République et canton de Genève

Grand Conseil

La séance est ouverte à 8h, sous la présidence de M. Guy Mettan, président.

Assistent à la séance: Mme et MM. François Longchamp, président du Conseil d'Etat, Mark Muller, Pierre-François Unger, Charles Beer, David Hiler et Isabel Rochat, conseillers d'Etat.

Exhortation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme Michèle Künzler, conseillère d'Etat, ainsi que Mmes et MM. David Amsler, Christophe Aumeunier, Guillaume Barazzone, Mathilde Captyn, René Desbaillets, Jean-Louis Fazio, Michel Forni, Sophie Forster Carbonnier, Morgane Gauthier, François Gillet, Eric Leyvraz, Philippe Morel, Jean Romain, Ivan Slatkine, Eric Stauffer et Daniel Zaugg, députés.

Annonces et dépôts

Néant.

PL 10540-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat établissant le budget administratif de l'Etat de Genève pour l'exercice 2010 (LBu-2010) (D 3 70)

Premier débat

Le président. Le rapporteur de minorité, M. Eric Stauffer, est remplacé par M. Claude Jeanneret. Avant de vous donner la parole, Messieurs les rapporteurs, nous allons donner lecture du courrier 2853, comme il a été décidé hier. Je passe la parole à M. Selleger, secrétaire du Bureau du Grand Conseil.

Courrier 2853

Le président. Merci, Monsieur le secrétaire. Pour le bon déroulement des travaux, je vous rappelle que vous avez reçu une petite feuille donnant toutes les indications. Nous sommes au premier débat, je rappelle que c'est au maximum cinq minutes de parole par groupe; je la passe tout de suite au rapporteur de majorité, M. Jeannerat.

M. Jacques Jeannerat (R), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Le budget 2010 de l'Etat de Genève prévoit un déficit d'environ 350 millions, il a été adopté par une large majorité de la commission des finances. Mais ça n'est pas un budget de passion, c'est au contraire un budget de raison. Voici deux motifs d'avoir un déficit d'une ampleur aussi importante: d'abord, la crise économique que nous connaissons depuis une quinzaine de mois et, ensuite, l'adoption, en septembre dernier, de la LIPP, soit la baisse de l'impôt sur les personnes physiques. Il s'agissait, à la fois pour le gouvernement et pour la majorité de la commission des finances, d'atténuer cette baisse d'impôts sur au moins deux exercices, et non pas directement sur l'exercice suivant l'adoption de cette modification de la fiscalité par le peuple. Au fond, ce budget - si je puis m'exprimer ainsi - a des circonstances atténuantes.

En ce qui concerne la diminution de la fiscalité, il s'agit simplement de rendre aux Genevois ce que l'Etat leur a trop pris ces dernières années. En effet, depuis trois ou quatre ans, les comptes ont présenté chaque fois des bénéfices très importants, le curseur était donc réglé trop haut. Je crois qu'en ce début de législature il faut donner un signal fort et je constate que seuls les partis gouvernementaux ont voté ce budget en commission des finances; donc ils assument, eux, leurs responsabilités.

Je souhaite relever deux caractéristiques de ce budget. Il y a d'abord une augmentation assez importante du nombre de postes, près de 240, dans deux secteurs différents qui répondent à des besoins bien spécifiques: le domaine de la sécurité et, également, celui de l'enseignement. La deuxième caractéristique, c'est le record en matière d'investissements, qui progressent d'environ 30% par rapport au budget de l'année précédente. Ce niveau record montre l'accent mis sur la mobilité, avec les trams, le CEVA, mais aussi la traversée de Vésenaz. On respecte ainsi la volonté populaire exprimée par la votation de novembre dernier. Et puis, le deuxième volet de ce budget d'investissement, c'est les domaines de la santé et du social avec, d'une part, la construction de bâtiments hospitaliers et, d'autre part, de nouveaux EMS. Ces investissements sont certes bons pour l'emploi, ils pourraient avoir une connotation anticyclique, mais ils vont plus loin que cela: ils répondent vraiment à des besoins réels, ils sont là pour combler de vraies attentes des Genevois et des entreprises de ce canton.

J'aimerais, pour terminer cette première intervention, saluer la manière prudente dont ont été calculées les recettes fiscales. On pourrait parler d'un scénario conservateur, on pourrait même avoir des surprises, dans un an, avec des recettes qui seront probablement supérieures à celles qui ont été calculées; j'en prends pour preuve qu'entre la version initiale du budget, que nous avons reçue au tout début du mois de septembre, et la réactualisation des estimations fiscales, on est déjà à +40 millions. On sent quelques frémissements positifs par rapport à une crise économique qui semble voir sa fin bientôt arriver - enfin, on l'espère. Il pourrait donc y avoir des surprises, et on pourrait se retrouver avec des comptes 2010 qui seraient nettement moins déficitaires que ce budget. On peut éventuellement regretter que le département de M. Hiler ait été aussi prudent que cela, mais enfin, je crois qu'il y a quand même suffisamment d'incertitudes pour avoir, malgré tout, un esprit conservateur. Voilà ce que je voulais dire pour cette première intervention, Monsieur le président.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Je passe à présent la parole à M. Jeanneret.

M. Claude Jeanneret (MCG), rapporteur de minorité ad interim. Merci, Monsieur le président... (Commentaires.) Oui, c'est une grande famille... Le budget qui nous est présenté, du point de vue financier, est extrêmement sain malgré un déficit de 350 millions. Il ne faut pas oublier que nous avons, au niveau de la loi, une protection contre le surendettement: c'est la réserve conjoncturelle au-delà de laquelle on ne peut pas s'endetter. Je ne crois pas qu'on a trop prélevé d'argent sur les citoyens ces dernières années, il y a simplement une nécessité d'avoir une bonne gestion pour rembourser une dette excessive - ce qui a été fait progressivement, on a aujourd'hui une meilleure gestion des liquidités. L'Etat ne va donc pas être mis en danger par un budget déficitaire, et ce dernier ne provient pas d'un excédent brutal de dépenses - elles n'augmentent pas massivement et sont bien contrôlées dans l'ensemble. Simplement, ce budget a été élaboré de manière très prudente dans le calcul des recettes, compte tenu de la conjoncture incertaine que nous vivons en ce moment.

J'aimerais quand même revenir sur le fond du budget, parce que c'est facile de ne parler que de chiffres: je crois que ce parlement a un peu trop limité son action au contrôle des chiffres, au détriment du contrôle de ce que représente un budget. Qu'est-ce qu'un budget ? C'est des moyens pour agir. Si l'on donne des moyens pour agir, c'est qu'on désire qu'il y ait une action. Celle-ci doit être claire, mais très précise et conforme à la loi. Et surtout, respectueuse du droit et des citoyens.

Ce qui gêne le MCG dans les budgets que l'on nous présente maintenant, ce n'est pas la question de l'équilibre financier, parce que du point de vue de la gestion financière nous sommes très bons. Il faut dire que - et je le répète - ce ne sont pas les 350 millions de déficit annoncés au budget - enfin, d'excédents de dépenses - qui sont dangereux, parce qu'à mon avis on aura des recettes bien supérieures, les résultats seront vraisemblablement meilleurs, mais c'est avant tout dans la manière de présenter le budget et, surtout, de donner l'autorisation d'agir que le MCG a été quelque peu freiné dans son enthousiasme initial.

Je vais relever ici les éléments qui parlent en défaveur de l'acceptation du budget, dans le sens de «l'acceptation de l'action» - je le dis bien - que l'on donne si l'on accepte la dépense. Il y a d'abord ce que l'on a expliqué hier soir: l'illégalité dans la gestion des SIG. J'en parlerai plus tard aujourd'hui, il y a beaucoup de choses qui sont inacceptables vis-à-vis du consommateur et citoyen de Genève. La deuxième chose qui est très grave, et beaucoup plus que les 10 millions qui seront acceptés ou refusés pour la Fondation des parkings, il s'agit d'une délégation de tâches de sécurité à une entreprise privée. Ces tâches, lorsqu'elles sont assumées par la police, ne peuvent être exécutées que par des citoyens résidents genevois ou, du moins, suisses. Et par cette astuce on délègue la punition du citoyen genevois, disons, «véhiculé» par la Fondation des parkings, qui engage, sans avoir d'autorisation ni de demande budgétaire préalable, plus de cinquante nouveaux contractuels dont plus de la moitié sont des frontaliers. Il s'agit là d'une action qui constitue véritablement, à notre sens, un détournement de la loi. Parce qu'on en arrive à engager des frontaliers pour punir les Genevois, ce qui n'est pas du tout dans l'esprit que l'on souhaite du respect de la loi.

Dans le même état d'esprit, il y a les EMS - on avait décidé d'une aide supplémentaire pour ce secteur d'activité de notre République - et l'on voit qu'on les a de nouveau oubliés. Il reste encore plusieurs cas qui seront évoqués aujourd'hui, mais je parlerai principalement de l'Université, pour laquelle on nous a présenté, l'année passée, une augmentation exceptionnelle de budget de 4 300 000 F, parce qu'il y avait momentanément une diminution du nombre d'étudiants, parce qu'il y avait des événements exceptionnels cette année-là... Eh oui ! Et puis, maintenant, on la pérennise sur quatre ans, cette augmentation ! C'est un exemple de mauvaise gestion, d'une gestion qui n'est pas vraiment contrôlée, d'autant moins que - il faut bien le dire, et nous le répéterons encore plusieurs fois - le budget et les comptes de l'Université sont audités, ou surveillés, au niveau de la commission des finances, par quelqu'un qui est payé par l'Université et dont l'épouse travaille dans cette institution. Je crois que, là, nous donnons un très mauvais exemple de ce que devrait être l'honneur...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.

M. Claude Jeanneret. ...l'honnêteté et la fierté d'être parlementaire.

M. Frédéric Hohl (R). Mesdames et Messieurs les députés, avec un déficit de 350 millions, le parti radical devrait normalement refuser un tel budget. Mais il y a des circonstances atténuantes, le rapporteur de majorité nous l'a expliqué dans son excellent rapport - et d'ailleurs, on le remercie.

Les radicaux saluent la création de postes dans le secteur de la sécurité, ainsi que le travail du gouvernement sur la grille de salaires de la police et des agents de détention notamment. Les radicaux ont toujours soutenu et soutiendront toujours les agents de «notre» sécurité, on l'a prouvé par de nombreuses motions, par des projets de lois et par des conférences de presse que nous avons organisées. Les radicaux saluent la création de postes dans l'enseignement postobligatoire: c'est l'avenir de Genève et de sa place économique qui est en jeu, principalement par la formation.

En dehors des deux axes de la sécurité et de la formation, il est à souligner le maintien d'un filet social de très haute qualité, l'un des meilleurs de Suisse. Probablement, l'un des très bons et l'un des - très, très, très, très - meilleurs au niveau européen et peut-être mondial.

Mesdames et Messieurs les députés, pour le groupe radical, nous pensons qu'il est nécessaire de faire attention et de ne pas en rajouter de manière à augmenter - vous l'avez compris - la dette de l'Etat ! La récente modification de la loi permet l'adoption de ce budget déficitaire en puisant dans la réserve conjoncturelle. Mais cette manoeuvre, Mesdames et Messieurs les députés, doit rester exceptionnelle. Pour les radicaux, la maîtrise de la dette reste un objectif essentiel.

Alors, nous vous rendons attentifs au fait que les radicaux seront plus exigeants l'année prochaine pour le budget 2011, notamment en ce qui concerne le nombre global des collaborateurs de l'Etat. Au vu de ces analyses, au vu du travail de commission, le groupe radical va accepter le budget, et nous offrons toute notre confiance au nouveau gouvernement - que nous saluons, Mesdames les conseillères d'Etat, Messieurs les conseillers d'Etat ! Enfin, nous vous encourageons, Mesdames et Messieurs les députés, à accepter ce budget. Je vous remercie.

M. Christian Bavarel (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, qu'est-ce qu'un budget ? Un budget, c'est donner les moyens de réaliser une politique. Ce budget est pris dans une période de difficultés économiques pour notre canton, et il est anticyclique - heureusement ! Les Verts saluent l'importance des investissements prévus par ce budget. C'est un budget, aussi, où la sécurité est prioritaire, avec 20 postes créés à la police, 53 dans les prisons, 52 pour la justice. Mais c'est aussi un budget qui prévoit 21 postes de plus pour l'enseignement spécialisé et 50 pour le postobligatoire.

Les priorités des Verts sont assez claires, et nous entendons bien les soutenir. Ce budget arrive à un moment de changement, de changement de périmètre des départements, de changement de majorité au gouvernement, de changement de législature.

Les priorités des Verts, bien évidemment, vous les connaissez s'agissant des transports publics: nous restons attachés à la volonté populaire du libre choix du mode de transport, en disant que nous aurons atteint ce libre choix le jour où nous aurons un tiers de mobilité individuelle motorisée, un tiers de transports publics et un tiers de mobilité douce. Nous en sommes loin ! Nous en sommes très loin ! Les Verts souhaitent une nette augmentation de la mobilité douce: nous espérons avoir des pénétrantes cyclistes et des pénétrantes piétonnes dans ce canton. Monsieur le conseiller d'Etat Mark Muller, il y a du travail en termes d'infrastructures pour la mobilité douce.

Nous sommes aussi tout à fait ravis d'avoir vu, avec le débat sur le tunnel de Vésenaz, que la voiture est devenue une nuisance pour l'ensemble de nos concitoyens, que tout le monde le reconnaît, qu'à certains endroits, sur la rive gauche, on essaie de mettre ces véhicules sous terre pour protéger 500 habitants. Mais je rappelle simplement qu'à Châtelaine ou qu'à l'avenue de l'Ain ce sont plus de 20 000 habitants qui se trouvent au-delà des normes acceptables de bruit. Là, je pense que la conseillère d'Etat aujourd'hui en charge de la lutte contre le bruit et la pollution de l'air a un énorme travail à faire, et nous la soutiendrons dans cette action.

La sécurité, je rappelle simplement que, pour les Verts, c'est la Déclaration universelle des droits de l'Homme. Son article 3 traite de cela. Les Verts sont extrêmement attachés au fait que notre peuple et nos concitoyens puissent vivre dans un monde où la sécurité est accrue.

Les économies d'énergie nous semblaient être aussi un domaine extrêmement important. Je vous rappelle qu'avant de chauffer une maison il faudrait peut-être commencer par fermer la porte et la fenêtre. Ces choses semblent être des évidences, néanmoins il y a de grosses priorités en termes d'économies d'énergie: avant de vouloir créer, produire de nouvelles énergies, il faut penser à économiser ! Et il y a des savoirs que nous sommes en train de perdre ou de ne pas acquérir - d'autres pays sont beaucoup plus dynamiques que nous - en matière de création d'énergies douces, bien évidemment, mais aussi en termes de compétences, pour des ingénieurs et pour des gens qui travaillent dans les métiers du bâtiment, quant au travail sur les différentes isolations. Nous pensons que notre canton est très clairement en retard. Nous saluons la volonté d'investissement du gouvernement dans ce sens-là, mais nous avons vraiment beaucoup de retard à rattraper.

La qualité de l'air dans notre canton reste une préoccupation pour les Verts. Nombre d'enfants sont atteints d'asthme, de bronchiolite. Il y a réellement des cas dramatiques - nous en connaissons tous autour de nous - de jeunes enfants régulièrement hospitalisés. Allons-nous continuer à vivre avec une qualité de l'air ne respectant pas les normes fédérales ? Jusqu'à présent, il y avait une période transitoire, nous pouvions déroger à ces normes; aujourd'hui c'est terminé, et il va falloir les respecter ! Je rappelle que c'est simplement la santé des plus faibles qui est en cause ici, une attention particulière doit donc être portée à cela.

Concernant la nature, 2010, c'est l'année de la biodiversité. Nous sommes en train de vivre la quatrième plus grande extinction d'espèces de l'histoire de notre planète, et nous devons nous en soucier particulièrement. Effectivement, nous avons vu des actions quelque peu désordonnées - nous aurons le temps aujourd'hui, je suppose, de parler des gardes-faunes, mais aussi de l'ensemble des problématiques qui tournent autour de la diversité biologique. C'est un petit poste budgétaire - nous en sommes tout à fait conscients - néanmoins c'est d'une importance majeure pour notre environnement et pour la qualité de vie des êtres humains. Les Verts seront spécialement attentifs à cela.

Nous rappelons que bien évidemment, toujours dans ce budget, se trouve la volonté de pouvoir aider en même temps, par le biais de la baisse d'impôts, les familles monoparentales et l'ensemble des familles de la classe moyenne. Je rappelle qu'il y a pour chacun deux solutions: si vous avez un loyer de 2000 F, soit votre employeur vous fait une augmentation de salaire de 500 F, et vous allez vivre mieux, soit on baisse votre loyer...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.

M. Christian Bavarel. ...à 1500 F, ce qui est une autre manière de disposer d'argent. Monsieur le président, j'arrive immédiatement à la fin de mon intervention. (Commentaires.)

En termes d'économie pour notre région, nous voulons être ouverts. Je vous rappelle que nous avons fait tomber les murailles de ce canton au moment où les moyens militaires avaient changé ! Vous pouvez toujours essayer de faire des fortifications... (Commentaires.) C'est vous... Oui, Messieurs les radicaux, je vous laisse très volontiers la paternité de ces choses-là, d'autant plus que les Verts n'existaient pas à l'époque ! Il ne sert à rien aujourd'hui de vouloir remettre des murailles alors que nous connaissons les forces aériennes: vous ne seriez ainsi pas protégés ! De même, il ne sert à rien de vouloir faire une Genève qui ressemblerait à celle des années 20...

Le président. Voilà, il vous faut vraiment conclure, Monsieur Bavarel !

M. Christian Bavarel. ...et qui ne tiendrait pas compte de la région et des frontaliers. Nous avons besoin de tous pour pouvoir vivre ensemble dans cette région, c'est ainsi que nous nous protégerons le mieux au niveau économique ! (Applaudissements.)

Mme Anne-Marie von Arx-Vernon (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, pour les démocrates-chrétiens, ce budget n'est pas tout à fait comme les autres, mais, aussi, il s'inscrit dans une période qui n'est pas tout à fait comme les autres. Ce budget anticyclique a été voté en commission par les partis gouvernementaux et a pour but de relancer l'économie genevoise. Surtout, il vise à respecter l'engagement pris auprès de la population et qui tient particulièrement à coeur aux démocrates-chrétiens, c'est-à-dire alléger la charge fiscale des familles et maintenir le pouvoir d'achat des catégories modestes de notre société, notamment les travailleurs pauvres, les jeunes familles, les familles monoparentales et les personnes âgées. Enfin, nous tenons absolument à garantir les investissements qui sont chiffrés à plus de 900 millions, ce qui est un véritable gilet pare-balles contre les attaques du chômage.

Alors oui, il y a un déficit de 335 millions, Monsieur le président, or toutes les rentrées fiscales ne sont pas encore enregistrées, et l'on peut espérer que ce déficit sera plus modeste. Néanmoins, déficit il y a, et le parti démocrate-chrétien l'assume. Pourquoi ? Parce que la priorité doit être donnée aux investissements qui sont très importants dans des domaines auxquels nous sommes fort attachés: le social, la santé - notamment par les EMS et les bâtiments hospitaliers - les transports, l'environnement - notamment avec les trams et le CEVA, plébiscités par le peuple - et tout ce qui peut développer la région. «Pourquoi encore ?», me direz-vous, Monsieur le président: eh bien, parce que la relance économique dépend des investissements, ce processus concret de garantie de l'emploi en temps de crise. Mais pourquoi encore ? Eh bien, ce déficit est acceptable, parce que la réserve conjoncturelle qui est constituée est justement destinée à compenser ce genre de risques de déficit budgétaire. Or, la réserve de 744 millions, elle n'est pas faite pour les chiens, Monsieur le président !

Alors oui, nous partons du principe que ce déficit est acceptable. C'est comme si, pour ce budget 2010, l'Etat de Genève avait fusionné un peu de la fourmi et un peu de la cigale pour créer l'insecte le plus résistant à la crise. On peut penser «cigale» en acceptant de financer des investissements indispensables à long terme, à très long terme - nous sommes là pour ça, même si la dette doit en être garante. Mais surtout, on peut penser «fourmi», parce qu'en donnant la priorité à la rigueur, dans la gestion du service public notamment, nous maintenons notre exigence d'offrir à la population les meilleures prestations auxquelles elle a droit.

Le parti démocrate-chrétien tient à donner un budget au Conseil d'Etat, qui l'a appelé de ses voeux, qui a été élu, et nous lui faisons confiance pour mener à bien ce grand défi que Genève devra assumer. Alors oui, le parti démocrate-chrétien votera ce budget. Je vous remercie.

Mme Anne Emery-Torracinta (S). Mesdames et Messieurs les députés, les socialistes saluent un certain nombre de points positifs dans ce budget 2010: tout d'abord - et cela a été dit par certains d'entre vous - c'est un budget de relance. Je crois que c'est important de le souligner parce qu'on ne refait pas les erreurs des années 90 durant lesquelles, en période de crise économique, on avait été frileux en termes d'investissements. Et là, au contraire, ne pas refaire les erreurs du passé, c'est un excellent signe.

Le deuxième point positif, pour les socialistes, c'est le respect des mécanismes salariaux et le respect par le Conseil d'Etat des engagements pris vis-à-vis de la fonction publique. Mais à ce propos, il y a une différence entre le projet de budget, qui avait été présenté et discuté en commission des finances, et puis la réalité du terrain, puisque le Conseil d'Etat, dans les amendements qu'il nous soumet aujourd'hui, propose une indexation salariale de 0,3%. Et, en tant que socialistes, nous serons extrêmement attentifs à ce que cette indexation soit appliquée; sinon, ça pourrait éventuellement être pour nous une raison de refuser le budget.

Troisième point: nous nous félicitons de la création de 238 postes - on la dit - dans des secteurs clés: la justice, la police, la sécurité en général, les prisons, mais aussi l'enseignement postobligatoire et l'enseignement spécialisé.

Nous mettons néanmoins, Mesdames et Messieurs les députés, quelques bémols. Le premier d'entre eux, c'est qu'il nous est dit, dans l'exposé des motifs du Conseil d'Etat: «Au niveau du "petit Etat", l'augmentation des effectifs se monte à 1,4%, un chiffre proche du taux de croissance de la population.» Soit ! Mais nous constatons à l'usage, quand on regarde les choses sur le terrain, qu'apparemment il y a quand même une certaine frilosité du Conseil d'Etat dans l'allocation des postes proposés au Grand Conseil. Voici quelques exemples: vous savez que nous avons, les socialistes, beaucoup défendu la question des EMS et celle des postes qualifiés attribués à ces établissements - et nous le ferons encore tout à l'heure par un amendement. On sait, là encore, que l'application de l'IN 125 n'est pas prévue dans ce budget.

Le deuxième exemple concerne l'Hospice général: on est en période de chômage qui augmente - il est passé à 7,2% à Genève - on sait qu'on aura de plus en plus de dossiers à traiter à l'Hospice; eh bien, le Conseil d'Etat n'a pas suivi les recommandations du Conseil d'administration de l'Hospice général et a amputé de 25 millions les propositions de budget de cette institution. Est-ce très raisonnable, à un moment où l'on sait que l'Hospice va être mis sous pression par l'augmentation des demandes et du nombre de dossiers ?

Troisième exemple: si je me suis réjouie tout à l'heure de l'augmentation des postes d'enseignants dans le postobligatoire, j'aimerais vous dire, Mesdames et Messieurs les députés, qu'on assiste depuis des années à une baisse continue des budgets dans ce domaine. Par exemple, l'été dernier, les directions d'écoles ont été averties d'une baisse linéaire de 3,34% dans leur budget, sans aucun lien avec la réalité de ce qui se passait. Et ce qui m'inquiète, là, ce n'est pas tellement ce que le Conseil d'Etat propose - parce que ce qu'il présente, il le sait bien, c'est en fonction de ce que le parlement va probablement pouvoir accepter - mais j'ai du mal à comprendre - et je m'adresse ici essentiellement à l'Entente et à l'UDC - pourquoi vous considérez toujours les postes à l'Etat comme des coûts ! En effet, quand une entreprise privée crée des postes, des emplois, vous vous réjouissez en disant: «C'est bon pour l'économie genevoise !» Mais quand c'est l'Etat qui donne du travail à des résidents et qui évite ainsi que ces personnes soient à la charge de la société d'une manière ou d'une autre, vous nous dites: «Ce sont des coûts qu'il faut diminuer.» J'ai du mal, je dois dire, à voir la cohérence dans vos raisonnements à ce niveau-là.

Et j'aimerais, encore à ce propos, vous rendre attentifs à ce qui se passe: il y a un certain ras-le-bol dans la fonction publique. Vous avez peut-être vu hier qu'il y a eu coup sur coup deux manifestations: dans le secteur subventionné et dans la fonction publique. Je crains fort que la législature qui s'entame aujourd'hui soit celle d'un ras-le-bol montant de la fonction publique, ce qui pourrait nous amener à retrouver les grèves et les difficultés qu'on a connues il y a un certain nombre d'années. Cela serait fort dommage après le travail de qualité qu'a fait le Conseil d'Etat au niveau des accords dans ce domaine lors de la dernière législature.

Enfin, je dois vous dire que le groupe socialiste écoute avec une certaine malice les remarques qui sont faites aujourd'hui sur le déficit. On dit: «Il y a des circonstances atténuantes, il y a la baisse d'impôts.» Je soulignerai, toujours avec une certaine malice, qu'on aurait pu en décider autrement en n'acceptant pas cette baisse d'impôts, d'abord dans ce parlement. En conclusion, Mesdames et Messieurs les députés, pour les socialistes, ça n'est pas un budget enthousiasmant, mais c'est un budget qu'on peut raisonnablement accepter.

M. Pierre Weiss (L). Mesdames et Messieurs les députés, ce budget - qui est devenu légal alors qu'il ne l'était pas au moment de son dépôt - est un budget sur lequel, effectivement, nous pouvons entrer en matière, tout en relevant deux choses: il s'agit d'un budget insatisfaisant, il s'agit d'un budget nécessaire. Je vais d'abord vous expliquer pourquoi il est insatisfaisant et, après, en conclusion, pourquoi il est néanmoins nécessaire.

Il est insatisfaisant parce qu'il n'exprime, d'une part, pas de priorité et, d'autre part, parce qu'il se départit de la doctrine qui avait prévalu pendant quatre ans: celle du ninisme. Il n'exprime pas de priorité: 238 nouveaux postes sont créés - auxquels s'ajoutent d'ailleurs une vingtaine de policiers, nécessaires pour la sécurité dans notre canton - et en même temps, contrairement à ce qui s'était passé dans les quatre années précédentes, il n'y a pas de réflexion sur les missions superflues de l'Etat ! Nous y reviendrons dans certains cas, notamment dans les services qui pourraient mieux faire et qui n'ont pas mieux fait, même s'ils sont richement dotés - quels que soient, d'ailleurs, les détenteurs des portefeuilles, en l'occurrence, il ne s'agissait pas d'un portefeuille de l'Entente. C'est donc un budget auquel il manque des priorités en ce qui concerne le fonctionnement.

Mais il y a quand même une raison de satisfaction en ce qui concerne les investissements - satisfaction minimale, je dirais ici, puisque, depuis le début de la législature passée, les investissements ont pour ainsi dire triplé: 700 à 900 millions, un montant minimal ! Sur lequel nous devons entendre pour faire face aux défis qui attendent Genève ! Certains d'entre eux ont été rappelés ici en matière d'infrastructure: le CEVA, la traversée routière du lac - que nous devrons bien financer dans le futur, en tout cas en partie, on verra ce que sera le concours fédéral - mais aussi d'autres constructions nécessaires en matière de formation ou de soins à la population. Voilà des éléments que nous devrons aborder, sur lesquels nous devrons nous mettre d'accord et non pas nous affronter, et qui vont faire gonfler le budget des investissements.

Vous pourriez me répliquer qu'il y a, bien entendu, une augmentation de la dette; certes, mais il y a la bonne et la mauvaise dette - c'est un peu comme le cholestérol. Et la mauvaise dette, ce serait celle qui servirait à combler des manques de moyens pour le fonctionnement même de l'Etat; la bonne, c'est celle qui sert à permettre à Genève, en termes d'infrastructures, de tenir son rang par rapport aux autres cantons suisses qui, eux, investissent à des hauteurs plus importantes, et dont les habitants, à coûts plus faibles, trouvent des satisfactions plus grandes que les Genevois. Il s'agira là d'avoir, au fil de la législature, de nouveaux accents, nous les attendrons dans la lignée de cette augmentation d'investissements de cette année.

C'est un budget qui est aussi insatisfaisant du côté, cette-fois-ci, pas des dépenses, mais des recettes. Elles ont été - on l'a vu ces dernières années - sous-estimées, cela pour différentes raisons, tenant parfois au modèle économétrique choisi, parfois aux experts approchés, parfois aussi, peut-être, à une prudence politique excessive. Maintenant que la conjoncture s'est retournée, il s'agira de voir si les recettes ont été estimées correctement. Personnellement, j'ai un certain nombre de craintes de sous-estimation.

Ce budget n'est pas non plus justifié dans une des motivations de son augmentation, à savoir le mettre en phase avec la croissance de la population, laquelle devrait se traduire ainsi: 1% de population en plus, 1% de budget en plus. Non, ce n'est pas une bonne raison ! C'est une raison paresseuse d'augmenter le budget. Quand la population croît de 1%, le budget ne doit pas croître mécaniquement du même pourcentage ! Parce que cela supposerait qu'il n'y a pas d'économies possibles dans le fonctionnement de l'Etat, qu'il n'y a pas d'économies d'échelles envisageables.

Le président. Il vous reste dix secondes, Monsieur le député.

M. Pierre Weiss. Or, il peut y avoir des économies d'échelles. Et c'est précisément pour permettre de contrer un certain nombre d'insatisfactions ressenties par les libéraux dans ce budget que nous avons proposé des amendements à hauteur de 37 millions. Nous reviendrons sur ces derniers. Je regrette que le plus important d'entre eux ait été refusé, celui qui concernait la compensation des nouveaux postes. D'autres sont moins importants, nous en discuterons.

Je voudrais juste vous rendre simplement l'hommage de la vérité, Monsieur le président: en tant que commissaire responsable du département de l'instruction publique, vous n'êtes pas, que je sache, rémunéré par le DIP ni par l'Université. C'était cette précision que je voulais apporter aujourd'hui.

Le président. Merci, Monsieur le député, je confirme vos propos, pour passer maintenant la parole à M. Bertinat.

M. Eric Bertinat (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe UDC a décidé de refuser le budget 2010 tel qu'il est ressorti des travaux de la commission des finances. Il le refuse presque par principe, parce que la bonne santé des finances publiques est une exigence du programme de l'UDC et que, par conséquent, un budget déficitaire ne peut être accepté, qui plus est lorsqu'il présente une dette astronomique.

Pour l'UDC, l'Etat doit pouvoir développer une action efficace dans ces nombreux domaines prioritaires qui sont les siens, tels que la sécurité, l'aide sociale, la scolarisation et bien d'autres encore, qui permettent à tous nos compatriotes ainsi qu'à tous ceux qui résident légalement à Genève de mener une vie décente dans notre canton. Ce souci est sans doute partagé par chacun d'entre vous, mais, pour assurer tant que faire se peut la pérennité des engagements de l'Etat, une certaine austérité est nécessaire vis-à-vis de nos finances. Cet exercice semble irréalisable à Genève, habituée qu'elle est à vivre dans un confort financier invraisemblable. Malgré une crise économique qui pénalise durement les économies publiques et privées de nos voisins européens, notre canton se permet de continuer sur un train de vie de milliardaire: de 7,6 milliards de francs pour être précis. Des charges que les revenus ne couvrent pas à hauteur de 335 millions de francs !

Les résultats fiscaux fastes des précédents exercices ont empêché l'administration publique d'opérer une réelle remise en question de son fonctionnement. A peine l'Etat s'est-il donné la peine de contenir ses dépenses et de profiter de l'adaptation de la comptabilité aux normes IPSAS pour dégager une réserve conjoncturelle bienvenue, voilà qu'il modifie la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat, laquelle, dans sa version originale, ne permettait pas un budget avec un tel déficit. Curieux principe que celui adopté par notre parlement, lequel modifie une loi destinée à empêcher l'adoption d'un budget déficitaire dans les proportions du budget 2010, pour permettre précisément à ce même budget de rester légalement déficitaire ! C'est une manoeuvre digne du tireur qui décroche une flèche, puis dessine la cible autour de la flèche et finit par se proclamer champion ! Cette curieuse manoeuvre est d'autant plus surprenante que - de l'avis même du département des finances - l'évaluation des recettes fiscales est très prudente et les hypothèses conjoncturelles plutôt pessimistes. Un budget est forcément estimatif, mais il doit aussi coller le plus possible à la réalité.

Alors, que vaut ce budget 2010 ? Ce dont nous sommes sûrs, c'est qu'il présente une progression de 2,8% des charges de personnel - nous sommes hors de la cible annoncée en 2005. Cette augmentation est due aux mécanismes salariaux que vous avez acceptés, à la création de nouveaux postes et à la définition de la réduction «technilinéaire», qui nous fait une belle jambe. Côté salarial, le Conseil d'Etat versera l'indemnité 2010 selon les mécanismes usuels: à celle-ci s'ajoute l'annuité décalée versée au corps enseignant. En revanche, le budget ne prévoit pas d'indexation, puisque le taux d'inflation est actuellement négatif, il est de -0,8%. On a craint un moment d'égarement quand un député libéral s'est demandé si cette situation ne devait pas conduire à une réduction des salaires dans la fonction publique... Mais le regard désespérément fixe du grand blond avec les finances sur le dos a vite fait de nous rappeler aux dures réalités syndicales.

Il reste que ce budget ne nous dit rien de bon: l'engagement de 238 fonctionnaires - 52 pour le pouvoir judiciaire, 20 pour le corps de police, 53 pour le personnel des établissements pénitenciers, 21 pour l'enseignement spécialisé et 50 pour l'enseignement postobligatoire - est sans doute bienvenu et donne une première réponse aux attentes de la population pour plus de sécurité. Mais cette fameuse rigueur, qui permettait petit à petit de baisser notre dette, n'a pas été le centre des préoccupations de l'Etat: 238 fonctionnaires font 238 fonctionnaires en plus ! Et rien ne vient contrebalancer ces engagements, ils grossissent simplement les effectifs de l'Etat et participent au déficit présenté.

Deux remarques enfin: la baisse des impôts décidée par le peuple est, pour l'UDC, une bonne chose, car elle permet de garder une pression sur les dépenses de l'Etat et ne met pas en péril les finances publiques - puisque la réserve conjoncturelle, comme le CEVA, est le remède miracle à tous nos maux. Quant aux investissements extrêmement élevés, l'UDC considère qu'ils empêcheront l'Etat d'adoucir la dette et impacteront les prochains exercices comptables par les sommes consacrées à l'amortissement, à l'entretien, à l'engagement du personnel, à l'achat de matériel, etc. - même si nous admettons qu'une partie de ces investissements est nécessaire et participe à lutter contre la crise économique.

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !

M. Eric Bertinat. Merci, Monsieur le président. L'UDC acceptera donc d'entrer en matière, et nous soutiendrons certains des amendements qui nous seront proposés et qui participeront à la réduction des déficits du budget 2010.

M. David Hiler, conseiller d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, premier rappel: pendant les quatre dernières années, le Conseil d'Etat, dans une période de croissance économique forte puis exubérante, a souhaité redonner une marge de manoeuvre à l'action de l'Etat - cela s'est traduit, vous le savez, et se traduira vraisemblablement, pour ces quatre années, par un bénéfice cumulé de 2 milliards de francs et par une baisse de la dette du même niveau. Le Conseil d'Etat l'a effectivement fait en travaillant à réduire les postes dans le secteur administratif pour l'essentiel, afin de répondre à des besoins dans d'autres secteurs.

L'exercice - je suis désolé de le dire à certains orateurs - a forcément une fin. Je veux dire: ce qui a été fait ne peut pas l'être une deuxième fois. Et nous entrons aujourd'hui clairement dans une période où il n'est pas possible de financer l'intégralité des nouveaux postes par des diminutions du nombre de postes ailleurs. Au demeurant, il nous aiderait, soit dit en passant, que l'on nous indique une fois où se trouve cet ailleurs ! C'est une première chose, et je crois qu'elle est importante.

Le fait est que cette marge de manoeuvre qui a été créée, nous la possédons: elle s'exprime notamment par le fait que nous avons pu lancer, avec votre appui, une politique anticyclique. Il est évident que, sans cette marge de manoeuvre, il aurait été suicidaire de faire 900 millions de francs d'investissements, suicidaire de baisser les impôts au milieu de la crise - alors que c'est là, au fond, que cette mesure peut avoir une efficacité sur l'emploi dans le secteur local - il aurait été suicidaire, enfin, de mettre en oeuvre un certain nombre de décisions - de votre parlement, malgré tout ! Et j'en viens ainsi à ce que cela changerait, si ce budget n'était pas voté.

Vous avez travaillé, Mesdames et Messieurs, fort longuement sur la nouvelle organisation judiciaire qui nous est imposée par le droit fédéral. Il faut 50 postes pour la mener à bien, ils sont dans le budget. En cas de douzièmes, l'ensemble du processus de recrutement, qui doit être terminé et effectif au 1er janvier 2011, serait freiné.

Le plus grave concernerait évidemment la prison. Vous l'avez décidé, elle s'appelle Curabilis. Il se trouve qu'il faut trois ans pour former des gardiens et il est donc de votre responsabilité de voter ces postes pour cette prison. Et il en est, à l'extérieur de l'Etat, de même pour les EMS. Parce que ces établissements, eh bien, ils vont s'ouvrir ! Et ils exigent 200 postes. De plus, une partie de votre parlement estime qu'il en faudrait encore. Sans compter ceux-là, comprenez bien que si le parlement vote des subventions d'investissements pour des EMS, à un moment donné, il doit mettre le personnel qui va avec ! Autrement, il ne fallait pas voter les investissements ! C'est donc vous dire, en ne prenant que quelques exemples, qu'il est extrêmement important que ce budget soit soutenu par le plus grand nombre possible de députés, et à coup sûr par les partis gouvernementaux, car, en somme, il y a eu accord sur la politique générale qui mène à ce budget.

Deuxième chose: les recettes fiscales. Vous avez sans doute raison, Monsieur le rapporteur, comme d'autres, de dire que ça sera vraisemblablement un peu meilleur que ce qui figure dans le budget. Je vous mets quand même en garde contre le fait de penser que, de ce point de vue, tout va continuer comme avant. En ce qui concerne les personnes physiques, à la suite des correctifs invraisemblables sur les exercices 2006 et 2007, la méthode a été changée et appliquée pour la première fois en 2008. Or, ce que nous savons maintenant sur un peu plus de 80% des déclarations - celles pour lesquelles on a notifié le bordereau - n'indique pas qu'on aurait de telles différences.

Par ailleurs, vous devez quand même vous rendre compte que ces différences étaient en bonne partie dues à l'année 2007 et qu'elles se sont manifestées de plusieurs manières. D'abord, tous les instituts conjoncturels indiquaient une croissance de 2%, mais elle fut établie à 3,3% en fin d'année, puis à 3,7% l'année suivante; cette croissance du PIB suisse est la base de tous les calculs que peuvent faire les économètres du département. Cela ne s'était pas vu, je crois, depuis une grosse vingtaine d'années et ne se reverra en tout cas pas pendant cette législature - je crois qu'on peut être d'accord là-dessus. Alors, évidemment, cette croissance, ajoutée à une méthode trop conservatrice des économètres - c'est certain - a généré plusieurs centaines de millions qui sont venus s'ajouter en correctifs sur l'exercice 2008 et une dernière fois sur l'exercice 2009. Cela, ça n'existe plus ! Et je voudrais quand même vous dire que, pour 2009, si nous sommes jusqu'à présent, il est vrai, un peu plus haut pour les personnes physiques, au barème ordinaire, nous avons surestimé l'impôt à la source dans le budget. Globalement, nous allons nous en tirer - toujours avec les correctifs - avec un excellent résultat, mais je ne parierais pas trop sur la suite.

Et puis, il y a l'inconnue, qui ne tient pas à une méthode, c'est l'inconnue des personnes morales. Déjà, la qualité de notre échantillon s'est péjorée puisqu'elle reposait malgré tout sur le résultat de deux grandes banques suisses. Celles-ci ne sont évidemment pas contribuables sur l'exercice 2010. Sauf pour l'impôt sur le capital. Mais pour l'impôt sur le bénéfice, non. Et l'une d'entre elles, aux dernières nouvelles, ne redeviendra pas contribuable avant 2013. Par ailleurs, une bonne partie des entreprises n'ont pas répondu pour l'exercice 2010 ! A la question «Quelle sera l'évolution de votre bénéfice en 2010 ?», elles ont répondu raisonnablement par un point d'interrogation. La validité de nos hypothèses est donc questionnable.

Vraisemblablement, Mesdames et Messieurs les députés, les évaluations actuelles sur 2009, qui seront recorrigées une dernière fois en janvier, sont trop hautes, et nous devrions perdre encore 50 à 100 millions par rapport à celles-ci. Mais, vraisemblablement aussi, l'évaluation 2010 est, elle, trop faible. Comment se fera l'équilibre ? C'est la conjoncture qui le décidera. Et je crois que ceux d'entre vous qui s'intéressent beaucoup aux questions économiques savent bien que c'est l'avenir qui nous le dira. Personne n'en sait rien !

J'insiste encore sur un point: le Conseil d'Etat avait pour hypothèse que les bénéfices de 2007 ne se retrouveraient pas avant 2012. L'évolution de la conjoncture confirme cette vision - ce n'était pas une prévision, même - pourquoi ? La récession est terminée, mais la reprise est extrêmement laborieuse dans tous les secteurs ! Et par ailleurs, toute cette année, nous allons vraisemblablement détruire des emplois, ce qui n'a pas été le cas avant le troisième trimestre de l'année 2009. Donc, soyons clairs entre nous: il n'y a pas 400 millions d'assurance qui est garantie dans les estimations fiscales. Par contre, il y a une réserve conjoncturelle, dont il a été dit qu'elle n'était pas pour les chiens.

Vous allez être saisis de quelques amendements qui vont exactement dans le sens de ce budget. Certains d'entre eux sont importants - ceux concernant les 0,3% d'indexation et ceux qui matérialisent l'accord passé avec la police - et je vous remercie par avance de leur faire bon accueil.

Pour la suite, Mesdames et Messieurs, vous comprendrez bien que beaucoup de choses se jouent dans la qualité de nos relations avec l'Union européenne.

Le président. Vous êtes à huit minutes, Monsieur le conseiller d'Etat.

M. David Hiler. Je vais terminer. Il s'agit du débat avec l'Union européenne sur la fiscalité des cantons, il s'agit des tensions avec la France, l'Italie et l'Allemagne. En tout cas, vous ne pouvez pas tabler sur un immense moteur tel que celui que vous avez connu pendant dix ans, celui de la place financière. Il y aura période de consolidation et il devra y avoir aussi, vraisemblablement, période de diversification. Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Je vais donc faire voter l'entrée en matière sur ce projet de loi.

Mis aux voix, le projet de loi 10540 est adopté en premier débat par 70 oui (unanimité des votants).

Deuxième débat (livre rouge)

Le président. Avant de passer à l'examen du livre rouge, nous allons, comme il l'a été décidé hier, procéder au vote en bloc des amendements dits «techniques» proposés par le Conseil d'Etat. Je passe tout de suite la parole à M. Hiler pour qu'il nous les présente brièvement.

M. David Hiler, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, il convient d'abord de préciser une chose: il ne s'agit pas d'amendements concernant la reconfiguration des départements. Celle-ci sera simplement effectuée dans la présentation de ce budget - lorsque vous examinerez le livre rouge - puisqu'elle relève, de par la constitution, de la seule compétence du Conseil d'Etat. En revanche, un certain nombre d'erreurs ont été commises, je vous en donne un exemple: dans mon département, on a un peu oublié que la Fondation de valorisation n'existait plus, de sorte que la ligne qui devait être imputée maintenant à l'interne est restée en rubrique 35, soit «Dédommagements à des tiers». Il y a eu par ailleurs un certain nombre de décisions concernant les forfaits d'intégration, qui exigent une redistribution de revenus entre le DSE et le DSPE. Il y a encore 300 000 F qui avaient été amendés par la commission pour que l'on cesse d'envoyer chaque mois, par courrier, les relevés de salaire des fonctionnaires. En réalité, le courrier doit figurer sous la rubrique de l'administration fiscale, et il y a une modification technique sur ce point.

Ce qui caractérise ces différents amendements techniques, c'est qu'ils n'ont aucune influence sur le résultat. Il s'agit simplement d'éléments qui sont catégorisés ailleurs, de sorte que la démarche du Bureau, de vouloir les voter en bloc, est légitime. Au franc près, le budget est identique avant et après l'adoption de ces différents amendements techniques qui ne sont d'ailleurs pas extrêmement nombreux.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Je vais, Mesdames et Messieurs les députés, vous faire voter en bloc la liste de ces amendements techniques, de sorte que le département puisse ensuite les répercuter sur les rubriques correspondantes.

Mise aux voix, la liste des amendements techniques du Conseil d'Etat au projet de budget 2010 est adoptée par 72 oui (unanimité des votants).

Budget de fonctionnement

Le président. Nous passons maintenant à l'examen du livre rouge. Nous sommes à la page 99: «Récapitulation du projet de fonctionnement du Conseil d'Etat». A la rubrique 30, «Charges de personnel», nous sommes saisis de deux amendements. Je commence par le plus éloigné d'entre eux, à savoir celui du MCG: «Charges de personnel: +12 166 000 F». Cet amendement est couvert par des réductions de dépenses ailleurs dans le budget. Je passe donc la parole au MCG, en l'occurrence à M. Sauty.

M. Olivier Sauty (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, hier, à l'occasion du débat sur le budget des SIG, je vous avais invités à le refuser, parce que la politique salariale ne nous convenait pas. Je vous avais parlé des droits acquis par rapport à la rémunération, et là on parle précisément des bonus: c'est la seule entreprise publique où l'on paie encore des bonus. Alors, par égalité de traitement envers tous les autres fonctionnaires, le MCG propose que nous payions environ 800 F à chacun d'entre eux, ce qui représenterait une somme, comme indiqué ici, de 12 166 000 F. De la sorte, tous les fonctionnaires seront sur un pied d'égalité et bénéficieront du même traitement. Voilà, Mesdames et Messieurs, je vous invite à accepter cet amendement.

M. Mauro Poggia (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, notre république dispose d'une Cour des comptes; nous avons décidé qu'elle devait fonctionner et nous ne pouvons pas ignorer ses décisions ni même ses considérations. Je rappelle que la Cour des comptes a en particulier relevé que, de manière illégale, des bonus sont versés au personnel des Services industriels de Genève. Mais la Cour des comptes considère - en concluant qu'il n'est pas de sa compétence de supprimer des bonus qui ont été décidés dans le cadre de cette institution indépendante - qu'il y a des droits acquis. «Acquis», mais à qui profitent effectivement ces bonus ? On peut se le demander.

Nous avons retenu un montant moyen de 800 F par employé, mais ces bonus vont jusqu'à 30 000 F pour certains d'entre eux. Il n'est pas normal de considérer qu'au sein des Services industriels de Genève on puisse, finalement, travailler dans l'illégalité - illégalité qui devient un fait accompli, que l'on appelle pudiquement, juridiquement, un droit acquis. Cela fait que nous entérinons - et nous y reviendrons dans le cadre d'autres amendements au cours de la journée, plus précisément en faveur des Services industriels de Genève... Nous ne pouvons pas prendre acte d'une situation qui est illégale et considérer que, finalement, c'est comme ça et que nous n'avons rien à dire.

Nous sommes ici, en tant que députés, pour donner des signes clairs ! C'est vrai qu'un budget doit faire fonctionner l'Etat, faire fonctionner la machine, cette grosse machine qu'est notre société, mais nous sommes aussi là pour donner des directives, des impulsions, et nous sommes tous d'accord sur ce point. Si les Services industriels de Genève s'autorisent à accorder des bonus de 800 F en moyenne par employé, il n'y a aucune raison pour que la secrétaire de l'Etat - qui vaut bien une secrétaire des Services industriels - ne reçoive pas également ce bonus. Nous avons fait estimer par le service des finances le montant total qu'il faudrait mettre à disposition. Vous aurez constaté que nous avons prévu de quelle manière cette somme de 12 166 000 F serait trouvée dans d'autres postes du budget. Nous considérons que, par égalité de traitement entre les employés des Services industriels et les fonctionnaires et employés de l'Etat de Genève, il faut accorder ce surplus de charges, que nous vous demandons d'accepter par cet amendement. Je vous remercie.

M. Christian Bavarel (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, vous vous en doutez, les Verts refuseront cet amendement, je vais simplement m'en expliquer. Pour nous - si nous pouvons rejoindre le MCG pour dire que les bonus des Services industriels doivent être regardés de plus près, mais dans une cadre légal - ce n'est pas parce qu'un endroit dysfonctionne qu'on doit, pour l'équilibre, faire quelque chose qui dysfonctionne ailleurs. D'autant moins si la politique - et celle-là, nous refuserons de la suivre - si je grossis le trait, consiste à dire: «Supprimons les impôts et augmentons tous les fonctionnaires en nombre et en francs !» Nous essaierons simplement de rester cohérents et de nous attacher à une politique tenant compte de la réalité.

M. Eric Bertinat (UDC). La logique du MCG vient d'être expliquée par mon collègue Bavarel, je n'y reviendrai pas. Mais l'amendement diminuant la ligne 03.26.00.00 36 «Université: subventions accordées» de 4,3 millions, qui nous sera soumis, je suppose, lors de la discussion sur le département de l'instruction publique, et que l'UDC pourrait soutenir, eh bien, cet amendement ne pourra être appuyé sous cette forme.

M. Pierre Weiss (L). La question posée par le groupe MCG est une vraie question à laquelle il conviendra d'apporter une vraie réponse. Il y a la forme à distinguer du fond. S'agissant du bras de levier utilisé, à savoir les bonus distribués aux collaborateurs des SIG, je rappellerai tout d'abord que nous avons voté hier soir le budget de cette institution autonome qui dispose de son conseil d'administration, lequel organise la répartition des bénéfices de l'entreprise. On espère que la partie accordée aux clients est prioritaire, que celle consacrée aux investissements n'est pas oubliée et, évidemment, que les collaborateurs eux-mêmes reçoivent aussi - puisqu'il s'agit d'une entreprise partiellement active sur un service concurrentiel - en fonction de leur mérite, une juste rétribution de leurs efforts. C'est dire si le groupe libéral est favorable à une politique de boni !

S'agissant de l'Etat, toute augmentation des dépenses qui viendrait à accroître le déficit doit être couverte par des recettes correspondantes ou par des baisses de dépenses dans d'autres secteurs. Je n'ai pas encore compris où le groupe MCG entend diminuer les dépenses. S'agissant des recettes, elles ne peuvent être augmentées selon le bon plaisir de tel ou tel groupe, parce qu'évidemment nous pourrions tous avoir de l'imagination quant aux recettes et à l'effacement de la crise actuelle. Pour ma part, je serai extrêmement prudent - et je pense que le chef du département des finances l'est tout autant - en ne croyant pas qu'on va pouvoir augmenter du montant calculé - et qui est certainement exact - les recettes de l'Etat. S'agissant des dépenses, dans quel secteur va-t-il falloir trouver le montant correspondant ? J'attends encore des explications. Mais ça, c'est sur la forme.

Sur le fond, je crois qu'il est juste de vouloir aussi introduire un système de boni pour les collaborateurs de l'Etat. Comme pour d'autres employés qui sont dans le secteur privé, il faut y penser pour le secteur public. Et de ce point de vue-là, une réponse est donnée aujourd'hui même: à 16h45, dans le cadre de la commission ad hoc sur la fonction publique, un rendez-vous est donné à tous les partis politiques, qui auront envoyé leurs représentants. Il y aura d'ailleurs Me Poggia pour le MCG notamment. Et, dans le cadre de cette commission ad hoc, nous aurons à nous pencher sur le futur statut de la fonction publique et notamment sur les rémunérations qu'il conviendra d'accorder aux employés de l'Etat. Je pense qu'il est effectivement nécessaire que l'on puisse accorder, dans le futur, des bonis variables selon les efforts et les mérites des uns et des autres.

Il y a toutefois un point sur lequel je me distancie de l'amendement du MCG, c'est sur le fait d'accorder un boni qui soit de type «arrosoir», égalitaire à tous les collaborateurs de l'Etat. Je ne pense pas qu'il s'agisse là d'une proposition raisonnable, je pense qu'il s'agit, au contraire, d'une mesure qui ne rend pas hommage aux efforts différents des uns et des autres. A certains, il faudra accorder davantage que les 800 F en question, et puis, à d'autres, je dirai non seulement rien du tout, mais, dans l'idéal, probablement moins ! Moins, parce que leurs performances ne seraient pas à la hauteur.

Donc, oui au principe des bonis généralisés, mais oui, d'abord, à une réforme de la fonction publique ! D'ailleurs, oui aussi, au passage, aux efforts que déploie M. Hiler à la tête du département des finances pour une réforme qui viendra sur l'évaluation des fonctions; elle nous permettra de remettre un certain nombre de choses à plat.

C'est donc dire que le groupe libéral, compte tenu de ces différentes remarques, n'entrera pas en matière sur cet amendement aujourd'hui. Mais sur le fond, il est tout à fait disposé à discuter de propositions de bonis différenciés - et non pas égalitaires, non équitables - à accorder aux collaborateurs de l'Etat. J'ajoute que les hauts cadres de l'Etat mériteraient eux aussi, au passage, d'être davantage récompensés - c'est une autre question dont on reparlera à l'occasion. Je vous remercie, Monsieur le président.

Le président. Je dois rendre justice au MCG: la proposition d'augmentation des charges du personnel est dûment couverte par des propositions de réduction des dépenses. Tous les groupes s'étant inscrits, le Bureau décide de clore la liste. Prendront la parole: Mme von Arx-Vernon, Mme Anne Emery-Torracinta, M. Jeanneret, M. Jeannerat et M. Golay.

Mme Anne-Marie von Arx-Vernon (PDC). Pour le parti démocrate-chrétien, cet amendement est inacceptable pour au moins deux raisons. La première, c'est de continuer à faire croire que le budget des SIG est illégal. C'est une stratégie malhonnête car les recommandations de la Cour des comptes ont été prises en considération et appliquées - cela a été dit hier par Mme la conseillère d'Etat, le MCG le sait, tous les partis le savent. Et puis, l'autre raison qui est particulièrement détestable, c'est le fait de dresser les fonctionnaires contre les employés des SIG, en faisant croire que ceux-là sont des grands privilégiés et que les autres souffrent sous la tâche et n'ont pas la reconnaissance qu'ils méritent. Et ça, c'est une pratique, une technique qui est absolument répugnante, Monsieur le président, et nous ne pourrons jamais adhérer à cette manière de faire. Je vous remercie.

Mme Anne Emery-Torracinta (S). Il est évident que les socialistes ne pourront pas soutenir un tel amendement ! Cela pour une raison bien simple: dieu sait si nous soutenons la fonction publique, mais si l'on estime qu'elle n'a pas une rémunération assez élevée, alors on évalue et on hausse les salaires. Nous sommes, par principe, totalement opposés à ce que nous a dit, d'ailleurs, le parti libéral, au système des bonis et à celui du salaire au mérite. Avec ce genre d'amendements, Mesdames et Messieurs les députés du MCG, vous jouez les boute-feu et vous êtes en train de remettre la question du statut de la fonction publique sur la table - ce n'est peut-être pas la meilleure des idées.

Deuxièmement, vous voulez une égalité de traitement, en disant: «Aux SIG, ils ont plus, ils ont des bonis, alors on doit le donner à toute la fonction publique.» On devrait peut-être aussi se poser la question de l'assurance-maladie ainsi que des franchises qui sont payées au personnel de police, et pas à l'ensemble des fonctionnaires ! Si vous vous lancez dans ce raisonnement-là, allez jusqu'au bout et posez toutes les rémunérations de manière transparente et claire sur la table !

La troisième raison d'opposition du parti socialiste, c'est la couverture que vous proposez. Il est évident qu'on ne peut pas vous suivre: il y a une espèce de rétorsion face aux SIG, donc vous enlevez de l'argent. On ne peut pas vous suivre non plus par rapport à l'Université.

Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à ne pas accepter un amendement qui pose plus de problèmes qu'il n'en résout.

Le président. Merci, Madame la députée, la parole est à M. Roger Golay.

M. Roger Golay (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés... (Remarque.) Je n'ai pas terminé, Monsieur Deneys, et je ne vous ai pas...

Le président. Ne vous laissez pas interrompre, Monsieur Golay !

M. Roger Golay. ...interrompu chaque fois que vous avez pris la parole, hier, pour dire un peu tout et n'importe quoi...

Le président. Monsieur Golay, poursuivez !

M. Roger Golay. ...donc laissez-moi parler, s'il vous plaît ! Alors, pour répondre à M. Weiss, j'apprécie en tout cas le fait qu'il veut reprendre la forme de cet amendement dans un futur débat qui aura lieu cet après-midi déjà, à 16h45, lors de l'ouverture de la commission ad hoc. Simplement, il ne faudrait pas que les gens imaginent que M. Weiss va fournir, tout d'un coup, des primes, comme ça, à la fonction publique. Ça ne sera certainement pas des bonus; ce qu'il souhaite certainement, c'est plutôt le salaire au mérite. En dehors de cela, s'agissant de cet amendement, nous, les fonctionnaires du groupe MCG - et là, j'en viens à répondre à M. Deneys - nous abstiendrons. Simplement, nous soutiendrons nos collègues moralement.

M. Claude Jeanneret (MCG), rapporteur de minorité ad interim. Effectivement, l'amendement consistant à augmenter des dépenses en charges de personnel dans la fonction publique peut surprendre. Mais il y a quand même une chose qu'il faut remarquer: les fonctionnaires de la fonction publique sont payés par des impôts qui sont votés; les fonctionnaires des Services industriels sont payés par des taxes d'électricité, lesquelles sont décidées par l'Etat et sont, en fait - puisque ça dégage du profit par rapport au coût - des impôts que l'on camoufle au regard de la population. On le voit aujourd'hui, c'est un véritable racket qui est organisé. Et quand on vient nous parler du conseil d'administration d'une société dont les revenus excessifs sont prévus par l'Etat et qui n'a comme fonction que de distribuer l'électricité dans un marché fermé pour le moment... Et même s'il était ouvert, je vais vous le dire, cela ne changerait rien au fait que l'électricité doit être transportée, et les moyens pour ce faire sont exclusivement acquis par les Services industriels. C'est donc un véritable racket, parce que non seulement les moyens de transport de l'énergie sont acquis par les Services industriels, mais, en plus de ça, le prix est défini par l'Etat !

De plus, contrairement à ce qui a été dit hier par un député libéral, les Services industriels n'étaient pas prêts à rembourser la population des excédents de prélèvement, c'est une obligation qui leur a été signifiée par des organismes fédéraux. Nous sommes donc véritablement dans une situation difficile.

Et grâce à ces impôts «camouflés», dirions-nous, c'est-à-dire ce «surprix» que l'on facture au consommateur - qui, lui, en tant que citoyen de Genève, paie déjà des impôts pour rémunérer d'autres fonctionnaires - on peut distribuer des primes. Alors, tant qu'à faire, autant les donner à tout le monde ! Parce que nous avons aussi le respect de l'équité - de l'équité ! Et tous les gens qui travaillent pour l'Etat, que ce soit dans des entreprises autonomes ou dans des entreprises étatiques, sont au service de la collectivité et rendent de grands services. La manière de les financer n'est pas nécessairement honnête, mais eux sont des gens honnêtes qui rendent de grands services. Il faut quand même faire la différence. Et il n'est pas normal qu'un service - parce qu'il a reçu la bénédiction pour surfacturer ses prestations - puisse donner des bonus à ses employés et que les autres services ne dépendant que des impôts - qui sont des taxes ne donnant pas cette impression de service - n'aient pas les mêmes avantages.

Nous avons prévu de financer cet amendement par la suppression d'une subvention accordée trop généreusement à l'Université, par la remise dans la légalité de l'indemnité de restructuration des déchets spéciaux - c'est-à-dire moins 4 000 000 F aux SIG - et puis par la diminution de la subvention pour l'encouragement à l'utilisation d'énergies renouvelables. Nous couvrons ainsi parfaitement ce budget.

Par ailleurs, il faut quand même reconnaître qu'effectivement certaines personnes - je pense peut-être à des libéraux - quand on parle de bonus, songent tout de suite aux milliards distribués par les banques. Mais non ! Nous, ce que nous proposons, ce sont des bonus simples, efficaces, qui sont donnés en récompense à la fidélité et à l'action ponctuelle des employés de l'Etat et de tous les organismes paraétatiques.

Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, je vous encourage vivement - non pas par remise en question de la fonction publique, mais, au contraire, par respect pour les acteurs de la fonction publique, par esprit d'équité - à accepter cet amendement du MCG. Merci, Monsieur le président.

M. Jacques Jeannerat (R), rapporteur de majorité. J'aimerais faire deux remarques, une sur le fond et une sur la forme de cet amendement. On ne peut pas demander aux grandes régies publiques, aux entreprises publiques, de fonctionner à la fois avec une certaine autonomie, de fonctionner comme de véritables entreprises, notamment sur le plan de la gestion budgétaire qui évolue quand même dans le cadre défini par ce parlement - c'est le cas des SIG puisqu'on a voté hier soir leur budget général - et puis, en même temps, leur imposer un certain nombre de règles de fonctionnement, notamment vis-à-vis de leurs collaborateurs. De plus, assimiler ces entreprises et leurs employés aux fonctionnaires de l'Etat, eh bien, c'est un peu mélanger des pommes et poires. Et puis l'amendement, s'il devait être complet, devrait alors comprendre aussi un bonus pour les autres régies ! Pourquoi accepterait-on que le bonus des SIG soit également accordé aux fonctionnaires ? A ce moment-là, pourquoi ne pas inclure également les employés des TPG, ceux de l'aéroport ou d'autres régies de l'Etat ? Cet amendement est donc incohérent.

Sur la forme, moi je veux bien qu'il y ait une démonstration arithmétique pour nous dire que cette dépense supplémentaire au budget est couverte. Mais si l'on accepte ces +12 000 000 F et qu'ensuite on vient refuser les trois amendements permettant d'avoir cette couverture, eh bien, on va être chocolat, comme on dit ! Il faudrait donc peut-être d'abord qu'on vote sur les diminutions proposées par le MCG, qui lui permettraient ensuite de venir avec un amendement visant à augmenter les dépenses; sinon, je ne vois pas très bien comment on va s'en sortir.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Je voulais vous dire, Mesdames et Messieurs les députés, que, si l'on accepte l'amendement, du coup, on accepte également les réductions. C'est un ensemble... (Remarque.) Exactement ! La parole n'étant plus demandée, je vais la donner à M. David Hiler.

M. David Hiler, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, il a été dit que ce n'est pas parce que quelqu'un fait une bêtise qu'on est obligé de l'imiter par égalité de traitement, et le Conseil d'Etat partage cette appréciation. La deuxième chose, Mesdames et Messieurs, s'adresse au MCG: le Conseil d'Etat a mis en consultation un projet de loi permettant de contrôler beaucoup plus étroitement le système de rémunération des régies. Il ne s'agit pas de dire que ce doit être le même que celui de l'Etat, il s'agit de dire que le règlement du personnel et de la rémunération doit faire l'approbation du Conseil d'Etat. Vous n'avez pas répondu à cette consultation, vous avez, en revanche, à peu près fait savoir que vous lanceriez un référendum contre le projet de loi pas encore déposé. Il faudra quand même qu'on ait une discussion plus sérieuse sur cet objet, parce que si vous voulez, une fois ou l'autre, qu'il n'y ait plus cette originalité, il faut évidemment donner le pouvoir à quelqu'un de contrôler les régimes salariaux des différentes entreprises publiques.

Et puis, pas pour allonger, mais pour que ce parlement sache quand même exactement de quoi on parle: quelles sont les couvertures ? Diminution de la subvention à l'Université pour 5 millions... Bien... «Indemnité de restructuration des déchets spéciaux SIG»: vous pouvez toujours couper la ligne, mais comme ça fait partie d'un accord global qui a été conclu lors d'un transfert d'actifs et qu'il y a un papier signé, et que ça fait l'objet d'un projet de loi, et que ce projet de loi a été accepté par le peuple, les 4 millions seront versés; c'est donc une fausse économie. Et enfin, «Subventions pour l'encouragement à l'utilisation d'énergies renouvelables et à l'utilisation rationnelle de l'énergie» - assainissement des bâtiments: à chacun sa manière de fêter Copenhague, bien sûr !

Le Conseil d'Etat vous demande donc de repousser ces amendements qui - ceux à la baisse - sont totalement contraires aux priorités du Conseil d'Etat et de ce parlement et - ceux à la hausse - n'ont aucun sens.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons donc voter cet amendement du MCG: +12 166 000 F à la ligne 30 «Charges de personnel», couverts par -4 300 000 F à la ligne 03.26.00.00 36 «Université: subventions accordées», -4 000 000 F à la ligne 06.01.00.00 363 00104 «Indemnité de restructuration des déchets spéciaux» et -5 000 000 F à la ligne 06.04.00.00 364 00314 «Subventions pour l'encouragement à l'utilisation d'énergies renouvelables et à l'utilisation rationnelle de l'énergie».

Le président. Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 58 non contre 7 oui et 7 abstentions.

Le président. Nous passons maintenant à l'amendement du Conseil d'Etat, toujours à la ligne 30, et je passe brièvement la parole à M. Hiler.

M. David Hiler, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, il s'agit du mécanisme usuel qui fait que nous devons à chaque fois - et cette fois, si vous êtes d'accord, ce sera la dernière - revenir en plénière avec le niveau définitif de l'inflation, qui, selon notre loi, est fixé au mois de novembre. J'avais annoncé que - pour toutes sortes de raisons que je ne développerai pas ici - nous déposerions un projet de loi à ce propos. Nous le déposerons effectivement en janvier, de sorte que, dorénavant, ça soit octobre qui soit la limite; et on recalculera d'octobre à octobre, pas de novembre à octobre.

Vous vous rappelez que, la dernière fois, ça avait facilité l'adoption du budget puisqu'il y avait eu plus de 1% de baisse dans l'indexation. Mais dans le cas d'espèce - de façon un peu surprenante, d'ailleurs - nous nous retrouvons avec 0,3%; d'une certaine manière, c'est presque préférable que ce soit comme ça, puisque nous aurons ainsi, sur 2011 - où l'inflation sera plus forte - une marge de manoeuvre qui se sera créée. Et 0,3%, ce n'est pas grand-chose, et le signal général doit être donné - mécanismes salariaux, indexation... Nous sommes, en 2010, encore dans la période où nous donnons priorité de façon générale au maintien des emplois et du pouvoir d'achat. Par cohérence, nous vous demandons de soutenir cet amendement qui permet de verser à l'ensemble des collaborateurs de l'Etat, à ce stade, l'indexation. Et, bien entendu, recalculée au prorata de la subvention, nous donnons évidemment l'indexation à tous les établissements divers et variés qui suivent les mêmes mécanismes salariaux que ceux de l'Etat de Genève.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons donc nous prononcer ligne par ligne, puisqu'en fait il y en a quatre qui sont concernées par cet amendement relatif à l'indexation. Nous commençons donc par la ligne 30 «Charges de personnel: +6 352 484 F».

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 55 oui contre 6 non et 6 abstentions.

Le président. Nous passons à l'amendement de la ligne 338: «Amortissements, provisions, irrécouvrables: +300 301 F».

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 58 oui et 6 abstentions.

Le président. Nous sommes saisis d'un amendement à la ligne 36: «Subventions accordées: +4 431 353 F».

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 61 oui et 6 abstentions.

Le président. Le dernier amendement est à la ligne 43: «Recettes diverses: +229 540 F».

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 64 oui (unanimité des votants).

Le président. Nous passons maintenant au chapitre concernant la chancellerie.

CHAPITRE 1: CHANCELLERIE D'ETAT

Le président. Nous sommes à la page 113 du livre rouge. (Le président énumère les différentes sections.)

Mis aux voix, le budget de fonctionnement de la Chancellerie d'Etat est adopté par 71 oui (unanimité des votants).

CHAPITRE 2: FINANCES

Le président. Nous sommes à la page 133 du livre rouge. Je vais procéder à l'énumération des sections et vous indiquerai les amendements à traiter.

Administration fiscale cantonale (Rub. 02.24.00.00.40)

Le président. Nous sommes saisis d'un amendement du Conseil d'Etat à la ligne 40: «Impôts: +2 750 000 F». Je passe la parole à M. Hiler.

M. David Hiler, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, il s'agit de la première concrétisation budgétaire de l'accord passé avec les syndicats représentant la police, les gardiens de prison et autres agents de détention. Pour mémoire: dans cet accord - et c'est de cela que nous allons parler - il y a en fait deux points essentiels. D'abord, la classification de fonction: on passe de 12 à 14 comme classification de base pour les gardiens et pour les gendarmes et, de la même manière, de 13 à 15 pour la police judiciaire. En outre, les grilles salariales deviennent standardisées, et sur celles-ci, curieusement, une annuité égale une année et n'a pas besoin de trois ou quatre ans pour être obtenue comme c'est le cas aujourd'hui. Cet accord a été signé mercredi, sous réserve, bien sûr, du vote d'aujourd'hui. Il a été présenté à la commission des finances assez longuement, vous avez pu en prendre connaissance, également sur le site internet de l'Etat ou dans la presse, selon la façon dont vous vous informez.

Ce premier amendement, c'est simplement la fiscalisation de l'inconvénient de service, qui deviendra dans quelques mois une indemnité pour risque. Il a toujours été considéré comme désagréable, sur la base d'un avis de droit questionnable, qu'un revenu ne soit pas fiscalisé, alors même que le nouveau certificat de salaire, adopté il y a maintenant deux ans, est extrêmement exhaustif, tant pour le public que pour le privé. Nos interlocuteurs syndicaux en ont convenu, c'est la raison pour laquelle il s'agit d'une compensation des avantages qui sont donnés par ailleurs.

Je profite de l'occasion pour vous signaler que l'économie la plus forte qui résulte de cet accord - à savoir la fin d'un ordre de service qui aboutissait à la création quasi automatique de quatre heures supplémentaires, en d'autres termes, selon ce qu'indique la Cour des comptes, une semaine de travail de moins de 36 heures - c'est que cela ne fait pas l'objet d'une diminution budgétaire puisque les 43 postes ainsi créés - et c'est ce que veut la population, et c'est ce que vous voulez - seront sur le terrain. Il aurait été possible de récupérer cet argent en indiquant une dissolution de la provision pour heures supplémentaires à hauteur de ces 5,2 millions - ça aurait d'ailleurs ainsi pris huit ans à vider la provision existante. Le Conseil d'Etat a estimé - Mme Isabel Rochat vous en dira plus tout à l'heure - et je crois que c'est évident, que la priorité doit être donnée, dans les temps actuels, à l'action sur le terrain, et pas à une recette obtenue par une dissolution de provision. Pour cette raison, c'est la seule compensation monétaire que vous retrouverez dans l'étude de ce budget.

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 74 oui (unanimité des votants).

Commission externe d'évaluation des politiques publiques - CEPP (Rub. 02.29.01.00.30)

Le président. Nous sommes saisis de deux amendements à la ligne 30, l'un de Mme Chatelain, l'autre de M. Jeannerat. Je passe la parole à Mme Chatelain, dont l'amendement est le plus éloigné.

Mme Elisabeth Chatelain (S). Nous avons discuté longuement en commission des finances, mais également en commission de contrôle de gestion, de la CEPP, de son travail existant, de son avenir. Et je crois qu'il est très clair que tout ce qui concerne les contrôles au sein de l'Etat va être revu. D'ailleurs, ce Grand Conseil a accepté une motion en ce sens afin que le Conseil d'Etat nous présente au plus vite - et il nous l'a promis pour le premier semestre 2010 - un nouveau projet de loi réglant l'ensemble des possibilités de contrôle au sein de l'Etat.

La CEPP est le seul organe de contrôle procédant à des évaluations des politiques publiques, et nous pouvons, avec la commission de contrôle de gestion, solliciter ses services, le Conseil d'Etat le fait également. Actuellement, la commission de contrôle de gestion a donné quatre mandats à la CEPP, je vous en ai énuméré les thèmes dans la proposition d'amendement: ça concerne la formation de la police, la Genève internationale, la protection contre le bruit et les jeunes en rupture. Ce sont des thèmes importants au travers desquels nous pouvons observer la politique de l'Etat, de façon à régler les problèmes soulevés par les questions de la commission de contrôle de gestion. Le Conseil d'Etat lui-même a aussi mandaté la CEPP pour une évaluation du chèque formation.

La CEPP fait un travail que nous estimons important et utile à tout le monde au sein de l'Etat. Je vous demande donc de supprimer l'amendement initial de -130 000 F, que la majorité de la commission des finances a adopté en deuxième débat, et de revenir au budget initial présenté par le Conseil d'Etat.

Mme Sophie Forster Carbonnier (Ve). Je n'ai pas grand-chose à ajouter à ce que vient de dire ma collègue, Mme Chatelain, car le groupe des Verts demande également le retour au budget initial présenté par le Conseil d'Etat en ce qui concerne la CEPP. En effet, nous tenons à rappeler que la motion proposée par la commission de contrôle de gestion avait été acceptée par le Grand Conseil et que le Conseil d'Etat va donc présenter en 2010 un projet de loi visant à améliorer la coordination et l'efficacité des différentes entités en charge du contrôle et de l'évaluation des politiques publiques. Pour les Verts, nous trouvons donc prématuré de nous prononcer maintenant et de décider s'il faut ou non modifier l'allocation des ressources à ces différentes entités. Nous préférons donc attendre le projet de loi du Conseil d'Etat et vous demandons d'accepter les amendements proposés. Merci.

M. Eric Bertinat (UDC). Le problème de la CEPP - qui ne plaît pas forcément à tout le monde, et c'est bien ainsi - c'est finalement de savoir si l'on veut qu'elle disparaisse ou pas. Il ne s'agit pas de proposer, comme ça, des amendements qui réduisent partiellement - à coup de 10 000 F, 50 000 F, 70 000 F - les ressources de cette commission qui, jusqu'à présent, a rendu des rapports intéressants. Même celui sur le travail au noir, bien que fortement critiqué, a finalement soulevé de nombreuses questions auxquelles nous attendons des réponses. D'ici à quelques mois, la CEPP va produire un deuxième rapport, qui sera sans doute encore plus complet sur ce sujet. Nous soutiendrons l'amendement socialiste voulant que nous revenions à la situation initiale.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Jeanneret.

M. Claude Jeanneret (MCG), rapporteur de minorité ad interim. Merci, Monsieur le président. On va alterner, comme ça... La CEPP est une institution qui peut gêner certains, mais elle a quand même un avantage sur toute autre institution qui existe: elle est totalement indépendante. Elle est indépendante et n'est pas nécessairement nommée par les voies politiques traditionnelles. Elle est intéressante parce qu'elle a son approche personnelle et parce qu'elle ose dire ce qu'elle découvre, et non pas seulement ce qu'on lui dit de dire. Ça peut gêner certains groupes, même certains groupes de l'Entente, certains libéraux en particulier - on le voit aujourd'hui - qui s'acharnent d'une manière mesquine et vengeresse contre une institution qui a eu le malheur de faire un rapport ne convenant pas à leurs principes et à leur volonté de cacher la vérité au peuple. Les rapports de la CEPP, véritablement, ont toujours un intérêt. On peut les discuter, on peut les approuver ou les désapprouver, mais ils ont toujours une vue intéressante de ce qui se passe près de chez nous, sur les dispositions qui sont prises et sur celles qui ne le sont pas !

On peut aujourd'hui discuter pour savoir si l'on veut ou si l'on ne veut pas conserver ce genre d'institution. A ce moment-là, on décide qu'on ne veut pas que quelqu'un d'autre que l'Etat ou ses organismes contrôle l'action de celui-ci - c'est donc de l'autocontrôle, c'est bien - mais on ne peut pas décemment diminuer le budget d'une institution qui a une vocation légale. Et l'on diminue son budget pour l'empêcher de faire son travail et, ainsi, pouvoir dire à la prochaine législature: «Voyez, messieurs-dames, on leur donne de l'argent, et ils ne font rien !» C'est tellement facile, c'est tellement petit, c'est indigne d'un parlement !

Moi je pense que nous devons pour le moment maintenir le budget de la CEPP. Au cas où il serait décidé de ne plus vouloir cette institution, ce dont je doute - en tout cas, ce n'est pas la volonté du MCG - mais ça peut arriver, nous respecterions la majorité. Mais nous refusons d'agir par petite mesquinerie, par petits à-coups qui n'ont d'intérêt ni pour la république, ni pour une institution, ni pour nous-mêmes, parce que nous dépenserions de l'argent pour ne pas obtenir le service qu'on en attend ! Nous vous conseillons donc vivement d'accepter l'amendement demandé par le parti socialiste.

Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Jeannerat, qui nous présentera aussi, je pense, son amendement.

M. Jacques Jeannerat (R), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Monsieur le rapporteur de minorité, vos propos seraient exacts si l'amendement consistait à biffer purement et simplement la ligne budgétaire pour la CEPP, ce qui n'est pas du tout le cas. On l'a déjà dit tout à l'heure: il y a une surmultiplication des organes de contrôle et de vérification - il y a d'abord la commission de contrôle de gestion du Grand Conseil, il y a l'ICF, il y a la Cour des comptes, il y a maintenant la CEPP. Cette dernière, dans sa structure actuelle - avec un mélange de gens qui viennent de la société civile et de scientifiques - eh bien, a montré qu'elle arrivait au terme de sa façon de fonctionner. Alors, elle est actuellement en train de travailler sur quatre dossiers, il s'agit de lui donner les moyens de terminer ce travail, mais il s'agit aussi de donner un signal relativement fort au Conseil d'Etat, qui nous a promis un projet de loi pour revoir l'ensemble de ces structures de contrôle.

En commission des finances, nous avions proposé un amendement qui consistait à réduire de 100 000 F la ligne 30, c'est-à-dire les charges de personnel, et enlever 30 000 F à la ligne 31 sur les dépenses générales. Pour que la CEPP puisse quand même travailler sur ces quatre dossiers dont Mme Chatelain parlait tout à l'heure, nous souhaitons permuter ces réductions et, donc, avoir - attendez que je retrouve mes chiffres: -100 000 F à la ligne 31 et -30 000 F à la ligne 30. Il faut donc, par rapport à ce qui a été décidé en commission, rajouter 70 000 F à la ligne 30 et soustraire 70 000 F à la ligne 31. (Commentaires. Brouhaha.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Je vais vous faire voter l'amendement le plus éloigné - s'il est accepté, l'amendement de M. Jeannerat tombera - qui est celui de Mme Chatelain, de Mme Emery-Torracinta et suivants. Voici l'amendement: +100 000 F à la ligne 02.29.01.00.30 «Charges de personnel» et +30 000 F à la ligne 02.29.01.00.31 «Dépenses générales».

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 51 oui contre 24 non et 2 abstentions.

Mis aux voix, le budget de fonctionnement du département des finances est adopté par 77 oui (unanimité des votants).

Le président. Nous passons au département suivant et ferons une pause tout à l'heure.

CHAPITRE 3: INSTRUCTION PUBLIQUE, CULTURE ET SPORT

(Anciennement: instruction publique)

Le président. Nous sommes à la page 161 du livre rouge. Je vais énumérer les rubriques jusqu'au prochain amendement.

Université (Rub. 03.26.00.00.326)

Le président. Nous avions ici un amendement correspondant à celui sur les charges de personnel proposé par le MCG. Je ne sais pas si ce dernier... (Remarque.) Je passe la parole au MCG, s'il persiste dans son amendement. C'est M. Rappaz qui prend la parole.

M. Henry Rappaz. C'est bien le nôtre ? C'est le nôtre ? (Commentaires.)

Le président. Monsieur Rappaz ? (Commentaires.) M. Rappaz renonce. Je donne la parole à M. Poggia.

M. Mauro Poggia (MCG). Nous parlons bien, Monsieur le président, de l'amendement consistant à réduire la subvention pour l'Université de 4 300 000 F, c'est juste ? Très bien, excusez-moi. Comme l'expliquent les arguments figurant en bas de l'amendement qui vous est présenté, une augmentation de 4,3 millions de la subvention à l'Université avait été présentée pour 2009 et acceptée par ce parlement pour tenir compte d'une baisse du nombre d'étudiants, aussi pour tenir compte des dépenses exceptionnelles liées au 450e anniversaire. Et aujourd'hui, on est en train de pérenniser cette subvention alors que nous n'avons à l'évidence aucun élément nous permettant de considérer que la situation de l'exercice 2009 - qui était exceptionnelle - devrait se reproduire pour l'exercice 2010. Les libéraux - qui sont évidemment attachés à une saine gestion de nos institutions - auront à coeur de relever que, si les recettes de l'Université doivent à nouveau baisser en 2010, eh bien, il convient que cette institution - qui est un modèle d'excellence - puisse modifier ses charges pour tenir compte de cette situation nouvelle. Il n'est pas question que l'Etat de Genève pérennise - comme je l'ai dit il y a un instant - cette subvention de 4,3 millions, qui était exceptionnelle pour l'exercice 2009, et nous vous demandons donc de la réduire du même montant.

M. Eric Bertinat (UDC). Rapporteur de la minorité il y a quelques jours - deux semaines sauf erreur - lorsque nous avons traité le projet de loi qui accordait entre autres cette subvention de 4,3 millions, je m'étais opposé à pérenniser la proposition de M. Weiss qui, devant la baisse du nombre d'inscriptions d'étudiants à l'Université, baisse qui générait pour cette institution une perte de revenus, avait proposé une subvention extraordinaire. Lors de l'établissement du contrat de prestations, nous nous sommes rendu compte que cette somme était réintroduite; cette curieuse opération fut la raison de mon rapport de minorité, parce qu'évidemment, depuis lors, le nombre d'étudiants est revenu, à peu de choses près, à son niveau initial. Il n'y a donc vraiment pas de raison de maintenir cette subvention. Cela ne remet évidemment pas en cause la subvention de l'Université de Genève, qui est - sauf erreur de ma part - l'une de celles qui ont le plus augmenté ces dernières années, et qui ne devrait pas baisser ces prochaines années. Le fonctionnement de l'Université n'est ainsi nullement remis en cause.

Le président. Merci, Monsieur le député. Il reste trois intervenants. Le Bureau va clore la liste, de façon que nous puissions aller boire un café. Je passe la parole à M. Saudan.

M. Patrick Saudan (R). Merci, Monsieur le président. Le parti radical refusera cet amendement: vous savez bien que nous sommes attachés à la mission de l'Université, et, même si le nombre d'étudiants s'est stabilisé ces derniers temps, je vous ferai remarquer qu'il y a quand même des domaines critiques au sein de cette institution. Par exemple, la faculté des lettres a constaté une baisse de 12% du nombre d'étudiants cette dernière année. Vous savez, c'est cette faculté des lettres qui va devoir former, en grande partie, nos enseignants pour le secondaire. C'est pour ça que, l'argent étant le nerf de la guerre, nous trouvons particulièrement inopportun de réduire actuellement la subvention de l'Université. Et sur ce, je m'arrête, je fais juste remarquer au président - c'est une demande de mon chef de groupe - que la pause café pourra intervenir prochainement. Merci. (Rires.)

Le président. Il en est pris note ! La parole est à M. Forni.

M. Michel Forni (PDC). Merci, Monsieur le président. Notre Université est actuellement une institution de haut niveau, qui doit bénéficier non seulement de sa renommée, mais aussi de certains moyens. Et aujourd'hui, une diminution de 4,3 millions dans un budget - même si celui-ci a été renforcé l'an passé - représente une saignée importante que nous ne pouvons actuellement pas admettre. Le parti démocrate-chrétien s'inscrit en faux contre cette tendance à la baisse, qui tient compte d'un certain nombre d'étudiants, d'un certain nombre de paramètres, mais qui, d'un autre côté, exige la conservation du pôle d'excellence. Alors soyons honnêtes, Messieurs ! L'argent, c'est le nerf de la guerre: sans argent, il n'y a pas de possibilités, il n'y a pas de finalité. C'est la raison pour laquelle cette demande est suicidaire, et je vous demande d'y renoncer.

Le président. Merci, Monsieur le député. Le dernier intervenant est M. Jeanneret.

M. Claude Jeanneret (MCG), rapporteur de minorité ad interim. Merci, Monsieur le président. Bien, chers collègues ! Alors, on entend le cri des gens intéressés par l'Université: «L'argent, c'est le nerf de la guerre, on va amputer cette brave Université de toute sa capacité !» Je rappellerai simplement qu'il s'agit de 4,3 millions sur un budget de près de 300 millions - plus précisément sur un budget de 294 millions - ce qui représente moins de 1,5%. Ce que je veux dire par là, c'est que quand on parle d'excellence, on parle aussi de l'excellence dans la manière de gérer, ce qui n'est pas le cas présentement ! Le budget exceptionnel de 4 300 000 F était destiné à pallier une diminution du nombre d'étudiants, qui semble - d'après tout ce que j'ai entendu - avoir été rétabli actuellement; cette subvention n'a donc plus de raison d'exister. Quand on nous dit que la faculté des lettres fait face à une diminution du nombre d'étudiants... Eh bien, on est encore dans un pays libre, on n'est pas obligé d'aller à la faculté des lettres parce qu'elle manque d'étudiants ! Chacun est libre et a le droit d'adhérer à la faculté qu'il désire ! Et puis je répéterai que, si la faculté des lettres n'a plus autant d'étudiants, peut-être qu'on aura moins d'enseignants à l'avenir - ça, j'en doute, mais enfin, admettons - ce serait une bonne raison de restructurer un service en fonction des besoins ou des prestations qu'il assure.

Je crois qu'il ne faut pas confondre l'excellence d'une chose - et je ne discute pas de l'excellence de notre Université, de sa réputation - avec la bonne gestion; l'une n'empêche pas l'autre, et ce n'est pas parce qu'on dilapide l'argent qu'on fait de la bonne gestion et de l'excellence ! L'excellence n'a pas à voir qu'avec l'argent que l'on donne, elle a aussi à voir avec la manière de dépenser l'argent. Et lorsque l'on a reçu une subvention exceptionnelle pour pallier une situation exceptionnelle, il est indécent, vis-à-vis d'une bonne gestion, de reconduire cette indemnité alors qu'elle n'est plus nécessaire. Or, aujourd'hui - d'après ce que j'ai entendu - le nombre d'étudiants étant revenu à la normale, elle n'est plus nécessaire.

Maintenant, je dirai encore une chose: il est clair que l'Université de Genève court un certain risque, parce que, dans certaines facultés, elle est en concurrence avec l'Ecole polytechnique de Lausanne. Et au niveau fédéral, les cantons qui envoient leurs étudiants à Genève doivent payer une contribution à ce dernier, ce qui n'est pas le cas lorsqu'il s'agit d'une école fédérale. Alors, nous avons là une structure à étudier pour l'avenir, on a peut-être quelque chose à prévoir pour l'avenir, mais aujourd'hui on veut un budget d'actualité ! Ces 4 300 000 F ne sont pas nécessaires, ils étaient exceptionnels l'année passée, et je trouve que, là, on encourage une mauvaise gestion si l'on accepte ce montant ! Nous vous prions donc, Mesdames et Messieurs les députés, de donner le signal d'une bonne gestion - avec tout le respect que l'on doit à l'Université, parce qu'on envoie quand même 290 millions, ce n'est pas n'importe quoi. Il faut simplement qu'on ait, en retour, la certitude que la gestion est bien assumée, et c'est la raison pour laquelle je vous demande d'accepter l'amendement du MCG.

Le président. Merci, Monsieur le député. Nous allons donc voter l'amendement proposé par le MCG à la ligne 03.26.00.00.36 «Subventions accordées: -4 300 000 F».

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 53 non contre 23 oui et 1 abstention.

Mis aux voix, le budget de fonctionnement du département de l'instruction publique, de la culture et du sport est adopté par 76 oui contre 1 non.

Deuxième partie du débat sur le budget 2010 (2e débat - livre rouge): Session 03 (décembre 2009) - Séance 14 du 18.12.2009

Le président. Nous allons faire une petite pause jusqu'à 10h10.

La séance est levée à 9h50.