République et canton de Genève

Grand Conseil

La séance est ouverte à 17h10, sous la présidence de Mme Marie-Françoise de Tassigny, présidente.

Assistent à la séance: Mme et MM. Martine Brunschwig Graf, présidente du Conseil d'Etat, Laurent Moutinot et Pierre-François Unger, conseillers d'Etat.

Exhortation

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme et MM. Carlo Lamprecht, Robert Cramer, Micheline Spoerri et Charles Beer, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Christian Bavarel, Janine Berberat, Anita Cuénod, René Desbaillets, Jean-Claude Dessuet, Antoine Droin, René Ecuyer, Jean-Claude Egger, Philippe Glatz, Michel Halpérin, André Hediger, David Hiler, Nicole Lavanchy, Christian Luscher, Blaise Matthey, Jacques Pagan, Patrice Plojoux, André Reymond, Jacques-Eric Richard, Jean Rossiaud, Pierre Schifferli, Patrick Schmied, Louis Serex, Ivan Slatkine, députés.

Correspondance

La présidente. Vous avez trouvé sur vos places l'énoncé de la correspondance reçue par le Grand Conseil. Cet énoncé figurera au Mémorial.

Réponse du Grand Conseil au Tribunal fédéral concernant le recours de M. DERVEAUX Marc contre la loi 9198 (taxis et limousines) (voir corresp. 1976, 1994 et 1998) ( C-2006)

Annonces et dépôts

Néant.

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, nous reprenons le cours de notre ordre du jour.

M 1619
Proposition de motion de Mmes et MM. David Hiler, Loly Bolay, Gabriel Barrillier, Hugues Hiltpold, René Koechlin, Edouard Cuendet, Pascal Pétroz, Jacques Baud, René Ecuyer, Marie-Paule Blanchard-Queloz, Françoise Schenk-Gottret, Alberto Velasco, Michèle Künzler concernant l'accueil et le logement des requérants d'asile
M 1560-A
Rapport de la commission du logement chargée d'étudier la proposition de motion de MM. Florian Barro, Hugues Hiltpold, Pierre Kunz concernant l'accueil et le logement des requérants d'asile

Débat

Mme Françoise Schenk-Gottret (S), rapporteuse. Les travaux de la commission ont commencé dans la confusion car on a commencé à débattre de la politique d'asile au lieu de débattre du logement des requérants d'asile.

Les auteurs de la motion 1560 ont expliqué le sens de leur démarche. Ainsi, l'on a pu mettre de côté un débat stérile, pour arriver à un nouveau texte dont les invites ont été votées à l'unanimité.

Aussi, je vous invite à voter la motion 1619 avec la même unanimité que celle des commissaires et j'invite les auteurs de la motion 1560 à la retirer, comme cela a été convenu en commission.

M. Jacques Baud (UDC). Nous en sommes à la motion 1619. C'est bien celle-là ? Bien ! Que dire ? On parle de trouver des logements pour nos réfugiés, moi je veux bien... Je l'ai déjà dit en commission: nous manquons de logements pour nos enfants, pour nos familles, pour les gens de chez nous, et je pense qu'on ferait mieux de se préoccuper de ce grave problème de logement pour les Genevois et tous ceux qui habitent Genève.

Renvoyons cela au Conseil d'Etat, il verra ce qu'il peut faire ! Je ne pense pas qu'il puisse faire grand-chose, il y a des problématiques fédérales qui entrent en jeu. On nous envoie beaucoup plus de réfugiés que l'on ne peut en recevoir; il en arrive beaucoup plus que la Suisse ne peut en recevoir; il y a ceux qui doivent partir et qui ne partent pas et il y a également des problématiques au niveau de l'Hospice général pour loger tous ces gens-là.

Que dire de plus ? Pas grand-chose, sinon qu'il nous faut d'abord penser aux gens de chez nous, que nous négligeons en ce qui concerne le logement. Et lorsqu'on aura des logements pour nos familles, lorsque l'on aura des logements pour nos travailleurs, eh bien alors, je veux bien que l'on se préoccupe de cet objet ! D'ici là, je n'entre pas en matière.

Mme Loly Bolay (S). Je n'entrerai pas dans la polémique soulevée par M. Baud en commission, dont il a claqué la porte. Par la suite, il a présenté ses excuses, mais, là, il revient à nouveau à cette polémique...

La problématique des réfugiés relève de la compétence fédérale et le canton de Genève accueille 5% des réfugiés, ce qui représente 1% de la population genevoise - on sait qu'aujourd'hui le nombre des demandes a chuté de moitié. Cette problématique suscite les réflexions qui ont été concrétisées dans cette motion: on s'aperçoit que ce sont toujours les mêmes communes qui sont d'accord de recevoir des requérants d'asile. Lorsque nous avons abordé la problématique des APA, nous nous sommes très rapidement rendu compte que le département avait questionné toutes les communes qui ont toutes répondu défavorablement. C'est pourquoi il a bien fallu trouver des solutions pour le département, puisque ce problème relève de la compétence fédérale et que le canton doit, de toute façon, assumer ses responsabilités.

La motion issue de la commission demande, entre autres, une plus grande concertation au niveau des communes - il est vrai qu'il serait important d'intégrer, dès le départ, les communes dans le processus. La motion demande aussi que les structures d'accueil pour réfugiés soient beaucoup plus petites, qu'elles s'intègrent mieux dans le contexte des communes, que toutes les communes jouent le jeu - et non pas que ce ne soit l'affaire que de deux ou trois d'entre elles.

Cette motion, comme l'a dit ma collègue, a été votée à l'unanimité des membres de la commission des travaux: par conséquent, je vous demande de confirmer ce vote.

M. Gilbert Catelain (UDC). Cette motion est, étonnamment, signée par l'ensemble des membres de la commission, mais mon collègue Baud m'a dit n'avoir pas pu la signer puisqu'il avait quitté la commission au moment où elle l'a prétendument été - ou alors il n'a pas vu ce qu'il avait signé, ce qui est autre chose...

Les invites au Conseil d'Etat ne sont pas si extraordinaires que cela, puisqu'il s'agit de poursuivre une procédure de concertation avec le DAEL, l'Hospice général et les communes concernant la définition de centres d'accueil. On peut tout à fait concevoir cela puisqu'on a, en effet, une obligation légale de loger des requérants d'asile - la question est de savoir jusqu'à quand.

Auparavant, il y avait une importante restriction au travail des requérants d'asile, or cela a été assoupli: un requérant d'asile peut travailler au bout de six mois - même avant, puisque vous avez transmis une pétition qui devrait permettre à cette catégorie de personnes de travailler beaucoup plus tôt. Pour moi, cela veut donc dire que, si elles travaillent, ces personnes reçoivent un salaire - outre une indemnité de l'Hospice général. Je ne vois donc pas pourquoi ces personnes seraient privilégiées dans l'accès au logement. Dans ce canton, des milliers de personnes cherchent un logement et pour lesquelles la situation se détériore, notamment parce que l'Hospice général retire du marché locatif, dans différentes communes, des logements à bon marché pour les mettre à disposition d'une seule catégorie de la population. Cela est concevable à partir du moment où le requérant n'a pas le droit de travailler et ne peut donc pas subvenir à ses besoins puisqu'il bénéficie d'une aide de la Confédération et/ou du canton. Cependant, dès le moment où le requérant accède au marché du travail, je ne vois pas pourquoi il bénéficierait d'un droit au logement que le reste de la population n'a pas. A mon avis, il y a une incohérence à laisser cette invite telle quelle, il faudrait la cadrer par rapport à l'accès au monde du travail.

Pour le reste, les invites ne sont pas d'une grande gravité et «prévoir, dans la mesure du possible, une répartition équilibrée des lieux d'accueil entre les différentes communes» me semble être une bonne chose. L'UDC soutient ce type de mesures, car on s'aperçoit qu'une commune comme Vernier fournit un très gros effort d'accueil à l'égard des requérants d'asile et que des quartiers comme Vernier-Village ou Châtelaine ont une importante proportion de requérants d'asile, alors que d'autres communes, au contraire, ne sont pas solidaires et n'accordent pas leur contribution.

Une autre invite de cette motion consiste à «donner une meilleure information concernant la problématique de l'asile à Genève et l'action des pouvoirs publics à cet égard»: pourquoi pas ? Cependant, je ne vois pas en quoi cela va résoudre le problème. Cela pourra peut-être même causer une certaine frustration au sein de la population, puisqu'elle s'apercevra qu'on privilégie une catégorie de personnes plutôt que d'autres.

Enfin, l'invite consistant à demander au Conseil d'Etat de «poursuivre ses efforts auprès de l'Office fédéral des réfugiés pour que la répartition des requérants entre les cantons suisses, en fonction de leur âge et de leur état civil, soit équitable» me paraît primordiale. Effectivement, il n'est pas normal que ce canton soit contraint, malgré lui, d'accueillir davantage de population ou de catégories particulières de population que d'autres cantons, et les clés de répartition doivent être respectées par l'Office fédéral des réfugiés. C'est pourquoi cette invite me paraît judicieuse. Sous réserve de la première invite, le groupe UDC aurait pu soutenir cette motion.

Jusqu'à présent, le canton a fait beaucoup dans ce domaine, des constructions modulaires à la route du Bois-Brûlé et au château de Feuillasse ont été réalisées. De nombreuses de choses ont été accomplies alors que la population de requérants d'asile est plutôt en diminution selon les statistiques fournies par l'Office fédéral des réfugiés. Or aujourd'hui encore, l'Hospice général loge dans ses infrastructures des gens destinés à être renvoyés de Suisse puisqu'une décision négative en matière d'asile a été prise à leur encontre. Ces gens sortent donc du champ d'application de la loi sur l'asile alors que, malgré tout, certains d'entre eux sont encore logés dans des infrastructures qui ne sont pas ou plus prévues pour eux.

Mme Michèle Künzler (Ve). Il est vrai que cette motion, telle qu'elle ressort de la commission, a été votée à l'unanimité. Au fond, elle part de conflits surgis dans certaines communes au sujet de l'implantation d'hébergements pour les requérants d'asile. Et le seul point positif de la première motion est d'avoir permis de donner davantage d'informations. En effet, autour de cette problématique d'asile, j'ai l'impression que la plupart des gens ne savent strictement rien ! Vous connaissez beaucoup de choses, Monsieur Catelain, mais vous entretenez aussi la confusion ! Parce que vous nous dites que les requérants sont privilégiés par rapport à d'autres personnes à Genève. Les requérants d'asile dont l'accueil a été défini sont logés collectivement, dans des structures qui ne sont pas si confortables et intéressantes que cela ! Les requérants d'asile ne sont en tout cas pas en concurrence avec d'autres citoyens genevois qui demandent des logements. Il faut être clair: la situation n'est absolument pas la même pour les requérants d'asile que pour les citoyens genevois !

Vous évoquez le fait que les requérants d'asile ne peuvent pas travailler: vous devriez éventuellement parler à votre conseiller fédéral préféré, car c'est peut-être de lui qu'émane l'interdiction de travailler pour des jeunes qui pourraient parfaitement subvenir à leurs besoins !

Par ailleurs, il est vrai que des requérants sont logés dans des structures alors qu'il ne dépendent plus de la loi sur d'asile. Je rappelle cependant que ces requérants ressortissent tout de même à Constitution fédérale. Nous avons pu voir cet hiver, avec quelques collègues, dans quelles conditions les requérants - qui n'en étaient plus - étaient logés à la Voie-des-Traz: eh bien, c'était un scandale ! Les toilettes étaient tout simplement gelées et même une casserole avait gelé au fond de l'évier. On pouvait à peine, avec nos équipements d'hiver, tenir dans ces baraquements... Il est vrai que ces baraquements ne sont pas trop inconfortables en été; cependant, ce que nous avons vu cet hiver était inadmissible ! C'est la raison pour laquelle la plupart des gens ont été d'accord de rapatrier ces personnes aux Tattes. Qu'on nous demande de ne pas subvenir à leurs besoins de manière exagérée: soit ! Mais que l'on ne nous demande pas de laisser des êtres humains geler sur place !

Je vous invite donc à voter cette motion telle qu'elle est. Le plus important, c'est vraiment l'information à la population ! Puisque des fadaises sont racontées sans cesse...

Mme Jocelyne Haller (AdG). Mme Künzler vient de le dire, l'important c'est vraiment d'informer la population. L'intervention de M. Catelain vise à détourner l'attention de la problématique qui est au centre des préoccupations de cette motion. Monsieur Catelain, vous déviez le tir et vous parlez des personnes déboutées ! Revenons d'abord aux personnes qui ne le sont pas, celles à propos desquelles il incombe à l'Etat de Genève d'assurer des conditions de vie dignes et des conditions de logement respectables.

Quant à la population dont vous avez tout à l'heure parlé, à savoir les personnes ayant vu leur demande d'asile refusée, vous avez, Monsieur Catelain, à leur propos, demandé jusqu'à quand on devrait les loger: eh bien, Monsieur le député, jusqu'au moment où elles seront en mesure de partir ! Et jusqu'à ce moment-là, l'Etat de Genève se doit de leur assurer des conditions de logement qui soient dignes ! Mme Künzler l'a évoqué tout à l'heure, il y a eu de fâcheux précédents en la matière, et plus jamais cela ne devrait se produire à Genève ! Nous l'avons critiqué, et il ferait beau de dire aujourd'hui que, sous prétexte que nous ne voulons pas favoriser le séjour de ces personnes ici, il faille les faire vivre dans des conditions indignes...

Cela mis à part, vous avez proféré deux ou trois âneries, - vous me permettrez de l'affirmer - en disant que l'on retirait du marché des logements à bon marché au profit de la population déboutée et au détriment de la population genevoise. C'est un mensonge, et vous le savez pertinemment ! Les logements qu'occupent les requérants d'asile représentent une minorité du marché du logement à Genève, il s'agit d'hébergements collectifs. Et quand il s'agit de logements individuels, il s'agit de logements qui ne sont en rien enlevés à la population genevoise ! Le problème de logements que nous connaissons ici à Genève relève d'autres difficultés. Ce ne sont en tout cas pas les requérants d'asile, déboutés ou pas, qui sont à l'origine de cette pénurie de logements, ce serait mensonger de vouloir le faire croire !

Nous sommes tous convaincus qu'il faut soutenir cette motion et ne pas entrer dans des considérations telles que celles que propose l'UDC.

M. Gilbert Catelain (UDC). Je voudrais clarifier ce que j'ai dit: je n'ai pas fondamentalement remis en cause cette motion, j'ai simplement dit qu'il fallait cadrer la première invite, puisque lorsqu'un requérant d'asile en possession d'un livret N peut travailler après six mois, qu'il trouve en principe un emploi et qu'il bénéficie en plus d'un certain nombre de subventions sous forme d'assistance - notamment par rapport à la caisse maladie et par rapport aux soins - il a une capacité financière de se loger. Or, on n'en tient pas compte dans votre motion !

Je dis simplement que toute une série de requérants d'asile en possession d'un livret N travaillent sur la place de Genève, principalement dans l'hôtellerie; ils ont un salaire correspondant à des conventions collectives et, pour eux, on assure des logements qui ne sont pas forcément collectifs mais plutôt individuels. D'ailleurs, Mme Künzler - alors qu'elle était rapporteure de minorité à propos d'un objet à vendre de la Fondation de valorisation et qu'il s'agissait d'un immeuble dans lequel il y avait trente huit studios - disait qu'il fallait absolument que l'Etat achète ce genre de logements parce que cela permettrait d'éviter des spéculations. Et quand on lisait l'exposé des motifs, par qui était occupé cet immeuble composé de trente-huit studios ? C'était écrit noir sur blanc: l'Hospice général et des requérants d'asile. C'est noir sur blanc !

Une partie de ces requérants sont logés dans des logements collectifs. C'est normal: lorsqu'un célibataire arrive, on ne lui trouve pas, les premiers mois, un logement, cela va de soi. En revanche, on trouvera un logement individuel pour les familles. D'un autre côté, toute une série de citoyens suisses ou étrangers qui travaillent sur la place de Genève voient la recherche d'un logement rendue d'autant plus difficile que certains de ces logements sont, d'office, mis sur un pied d'inégalité de traitement, au profit d'une seule catégorie de la population. Par conséquent, les citoyens suisses ou étrangers, alors qu'ils travaillent et vivent légalement dans ce pays, doivent rechercher un logement ailleurs, notamment dans le canton de Vaud.

Quant aux requérants d'asile déboutés, excusez-moi, mais, à partir du moment où l'Hospice général se dit qu'il doit les loger à cause de la loi, etc., il est clair que cela ne les incitera pas à rentrer chez eux, cela est clair ! Je dis donc que, à partir du moment où les requérants d'asile sont déboutés, ils ne rentrent plus dans le cadre de la loi sur l'asile, qu'ils sont en séjour illégal et qu'il n'appartient plus au seul canton de Genève de les prendre en charge: ils ont l'obligation de quitter le territoire. Alors, est-ce que vous devez favoriser ce séjour illégal ou non ? Je suis d'avis que ce n'est pas le rôle de l'Etat de favoriser le séjour illégal. Mon discours se limite à cela pour les requérants d'asile; en revanche, lorsque les requérants rentrent dans le cadre légal de la loi sur l'asile, je suis parfaitement d'accord avec vous: nous devons trouver des solutions. Nous en avons d'ailleurs trouvées, le Conseil d'Etat a investi à Bois-Brûlé, à Feuillasse et à l'avenue de la Paix; on a bâti des constructions modulaires qui donnent entièrement satisfaction, et cela se passe très bien.

Par conséquent, pour moi, sur le reste de la motion, il n'y a pas de problème et je serai prêt à la soutenir.

Mme Loly Bolay (S). J'aimerais répondre brièvement deux choses à M. Catelain. Tout d'abord, Monsieur Catelain, mes collègues vous ont dit être allés voir, cet hiver, au Grand-Saconnex - sur ma commune, à mon grand regret - dans quelles conditions étaient logés les requérants d'asile. Eh bien, comme représentation de Genève, ville des Droits de l'homme, franchement, je n'ai pas du tout envie que l'on donne cette image-là dans le monde entier !

Deuxièmement, vous dites être très préoccupé par les problèmes de logement que rencontrent les gens... Mais nous vous avons proposé tout à l'heure une solution pour des logements à la caserne des Vernets: évidemment que cela touche les militaires, et c'est pourquoi vous n'en voulez pas ! (Remarques. Brouhaha.)Alors, je dis: «C'est au pied du mur que l'on reconnaît le maçon.» Par conséquent, si vous êtes aussi préoccupé que cela par le problème du logement, eh bien, vous n'avez qu'à voter les propositions que nous vous faisons !

Une voix. Bravo !

Mme Jocelyne Haller (AdG). J'aimerais revenir sur ce que M. Catelain vient de dire, même si je ne voudrais pas trop lui donner d'écho.

Les requérants d'asile qui travaillent s'assument, Monsieur Catelain, et ils contribuent à leurs frais de logement ! Il faudrait juste ne pas l'oublier. S'ils ont des ressources, elles sont prises en compte et déduites des droits qui leurs sont octroyés. Il serait mensonger de prétendre le contraire. Ne venez donc pas dire qu'ils sont totalement pris en charge ! Lorsqu'ils travaillent, ils contribuent à leurs frais de logement !

Par ailleurs, il y a une réalité que vous semblez ignorer: lorsque vous dites qu'ils prennent les logements dont d'autres devraient pouvoir bénéficier, est-ce que vous imaginez qu'il est facile, aujourd'hui, pour un requérant d'asile ayant ce statut-là, de trouver un logement, d'obtenir un bail ? Pensez-vous que les régies octroieront facilement des baux à des requérants d'asile ?! Alors, n'accusez pas les institutions de prendre un certain nombre de mesures qui permettent de garantir un logement à ces personnes ! Et ne dites pas que telle ou telle institution cache une certaine réalité parce que c'est ce à quoi elles sont contraintes, compte tenu des difficultés auxquelles est confrontée cette population pour obtenir des baux. Ces baux sont autant difficiles à obtenir pour eux que pour le reste de la population, étant donné la pénurie.

Ne confondez donc pas deux problématiques différentes ! L'une est liée au statut des personnes, l'autre est liée à la réalité du marché du logement aujourd'hui. (Applaudissements.)

M. Gilbert Catelain (UDC). Je comprends l'argumentation de Mme Haller concernant certaines régies privées qui refuseraient de faire signer un bail à un requérant d'asile sous livret N, sachant qu'il devra peut-être quitter la Suisse. En revanche, je suis tout à fait surpris que vos milieux et vos caisses de pension - et il y en a plusieurs, à Genève - refuseraient de signer un bail avec un requérant d'asile... Cela signifierait que vos caisses de pension sont donc xénophobes ?! Etes-vous en train de dire cela ? C'est affolant. (Exclamations.)

La présidente. La parole n'étant plus demandée, nous allons donc nous prononcer sur le renvoi de cette motion au Conseil d'Etat.

Mise aux voix, la motion 1619 est adoptée par 54 oui et 5 abstentions.

La présidente. Monsieur Hiltpold, vous avez la parole à propos de la motion 1560.

M. Hugues Hiltpold (R). Comme il l'a été rappelé par Mme Françoise Schenk-Gottret et comme nous sommes convenus lors de nos débats à la commission du logement, j'annonce le retrait de la motion 1560.

Le Grand Conseil prend acte du retrait de cette proposition de motion.

P 1180-A
Rapport de la commission du logement chargée d'étudier la pétition : Soutien au projet Rhino
Rapport de majorité de M. Hugues Hiltpold (R)
Rapport de minorité de M. Alberto Velasco (S)

Débat

M. Alberto Velasco (S), rapporteur de minorité. Nous sommes à nouveau face à notre saga RHINO. Cela fait vingt ans, maintenant.

Une voix. RHINO au poteau !

M. Alberto Velasco. Non, il faut quand même du respect pour traiter cet objet. Je vous demande d'entrée de cause, Mesdames et Messieurs les députés, de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat. Contrairement à ce que dit le rapporteur de majorité, cette pétition est d'actualité.

Aujourd'hui, RHINO est devenue une institution, un patrimoine culturel et social pour les Genevoises et Genevois. Il convient de maintenir cette expérience de vie qui y est faite et qui, à mon avis, est relayée ailleurs qu'à Genève, expérience différente que dans des coopératives ou des appartements.

Par ailleurs, les personnes habitant à RHINO ont essayé de trouver d'autres solutions: elles ont tenté d'en faire une coopérative et même proposé l'achat de ces immeubles. Or à chaque fois cela a été un échec, qui ne leur est peut-être pas forcément imputable. C'est à croire que certains milieux immobiliers ont très peu intérêt à ce que cette solution débouche sur une possibilité pour les locataires de RHINO.

Je ne peux donc qu'encourager ce Conseil d'Etat à donner un signal pour qu'une solution soit trouvée. En cas d'utilisation de la manière forte - expulsion par la force des personnes vivant à RHINO - je pense qu'une solidarité de plusieurs milieux de ce canton se formerait pour défendre cette expérience.

Je vous prie donc de bien vouloir renvoyer cette pétition - entre nous soit dit, ce n'est qu'une pétition - au Conseil d'Etat afin qu'une solution soit trouvée, pour la paix de notre République.

M. Jacques Baud (UDC). Squatter ! Je rappelle la loi: «Tout squatter est dans l'illégalité. Le fait de squatter un immeuble est une violence contre la propriété privée». Donc, je demande le classement de cette pétition; nous n'avons pas à en parler !

Mme Michèle Künzler (Ve). Il me semble qu'il faut voir plusieurs choses dans ce projet. C'est vrai, les squatters sont dans l'illégalité, mais pas forcément dans l'illégitimité. (Exclamations.)Voilà la nuance !

A droite, vous organisez souvent des fêtes auxquelles vous invitez des artistes; d'où viennent-ils ? Eh bien, ils logent souvent à RHINO ! J'entendais à la radio une émission sur les danseurs - qui sont payés au lance-pierres parce qu'il s'agit de sommes de l'ordre de 2000 francs par mois... Où logent-ils ? Je vous le donne en mille: à RHINO ! Ou dans des conditions similaires ! Et au niveau des milieux artistiques, il faudrait aussi réfléchir à toutes vos fêtes: qui réalise les performances artistiques que vous appréciez ? Voilà: des gens qui habitent à RHINO!

Peut-être que l'essentiel de cette pétition consiste à dire - pas seulement pour cet immeuble - qu'il faut favoriser toutes les expériences qui permettent un logement associatif ou différent, surtout pour une classe de la population qui n'est finalement pas aussi bien lotie que cela, à savoir les artistes.

Je vous demande de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat parce qu'il faut trouver des solutions dans ce domaine.

M. Rémy Pagani (AdG). Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs les députés, je comprends qu'après seize ans d'occupation de cet immeuble, on ne se souvienne plus de l'historique qui a entraîné celle-ci et que l'on soit amené à employer des procédés scabreux revenant à dire: «Ces habitants sont illégaux parce qu'ils sont illégitimes.»

Il faut rappeler qu'avant l'occupation qui a débuté en 1981 ces trois immeubles ont fait l'objet de spéculation - que nous avons constatées, car, chaque jour, tous les citoyens payent les effets de la spéculation provoquée par la Banque Cantonale de Genève en favorisant un certain nombre d'hommes de paille, ou en chair et en os, responsables de faire monter les enchères à des prix exorbitants.

Tel était le cas des trois immeubles, occupés maintenant depuis seize ans. Durant les dix années précédant 1981, ces immeubles ont fait l'objet de multiples ventes et achats, de sorte que la facture de ces spéculations financières s'élevait quasiment à 35 millions de francs. D'ailleurs, c'était également le cas pour une série d'immeubles s'étendant du boulevard des philosophes au rond-point de Plainpalais. C'est ça, la réalité, ce dont je vous parle et que les habitants associés ont cherché à contrer ! Et ce qu'ils veulent et continuent à défendre, c'est remettre des logements abordables sur le marché du logement.

Ensuite, une série de projets - tous aussi luxueux les uns que les autres - ont été opposés à ceux des habitants, et aujourd'hui les propriétaires nous annoncent qu'ils ont un projet, HLM quasiment, et que les habitants ayant défendu cet immeuble devraient, sans coup férir, quitter les lieux... Il est illusoire de penser que les choses pourraient se dérouler de la sorte ! Autant notre Parlement a été d'accord - lorsqu'il a été question d'ôter le poids, le boulet, qui «plombait» la Banque Cantonale de Genève - de mettre sur une voie de garage l'ensemble des immeubles faisant l'objet de spéculation dans les années 80, autant notre parlement doit aujourd'hui favoriser une solution négociée avec les habitants de ces trois immeubles, sans jamais oublier que ces derniers font partie intégrante de l'ensemble de la problématique des années 80 ! Ils doivent être considérés comme, si j'ose m'exprimer ainsi: «la queue de la comète» qui a fait exploser le marché immobilier durant ces années-là.

Nous nous devons de trouver des solutions en concertation avec ces habitants - que l'on doit remercier, Monsieur Baud, pour avoir entretenu ces immeubles tout au long de ces années de spéculation... (Commentaires. Brouhaha.)Si ces immeubles n'avaient pas été habités - vous le savez très bien, Mesdames et Messieurs les architectes et députés siégeant sur les bancs d'en face - et s'ils avaient été vidés dix ans avant 1981 ainsi qu'au cours des seize années suivantes, ils seraient maintenant en ruines ! Alors, de ce point de vue là, il y a un réel effort à fournir: dans la lutte contre la hausse des loyers et dans celle des locataires pour que ces appartements à prix modique restent sur le marché du logement.

C'est pourquoi nous vous invitons à trouver un modus vivendi avec les auteurs de cette pétition, de même qu'une solution qui ne mette pas, une nouvelle fois, notre République à feu et à sang pour simplement régler un problème provenant du fond des âges, soit des années 80, années de spéculation!

M. René Koechlin (L). Ce débat m'inspire une réflexion toute vaudoise: «Quand j'entends ce que j'entends et que je vois ce que je vois, je suis bien content de penser ce que je pense.» Quoi que l'on dise, tout ce qui touche à RHINO: c'est rosse ! (Exclamations.)

C'est pourquoi je vous invite à suivre le rapport de majorité qui nous propose de classer cette pétition.

M. Luc Barthassat (PDC). Quand j'entends M. Velasco nous dire que RHINO est un patrimoine pour Genève et les Genevois... (Rires.)... Excusez-moi, mais les chaussettes m'en tombent ! Et pourtant j'en ai mis des longues...

Ensuite, M. Velasco ose nous dire que les personnes habitant à RHINO sont des «locataires»... Alors que ce sont des squatters. Mais on devrait tous éclater de rire - excusez-moi, Monsieur Velasco !

Enfin, il faudrait «remercier les squatters pour la paix de Genève»... Mais ils feraient mieux de nous la foutre, la paix, entre nous soit dit ! (Rires.)

Je ne veux pas m'étendre sur le sujet, mais dire que ce projet est conforme à la LDTR. Alors, classons tout simplement cette pétition ! Et l'on fera la même chose pour celle d'après. Et passons à des choses sérieuses !

M. Sami Kanaan (S). Il est aisé de faire de l'humour facile ! Et je trouve dommage qu'un nouveau représentant de Genève au Conseil national, à Berne, témoigne d'un pareil mépris et d'une telle vulgarité. On peut être d'accord ou pas avec les objectifs poursuivis par les occupants de RHINO, cela est tout à fait légitime, mais on doit quand même y mettre les formes.

Dans le cas qui nous occupe, il est trop facile de se réfugier derrière l'illégalité - effective, au sens formel du terme - de l'occupation de RHINO pour simplement balayer cet objet, comme vous le faites d'ailleurs à chaque fois que l'on en parle. Parce que les habitants de RHINO ont objectivement contribué à dénoncer les abus de la spéculation immobilière ! Cela peut paraître lointain pour certains qui oublient volontiers cette période, pourtant marquée par des abus et des actes illégaux dont la plupart n'ont, comme par hasard, pas été sanctionnés... On attend toujours des sanctions contre les gens qui, pendant des années, ont soustrait des objets au marché immobilier, qui ont fait de la spéculation pure et qui ont pourri le marché du logement en créant des situations de nécessité et d'urgence pour une bonne partie de la population. C'est marrant, ça: ça ne dérange visiblement personne... C'est légitime, c'est légal, c'est normal !

En revanche, vous vous acharnez sur l'occupation de ce bâtiment - occupation qui est, c'est vrai, formellement illégale: vous méprisez la valeur de la contribution de ses habitants, que ce soit sous l'aspect culturel, social, en matière de logement ou d'intégration, et vous balayez cela du revers de la main ! C'est typiquement un mépris que l'on pourrait presque appeler «un mépris de classe»: quand les élites font des erreurs, c'est permis, c'est légitime; quand d'autres font des erreurs ou se permettent de ne pas respecter la loi à la lettre, cela, vous le trouvez alors fondamentalement inacceptable !

Aujourd'hui, évidemment que vous obtiendrez la majorité, et vous classerez cette pétition. Je suppose que vous classerez la suivante aussi. Mais vous ne vous débarrasserez pas du problème ainsi... Peut-être que les habitants de RHINO perdront leur bataille, peut-être qu'ils devront quitter les bâtiments; un projet existe, un pseudo-HLM qui le sera pendant quelques années, puis ses logements deviendront des habitations de luxe, avec des loyers élevés en pleine ville de Genève... Alors, quand vous prétendez résoudre la crise du logement, y compris pour les gens qui n'ont pas les moyens de se payer des appartements de luxe, c'est un peu contradictoire ! Et la lutte devra se poursuivre sous d'autres formes.

En refusant de vous montrer parfois un peu plus flexibles et ouverts à la discussion, vous durcissez l'affrontement inutilement et, par là même, vous empêchez toute discussion sereine pour trouver ensemble des solutions. On ne peut que regretter cette intolérance et cette totale fermeture au dialogue !

Mme Véronique Pürro (S). On a beaucoup parlé de logements au sujet de cette pétition et de RHINO, et il est vrai que, comme l'a rappelé M. Pagani, lorsque le squat de RHINO a été ouvert - j'ai fait partie de ceux qui, à l'époque, ont ouvert les portes de cet immeuble - c'était parce qu'il y avait une forte spéculation et un manque criant de logements à bas prix, comme c'est le cas à l'heure actuelle. J'aimerais aussi relever que, si RHINO a permis depuis lors de loger de nombreuses personnes, il l'est relevé dans la pétition et par les lettres de soutien qui lui sont annexées, hormis la contribution en matière de logement, RHINO aura aussi contribué de manière importante au développement de la culture genevoise.

On parle de «culture alternative». Pour certains, c'est très dévalorisant... (L'oratrice est interpellée.)... Non, ce ne sont pas forcément des petits copains ! Ce sont des gens dont les actions ont rayonné et rayonnent bien au-delà de nos frontières locales et nationales.

En effet, la Cave 12, développée à RHINO, est connue pour sa programmation pointue; ce qui se passe à la Cave 12 rayonne bien au-delà de Genève. Quand on voit que l'ADC, Association pour la danse contemporaine genevoise, et que le festival Archipel - qui ne sont pas des organismes de la culture parmi les moindres - de même qu'un réalisateur comme Alain Tanner, un chorégraphe comme Gilles Jobin et qu'un groupe connu sur scène internationale comme les Young Gods soutiennent RHINO pour sa contribution au développement de la culture locale, eh bien, on ne peut pas rester indifférent !

Alors, soit ! Il y a le logement, mais je crois que l'on peut remercier, féliciter et encourager RHINO pour tout ce qui y a été fait, contribuant ainsi au rayonnement de la Genève culturelle.

M. Hugues Hiltpold (R), rapporteur de majorité. Je voudrais rappeler que la commission a traité ce dossier correctement puisqu'elle a auditionné tant les propriétaires et les avocats représentant lesdits propriétaires que les occupants actuels du bâtiment, venus présenter leur projet qu'ils qualifiaient, je cite, de: «projet de logement alternatif social».

Cela étant, au moment où nous avons traité cette pétition, nous avons admis qu'il n'y avait pas d'autre choix que de classer cette pétition, dans la mesure où les invites faisaient référence à une autorisation de construire datant de 1997. Ladite autorisation de construire est, à ce jour, sans objet.

Si d'aventure ce Grand Conseil venait à renvoyer cette pétition devant le Conseil d'Etat, cela n'aurait strictement aucun sens. C'est la raison pour laquelle je vous recommande à toutes et à tous de classer cette pétition.

M. Alberto Velasco (S), rapporteur de minorité. Mon collègue Barthassat s'offusque du fait que «j'ose dire» certaines choses. Si, dans ce parlement, on n'ose pas tenir de tels propos, je ne vois pas où l'on osera le faire. Par conséquent, Monsieur Barthassat, oui, j'ose tenir certains propos - Dieu merci, la démocratie nous permet encore cela !

Ce sont vos milieux qui ont fait que ces personnes ont décidé d'occuper ces bâtiments, ce n'est pas nous - la gauche - qui avons dit à celles-ci: «Allez occuper !» Ce sont vos milieux, avec leurs pratiques spéculatives des années 70, qui ont entraîné de nombreuses occupations d'immeubles. Et ni moi ni M. Pagani ne sommes arrivés à la conclusion que ces bâtiments ont été maintenus en bon état grâce à leur occupation: c'est la brigade des squats. Dans le cadre de nos travaux à la commission du logement, nous avons reçu la brigade des squats qui nous a confirmé que, parce que ces bâtiments avaient été occupés et que le chauffage avait fonctionné, ils n'avaient pas été détériorés. Ne nous accusez donc pas de ce que les gens squattent à Genève ! Les gens squattent à Genève parce qu'on ne leur a pas permis, à un moment donné, de se loger dignement. Dignement ! Or il leur faut de quoi se loger dignement.

Si vous voulez régler les problèmes de squats, Messieurs, c'est possible ! Mais il faudra au préalable que toutes les personnes qui sont squatters, avec leurs enfants, puissent être logées de manière digne. Pour le moment, aucune solution ne leur a été proposée. Je tiens par ailleurs à dire que ces personnes ont, à maintes reprises, essayé de racheter les immeubles et de trouver une solution à leur situation.

Au sujet de la culture, Monsieur Barthassat, votre insensibilité à ce domaine fait que vous ne pouvez pas comprendre ce qui s'est passé là-bas ! La culture ne se trouve pas que dans l'art de faire des paysages. La culture, vous savez, c'est très, très vaste... Il y a d'autres domaines que le vôtre. Il faut donc quand même élargir votre horizon culturel.

Pour le reste, je comprends les propos du rapporteur de majorité - ce que vous dites est vrai, Monsieur Hiltpold: l'objet pour lequel cette pétition a été adoptée n'est pas de mise aujourd'hui. Malheureusement, vous le savez, le débat concernant RHINO dépasse les propos et l'origine de la pétition. C'est pourquoi, si je demande que cette dernière soit renvoyée au Conseil d'Etat, c'est pour que nous trouvions, de manière républicaine, une solution à ce problème.

M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Je vais vous donner simplement quelques informations sur l'actualité de ce dossier. Après les efforts que l'Etat avait réalisés pour tenter de trouver une solution, la Ville, de son côté, sur la base d'une résolution de son Conseil municipal, a essayé d'instaurer une sorte de table ronde pour trouver une issue qui arrangerait tout le monde. Malheureusement, ces efforts ont été vains, et je n'entends pas me prononcer sur la question de savoir à qui en incombe la faute. En son temps, vous nous aviez demandé de faire ces efforts: nous les avons faits.

Aujourd'hui, que se passe-t-il ? L'autorisation précédant celle dont il est question dans la pétition est devenue caduque, faute - par le propriétaire - de l'avoir prolongée. Nous ne portons donc aucune responsabilité à cet égard.

Une deuxième autorisation a été délivrée en mai 2004; elle fait aujourd'hui l'objet de recours et, par conséquent, nous sommes les uns et les autres dans l'attente d'une décision judiciaire.

Mises aux voix, les conclusions de la commission du logement (classement de la pétition) sont adoptées par 39 oui contre 31 non.

P 1415-A
Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition Sauvons Rhino !
Rapport de M. Pierre Weiss (L)

Débat

M. Pierre Weiss (L), rapporteur de majorité. Concernant cette pétition, nous étions arrivés, en commission, à une autre conclusion que celle du cas précédent.

Pour écourter les débats, je crois qu'une même solution pourrait tout à fait être adoptée et qu'il conviendrait par conséquent de classer cette pétition, laquelle permet de constater l'opposition qui subsiste entre le droit de propriété, d'un côté et, de l'autre, le droit au logement squatté.

La présidente. Vous proposez donc formellement un classement de cette pétition, Monsieur le rapporteur ?

M. Pierre Weiss. C'est exactement cela, Madame la présidente.

M. Alain Etienne (S), rapporteur de minorité. J'aimerais relever les mauvaises conditions de travail de la commission. C'est assez rare, mais il n'y a pas eu cette fois-ci de débat après les auditions: les députés de l'Entente ont fait le forcing pour voter immédiatement sans donner aucune explication quant à leur position - et maintenant encore, M. Weiss vient de dire qu'il faut appliquer un traitement vertical à cette pétition.

Cette dernière pose la question du logement associatif: quelle place accordons-nous au logement associatif dans cette République ? Renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat, c'est donner un signe fort quant aux besoins qui se font sentir en matière de logement associatif.

Nous en avons parlé tout à l'heure, historiquement il faut reconnaître qu'il y a eu spéculation sur ces immeubles...

Une voix. On l'a déjà dit avant !

M. Alain Etienne. ... les logements sont restés vides inutilement. Le projet RHINO prend donc tout son sens. Il y a eu dans cette affaire un abus du droit de propriété; nous devons ainsi donner une nouvelle impulsion au droit au logement. Lors des travaux de la commission, il nous manquait une information essentielle: le propriétaire était, à l'époque, toujours en attente de l'inscription au registre foncier de l'immeuble sis boulevard de la Tour 14. Et je ne sais pas si, selon les informations que nous avons reçues aujourd'hui, cette inscription au registre foncier a été effectuée entre-temps.

Ici deux projets sont présentés: celui du propriétaire, qui comprend 19 appartements de 7 pièces avec un loyer de moins de 2000 francs par mois, en application de la LDTR. Comme l'a rappelé M. Kanaan, dans quelques années les loyers de ces appartements deviendront libres...

Quant au projet de RHINO, il est original: il prévoit 75 logements avec un loyer de 375 francs permettant d'accueillir notamment un grand nombre d'étudiants et il faut aussi relever - Mme Pürro l'a fait - toute l'importance de RHINO sur le plan de la scène artistique. Si nous voulons voir se poursuivre ce genre d'expériences, il serait possible d'accorder à l'Association RHINO le droit de superficie qu'elle sollicite. Il faut donc donner une chance au projet RHINO.

C'est pourquoi je vous demande de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat.

M. Rémy Pagani (AdG). Tout à l'heure, j'ai parlé du passé, aujourd'hui je tiens à parler du présent et à rappeler la loi à certains. N'est-ce pas Monsieur Weiss ?!

Il a fallu que les locataires et les associations d'habitants se mobilisent à plusieurs reprises pour inscrire le droit au logement dans notre constitution; une votation a également eu lieu pour inscrire dans la loi la possibilité pour le Conseil d'Etat de réquisitionner les appartements vides. C'est inscrit dans la loi ! Cela a d'ailleurs été contesté au Tribunal Fédéral, or ce dernier a confirmé la légalité de cette loi. Parce qu'il existe encore aujourd'hui plus de mille logements laissés volontairement vidés par les propriétaires ! En pleine pénurie de logement ! Vous pouvez consulter les statistiques: il y a encore aujourd'hui plus de mille logements vides qui sont retirés du marché pour faire... (L'orateur est interpellé.)Pour faire monter les prix - effectivement, Monsieur Kunz ! C'est ce qui est en train de se passer.

Nous avons dénoncé quelques-uns des mille logements vides, il y a de cela une année, au chef du département. Nous avons fait cela pour que soit effectivement appliquée la loi et pour réquisitionner ces appartements vides. Or qu'a fait le département ? Jusqu'à maintenant rien ! Sous prétexte que ces immeubles seraient répartis de manière diffuse, qu'on ne saurait pas très bien où ils se situent et que les SIG auraient de la peine à déterminer où ils se trouvent... Toujours est-il que, Mesdames et Messieurs les députés, ce que font les squatters aujourd'hui, c'est appliquer la loi ! A la place du Conseil d'Etat ! (Rires. Brouhaha. La présidente sonne la cloche.)Eh oui, Mesdames et Messieurs ! Je le dis très sérieusement. Et le corps électoral, contrairement à ce que vous imaginiez, s'est prononcé pour la réquisition des appartements.

Ces mille logements vides, retirés du marché, constituent un abus de droit de la part des propriétaires ! Et pour combattre cet abus de droit, le gouvernement devrait se mobiliser pour inviter d'abord et forcer, le cas échéant, les propriétaires à remettre sur le marché ces logements qui font cruellement défaut à la majorité de la population ! Le gouvernement ne le fait pas: les squatters sont donc en droit d'appliquer la loi qu'a voulue le corps électoral. C'est ce dont il est question. J'imagine donc que cette pétition respecte la loi... Enfin, je n'imagine pas: cette pétition respecte la loi.

Un autre problème surgit: parmi les propriétaires, un avocat, qui siégeait parmi nous il y a de cela deux législatures, a trouvé un artifice juridique - que je trouve assez scandaleux - selon lequel l'Association RHINO serait illégale parce qu'immorale... Il demande le séquestre des fonds de l'Association RHINO et, pire encore: la dissolution de cette association ! Notre démocratie genevoise - et même helvétique - a une base associative fondamentale; nous appartenons tous à une association, que ce soit une association professionnelle, une association syndicale, une association de quartier, une association de locataires ou une association de chanteurs. Or aujourd'hui, certains avocats, sous prétexte de retrouver leurs biens, qu'ils ont en fait laissés dépérir pour pouvoir mieux spéculer, demandent la dissolution d'une association et s'attaquent aux libertés publiques et fondamentales ?! Il faut dénoncer cela, parce que c'est inadmissible ! Et j'espère que les juges qui ont été saisis de cette forfaiture sauront répondre de manière adéquate à la mesure de cette initiative scandaleuse.

La présidente. Merci, Monsieur le député. Je vais faire lire une lettre qu'on avait reçue le 9 mars 2004... (Exclamations.)Si ! Et je demande à Mme la deuxième vice-présidente de la lire.

Courrier 1762

M. Sami Kanaan (S). Merci, Madame la présidente, d'avoir fait lire cette lettre car j'allais justement le demander. Parce qu'au-delà des questions de fond le rapporteur de majorité a fait un travail particulièrement mauvais et critiquable. En effet, le rapporteur peut prendre position sur l'objet concerné, mais il doit se limiter à décrire les faits et à transmettre les déclarations des commissaires, sans les détourner en fonction de ses envies ou de ses opinions. Le rapporteur de majorité a manipulé les travaux de la commission, dont il se permet aujourd'hui de modifier les recommandations. L'intervention initiale de M. Weiss, qui propose de classer la pétition, est donc inacceptable du point de vue du règlement: M. Weiss se place au-dessus des lois et règlements alors qu'il en prêche le respect.

J'aimerais, dans la foulée du débat précédent, appuyer les dires de Monsieur Pagani... (Commentaires.)Même si cela vous surprend ou vous fait rire ! Il y a de la part de la majorité, en commission comme en plénière, un mépris profond vis-à-vis d'une autre manière de faire, d'une autre manière d'exister, qui a pourtant sa légitimité. Et Genève a pour tradition de se montrer relativement tolérante et de préférer le dialogue à la bataille... Or dans ce cas, la majorité fait preuve d'esprit de censure, tout en tolérant par ailleurs que les promoteurs immobiliers abusent de leur position. Ici en particulier, les promoteurs concernés n'ont aucune leçon à donner: ils n'arrivent pas à finaliser leur projet et sont incapables d'obtenir des autorisations parce qu'ils ne maîtrisent pas le dossier ! Est-ce le genre de projet que vous voulez soutenir - face à un autre projet qui, lui, est cohérent sur tous les plans?! C'est regrettable.

Encore une fois, je vous invite à renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat et vous en remercie.

Mme Michèle Künzler (Ve). J'allais, comme M. Kanaan, m'offusquer de la légèreté de M. Weiss. De quel droit se permet-il de changer les conclusions d'un rapport ?

M. Pierre Weiss. Je l'ai fait à titre personnel.

Mme Michèle Künzler. Oui, justement ! Seulement vous n'êtes pas là à titre personnel, Monsieur Weiss, vous représentez les citoyens ! Voici précisément ce que nous vous reprochons: cette légèreté face à la démocratie ! (Remarques. Brouhaha. La présidente agite la cloche.)

Vous méprisez aussi tous les citoyens qui ont signé cette pétition, et ils ne sont pas peu nombreux ! Il ne s'agit pas seulement des gens qui habitent RHINO, ce sont 3799 citoyens, pratiquement 4000 personnes, qui ont signé cette pétition ! Elle mérite quand même qu'on l'étudie et lui trouve une solution. Parce qu'au fond les gens de RHINO aimeraient bien rester dans le bâtiment qu'ils occupent actuellement, mais la pétition demande aussi qu'il y ait un vrai projet pour le logement associatif et artistique. Peut-être que l'issue ne sera pas forcément la même que celle de l'immeuble du boulevard de la Tour, même si tout le monde le souhaite - en tout cas là-bas - et peut-être que l'issue déplacera les habitants de RHINO. C'est pourquoi nous voulons renvoyer ce projet au Conseil d'Etat. Ce projet est intéressant, le concept même du logement associatif est très intéressant.

Nous respectons la propriété privée puisqu'elle est inscrite dans la constitution, mais il ne faut pas la sacraliser non plus ! Parce que les propriétaires - ou soi-disant propriétaires - essaient de prouver qu'ils le sont depuis près de vingt ans: ils ont passé des cédules et n'arrivaient même pas à se faire inscrire au registre foncier... Soyons clairs: cet immeuble a fait l'objet d'énormes spéculations et a été transmis tant de fois que l'on n'arrive même pas à en trouver le propriétaire légal pendant vingt ans.

Alors, cela constitue peut-être une erreur d'être squatter, mais, en l'occurrence, il nous faut d'abord trouver un propriétaire à cet immeuble. (Applaudissements.)

Mme Jocelyne Haller (AdG). M. Weiss n'aime pas les membres de l'Association RHINO. En fait, M. Weiss n'aime pas RHINO, tout simplement.

Une voix. Nous non plus !

Mme Jocelyne Haller. Oui, vous êtes quelques-uns à partager ce sentiment, et c'est bien de cela dont il est question. (L'oratrice est interpellée. Commentaires.)Quand vous en aurez terminé, je pourrai reprendre... Merci !

Cette évidence transpire dans son rapport de majorité et, à vrai dire, elle s'est marquée avant même le début des travaux de la commission sur cet objet, tant M. Weiss piaffait d'impatience de pouvoir faire un sort à cette pétition. Ses sentiments et ses opinions lui appartiennent, mais se devait-il de nous les faire aussi complaisamment partager alors même qu'il annonçait à la page deux de son rapport qu'il renonçait à tout commentaire dans le cadre de son rapport ? Etait-il nécessaire d'orienter de manière aussi subjective le rapport de majorité et de sortir de leur contexte certaines déclarations des pétitionnaires pour mieux les tourner en dérision ? S'agissant d'un rapport de majorité, ces circonvolutions manquent singulièrement de fair-play, et je tenais à vous le faire remarquer, Monsieur Weiss ! Je ne reviens sur les propos que vous avez tenus en préambule, il est évident que vous avez outrepassé votre rôle de rapporteur en la matière.

Cela a été dit longuement tout à l'heure l'Association RHINO incarne depuis de nombreuses années le projet de développer des logements associatifs, abordables et porteurs d'un autre projet de vie. Car il ne s'agit pas uniquement d'appartements dans cette démarche, mais d'un projet alternatif de logements assortis d'espaces conviviaux et culturels - dont il faut, au passage, saluer la longévité.

Désignés par certains comme ne respectant ni les lois ni les règles, les membres de l'Association RHINO sont quasiment dépeints comme d'odieux délinquants qui réquisitionnent des espaces immobiliers au détriment d'investisseurs bien évidemment bienveillants... Cette bienveillance reste à être prouvée, les avatars du marché du logement devraient nous renseigner à ce propos.

Que les squatters ne soient pas dans la règle en permanence, ce n'est, à l'évidence, pas un scoop. Pas plus que ne l'est le fait que les lois prennent parfois du temps à se mettre en concordance avec la légitimité. Cela n'a pas été le cas de l'Hôtel Carlton, par exemple, qui a démarré sur une expérience de squat et qui a ensuite été légitimé en votation populaire; cela devrait vous amener à réfléchir et, peut-être, à relativiser vos entreprises de «diabolisation» de l'Association RHINO.

Légitime, le projet RHINO l'est ! Ce dont il a besoin, ce sont des moyens, de l'espace pour développer cette expérience de logement associatif, écologique et bon marché dont il se réclame. Le mode de logement prôné par l'Association RHINO favorise des échanges de services et la transmission de connaissances et de savoir-faire. Plus encore, il tente à endiguer l'isolement social en milieu urbain de certains types de personnes. Il faut souligner aussi que l'Association RHINO est animée d'une préoccupation écologique qu'il convient de saluer. En outre, RHINO développe des activités culturelles notables qui font partie intégrante du paysage culturel genevois, comme cela a été abondamment développé tout à l'heure.

Il est encore à relever que l'Association RHINO ne veut pas être prise en charge mais assumer elle-même ses activités. Après l'échec des tentatives d'acquisition de l'immeuble concerné, RHINO demandait à la collectivité de faire l'acquisition de l'objet immobilier et de le remettre en droit de superficie à la coopérative RHINO qui en financera les travaux de rénovation.

Pour conclure, pérenniser l'expérience de RHINO consisterait à permettre une ouverture dans la manière de concevoir l'habitat et la convivialité. Ce serait également l'occasion de garantir l'existence d'un lieu d'expérimentation sociale.

Au-delà des avatars subis par le projet RHINO, il faut que ce Grand Conseil se prononce: soit il se fait le champion des milieux immobiliers et des grands propriétaires - comme certains semblent enclins à le faire - soit il se veut l'émanation de la population dans toute sa diversité et, à ce titre, il signifie, par un renvoi au Conseil d'Etat, que l'expérience RHINO doit se poursuivre et que l'expérimentation sociale a sa place dans notre canton. (Applaudissements.)

M. Pierre Weiss (L), rapporteur de majorité. Certains dans cette salle, «s'offusquent de ce que je m'offusque» des propos tenus par les pétitionnaires, qui sont à la limite de la diffamation. Eh bien, je trouve leurs sentiments pour le moins étonnants ! Ils écrivent par exemple que «le propriétaire persiste dans ses opérations à but manifestement spéculatif en profitant de l'aide publique»: le propriétaire ne profite pas de l'aide publique, il y a délibérément renoncé. Qui plus est, la preuve du caractère spéculatif de son action n'a été apportée par personne.

Au demeurant, dans cette affaire M. Velasco a commencé son intervention en rappelant que RHINO, c'était vingt ans d'illégalité - il a ajouté quelques années, mais on est habitué, chez M. Velasco, à ce qu'il en rajoute... Peu importe ! (Commentaires. Brouhaha.)Par le biais de cette pétition RHINO, nous avons simplement affaire à ceux qui entendent défendre le droit contre ceux qui entendent se placer hors-la-loi ! Nous sommes du côté du droit et de la loi, et nous entendons défendre cette position et la loi. C'est la raison pour laquelle - alors que vous avez fort bien lu le rapport de pétition que j'ai eu l'honneur de rédiger et que vous avez eu par conséquent la possibilité de lire les conclusions de la majorité de la commission - à titre personnel, j'ai demandé en introduction, comme élément complémentaire, que cette pétition soit classée. C'est ce que je vous propose d'accepter, Mesdames et Messieurs les députés.

La présidente. Je donne la parole à Mme Hagmann, uniquement pour une requête particulière, puis à M. Velasco afin qu'il puisse rétorquer à M. Weiss.

Mme Janine Hagmann (L). Je voulais dire que le groupe libéral, pour des raisons de similitude avec la pétition précédente, demande le classement de cette pétition.

M. Alberto Velasco (S). Monsieur Weiss, vous avez des pratiques incroyables: vous déformez les propos des personnes auditionnées mentionnées dans votre rapport et mes propos. Je n'ai pas dit qu'il y avait eu vingt ans d'illégalité, j'ai relevé qu'il y avait vingt ans que le problème de RHINO et son occupation existaient. A aucun moment, je n'ai parlé d'illégalité !

Veuillez donc retirer ces paroles, cher collègue ! Vous ne pouvez pas me faire dire de telles choses. Je ne peux pas affirmer une chose que je... (L'orateur est interpellé.)... Excusez-moi, Mesdames et Messieurs les députés, mais à aucun moment je n'ai parlé d'illégalité. Monsieur Weiss, je vous prie de retirer ces propos de ma bouche ! (Brouhaha.)

M. Pierre Weiss (L), rapporteur de majorité. La transcription des propos de M. Velasco !

La présidente. «La transcription des propos de M. Velasco» ?

M. Pierre Weiss. Il souhaite savoir s'il a dit ou non «illégalité»: j'attendrai de voir la transcription de ses propos. (Commentaires. Exclamations.)

M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. J'aimerais rassurer M. le député Pagani qui parle du présent. En ce qui concerne les appartements vides, non sans difficultés - compte tenu des maigres moyens à notre disposition - nous suivons cette problématique. Ce qui se produit manifestement aujourd'hui, c'est qu'il n'y a pas un immeuble ou plusieurs étages vides longtemps au même endroit. Il y a en revanche, effectivement, un stock d'environ un millier de logements qui «tournent» de l'un à l'autre. Lorsque l'on constate qu'un ou deux de ces appartements restent vides plus de deux ou trois mois, nous intervenons pour en demander la raison, et nous le faisons de la manière la plus systématique et la plus rationnelle possible. Si vous avez connaissance de cas qui auraient échappé à notre vigilance, Monsieur le député, faites-m'en part: vous me savez friand de ce genre d'informations !

La présidente. Je rappelle que, selon l'article 172 de la loi portant règlement du Grand Conseil, «après avoir délibéré sur le rapport de la commission, le Grand Conseil statue sur l'une des propositions (...).» Par conséquent, uniquement si le dépôt était refusé, nous pourrions passer à une autre proposition. Mais pour l'instant, je dois mettre aux voix la proposition du rapporteur de majorité, soit le dépôt de cette pétition.

M. Thierry Charollais (S). Madame la présidente, je demande l'appel nominal. (Appuyé.)

La présidente. Il en sera fait ainsi. Je rappelle être obligée de mettre d'abord aux voix la proposition de dépôt; si elle est refusée, nous passerons au classement.

Mises aux voix à l'appel nominal, les conclusions de la majorité de la commission du logement (dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont rejetées par 67 non.

Appel nominal

La présidente. Je mets aux voix la proposition du rapport de minorité, soit le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat.

Mises aux voix à l'appel nominal, les conclusions de la minorité de la commission du logement (renvoi de la pétition au Conseil d'Etat) sont rejetées par 38 non contre 31 oui et 1 abstention.

Appel nominal

La présidente. Mesdames et Messieurs... (Brouhaha.)Ne soyez pas pressés ! Je mets aux voix le classement de cette pétition.

Mis aux voix à l'appel nominal, le classement de la pétition est adopté par 38 oui contre 33 non et 1 abstention.

Appel nominal

P 1417-A
Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition concernant le soutien aux associations et artistes installés dans l'ancienne usine Kugler
Rapport de M. Alain Etienne (S)

Débat

M. Alain Etienne (S), rapporteur. L'usine Kugler est un lieu important pour Genève, c'est un lieu culturel et artistique qui comprend de nombreuses activités très intéressantes, les commissaires ont pu s'en rendre compte de visu, lors de la visite du site et en écoutant les représentants des associations lors de leurs auditions.

Un incendie s'est déclaré en novembre 2002. Pour des raisons de sécurité, l'accès aux locaux a été limité selon des horaires stricts et le site était sous le contrôle d'une société de surveillance.

Ce rapport a été déposé en novembre 2003. A l'époque, nous étions dans l'attente d'un rapport d'évaluation sur la sécurité du site, notamment par rapport à la pollution du sol et au réseau électrique. Quelle est, aujourd'hui, la réponse du Conseil d'Etat ?

La pétition demande que l'Etat soutienne les activités qui ont lieu à l'usine Kugler et qu'il accorde des contrats de confiance. Le principe de l'aménagement de la pointe de la Jonction a été voté par ce Grand Conseil. Nous disposons ainsi d'un laps de temps qui permettrait justement de maintenir certaines activités sur place. La commission des pétitions est donc favorable au renvoi de cet objet au Conseil d'Etat.

Les besoins des associations en matière de lieux d'accueil sont en augmentation et nous demandons le maintien des activités artistiques, le temps qu'une décision soit prise au niveau de l'aménagement de la pointe de la Jonction.

Mme Esther Alder (Ve). Notre groupe approuve tout ce qu'a dit le rapporteur.

Il est vrai que le rapport a été déposé en novembre 2003, et j'imagine quand même que, depuis, il y a eu du nouveau. J'aurais aimé entendre M. le conseiller d'Etat Moutinot sur l'évolution de ce dossier, car, lors de notre visite, nous avons effectivement pu constater que l'usine Kugler était un espace magnifique, avec des surfaces exploitables au niveau artistique.

On sait aujourd'hui que la demande en matière d'espaces culturels alternatifs est énorme, et nous avons trouvé vraiment regrettable qu'à cause d'un petit feu - ce n'était finalement qu'un petit feu - toute l'usine ait été mise sous tutelle et sous surveillance de Securitas. Cela a d'ailleurs coûté 30 000 francs par mois - je ne sais pas pour quelle durée, toujours est-il que ce sont des sommes astronomiques. On ergote pour quelques dizaines de milliers de francs lors de notre débat de cet après-midi sur le subventionnement d'associations qui font un travail remarquable, mais, à propos de sommes extrêmement élevées dépensées pour la sécurité, je n'entends personne s'offusquer...

Alors, j'aimerais vraiment savoir où l'on en est: un partenariat existe-t-il avec la Ville ou avec la Délégation à la jeunesse qui est à la recherche de locaux - avec la maison de quartier de la Jonction qui cherche aussi des espaces pour les «rappeurs» ? Etc. On sait aussi que les projets futurs, s'il y en a, prendront quelques années pour se réaliser.

Par conséquent, nous voulons vraiment que ces superficies désaffectées soient optimisées et qu'elles profitent à tous les milieux demandeurs d'espaces, surtout dans le contexte de la crise actuelle en matière de surfaces commerciales, extrêmement coûteuses.

M. Jacques Baud (UDC). C'est vrai, cette usine est assez étonnante, ce sont des espaces fantastiques où des artistes pourraient faire oeuvre utile. Mais il est vrai aussi que cette bâtisse est dans un état relativement lamentable, qu'il y a des dangers au niveau de la structure, et pas seulement au niveau de l'électricité. Par conséquent, si elle est fermée, c'est pour des raisons de sécurité à l'égard de toutes les personnes qui pourraient être à l'intérieur de cette bâtisse. Il faut donc ne permettre à personne d'entrer dans cette bâtisse, il en va de la vie de chacun. Et l'Etat a raison de fermer la bâtisse en attendant qu'on la restaure.

Par ailleurs, tout l'aménagement du quartier est à revoir. Savoir ce que l'on va en faire sans avoir défini l'aménagement définitif du quartier n'est pas possible, il faut attendre.

Je propose donc le dépôt de cette pétition, car il est beaucoup trop tôt pour prendre une décision quelconque.

M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Un certain nombre de choses se sont passées depuis le dépôt de ce rapport, le 18 novembre 2003: des travaux de sécurisation ont été entrepris. Cela a conduit à la condamnation définitive des lieux qui ne pouvaient pas être sécurisés, en particulier le sous-sol, alors qu'en revanche le maximum de surface au rez-de-chaussée a pu être récupéré. A partir de là, des contrats ont été signés le 15 mars 2005, permettant à la majorité des anciens occupants de retourner dans l'ex-usine Kugler - évidemment avec des surfaces un peu limitées pour que tout le monde en ait une petite partie. Nous en sommes là, nous nous trouvons donc tout à fait dans le cadre de ce qui a toujours été annoncé et que nous avons fait.

Maintenant, cette situation est évidemment provisoire, dans la mesure où votre commission de l'aménagement et votre Grand Conseil souhaitent que nous parvenions à un aménagement de qualité de l'ensemble de la pointe de la Jonction. Parmi les éléments à prendre en compte, la situation des deux dépôts des TPG ne simplifie pas l'élaboration d'un projet, puisque l'usine s'y trouve au milieu. A cela s'ajoute le respect de l'extrême sud de la pointe de la Jonction qui est en zone de verdure et qui, pour l'instant, comprend plus de béton que de pâquerettes.

Toujours est-il que cet aménagement va prendre un certain temps jusqu'à ce que nous soyons d'accord avec vous et la Ville et que, par la suite, la phase de construction soit entamée puis finalisée. Il faut bien s'imaginer que cela va encore durer un certain temps.

Dans l'immédiat, la situation est stabilisée sur le plan de la sécurité et les surfaces qui pouvaient raisonnablement être remises à disposition - afin qu'elles ne soient pas gaspillées - l'ont été. A ma connaissance, elles l'ont été à satisfaction, puisque les contrats ont été signés le 15 mars et que je n'ai encore reçu aucune plainte à ce jour. S'il y avait eu un problème grave, j'en aurais été informé.

Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (renvoi de la pétition au Conseil d'Etat) sont adoptées par 37 oui contre 17 non et 9 abstentions.

P 1440-A
Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition concernant le patrimoine et les nuisances au centre de Carouge
Rapport de M. Alain Etienne (S)

Débat

M. Alain Etienne (S), rapporteur. Cette pétition concerne la conservation du patrimoine et les nuisances au centre de Carouge. Elle concerne plus particulièrement un établissement situé au 36, rue Ancienne - mais pas seulement, puisqu'il est fait mention de plusieurs autres établissements. Les pétitionnaires se plaignent en particulier de l'exploitation d'une terrasse sur cour, et non sur rue.

La commission a tout d'abord voulu obtenir la confirmation du respect des autorisations. Or, par lettre, la police des constructions nous a confirmé deux choses: premièrement qu'il s'agit vraisemblablement d'une infraction, puisque ce restaurant est trop récent pour obtenir l'autorisation d'exploiter; deuxièmement qu'en principe l'implantation sur cour est refusée, en application de la loi fédérale sur la protection de l'environnement.

Il semblerait donc que la seule autorisation qui ait été donnée soit celle, indiquée dans le bail du propriétaire, qui stipule que le locataire a la jouissance de la terrasse de 8h à 22h.

Concernant le jardin, et plus particulièrement la préservation du patrimoine, l'exploitante du restaurant affirme n'avoir coupé aucun arbre et n'avoir réalisé aucun aménagement de sa terrasse. Il faudrait donc s'enquérir avec précision, auprès du propriétaire, de la réalité des faits.

La commission se demande aussi quel a été le rôle du service des autorisations des patentes: est-il vrai que, lorsqu'il s'agit d'une terrasse sur domaine privé, c'est au propriétaire de donner son accord ?

Pour toutes ces raisons, la commission vous invite à renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat afin d'obtenir un certain nombre d'éclaircissements.

Pour terminer, j'aimerais vous informer de ce qu'après le dépôt du rapport j'ai reçu un courrier - dans le cadre de cette pétition-ci mais concernant un autre restaurant à Carouge, parce qu'apparemment le problème est important sur le territoire de cette commune. Pour gagner du temps, je ne vais pas demander la lecture de ce courrier, mais je vous le transmets pour qu'il soit, si possible, annexé à mon rapport.

La présidente. Je n'ai pas très bien compris ce que vous souhaitez, Monsieur le député !

M. Alain Etienne. Je vous remets le courrier que j'ai reçu pour qu'il soit annexé à mon rapport.

La présidente. Il sera lu maintenant, Monsieur le député.

M. Alain Etienne. Ce n'est pas indispensable...

La présidente. Il le sera. (La présidente est interpellée.)Je suis obligée de le faire lire, cela a été demandé. Je prie Mme Bartl, vice-présidente, de procéder à cette lecture.

Courrier 1885

M. Pierre Ducrest (L). Depuis que le roi Victor-Amédée III a voulu que Carouge soit une ville, elle est depuis lors une ville festive, animée, jouissive... (Exclamations.)... où beaucoup de gens de la haute ville de Genève viennent passer quelques heures. Et cela dure depuis plus de deux siècles !

Or il se trouve actuellement que des groupuscules, par voie pétitionnaire, veulent, par un égoïsme latent, faire sombrer Carouge dans la nuit calme et transformer Carouge en une ville sans âme, enfin - comme le dit M. Kunz - en un lieu où les gens ne viendront plus !

Carouge a fait l'objet de beaucoup de pétitions; qu'elles soient déposées, comme celle-ci, au Grand Conseil ou au Conseil municipal de Carouge, elles sont toutes du même acabit... Celle qui nous occupe ici dénonce des éléments de construction qui auraient été réalisés illégalement; on se focalise sur un café, mais, au travers de celui-ci, c'est la vie de Carouge et l'ensemble de ses terrasses qui sont attaquées.

Récemment, le Tribunal administratif a refusé une demande de la Ville de Carouge concernant un règlement des terrasses; Carouge, par le biais de son Conseil administratif, a décidé d'aller jusqu'au Tribunal fédéral. C'est «Clochemerle-sur-Arve» !

Il est évident qu'au travers d'une pétition comme celle-là on essaie de tromper le Grand Conseil sur le bien-fondé de celle-ci et de «faire passer le bébé» au Conseil d'Etat, afin qu'il redescende au département de justice et police avec tout ce qui s'ensuit... Ce n'est qu'un pis aller.

Moi, Mesdames et Messieurs les députés, je vous dis qu'il nous faut refuser le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat et je propose, dans la foulée, de la déposer sur le bureau du Grand Conseil.

Une voix. Bravo !

Mme Jeannine De Haller (AdG). Monsieur Ducrest tient les mêmes propos au Conseil municipal: les habitants de Carouge n'ont pas droit à la tranquillité pendant la nuit, et ce sont seulement les fêtards qui ont droit de cité à Carouge ! Monsieur Ducrest, je suis bien entendu d'accord que l'on fasse la fête à Carouge: nous soutenons les cafetiers et les commerçants, mais nous soutenons aussi les habitants.

C'est pourquoi nous demandons qu'une certaine tranquillité soit rétablie et qu'un respect mutuel des uns envers les autres demeure. C'est tout ! On ne tient pas à avoir une ville morte, vous le savez fort bien.

M. François Thion (S). En fait la commission des pétitions demande de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat parce qu'une vérification doit être effectuée, visiblement les choses n'ont pas été faites de manière appropriée. Il faut donc vérifier si toutes les demandes d'autorisation ont été faites en bonne et due forme et tirer au clair les éventuelles irrégularités concernant le restaurant dont il est question dans la pétition.

C'est simplement pour cela que nous demandons le renvoi au Conseil d'Etat.

M. Alain Etienne (S), rapporteur. Je sais bien que M. Ducrest est tout nouveau dans ce parlement... (Commentaires.)... et qu'il n'a pas suivi les travaux de la commission. J'aimerais simplement lui rappeler que, contrairement à ses dires, la terrasse dont il est ici question a été établie sur cour et non sur rue. Toute la problématique qui s'est engagée au niveau de la commune de Carouge traite du problème des nuisances sur rue, contre lesquelles on dispose de beaucoup plus de moyens d'actions. En ce qui concerne les nuisances sur cour, c'est beaucoup plus problématique et il faut prendre les préoccupations des habitants en compte. Et l'on ne peut pas faire abstraction de la note de la police des constructions que nous avons reçue. Je ne sais pas si vous l'avez lue, Monsieur Ducrest, mais j'en ai fait état tout à l'heure dans mon intervention. En principe, une autorisation d'exploitation d'une terrasse sur cour n'est pas possible. Voilà pourquoi nous avons justement besoin d'éclaircissements, car on ne peut pas faire abstraction de ces choses-là.

Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (renvoi de la pétition au Conseil d'Etat) sont adoptées par 35 oui contre 27 non.

M. Hugues Hiltpold (R). Je crois savoir que M. Pierre Ducrest a fait une proposition, s'agissant de cette pétition, pour la déposer sur le bureau du Grand Conseil.

La présidente. Merci, Monsieur le député, j'avais omis cela. Nous allons donc nous prononcer sur le dépôt de cette pétition.

Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées par 37 oui contre 29 non.

La présidente. Nous donnons un petit coup de chapeau à M. Follonier qui fête son anniversaire et dont l'âge correspond à un chiffre rond... On lui souhaite un bon anniversaire ! (Applaudissements.)

Comme nous avons travaillé rapidement, nous allons clore nos débats. Je me réjouis de vous retrouver les 19 et 20 mai. Bonne soirée à tout le monde !

La séance est levée à 18h50.