République et canton de Genève

Grand Conseil

IN 125
Initiative populaire 125 : Pour une meilleure prise en charge des personnes âgées en EMS
IN 125-C
Rapport de la Commission de la santé chargée d'étudier l'initiative populaire 125 « Pour une meilleure prise en charge des personnes âgées en EMS »

Débat

Mme Véronique Schmied (PDC), rapporteuse de majorité. J'aimerais en préambule procéder à la correction d'un terme utilisé par M. Pierre-François Unger, chef du département, à la page 17 du rapport. Il s'agit en fait de «non-mal-efficience» et pas de «non-magnificence»; la non-mal-efficience consistant à ne pas faire de mal.

Cette correction indispensable étant faite, je me permets de situer cette initiative dans le cadre actuel du blocage des subventions sur quatre ans des EMS, décision prise par le Conseil d'Etat dans le cadre des mesures cantonales d'économies qui touchent tous les départements.

Le coût de cette initiative a été estimé à 60 millions. La question préliminaire que l'on peut poser est la suivante: si l'on accorde 60 millions de plus aux EMS, quels autres secteurs vont être touchés ? Je n'ose imaginer que certains puissent entrevoir là l'opportunité d'instrumentaliser cette initiative, dans cette période de restrictions budgétaires, pour débloquer quelques millions supplémentaires au bénéfice de la gestion des EMS...

J'en viens maintenant à ce qui a été discuté en commission. La commission - sachez-le - a refusé l'initiative par 7 non contre 3 oui et 2 abstentions. L'éventualité d'un contre-projet - et je donne cette information de manière orale, parce que cela n'a pas été «protocolé», ce qui fait que vous n'allez pas trouver cette décision de la commission dans le rapport - a été évoquée par le groupe socialiste et le groupe MCG. Le principe du contreprojet a été soumis au vote au cours de la séance du 29 septembre et a été refusé par 5 non - libéraux, radicaux et démocrates-chrétiens - contre 3 oui - les socialistes, le MCG - et 2 abstentions - les Verts. La répartition est la même que pour le refus de l'initiative.

Les opposants à l'initiative ont considéré deux facteurs essentiels: le coût élevé de la mise en oeuvre de l'initiative - 60 millions, comme je l'ai déjà dit. D'autre part, la commission a nettement l'impression que des centralisations s'imposent à fins de rationalisations et d'économies d'échelle entre les différents EMS actuellement en fonction et futurs. Notamment une centrale d'achats et un pool administratif, pour donner deux exemples.

Les membres de la commission ont été étonnés d'apprendre que Genève se situait, par rapport aux cantons romands, en première place quant au coût global par journée de résident, en première place en matière de qualité des soins et en deuxième position après le Jura en matière de pourcentage réglé par les assurances. Il semble donc que les conditions de vie pour les résidents soient optimales à Genève par rapport à la Suisse romande.

La notion de qualité des soins a été évoquée par tous les groupes, en soulignant l'importance de l'implication des familles. Les aidants naturels, tels qu'ils ont été évoqués par le Conseil d'Etat dans ces mesures d'économies, ont ici toute leur place, l'EMS étant un lieu de vie et non un hôpital.

Il faut encore noter, bien que cela ne concerne pas directement l'initiative 125, l'inquiétude des uns et des autres, c'est-à-dire les auditionnés: la Fegems, les initiants et les députés également, quant à la disparition de l'outil PLAISIR, disparition annoncée, qui n'est, pour l'instant, remplacé par aucun outil encore connu, bien que le Conseil d'Etat ait affirmé que l'outil PLAISIR ne disparaîtrait que lorsqu'il serait remplacé... Actuellement, l'outil PLAISIR est le seul outil de mesures. C'est sur sa base que les assurances effectuent leurs remboursements.

En conclusion, la commission a rejeté l'initiative 125, comme je l'ai déjà dit, par sept non - les trois groupes de l'Entente - contre trois oui - les socialistes, le MCG - et deux abstentions - les Verts. Et, parmi les auditionnés, l'APAF - l'Association pour la défense des personnes âgées en EMS - par la bouche de sa présidente, dément très fermement l'affirmation, qui figure dans l'exposé des motifs de l'initiative, selon laquelle 20% des soins nécessaires ne seraient pas assurés. La Fegems prend la même position que l'APAF, et le directeur d'un EMS visité par la commission, qui a été auditionné, leur a emboîté le pas dans cette position.

Le coût et l'irréalisme de cette initiative doivent vous enjoindre, Mesdames et Messieurs les députés, à refuser cette initiative.

Mme Laurence Fehlmann Rielle (S), rapporteuse de minorité. Je voudrais tout de même rappeler quel est le but de cette initiative. Elle entend assurer que les personnes âgées résidant en EMS reçoivent des soins et un encadrement dignes d'un canton comme Genève.

Je rappelle également que, selon l'outil PLAISIR, qui est actuellement encore utilisé pour mesurer la couverture des soins, les 100% ne correspondent pas à des soins optimaux; il garantit des soins dits «convenables». Il ne s'agit donc pas de soins de luxe, mais de soins convenables ! De manière concrète, il a été notamment évoqué que cela signifiait, par exemple, une douche par semaine ou trois mobilisations par jour. Pour les personnes qui sont actuellement en EMS et qui sont souvent très atteintes dans leur santé, la mobilisation et la communication sont extrêmement importantes. Alors, est-ce vraiment trop demander pour respecter la dignité des personnes âgées ?

D'une manière générale, il s'avère - cela a été constaté - qu'il y a un déficit d'environ 20% par rapport au standard de l'outil PLAISIR. C'est un chiffre global, et il peut effectivement y avoir des différences selon les établissements. Ces déficits ont été observés, selon les dires des professionnels, en matière d'hygiène, en matière de mobilisation et en matière de communication. Le problème n'est donc pas seulement de type économique, qui nécessite de dégager des ressources suffisantes; il est aussi éthique.

Dans mon rapport, j'ai relevé une certaine contradiction entre différents acteurs, notamment la Fegems et l'APAF. D'un côté, la Fegems affirmait, lors de son audition, qu'il n'était pas nécessaire de couvrir les 100% de PLAISIR, alors que l'APAF - l'Association de défense des personnes âgées - s'insurgeait contre l'affirmation selon laquelle 20% des soins ne seraient pas couverts... C'est donc dire qu'il y a des différences de perception, même parmi les opposants à l'initiative !

Dans certains EMS, il est quand même assez clairement fait état que les limites sont atteintes s'agissant de la surcharge de travail, en raison - comme je l'ai dit tout à l'heure - de l'âge très avancé des personnes qui entrent en EMS. Et puis, malgré les efforts déployés par ces EMS pour assurer le bien-être des résidents - vous l'avez peut-être lu dans les médias - la Fegems a récemment tiré la sonnette d'alarme pour dénoncer la diminution de 8% de la subvention accordées aux EMS. Alors qu'auparavant son discours officiel tendait à assurer que la charge de travail n'était pas modifiée et que tout allait à peu près bien, elle commence maintenant à s'inquiéter sérieusement, craignant que cette baisse risque d'engendrer une diminution de personnel, donc une diminution des prestations et, en fin de compte, une détérioration des conditions de vie des personnes âgées.

Par ailleurs, j'ai estimé inacceptable que certains commissaires de la commission de la santé se soient permis d'affirmer que cette initiative ne servait, au fond, qu'à assurer les intérêts du personnel soignant dans les EMS plutôt que le bien-être des personnes résidentes. Cette affirmation est à la fois absurde et insultante. En effet, la problématique des conditions de travail du personnel est forcément étroitement liée au bien-être des personnes âgées. C'est donc absurde de dire cela ! Et c'est aussi insultant, parce que cela sous-entend qu'une partie du personnel ne ferait pas correctement son travail, ce qui n'est pas le cas malgré des conditions de travail assez difficiles. Les choses ne sont en effet pas toujours faciles, notamment parce que les décès réguliers sont stressants pour le personnel.

Je noterai encore que si l'APAF, qui regroupe un nombre relativement limité de membres, et la FEGEMS se sont opposées à cette initiative, d'autres organisations de grande importance, telles que l'AVIVO, le Mouvement Populaire des Familles, Alter Ego, la soutiennent.

Effectivement - la rapporteuse de majorité l'a dit - cette initiative a été balayée en commission. Seuls les socialistes l'ont soutenue. Nous regrettons cette position, parce que nous avions évoqué la possibilité de réfléchir à un contreprojet. Et cette initiative, même si certains de ses aspects sont critiqués, ouvre un espace de débat. Elle donne la possibilité de réfléchir à des solutions différenciées pour résoudre les problèmes que pose la gestion des EMS. Malheureusement, l'éventualité du contreprojet a également été balayée.

J'en resterai là pour l'instant, mais je pense que nous continuerons à en parler dans la suite du débat.

Présidence de Mme Anne Mahrer, première vice-présidente

M. Alain Charbonnier (S). Il me semble important de rappeler encore une fois - c'est la deuxième fois, ce soir - le but de cette initiative, qui demande simplement la modification d'un article de la loi sur les établissements médico-sociaux - la LEMS. Cet article 9 modifié dirait, je cite: «... pour assurer la totalité des prestations nécessaires aux pensionnaires et qui sont prodiguées par: 1) les services de l'hôtellerie, de la technique et de l'administration; 2) le service de l'animation socioculturelle; 3) le service des soins infirmiers - évidemment; 4) les autres professionnels de la santé, notamment les ergothérapeutes, les physiothérapeutes, les psychomotriciens, les logopédistes, les diététiciens, les laborantins;...». Qui peut refuser un tel article de loi ? Comment peut-on refuser ces prestations aux personnes âgées ? Mesdames et Messieurs les députés, réfléchissez un peu avant de voter sur cette initiative, parce que le peuple risquerait bien de vous désavouer dans quelque temps sur ce sujet !

Comment en est-on arrivé au dépôt de cette initiative ? Il faut refaire l'historique et revenir sur cet outil PLAISIR, qui n'a de plaisir que le terme. Au début, il était en effet très décrié par les professionnels, par les EMS, etc. Sa mise en place a pris du temps et il a coûté très cher au canton de Genève - il faut tout de même le dire. Il a fallu former du personnel dans les EMS pour qu'il puisse évaluer les soins infirmiers. Je précise que l'outil PLAISIR n'évalue que les soins infirmiers et pas les autres domaines des EMS. Et puis, avec les années, cet outil est devenu le pilote des EMS.

Or, on le supprime aujourd'hui ! Le Conseil d'Etat prend des mesures, qui ne sont évidemment pas votées par le Grand Conseil, comme c'est le cas, d'ailleurs, pour tout un catalogue de mesures qui sont prises - qui ne concernent pratiquement aucun projet de loi - sans passer par le Grand Conseil... Je souhaite que le Grand Conseil reste attentif à toutes ces mesures et aux conséquences qu'elles peuvent engendrer en étant appliquées hors du contexte législatif.

Cet outil PLAISIR n'a jamais été utilisé à 100% dans le canton de Genève, bien que - et Mme Rielle l'a dit - ce taux ne représente pas le summum de la qualité des soins, mais une moyenne acceptable. Par exemple une douche par semaine, cela ne me paraît pas excessif dans le contexte actuel en matière d'hygiène dans notre canton, pour des personnes âgées qui, pour la plupart, sont alitées ou en chaise roulante. Cet outil n'a donc jamais été utilisé à 100%. Il l'a été à 88-89% au début, à 83-84% en 2004, puis toujours la dégringolade en 2005 pour arriver à 80% en 2006. Et comme il n'existe plus d'outil PLAISIR, on peut suspecter que certains EMS sont bien en dessous de 80%, peut-être autour de 75-78%... C'est très difficile à dire puisque l'outil n'existe plus.

Au niveau des soins prodigués, les EMS ont dû faire face à la baisse de la subvention du canton de Genève. Et pour cela, le Conseil d'Etat s'est appliqué à mettre en place des mesures d'économies. Il l'a fait, je crois, en jouant vraiment le jeu. C'est peut-être l'un des secteurs qu'il a le plus respecté par l'intermédiaire de la Fegems et de son comité.

Et aujourd'hui, d'autres mesures sont prises par le Conseil d'Etat, dont la mesure 47 qui abandonne l'outil PLAISIR et une autre qui bloque la subvention pendant quatre ans. Cela correspond à une demande de longue date de la Fegems, des EMS - il faut le dire - qui souhaitent planifier leur activité sur quatre ans et ne pas revenir discuter chaque année de la subvention.

Alors, une enveloppe sur quatre ans, oui, mais discutée, pas décidée, comme cela a été le cas, par le Conseil d'Etat et la majorité de ce Grand Conseil - soit une planification sur quatre ans, sur la base de la subvention 2005, diminuée de 7,5% ! Les EMS se retrouvent donc pendant quatre ans avec une subvention diminuée - encore une ! Et, pour couronner le tout, la Fegems a une convention collective avec les employés, qui lui demandent d'appliquer les mécanismes salariaux de l'Etat - cela a été négocié avec les employés. Aujourd'hui, le Conseil d'Etat a remis en route les mécanismes salariaux. Les EMS se voient donc dans l'obligation de suivre, et ne vont plus pouvoir offrir les prestations demandées par l'initiative, mais, aussi - me semble-t-il - par chacun dans ce canton, en faveur des personnes âgées, puisqu'ils devront faire face à ces augmentations de salaire, soit dit en passant bienvenues pour le personnel, car le niveau des salaires pose également problème. Cette initiative vient donc, pour nous, à point nommé.

La Fegems a évoqué un autre problème... Ses représentants nous ont dit que l'initiative posait de très bonnes questions, mais qu'elle n'apportait pas la bonne réponse... Que la bonne réponse, c'est de développer la formation de façon que le personnel soit plus efficient, qu'il y a encore une bonne marge d'économies à faire à ce niveau... Effectivement, la formation peut être une solution intéressante, pourquoi pas ? Mais que constate-t-on en examinant le budget de l'Etat concernant la plate-forme formation ? Une diminution - disons même une dégringolade - de la subvention, qui est ramenée aujourd'hui de 4 millions et quelque il y a encore trois quatre ans, à 2,8 millions ! Je fais là une parenthèse... 2,8 millions au projet de budget du Conseil d'Etat, mais, dans les chiffres qui ont été envoyés à la Fegems au mois de juillet, la subvention est de 2,3 millions ! On ne sait pas très bien par quel tour de passe-passe, mais c'est ainsi ! Nous aimerions donc bien une réponse précise quant au montant exact de cette subvention !

S'agissant de la qualité des soins et des services que l'on peut apporter aux personnes âgées, un débat important va s'engager prochainement - le 19 novembre, je crois - sur le futur des personnes âgées. Le Conseil d'Etat, par la voix de son président, nous a dit qu'il serait à l'écoute de chacun. A cette occasion, il me semblerait intéressant que la commission puisse aussi se pencher sur ces problèmes et, dans l'élan de cette initiative, proposer un contreprojet si le cas se présente et si les arguments sont de poids. Cela permettrait de compléter cette initiative par un contreprojet.

D'après ce qu'on a entendu, la nouvelle politique en la matière consisterait à développer fortement l'aide à domicile, à augmenter les relations entre l'aide à domicile, les EMS et, évidemment, les médecins; enfin, tous les acteurs de la politique en faveur des personnes âgées.

La présidente. Excusez-moi, Monsieur le député, il va falloir conclure !

M. Alain Charbonnier. Je conclus maintenant. Je reprendrai la parole tout à l'heure !

Mme Patricia Läser (R). Mesdames et Messieurs les députés, non, nous ne sommes pas les méchants ! Oui, comme vous, nous voulons que nos aînés aient une bonne qualité de vie jusqu'à la fin ! Oui, comme vous, nous sommes conscients que le vieillissement de la population est toujours plus important ! Et oui, comme vous, nous constatons que les résidents des EMS sont toujours plus dépendants !

Mais nous refusons que les personnes âgées soient prises en otage pour faire avancer les conditions et les revendications de travail du personnel ! Il est plus facile de réclamer des bras supplémentaires pour assumer une charge de travail que de s'asseoir autour d'une table pour réfléchir ensemble aux moyens possibles de parvenir à une plus grande efficacité. Il suffit souvent d'une simple réorganisation pour gagner du temps sans alourdir la charge de travail. Mais, pour cela, encore faut-il avoir la volonté d'étudier des pistes.

Au fil des diverses auditions, nous nous sommes rendu compte que ces éventuelles discussions pouvaient aboutir à une meilleure gestion du travail interne dans les EMS. Il apparaît aujourd'hui aussi que de nombreuses synergies pourraient être mises en place entre les différents EMS, et cela principalement pour le pôle administratif ou le pôle des animations. Ces synergies déboucheraient inévitablement sur des libérations de postes pouvant être affectés au pôle des soins.

Comme vous pouvez l'entendre, des solutions existent. Et les finances actuelles de l'Etat ne permettent pas des dépenses supplémentaires. N'oublions pas, non plus, que Genève est l'un des cantons, si ce n'est le canton qui aide le plus ses personnes âgées ! Une nouvelle dépense au niveau des EMS réduirait d'autant l'aide à domicile et obligerait certains de nos aînés encore quasi valides à entrer en EMS. Et ce n'est, de loin, pas le but recherché !

Mesdames et Messieurs, je le répète, ne prenons pas en otage nos aînés ! Les normes dans les EMS genevois sont plus que correctes ! Donnons-nous plutôt les moyens de former du personnel, de leur donner les connaissances indispensables à l'accomplissement de leur métier, avec comme résultat: motivation, plaisir, mais aussi meilleure efficacité et, donc, moins de fatigue ! Cessons donc de renforcer des équipes sans réflexion globale préalable !

Pour cette raison, je vous demande de refuser cette initiative.

M. Edouard Cuendet (L). En lisant le titre de l'initiative 125 «Pour une meilleure prise en charge des personnes âgées en EMS», tout le monde devrait en principe être d'accord. Et, comme ma collègue radicale, nous n'acceptons pas d'assumer le rôle de méchants tel que les députés d'en face veulent nous l'attribuer.

Evidemment, la charge émotionnelle est importante sur ce dossier, puisque chacun connaît une personne dans un EMS, que ce soit un proche, un parent, un ami. Et puis, nous pensons aussi à notre avenir: beaucoup d'entre nous seront peut-être un jour dans un EMS. Mais cela ne doit pas nous empêcher d'avoir un débat un tant soit peu rationnel. Et, pour ce faire, il est indispensable d'établir des comparaisons avec ce qui se réalise ailleurs, ce que nous avons de la peine à faire à Genève.

Les travaux de la commission nous ont permis d'obtenir des renseignements intéressants à ce sujet. Tout d'abord, il apparaît que Genève - comme l'a dit ma préopinante - est le canton suisse qui consacre le plus de moyens au bien-être de ses aînés, ce qui est une bonne chose. Par exemple, il consacre 12% de plus que Bâle-Ville et 17% de plus que Zurich. C'est à Genève également que l'aide à domicile est la plus développée, et on peut s'en féliciter, mais il faut aussi prendre en compte cet élément. Ce n'est donc pas un hasard si le séjour en EMS coûte entre 8000 et 8500 F par mois à Genève.

Faisons une comparaison du coût par jour en EMS avec nos voisins romands ! Une journée en EMS - ce sont les chiffres de 2003 qui nous ont été fournis en commission - coûte en moyenne 215 F en Valais, 227 F dans le Jura, 255 F à Neuchâtel, 259 F dans le canton de Vaud, 272 F à Fribourg et 352 F à Genève ! Une fois de plus, Genève se distingue: le coût de ses prestations est beaucoup plus élevé que dans les autres cantons romands !

On évoque le prix du loyer, etc., mais, de l'aveu même des initiants qui ont été entendus par la commission, ce coût exorbitant doit avant tout être mis sur le compte des coûts salariaux dus aux conventions collectives. Or l'initiative 125 va précisément péjorer cette situation, puisque son impact financier est estimé à environ 60 millions par année - avec les chiffres actuels, donc...

En commission, nous avons entendu un député proposer, comme solution miracle, que ces montants supplémentaires soient assumés par les assurances-maladie qui, à l'heure actuelle - c'est vrai - ne couvrent que 50% des frais. Il a donc imaginé que les assurances-maladie couvrent 100% des frais pour régler le problème, ainsi tout le monde serait content... C'est à l'évidence un peu court, car l'argent des assurances-maladie ne tombe pas du ciel ! Le département a calculé que, pour couvrir ces 60 millions, il faudrait que les primes d'assurance s'élèvent à environ 700 F par mois. Evidemment, la majeure partie des gens ne pourraient pas les payer, et c'est serait encore à l'Etat «d'allonger» la différence.

Il faut donc trouver les 60 millions en question ailleurs. Etant donné la situation budgétaire, il faudrait les trouver dans d'autres secteurs, ce qui, on peut l'imaginer, prétériterait ces secteurs, et l'équilibre des dépenses ne serait plus respecté. Cela risquerait de provoquer - ce qu'il faut absolument éviter - une lutte entre générations. Entre, par exemple, la formation et les soins aux personnes âgées, ce qui serait totalement contre-productif.

Pour rester dans les chiffres, on relèvera aussi que le budget de la santé, qui comprend aussi les soins aux personnes âgées, n'est pas négligeable dans le canton de Genève, puisqu'il s'élève à plus de 1,5 milliard. C'est tout de même absolument colossal !

L'Association pour la défense des personnes âgées en EMS s'est opposée fermement à cette initiative pour différents motifs, dont le coût exorbitant du projet, mais, surtout, elle dément formellement l'affirmation selon laquelle 20% des soins nécessaires ne sont pas assurés.

Un élément n'a encore pas été évoqué ici. La représentante de l'APAF a souligné que, pour ses membres... Alors évidemment, l'Alternative dit maintenant que cette association n'est pas représentative, alors qu'au moment où l'on a décidé de son subventionnement on disait que c'était la meilleure association du monde et qu'elle était très représentative... Mais on n'est pas à une contradiction près ! La représentante de l'APAF - disais-je - a souligné que la priorité était surtout la création de nouveaux lits en EMS pour répondre à ce besoin lancinant de la population.

On touche là un point absolument crucial du débat. En période de situation financière difficile, il faut faire des choix, car on ne peut pas tout faire. Préfère-t-on dépenser des sommes tout à fait considérables - des dizaines de millions - pour augmenter à outrance les services dans des EMS déjà existants - services qui sont déjà nombreux et de qualité, de l'aveu de beaucoup - ou juge-t-on préférable de créer de nouveaux EMS pour répondre aux besoins de la population ?

Jusqu'à présent, il me semble que le Grand Conseil a fait son choix, puisque nous avons voté récemment des crédits pour construire de nouveaux EMS, et nous ne pourrons pas faire les deux. Je pense donc que le Grand Conseil se renierait, renierait la politique qu'il a menée en la matière jusqu'à présent, s'il venait à soutenir l'initiative 125.

Pour tous ces motifs, je vous invite à rejeter fermement l'initiative 125 et à ne pas entrer en matière sur le contreprojet que la Fegems a récemment appelé de ses voeux en faisant un lobbying intensif auprès de certains députés. Hélas, la Fegems n'est pas à une contradiction près, puisqu'on se rappellera - en tout cas les députés qui siègent à la commission de la santé - qu'elle a tiré à boulets rouges contre l'initiative en la traitant de tous les noms. Et maintenant, pour des motifs purement opportunistes, elle vient agiter l'idée d'un contreprojet... Cette versatilité de la Fegems devrait conduire le Conseil d'Etat à se pencher un peu plus sur le fonctionnement de cette organisation dont la principale vocation est de rationaliser les coûts ! Et l'on peut se demander si elle remplit sa mission de manière optimale.

Je le répète, le groupe libéral s'oppose donc à l'initiative 125 et également à l'idée d'un contreprojet. (Applaudissements.)

Présidence de M. Michel Halpérin, président

Mme Brigitte Schneider-Bidaux (Ve). Ce soir, nous prenons en considération l'initiative «Pour une meilleure prise en charge des personnes âgées en EMS».

Pour les Verts, le principe du respect du choix du lieu de vie et de la façon d'organiser sa vie est extrêmement important. Nous avons tous envie de vivre le mieux possible et dans le lieu de notre choix. Malheureusement, au soir de la vie, ce choix n'est pas ou n'est plus toujours possible et, parfois, l'installation en EMS est inéluctable.

Donc, comment ne pas être d'accord avec une initiative qui stipule qu'il faut: «... le personnel nécessaire en nombre et en qualification, rémunéré conformément aux conventions collectives ou, à défaut, aux normes équivalentes en vigueur dans les EMS...» ?

Pour assurer les besoins de leur résidents, les EMS se sont dotés d'un outil, dont vous avez amplement entendu parler ce soir, le bien nommé outil PLAISIR - PLAnification Informatisée de Soins Infirmiers Requis, en termes techniques. Ce mode de détermination en personnel par rapport aux besoins des résidents, avec toutes ses imperfections, avait le mérite d'être reconnu par tous et permettait d'avoir une photographie de l'évolution des besoins de la population des résidents d'un établissement.

La dotation en personnel des établissements se situait - on l'a déjà dit - entre 85%, il y a quelques années, et plus ou moins 80%, actuellement. Cette dotation permettait jusqu'à maintenant des soins de qualité. Les visites que nous avons pu faire dans différents établissements nous l'ont prouvé.

Avec le nouveau plan quadriennal, cet outil de planification a été abandonné, puisque la subvention octroyée a été déterminée pour les quatre prochaines années.

Il ne sera plus possible à l'avenir de savoir si un établissement se trouve dans la cible du personnel nécessaire pour assurer des soins. Grâce à la politique volontariste de ces dernières années en matière d'aide à domicile, nous savons que les personnes entrent en EMS le plus tard possible. Les personnes en EMS sont donc de plus en plus dépendantes et ont besoin de plus en plus de soins. Ironie du sort, faute de pouvoir engager du personnel, les institutions seront poussées à accepter de nouveaux résidents ayant besoin de moins d'attention; les hôpitaux seront toujours surchargés et les patients dépendants attendront encore longtemps une place dans un lieu de vie !

Mesdames et Messieurs, les Verts sont partagés devant une telle initiative... Ils s'abstiendront par conséquent - une fois n'est pas coutume ! - malheureusement. Par contre, si une proposition de contreprojet est faite - cela a été évoqué ce soir - nous la soutiendrons.

M. Gilbert Catelain (UDC). Le sort de cette initiative est donc dû à la situation catastrophique des finances publiques. Car il est bien clair que si notre canton avait les mêmes conditions-cadres que le Valais ou Fribourg, nous n'en serions pas réduits à devoir diminuer les subventions de ces EMS et nous ne nous poserions même pas la question des normes PLAISIR ! Nous devons malheureusement constater que cette situation va perdurer et que les mesures qui devront être prises à l'avenir risquent effectivement d'être lourdes de conséquences pour tous les secteurs de l'Etat et de la santé en particulier.

J'aurais également souhaité que les députés qui ont des liens directs professionnels, qu'ils soient physiothérapeutes ou administrateurs d'un EMS, s'abstiennent de prendre la parole dans ce débat. Il semble que l'article 24 est quelque peu bafoué.

Que prévoit l'initiative ? Contrairement à ce que l'on veut bien nous faire croire, elle dit la chose suivante, je cite: «L'autorisation d'exploitation est délivrée au requérant qui, en conformité avec la planification sanitaire cantonale: h) affecte à la prise en charge des pensionnaires le personnel nécessaire en nombre et en qualification, rémunéré conformément aux conventions collectives ou, à défaut, aux normes équivalentes en vigueur dans les EMS...». C'est exactement ce type de dispositions qui engendre la pénurie, comme nous pouvons le constater dans le domaine des crèches ! Il est effectivement impossible pour le secteur privé de développer des établissements pour la garde d'enfants, car les conventions collectives issues de communes, notamment de la Ville de Genève, imposent des normes impossibles à remplir pour un acteur privé.

Cette initiative a véritablement un effet pervers qui tend à étatiser complètement les structures EMS, ce qui empêche que de nouveaux acteurs se joignent aux acteurs actuels pour pouvoir développer l'offre et décharger le fardeau financier que représentent les EMS pour l'Etat. Mais il faut tout de même relativiser le poids de ce fardeau, puisqu'il représente en l'occurrence 90 millions de francs par année. On peut en effet considérer que ce budget de l'Etat n'est pas énorme. Il faut simplement prendre conscience qu'avec le vieillissement de la population il faudra de toute manière accroître le subventionnement affecté aux EMS. La question est de savoir comment nous allons affecter ce subventionnement et non pas forcément combien.

Selon les initiants, les autres cantons respectent mieux les normes PLAISIR, ce qui est assez paradoxal: les autres cantons, où le coût de la place est nettement moins cher, respectent mieux les normes PLAISIR ! Nous pouvons donc, à travers cet élément, en déduire qu'il n'y a pas forcément une relation de cause à effet entre financement, subventionnement et respect des normes PLAISIR. Il serait du reste intéressant que la commission de contrôle de gestion se penche sur ce problème et examine comment il se fait qu'à Genève, où la place d'EMS coûte jusqu'à 60% de plus qu'ailleurs - 350 F au lieu de 210 F - on n'arrive pas à respecter des normes comme c'est le cas ailleurs dans les autres cantons. Je rappelle que, dans certains secteurs, les barèmes sont équivalents: un facteur qui travaille à Lausanne gagne exactement le même salaire, au franc près, qu'un facteur qui travaille à Genève ! Même un policier genevois ne gagne pas 60% de plus qu'un gendarme vaudois ! Il y a donc vraiment un gros problème entre l'affectation de la subvention et le résultat de cette affectation !

En outre, la rapporteure de majorité nous dit la chose suivante: 39,5% des coûts sont affectés aux soins. Ce taux correspond à 210 F, et 210 F par jour c'est, grosso modo, ce que dépense un EMS dans le Valais pour garantir les soins, l'infrastructure et les frais de personnel ! Il a donc effectivement un gros problème de coût !

La question du financement est encore plus crasse, lorsqu'on s'adresse aux caisses maladie... Je me souviens qu'il y a peu de temps dans cette enceinte, tout le monde disait que les coûts des caisses maladie à Genève étaient trop élevés et qu'il fallait faire en sorte de les baisser, etc. Or, si l'on acceptait cette initiative ou si l'on demandait que la LAMal, les assurances-maladie, prennent en charge les 100% de ces coûts, la prime moyenne de l'ensemble des citoyens genevois atteindrait 700 F par mois ! Qui, dans ce canton, pourrait soutenir une telle mesure qui ferait passer les primes d'assurance-maladie de 400 F par mois actuellement à 700 F ?

L'autre problème qui n'a pas été soulevé est celui de la participation des communes. Dans certains cantons, les communes participent au financement des EMS. Quelques communes très riches, comme la Ville de Genève, pourraient y participer. Elle consacre 250 millions pour la culture, mais zéro franc pour les EMS ! On pourrait donc très bien prévoir une répartition différente. Et puis, finalement, cette situation est aussi le résultat d'un manque de concurrence. Un manque de concurrence qui fait que le marché est complètement cloisonné et, surtout, protégé, puisque les acteurs sont essentiellement publics.

La question maintenant est de savoir - l'UDC ne va pas soutenir cette initiative, c'est clair, les commissaires l'ont clairement exprimé en commission - si l'UDC pourrait soutenir l'idée d'un contreprojet. Pourquoi pas ? Nous n'avons pas très bien entendu les arguments de la rapporteure de majorité sur ce point... Parce que, finalement, on pourrait très bien soutenir l'idée d'un contreprojet dont le but serait précisément d'inciter des acteurs privés à investir également dans ce champ d'activité. Et, aussi, d'instaurer, comme pour les TPG, la notion de contrat de prestation.

Le président. Il va vous falloir conclure, Monsieur le député !

M. Gilbert Catelain. Je vais conclure. L'idée serait la suivante: la subvention de l'Etat serait affectée à l'EMS pour autant qu'il respecte un certain nombre de normes, et non pas l'inverse. Ce n'est pas le personnel qu'il faudrait défendre dans le cadre de l'initiative et dans le cadre de la loi, mais la subvention, comme pour les TPG, devrait être liée à une prestation qui devrait être fournie par les EMS.

Dans ce sens, l'UDC pourrait soutenir un éventuel contreprojet.

M. Christian Brunier (S). C'est un régal d'intervenir après l'UDC... Messieurs de l'UDC, lorsque vous êtes en campagne électorale, vous dites aux personnes âgées, pour obtenir leur vote, que votre parti va prendre leur défense... Vous faites la même chose, d'ailleurs, avec les chômeurs, avec les plus défavorisés de la population. Mais, concrètement, vous défendez toujours - toujours ! - les plus nantis et vous combattez ceux que vous prétendez défendre: les chômeurs, les personnes défavorisées, et, comme c'est le cas aujourd'hui et une fois de plus, les personnes âgées !

M. Catelain, de l'UDC, nous dit que son groupe ne peut pas soutenir cette initiative, notamment parce qu'elle demande de respecter les conventions collectives et les usages de la branche dans les EMS... Mais heureusement ! C'est le respect du droit ! Et, c'est d'ailleurs actuellement le cas ! Heureusement, les conventions collectives et les usages de la branche sont respectés dans les EMS ! (L'orateur est interpellé.) L'initiative ne dit absolument pas cela - vous avez cité un passage de l'exposé des motifs ! L'initiative demande de garantir la totalité des prestations indispensables aux résidents ! Je vous le répète: «garantir la totalité des prestations indispensables aux résidents»  !

Est-ce que le fait de garantir la totalité des prestations pour les personnes âgées dans les EMS est excessif ? Le parti socialiste ne le pense pas ! Le parti libéral nous a fait remarquer tout à l'heure qu'il fallait faire attention, qu'il y a beaucoup de charge émotionnelle en ce sujet, car nous pensons à ce que nous allons devenir lorsque nous serons âgés... Alors, nous allons sortir du débat émotionnel, je suis d'accord, Monsieur Cuendet ! Et je vais, comme vous l'avez fait, faire une analyse rationnelle et pragmatique, puisque c'est le but du débat de ce soir. Je vous rappelle tout de même qu'au-delà de notre débat, il y a des êtres humains ! Et finalement, il faut tout de même un peu d'émotionnel dans ce type de dossier.

Que demande cette initiative ? D'assurer 100% des soins ! Certains jugent cette demande excessive... L'équipe de recherche opérationnelle en santé - ce n'est ni un syndicat ni un parti de gauche, c'est une équipe mandatée par le département - nous dit que 100% des soins ne constituent pas les soins optimaux... Ce n'est pas le grand luxe, il ne s'agit pas d'hôtels cinq étoiles ! Cela représente simplement l'application de pratiques permettant d'assurer un bien-être et une sécurité convenables aux personnes âgées. Le bien-être et la sécurité offerts aux personnes âgées, c'est ce que représentent les 100% des soins demandés par l'initiative ! Etes-vous opposés à cela ? C'est ce que vous laissez entendre... (Remarque.) Non, nous ne pouvons pas y être opposés ! Vous le savez, nous n'assurons pas 100% de ces soins actuellement et nous sommes plus proches de 80% de ces prestations. Cela veut dire que nous sommes à 80% des soins convenables. C'est grave ! Et 100%, cela signifie, par exemple, une douche toutes les semaines... Alors, imaginez ce que cela signifie à 80% ! Avec 100%, cette initiative demande trois mobilisations: trois contacts par jour, qui sont très importants pour les personnes âgées ! Avec 80%, cela représente 2,4 mobilisations... Vous pensez que c'est suffisant, vous avez une vision assez peu humaine de ce que doivent être les relations dans un EMS.

Vous avez fait des comparaisons avec les autres cantons en montrant que la journée en EMS y coûte moins cher... C'est paradoxal, à Genève cela coûte toujours plus cher... Oui, mais ce que vous ne dites pas, c'est que les conditions de logement sont différentes dans les autres cantons ! Le logement coûte plus cher à Genève, et il n'y a pas de raison pour que les terrains destinés à la construction d'EMS soient moins chers que pour le logement ! Et puis, les salaires sont différents ! On nous a cité quelques professions où les salaires sont les mêmes... C'est malheureux, Monsieur Catelain, car les fonctionnaires fédéraux - en tout cas ceux qui ont un petit salaire - qui gagnent la même chose à Genève que dans d'autres cantons où le niveau de vie est différent, eh bien, ils le subissent assez gravement ! Alors, ne donnez pas les mauvais exemples, prenez plutôt les bons ! M. Cuendet ne nous dit pas que les employés de banque sont bien payés à Genève, et mieux que dans la plupart des cantons en Suisse... Mais cela ne vous choque pas !

M. Edouard Cuendet. Ils payent des impôts ! (Exclamations.)

M. Christian Brunier. Monsieur Cuendet, vous dites que les banquiers payent des impôts, mais croyez-vous que le personnel des EMS n'en paye pas ? (Rires.) Ils ont un salaire modeste, mais ils payent aussi leurs impôts, alors ayez un minimum de respect pour ces personnes qui travaillent dans des conditions terriblement difficiles et qui ne sont souvent pas payées en conséquence ! (Brouhaha.)

En faisant des comparaisons avec les autres cantons, vous oubliez de dire qu'il ne s'agit pas de la même population, grâce - je dis bien «grâce» - aux soins à domicile. Les personnes âgées à Genève entrent de plus en plus tard dans les EMS, elles sont de plus dépendantes, ce qui est plus compliqué à gérer. Alors que dans certains cantons, vous le savez, les soins à domicile sont peu développés; la population en EMS y est donc plus jeune et exige beaucoup moins de soins, ce qui coûte évidemment moins cher. La comparaison avec les autres cantons est donc plus qu'aléatoire !

Les chiffres c'est une chose, mais il faut aller sur le terrain. Nous y sommes allés et nous avons rencontré du personnel et des directions très impliqués, qui travaillent très bien et qui se sentent très concernés par le bien-être des personnes âgées. Il faut les en féliciter, car c'est un métier terriblement difficile, il n'est pas toujours évident de soigner des personnes qui sont souvent grabataires. Nous avons néanmoins pu constater que le personnel était stressé, à la limite du supportable. Nous devons donc réagir à cela au niveau du monde politique.

Certains à droite, reconnaissent - en tout cas en coulisses - qu'il faut faire quelque chose, mais ils disent que cela coûte trop cher - 60 millions, c'est le montant qui a été évoqué par le Conseil d'Etat. Quand nous avons demandé sur quelle base ce chiffre avait été donné, le Conseil d'Etat nous a répondu d'une manière peu convaincante. Ce chiffre a été sorti à la louche... Mon ami Alain Charbonnier donnera plus d'explications sur ce point tout à l'heure. Et même, s'il fallait dépenser 60 millions ! Comme par hasard, M. Cuendet trouve que c'est une dépense hyper choquante... Par contre, quand les impôts sont diminués de 1,2 milliard, là, il n'est pas choqué ! Quand on parle du directeur de l'UBS qui touche 22 ou 27 millions par année, il n'est pas choqué non plus ! (Exclamations.) Eh bien, moi, même s'il fallait dépenser 60 millions de plus, je pense que les personnes âgées qui se trouvent dans les EMS valent bien trois années de salaire d'un directeur de l'UBS ! Trois ans de salaire d'un directeur de l'UBS pour financer les EMS à Genève !

Le président. Monsieur le député, il vous faut conclure !

M. Christian Brunier. Le parti socialiste était assez ouvert pour discuter d'un contreprojet. Visiblement, vu le contexte politique actuel, ce sera très difficile. Je vous propose donc de nous retrouver devant le peuple, à propos du débat sur les EMS, sur les personnes âgées, et des conditions qu'il faut leur offrir. Et je pense que nous gagnerons ce vote devant la population ! (Applaudissements.)

Le président. Je salue la présence à la tribune de notre ancien collègue, M. Jean-Claude Dessuet. (Applaudissements.) Le Bureau constate que les intervenants sont encore: M. Michel Forni, M. Pierre Kunz, M. Eric Stauffer, M. Alain Charbonnier, Mme Laurence Fehlmann Rielle, Mme Véronique Schmied, M. Gilbert Catelain, Mme Pürro et le Conseil d'Etat. La liste est close.

M. Michel Forni (PDC). Suite aux différentes interventions, on peut résumer le texte de cette initiative sous l'angle d'une meilleure prise en charge des patients en EMS. Il y a le fond, la forme et des prises de position un peu épidermiques ce soir.

Ce texte s'appuie cependant sur un outil qui s'appelle «PLAISIR», qui a pour but d'apporter aux pensionnaires de ces établissements du bien-être, une sécurité convenable, et il s'associe en index quantifiable de besoins et de soins. L'estimation, c'est qu'environ 20% des soins nécessaires ne seraient pas donnés aux personnes âgées, et le risque est que d'autres prestations pourraient être menacées. Ce texte demande donc une augmentation en moyens matériels et en personnel soignant. Il y a bien sûr un prix, et ce prix est un surcoût annuel estimé aux environs de 60 millions pour notre canton.

Cette initiative découle, et y est également associée, de ce qui se passe dans le monde de la santé et qui a bien été développé par notre Conseil d'Etat dans son rapport au Grand Conseil - je vous le rappelle - sur la politique en faveur des personnes âgées du canton de Genève. Ces objectifs stratégiques sont clairs et vont dans le sens, d'une part, d'un développement, mais aussi d'une régulation, car les progrès de notre médecine coûtent cher. Et si nous sauvons du bas âge, nous vieillissons et nous remplaçons des maladies de jeunesse par des maladies dégénératives.

Je ne veux pas entrer dans les chiffres qui vous ont déjà été communiqués concernant soins, prise en charge par la collectivité, éventuel surcoût des primes d'assurance. Les démocrates-chrétiens estiment qu'il existe à ce projet d'autres alternatives. Car il y a un triplé inséparable: efficacité, coût et, surtout, équilibre budgétaire. Et il convient de pouvoir le respecter ! Pour ce faire, il y a peut-être des possibilités de rationaliser, et elles existent sur le plan logistique. Pensez à «direction» - cela a déjà été dit... Pensez à «cuisine », pensez à «médicaments» ... Il y a une nouvelle affectation, c'est-à-dire un profilage qualitatif du personnel, avec l'introduction de plus d'aides-soignantes. Il y a aussi attention des nouveaux indicateurs nationaux qui ciblent la qualité et la sécurité de nos programmes médicaux: l'un s'appelle «RIS», c'est-à-dire Rationnement Implicite de Suisse, et a été étudié à Lausanne; l'autre s'appelle «Rationing of Nursing Care in Switzerland », abrégé «RICH», et a été étudié à Bâle. Ces nouveaux indicateurs font que la sélection des prestations devrait permettre d'éviter un rationnement dans un système de soins tel qu'il semble malheureusement se mettre en place sur le plan national. Je dis bien: restriction de certains soins.

Pour donner suite à cette initiative, il convient donc de trouver, grosso modo, 60 millions, soit environ un quart de subsides qui sont accordés, par exemple, dans les assurances-maladie, comme cela a été dit. Mais ce serait une coupe sombre, sombre à éviter par son effet pervers, puisqu'elle pourrait également faire boule de neige sur d'autres prestations. Ou alors, une redistribution d'autres actes, tels que les actes à domicile, qui permettent cependant, il faut le reconnaître, le maintien de nombreuses personnes dans leur cadre de vie. Cela aboutirait à une crispation et une transformation du parcours de nos infirmières de soins coordonnés en un parcours d'obstacles.

C'est pourquoi je vous invite à rejeter cette initiative et à privilégier un contreprojet qui tienne compte d'une forme d'innovation et de perspective, et qui permette surtout d'éviter un phénomène de rationnement qui est exactement l'opposé de ce type de projet mais qui reste, malheureusement, un élément très probable qui se profile à l'horizon très rapidement.

C'est la raison pour laquelle les démocrates-chrétiens vous proposent de choisir une autre alternative et de refuser cette initiative.

Le président. Merci, Monsieur le député. Avant de poursuivre nos interventions, je voudrais saluer la présence d'une délégation des Verts belges et européens à la galerie du public du Grand Conseil, en particulier: Mme Monica Frassoni, coprésidente des Verts européens et députée au Parlement européen; M. Pierre Jonckheer, député au Parlement européen, vice-président du groupe des Verts parlementaires européens; Mme Isabelle Durant, ancienne vice-premier ministre et ministre des transports et de la mobilité de Belgique, sénatrice de Belgique et coprésidente des Verts belges; M. Jean-Marc Nollet, député fédéral et chef du groupe Vert à la Chambre des représentants de Belgique; M. Josy Dubié, sénateur de Belgique et chef de groupe à la Chambre, député régional bruxellois; Mme Vula Tsetsi, secrétaire générale du groupe des Verts au Parlement européen et M. Christophe Derenne, membre du Bureau des Verts belges. Bienvenue ! (Applaudissements.)

M. Pierre Kunz (R). Je ne parlerai pas du titre et préambule d'hier soir, rassurez-vous... Je ne parlerai pas non plus des personnes âgées... Car, en réalité, malgré ce que prétend leur texte et malgré ce qu'affirment certains de nos collègues ici, les initiants ne sont pas vraiment préoccupés par le sort des résidents des EMS. En fait, les initiants sont intéressés par une seule chose: le personnel des EMS !

Alors, parlons-en ! Parlons-en, mais de manière honnête, ouverte, objective - comme vous le préconisiez, Monsieur Brunier. Oui, Monsieur Brunier, c'est vrai, il n'y a pas de doute, le personnel des EMS est essentiellement constitué d'une majorité de collaborateurs dévoués et désireux d'accomplir au mieux leur tâche à l'égard des personnes dont elles ont la charge. Oui, Monsieur Brunier, c'est vrai ! Il n'y a pas de doute non plus que la masse de travail au sein des EMS a tendance à croître et qu'elle est de toute façon importante. Mais faut-il en conclure pour autant, comme le font les initiants, qu'il est nécessaire d'accroître les ressources humaines et financières ? Faut-il en conclure qu'une telle action sur la volumétrie permettra de résoudre tous les problèmes, réels, dans la gestion des EMS ? Car des problèmes nombreux existent, en effet, dont le personnel souffre.

Je vais en citer quelques-uns, si vous le voulez bien... Le poids des lourdeurs bureaucratiques imposées, notamment, par le régime de l'OCPA, par l'outil PLAISIR, par les normes techniques en matière hôtelière ! Les lourdeurs administratives que les EMS, souvent dirigés par des personnes dévouées, certes, mais peut-être pas toujours formées aux nécessités d'un management moderne, s'infligent à eux-mêmes. Par exemple, une démarche récente qui s'est développée au sein de ces établissements et qui s'appelle la «démarche qualité», tâche qui, normalement, est celle d'un management compétent ! L'absentéisme aussi, extrêmement élevé, puisqu'on est plus près de 15% que de la moyenne de l'Etat de Genève, qui est déjà très élevée, à 7,5% ! Un absentéisme dû autant à un statut du personnel manifestement inadéquat, démotivant, qu'à une gestion insuffisante, inadéquate, des ressources humaines.

Mesdames et Messieurs, les radicaux soutiennent le Conseil d'Etat dans sa décision de bloquer les subventions aux EMS à leur niveau de 2005, pour quatre ans. Ils sont en effet convaincus que de gros gisements d'efficience existent dans les EMS, qui peuvent être exploités grâce à une gestion administrative moderne de ces établissements. Et cela, bien sûr - bien sûr ! - sans réduire les exigences relatives à la gestion sanitaire des EMS. Mais cette gestion doit être débarrassée d'une partie du carcan administratif qui pèse sur ces EMS: la direction de ceux-ci doit pouvoir agir dans plus de libertés et plus de responsabilités, avec une autonomie plus large dans la gestion en général et dans celle des ressources humaines en particulier. Voilà le vrai chantier qui attend le Conseil d'Etat et ce parlement !

L'initiative 125 ne constitue en aucun cas la solution au problème des EMS: au contraire ! Cela a déjà été dit: son acceptation ne ferait qu'aggraver encore leur situation, qu'alourdir davantage leur gestion et accroître encore un peu plus le déficit déjà colossal avec lequel nous vivons depuis bientôt deux décennies.

Voilà pourquoi, comme l'a demandé ma collègue, il faut rejeter cette initiative.

M. Eric Stauffer (MCG). Je vais essayer d'être plus bref, parce que mes prédécesseurs ont exprimé leur point de vue relativement longuement. Je dirai d'emblée que l'on a la mauvaise habitude de toujours refuser les projets en disant qu'ils ne constituent pas la bonne solution aux problèmes, qu'ils ne sont pas le bon moyen... Lorsqu'on parle des personnes âgées, je pense qu'il faut avoir du respect: quand on boit l'eau du puits, il ne faut pas oublier ceux qui l'ont creusé ! Bien sûr, on aurait pu faire mieux, mais, quoi qu'il en soit, il faut saluer ceux qui font quelque chose, car il est toujours plus facile de critiquer.

Vous l'aurez compris, nous allons soutenir cette initiative et nous serons, sur cet objet, en parfaite harmonie avec le parti socialiste.

Je trouve assez choquants certains des propos qui ont été tenus ici, notamment par nos voisins de l'UDC. Je me souviens que vous aviez, dans cette enceinte, même proposé qu'il y ait une douche pour deux chambres dans les EMS... C'est parfaitement scandaleux ! Vous n'avez qu'à reprendre le Mémorial, cela y figure, et tous les citoyens peuvent le consulter sur le site du Grand Conseil.

Vous prônez des coupes budgétaires... Effectivement, comme l'a relevé le député Brunier, en période de campagne électorale vous êtes amis avec tout le monde, mais en fait vous montrez votre vrai visage dans cet hémicycle ! A vous entendre, Messieurs de l'UDC, il faut procéder à des coupes dans le budget, il faut réduire les prestations, il faut, dans un cadre plus général, autoriser les frontaliers à travailler à l'Etat, il faut reprocher, comme vous l'avez fait, Monsieur Catelain, à des physiothérapeutes et des directeurs ou directrices d'EMS de siéger dans la commission de la santé... Je vous dirai simplement, Monsieur Catelain, que, pour un député frontalier, vous avez beaucoup d'outrecuidance ! (Rires. Exclamations.) Parce que nous, au moins, nous habitons dans le canton pour défendre nos concitoyens, nous n'habitons pas dans un état étranger ! (Brouhaha.)

Une voix. C'est pas la première fois !

M. Eric Stauffer. Vous avez de la chance, Monsieur le député, que la Constitution suisse soit ainsi faite qu'un député genevois n'a pas le droit d'habiter dans le canton de Vaud, sous peine d'inéligibilité, mais qu'il a le droit d'habiter dans un état étranger ! (Exclamations.)

M. Alain Charbonnier (S). M. Catelain m'a effectivement reproché tout à l'heure de siéger à la commission de la santé, parce que je suis physiothérapeute... Je suis navré, Monsieur Catelain ! Si j'interviens sur ce sujet, c'est au titre de la personne âgée que je serai un jour, comme nous tous ici du reste. Je reconnais que l'article 24 m'empêche d'intervenir, mais il me paraît difficile de faire autrement, car nous serions nombreux ici à devoir nous taire !

Je ne voudrais pas tomber trop bas eu égard aux critiques formulées quant à votre domicile véritable ou pas, c'est évidemment difficile à prouver. Mais votre adresse est quand même à la direction des douanes, au chemin de Poussy... Ce qui est tout de même étonnant comme adresse pour un douanier, mais bon, on fera avec !

S'agissant du financement des EMS, par rapport au coût de cette initiative, le Conseil d'Etat nous a donné une réponse dans son rapport, disant que cela représentait, à la louche, comme ça, une augmentation de 20% par rapport à l'outil PLAISIR demandé par cette initiative, c'est-à-dire à peu près 600 postes, soit environ 60 millions. Les aides-soignantes seront probablement très contentes d'apprendre que leur revenu va passer dorénavant à 100 000 F par an - bruts, j'imagine, ne vous réjouissez quand même pas trop vite ! Et 100 000 F, cela me paraît tout de même énorme pour ces postes. Je pense donc que ces calculs ont été faits à la louche et qu'ils manquent totalement de précision. Nous n'avons pas eu de réponse précise jusqu'à maintenant, et ce serait peut-être une bonne chose que nous en obtenions une. D'autant plus que, par rapport au financement des EMS, sur lequel on est passé comme chat sur braise, il faut prendre en compte le deuxième pilier qui, progressivement, devient de plus en plus important pour les personnes qui entrent en EMS ! Ce qui va changer, voire bouleverser, le financement des EMS, et pourrait fortement alléger la facture. Les opposants prétendent qu'elle sera très importante... A mon avis, elle ne le sera pas autant que cela, elle n'atteindra pas 60 millions !

J'en viens aux économies prônées par M. Kunz - ce sont évidemment toujours les mêmes... Je tiens tout de même à dire que ce débat avait été relativement modéré jusque-là, mais, comme d'habitude, c'est le grand dérapage: M. Kunz s'en prend aux EMS, au personnel des EMS, aux directeurs ou directrices d'EMS. C'est une attitude tout à fait scandaleuse ! Des progrès immenses ont été accomplis au sein des EMS ces dix dernières années, ils sont soutenus par une fédération que l'on peut quand même estimer et qui a mis en place des formations efficaces, qui ne sont en tout cas pas contestées aujourd'hui par les syndicats. Donc, Monsieur Kunz, la prochaine fois, réfléchissez un peu avant de parler ! Et allez voir un peu sur le terrain ce qui se passe, parce que vous nous dites des choses complètement aberrantes !

Le président. Monsieur le député, je vous rappelle que vous devez vous adresser à la présidence, pas à vos collègues ! Donc, les propos que vous avez adressés à M. Kunz sont annulés... Vous me parlez à moi et, comme cela, M. Kunz n'aura pas besoin de répliquer !

M. Alain Charbonnier. Très bien ! Alors, Monsieur le président, vous voudrez bien vous adresser à M. Kunz ultérieurement pour lui signifier qu'en ce qui concerne les lourdeurs administratives et, entre autres, de construction, nous en avons vu des vertes et des pas mûres... Par exemple, un conseiller d'Etat actuel, assis à la droite de ces bancs, a dit, lors d'une conférence de presse au sujet des restrictions des normes de construction des EMS, que des normes pour diminuer le bruit étaient exigées mais que ce n'était pas forcément nécessaire, les personnes âgées étant sourdes la plupart du temps... Que l'on pouvait largement alléger ces normes de construction - on pourrait d'ailleurs même supprimer les murs, étant donné que les personnes âgées ne voient pas toujours bien... C'est complètement hallucinant d'entendre des choses pareilles ! Et je ne parle pas du dérapage sur la petite enfance !

Nous vous demandons avec insistance de soutenir cette initiative, qui ne peut qu'apporter du bien-être à nos personnes âgées. (Applaudissements. M. Pierre Kunz interpelle le président.)

Le président. Non, Monsieur Kunz, j'ai rétabli les choses tout à l'heure ! Ce n'est pas la peine de revenir à l'attaque ! J'ai rappelé M. Charbonnier à l'ordre. Par conséquent, il n'est pas nécessaire...

Une voix. Je suis particulièrement meurtri ! (Rires.)

Le président. Oui, oui... J'entends à votre voix que vous êtes meurtri, Monsieur Kunz ! Nous partageons tous votre meurtrissure, ce qui suffit à la soigner, à la cicatriser et à la faire oublier ! La parole est à M. le député Gilbert Catelain, pour qu'il nous expose les siennes...

M. Gilbert Catelain (UDC). Merci, Monsieur le président. J'aimerais juste clarifier la prise de position de l'UDC, puisque certaines personnes dans cette enceinte ont apparemment des oreilles, mais n'entendent pas... Je le répète, l'article 9 qui est modifié par cette initiative prévoit: d'affecter à la prise en charge des pensionnaires le personnel nécessaire en nombre et en qualification, rémunéré conformément aux conventions collectives ou, à défaut, aux normes équivalentes en vigueur dans les EMS. A propos de cela, j'ai simplement dit, comme pour les crèches, que nous étions en train de provoquer une pénurie dans ce canton. Il ne faut pas me faire dire que l'UDC est contre les EMS: c'est faux ! Nous avons voté certains budgets. Même si, c'est vrai, nous avons, à juste titre, remis en cause certaines normes de construction par rapport aux EMS, puisque les normes à Genève sont beaucoup plus larges que dans d'autres cantons. D'ailleurs, des membres du milieu, des initiants, sont aussi d'accord pour en remettre en cause certaines. C'est la première chose.

Du reste, pour dire à quel point c'est ridicule, on pourrait se demander pourquoi il faudrait une douche pour chaque chambre, puisque, selon les normes PLAISIR, pour remplir ces normes - d'après M. Brunier - il faut que les pensionnaires puissent prendre une douche par semaine ! Moi, j'ai bien compris que les normes PLAISIR représentaient plus que cela, Monsieur Brunier ! Il ne s'agit pas simplement d'une douche par semaine, parce qu'à 8000 F par mois la douche reviendrait à 2000 F, ce qui serait vraiment excessif !

Les normes PLAISIR prévoient effectivement bien d'autres choses, et nous en sommes parfaitement conscients ! Nous n'avons pas dit qu'il fallait supprimer les normes PLAISIR, il ne s'agit pas du tout de cela. Dans ce dossier, il y a une norme très simple, inscrite dans le rapport de majorité: globalement, pour s'occuper d'une personne âgée, il faut une personne, c'est-à-dire que l'effectif d'encadrement pour les personnes âgées doit être de 1/1. A partir du moment où l'on peut se mettre d'accord sur cette norme, on peut éluder pas mal d'éléments qui sont prévus dans cette initiative, d'où l'intérêt d'un contreprojet.

J'en viens au financement. Le MCG a beau jeu, pour la campagne électorale, de dire que les finances publiques sont dans un état catastrophique, mais qu'il ne faut pas y toucher... Quand on parle des EMS, là, les finances publiques ne posent plus de problème: tout roule, il n'y a pas de déficit, les générations futures ne seront pas handicapées par cette épée de Damoclès... De toute manière, l'avenir des EMS ne sera pas non plus pas handicapé par la dette et les déficits budgétaires... Et puis, de toute façon, le chef du MCG à Genève dit qu'il s'en moque ! Qu'il ne paie pas ses primes maladie ! Il a 10 000 poursuites dans ce canton... (Exclamations.) ... la plupart pour des primes maladie non payées ! Donc, il fait la morale aux autres mais ne paie pas ses primes maladie... (Brouhaha.) ... qui assurent le financement des EMS à hauteur de 60%... Alors, Monsieur Stauffer, avant de faire la morale aux autres, payez vos primes d'assurance maladie ! Vous contribuerez effectivement - pas seulement par la parole, mais dans les faits - à la bonne santé financière des EMS et au respect des normes PLAISIR dans les EMS !

M. Brunier a attaqué le directeur de l'UBS... Je suis également scandalisé qu'une seule personne puisse gagner 300 millions de francs par année. C'est moralement scandaleux ! Mais au moins, sur ces 300 millions, l'intéressé aura payé en tout cas 40% d'impôts et à lui tout seul il peut subventionner l'ensemble des EMS de ce canton. On pourrait donc presque lui dire merci... C'est en tout cas de l'argent qui a été retiré aux actionnaires - pour une fois - et dont une partie bénéficie directement au canton.

En résumé, la seule chose que nous avons dite, c'est que l'outil, pour arriver au but souhaité, n'est pas bon. Il ne s'agit pas forcément de remettre en cause les prestations fournies dans les EMS, mais la manière d'y arriver. Effectivement, il serait préférable que notre parlement se penche sur le mode de fonctionnement des EMS et imagine d'autres pistes pour atteindre les objectifs souhaités dans cette initiative, qui ne passent pas forcément par des revalorisations salariales, par une augmentation des personnels, puisque les autres cantons nous enseignent que l'on peut faire aussi bien, voire mieux, avec beaucoup moins !

Le président. J'indique à M. Stauffer que les blessures et les meurtrissures qu'il vient de se voir infliger sont la juste réponse à celles qu'il avait pratiquées d'abord... (Rires.) ... de sorte qu'il avait répondu par avance à ce qu'il subit maintenant ! (Le président est interpellé par M. Eric Stauffer.) Non, non, pas du tout ! Vous avez parlé du domicile des uns et des autres: vous n'aurez pas la parole ! La liste est close ! (Protestations de M. Eric Stauffer.) Madame Véronique Pürro, vous avez la parole.

Mme Véronique Pürro (S). Je rassure M. Stauffer, je ne vais pas lui donner une raison supplémentaire de vouloir intervenir suite à d'éventuelles attaques, puisque je ne compte pas l'attaquer, ni personne, du reste, dans cette enceinte.

J'aimerais rendre hommage ici aux collaborateurs et aux collaboratrices qui travaillent dans les EMS. Comme cela a été très justement relevé au cours du débat et dans les rapports, la population qui vit en EMS a considérablement évolué au fil des ans. En effet, avec le développement des prestations en matière d'aide à domicile, les personnes qui entrent désormais en EMS sont plus âgées qu'avant, ce qui a par conséquent beaucoup modifié le travail des collaborateurs et des collaboratrices des EMS. L'EMS d'aujourd'hui n'a plus rien à voir avec la maison de retraite que nous connaissions, il y a encore quelques années. Nous devons donc prendre en compte ces changements, parce qu'il n'est pas facile aujourd'hui de travailler dans un EMS. Des attaques ont été lancées à leur encontre, laissant entendre que le but qu'ils poursuivaient à travers l'initiative, c'était l'amélioration de leur conditions de travail et non pas l'amélioration des prestations délivrées: c'est totalement injuste et déplacé !

Pour ma part, j'aurais souhaité que nous nous demandions ce que nous voulons offrir, en termes d'habitation, à nos aînés en fin de vie. Si nous souhaitons - pardonnez-moi l'expression ! - «parquer nos vieux» dans des immeubles construits à cet effet, eh bien alors, continuons dans la voie du démantèlement ! Ce que les initiants souhaitent précisément, c'est éviter cette tendance, malheureusement réelle. Ils pensent que nos aînés méritent de pouvoir vivre leur fin de vie dans des lieux qui leur offrent une réelle qualité de vie: pas seulement des soins et un lit, mais des prestations de vie ! Comme les prestations hôtelières, les repas, etc., et également tout ce qui a trait à l'animation et favorise le lien entre des personnes qui - nous l'avons déjà dit - ont des profils très particuliers, parce que très âgées et avec des pathologies souvent assez lourdes. Là est la vraie question que nous devons nous poser, et nous pouvons remercier les initiants de l'avoir soulevée grâce à leur initiative.

Mais tout cela, c'est vrai, ne nous voilons pas la face, a un coût ! Et l'évolution démographique représente un réel défi pour notre collectivité publique et pour le budget de l'Etat. Ce que je regrette, c'est que nous n'ayons pas, comme c'est le cas dans d'autres domaines, une vision d'ensemble. En l'occurrence, nous traitons des EMS, mais les prestations dévolues aux personnes âgées sont très nombreuses. Il y a les prestations financières, les soins, les soins à domicile, les structures intermédiaires, la politique d'animation développée dans les communes, et, une fois de plus, nous traitons une seule problématique et par le petit bout de la lorgnette.

C'est la raison pour laquelle le parti socialiste a déposé un projet de loi visant à ce que nous définissions une véritable politique concernant les personnes âgées, sachant que celle-ci va représenter un coût de plus en plus important pour notre collectivité publique. Parce que c'est bien en ayant une vision de l'ensemble et des conséquences financières sur l'Etat de cet ensemble que nous pourrons effectuer une meilleure analyse et garantir une bonne qualité de vie aux personnes âgées, de 65 ans à la fin de la vie.

Je trouve donc quelque peu regrettable que nous terminions ce débat par des joutes oratoires et des reproches de part et d'autre. Parce que, je vous assure, l'évolution démographique qui fait que notre population vieillit de plus en plus représente un défi pour notre collectivité publique - comme pour tant d'autres, toutes les villes occidentales doivent faire face à ce défi. Et ce dernier mériterait que nos débats soient un peu plus sereins et que nous les abordions avec un peu plus de hauteur ! (Applaudissements.)

Mme Laurence Fehlmann Rielle (S), rapporteuse de minorité. Je voudrais simplement revenir sur quelques propos entendus au cours du débat. Je crois que c'était Mme Läser qui disait qu'il suffirait d'une simple réorganisation pour améliorer la situation des EMS... Effectivement, si l'on pouvait réfléchir à un contreprojet, ce serait une possibilité d'offrir des solutions différenciées. Mais on se rend compte aussi que parmi les solutions pour améliorer l'efficience se posait la question de la formation. Mme Läser a également indiqué que, dans le domaine de la formation, les budgets étaient en baisse... Alors, il ne suffit pas de réorganiser, il faudrait peut-être aborder le problème de façon plus globale !

Ensuite, M. Cuendet nous a expliqué qu'il n'était pas nécessaire d'améliorer la situation dans les EMS, que tout allait bien et que cela coûtait de toute façon trop cher, tout en disant qu'il fallait de nouveaux lits... Comme, de toute manière, il est opposé à toute augmentation de budget, je ne vois pas comment il pourra financer ces nouveaux lits ! Il nous a opposé toute une série d'arguments de nature technocratique alors qu'il faudrait peut-être simplement se poser quelques questions d'éthique ou quelques questions pratiques et garder à l'esprit que cette initiative ne demande pas la lune, mais simplement que nos aînés soient traités de façon convenable !

De plus - je crois que M. Charbonnier l'a dit tout à l'heure - le coût estimé de cette initiative, de 60 millions, est une estimation plus qu'approximative... Nous n'avons jamais eu d'explications étayées à ce sujet et ce coût est agité comme un épouvantail, pour faire peur afin que cette initiative soit refusée. Cela dit, certains ne s'offusquent pas tant que cela des cadeaux fiscaux qui sont faits à certains millionnaires ou à certaines entreprises qui ne payent pas leurs impôts... Par contre, débourser éventuellement 60 millions pour que nos aînés vivent correctement, eh bien, ils trouvent cela vraiment horrifiant !

Je ne vais pas trop réagir aux propos de M. Catelain qui s'embrouille dans les chiffres, je lui signalerai seulement que la comparaison avec le facteur lausannois n'est pas tout à fait fondée... Il faut juste se rappeler que les prix des loyers et des primes d'assurance-maladie ne sont pas tout à fait les mêmes dans d'autres cantons, notamment dans le canton de Vaud.

Finalement, si vous ne voulez ni entendre parler d'initiative ni entendre parler de contreprojet, eh bien, nous nous expliquerons devant le peuple ! (Applaudissements.)

Mme Véronique Schmied (PDC), rapporteuse de majorité. Le débat s'est vraiment polarisé ce soir entre deux groupes: ceux qui aiment les personnes âgées et ceux qui ne les aiment pas; ceux qui pensent que rien n'est assez bon pour les personnes âgées et ceux qui pensent que, finalement, on peut les parquer dans d'infâmes EMS où elles sont alignées dans les couloirs en attendant leur dernier jour...

J'aimerais quand même dire que la majorité est évidemment également sensible aux conditions de travail du personnel dans les EMS. Elle en a également visité et elle a pu se rendre compte que la tâche s'est alourdie pour le personnel au cours de ces dernières années: les personnes âgées qui entrent en EMS sont de plus en plus nombreuses et de plus en plus âgées, nombre d'entre elles sont en fauteuil roulant, dépendantes physiquement ou psychiquement, et cela représente effectivement un stress pour le personnel.

A ce stress on peut répondre, c'est vrai, en planifiant mieux le travail, en standardisant les tâches, en trouvant des économies d'énergie - de dépenses administratives, par exemple - entre plusieurs EMS. Cela permettrait de dégager des postes pour pouvoir aller sur le terrain et pour être auprès des personnes âgées. Et tout cela ne signifie pas plus d'argent, pour avoir plus de postes, pour augmenter le nombre d'actions auprès des personnes âgées; ce qui est important, c'est la qualité des soins, comme je l'ai souligné dans mon rapport.

La majorité qui s'est exprimée en refusant l'initiative est réaliste, Mesdames et Messieurs les députés ! Actuellement, les personnes âgées sont bien encadrées, sont bien soignées. Il ne faut pas peindre le diable sur la muraille ! Il y a une sérénité dans les EMS que l'on peut visiter qui rassure. D'ailleurs, nous en avons visité un seul dans le cadre de nos travaux sur cette initiative, et tout le monde était d'avis, me semble-t-il, que les personnes que nous y avons vues avaient l'air bien entourées: le personnel prenait le temps de les accompagner tranquillement à la table de la salle à manger, notamment, puisque c'est un moment auquel nous avons assisté. Bref, il faut les visiter, ces EMS, pour s'en rendre compte ! Nous n'avons pas à rougir de la manière dont les personnes âgées sont encadrées dans nos EMS. Il n'y a pas de manquement à l'éthique ! De toute façon, il faut vraiment rester raisonnables à ce propos.

Bien sûr, c'est dur de voir des personnes âgées dans cet état ! Personne n'a envie d'entrer dans un EMS pour y finir ses jours ! Personne ! Et je ne le souhaite à quiconque. Cela signifie que l'on souffre d'une certaine solitude et que notre famille ne peut pas nous accueillir jusqu'à notre dernier souffle. Mais c'est l'évolution de notre société qui en est la cause ! Nous pourrions bien multiplier le personnel - 600 personnes de plus, si je m'en réfère au calcul de M. Charbonnier - auprès des gens âgés, leur sort resterait le même ! Ces personnes continuent de vivre 2,4 ans dans un EMS avant de décéder. C'est ainsi que cela se passe actuellement, puisque les personnes âgées entrent en EMS de plus en plus tard étant donné que l'aide à domicile sursoit à cette entrée en EMS assez longtemps.

Donc, nous ne pouvons pas remonter le cours du temps et nous dire qu'en ajoutant des moyens, en ajoutant de l'argent, le sort des personnes âgées va s'améliorer et que, finalement, elles ne vont pas mourir ! Ce dont elles ont besoin, c'est de personnes auprès d'elles. Par exemple, des bénévoles, peut-être aussi des demandeurs d'emploi que nous pourrions solliciter dans les EMS... Ce sont les familles qu'il faut pouvoir accueillir, auxquelles il faut réserver de la place pour qu'elles y viennent et pour qu'elles se sentent accueillies comme chez elles, comme chez la personne âgée. L'EMS, c'est le domicile de la personne âgée ! Il faut que toutes ces personnes qui ne sont pas des professionnelles soient bien accueillies, qu'on leur fasse de la place pour qu'elles puissent mobiliser les personnes âgées, les emmener faire une petite promenade dans le couloir ou dans le jardin, les accompagner pendant les repas, leur faire la conversation, leur lire les journaux... Toutes ces choses qui n'exigent pas forcément un personnel qualifié, diplômé, et payé selon les conventions collectives de travail !

Ce qui peut être amélioré dans les EMS doit se concevoir en termes d'encadrement, de chaleur humaine. On ne peut pas vouloir redresser les finances de l'Etat d'un côté et, en même temps, faire exploser la subvention qui est dédiée aux EMS ! Nous - la majorité - n'acceptons pas que les personnes âgées, quand on les évoque, servent de prétexte à des revendications salariales en faisant vibrer notre corde sensible, ce qui nous permettrait de nous s'abstenir de toute raison.

M. Pierre-François Unger, président du Conseil d'Etat. J'interviendrai en oubliant tout ce que ce débat a pu, par moments, avoir d'excessif et, donc, de totalement insignifiant... Il a été dit que ce débat dépassait largement le cadre économique - et c'est vrai ! - et qu'il prenait des teintes et des impératifs qui touchent à l'éthique. Qui touchent à l'éthique tant à l'égard des personnes âgées - pour le maintien, à la fois, de leur dignité, des contacts dont ils ont besoin et de la préservation de l'autonomie que leur handicap leur laisse - qu'à l'égard des collaborateurs pour lesquels l'application d'une convention collective de travail s'impose, avec les mécanismes salariaux tels qu'ils sont prévus.

Mais, lorsque l'on parle d'éthique, on se doit d'éviter de dire des mensonges ! Le premier est la diminution de 8% ! J'observe que, sur les mêmes bancs, il y a six mois on avançait le taux de 25%... Le mammouth a donc été rétréci: on indique 8%... Eh bien non ! Le taux est de 1,5%, puisque, sur le budget total des EMS, qui est d'un demi-milliard - 500 millions de francs - la réduction opérée se monte à 7 millions. Et 7 millions sur 500 millions de francs, ça ne donne ni 25% ni 8%, mais 1,5% ! C'est tout à fait clair ! (L'orateur est interpellé.) Vous n'avez pas parlé de la subvention, alors ne m'interpellez pas et laissez-moi parler ! Vous avez toujours parlé de la réduction du montant du budget consacré aux EMS !

Cette première correction étant apportée, j'aimerais en faire une deuxième, s'agissant du fait que les personnes en EMS payeraient des impôts... Non, et c'est précisément ce qui a induit le Conseil d'Etat en erreur, et mon collègue Hiler s'en est ouvert à la presse... (L'orateur est interpellé.) Pourriez-vous cesser de m'interpeller, Monsieur le député ? Votre comportement est inacceptable, surtout après les propos démagogues que vous venez de tenir pendant dix minutes, en ne connaissant manifestement rien au sujet et en répétant benoîtement des choses qui vous avaient été dites ! (Applaudissements. Exclamations.)

L'importance du sujet est placée sur le plan éthique - et je vous remercie, Mesdames, de l'avoir souligné ! Les deux rapporteures, de majorité et de minorité, ont eu la décence d'en parler, mais il est tout de même aussi un peu économique. C'est l'occasion de rappeler que l'Etat est loin d'être désengagé dans ce que constitue le financement des EMS, puisqu'il finance, en gros, la moitié du budget total des EMS, soit 250 millions de francs... Donc 80 millions, un peu plus, puisqu'il a été prévu d'ouvrir des lits l'année prochaine et que nous en sommes maintenant à 86 millions pour l'année 2007, en fonction des nouveaux lits. Il y a donc bel et bien une adaptation de la subvention à ces nouveaux lits. Alors, 80 millions par cette voie-là et 70 millions environ par les prestations complémentaires, versées directement aux personnes et qui, comme vous le savez, à Genève sont déplafonnées pour diminuer le handicap qui serait celui des familles héritant d'une lourde dette. Votre parlement avait décidé, et c'est heureux, de ne pas faire peser sur les familles cet endettement «héréditaire» qui mettait les personnes âgées dans la situation très difficile de rompre avec le reste de la famille, compte tenu des difficultés financières qui en résultent.

Cet engagement de l'Etat est important, il l'est aussi dans les constructions: 400 nouveaux lits sont d'ores et déjà programmés; d'autres projets viendront s'ajouter, probablement d'ici à la fin de l'année. Et puis, la planification médico-sociale prévoit au total 1130 nouveaux lits - 650 tout à fait nouveaux, les autres étant des lits qui ne sont plus adaptés et qui sont transformés ou mis aux normes. C'est donc dire l'effort consenti par l'Etat, qu'il va continuer à consentir, mais qu'il ne peut pas accroître !

Dans la proposition qui nous est faite - et Mme la députée Pürro l'a relevé - le phénomène n'est pas appréhendé dans sa globalité. Je vous remercie d'avoir déposé un projet de loi. Vous savez - vous le saviez d'ailleurs - que le Conseil d'Etat allait en déposer un, ils seront complémentaires, nous tiendrons compte des propositions qui sont les vôtres. Et, à n'en pas douter, c'est bien l'articulation entre les différents segments de la prise en charge des personnes âgées qui s'impose. Et elle s'impose par un développement, c'est clair, de l'aide et du maintien à domicile; elle s'impose par le développement de structures intermédiaires sur lesquelles nous travaillons - et qui, il est vrai, nous ont mis en retard, sur ce point je vous donne raison - et, enfin, sur le domicile final que représente l'EMS pour une partie de la population.

L'initiative ne comporte pas, non plus, de proposition quant à une amélioration de la gestion. Au cours du débat, j'ai noté un certain nombre de choses... Les simplifications administratives, que le Conseil d'Etat consent pour octroyer une subvention - certes, un peu moins - de 80 millions sont de nature à permettre aux EMS d'épargner certains coûts administratifs, c'est du moins ce que la FEGEMS vous a signalé pendant des années.

Des efforts au niveau de la logistique ? Je ne vous cache pas que, surpris, j'ai comparé la proportion du personnel qui s'occupe des gens dans les EMS et dans l'hôpital: à l'hôpital, c'est trois personnes sur quatre qui s'occupent des malades; dans les EMS, c'est seulement trois sur cinq s'occupent des personnes âgées ! Que font donc les autres ? Que font donc les autres ?! Il y a de toute évidence, dans le personnel qui s'occupe de logistique, des économies à faire ! Je ne vois pas pourquoi les EMS devraient avoir des supports logistiques à ce point supérieurs à ceux qui existent dans les hôpitaux. Jamais une réflexion, pourtant soulevée à réitérées reprises, n'a été menée sur un pool de personnel pour aider les EMS momentanément en difficulté... Mais cela peut aussi être un pool pour des centrales d'achats... Il y a mille possibilités d'accroître l'efficience des EMS sans toucher ni à un cheveu ni à un poste de celles et ceux qui s'occupent des malades !

Et puis, cette initiative n'arrive pas non plus au bon moment, dans la mesure où elle survient en plein chantier du changement en cours, au niveau fédéral, concernant le financement des soins de longue durée, qui, cas échéant, risque de modifier très profondément la manière dont interviennent les revenus propres de la personne, les prestations complémentaires lorsqu'elles sont nécessaires - à Genève, 80% des personnes, lorsqu'elles sont en EMS, ont besoin de ces prestations complémentaires - les frais pris en charge par l'assurance maladie et les subventions cantonales... Tout cela risque d'être chamboulé ! Le Conseil des Etats a déjà pris une option et le Conseil national doit se prononcer en décembre.

Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, compte tenu de l'éthique qu'il faut observer à l'égard de cette vie âgée, qui est dans la dépendance, qui est une vie extrêmement difficile, et compte tenu aussi de l'éthique que l'on doit au personnel, cette initiative est inopportune. Elle est inopportune, parce qu'elle paralyse toute réflexion systémique - comme nous l'avons abordée, Mme Pürro et moi-même - elle paralyse aussi toute velléité managériale des directions, puisque les conseils des différents EMS n'ont pas forcément une compétence managériale en la matière, et elle fige le droit cantonal au moment où le droit fédéral doit changer.

Pour ces quatre raisons, Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat vous propose de rejeter cette initiative ! (Applaudissements.)

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je mets aux voix, dans l'ordre... (Un député demande l'appel nominal.) L'appel nominal demandé est-il soutenu ? Il l'est, très largement ! Je mets d'abord aux voix l'acceptation ou le rejet de l'initiative, puis l'acceptation ou le rejet du principe d'un contreprojet. Chacun regagne sa place pour le vote avec appel nominal, s'il vous plaît ! Celles et ceux qui acceptent l'initiative votent oui, les autres vote non ou s'abstiennent.

Mise aux voix à l'appel nominal, l'initiative 125 est refusée par 50 non contre 25 oui et 12 abstentions.

Appel nominal

Le président. Je vous soumets le principe d'un contreprojet: celles et ceux qui l'acceptent votent oui, les autres vote non ou s'abstiennent.

Mis aux voix à l'appel nominal, le principe d'un contreprojet recueille 38 oui et 38 non.

Le président. Il y a égalité et il m'appartient... (Le président est interpellé.) Cela ne fonctionne pas ? (Exclamations.) M. Barazzone non plus... Peut-on reprendre la procédure de vote ? Il y a un problème technique.

Une voix. Il faut appuyer pour débloquer le vote ! (Brouhaha.)

Le président. Alors, attendez, Mesdames et Messieurs les députés... C'est déjà assez difficile avec la technique. Je vais appuyer sur un bouton, mais cela ne signifie rien, c'est seulement pour débloquer la machine. On me dit que ça fonctionne, c'est le côté thaumaturgique de la présidence !

Nous recommençons donc, en espérant que tout le monde pourra voter cette fois-ci. Le vote est lancé. (Un instant s'écoule.) Est-ce que tout le monde a pu voter ?

Des voix. Oui !

Mis aux voix à l'appel nominal, le principe d'un contreprojet recueille 43 oui, 43 non et 3 abstentions.

Le président. Il y a encore égalité... Tout le monde a voté. Je tranche donc contre le principe d'un contreprojet.

Le principe d'un contreprojet est donc refusé à l'appel nominal par 44 non contre 43 oui et 3 abstentions.

Appel nominal

Le président. Le contreprojet est donc refusé. (Applaudissements.) Le peuple tranchera.

Le Grand Conseil prend acte du rapport IN 125-C.