mais également un juste équilibre entre protection publique et protection de la sphère privée ou intime, en est aussi l'une des composantes. Une bonne politique de sécurité dans les trains et les transports publics implique une complémentarité entre les moyens techniques, du style de la vidéosurveillance, et les moyens humains.

La vidéosurveillance - cela a été prouvé aussi dans une étude de l'Université de Genève datant de 2008 - est utile pour les déprédations, voire pour les incivilités, mais la présence humaine a tout de même plus d'effets en ce qui concerne la sécurité des personnes. La machine - donc la vidéosurveillance - ne peut et ne doit pas remplacer l'homme; elle n'est là que pour constater et non pour faire de la communication ou de la médiation, voire du contact direct avec les utilisateurs. Il est donc important de discuter de vidéosurveillance, mais il est encore plus essentiel de parler de moyens mis à disposition, que ce soit pour la police, pour des contrôleurs dans les rames - et non seulement dans les trains InterCity, mais aussi dans les RER - voire pour des médiateurs. Au choix, si l'on me demandait: «Est-ce que vous préférez avoir une caméra ou quelqu'un qui passe de temps en temps dans les compartiments ?», il est très clair que je répondrais que je préfère que quelqu'un passe de temps en temps. Parce que, à part le bénéfice d'être là, la caméra ne me sauvera pas ou ne m'aidera pas si je suis en difficulté.

En résumé, cette résolution tente de répondre à un véritable problème, mais elle n'est pas complète et, quelque part, elle est rétrograde et ne base la sécurité ou la lutte contre le sentiment d'insécurité que sur la vidéosurveillance. Depuis lors, les CFF ont évolué et, pour sécuriser les trains, ils ont introduit la vidéosurveillance dans tous les nouveaux wagons et toutes les nouvelles rames. En outre, ils ont étayé leur concept de sécurité en mettant également des personnes dans les trains. Donc je ne sais pas si c'est à nous, Genevois, d'entrer dans ce concept et de leur dire ce qu'ils doivent faire, vu qu'ils sont plus avancés par rapport à ce qui se trouve dans cette résolution. Maintenant, s'il y a un renvoi en commission et que c'est pour discuter...

Le président. Il vous faut conclure, Madame la députée.

Mme Lydia Schneider Hausser. Oui. S'il y a un renvoi en commission, le groupe socialiste ne s'y opposera pas, pour pouvoir étudier la chose. En revanche, si l'on nous demande d'accepter d'emblée cette résolution, nous refuserons.

M. Olivier Jornot (L). Chers collègues, s'il y a bien un domaine dans lequel la vidéosurveillance n'est pas un problème, c'est bien le domaine ferroviaire. C'est en effet l'un des premiers secteurs dans notre pays où les acteurs concernés - principalement les CFF, bien sûr - se sont non seulement dotés des instruments adéquats, du matériel approprié, mais ont aussi fait en sorte d'avoir les bases légales adéquates, pendant que les autres en étaient encore à l'âge de la pierre et à se demander, comme Mme Schneider Hausser, si par hasard il valait mieux mettre des hommes plutôt que des machines. Ce débat antédiluvien est déjà largement dépassé, puisque tout le monde est d'accord aujourd'hui pour dire que, pour lutter efficacement contre l'insécurité, il faut les deux et que les deux instruments sont adéquats lorsqu'ils sont combinés.

C'est en 2003, Mesdames et Messieurs - vous vous rendez compte, en 2003 ! - que l'ordonnance sur la vidéosurveillance dans les trains a été adoptée. Cela fait donc huit ans qu'on dispose de la base légale adéquate, pendant que - encore une fois - d'autres collectivités publiques n'ont toujours pas ce qu'il faut pour travailler dans le domaine de la vidéosurveillance. Les CFF ont fait tous les efforts nécessaires, et de très nombreux trains sont équipés. Récemment, lorsque les CFF ont annoncé la commande de la soixantaine de trains Bombardier pendant l'été, eh bien l'une des premières choses qu'ils ont dites était précisément qu'ils seraient tous équipés de caméras de vidéosurveillance. Je vous rassure, Madame Forster Carbonnier, ce ne sont pas des trains-bombardiers avec un trait d'union entre les deux. (Rires.)

Alors, Mesdames et Messieurs, nous n'avons pas de problème de vidéosurveillance dans les trains. Nous avons en revanche - et même si l'on renvoie cette résolution en commission, ce à quoi le groupe PLR ne s'opposera pas - un problème de vidéosurveillance de manière générale dans le canton, sur le terrain, sur la terre ferme, parce que nous n'avons pas suffisamment de concepts bien élaborés dans ce domaine. En effet, les caméras sont disséminées en fonction d'objectifs qui relèvent la plupart du temps soit de l'organisation du trafic routier, soit d'autres problèmes de ce genre, et pas de la lutte contre l'insécurité. Donc s'il y a un travail à faire dans ce parlement, au Conseil d'Etat et au département - au DSPE - eh bien c'est de travailler sur la vidéosurveillance de manière plus globale dans l'ensemble du canton; ce sera plus utile que de s'occuper de cette histoire de trains.

Mme Anne-Marie von Arx-Vernon (PDC). Pour le parti démocrate-chrétien, cosignataire de cette résolution, il n'y a pas de tabou, Monsieur le président, vous le savez bien. Et il ne s'agit pas d'opposer les médiateurs, les personnes qui vont avoir en charge la sécurité, et la vidéosurveillance. Les deux sont complémentaires et nous nous apercevons de plus en plus qu'il est important d'avoir de la vidéosurveillance dans les transports publics. C'est pourquoi nous trouvons évidemment parfaitement logique de renvoyer cette résolution à la commission judiciaire et de la police, afin d'étudier et de voir ce qui a déjà été fait, et qui est tout à fait reconnu comme étant efficace, et ce qu'il reste à faire. Je vous remercie beaucoup.

M. Roberto Broggini (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, cette résolution est une fausse résolution... (Exclamations.) ...pour la raison suivante, c'est que vous ne vous attaquez pas à la base du problème. (Commentaires. Le président agite la cloche.) C'est vous, les partis de droite, qui avez supprimé dans toutes les gares le personnel aux guichets, vous avez supprimé les contrôleurs au nom de la rentabilité, et maintenant nous devrions investir des sommes énormes pour pouvoir surveiller les gens avec des caméras, alors qu'il n'y a plus le personnel roulant. Et Dieu sait s'il est important, pour que les CFF fonctionnent bien, qu'il y ait du personnel humain !

Vous vous opposez souvent, les partis de droite, à ce que l'on surveille avec des caméras les routes et les autoroutes au nom de la liberté de pouvoir circuler comme on le souhaite; en revanche, dans les transports publics, il faudrait pouvoir contrôler tout le monde. Cela n'est pas acceptable !

Maintenant, si ce parlement doit renvoyer cet objet devant la commission judiciaire et de la police que je préside, je ferai les travaux, je vous le garantis, afin que l'on arrive à un résultat qui puisse répondre à cette résolution, mais je ne pense pas que vous saisissiez le problème par le bon bout. Je vous remercie, Monsieur le président.

M. Stéphane Florey (UDC). Juste deux ou trois mots sur ce que j'ai entendu. Bien évidemment, la vidéosurveillance est un moyen complémentaire qui ne remplacera en aucun cas la présence humaine; il faut juste en avoir conscience. Ce qu'il faut également savoir, c'est que la ligne Genève-Lausanne est la plus fréquentée de Suisse, c'est pour cela que nous avons déposé cette résolution qui demande justement de s'occuper spécialement de cette liaison.

Je vous rappellerai aussi que les trains ne sont pas systématiquement équipés de caméras de vidéosurveillance, mais qu'il s'agit d'une option. Même si les CFF font effectivement beaucoup d'efforts pour l'acquisition de nouvelles rames qui en soient d'office pourvues, ils ont beaucoup de peine à trouver le financement pour les anciennes rames. Et comme l'a dit Mme von Arx-Vernon, le renvoi en commission qui est demandé vise justement à faire un point de situation et à donner la suite qui s'imposera à cette résolution.

Une voix. Bravo !

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Eric Stauffer, à qui il reste une minute trente.

M. Eric Stauffer (MCG). Merci, Monsieur le président. Mon nom: Eric Stauffer, né le 24 octobre 1964. Mon adresse: 1, rue des Grand'Portes. Veuillez noter, c'est pour les poursuites pour violation du secret de fonction !

Mesdames et Messieurs les députés, hier soir, nous avons visité la DGM - la direction générale de la mobilité - et il y a des caméras partout à Genève aux feux. Ils ont fait un zoom et on a pu lire la marque du pantalon ! La marque du pantalon d'un passant sur un trottoir ! Or ces accès sont bloqués aux services de police par le gouvernement de gauche ! (Exclamations.) Mesdames et Messieurs, aujourd'hui la vidéosurveillance à Genève n'est plus un problème ! Aujourd'hui, les fonctionnaires de la DGM, frontaliers pour la plupart, ont accès à ces images et l'on interdit cet accès aux policiers assermentés. C'est une honte ! Madame la conseillère d'Etat, je vous demande de fustiger le Conseil d'Etat ! (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Je vous demande de fustiger le Conseil d'Etat ! Genève a besoin de sécurité et, aujourd'hui, il faut arrêter d'être hypocrite ! Voilà ce que j'avais à dire. Je viens de violer un secret de fonction de la commission des finances d'hier soir. Mais, par ailleurs, le GHI en avait déjà parlé il y a une année. Merci.

Le président. Monsieur le député, je vous vois en grande forme. Il n'est que 10h45... (Remarque.) La parole est à M. le député Pascal Spuhler.

M. Pascal Spuhler (MCG). Merci, Monsieur le président. J'aimerais juste ajouter qu'effectivement la vidéosurveillance dans les trains est une nécessité. Cela a été prouvé aux TPG. Depuis que des caméras y ont été installées, un certain nombre de cas de vandalisme et de petite criminalité ont été résolus grâce à cette vidéosurveillance. Mais elle ne fait pas tout, vous avez bien raison, et la présence humaine est également importante dans les trains. Cependant, quand la présence humaine est victime de criminalité, elle a justement besoin de la vidéosurveillance. C'est un apport, un plus, et une mesure préventive absolument nécessaire. Donc il vous faut soutenir cette résolution. Merci.

Mme Isabel Rochat, conseillère d'Etat. J'ai bien pris note que le président de la commission judiciaire allait attaquer les travaux sur la vidéosurveillance avec la plus grande diligence et je ne peux que m'en réjouir.

S'agissant de cette résolution, je pense que son contenu est de la compétence du Conseil fédéral, cela a été répété tout à l'heure. Le matériel roulant est équipé de caméras depuis 2003; les derniers trains Bombardier InterCity Genève-Lausanne en sont pourvus. Si le reste du matériel roulant doit l'être aussi, c'est effectivement de la compétence du Conseil fédéral.

J'aime mieux que la commission judiciaire planche sur notre projet, soit celui du Conseil d'Etat, s'agissant de la réglementation de la vidéosurveillance. Et je confirme effectivement ce qui a été dit précédemment, à savoir que la DGM est richement dotée en caméras. Maintenant, l'usage qui en est fait est une discussion qui doit avoir lieu au sein de la commission. La semaine prochaine, dans le courant du mois de septembre, je vais présenter l'état des lieux de toutes les caméras qui se trouvent sur le territoire genevois, et je peux confirmer que leur précision est assez infaillible.

Cela dit, je ne peux que saluer le fait que le travail sur la vidéosurveillance puisse enfin commencer au sein du Conseil d'Etat et au sein de notre commission judiciaire. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Nous sommes donc en procédure de vote. Il a été demandé le renvoi de cette résolution à la commission judiciaire et de la police.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de résolution 587 à la commission judiciaire et de la police est adopté par 67 oui contre 13 non.