République et canton de Genève

Grand Conseil

M 1470
Proposition de motion de Mmes et MM. Jacques Jeannerat, Gabriel Barrillier, Alain Meylan, Hubert Dethurens, Claude Aubert, Luc Barthassat, Janine Berberat, Thomas Büchi, René Desbaillets, John Dupraz, Jean-Michel Gros, Janine Hagmann, Hugues Hiltpold, Jean-Claude Dessuet, Claude Marcet, Mark Muller, Jean-Marc Odier, Patrice Plojoux, Pierre-Louis Portier, André Reymond, Jean Rémy Roulet, Olivier Vaucher, Pierre Weiss relative à la modification des limites de zones sur le territoire de la commune de Bardonnex (création d'une zone de développement 3 affectée à de l'équipement public)

Suite du débat

M. Christian Brunier (S). Vu le débat qui a commencé ce matin, je crois qu'il est important de rappeler la position du parti socialiste quant à ce restoroute de Bardonnex.

Première chose: le parti socialiste n'est pas opposé au principe de construire, au bord de l'autoroute de contournement, un restoroute ou une station service. Nous avons reconnu que cela pouvait être une bonne opportunité économique, que c'est un bon plan au niveau de la fiscalité. D'ailleurs, à l'époque, nous avions soutenu le projet à Blandonnet, lorsqu'il était encore réalisable - on sait qu'il ne l'est plus actuellement.

Deuxièmement, vous apportez une composante de vitrine des produits du terroir genevois. Nous pensons que cela peut aussi être une bonne idée, sans, bien sûr, tomber dans l'exagération, voire, quasiment, frôler le fantasme. Il faut donc trouver un lieu.

Il y a eu deux lieux identifiés. Un à Blandonnet, à une certaine époque. Je vous rappelle que le projet était tout fait: la commune était d'accord, le canton était d'accord, il y avait, certes, des recommandations critiques de l'office fédéral, mais il n'y avait pas opposition, comme certains l'ont prétendu ce matin. Et qui a fait échouer le projet, à l'époque ? C'est M. Joye, qui a déchiré le projet de son prédécesseur pour favoriser un projet où il avait certainement des intérêts, en tout cas indirects, beaucoup plus forts.

Par conséquent, tout le monde s'est reporté sur le projet de Bardonnex, projet auquel le parti socialiste s'est opposé pour plusieurs raisons. Premièrement parce que je vous rappelle que c'est une surface de 4 hectares située en terrain agricole, et que nous voulons protéger la zone agricole dans ce lieu qui a déjà été bien atteint. C'est aussi un poumon de verdure, une zone verte d'importance. La commission est d'ailleurs allée visiter le terrain et a pu constater qu'il était digne d'intérêt, d'un point de vue environnemental. C'est aussi un terrain - on l'a dit ce matin, et je le répète - qui est à proximité des logements, et il aurait été très dommageable d'installer une station service, un restoroute de grande envergure juste à côté, dans le voisinage.

Il y a toutefois une opportunité que nous avons explorée, dont personne n'a parlé ce matin: c'est l'exploitation de cette plate-forme douanière démesurée et sous-utilisée. Nous avons une plate-forme douanière immense avec des surfaces vraiment inexploitées, et vous pouvez le constater à chaque fois que vous passez là-bas. Dans une optique de signature des bilatérales, dans une optique de rapprochement - qu'on le veuille ou non, d'ailleurs - avec l'Europe, nous savons très bien que cette plate-forme sera inutilisée. Par conséquent, si nous voulons construire un restoroute, c'est sur cette plate-forme, sur cette partie déjà bétonnée, qu'il faut travailler, et nous avons les moyens d'y arriver. Je vous rappelle qu'il y avait eu une discussion - je dis bien une discussion ou, plutôt, un début de discussion - avec les douanes, et que cette discussion avait échoué.

Je pense toutefois que si nous faisons du lobbying, si nous mettons un peu de pression sur Berne, nous pouvons arriver à négocier pour construire un restoroute sur cette plate-forme douanière - je le redis mais c'est important - inexploitée et démesurée par rapport à la situation. Je crois que c'est le seul endroit susceptible d'accueillir une telle installation. Il n'est pas question, pour le parti socialiste, de brader la zone agricole, de brader une zone de nature, dans un endroit aussi urbanisé et aussi proche des logements.

Nous vous proposons donc de renvoyer cette motion en commission, pour nous mettre d'accord sur cette exploitation de plate-forme douanière, pour renoncer à ce sacrifice de zone agricole. Je pense qu'on peut trouver un arrangement et je pense qu'on peut instaurer un rapport de force avec les douanes, si nous sommes tous unis pour les faire plier et pour que ces dernières concèdent une partie de cette plate-forme sous-utilisée.

Le président. Bien. Nous voterons ce renvoi en commission, mais comme, de toute façon, la liste est close, ceci sera fait après les interventions des trois orateurs inscrits.

M. René Desbaillets (L). Je suis heureux qu'on ait marqué une pause dans ce débat qui a commencé ce matin. Cela a permis, à tout le monde, de baisser un petit peu la tension. Pour le nouveau député que je suis - depuis moins de deux ans - peu m'importe de savoir ce qui s'est passé avant, qui a refusé de faire une place autoroutière ici, qui a repoussé un restoroute là-bas, ce qui compte, c'est le futur. Et le futur, c'est un restoroute à proximité de Genève.

Je pense qu'on ne doit pas politiser ce débat. Nous sommes 100 députés ici, mais il y a 400 000 personnes à Genève, qui vivent de son économie. Sur ces 400 000 personnes, je suis sûr qu'il y a une grosse proportion d'habitants, de travailleurs, de contribuables, notamment, qui attendent un restoroute à la porte de Genève.

Pourquoi suis-je favorable à un restoroute près de Genève ? Pour l'image de Genève, pour son économie et pour son environnement.

L'image, tout d'abord: un restoroute, c'est une vitrine. A l'heure actuelle, il y a ceux qui voyagent à travers le monde, qui prennent l'avion, qui ont préparé leur voyage soit dans une agence soit par Internet. Ces derniers représentent un cas spécial, on ne parlera pas d'eux. Il y a énormément de gens qui voyagent par des moyens privés tels que l'automobile, qui naviguent sur les autoroutes, et qui, chaque fois qu'ils ont l'occasion ou l'obligation de se reposer - en principe, toutes les deux heures - de faire le plein, s'arrêtent sur un restoroute. Ils font un peu de lèche-vitrine de restoroute, même si, souvent, ces vitrines ne sont pas extraordinaires. Même moi, viticulteur genevois, je vois que lorsque j'arrive en Bourgogne, je me sens incité à sortir et à aller faire une petite tournée de caves en Bourgogne. Je descends dans le midi, on s'arrête à Avignon... (Manifestation dans la salle. Brouhaha)...Peu importe. Ce qu'il y a de sûr, c'est qu'un restoroute est une vitrine de la région ou de la ville à proximité. Il n'y a qu'à voir le chiffre d'affaires du restoroute de Gruyère ou le nombre de personnes qui s'arrêtent au restoroute: ils voient ce qu'il se passe à côté, et ils vont se balader dans la Gruyère.

Le deuxième point concerne l'apport économique. Je pense qu'il est non négligeable, économiquement, d'inciter les gens à s'arrêter à Genève - à venir visiter notre ville, à venir y consommer, y dormir, y voir les musées, y voir le Jet d'eau, l'Horloge fleurie, etc. Je pense que celui qui voyage sur l'autoroute, s'il n'a pas, à un moment donné, une incitation à s'arrêter, à voir ce qui se passe, il ne s'arrête pas. Je dois dire que, quand on regarde ce qui se passe, partout sur les restoroutes, il ne faut pas négliger cet apport économique.

Au niveau de l'environnement, ce que j'entends le plus, c'est qu'on va prendre 4 hectares dans la zone agricole. Permettez-moi de vous dire, en tant qu'agriculteur - et sachant qu'il y a 500 hectares, grosso modo, à Genève, qui sont des jachères, où on demande aux agriculteurs de ne rien faire dessus, et d'y laisser pousser la mauvaise herbe - je m'excuse, mais ce ne sont pas 4 hectares qui vont affamer le canton de Genève.

Le voyageur qui est en voiture, et qui se dit «Tiens, je vais m'arrêter à Genève», quelle sortie va-t-il prendre ? Est-ce qu'il va sortir à l'aéroport, à Bardonnex, à Bernex ? Ensuite, il aura envie de circuler. De Bernex il descend à Lancy, à Lancy, il essaie de trouver un plan, qu'il n'aura certainement pas, parce qu'il a une carte au 1:10 000 ou au 1:100 000. Il va donc se balader à travers la ville, à travers le canton, pour trouver une activité, pour trouver un logement. Lorsque vous vous arrêtez sur une aire autoroutière, si celle-ci est bien faite, il y a un office du tourisme, un bureau proposant des hébergements hôteliers ou des restaurants, etc. De telle sorte que le voyageur pourra faire son programme, afin de visiter Genève. Il saura que s'il veut se rendre en Vieille-Ville, il devra sortir de l'autoroute en prenant la direction de La Praille, il garera sa voiture au parking de l'Etoile. Il prendra le tram, cinq minutes plus tard, il se trouvera dans la Vieille-Ville, plutôt que de tourner dix minutes et de polluer, sans savoir où aller.

Par conséquent, nous devons être favorables au relais autoroutier. Je soutiens cette motion, je vous invite à la renvoyer au Conseil d'Etat. Refuser un restoroute, c'est un hara-kiri économique et écologique pour Genève.

M. Hubert Dethurens (PDC). J'aimerais revenir quelque peu sur les propos de M. Brunier.

Monsieur Brunier, qui veut le plus, veut le moins. Je suis heureux d'apprendre que le parti socialiste est favorable à un restoroute à Genève, mais de là à remettre le débat sur Blandonnet...

Il était visible que c'était irréalisable, notamment lors de la visite de Blandonnet de M. Moutinot et du groupe socialiste. Cela l'est encore plus aujourd'hui, depuis que la bretelle a été réalisée pour l'entrée de l'autoroute. Revenir sur ceci signifie que l'on ne veut rien, que l'on va encore parler pendant quatre ans, pour quelque chose qu'on sait irréalisable. Je crois que même M. Moutinot avait admis que c'était irréalisable à Blandonnet.

Deuxièmes propos que M. Brunier a tenus, que je trouve un peu graves: vous portez une accusation contre un magistrat - je ne sais pas si je vous ai bien compris - qui aurait magouillé pour son compte personnel. Dans ce cas, ou bien vous en avez dit trop ou bien pas assez: si vous avez des preuves de ce que vous avancez, alors divulguez-les dans la presse. Mais ne venez pas dire ici quelques petites choses qu'on ne comprend de toute façon pas.

Je suis favorable au restoroute de Bardonnex, d'abord parce que c'est le seul endroit, à Genève, où il est possible d'implanter un restoroute. Toutes les études de Berne l'ont démontré: tout ce qui est après l'aéroport n'est pas réalisable, parce que c'est trop près du restoroute qui est sur la côte. Il n'y a visiblement plus que Bardonnex.

Je mettrai un petit bémol, quand même, au premier projet présenté - là, je diffère un peu de mon collègue Desbaillets - car 4 hectares pour des jachères: non. Je vous rappelle, quand même, que les jachères font partie intégrante d'un plan de culture: Je n'aime pas trop les jachères, mais bon. Ces dernières nous sont imposées par la législation fédérale, et ce n'est pas que de la mauvaise herbe, c'est aussi une source de revenus pour les agriculteurs, imposée par Berne. Le seul reproche que je ferai au premier projet, c'est qu'il était un petit peu gourmand en matière de places de stationnement. C'est vrai que la plate-forme douanière, dans une échéance de dix, quinze ans, sera peut-être utilisable - bien que les douanes nous aient toujours affirmé le contraire. Par conséquent, dans un premier temps, je souhaiterais que le conseiller d'Etat, M. Moutinot, présente un projet de loi de déclassement à Bardonnex, parce que c'est le seul endroit possible, et qu'il soit un peu plus raisonnable du point de vue du stationnement...

Une voix. Quel projet ?

M. Hubert Dethurens ...Un projet de restoroute, à Bardonnex; avec un parking un peu plus petit qu'il n'était prévu au départ; avec une vitrine pour les produits genevois. A ce sujet, on est tous d'accord. Je suis heureux d'apprendre que le parti socialiste est aussi d'accord. Il suffit de s'entendre, maintenant, sur la grandeur de la partie à déclasser.

Pour finir, je pense qu'il faut renvoyer cette motion au Conseil d'Etat, parce que la renvoyer en commission de l'aménagement, encore une fois, c'est l'enterrer. Cela revient à se déplacer, de nouveau, à Blandonnet pour s'apercevoir que ça n'est pas possible. Cela représente des années de discussion pour n'arriver à rien.

M. Christian Grobet (AdG). Ayant eu le privilège de présider à la construction de l'autoroute de contournement, j'aimerais simplement rappeler quelques faits.

D'abord, quand ce Grand Conseil a adopté le projet de l'autoroute, avec son site, il y a eu une motion, présentée par les députés agriculteurs de l'Entente. Ces derniers demandaient que, au vu du sacrifice qui était consenti à la zone agricole pour la construction de l'autoroute de contournement, cette autoroute ne soit pas le prétexte à de nouveaux déclassements de terrains agricoles, et que, notamment, on ne déclasse pas des terrains en bordure d'autoroute pour des projets d'urbanisation. Je tiens à le rappeler, parce que cette résolution avait été déposée par des députés libéraux, PDC et radicaux, et votée par l'ensemble des députés - M. Dupraz s'en souviendra, puisqu'il était un des co-auteurs de cette motion.

Après que le projet général a été adopté et approuvé par le peuple, j'ai été approché, précisément par la Chambre d'agriculture - dont l'un de ses représentants siège toujours dans cette salle - pour modifier le projet de l'évitement de Plan-les-Ouates et renoncer à la solution dite du sud d'Arare au profit de la solution du vallon d'Evaux. Cette modification, non pas de l'axe principal de l'autoroute, mais de la branche assurant le contournement jusqu'à La Praille, était, évidemment, un exercice extrêmement difficile, puisque l'ensemble du projet avait été adopté en votation populaire. La Chambre d'agriculture, Monsieur Desbaillets, revendiquait que l'on modifie l'évitement de Plan-les-Ouates, parce que cela permettait de préserver, non pas 4, mais 6 hectares de terrain agricole. Il est vrai que, pour préserver ces 6 hectares de terrain agricole, on a fait un projet, qui est mieux intégré, mais qui a aussi coûté plus cher, et qui a pris dix ans de négociations pour finalement aboutir - du reste un peu contre le gré de la commune de Plan-les-Ouates.

En ce qui concerne la plate-forme douanière de Bardonnex, je vous signale que la commune qui était la plus farouchement opposée, et qui avait du reste été opposée à l'autoroute, était la commune de Bardonnex. Elle est intervenue, notamment auprès du département des travaux publics, pour que la plate-forme douanière soit la plus limitée possible et qu'on évite toute autre emprise sur le territoire de cette commune. Cela me fait un peu sourire lorsque M. Brunier parle de la surface exagérée de la plate-forme douanière, parce que, au moment de la réalisation de cette plate-forme, les douanes fédérales ont demandé qu'elle soit considérablement plus étendue que ce qui a été réalisé.

La commune de Bardonnex a insisté pour que la plate-forme ne soit pas agrandie. J'ai soutenu le point de vue de la commune de Bardonnex. Cela a été un bras de fer assez incroyable avec les douanes fédérales, parce qu'elles étaient convaincues qu'en tant qu'autorités fédérales elles pouvaient imposer l'agrandissement de la plate-forme. J'ai invoqué le vote populaire pour ne pas agrandir la plate-forme. Alors, je trouve pour le moins paradoxal, que, quelques années plus tard, ce soit cette même commune de Bardonnex - qui souhaitait aussi qu'on évite l'évitement de Plan-les-Ouates par le sud d'Arare, pour ne pas toucher à la campagne et aux terres agricoles - qui vienne demander qu'on déclasse du terrain pour faire le restoroute sur le territoire de Bardonnex, simplement pour des retombées fiscales. Je dois dire que, lorsqu'on fait de l'aménagement du territoire pour toucher quelques modestes impôts communaux sur l'activité ou une taxe professionnelle, c'est absolument lamentable. En tout cas, on devrait éviter de faire de l'aménagement du territoire pour des questions de recettes fiscales d'une commune, parce que c'est véritablement en dessous de tout.

M. Koechlin a dit que c'était un projet merveilleux; peut-être l'est-il sur le plan architectural. Je pense que c'est un mauvais projet sur le plan de l'emplacement et de l'environnement. Pour la station-service, la meilleure situation le long de l'autoroute était évidemment Blandonnet, parce que là on captait tous les véhicules, y compris ceux qui n'allaient pas en France, mais qui empruntaient l'autoroute de contournement jusqu'à La Praille.

Alors, quand on parle de retombées économiques... A l'époque, j'avais passablement examiné ces problèmes de restoroute. Je peux tout de suite vous dire que ce ne sont pas les restaurants qui amènent beaucoup de recettes mais c'est la pompe à essence. Et là, c'est vrai que cette pompe à essence pouvait avoir des retombées annuelles de plusieurs millions pour l'Etat de Genève. C'est la raison pour laquelle, personnellement, j'ai rallié la position de mes collègues du Conseil d'Etat qui, à l'époque, souhaitaient trouver une solution - et on l'a trouvée à Blandonnet. Je tiens à préciser que l'Office fédéral des routes avait expressément accepté le projet, qui était réalisable, quoi qu'en puissent dire d'autres. C'est vrai que c'était un projet un peu exigu qui ne prévoyait pas quelque chose de grandiose, mais il prévoyait l'essentiel: la station-service et des boutiques, qui auraient quand même permis de faire un chiffre d'affaires complémentaire.

J'ajouterai un point suivant...

Le président. Il est temps de conclure.

M. Christian Grobet. Je termine, j'en ai pour deux minutes, si vous permettez, Monsieur le président. L'Office fédéral des routes était tellement désireux que le raccordement entre les réseaux routiers suisse et français se réalise que, de fait, l'autorité fédérale a toujours accepté toutes les demandes qui ont été faites par le canton, dans un sens comme dans l'autre. Par voie de conséquence, ils ont accepté de faire des tunnels qu'ils ont ensuite refusé de prolonger, par exemple à Saint-Maurice et ailleurs, en raison du danger lié aux tunnels. Ils ont accepté la demande concernant le restoroute de Blandonnet. De même, quand M. Joye est arrivé pour demander le contraire, il a eu une oreille attentive de la part de l'Office fédéral, qui a retourné sa veste en disant qu'effectivement le restoroute pouvait être construit ailleurs. En ce qui me concerne, j'avoue avoir eu un malaise en apprenant que le choix s'était porté sur une compagnie pétrolière particulière, dont je dois dire que la réputation a été très fortement entachée à l'époque ou peu de temps après.

Je conclus qu'il faut effectivement renvoyer cette affaire en commission pour voir, comme M. Brunier l'a dit, si cette plate-forme douanière, qui ne sert quasiment à rien, qu'on prétendait sous-dimensionnée, et qui est totalement surdimensionnée, ne pourrait pas faire l'affaire. En outre, je persiste à penser, malgré les bretelles qui ont été faites, que, peut-être, une solution reste possible à Blandonnet - solution qui aurait été la meilleure, du point de vue de la localisation. (Applaudissements.)

M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. L'aire autoroutière de Bardonnex est une saga qui a occupé votre Grand Conseil à réitérées reprises, et qui, je le crains, l'occupera un certain nombre de fois encore.

Le Conseil d'Etat a, par conséquent, examiné soigneusement le projet de motion qui vous est soumis ce soir. S'agissant des aspects économiques, il considère que cette infrastructure doit faire l'objet d'une analyse, en fonction des buts que s'est fixés la promotion économique ou plutôt que le Conseil d'Etat a fixés à la promotion économique. Ils consistent à véritablement examiner l'impact d'une telle construction sur l'emploi, l'impact sur la fiscalité, l'impact sur la présentation des produits agricoles - puisque cela a été présenté comme tel - et à considérer si l'importance de ces activités justifie ou non, pour l'économie genevoise, une atteinte d'une telle importance à la zone agricole.

L'analyse de détail n'a pas été faite, mais le Conseil d'Etat estime que l'on ne peut, aujourd'hui, être catégorique sur l'intérêt de cette plate-forme, sans avoir, au préalable, examiné rationnellement, calmement, l'ensemble de ces paramètres.

Il est vrai aussi, et cela a été dit notamment par MM. Dethurens et Brunier, que le projet lui-même et le programme du projet sont de nature à permettre une appréciation différente, selon que ladite aire autoroutière se situe sur la plate-forme douanière ou selon qu'elle se situe à côté. Les négociations que nous avions eues, à l'époque, avec les douanes fédérales, lors du précédent projet, s'étaient mal déroulées. Vous êtes, Monsieur Brunier, d'un optimisme admirable, mais, enfin, peut-être que les douanes vous ont écouté ce soir, peut-être sont-elles plus enclines à négocier, aujourd'hui.

Il est vrai qu'il faudra calmement mettre dans la balance, très calmement et très sereinement, les avantages, qui ne sauraient être contestés, d'une telle aire autoroutière et l'impact sur le territoire, la nécessité de disposer des hectares nécessaires pour le faire. Si cette balance s'avérait positive pour un projet raisonnable, il faudrait évidemment aller de l'avant. Si le fléau de la balance penchait dans l'autre sens, il faudrait alors renoncer à ce projet.

Le Conseil d'Etat entend mener cette analyse calmement, une fois encore, dans le détail, selon les critères objectifs que la promotion économique a toujours suivis.

Je vous suggère, par conséquent, de suivre la proposition de renvoi en commission qui vous a été faite, de manière que le débat puisse se faire en entendant tous ceux qui ont à apprécier cette situation, et à ne pas en débattre avec la simplification qu'entraîne parfois ce type de débats, uniquement en séance plénière.

Mis aux voix, le renvoi de cette proposition de motion en commission est rejeté par 46 non contre 37 oui.

Mise aux voix, la motion 1470 est adoptée par 45 oui contre 39 non.