République et canton de Genève

Grand Conseil

La séance est ouverte à 17h, sous la présidence de Mme Marie-Françoise de Tassigny, présidente.

Assistent à la séance: Mmes et MM. Martine Brunschwig Graf, présidente du Conseil d'Etat, Carlo Lamprecht, Laurent Moutinot, Micheline Spoerri, Pierre-François Unger et Charles Beer, conseillers d'Etat.

Exhortation

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance: M. Robert Cramer, conseiller d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Luc Barthassat, Jacques Baud, Anita Cuénod, Jeannine de Haller, Pierre Ducrest, Pierre Froidevaux, Philippe Glatz, Robert Iselin, Nicole Lavanchy, Christian Luscher, Claude Marcet, Guy Mettan, Jacques Pagan et Marie-Louise Thorel, députés.

Discussion et approbation de l'ordre du jour

La présidente. Monsieur le député Pierre Weiss, vous avez la parole.

M. Pierre Weiss (L). Je vous prie de proposer la mise en urgence du point 94, à lier avec le point 38.

La présidente. Je mets aux voix la demande d'urgence qui, si elle est acceptée, sera traitée à 20h30.

Mis aux voix, le traitement en urgence du point 38 (R 493) et du point 94 (PL 8932-A, PL 8928-A et M 1485-A) est adopté par 28 oui contre 11 non.

M. Gilbert Catelain (UDC). Je demande le traitement en urgence des points 35 et 97, de manière liée, à savoir les motions sur le budget 2006.

La présidente. Nous sommes donc saisis d'une nouvelle demande de traitement de deux points en urgence.

Mis aux voix, le traitement en urgence de la proposition de motion 1618 et de la proposition de motion 1634 est adopté par 31 oui contre 21 non.

M. Souhail Mouhanna (AdG). Je demande le traitement en urgence des points 31 et 36.

La présidente. Je mets aux voix le traitement conjoint des points 31 et 36.

Mis aux voix, le traitement en urgence de la proposition de motion 1601 et de la proposition de résolution 489 est rejeté par 30 non contre 25 oui et 1 abstention.

Communications de la présidence

La présidente. Je vous annonce l'exposition d'affiches préparées par le service du Grand Conseil, dans le cadre des portes ouvertes du 28 mai 2005. Je tiens à remercier particulièrement M. Frédéric Deshusses et M. Lionel Rudaz, qui ont très activement, et avec talent, produit ces affiches. Tout a été fait par le service du Grand Conseil, que je vous demande d'applaudir.

Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)

La présidente. Je vous invite vivement à regarder cette exposition qui se tient à la salle des Pas-Perdus.

Correspondance

La présidente. Vous avez trouvé sur vos places l'énoncé de la correspondance reçue par le Grand Conseil. Cet énoncé figurera au Mémorial.

Echange de correspondance entre la présidence du Grand Conseil et la présidence du Conseil d'Etat intitulé "Utilisation de la Salle du Grand Conseil le dimanche 24 avril 2005" ( C-2018)

Annonces et dépôts

Néant.

Interpellations urgentes écrites

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, vous avez trouvé sur vos places les interpellations urgentes écrites suivantes:

Interpellation urgente écrite de M. Jean-Marc Odier : Extension de la libre circulation et votation du 25 septembre 2005 : redonner confiance aux entreprises, artisans et travailleurs ( IUE 201)

Interpellation urgente écrite de M. Rémy Pagani : concernant les difficultés que rencontrent les chômeuses et chômeurs en fin de droit pour trouver des emplois temporaires (mesures cantonales) ( IUE 202)

Interpellation urgente écrite de M. Pierre Kunz : Adoption par des personnes célibataires ( IUE 203)

Interpellation urgente écrite de M. Claude Marcet : Dysfonctionnement de la Justice (ter) ( IUE 204)

Interpellation urgente écrite de M. Claude Marcet : Rémunération des fonctionnaires ( IUE 205)

Interpellation urgente écrite de M. Claude Marcet : Hospice général (ter) ( IUE 206)

Interpellation urgente écrite de Mme Nicole Lavanchy : Le peuple a dit : "Non aux réductions de prestations sociales !" Pourquoi alors s'abstenir ? ( IUE 207)

Interpellation urgente écrite de M. Antoine Droin : Il y a une hypocrisie criante entre le nombre de chômeur/euses et l'obligation du nombre important de recherches d'emploi que ces derniers doivent accomplir chaque semaine ( IUE 208)

Interpellation urgente écrite de M. Antoine Droin : L'Office Cantonal de l'Emploi est-il un service de non droit au sein de l'Etat de Genève ? ( IUE 209)

Interpellation urgente écrite de M. Christian Brunier : Audit de l'Hospice général (suite) ( IUE 210)

Interpellation urgente écrite de M. Sami Kanaan : Combien de places de parking privées pour pendulaires à Genève ? ( IUE 211)

Interpellation urgente écrite de M. Gilbert Catelain : Accords bilatéraux I : après deux ans de libre circulation des personnes, quelle est la situation à Genève ? ( IUE 212)

IUE 201, IUE 202, IUE 203, IUE 204, IUE 205, IUE 206, IUE 207, IUE 208, IUE 209, IUE 210, IUE 211, IUE 212

La présidente. Conformément à l'article 162D de notre règlement, le Conseil d'Etat, respectivement le conseiller d'Etat interpellé, répondra par écrit lors de la session suivante, à savoir celle du mois de juin. Mesdames et Messieurs les députés, nous reprenons le cours de notre ordre du jour.

PL 9504-A
Rapport de la commission des travaux chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat ouvrant un crédit d'investissement de 58'321'000F pour la construction du cycle d'orientation de la Seymaz à Chêne-Bourg

Suite du premier débat

M. René Koechlin (L). J'ai entendu certains préopinants dire que ce projet était un bon projet et que, de surcroît, il était économique. D'un point de vue strictement architectural, je partage la première appréciation. En effet, il s'agit d'un bon projet, architecturalement parlant. Il est le résultat d'un concours, et les lauréats de ce concours ont conçu un projet qui présente beaucoup de qualités esthétiques.

On ne peut en revanche pas dire que ce soit un projet économique, même si le prix de revient est inférieur à celui de certains autres cycles d'orientation qui ont été traités dans cette enceinte. Nous en sommes toujours à plus de 80 000 F par élève, en ce qui concerne le prix de revient. Je rappelle, en passant, que l'Ecole Moser a été construite il y a deux ans et que son prix de revient est de 36 000 F par élève. Par ailleurs, il y a un projet d'école internationale sur la rive droite, dont le prix de revient par élève dépasse légèrement 50 000 F. Nous sommes donc encore très largement au-dessus de ces prix, en comparaison.

Je sais que l'on ne peut pas jeter la pierre au département de l'aménagement, de l'équipement et du logement, qui ne fait que répondre aux demandes et exigences du département de l'instruction publique. Mais les programmes des cycles d'orientation sont assez dispendieux et l'on peut quand même se poser la question de savoir si ce n'est pas au niveau de ceux-ci qu'il faudrait provoquer une réforme - ou, en tout cas, une réflexion - afin de voir s'il n'y aurait pas un moyen de construire des établissements scolaires plus économiques. Celui qui nous occupe n'est pas plus économique, il est simplement moins cher: nuance. Cela dit, il y a 700 élèves et cela constitue un besoin pressant. C'est la raison pour laquelle je me suis résolu à voter ce projet de loi.

Cependant, même du point de vue architectural, il y a un critère assez simple d'appréciation de l'économie d'un projet: il s'agit du rapport entre la surface de l'enveloppe des bâtiments et le mètre carré de plancher. Ce projet se situe autour de 1, à cet égard. Des projets raisonnablement compacts ont, habituellement, un rapport de 0,6. Nous en sommes donc loin. La raison en est simple: ce projet ne comporte qu'un étage et le rez-de-chaussée; vous comprendrez donc aisément que la surface de la toiture, ramenée au mètre carré de plancher, est forcément élevée, et, si on y ajoute la surface des fondations, on obtient encore une somme plus élevée.

C'est donc un projet qui est relativement coûteux, mais, comme il est nécessaire, nous le voterons. Je regrette que nous n'ayons pas maintenu, parmi les extraits, le projet précédent - au numéro 126 de l'ordre du jour - qui est un bâtiment destiné au regroupement des services de l'environnement.

A titre de comparaison, ce bâtiment me paraît en revanche économiquement intéressant, parce qu'il est extrêmement bien situé et qu'il permet de regrouper des services qui sont actuellement éparpillés. Sur le plan du fonctionnement, cela entraîne donc une économie. Par ailleurs, on construit pour 52 millions et, si l'on calcule cela en termes de loyer annuel, on réalise une économie de 2 millions sur ce que l'on paie actuellement pour ces services. Par conséquent, c'est un projet intéressant et économique, qui contribue en plus à mettre en valeur des biens immobiliers de l'Etat.

J'encourage le Conseil d'Etat à concevoir des projets de ce type le plus souvent possible. Je le dis à l'occasion du débat sur la construction de ce cycle parce que, à l'inverse, un cycle ne contribue pas à mettre en valeur des biens immobiliers de l'Etat; on le construit surtout parce qu'il répond à des besoins urgents. Mais, si on compare ces deux projets sur le plan économique, celui de la Maison de l'environnement est un projet efficace qui exploite intelligemment le patrimoine de l'Etat, contrairement à n'importe quel cycle dont nous votons la construction dans cette enceinte.

Voilà les observations que je voulais formuler en passant, à propos de ce projet de loi que, compte tenu de la nécessité, bien sûr, nous voterons.

M. Pierre Kunz (R). Comme l'a rappelé M. Koechlin, nos rapporteurs ne tarissent pas de louanges sur ce projet qui est «excellent, axé sur le développement durable, beau et économique». Ces appréciations sont pour le moins superficielles. Je me demande si, à force de parler, dans cette enceinte, en termes de centaines de millions de francs de dépenses, d'investissements, de déficits, de milliards de francs de dette publique, nous ne perdons pas complètement la mesure de ce que nous faisons.

Mesdames et Messieurs les députés, 60 millions pour un cycle d'orientation, ce n'est ni beau, ni excellent, ni économique; c'est tout simplement démesuré, complètement déraisonnable et fou. C'est fou ! Et il est temps que nous nous en rendions compte et que nous cessions ces dérives.

Je ne ferai pas, moi, comme M. Koechlin, et je ne voterai pas ce projet car la situation financière de notre Etat, les montants, déraisonnables, invoqués ici, sont tout simplement insupportables pour ma conscience et mon envie d'être un bon député, défenseur des intérêts de cette communauté. Je ne voterai donc pas ce projet et, je vous le dis, je ne voterai plus jamais un crédit de cette nature, même s'il s'agit d'un cycle d'orientation, parce qu'il est temps que nous cessions de nous prendre pour Crésus, alors que nous sommes des mendiants.

La présidente. Je rappelle que la liste des intervenants est close et que le dernier inscrit est M. Laurent Moutinot.

M. François Thion (S). Je prends note que les radicaux ne veulent plus construire d'écoles à Genève.

J'ai lu ce rapport avec attention et j'ai un petit souci - pas seulement concernant ce rapport, d'ailleurs. En effet, nous avons déjà eu plusieurs rapports sur des constructions d'écoles et sur des aménagements d'un point de vue mobilier. Dans ces rapports, on nous cite, comme mesure d'économie, la suppression des tableaux noirs. C'est peut-être une révolution en matière de pédagogie qui m'a échappé, mais je suis étonné que, dans un cycle d'orientation, on n'utilise plus de tableau noir. Cependant, j'ai bien compris que la mesure d'économie avait en fait trait aux points d'eau situés dans les salles de classe. Je ne sais pas combien d'argent on arrive à économiser grâce à ces suppressions de robinets mais je trouve cela un peu bizarre.

On présentera donc des cours aux élèves de cycles d'orientation sans tableau, parce que les tableaux blancs nécessitent un matériel que l'on n'a pas toujours à disposition. Par conséquent, on utilisera le rétroprojecteur. Or vous savez que quand vous suivez un cours au rétroprojecteur, vous vous endormez au bout d'un quart d'heure: c'est extrêmement lassant. Si, ensuite, le progrès de la technique nous permettra d'utiliser des ordinateurs et de mettre des programmes d'ordinateurs sur des écrans, on continuera. Mais il faut savoir que les élèves, lorsqu'ils ne sont pas au cycle d'orientation, sont devant la télévision ou devant des écrans. Je m'inquiète donc pour la jeunesse de Genève et je doute de l'efficacité de ce type d'économies.

Quand on est dans des bâtiments provisoires - comme l'école de commerce du Rolliet ou l'annexe du collège et école de commerce Emilie-Gourd de Chêne-Bougeries que l'on construira - je comprends effectivement que l'on fasse cette économie. Pour le cycle d'orientation de la Seymaz, je suis un peu étonné.

J'aimerais savoir si le personnel technique qui travaille au DIP, et qui vient de temps à autre en commission pour nous parler de ces aménagements, se rend dans les salles de classe. En effet, lorsque commence un cours au cycle d'orientation, notamment par un jour où il fait chaud, comme aujourd'hui, certains élèves, qui ont couru, sont venus en vélo ou se sont dépensés pendant la récréation, se ruent vers le robinet pour se désaltérer. Cela sera donc fini. Que fera-t-on alors ? On mettra des distributeurs de boissons sucrées, dans les couloirs de l'établissement - boissons saines, j'imagine... - à grand renfort de publicité pour Coca-Cola, parce que cela existe déjà dans un certain nombre de collèges.

J'ai une petite inquiétude à cet égard, et je voulais l'exprimer. Cependant, il va de soi que nous voterons ce projet de loi. Il me semble cependant que, notamment dans les prochains projets de cycles d'orientation, il faudra faire attention à cela.

Mme Beatriz De Candolle (L). Je ne vais pas m'attarder ni sur la nécessité de la construction de ce cycle pour la région Arve-Lac ni sur l'architecture, qui cadre bien avec le site. J'aimerais souligner que la commune de Chêne-Bourg - et je me targue de vous dire que je connais un peu cette commune, étant actuellement son maire - a, à deux reprises, transmis au département de M. Moutinot ses remarques et ses inquiétudes concernant les aménagements extérieurs prévus. J'aimerais d'abord parler du parking pour véhicules. 47 places, c'est un nombre tout à fait insuffisant, en regard du nombre d'enseignants attendus en journée. Le DIP nous a transmis une liste des horaires des enseignants du cycle d'orientation: il faut compter entre 55 et 80 enseignants qui sont simultanément présents dans l'établissement, par demi-journée.

J'aimerais vous rappeler, deuxièmement, qu'en raison de la carence de parking dans cette région, on peut craindre une dispersion des voitures des enseignants dans le chemin du Plateau de Bel-Air, qui souffre déjà de la présence de nombreux véhicules pendulaires.

J'aimerais aussi vous parler du parking à vélos. Mesdames et Messieurs les députés, un parking à vélos pour cent vélos, alors qu'il y a sept cents élèves, cela n'est pas suffisant. De surcroît, ce parking est couvert; cela m'étonne que l'on continue à couvrir des parkings à vélos alors qu'on connaît les déprédations et les vols qui y sont commis. Par conséquent, les élèves mettront à nouveau leur vélo un peu partout dans la commune.

J'aimerais encore relever le problème du raccordement de ce parking avec le réseau routier existant. Le double embranchement du parking sur l'avenue de Mirany n'est pas acceptable en raison des dangers qu'il représente pour les piétons, à cause de la circulation automobile et des transports publics. L'avenue de Mirany est une autoroute, aujourd'hui. Or cette avenue fait partie du plan des réservations routières de site en vue de la réalisation des voies publiques aux communaux d'Ambilly; elle débouchera donc sur cette artère.

Par ailleurs, l'expérience qu'on a du collège du Foron montre aussi que de nombreux élèves se font déposer en voiture par leurs parents. Aussi, il est absolument indispensable de penser à aménager un emplacement «arrêt-minute». En outre, les différents plans démontrent qu'il faudrait peut-être également un îlot pour les piétons.

Mesdames et Messieurs les députés, je suis peut-être tout à fait naïve, mais j'ose espérer - et je vous regarde, Monsieur Moutinot - que les deux départements concernés seront à même, pendant la construction de ce cycle, de revoir leurs positions et d'adapter le programme prévu à la réalité.

Mme Morgane Gauthier (Ve). Nous ne remettons pas en question la nécessité de construire un nouveau cycle dans cette partie du canton. Les projections des nouveaux élèves sont tout à fait convaincantes, les Verts soutiennent donc ce projet de loi.

Concernant le projet lui-même, nous relevons à nouveau des contradictions, et nous avons des observations à formuler, comme les membres de quasiment chaque groupe l'ont fait. Ce n'est pas quant aux tableaux noirs ni aux accès des véhicules - parce que pour nous pensons que le parking est largement assez grand, comme vous vous en doutez - mais c'est bien sur la problématique énergétique que nous voulons revenir.

La problématique du développement durable est maintenant largement intégrée à la commission des travaux. Nous avons des discussions extrêmement intéressantes sur des sujets tels que la taille des chaudières ou la gestion de la parcelle, et je crois que chaque groupe a pris conscience de la nécessité d'intégrer des notions de développement durable dans chaque projet de construction. Malgré cela, nous construisons toute l'installation pour recevoir des cellules photovoltaïques, mais il n'y en a pas. Nous trouvons fortement dommage que ces cellules ne soient pas installées.

Nous avons reçu à la commission de l'énergie, la semaine dernière, deux documents excessivement importants sur la qualité de l'air dans les classes. Ainsi, le CO2 serait un indicateur intéressant à mesurer pour voir la qualité de l'air. Nous avons une note concernant la motion MINERGIE que nous avons déposée ainsi que le projet de loi selon lequel tous les nouveaux bâtiments publics devraient être construits sous des labels énergétiques, que ce soit MINERGIE ou d'autres - nous sommes prêts à ce que ce soient des labels de haute performance énergétique. MINERGIE est une norme pour la quantité d'énergie dépensée par mètre carré, mais elle concerne également le confort et la salubrité.

Que voyons-nous au travers des études reçues à la commission des transports - et que je me réjouis de transmettre à la commission des travaux ? Je vous cite le rapport: «Notre expérience montre que, en l'absence de ventilation mécanique, le maintien d'une bonne qualité de l'air dans les salles de classe est extrêmement difficile voire impossible à assurer par la simple ouverture des fenêtres, et quel que soit le type de bâtiment.» L'aération mécanique n'est donc pas la solution mais c'en est une.

La deuxième chose dont nous avons pris connaissance, qui est également extrêmement importante, est l'analyse de la seule école qui a été construite selon les normes MINERGIE. Il s'agit de l'école MINERGIE, à Fully dans le Valais. Que conclut-elle, par rapport à la qualité de l'air ? Les mesures effectuées, dans la classe à l'effectif le plus important de l'école, ont montré que la salubrité de l'air et que le confort dans la classe sont nettement améliorés par ce type de ventilation. Ce sont des conclusions qui n'émanent pas du groupe des Verts, elles sont faites par l'administration, donc par des experts extérieurs. La commission des travaux doit, je pense, se saisir de cela.

Il faut absolument qu'il y ait des bâtiments qui soient énergétiquement cohérents, parce que nous construisons tout de même pour quelques années. Dans le futur, nous ne pourrons pas nous plaindre, quand le prix du pétrole aura tellement augmenté et que les charges seront très importantes, qu'il y ait des trous dans les budgets. Nous devons prendre ces mesures aujourd'hui, justement lorsque l'on décide de construire ce genre de bâtiments. Il faut donc impérativement instaurer des normes beaucoup plus strictes en ce qui concerne l'isolation et la ventilation. En effet, ces études montrent que l'air des classes, tout au long de la journée, est insalubre.

Le groupe des Verts en a assez et vous propose de voter les projets de lois en ce qui concerne MINERGIE, induisant ainsi l'obligation d'instaurer des standards beaucoup plus sévères qu'aujourd'hui en matière d'énergie et de ventilation, parce qu'ici il est bien question de salubrité, contrairement à ce que certains prétendent.

M. Jean-Claude Egger (PDC). Je voudrais faire une remarque à Mme Gauthier et à vous tous. Reportez-vous à la page 15 du projet de loi, vous verrez tout ce qui a été fait - pas pour le développement durable mais en tout cas pour des isolations thermiques, pour les chauffages. Nous avons reçu un manuel - malheureusement je ne l'ai pas pris - sur toutes les économies d'énergie qui peuvent être réalisées. Nous avons mis un toit engazonné, c'est-à-dire que nous l'avons végétalisé pour retenir l'eau. De gros travaux ont été faits, et vouloir faire plus en matière de construction d'un cycle d'orientation, c'est pousser le bouchon un peu loin.

Le groupe PDC votera ce projet, car ne pas le voter - comme veut le faire M. Kunz - n'est pas acceptable. Tout comme il n'est pas acceptable de dire: «Ça coûte cher, on ne vote pas», de ne pas donner de solution et de dire, en outre, qu'on ne votera plus jamais un projet si son montant dépasse une certaine somme.

Dire, d'un autre côté, que ce projet est économique, n'est pas acceptable non plus. Je vous rappelle quand même qu'il s'agit d'un projet à 58 millions de francs et que, comme l'a dit M. Koechlin - qui a réalisé une excellente analyse du problème financier de ce cycle - 36 000 F par élève sont dépensés à l'Ecole Moser, alors que plus de 80 000 F par élève sont dépensés dans les cycles d'orientation à Genève. Il faudra donc bien trouver une moyenne entre les solutions les plus hautes et les plus basses, de façon à réaliser quelques économies.

C'était le but premier de mon intervention, je voulais parler des places de parking. Pour ce cycle, qui comptera plus de 700 élèves et une grande quantité de profs, 45 places de parking ne sont pas non plus acceptables, surtout avec le problème des voltigeurs. Nous les avons comptabilisés, des statistiques ont été réalisées, ces gens arrivent à 8h du matin et n'ont aucun problème pour se garer. En revanche, dès qu'ils changent de cycle d'orientation pour aller y enseigner, c'est terminé, ils ne trouvent plus de places: les autres profs ont pris les places disponibles. Par conséquent, les abords de tous les cycles d'orientation sont squattés par les automobiles des profs. Dans des situations comme à la Seymaz, où il y a suffisamment d'espace de construction et où la desserte des transports publics laisse à désirer, il serait tout de même plus facile de créer quelques places de parking supplémentaires pour résoudre ces problèmes.

On nous dit aussi que le parking de Belle-Idée pourrait être utilisé le soir. Oui, c'est vrai, pour les salles de gymnastique, pour les sports exercés par les habitants de la région, cela pourrait jouer; mais je ne sais pas si vous avez essayé de vous promener la journée à Belle-Idée: y trouver une place de parking n'est pas évident. On se retrouvera donc devant une cohorte de voitures qui seront parquées le long des routes. Créer un tel site dans une région constitue déjà tout un bouleversement, parce que cela amène énormément de monde dans ce quartier.

Voilà donc les problèmes que je voulais évoquer. Je le répète cependant, le PDC votera ce projet.

M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur de minorité. Je suis rapporteur de minorité sur un débat annexe mais, vu la tournure des débats, je me permets tout de même de soutenir la majorité qui a voté ce projet de loi, parce que j'ai été assez scandalisé par la position de M. Kunz, qui, je crois, s'est exprimé au nom du parti radical. (L'orateur est interpellé.)Ah bon, cela me rassure quelque peu par rapport à l'histoire du parti radical, parce que ce serait la première fois que, à Genève, le radicalisme voterait contre la construction d'une école. On aurait atteint, dans ce cas, les fondements du radicalisme genevois.

Cela étant, j'invite M. Kunz et les députés qui le voudraient à approfondir leurs connaissances en ce qui concerne la construction de bâtiments. Nous avons fait l'effort, à la commission des travaux, d'aller visiter l'Ecole Moser - d'ailleurs sous mon impulsion, lorsque j'étais président, et à la demande de Mme Hagmann. Puis nous nous sommes trouvés à l'Ecole Moser où nous avons conclu que de sérieuses économies avaient été réalisées. Par exemple, nous avons été accueillis dans une grande salle d'une capacité d'environ soixante places - je le dis de tête - où des cours, modulables, étaient dispensés. Imaginez de donner un cours devant soixante élèves du cycle d'orientation, alors que, déjà, les professeurs se plaignent de l'augmentation du nombre d'élèves ! Evaluez, Mesdames et Messieurs les députés, le bien-fondé de cette économie ! Parce que, en effet, l'économie architecturale passe par là: si on veut faire des économies, on doit construire moins de classes.

Par la suite, nous avons visité les locaux et nous nous sommes aperçus qu'il n'y avait pas de banques des laboratoires - ce que l'on appelle les paillasses de laboratoires. Les architectes de l'Ecole Moser ont, en revanche, réussi à trouver un système modulable - bien que l'on ne nous ait pas montré de quelle manière il était modulable. A mon avis, sans avoir approfondi le sujet, il y avait deux ou trois laboratoires. Il n'y avait pas de laboratoire de langues. En outre, le bâtiment n'était pas excavé.

On en vient alors aux économies. C'est donc sur la qualité de l'enseignement - qui peut être dispensé autrement, j'en conviens, dans une école plus petite - que les économies doivent être réalisées. Cependant, en l'occurrence, nous avons 700 élèves à, si j'ose dire, mettre en rangs et à organiser pour dispenser un enseignement qui soit de qualité. Voilà notre responsabilité. Je ne pense pas que l'on puisse dispenser un enseignement de moindre qualité pour réaliser des économies. Il est vrai que nous pouvons supprimer des standards, mais je ne crois pas, après cette visite et d'autres que nous avons effectuées, que nous puissions aller aussi bas que l'Ecole Moser, si ce n'est en dispensant un enseignement qui soit de peu de qualité pour une masse importante d'élèves, à savoir 700 à 800 élèves.

La qualité de ce projet, pour le dire autrement que M. Koechlin, qui est nettement plus compétent que moi au niveau architectural, tient dans le fait qu'il y a deux niveaux. En plus de cela, les économies sont réalisées grâce au fait - et cela est repris de l'Ecole Moser - qu'il n'y a pas d'excavation, sauf les deux salles de gym. Je relève, au passage, que l'Ecole Moser n'a qu'une seule salle de gym. Là aussi, on pourrait dire: «Une unique salle de gym suffit pour 800 élèves.» Cela ferait partie des économies. Or le nombre des salles de gym est, à mon avis, incompressible. Par conséquent, il faut deux salles de gym. L'architecte qui a gagné le concours a déjà fait un effort considérable. Nous retrouvons cet effort au niveau du prix de 58 millions: il n'a pas excavé, sauf pour les deux salles de gym qui sont de peu d'emprise dans le terrain, et cela représente une économie substantielle.

Monsieur Kunz, des économies ont été faites. La question des tableaux noirs m'a aussi fait m'interroger, tout comme M. Thion, qui est un praticien. Que signifie la suppression des tableaux pour les élèves ? Cela entraîne peut-être effectivement un manque d'attention parce qu'on sait très bien que les éléments de propagation du savoir sont extrêmement importants, afin d'attirer l'attention de ceux qu'on est censés éduquer - surtout à l'âge desdits élèves.

Voilà ce qui me conforte, Mesdames et Messieurs les députés, dans le fait de poursuivre la démarche qui est proposée ici - parce que c'est une réelle démarche d'économie. Je le rappelle: nous étions autour des 70 millions de francs et nous sommes descendus à 58 millions. Il faut continuer à faire des efforts, mais pas au détriment de l'enseignement. C'est pour cela que je vous invite, et que j'invite M. Kunz, à venir à la commission des travaux pour travailler avec nous en réalisant des économies qui ne soient pas seulement idéologiques, mais des économies qui améliorent réellement l'enseignement. Et j'invite tout ce parlement à voter ce projet de loi.

La présidente. Monsieur Kunz, je ne crois pas que vous ayez été mis en question, on s'est simplement interrogé... (La présidente est interpellée.)Alors rapidement, Monsieur Kunz.

M. Pierre Kunz (R). Très rapidement, Madame la présidente. J'ai été mis en cause, puisque l'on m'a taxé d'ennemi de l'école. On a dit que je ne voulais pas faire construire de cycles parce que je trouvais que c'était inutile. Permettez donc quand même que je corrige cela !

Par ailleurs, j'ai bien précisé - je ne l'ai probablement pas suffisamment bien précisé - que je m'exprimais en mon nom personnel.

Enfin, je comprends, à l'audition du long discours de M. Pagani, concernant des détails et des peccadilles, que son principal problème est qu'il s'intéresse aux fourmis. Il ferait mieux de s'intéresser à la fourmilière.

M. Alberto Velasco (S), rapporteur de majorité. Je déclare que je suis assez choqué par les propos de notre collègue Kunz... (Exclamations.)...parce que, Monsieur Kunz, vous avez tenu des propos démagogues... (Manifestation dans la salle.)...et je vais vous dire pourquoi. (L'orateur est interpellé.)Les propos, pas M. Kunz...

La présidente. Monsieur le rapporteur, parlons du sujet !

M. Alberto Velasco. Vous dites que ce projet est très cher et que, à la limite, il est mauvais, mais vous ne démontrez rien. Vous faites des affirmations sans apporter aucune démonstration. M. Koechlin, lui, a fait un exposé avec des démonstrations très intéressantes.

Je peux comprendre cette attitude de votre part, Monsieur Kunz, parce que vous êtes quelqu'un qui est torturé, il faut le dire, et tétanisé, par l'incidence qu'a eue la baisse d'impôts de 12,5% dans notre canton. Ce fait vous torture, au point d'affirmer ce que vous avez tout à l'heure affirmé. Il vous faut vraiment venir à la commission des travaux, Monsieur Kunz, comme l'a dit M. Pagani pour voir la réalité des choses.

Je suis d'accord avec ceux qui ont déclaré que ce projet était économiquement moins cher. Ce projet est plus cher financièrement qu'il ne l'est économiquement. Lorsque l'on dit qu'un projet est économiquement moins cher, c'est parce qu'il aborde toute une série d'aspects. Si l'on tient compte de toute une série de paramètres liés à la construction du cycle et si l'on fait des comparaisons, il s'avère qu'il est effectivement moins cher. Maintenant, si on prend la valeur absolue, c'est-à-dire la valeur financière du projet, à ce moment-là, on pourrait être d'accord et dire que ce projet est financièrement plus cher qu'un autre. Cependant, lorsque l'on parle d'une valeur économique, il faut y intégrer tout le cahier des charges auquel ce projet est soumis.

La question du tableau noir est beaucoup plus importante qu'on ne le pense - je l'ai dit en commission et je le répète ici. La présence des lavabos dans les salles de classe, pour une question d'hygiène, devra être prise en compte. Cela ne représente pas des économies grandioses. En revanche, ces économies sont susceptibles d'avoir des incidences dans le futur, qui pourraient entraîner des dépenses beaucoup plus importantes, si jamais il s'avérait qu'il faudrait revenir en arrière.

Je vous engage à voter ce projet de loi, qui est un projet d'avenir pour notre République.

M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. J'ai un motif de satisfaction: personne ne remet en cause la nécessité de construire le cycle d'orientation de la Seymaz et vous avez bien raison, parce que le besoin est avéré et aussi parce que la richesse de notre pays dépend pour l'essentiel de la qualité de l'enseignement qui sera prodigué. Nous n'avons en effet pas d'autre matière première que la matière grise.

J'ai en revanche un sentiment un peu plus mitigé quant à divers aspects de ce débat. Je suis rassuré d'apprendre que tous les groupes voteront en faveur du projet, mais je suis inquiet pour le suivant. En effet, je crains qu'il ne me soit rigoureusement impossible, dans la construction du prochain cycle, d'intégrer en une synthèse harmonieuse tout ce qui a été dit. Je suis extrêmement attentif à tout ce qui a été dit et qui, au demeurant, est souvent très pertinent. Cependant, je vous prie de ne pas perdre l'essentiel de vue: l'essentiel est de disposer, au meilleur coût, de la meilleure qualité pour les bâtiments dont nous avons besoin. Je reprendrai quelques-unes des remarques ou des critiques qui ont été formulées afin d'y répondre.

Monsieur Pagani, vous avez commis une petite erreur: les attributions au Fonds cantonal d'art contemporain ne se font pas bâtiment par bâtiment. Par conséquent, soyez rassuré, la décoration de ce cycle ne souffrira pas de la réduction de la dotation du fonds.

En ce qui concerne le coût: 58 millions de francs, c'est beaucoup d'argent. Une telle somme est difficile à faire rentrer dans l'enveloppe des investissements, je vous le concède. Cependant, j'affirme, et aucun d'entre vous ne l'a d'ailleurs contredit, qu'il n'y a pas, dans ce projet, d'éléments luxueux ou exorbitants, au point même que certains estiment que des équipements nécessaires ont été supprimés. Le coût, en fonction de l'équipement que l'on veut, est acceptable. Il arrive quelquefois que certains d'entre vous, architectes ou ingénieurs, disent: «Je vais trouver des économies dans un projet.» Ils viennent le regarder, au département. Mes services travaillent avec suffisamment de rigueur pour que personne n'ait jamais trouvé d'élément que nous aurions surpayé dans un chantier de l'Etat.

En ce qui concerne les places de parking, Madame la députée maire, vous savez que cette question est toujours éminemment controversée. Je conçois aisément les soucis de vos administrés de ne pas trouver des véhicules garés de manière sauvage, mais vous savez tout aussi bien que moi que les mêmes administrés ne souhaitent pas que l'on fasse des parkings trop grands, parce que cela a pour effet d'amener plus de véhicules. Par conséquent, la détermination du nombre adéquat de places de parc - je n'ai aucune expertise personnelle en la matière - se fait sur la base du nombre de voltigeurs estimés ainsi que d'un certain nombre de critères faisant partie des conceptions de la circulation qui nous sont transmises par l'office des transports et de la circulation. Nous reverrons encore cette question puisque vous m'y rendez attentif, mais il n'y a pas de miracle: s'il y a un grand parking, il y a plus de circulation; s'il y a un petit parking, il y a plus de parking sauvage. Résoudre cette quadrature du cercle est une tâche difficile, surtout dans le cadre de la construction d'une pareille infrastructure.

Madame Gauthier, vous avez beau me sourire mais, je suis navré, je ne peux pas être d'accord avec un certain nombre de choses que vous avez dites. En ce qui concerne le photovoltaïque, il a été exposé très clairement que la politique consistait à préparer les toits de manière qu'ils puissent le recevoir et qu'un opérateur, probablement les SIG - cas échéant, d'autres - viendrait s'y installer. Cela dans le but, notamment, de nous dégager de coûts au demeurant fort nécessaires et fort utiles, mais qu'il n'y a pas de raison que l'Etat assume, si quelqu'un d'autre les assume à sa place.

En ce qui concerne le concept énergétique - là aussi, je ne suis pas un expert en énergie - tout ce qu'on a vu, lors de l'examen devant la commission des travaux, toutes les assurances qui nous ont été données par les spécialistes en la matière me permettent de dire que vous avez été trop critique sur ce point.

Mesdames et Messieurs les députés, je vous remercie par avance de voter le crédit de construction du cycle de la Seymaz dont certains ont dit - il faut le rappeler - que c'était un beau projet sur le plan architectural, bien intégré dans cette région. Merci de le voter, donc, et merci surtout, par avance, lors de l'examen des prochains crédits pour des bâtiments scolaires - ô combien indispensables ! - d'éviter, par une addition d'exigences contradictoires, d'arriver à un résultat que personne ne souhaite.

La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons procéder au vote d'entrée en matière de ce projet de loi.

Mis aux voix, ce projet de loi est adopté en premier débat par 63 oui contre 3 non et 10 abstentions.

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.

La présidente. Monsieur le rapporteur de minorité, c'est pour l'article 1. Je vous laisse donc présenter votre amendement, Monsieur le rapporteur.

M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur de minorité. On est, comme à chaque fois, mis devant le fait accompli, car il est du ressort du Conseil d'Etat d'amputer le Fonds de décoration. Il n'y a pas de ligne budgétaire qui pourrait être supprimée chaque année, en regard du budget général. Chaque fois qu'il y a des travaux, il est réservé un pourcentage pour le Fonds de décoration. Au départ, cela représentait l'équivalent de 0,5%, aujourd'hui 1%. Cette somme est gérée par une fondation, le Fonds d'art contemporain, composée par un certain nombre de personnalités de notre République. Les bonnes années, comme celle durant laquelle on a construit l'autoroute de contournement, cela représentait 1,2 million de francs. Aujourd'hui nous disposons de 800 000 F. Or depuis le 1er janvier, le Conseil d'Etat a divisé cette subvention de moitié. Quelles que soient les garanties que nous donne M. Moutinot, par rapport au fait que ce cycle-là ne subira pas encore les foudres de la décision du Conseil d'Etat, cette somme est toute de même réduite de moitié sur le long terme, puisque ce n'est pas avant 2007 que nous aurons éventuellement une nouvelle politique décidée par le Conseil d'Etat.

Je vous demande donc, Mesdames et Messieurs les députés, de rajouter, pour cet article 1, la somme de 254 000 F. Je pourrais aussi vous demander d'amputer de 254 000 F le projet général, pour le remettre sur le Fonds d'art contemporain. (Manifestation dans la salle.)Je ne m'y attellerai pas aujourd'hui, mais peut-être le ferai-je dans un prochain projet de loi d'investissement, pour faire en sorte que le Fonds d'art contemporain ne soit pas prétérité par rapport à d'autres subventions.

La présidente. Merci. Je vais donc mettre cet amendement aux voix.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 40 non contre 23 oui et 12 abstentions.

Mis aux voix, l'article 1 est adopté.

La présidente. Je repropose votre amendement, Monsieur Pagani, parce qu'il est un peu différent.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 40 non contre 23 oui et 13 abstentions.

Mis aux voix, l'article 2 est adopté de même que les articles 3 à 6.

Troisième débat

La loi 9504 est adoptée article par article en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 9504 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 62 oui et 9 abstentions.

PL 8746-B
Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier le projet de loi de MM. Mark Muller, Christian Luscher, Jean-Michel Gros, Alain Meylan, Pierre-Louis Portier, Patrick Schmied, Pascal Pétroz, Hugues Hiltpold modifiant la loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites (L 4 05)

Deuxième débat

M. Rémy Pagani (AdG). Je rappelle, pour ceux qui l'auraient oublié depuis hier soir 23h, que nous sommes dans un débat concernant le droit des associations et, plus particulièrement, concernant la suppression de ce droit. Cela concerne tant des associations d'habitants, des associations de quartier, des associations de locataires que des associations de propriétaires. Elles n'auront plus le droit de s'opposer à un projet ou de proposer la mise à l'inventaire d'un certain nombre d'immeubles qui nécessitent d'être protégés, d'un point de vue architectural et historique.

Nous avons donc, si j'ose dire, concocté un amendement qui nous a pris un peu de temps, parce que nous avons dû le resituer dans le texte. Hier, à 23h, et je m'en excuse, nous avons compris que l'article 39A existait toujours. En fait, il n'existe plus selon la nouvelle législation que nous nous apprêtons à voter. Il devient l'article 39. Nous proposons donc d'abord, à l'article 63, la réintroduction du «ou» et non pas du «et», et puis à l'article 39, alinéa 1, l'introduction du texte suivant: «Le droit de recours est garanti aux communes et aux associations au sens de l'article 63».

Voilà, Madame la présidente. Nous espérons que ce parlement réservera un bon accueil à cette proposition de modification. D'autant plus que cette proposition ne touche pas forcément beaucoup d'associations de défense du patrimoine ou de défense des locataires, mais s'en prend surtout, de manière principale, aux associations de propriétaires qui sont, elles, les premières à s'opposer en cas de recours. Je trouve qu'il est assez paradoxal que ces mêmes milieux de droite qui, à longueur d'années, nous «bassinent» avec la défense des intérêts des petits propriétaires et des propriétaires de villa - je prends l'exemple de M. Muller - et qui se font les chantres de la défense de ces intérêts, veuillent enlever aujourd'hui à ces propriétaires la possibilité de faire valoir leurs droits.

La présidente. Merci. Nous n'avons pas tout à fait la même logique: je serai obligée de faire voter l'article 39 avant l'article 63, pour des raisons de chronologie, Monsieur le député.

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles 7, alinéa 2, et 10, alinéa 3.

La présidente. Nous sommes saisis d'un amendement à l'article 39.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 41 non contre 34 oui.

Mis aux voix, l'article 39 est adopté, de même que les articles 39A (abrogé) et 62, alinéa 3.

La présidente. Nous sommes saisis d'un amendement à l'article 63. Je mets aux voix cet amendement.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 39 non contre 34 oui.

Mis aux voix, l'article 63 est adopté.

Mis aux voix, l'article unique (souligné) est adopté.

Troisième débat

La loi 8746 est adoptée article par article en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 8746 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 43 oui contre 33 non.

PL 8829-B
Rapport de la commission des droits de l'Homme (droits de la personne) chargée d'étudier le projet de loi de MM. Michel Halpérin, Bernard Lescaze, David Hiler, Antonio Hodgers attribuant une subvention de 160'000F à l'UEDH pour 2003, 2004 et 2005

Premier débat

Mme Marie-Paule Blanchard-Queloz (AdG), rapporteuse. Ce projet de loi avait tout d'abord été renvoyé à la commission des finances, vous vous en souvenez. La commission des droits de l'Homme (droits de la personne) avait demandé à en être saisie pour pouvoir, avec l'appui de Mme Brunschwig Graf, faire le tour des subventions accordées dans le cadre de la promotion des droits de l'Homme à Genève. C'est ce que nous avons fait.

L'Université d'été des droits de l'Homme est une organisation non gouvernementale qui organise, chaque année, des sessions de formation pour des étudiants venus de l'étranger. Cette organisation n'a pas le statut d'université, ce n'est pas non plus une école privée, bien qu'elle dispense une formation à des jeunes. Cette association est largement subventionnée par les pouvoirs publics, puisque le département de l'intérieur, le département des affaires étrangères, la DDC - pour les bourses - le DEEE, la Ville de Genève et les communes genevoises subventionnent 86% de son budget. Tant au niveau fédéral que communal, cette association est donc largement subventionnée. Les 14% restants sont le fait des cotisations des participants - qui sont d'ailleurs, eux-mêmes, subventionnés par des bourses. Cette organisation demande 160 000 F par an pour trois années - 2003, 2004 et 2005. Cela représente une somme assez importante, puisqu'elle avoisine le demi-million de francs.

Pourquoi la commission des droits de l'Homme a-t-elle refusé à l'unanimité ce projet de loi ? Nous n'avons pas discuté de la qualité des cours qui sont donnés, ce n'est pas notre rôle, de toute façon. Nous avons refusé cet octroi, parce que cette université n'entre pas dans les critères d'attribution des fonds de la solidarité internationale, qui ne subventionne pas les frais de fonctionnement. Le DIP a refusé de subventionner cet établissement, malgré ses nombreuses demandes, puisque le canton de Genève ne subventionne pas les écoles privées.

Ce projet de loi soulève trois questions assez importantes. Tout d'abord, cela montre que certains députés relayent ce genre de demandes, qui sont importantes, devant ce parlement, pour ensuite retirer leur signature du projet de loi, quand cela pose des problèmes. Il est facile de faire miroiter à ces organisations le fait de relayer leur demande auprès de ce parlement, mais quand il s'agit de l'équivalent de trois fois la somme de 160 000 F, il faut bien réfléchir.

La deuxième question concerne la répartition du Fonds de solidarité internationale. On a vu, en faisant le tour des organisations subventionnées et en observant le fonctionnement de ce fonds - on l'a aussi vu à la commission des affaires communales, régionales et internationales en étudiant le rapport du Conseil d'Etat sur l'attribution de ce fonds - que les critères d'attribution n'étaient pas forcément très clairs, en ce qui concerne les droits de l'Homme. D'ailleurs, la motion qui a été déposée par les membres de la commission des affaires communales, régionales et internationales devrait permettre d'y voir un tout petit peu plus clair.

Enfin, la troisième question concerne le tourisme favorisé par ce type d'organisations. Face à notre refus d'octroi de subside, l'Université d'été des droits de l'Homme a approché la Chancellerie qui, elle, a accordé un fonds de 50 000 F. Cette somme a été accordée pour un projet bien précis qui se déroule, certes, à Genève, mais qui concerne les femmes autochtones dans les pays du Sud.

La commission des droits de l'Homme vous propose donc, à l'unanimité, de refuser ce projet de loi.

M. Michel Halpérin (L). Chacun sait que j'ai les yeux de Chimène ou, pour être politiquement et grammaticalement plus correct, les yeux de Rodrigue, pour la commission des droits de l'Homme, puisque la commission est une demoiselle, comme son épithète l'indique.

Je prends la parole sur ce sujet, bien que, comme l'a indiqué notre rapporteure et actuelle présidente de la commission des droits de l'Homme, Mme la député Marie-Paule Blanchard-Queloz, la commission, unanime, ait décidé qu'il n'y avait pas lieu de voter une subvention à l'Université d'été, parce que malgré le regard bienveillant que je porte sur cette commission parmi toutes les autres, je regrette un peu l'argumentaire dans lequel elle s'est engagée au sujet de l'appartenance, des liens ou de la proximité de l'Université d'été avec une autre organisation qui serait, elle-même - je le mets au conditionnel, parce que nous n'en avons pas vraiment eu la certitude - en rapport, plus ou moins étroit, avec l'Opus Dei.

Je voudrais exprimer, comme regret, deux choses distinctes. La première, c'est que nos travaux aient en quelque sorte été phagocytés par l'irruption de cette rumeur concernant un lien entre l'Université d'été, qui cherchait à obtenir une subvention et, possiblement, l'Opus Dei. Du coup, j'ai eu par moments le sentiment que nous naviguions davantage sur la mer des fantasmes que sur celle des réalités assurées. C'est une impression que je n'aime pas, dont j'essaie de me défendre de façon générale, et dont je regrette que notre commission ne se soit pas mieux défendue, à l'heure de sa propre délibération.

On peut dire, et Mme Blanchard-Queloz l'a fait tout à l'heure, que nous avons pris la décision de ne pas donner la subvention pour d'autres raisons que celle-ci, mais il suffit de lire le rapport pour se rendre compte que ce lien possible avec l'Opus Dei a joué un rôle tout à fait déterminant dans l'esprit des délibérants à la commission des droits de l'Homme. Par conséquent, partir d'une délibération, sur une indication aussi incertaine me paraît, en soi, problématique.

Le deuxième regret, c'est que nous n'avons pas exactement fait ce que nous avions décidé de faire. Au départ, comme l'a rappelé notre rapporteure, il s'agissait de déterminer quels étaient les critères d'attribution de subventions du canton en matière de droits de l'Homme. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle ce rapport avait fait une double circulation: il était d'abord allé à la commission des finances, ce qui était normal; et puis nous avions demandé à le recevoir aux droits de l'Homme, parce que nous pensions que ce serait, pour la commission, l'occasion de fixer une politique de distribution de subventions en matière de droits de l'Homme, et notamment de promotion des droits de l'Homme, ce qui est le but de l'Université d'été. Or, j'ai trouvé, d'une part, que les informations que nous avons reçues - et la rapporteure l'a dit tout à l'heure - étaient un peu insuffisantes et, d'autre part, que nous n'avons pas réussi à prendre une décision qui soit de nature à poser le cadre d'une politique de subvention en matière de droits de l'Homme. Dans ce sens-là, je crois que nous pouvons dire qu'avec ou sans l'octroi d'une subvention à l'Université d'été nous avons en quelque sorte eu un double échec à la commission des droits de l'Homme. J'aime assez cette commission pour le dire ici et espérer qu'à l'avenir elle réussira à mieux cadrer son travail.

Pour terminer, j'ajoute un troisième regret, un regret supplémentaire donc, mais qui n'est pas tout à fait de même nature que les deux premiers dont j'ai fait état: la publication de notre rapport a suscité des réactions dans le monde entier. C'est dire si Genève intéresse l'étranger, parfois. Nous avons reçu des lettres de professeurs d'universités des Etats-Unis, du Chili ou d'ailleurs, nous reprochant d'avoir pris pour acquis l'existence d'un lien avec l'Opus Dei - étant précisé que si ce lien existait, il ne fallait pas encore en déduire que cela mette un terme à toute possibilité de dialogue avec une institution - et contestant l'existence de ce lien.

Il faut donc savoir que lorsque nous prenons la responsabilité d'afficher des convictions de ce genre, elles ne sont pas dans notre intimité, réservées à cette assemblée, si docte soit-elle. Nous sommes lus à l'étranger et parfois critiqués pour la rapidité avec laquelle nous prenons des positions - rapidité confinant peut-être, ici, à la hâte.

M. Jean Rossiaud (Ve). La commission des droits de l'Homme a refusé, à l'unanimité, on vous l'a dit, le projet de loi demandant le financement de l'Université des droits de l'Homme. Les Verts n'ont pas de divergences sur la décision finale. En revanche, comme l'a exprimé M. Halpérin, tout à l'heure, nous sommes quelque peu mal à l'aise avec l'argumentation qui a été invoquée par bon nombre de commissaires et qui a été reprise dans le rapport, principalement.

Pour parler de notre position d'une façon positive, je dirai que nous sommes à priori tout à fait favorables au principe du financement de la formation dans le domaine de la promotion des droits de l'Homme, de la promotion et du développement de l'action humanitaire. Il est important de continuer à oeuvrer dans ce sens-là, pour que la place de Genève se trouve confortée dans l'arène internationale, et que les ONG la mettent à profit afin d'offrir des formations à des personnes venant d'Asie, d'Afrique et d'Amérique latine.

Pour financer l'Université d'été des droits de l'homme, il faudrait que l'UEDH réponde à un certain nombre de critères et de conditions. Or pour l'instant, et à notre avis, l'UEDH n'y répond pas totalement. On a dit que l'Université d'été des droits de l'homme n'était pas une université, que c'était une ONG et qu'on ne pouvait pas la considérer non plus comme une école privée. Cependant, le fait qu'elle veuille donner un certain nombre de cours de haut niveau académique - même donnés en partie par des professeurs de l'Université et en partie par des praticiens - l'oblige à un certain universalisme et à une certaine transparence.

Je pense que l'on pourrait revoir la question du financement de l'UEDH si cette dernière collaborait effectivement avec d'autres organisations travaillant dans le domaine de la promotion des droits de l'Homme ou si l'UEDH faisait, avec d'autres organisations, des projets communs qu'elle pourrait nous soumettre.

On pourrait encore revoir la question si le comité directeur de la formation était composé de représentants du monde académique - que ce soit de l'Université de Genève ou d'autres universités - afin de garantir deux choses: la pluralité idéologique des candidats sélectionnés et la pluralité de contenu des cours dispensés.

On pourrait enfin revoir ce refus de financement - cela a été relevé par M. Halpérin - si les liens institutionnels entre l'UEDH et l'OIDL, l'organisation pour le droit à l'éducation et la liberté d'enseignement - qui est d'obédience catholique et qui est proche de l'Opus Dei - étaient statutairement distendus. L'importance de l'OIDL, pour l'UEDH, c'est qu'elle possède un statut consultatif auprès de l'ONU. C'est à ce titre que les étudiants de l'UEDH font des visites à l'ONU. Je pense que cela relève de trop d'ambiguïtés et prête à laisser courir trop de rumeurs pour ne pas être pris en compte.

Par conséquent, et pour résumer, si l'UEDH collaborait plus avec les organisations; si elle ouvrait de manière effective son comité directeur à l'Université pour promouvoir la pluralité idéologique et des contenus dispensés; si, enfin, elle coupait les liens avec l'OIDL, on pourrait alors réévaluer la question.

M. Roger Deneys (S). Pour les socialistes, Genève, Ville de paix, Ville internationale, peut et doit développer son rôle en matière de respect des droits de l'Homme, à travers le monde, y compris en finançant des associations ou des institutions, privées ou publiques, qui sont actives, à Genève ou ailleurs dans le monde.

En l'occurrence, l'UEDH est une Fondation. Ce n'est d'ailleurs pas cette question de statut qui pose véritablement problème; c'est plutôt, comme l'ont évoqué MM. Halpérin et Rossiaud, la question des liens de l'Université d'été des droits de l'homme avec d'autres institutions - dont l'Opus Dei.

Monsieur Halpérin, vous dites que les liens entre l'UEDH et l'Opus Dei n'existent pas de façon très formelle. J'aimerais quand même préciser que M. Fernandez, le co-président de l'Université des droits de l'homme a reconnu, en commission, qu'il était lui-même membre de l'Opus Dei. Certes, c'est une personne parmi d'autres, mais on ne peut pas uniquement parler en termes de rumeur à ce sujet. Un lien existe. La commission dispose quand même d'éléments pour faire ce lien.

Je partage les préoccupations de M. Rossiaud. En effet, la question de la transparence préoccupe aussi les socialistes. Or, la transparence du fonctionnement de l'institution en question pose problème. Il s'agit d'une part de transparence financière: comment cette institution est-elle financée par d'autres associations - par quelles personnes privées ? Il s'agit évidemment aussi, d'autre part, de transparence du fonctionnement: la provenance des étudiants de l'Université d'été des droits de l'homme pose problème - une des questions soulevées en commission - compte tenu de liens éventuels avec un organisme tel que l'Opus Dei. On ne peut pas prendre le risque, à Genève, de voir des personnes actives dans le domaine des droits de l'Homme - par exemple en Amérique latine - qui seraient venues à Genève et qui auraient été repérées comme étant activistes dans ce domaine, compte tenu des problèmes ayant eu lieu en Amérique latine, notamment avec des dictatures militaires.

Pour que cette transparence soit garantie - ce qui est une condition de base pour que nous accordions une subvention - cela demande que des spécialistes, actifs dans le domaine, puissent garantir cette transparence. Dans ce sens-là, lors de nos auditions, nous avons eu le feedback d'un spécialiste du domaine à Genève, qui nous a dit: «Nous devrions avoir une sorte de coordination des organismes actifs dans le domaine de la formation aux droits de l'Homme, à Genève. Cette coordination des différents organismes devrait valider ou invalider le soutien à telle ou telle entité.»

Quelque part, cette question dépasse le cadre de cette commission des droits de l'Homme. Notre rôle a essentiellement consisté dans le fait de repérer ce manque de transparence, à l'heure actuelle, pour le moins. Cela ne préjuge de rien pour la suite, cependant il n'est pas possible d'accorder, aujourd'hui, dans de telles conditions, une subvention à cette institution.

Présidence de M. Michel Halpérin, premier vice-président

M. Thomas Büchi (R). S'il est facile, pour notre parlement, de toujours dire oui, on se rend compte à quel point il lui est maintenant difficile de dire non.

S'il est vrai que la commission des finances a peut-être traité ce projet un peu rapidement, je tiens quand même à rappeler qu'il nous a fallu six séances de commission des droits de l'Homme pour traiter d'une subvention de 160 000 F - on peut se poser la question de savoir si ces six séances sont justifiées ou pas, car il aura également fallu de multiples auditions, sans compter la lecture des lettres de pression pour nous dire que nous n'étions pas gentils, etc.

Avec l'état catastrophique des finances de notre République, telles que nous les connaissons, je crois que chaque fois que nous dirons non à quelqu'un, nous passerons un temps infini à le dire et à nous justifier de cette décision. Notre commission a fait un travail sérieux, approfondi, et je ne pense personnellement pas que l'argument de l'appartenance ou des liens proches de l'Opus Dei ait été déterminant.

Je me demande s'il est du ressort de notre parlement de continuer à subventionner des organismes qui sont plus des organismes privés que des organismes véritablement d'utilité publique. Cela ne veut pas dire que leur travail n'est pas utile, bien au contraire, mais c'est un travail qui est le fruit d'une initiative privée. Je crois qu'à ce titre-là notre parlement a le devoir de dire non à certains parce que nous n'avons tout simplement plus les moyens de dire oui. Il est évident que, étant donné la place que nous occupons sur la scène internationale et par rapport aux droits de l'Homme, nous devons encourager les programmes de formation en matière des droits de l'Homme. Mais il y a d'autres organismes qui le font avec beaucoup d'efficacité et il faut continuer à souligner cela.

L'ambiguïté de la Chancellerie nous a beaucoup surpris. La Chancellerie connaissait parfaitement les travaux de notre commission des droits de l'Homme. En outre, le rapport était pendant devant la plénière du Grand Conseil depuis plusieurs mois. Malgré tout, la Chancellerie a continué à attribuer des fonds. Nous en sommes un peu étonnés, et je tiens à ce qu'il soit relevé ici que c'est un peu limite.

Quant aux critères d'appréciation de base sur lesquels nous devons continuer à attribuer des subventions, Mesdames et Messieurs les députés, je crois qu'un parlement de milice n'a pas les moyens de les établir. C'est donc à l'exécutif, voire à la Chancellerie, de nous proposer un cahier des charges extrêmement précis, cahier des charges que nous n'avons encore jamais obtenu dans l'intégralité pour nous permettre d'en juger.

Notre groupe continue unanimement de refuser cette subvention.

Mme Marie-Paule Blanchard-Queloz (AdG), rapporteuse. Merci, Monsieur le président. Qui aime bien châtie bien ! Cependant, je vous ai trouvé, tout à l'heure, dans votre rôle de député, assez sévère avec notre commission. Nous avons demandé ce renvoi à notre commission dans le but de faire un tour d'horizon des subventions concernant la formation en matière des droits de l'Homme, à Genève. C'est ce que nous avons fait, M. Büchi l'a longuement rappelé. Nous avons auditionné Mme Cohen, responsable du Fonds de solidarité internationale, et nous avons étudié ces critères. Cela a aussi été fait à la commission des affaires communales, régionales et internationales, comme je l'ai dit tout à l'heure. Il s'agit de critères flous dont l'application est difficile. Nous avons essayé de faire des recommandations pour mieux définir ce qui touchait les droits de l'Homme, la promotion de la paix, etc.

Nous avons aussi fait le tour des gens subventionnés et non subventionnés, à Genève. Je rappelle que, à Genève, il y a le CODAP, qui dispense une formation permanente en matière de droits de l'Homme auprès des jeunes. C'est une formation très intéressante et très fouillée. Le CODAP a eu beaucoup de peine à obtenir un soutien de l'Etat de Genève.

Par ailleurs, l'Ecole Instrument de Paix, si elle s'est vue attribuer des fonds - qui n'étaient pas privés ni personnels mais enfin... - si elle s'est vue attribuer des fonds par M. Segond de manière un tout petit peu arbitraire, elle s'est retrouvée sans subvention lorsque celui-ci a quitté le département. Elle a fait, une première fois, une demande à la Chancellerie, qui la lui a accordée. Ensuite, on lui a répondu: «Non, nous sommes désolés, mais il n'y a plus de ligne budgétaire pour vous.» Par conséquent, l'Ecole Instrument de Paix, qui travaille avec les écoles genevoises pour la formation aux droits de l'Homme de manière bien spécifique et fait un travail reconnu, n'est aujourd'hui pas subventionnée. La session de formation d'été, si mes renseignements sont exacts, n'a pas été subventionnée.

L'Université d'été des droits de l'homme est subventionnée par la DDC, par le département fédéral des affaires étrangères, par le département fédéral de l'intérieur, par la Ville de Genève, les communes genevoises et le département de l'économie, de l'emploi et des affaires extérieures à 86%. Je trouve un tout petit peu exagéré que l'on reçoive des lettres - même si c'est du monde entier, cela ne veut pas dire que cela leur donne plus de valeur - pour faire pression sur ce refus.

Je vous recommande donc de voter non.

Le président. Le Bureau vous propose de clore la liste où il reste encore M. Antoine Droin, puis Mme la conseillère d'Etat Brunschwig Graf.

M. Antoine Droin (S). Je n'aimerais pas répéter tout ce qui a été dit. Un certain nombre de choses sont partagées par l'ensemble des membres de la commission des droits de l'Homme.

J'aimerais faire état, pour abonder dans le sens de Mme la rapporteure, d'une certaine ambiguïté que nous avons relevée et d'un doute qui nous est apparu. En effet, je pense que ce qui est ressorti de nos débats, tout au long de ces séances sur l'Université d'été des droits de l'homme, c'est que nous n'avons jamais pu acquérir l'intime conviction que nous pouvions aller dans le sens d'une subvention pour l'Université d'été.

Nous avons été saisis d'un doute, qui s'est présenté à deux niveaux. Il ne faut pas que nous nous cachions la vérité: la question de l'opportunité ou pas de ces relations plus ou moins transparentes avec des mouvements religieux comme l'Opus Dei existe bien; mais le rôle que l'Université d'été des droits de l'homme avait ou pas dans les milieux associatifs concernant les droits de l'Homme dans notre canton a aussi été mis en question, et c'est ce qui s'est avéré prédominant dans tous les débats. Il a ainsi été relevé que les relations qu'il y avait avec les différentes institutions n'étaient pas forcément des relations très étroites, loin s'en faut.

Quelques doutes ont également été émis quant à la qualité des cours dispensés, ainsi que quant au statut de ces cours: ces cours sont-ils des cours au sens universitaire du terme ou pas ? Sont-ce plutôt des rencontres plus ou moins informelles ? Je vous fais part de ces contradictions pour bien vous montrer que nous avons eu des doutes tout au long de nos débats.

Enfin, une mention qui a été faite dans le rapport de Mme Blanchard-Queloz, évoque - et c'est vrai que nous en avons parlé - de fédérer les milieux «droits de l'Homme». Et c'est vrai que, autant les milieux de la coopération internationale sont fédérés au travers de la Fédération genevoise de coopération, autant, au niveau des droits de l'Homme, il n'y a pas de fédération à Genève. C'est une lacune que les milieux concernés devront peut-être considérer, afin d'être plus représentatifs et d'avoir une meilleure réflexion sur l'ensemble de la dynamique et de la problématique des droits de l'Homme à travers le monde.

Il sera donc intéressant de voir si, à terme, on ne pourrait pas aussi, au travers de la loi 0,7% qui le stipule particulièrement, donner des crédits à une représentation des institutions en faveur des droits de l'Homme.

Mme Martine Brunschwig Graf, présidente du Conseil d'Etat. N'ayant pas assisté à la commission des droits de l'Homme mais à la commission des finances - qui a déjà traité cet objet - et puisque cette histoire date de longs mois, j'aimerais, en préambule, relever que, quelle que soit la noblesse de la cause dont nous parlons ici, franchement et pour le futur, il serait bon que nous nous préoccupions déjà de savoir ce que nous pouvons financer aujourd'hui.

Mme Blanchard-Queloz l'a rappelé, s'agissant de l'Ecole Instrument de Paix, et s'agissant notamment aussi du travail de Mme Monique Prindezis, le subventionnement ne serait pas nécessairement assuré - et j'ignorais cela.

Je ne suis pas d'accord, en tant que présidente du Conseil d'Etat, de vous encourager à continuer d'envisager le subventionnement de toutes sortes de causes très intéressantes, alors que, compte tenu des priorités et de l'évolution, il nous sera difficile de financer ce qui figure déjà dans nos budgets.

Il s'agit ici d'un projet de loi à propos duquel apparemment personne ne s'est demandé s'il était justifié ou pas d'accorder, pour les années 2003 à 2005, un crédit qui n'avait aucune base légale et qui n'était pas inscrit. Nous discutons donc d'un crédit complémentaire. Je ne fais aucune critique à la commission des droits de l'Homme, puisque sa conclusion l'amène à un refus, par conséquent, il n'est pas question ici de stigmatiser les députés. Cependant, il ne va pas de soi d'envisager que des crédits soient accordés sous prétexte que la cause est belle. Encore une fois, quelle que soit la noblesse des causes, il est bon que la commission s'intéresse déjà de savoir ce qui figure au budget.

Je vous signale qu'il y a 220 000 F, au titre de la promotion de la paix, au département de l'instruction publique; que vous y retrouvez, juste en dessous, le Gipri, que ce Grand Conseil avait souhaité subventionner - parce qu'après des années de lutte il a obtenu une subvention soutenue de façon très amicale par un certain nombre de députés. Cette Université avait débarqué dans notre parlement, sous les mêmes auspices, avec le même genre de soutiens et le même genre de sympathies.

Je rends donc hommage à la commission des droits de l'Homme. Je ne me prononcerai absolument pas ici sur certains commentaires émis à l'égard de certaines appartenances. Tel n'est pas mon propos.

Je vous encourage vraiment à faire au mieux avec ce dont nous disposons ou ce dont nous pourrions disposer demain. S'il vous plaît, quelles que soient les causes, ne confortez pas une fédération des droits de l'Homme dans l'idée qu'elle obtiendra une subvention, parce que la coopération internationale s'adresse à des projets. Or, ici, il ne s'agit pas de projet mais de subvention de fonctionnement.

Il y aura toujours des associations qui demanderont des subventions dans la durée. Et c'est justement le problème: ce n'est pas que nous devrions donner une fois, pour une belle oeuvre; nous devrions donner chaque année pour une belle oeuvre. Cela entraîne qu'il y a des obligés dans les budgets. S'il est douloureux de se voir refuser une subvention dont on n'a jamais bénéficié, il est encore plus douloureux de se voir refuser l'octroi d'une subvention qui a été accordée précédemment, parce que cela ne se justifie tout à coup plus. Voilà pourquoi je remercie donc la commission de sa position.

La méthode, aujourd'hui, consistera de se demander, avec courage, comment agir dans le futur, parce qu'il faudra en effet du courage pour dire non.

Le président. Merci, Madame la présidente du Conseil d'Etat. Nous sommes en procédure de vote. Vous vous rappelez qu'il s'agit du projet de loi 8829-B. Il y avait eu un préavis favorable de la commission des finances, il y a ici un préavis défavorable de la commission des droits de l'Homme. Je vous propose, pour la clarté du vote, que ceux qui acceptent d'entrer en matière sur le projet de loi d'une subvention votent oui.

Mis aux voix, ce projet de loi est rejeté en premier débat par 68 non contre 1 oui et 1 abstention.

PL 9074-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat ratifiant la charte d'éthique de la Banque cantonale de Genève
Rapport de majorité de M. Robert Iselin (UDC)
Rapport de première minorité de M. Souhail Mouhanna (AdG)
Rapport de deuxième minorité de M. Antoine Droin (S)

Premier débat

M. Gilbert Catelain (UDC), rapporteur de majorité ad interim. Je voudrais faire une petite synthèse parce que je n'étais pas très au clair quant à ce projet de loi, étant donné que je n'avais pas participé aux travaux de la commission.

Pour la majorité de la commission, il s'agit de permettre à la Banque cantonale de Genève de se doter d'une charte d'éthique qui présente quatre axes. Le premier précise la mission et les principes éthiques de cette Banque, visant à contribuer au développement de Genève et de sa région, notamment en proposant, aux résidents et aux entreprises qui travaillent dans cette région, un service bancaire compétitif, tout en exerçant et en s'inspirant de principes éthiques tels que l'intégrité, l'équité, la loyauté, l'indépendance et la transparence.

Le deuxième axe vise la responsabilité de la Banque envers ses clients et ses fournisseurs, à l'externe, et vis-à-vis de ses collaborateurs et actionnaires, à l'interne.

Le troisième axe vise à permettre à la Banque de respecter les principes de développement durable, notamment par rapport à sa consommation personnelle, mais aussi vis-à-vis de ses clients ou des prêts qu'elle devrait accorder à certaines entreprises.

Enfin, le quatrième axe vise à favoriser le fait que la Banque mène une politique d'information et de communication ouverte à l'égard de l'extérieur.

Cette charte d'éthique est nécessaire puisqu'il semblerait que la Banque cantonale de Genève, on l'a vu par le passé, n'est pas forcément au-dessus de tout soupçon et n'est pas non plus, dans le domaine de la banque et de la gestion bancaire, la meilleure banque de la place - même si c'est une banque partiellement étatique. Certains souhaiteraient que l'on aille encore plus loin. On peut les comprendre, on pourrait aller dans leur sens mais je crois qu'il faut commencer.

Nous vous proposons de maintenir cette charte telle quelle et de permettre au Conseil d'Etat de la ratifier, afin que la Banque cantonale, qui est en phase de rénovation, puisse travailler sereinement - parce qu'elle en a bien besoin.

Le président. Le Bureau vous propose de clore la liste . Il y a déjà M. Mouhanna, M. Droin, M. Grobet, M. Gautier, M. Odier, M. Bavarel, M. Schmied et Mme Bolay.

M. Souhail Mouhanna (AdG), rapporteur de première minorité. Un rapport de minorité, concernant le projet de loi relatif à la charte d'éthique de la Banque cantonale, ne signifie pas que la minorité que je représente est contre une charte éthique. Nous considérons simplement que la charte éthique qui nous est proposée est trop incomplète, trop vague et qu'elle manque de substance. Je vais m'expliquer à ce sujet.

Je rappellerai, en préambule, que la première fois qu'il a été question de charte éthique pour la Banque cantonale de Genève, c'était à l'époque de la fusion de la Caisse hypothécaire et de la Caisse d'épargne. J'ai d'ailleurs la date exacte de cela: c'était le 24 juin 1993. Dans l'article 11, alinéa 2, lettre f, de la loi sur la Banque cantonale de Genève, il était explicitement fait mention de la nécessité d'une charte éthique.

Nous sommes presque en juin 2005, par conséquent douze ans après, et l'on vient enfin avec une proposition de charte éthique. On sait ce qui s'est passé entre 1993 et 2005: d'énormes pertes ont été occasionnées, conduisant l'Etat à provisionner 2,7 milliards de francs. Comme certains se plaisent à diviser le montant de la dette par le total d'habitants, y compris les nourrissons, cela fait 6 750 F par habitant. Ces pertes énormes n'ont pas été occasionnées par de simples choix stratégiques au niveau de l'activité de la Banque - et de ce qui a constitué la Banque - mais il y a eu un certain nombre de dysfonctionnements, un manquement à un certain nombre de règles. Je dirais même qu'il y a eu falsification des comptes qui ont conduit la Banque cantonale de Genève au seuil de la banqueroute.

A partir de là, il était impensable que la Banque cantonale ne tienne pas compte de ces différents éléments et qu'elle donne à la collectivité, c'est-à-dire les citoyennes et les citoyens de ce canton, la responsabilité d'assumer ce risque. La Banque devait absolument faire le nécessaire pour garantir, aux contribuables, une activité et une gestion qui respectent un certain nombre de règles fondamentales régissant une banque - qui n'est pas une simple banque privée, mais qui est destinée à servir l'économie cantonale et qui est, de plus, garantie par l'Etat.

Tout à l'heure, j'étais étonné du refus d'une majorité de ce Grand Conseil d'inscrire les points 31 et 36 en urgence. Le point 31, directement lié à cette affaire, est une proposition de motion qui visait à rechercher l'origine et la cause des créances consenties aux débiteurs défaillants de la Banque cantonale de Genève. Le point 36 est une proposition de résolution signée par quatre membres de la commission de contrôle de la Fondation de valorisation, à savoir Mme Alexandra Gobet Winiger, malheureusement disparue, Claude Marcet, Véronique Pürro et moi-même. J'étais étonné que l'UDC vote contre l'urgence.

Qu'est-ce que cela à avoir avec ce rapport de minorité que je suis en train de défendre ? Il se trouve que la Fondation de valorisation réalise certains anciens gages de la Banque cantonale de Genève et qu'il y a d'énormes pertes sur certains de ces objets. Nous aurions donc voulu que ce Grand Conseil s'intéresse de plus près à une activité qui occasionne, pour la collectivité, des centaines de millions, voire des milliards, de francs de pertes, mais on n'a pas voulu de cela.

En commission des finances, un projet de loi visant à réduire le nombre de membres du conseil d'administration de la Banque cantonale a été accepté. Cela a pour effet de réduire les possibilités de contrôle démocratique de la Banque cantonale. Par conséquent, nous nous dirigeons, une fois de plus, vers un manque de transparence, de surveillance et de contrôle démocratique de cette Banque qui, je le répète encore, bénéficie de la garantie de l'Etat. Tous ces éléments me permettent d'affirmer que la charte éthique, telle que formulée, est minime et ne saurait nous satisfaire.

C'est la raison pour laquelle nous proposons que la charte éthique comporte les règles qui auraient dû être respectées pour éviter le désastre dont j'ai parlé, à savoir:

«La sincérité, c'est-à-dire une présentation des comptes de la Banque qui soit conforme à la réalité, avec une indication précise des provisions requises pour les crédits à risque.

»La publication de comptes permettant de connaître la situation financière de la Banque (en lieu et place de comptes de perte et profit et de bilans beaucoup trop succincts).

»La mise en place d'organes de contrôle efficaces et sans complaisance.»

On se rappelle la complaisance d'un certain nombre d'organes de contrôle, qui ont fait croire qu'il y avait suffisamment de provisions et on a vu la suite. Je reprends ma lecture.

«Une information complète du Conseil d'administration.

»Des règles précises en matière d'octroi de crédits, notamment les crédits commerciaux (en blanc) dont le montant doit être limité et les crédits hypothécaires qui doivent être consentis sur la base de la valeur de rendement des objets immobiliers et d'un apport correct de fonds propres.»

Le président. Monsieur le rapporteur, il vous faut conclure, vous avez épuisé votre temps de parole. Je vous remercie.

M. Souhail Mouhanna. Merci.

Le président. Vous reprendrez la parole plus tard, si vous le souhaitez. La parole est à... (Le vice-président est interpellé.)Vous avez encore une ou deux phrases, je vous laisse finir, dans ce cas. Mais si vous avez encore une longue page sous les yeux... (Manifestation dans la salle.)

M. Souhail Mouhanna. Monsieur le président, vous avez immédiatement fermé la liste et maintenant, vous me coupez au milieu de mon intervention. J'avais encore trois ou quatre paragraphes à lire, mais je reprendrai la parole, Monsieur la président.

Le président. Vous reprendrez la parole, c'est très bien.

M. Antoine Droin (S), rapporteur de deuxième minorité. J'allais dire que j'aurais fait miennes les paroles du rapporteur de première minorité, mais comme il n'a pas eu le temps de finir, je ne peux pas m'avancer, puisque je ne connais pas la teneur de la fin de son intervention. Mais comme je la suppose, je peux d'ores et déjà affirmer que nous partageons une grande partie des arguments qui ont été avancés par M. Mouhanna.

J'ai commencé mon rapport de minorité en citant la définition du mot «éthique» parce que cela me semble primordial de commencer par cela. Nous parlons ici d'une charte éthique. L'éthique est l'art de diriger la conduite, selon le «Petit Robert». Cela me semble un point fondamental dans le débat qui nous anime, ce soir. J'ai aussi mentionné, dans mon rapport, que «qui peut le plus, peut le moins». Je veux dire par là qu'il est primordial que l'élaboration d'une charte éthique soit faite avec la volonté de clairement définir ce que le mot «éthique» signifie à l'égard des activités de l'entreprise de la Banque cantonale de Genève, puisqu'il s'agit d'elle.

La charte qui nous est proposée est une charte minimum, une charte, méchamment dit, «bon marché». Elle se veut un document auquel n'importe qui pourrait adhérer puisqu'en fait elle est peu contraignante. C'est un peu là que se situe le problème. En effet, une charte trop diluée ralliera tout le monde autour d'elle, au lieu de faire adhérer les gens à quelque chose d'un peu plus contraignant, avec toute la valeur du mot «éthique», que j'ai défini tout à l'heure. Il est fondamental pour nous qu'il y ait une charte éthique, mais pas à n'importe quel prix.

J'aimerais ajouter, à ce que j'ai écrit dans mon rapport, quelques mots au sujet de la problématique du développement durable. L'article 3 de la charte fait mention du développement durable, mais cette mention constitue plus un prétexte qu'une réelle volonté d'aller dans le sens concret de ce développement durable. Il n'y a en effet pas la notion de la durabilité telle qu'elle est définie, et on ne tient pas compte de la notion d'équilibre qui doit subsister entre les trois composantes du développement durable que sont le social, l'environnement et l'économie.

Je reprends ici l'alinéa 2 de l'article 1 de la loi sur l'action publique du développement durable qui stipule que l'on «recherchera la convergence et l'équilibre durable entre efficacité économique, solidarité sociale et responsabilité écologique.» Cela est fondamental, si l'on veut appliquer le développement durable. Or ce n'est pas le cas dans l'article 3, tel qu'il nous est proposé par l'organe de la Banque cantonale. Il ne suffit donc pas seulement de mentionner les mots «environnement», «économie» et «social» pour faire croire que l'on fait effectivement du développement durable.

Il n'en reste pas moins que tout un nombre d'éléments ne figurent pas dans cette charte, comme M. Mouhanna l'a mentionné. Il s'agit de l'évasion fiscale, les questions de blanchiment, la spéculation immobilière, la question du contrôle, celle du suivi ainsi que les questions d'égalité entre hommes et femmes.

Enfin, l'article 1 de la charte, telle qu'elle nous est proposée, fait mention de la transparence. Il me semble que c'est un élément fondamental qui doit figurer dans une charte, et un article spécifique dans la charte, à ce sujet, me semblerait tout aussi fondamental.

En fonction de tout ce que je viens d'évoquer, je vous recommande, Mesdames et Messieurs les députés, de bien vouloir refuser ce projet de loi, afin que la Banque cantonale revienne avec une charte qui aura été plus pensée, pour que nous disposions d'une charte digne de ce nom.

Présidence de Mme Marie-Françoise de Tassigny, présidente

M. Christian Grobet (AdG). J'aimerais appuyer les rapports de minorité, en faisant un rappel historique au sujet de cette question.

Peu de temps après la création de la Banque cantonale, notre formation politique est intervenue à plusieurs reprises, publiquement et dans ce Grand Conseil, pour dénoncer un certain nombre de pratiques, pour le moins douteuses, de la Banque cantonale. La direction de la Banque a toujours traité ces interventions avec mépris, en prétendant que nous cherchions à dénigrer la Banque et que toutes ces accusations étaient infondées. Il est d'ailleurs à noter que, à l'époque, le Conseil d'Etat relayait servilement la direction de la Banque, en faisant des déclarations vraisemblablement préparées par la direction de la Banque cantonale. Deux ans avant la situation de banqueroute de la Banque cantonale, en l'an 2000, j'avais déclaré, dans cette enceinte, que j'étais convaincu que le bilan de la Banque n'était pas conforme à la réalité et que, en définitive, il s'agissait d'un bilan qui était faux.

La réalité a dépassé tout ce qu'on pouvait imaginer en ce qui concerne le «trafiquage» de la Banque cantonale puisque le surendettement aurait impliqué quatre fois plus de provisions que celles qui étaient créées. Devant ce désastre incommensurable, que même les esprits critiques n'avaient pu imaginer, on s'est tous demandé, en 2000, lors des débats pour trouver un moyen de sauver la Banque par le refinancement et le transfert d'actifs obérés à la Fondation de valorisation des actifs de la BCGe, comment cette situation avait pu se produire et comment cela se faisait que la Banque n'ait pas respecté de règles éthiques élémentaires en matière de gestion bancaire.

C'est à ce moment-là que certains députés ont rappelé que la Banque aurait dû adopter, en vertu de la loi sur la Banque, une charte éthique. Cette loi a été votée en 1993 et il me semble du reste que cette disposition prévoyant l'adoption d'une charte éthique avait été introduite par le Grand Conseil. Sept ans plus tard, cette charte éthique n'avait toujours pas été adoptée. Cela montrait à quel point la direction de la Banque se préoccupait des questions d'éthique. Evidemment que, à ce moment-là, nous avons été plusieurs à intervenir pour demander: «Mais enfin, cette charte va-t-elle finalement être adoptée ?»

Je reconnais les mérites de la direction actuelle, qui a réussi à remettre cette Banque cantonale d'aplomb, mais en ce qui concerne cette charte éthique, excusez-moi, la direction de la Banque a failli à sa tâche. Ce n'est pas possible ! Quatorze ans après l'adoption de la loi prévoyant la nécessité d'adopter une charte éthique, après tout ce qui s'est passé au sein de cette Banque - des pratiques mafieuses, une gestion déplorable au détriment des clients et, surtout, des contribuables qui doivent aujourd'hui payer - il est scandaleux qu'on nous sorte un document aussi vide de toute substance.

Ce qui nous intéresse, Madame la présidente du Conseil d'Etat, c'est de connaître quelles seront les règles éthiques en matière de gestion bancaire. Prenez le texte de cette charte éthique: on y parle de la mission et des principes, il y a du bla-bla dans le premier alinéa, des considérations générales. Ensuite, on parle de la responsabilité envers l'ensemble des partenaires, la gestion de la Banque dans le respect du principe du développement durable, mais on ne parle pas de ce à quoi on s'attend en ce qui concerne une banque, à savoir quels sont les principes éthiques en matière de gestion de la Banque. Quelles sont les règles que l'on doit appliquer ?

Il est quand même extraordinaire que cela ne figure pas dans un projet de charte que l'on nous soumet aujourd'hui. Je prendrai un exemple que je connais bien, celui des crédits hypothécaires. Qu'a fait la Banque cantonale en matière de crédits hypothécaires ? Elle a violé les principes non écrits élémentaires qu'appliquent toutes les banques - mais que d'autres banques, à vrai dire, ont aussi violés dans les années quatre-vingt - à savoir d'accorder des crédits hypothécaires sans qu'il y ait de fonds propres. Elle n'a encore pas tenu compte de la valeur de rendement des immeubles, et les valeurs qui ont été données à des objets immobiliers n'avaient aucune correspondance avec la réalité. Il s'agissait de valeurs totalement fictives qui n'avaient rien à voir avec la véritable valeur de rendement. C'est honteux qu'on ne dise même pas, aujourd'hui - après tout ce qui s'est passé, après les 5,3 milliards de crédits hypothécaires obérés qui ont été transférés à la Fondation de valorisation des actifs de la BCG - que les crédits hypothécaires devraient être accordés en fonction de la valeur de rendement des immeubles. (L'orateur est interpellé.)Eh bien oui, c'est une question éthique élémentaire puisque, Madame la présidente, la Banque cantonale a violé les règles d'éthique en donnant des valeurs fictives et en recourant à des expertises fictives. Il y a quand même eu des architectes, qui étaient les hommes de main de la direction de la Banque cantonale, qui se faisaient payer des honoraires élevés pour faire des expertises de complaisance. Tout le monde a vu un certain nombre de ces expertises, dans lesquelles on donnait des valeurs de cinq mille ou dix mille francs le mètre carré de terrain. C'était totalement faux et tout ça, c'était pour accorder des crédits à des petits copains. Cela est absolument scandaleux.

Ce document doit être renvoyé en commission, Mesdames et Messieurs les députés, pour que la commission des finances donne un peu de substance...

La présidente. Monsieur le député !

M. Christian Grobet. ...à cette charte éthique. Vous dites, Monsieur Catelain...

La présidente. Monsieur le député !

M. Christian Grobet. ...faisons un premier pas, nous pourrons toujours revenir après ! Mais vous vous trompez totalement. On ne pourra pas revenir, parce que la charte doit être proposée par la direction de la Banque.

La présidente. Monsieur...

M. Christian Grobet. Nous ne pouvons même pas proposer cette charte. Tout ce que nous pouvons dire, c'est: «Non, nous ne sommes pas d'accord avec un document vide de substance.» Nous ne pouvons que faire un certain nombre de suggestions à la Banque pour qu'elle nous présente un document digne de ce nom, qui réponde à ce scandale qui nous coûte 250 millions de francs par année, plombant ainsi les comptes de l'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, faisons notre travail et disons à la Banque cantonale...

La présidente. Vous avez dépassé les sept minutes de temps de parole, Monsieur Grobet.

M. Christian Grobet. ...«Vous avez bien travaillé au redressement de la Banque, mais établissez - je finirai par cela, Madame la présidente - les règles fondamentales qui doivent régir cette Banque afin que ce qui s'est passé ne se reproduise plus !» (Applaudissements.)

M. Renaud Gautier (L). Le débat sur l'éthique est relativement nouveau, dans ce parlement, cela est donc très intéressant. Cependant je crois, toute proportion gardée, qu'il faudrait remettre l'église au milieu du village - je peux m'exprimer ainsi à Genève - et ne pas confondre deux principes.

Le premier rapport de minorité justifie son refus en se calant sur des faits anciens qui tombent, pour la plupart, sous le coup de la loi. Le deuxième rapport de minorité, lui, se projette dans l'avenir en disant: «Si on veut cela, il faut faire ceci maintenant.» Enfin, mon préopinant, homme qui connaît tout le respect que je lui porte, me semble tout à coup avoir oublié qu'étant un des avocats les plus éminents de cette République, il ne saurait confondre les règles de droit qui gouvernent toute entreprise - les banques y compris - qui, lorsqu'elles sont violées, débouchent sur des plaintes, ce qui est le cas de la Banque cantonale ancienne version; et le sens que l'on peut donner à une charte éthique.

Mesdames et Messieurs, mettez toutes les choses que vous voulez, dans cette charte éthique: l'âge du capitaine, la hauteur des jupes, l'ourlet, n'importe quoi; tant que vous n'avez pas les moyens d'«implémenter» ou de forcer celles-ci, elles ne restent que des déclarations d'intention. Le droit qui gouverne les banques suisses est, comme vous le savez, le droit le plus complet et contraignant qui existe... (L'orateur est interpellé.)Je ne cherche pas, Monsieur le syndicaliste, à me battre sur votre terrain. Acceptez que, en la matière, j'en connaisse plus que vous.

Or, donc, confondre le droit et les contrôles qui sont imposés à une banque avec une charte d'éthique est une erreur fondamentale de jugement. On peut, on doit et il est souhaitable que toute entreprise puisse accepter une charte d'éthique. Celle qui nous est proposée par un certain nombre de membres du Conseil d'administration de ladite Banque cantonale viendra effectivement renforcer le cadre légal qui régule le monde bancaire. C'est une bonne chose, il y a de bonnes intentions, mais elles restent des intentions. Il est en effet souhaitable que la Banque cantonale s'y réfère et y adhère mais, soyons tout à fait clairs, si elle commet des infractions à cette charte d'éthique, il y aura quelques grands débats dans ce parlement sans pour autant qu'il y ait de sanction de quelque ordre que ce soit.

Soyons «proactifs», souhaitons que la Banque cantonale accepte et mette cette charte d'éthique en place, mais reconnaissons-lui sa vraie valeur ! Ne lui donnez pas l'image d'une hypothétique sanction ou de l'amélioration de ce qui s'est passé, et n'attendez pas d'elle qu'elle dirige le futur ! Il appartient à l'institution de déterminer publiquement quelle sera la qualité de ses rapports, en son sein et avec ses partenaires, et des engagements qu'elle prend, quant au respect d'un certain nombre de valeurs qui paraissent importantes à tout le monde, ici. Ce ne sera jamais rien d'autre que cela. Confondre le droit et l'éthique, Madame, est une grave erreur. (Applaudissements.)

M. Jean-Marc Odier (R). Le groupe radical approuvera cette charte mais avec une certaine réserve. Il s'agit de la même réserve qu'en l'an 2000, lorsque nous avions approuvé le sauvetage de la Banque: la réserve selon laquelle politique et économie ne font pas bon ménage. Nous pensions à l'époque, comme maintenant, qu'une banque devrait être beaucoup plus indépendante qu'elle ne l'est effectivement aujourd'hui.

En effet, une banque est un acteur économique. Elle se bat sur un terrain économique avec des concurrents et elle doit être performante pour fonctionner. A partir du moment où il y a un enjeu et une influence politiques, nous pensons que l'on en arrive à des situations telles que celles qui ont mené à la perte de la Banque qu'il a fallu sauver en l'an 2000. Ce que nous vivons aujourd'hui est, pour nous, une étape. Nous pensons que, à terme, la Banque cantonale devra être beaucoup plus indépendante et que l'Etat devrait se désengager de cette Banque.

Cette charte constitue une influence extérieure qui pourrait exercer une contrainte et constituer une entrave au bon fonctionnement de la Banque. Nous ne partageons donc pas du tout ce point de vue. Ce qui est, pour nous, admissible, c'est que cette charte a été choisie et définie par la Banque elle-même comme un objectif d'entreprise qu'il est possible, pour elle, d'atteindre. C'est à cette seule condition que nous allons approuver cette charte. Bien entendu, nous ne partageons pas le point de vue des rapporteurs de minorité qui, eux, au contraire, aimeraient encore ajouter des contraintes et des entraves susceptibles de porter atteinte au bon fonctionnement de cette banque.

Le groupe radical votera donc cette charte mais pas plus.

M. Christian Bavarel (Ve). Pour les Verts, il n'est pas question, ici, de juger de la légalité du travail de la Banque. Nous laisserons la commission fédérale des banques ainsi que les juges s'occuper de ce problème. Nous sommes bel et bien confrontés à un problème d'éthique.

Je me réjouis de voir que, dans cette salle, tout le monde s'accorde à dire qu'une charte éthique est nécessaire. C'est un outil indispensable. Le monde bancaire reposant sur la confiance et travaillant sur cette principale valeur, la confiance demande d'être dotée d'une charte éthique. Malheureusement, dans le monde du business, on a l'impression qu'il est possible de s'enrichir à n'importe quel prix et par n'importe quel moyen légal et que c'est ainsi que l'on doit fonctionner. On nous vend, plutôt que du libéralisme, la liberté du renard dans le poulailler. Il est certain que ce n'est pas à cela que l'on aspire.

Cette charte éthique n'est pas un but lointain à atteindre. Elle est un socle minimum sur lequel la Banque doit travailler. Les Verts pensent aussi que cette charte ne va pas assez loin mais qu'elle constitue déjà un pas dans la bonne direction. Il s'agit d'une amélioration par rapport à la situation actuelle. Nous sommes donc d'avis qu'il faille d'abord commencer par appliquer cette première charte éthique. Dans le futur, beaucoup d'améliorations pourront être faites sur cette charte. Nous soutiendrons donc cette charte éthique.

La présidente. Il est 19h. Je vous propose de nous arrêter jusqu'à 20h30. Nous reprendrons ce projet de loi pour le terminer, là où nous venons de nous arrêter. Puis nous enchaînerons sur les urgences.

Je vous souhaite un bon appétit.

Fin du débat: Session 08 (mai 2005) - Séance 47 du 20.05.2005

La séance est levée à 19h.