République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 10570-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève (LGAF) (D 1 05)
Rapport de majorité de M. Renaud Gautier (L)
Rapport de minorité de M. Eric Stauffer (MCG)

Premier débat

M. Renaud Gautier (L), rapporteur de majorité. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs, il s'agit d'un petit projet de loi qui s'inscrit dans cette logique que nous vivions depuis plusieurs années, à savoir celle du budget par prestations, et qui tend à la création d'un centre unique de gestion du contentieux de l'Etat de Genève, rattaché au département des finances. Ceci n'a rien de très particulier ni de spécial, si ce n'est effectivement de placer en un seul lieu les compétences nécessaires pour gérer les créances que l'Etat peut avoir. (Remarque.) N'est-ce pas ?

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur ! Vous avez terminé ?

M. Renaud Gautier. Absolument !

Le président. Je vous remercie de la brièveté de votre rapport. Je passe la parole à M. le rapporteur de minorité, M. Stauffer.

M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de minorité. Nous prenons acte que le rapporteur de majorité dit: «C'est un projet de loi sans importance, c'est un petit projet de loi.» Non, Mesdames et Messieurs ! En réalité, ce projet de loi fait suite à la débâcle de la Banque cantonale genevoise, qui coûtera in fine plus de 2,2 milliards au contribuable genevois. Alors nous n'avons effectivement pas les mêmes appréciations, Monsieur le député, s'agissant de «projets de lois sans importance» - qui sont très courants, et, comme cela, tout va bien dans le meilleur des mondes !

En fait, de quoi s'agit-il ? Eh bien, il s'agit tout simplement de régler la petite bagatelle de 177 actes de défaut de biens datant des années... Vous savez, les années durant lesquelles la Banque cantonale et tous ses érudits de la finance, de même que tous ses grands spécialistes de l'immobilier, octroyaient des crédits à leurs petits copains - vous savez, qui finançaient par ailleurs quelques partis politiques ! Evidemment qu'au bout d'un moment ça a coincé dans la machine ! Et l'on s'est retrouvé avec une facture de 5 milliards qui ont été repris par la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève pour essayer de sauver ce qui était «sauvable». Et c'est donc, au final, une facture de 2,2 milliards qui sera présentée au contribuable genevois !

Le MCG a été très à la page avec la commission de contrôle de la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève. Le titre est assez long, mais le travail fut aussi laborieux. En effet, il faut savoir que, dans le cadre de ses activités, le modeste député que je suis s'est quand même pris quelque chose comme deux plaintes pénales de la part de la Fondation de valorisation et une demande au Tribunal civil pour atteinte à la personnalité, ceci parce que nous avons osé mettre en cause le directeur de cette fondation - un certain élu d'un certain parti de l'Entente dans la commune de Bernex - qui avait participé, selon nous, à la débâcle de la Banque cantonale de Genève en contribuant à signer des contrats pour des montants qui n'avaient aucun rapport avec les objets financés. Il a donc contribué à falsifier les comptes de la banque et, résultat des courses, aujourd'hui c'est le contribuable genevois qui va payer les pots cassés ! Maintenant, avec tout ce processus, Mesdames et Messieurs, on arrive à ces 177 actes de défaut de biens qui, accrochez-vous, représentent la «bagatelle» citée par le député Gautier, soit quand même - tout de même ! - la somme de 468 millions de francs ! Belle «bagatelle», Monsieur le député ! Ça représente quand même - laissez-moi vous le dire ! - 5% de la dette cantonale genevoise ! Et les 2,2 milliards qui seront présentés au contribuable ne représentent pas moins de 30% de la dette du canton. Alors vous voyez, les bagatelles à la libérale...

Vous m'excuserez, mais, sur ce dossier-là, on ne pourra pas vous suivre. Sur bien d'autres sujets, nous sommes en accord, mais pas sur celui-là ! Peut-être y a-t-il un lien de cause à effet, peut-être que certains dirigeants de cette banque et certains conseillers d'Etat étaient proches de vos milieux... Et puis ma foi, aujourd'hui, les vrais responsables - pfuit ! On attend toujours un hypothétique procès avec quelques fusibles certes importants, mais les vrais coupables, eux, se la coulent douce: ils ont certainement tiré de bons bénéficies et doivent bien rigoler en voyant que la facture est présentée finalement au peuple genevois.

En fait, le Conseil d'Etat nous a présenté en commission une première version dans laquelle il voulait limiter au montant de 100 000 F les abandons de créances sur les actes de défaut de biens...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le rapporteur !

M. Eric Stauffer. Bah ! Vous voyez, Monsieur le président, c'est toujours le problème: quand on parle de sujets importants, avec cette majorité gouvernementale, vous limitez...

Le président. Vous avez encore dix secondes, exceptionnellement !

M. Eric Stauffer. ...le temps de parole. Et puis c'est toujours la même chose: le seul crétin, dans l'histoire, c'est le contribuable, qui continue à payer les casseroles de la Banque cantonale ! Ici, on ne peut pas s'exprimer ! Ici, on nous limite la parole ! (Remarque.) Ici, on fait des débats de quarante minutes...

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de minorité, votre temps de parole est largement écoulé !

M. Eric Stauffer. ...et puis, encore une fois, la facture sera pour le contribuable !

Le président. Je vais maintenant passer la parole à M. Bavarel.

M. Christian Bavarel (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons, les Verts, être extrêmement clairs: selon nous, le scandale de la Banque cantonale est total. Néanmoins, le lieu où cela doit se résoudre, c'est en justice. Et nous attendons un procès, Monsieur Stauffer, avec autant d'impatience que vous ! Nous souhaitons avoir un procès !

De quoi s'agit-il ? A un moment, nous avions un trou de 5 milliards; c'est redescendu à 2 milliards, ce qui veut dire qu'il y a des gens qui ont bouché le trou. Il s'agit de finir ce travail, et, Monsieur Stauffer, je trouve détestable que vous tapiez sur les gens qui essaient de boucher le trou ! (Commentaires. Brouhaha.) Maintenant, nous attendons, nous, un procès pour condamner ceux qui ont fait le trou, et non pas pour taper sur les personnes qui ont essayé de le boucher ! (Remarque.)

M. Claude Jeanneret (MCG). Eh bien, je vais continuer le... comment dirais-je ? Je vais poursuivre sur la lancée de mon collègue de parti. Je reviens sur ce qu'a dit M. Bavarel: premièrement, concernant les 5 milliards, personne n'a fait un effort pour les diminuer ! Quand on pense que l'immobilier a plus que doublé depuis cette époque, eh bien, si l'on a encore 2 milliards de dettes, c'est que ça s'est fait d'une manière un tout petit peu... Disons «soft», pour certains que ça intéresse. Si l'on avait bien travaillé, et si ce parlement n'avait pas été à la botte de ceux qui ont pris de l'argent, on n'aurait jamais 2 milliards de dettes ! On aurait zéro franc de dettes et on aurait un bénéfice. C'est tout ce que je peux vous dire !

De plus, il est inadmissible de constater qu'on arrive à passer de très nombreuses minutes - pour ne pas dire plus, et c'est un euphémisme - en commission des finances pour, peut-être, 170 000 F de dépenses relatives à des voitures électriques, alors qu'on ose dire ici que 460 millions, c'est une bagatelle ! Je trouve cela scandaleux ! C'est une irresponsabilité absolument inadmissible de la part des élus du peuple !

Je voudrais dire un truc, puisqu'on nous affirme: «On n'a pas à vérifier la remise de dettes sur les ADB, parce que ce n'est pas intéressant» - car 500 000 F, voire un million, il ne faut pas voir les petites choses... Eh bien non ! Les petites choses peuvent en cacher des grandes ! Et moi, j'estime que, là, nous avons fait une erreur fondamentale, parce que - par mesure de simplification, dit-on, mais surtout par mesure de complaisance vis-à-vis de certaines actions - on ne veut pas tout contrôler. Je ne suis pas d'accord: nous devons agir ! Nous, le MCG, avons été opposés à l'augmentation à 500 000 F du montant pour le contrôle des remises des ADB, alors que le Conseil d'Etat nous avait proposé 100 000 F, ce qui était beaucoup plus raisonnable. Nous avons une dette de 468 millions à gérer sur la remise d'ADB, et j'estime que c'est notre devoir, à la commission des finances, d'examiner cela. Aujourd'hui, il est inadmissible que l'on vote une loi pour diminuer le travail de la commission des finances, simplement par mesure d'économie ! Non ! Ce n'est pas une mesure d'économie, il faut bien le dire ! C'est une mesure de complaisance, c'est tout ! Ce n'est pas qu'on n'ait pas confiance en le Conseil d'Etat, bien au contraire. Mais si lui-même a proposé 100 000 F, c'est qu'il était conscient de l'importance de la chose, et c'est la raison pour laquelle il est inadmissible que la commission des finances ait décidé - par la voix de certains partis qui étaient bien impliqués dans l'affaire - de monter la limite du contrôle à 500 000 F.

J'ajouterai encore ceci: quand on arrive à avoir une perte de 2,2 milliards sur de l'immobilier - qui a, comme je le disais tout à l'heure, plus que doublé depuis que la catastrophe s'est produite - on ne peut pas se féliciter de la gestion de la dette de la Banque cantonale ! Le malheur dans toute cette histoire, c'est que c'est de nouveau ceux qui paient des impôts, c'est de nouveau la population genevoise qui est en train de payer la mauvaise gestion et la facilité de décision ! Une décision qui a été prise à dix heures le soir, n'importe comment, et qui n'a pas tenu compte de toutes les catastrophes que cela pouvait provoquer ! Et 2 milliards, sur 13 milliards de dettes pour Genève, c'est quand même beaucoup d'argent !

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !

M. Claude Jeanneret. J'en reviens à une chose: le MCG ne peut pas accepter cette loi, et nous nous opposerons à cette proposition telle qu'elle est faite maintenant. (Applaudissements.)

M. Pierre Weiss (L). Mesdames et Messieurs les députés, je pense qu'il faut en revenir aux faits, aux chiffres - et c'est ce dont avait à traiter la commission des finances. Je crois que tout le monde sera d'accord ici pour dire que les 2,5 milliards qui sont à payer par les contribuables, c'est beaucoup trop, et que cela montre que les banques publiques peuvent être, à l'occasion, aussi mauvaises que les banques privées. Ce n'est pas une raison de se rassurer pour autant, mais enfin, c'est une façon de voir que ce n'est pas la forme de propriété qui importe, mais la qualité et les compétences des dirigeants.

De quoi s'agit-il ce soir ? Il s'agit de savoir si l'on fait confiance ou pas au Conseil d'Etat, et certains ici pratiquent la méfiance, voire veulent jeter le discrédit, pour des montants qui ne sont pas de 467 885 000 F, mais pour des montants qui sont, sur ce total de 465 millions, de moins de 13 millions ! En effet, il y a moins de 13 millions pour lesquels la commission des finances, dans sa majorité, est d'avis qu'il convient de donner au Conseil d'Etat la compétence de régler les cas. Combien sont-ils, ces cas ? Ils sont 63 sur un total de 177. En d'autres termes, 63 cas sont des actes de défaut de biens de moins d'un demi-million, de moins de 500 000 F. Les autres - je laisserai l'expert-comptable calculer la différence entre 177 et 63 - eh bien, ce sont des actes de défaut de biens de plus de 500 000 F. Pour ceux-là, la commission des finances entend effectivement exercer son contrôle. Cela montre bien que nous ne démissionnons pas, que nous remplissons notre mandat et que nous allons à l'essentiel.

Le Conseil d'Etat aurait pu, à la limite, se sentir légèrement, sinon méprisé, en tout cas mis en cause, puisqu'on lui disait qu'il n'avait qu'à s'occuper des choses de second ordre - des actes de défauts de biens de moins de 500 000 F. Il ne l'a pas fait, je crois qu'il a parfaitement compris qu'il s'agit là plutôt de ventes administratives que de décisions plus importantes. Et c'est la raison pour laquelle la grande majorité de la commission des finances a considéré qu'il était rationnel pour elle de s'occuper des choses importantes et pas des secondaires.

Cela étant dit, nous avons entendu, ici, des attaques personnelles lancées contre un magistrat communal, et elles n'ont pas été formulées de façon complète. Je me garderai bien de dire qui a raison ou qui a tort, mais, à ma connaissance, ce magistrat communal de la commune voisine de la mienne a vu une plainte contre lui classée. En revanche, le député qui s'est exprimé a toujours contre lui-même - ce député est à la table du rapporteur de minorité - une plainte civile de la part de celui qu'il a mis en cause et dont il a voulu jeter l'honneur à la poubelle. Donc, il y a un moment où il faut savoir qui est du côté de ceux qui salissent et qui est du côté de ceux qui sont propres !

M. Roger Deneys (S). Mesdames et Messieurs les députés, les socialistes ne soutiendront pas l'amendement du MCG. Il faut dire que, pour eux, l'essentiel ici est de ne pas laisser les abandons de créances simplement aller jusqu'à un terme où l'on ne récupère rien, mais, bien entendu, de mettre la pression sur ces débiteurs pour qu'on puisse récupérer de l'argent. Et comme l'a dit M. Weiss tout à l'heure, c'est vrai que vis-à-vis de ces montants - à 100 000 F ou à 500 000 F - en réalité, en augmentant cette limite on garde quand même un montant de 452 millions de francs à la compétence du Grand Conseil et l'on laisse effectivement 13 millions à celle du Conseil d'Etat. Ça ne m'étonne pas que le MCG se focalise sur les petites affaires et les petits dossiers, et préfère occulter les gros - on sait très bien que la commission a aussi d'autres dossiers à traiter.

Mesdames et Messieurs les députés, la priorité doit être le contrôle démocratique: à partir du moment où notre Grand Conseil peut obtenir des informations de la part du Conseil d'Etat, on peut estimer que la commission a fait son travail correctement en fixant cette limite à 500 000 F. (Commentaires.)

Et pour le reste, Monsieur Jeanneret, je trouve particulièrement choquants vos propos concernant les 2 milliards que nous aurions perdus parce que nous serions de mauvais gestionnaires dans l'immobilier. Je vous rappelle, Monsieur Jeanneret - et M. Stauffer a essayé de le répéter à maintes occasions, mais vous n'avez pas bien dû l'entendre - que ces 5 milliards sont bien liés à la spéculation qui a eu lieu l'époque ! Et c'est bien pour cela qu'on ne peut pas récupérer cet argent: parce que les prix qu'avaient établis les spéculateurs - qui sont peut-être de certains milieux de cette enceinte, c'est vrai - étaient surfaits ! Mais en l'occurrence, en vendant à un prix réel, évidemment qu'on allait perdre en tout cas la moitié, voire plus. On peut donc plutôt se féliciter de ce que le marché immobilier ait connu une certaine reprise, car c'est celle-ci qui a permis de limiter la casse, et certainement pas l'intervention du MCG ! Qui, par ailleurs, a aussi connu quelques élus ayant eu des casseroles avec cette Fondation de valorisation. Donc, je crois qu'on n'a de leçon à donner à personne ! (Remarque.) Je vous dirai simplement qu'on est ici en train de boucler cette affaire: ce qui compte surtout, c'est d'éviter qu'une telle chose se reproduise. Pour cela, je pense qu'il faudrait compter sur tous les groupes - et j'espère qu'on pourra aussi compter sur le MCG quand il faudra éviter que cela se reproduise.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Gautier. (Remarque de M. Eric Stauffer.) Monsieur Stauffer, vous souhaitez vous exprimer, mais comme votre temps de parole est épuisé, je vous redonnerai cette dernière au deuxième débat, afin de présenter votre amendement.

M. Renaud Gautier (L), rapporteur de majorité. Monsieur le président au regard si doux, puis-je vous demander de rappeler au rapporteur de minorité que nous examinons le PL 10570-A - il s'agit du point 162 de notre ordre du jour - et que ce projet traite de la modification de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève. C'est de cela qu'il s'agit ! Alors après, évidemment, on peut, à un titre ou à un autre, décider de mettre toute la crème fouettée qu'on veut en disant que c'est la faute de celui-ci ou de celui-là... Ce dont on parle ici, l'enjeu de ce soir, c'est: voulons-nous donner à un service de l'Etat - en l'occurrence, le département des finances - une compétence sur la gestion des créances ? Tout le reste n'est que billevesées. Voilà donc sur quoi nous avons à voter ce soir, et non pas sur l'avenir ou sur le futur hypothétique de la Banque cantonale de Genève.

M. David Hiler, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je veux tout de même vous rappeler quelle serait la conséquence si, par hasard, ce projet de loi n'avait pas été déposé: c'est simplement que le Conseil d'Etat - ou plus exactement, en l'occurrence, le service concerné - traiterait ces actes de défaut de biens selon des directives, sans en référer à qui que ce soit. C'est ce que nous faisons dans le domaine de l'administration fiscale - j'espère que vous imaginez ce que représenterait un passage de ces gestions devant les commissions parlementaires.

Donc, le Conseil d'Etat - qui avait été accompagné pendant plus de dix ans, tout de même, par une commission parlementaire pour ces dossiers - a estimé qu'il convenait, sur ce dossier particulier, qu'une commission, en l'occurrence la commission des finances, ait les mêmes prérogatives que celles qui avaient été attribuées à la commission de contrôle de la Fondation de valorisation. Il l'a fait, parce qu'il estime que tout ceci reste encore brûlant, dix ans après, et qu'il est bon qu'il n'y ait pas trop de soupçons là autour.

Nous étions partis sur un niveau extrêmement bas, tout en précisant au parlement qu'au fond c'était essentiellement son problème de savoir à quelle hauteur - 100 000 F ou 500 000 F - l'abandon de créances devait être approuvé par la commission. La commission a choisi 500 000 F, ce qui paraît à peu près raisonnable. De toute façon, le circuit est en soi relativement complexe: un service est concerné, il faut que le chef du département porte l'affaire au Conseil d'Etat, il faut que le Conseil d'Etat soit d'accord, et - au-dessus de 100 000 F ou 500 000 F, selon la décision du deuxième débat - une commission doit encore donner son préavis ! Vous reconnaîtrez, disons, qu'une certaine prudence règne autour de cette affaire.

Pour le reste, effectivement, ça coïncide - et c'est important - avec la création d'un service de contentieux et, notamment, de traitement des actes de défaut de biens, qui fonctionnera pour l'ensemble de l'Etat. Voilà sur quoi vous devez voter, mais il convient de vous rappeler quand même la base du problème: sans cette loi, c'est l'administration qui traite ces actes de défaut de bien !

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Maintenant que la parole n'est plus demandée, nous allons nous prononcer sur la prise en considération de ce projet de loi.

Mis aux voix, le projet de loi 10570 est adopté en premier débat par 85 oui (unanimité des votants).

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles 70, al. 1, lettre b (nouvelle teneur) à 71B (nouveau).

Le président. Nous sommes saisis d'un amendement du MCG à l'article 71C. Je passe la parole à M. Stauffer.

M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous demandons de remettre ce que le Conseil d'Etat a proposé initialement, c'est-à-dire une limite à 100 000 F.

Vous me permettrez de réagir à quelques propos qui ont été tenus ici: on entend du député Deneys qu'il y a finalement un contrôle démocratique, que tout va bien dans le meilleur des mondes; nous entendons aussi de M. David Hiler, notre excellent conseiller d'Etat - je le souligne, et sans ironie - qu'il y a quand même une certaine prudence qui règne autour de ceci puisqu'il y a, pour les montants supérieurs à 500 000 F, les contrôles A, B, C, avant que ça arrive en commission. Mesdames et Messieurs, et Mesdames Messieurs du Conseil d'Etat, rappelez-moi donc quel contrôle démocratique il y a eu sur la Banque cantonale genevoise, en 2000, pour plomber les Genevois à plus de 2 milliards de francs ! Vous étiez les mêmes ! Les mêmes partis ici, les mêmes contrôles démocratiques ! Et vous vous êtes moqués du peuple genevois ! Vous avez autorisé, validé toutes ces demandes de crédits, qui n'avaient pas lieu d'être, pour enrichir une certaine caste à Genève au détriment de l'ensemble de la population ! Et c'est à ce titre-là que le MCG, aujourd'hui, s'oppose à ce mode de faire. Parce que «contrôle démocratique», oui, mais contrôle par le parlement et les commissions ! Et je veux voir maintenant quel est celui d'entre vous, à gauche comme à droite, qui viendra contredire ce que je viens d'affirmer ici !

C'est pour ces raisons que nous proposons cet amendement fixant la limite à 100 000 F pour le contrôle par la commission des finances. Je vous remercie de soutenir - dans un acte responsable de «contrôle démocratique», comme vous aimez bien le mettre en avant - cet amendement du MCG. Merci ! (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Il n'est nul besoin de vociférer, nous avons rajouté des haut-parleurs et l'on vous entend parfaitement. Je passe la parole à M. Jeanneret.

M. Claude Jeanneret (MCG). Merci, Monsieur le président. Eh bien oui, je crois que le cas est assez grave pour que le contrôle démocratique soit complet. Au parlement, nous sommes des élus du peuple, je pense qu'il est normal qu'on ait un contrôle assez détaillé. Et ce n'est pas parce que ce n'est - pour M. Weiss - «que»18 millions, que ce n'est pas important. Non, pas du tout ! Il est très important que nous ayons un contrôle sur l'ensemble de cette débâcle. Parce que c'en est une. Je rappellerai à M. Deneys que la présidente de la Banque cantonale, à l'époque, était de son parti et qu'elle a même prétexté qu'elle ne connaissait pas très bien la comptabilité pour expliquer avoir signé des bilans qui n'étaient pas bons. Alors, s'il y a des gens qui vont véritablement combattre les excès de certaines banques, c'est le MCG. Mais on peut dire en tout cas que le parti socialiste n'a pas été dans le coup: au contraire, il a soutenu la débâcle ! Merci, Monsieur Deneys ! Merci, Monsieur le président. Nous nous opposerons donc... Nous maintenons cette proposition d'amendement... (Commentaires.) ...que nous souhaitons que tout le monde, démocratiquement, vote avec nous. (Commentaires.)

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est au rapporteur de majorité, M. Gautier.

M. Renaud Gautier (L), rapporteur de majorité. Monsieur le président, bien évidemment, si l'on demande de contredire mon éminent vis-à-vis, je ne peux pas me retenir. S'agissant de déterminer si la limite - ou le curseur - doit être posée à un chiffre ou un autre, somme toute s'est posée la question de savoir quelle confiance ou quelles compétences peuvent être accordées à l'administration. Alors on peut - comme mon éminent vis-à-vis - décider que, dans l'administration, tout se pourrit, etc., et qu'il faudrait tout faire au niveau parlementaire. Je me pose juste la question de savoir si vingt-quatre heures par jour vont suffire !

On peut, au contraire, se dire que, dans le fond, ce sont les décisions importantes - celles qui consistent à savoir comment réaliser une créance dépassant un certain montant qui devrait être fixé - donc, des décisions importantes qui devraient faire l'objet d'une discussion et d'un contrôle démocratique - ça me fait toujours rire lorsque certains utilisent ce mot-là quand ça les arrange et pas dans d'autres circonstances. En l'occurrence, la commission, dans sa grande majorité, a décidé qu'en plaçant le curseur à 500 000 F il n'y avait aucun déni démocratique de quelque ordre que ce soit. Au contraire, dans la mesure où la majorité avait demandé ce qu'on a appelé un «bilan d'entrée» par rapport à la somme des créances - qui ne sont pas seulement celles de la Banque cantonale - on souhaitait pouvoir discuter, au niveau de la commission des finances, les montants des créances au-dessus de 500 000 F. Je vous engage donc à refuser cet amendement et à vous en tenir au texte du projet de loi.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. La parole n'étant plus demandée, je vais faire voter l'amendement du MCG, lequel figure dans le rapport de minorité. Il s'agit de remplacer...

M. Eric Stauffer. Je demande le vote nominal !

Le président. Etes-vous soutenu ? (Remarque de M. Eric Stauffer.) Modérément... (Exclamations. Commentaires.) ...mais vous l'êtes. (Appuyé.) Il s'agit donc de remplacer, à la lettre b) de l'article 71C (nouveau), le montant de 500 000 F par 100 000 F: «Les abandons de créances sont du ressort du Conseil d'Etat. Au-delà de 100 000 F, ils sont au surplus soumis à l'approbation de la commission des finances du Grand Conseil.»

Mis aux voix à l'appel nominal, cet amendement est rejeté par 71 non contre 14 oui.

Appel nominal

Mis aux voix, l'article 71C (nouveau) est adopté par 71 oui contre 14 non.

Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté, de même que l'article 2 (souligné).

Troisième débat

Le président. Le troisième débat est demandé. (Remarque de M. François Longchamp.) Oui, très bien ! Je passe la parole à M. Stauffer pour le troisième débat.

M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. J'interviendrai de manière très brève. La population prendra acte du contrôle démocratique et du niveau auquel ce parlement veut le fixer. Aujourd'hui - et je rejoins le conseiller d'Etat David Hiler sur ce point - il y a une absence totale de contrôle, donc mieux vaut 500 000 F que rien. Nous soutiendrons ainsi la démarche sans la contrer. C'est-à-dire que nous nous abstiendrons sur le vote final, je tenais simplement à le dire. Mais, encore une fois... (Remarque de M. Renaud Gautier.) Monsieur Gautier, vous pouvez rigoler et faire de l'humour, mais quand on parle de 2,2 milliards... Peut-être que pour vous, éminent libéral, ce n'est rien ! J'ai cru savoir que vous avez un peu pédalé pour trouver quelques fonds, de manière très positive, pour un musée genevois, et je vous en félicite... (Commentaires.) Mais 2,2 milliards, c'est quand même beaucoup, beaucoup d'argent !

Donc, c'était simplement pour cette prise de... (Commentaires. M. Renaud Gautier tend un billet de banque à M. Eric Stauffer.) Voilà... (Commentaires.) ...100 millions?! Il me tend 100... trillions ! De quelle république bananière s'agit-il, pouvez-vous nous le spécifier, Monsieur le député ? (Rires. Exclamations.) Peut-être faudrait-il en imprimer pour Genève ! (Exclamations.) Car Genève a vraiment besoin... (Exclamations. Protestations) ... Mesdames et Messieurs, d'imprimer... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...des billets de 100 trillions... (Brouhaha.)

Le président. S'il vous plaît !

M. Eric Stauffer. ...puisque nous allons bientôt rejoindre, avec un diplôme, le statut de république bananière. J'en ai terminé, Monsieur le président.

Le président. Monsieur le rapporteur, merci. (Remarque.) Monsieur Jeanneret, tenez-vous à intervenir ou s'agit-il d'une erreur ? (Remarque.) Nous passons donc au vote.

La loi 10570 est adoptée article par article en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 10570 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 71 oui et 15 abstentions. (Exclamations à l'annonce du résultat.)

Loi 10570

Le président. Nous passons au point 130 de notre ordre du jour.