République et canton de Genève

Grand Conseil

M 1296
11. a) Proposition de motion de Mme et MM. Pierre-Pascal Visseur, Jean-Marc Odier, Marie-Françoise de Tassigny et Michel Balestra concernant la répartition des tâches de la police. ( )M1296
P 1237-A
b) Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition en faveur du maintien du poste de police de Versoix. ( -)P1237
Rapport de M. Jean-Marc Odier (R), commission des pétitions

Proposition de motion(1296)concernant la répartition des tâches de la police

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant :

l'inquiétude légitime d'une grande partie de la population face à la violence croissante lors de réunions sur la voie publique ;

la multitude de tâches administratives et d'autorité incombant aujourd'hui à la police ;

la présence souhaitée de policiers sur la voie publique, en plus grand nombre ;

le grand nombre d'heures supplémentaires effectuées par la police ;

les projets de nouvelle utilisation des postes de police ;

la demande d'augmenter le nombre de policiers ;

invite le Conseil d'Etat

à établir et à publier la liste exhaustive des tâches confiées actuellement à la police, à publier la nouvelle répartition du travail de la police, telle qu'imaginée par la réforme en cours ;

à décharger la police des tâches pouvant être assumées par du personnel administratif, par des agents de sécurité municipaux ou des tiers ;

à proposer au Grand Conseil les modifications législatives y relatives ;

à adopter lui-même les modifications réglementaires nécessaires.

EXPOSÉ DES MOTIFS

L'examen de la pétition 1237 (en faveur du maintien du poste de police de Versoix) a démontré que les policiers devaient effectuer une multitude de tâches (notification de commandements de payer, rapports administratifs, police du commerce, police des étrangers) ne ressortant pas de leur mission première.

Par ailleurs, les membres de la police effectuent chaque année plusieurs dizaine de milliers d'heures supplémentaires, qui ne peuvent être ni récupérées ni payées en dehors des heures à charge de la Confédération.

Force est de constater que les policiers, bien malgré eux, sont souvent tenus éloignés de la voie publique et que les « îlotiers » (police de proximité dans les quartiers) supportent l'essentiel du travail de proximité.

Les « doublons » existants entre la police cantonale et les agents de ville entraînent des confusions dans l'esprit de la population.

Le but de cette motion est aussi d'ordre informatif : il s'agit d'obtenir du Conseil d'Etat un inventaire complet et détaillé des tâches actuellement assumées par la police, et un aperçu de la réforme en cours remédiant à cet état de fait.

Il est ensuite demandé de transférer, dans la mesure du possible, les travaux administratifs à du personnel « non-policier ». Il n'est en effet pas souhaitable qu'une carrière de gendarme conduise à notifier des commandements de payer ou à dactylographier des rapports divers.

La motion invite enfin le Conseil d'Etat à procéder aux modifications réglementaires nécessaires, respectivement à proposer au Grand Conseil de modifier les lois concernées.

Nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à bien vouloir renvoyer cette motion directement au Conseil d'Etat.

Rapportde la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition en faveur du maintien du poste de police de Versoix(1237)

Rapporteur: M. Jean-Marc Odier

Sous la présidence de M. Louis Serex, la Commission des pétitions a étudié la pétition 1237 lors de ses séances du 26 avril et du 17 mai 1999. Les procès-verbaux ont été tenus par Mme Pauline Schaeffer.

Déposée par Mme Yvonne Humbert, maire de Genthod, la pétition 1237 est une initiative du Conseil municipal de Genthod, suivie du Groupement des communes de la rive droite du lac.

Pétition(1237)

en faveur du maintien du poste de police de Versoix

Mesdames etMessieurs les députés,

La commune de Genthod faisant partie d'un bassin regroupant les communes de la rive droite du lac, soit près de 19 000 habitants, elle est de plus en plus confrontée à des problèmes de sécurité et s'inquiète de la future suppression du poste de police de Versoix.

La présente pétition demande instamment aux Autorités cantonales de renoncer à cette décision.

N.B. : 256 signatures

Commune de Genthod

. .

Auditions

Audition des pétitionnaires, MM. Jean-Marc Mermoud, maire de Pregny-Chambésy, René Schneckenberger, maire de Versoix, et Pierre-Marie Salamin, conseiller administratif de Versoix

En préambule, les pétitionnaires informent la commission qu'une pétition ayant récolté environ 1350 signatures auprès des commerçants versoisiens a été adressée au Conseil d'Etat en janvier, lequel y répondit par le chef du DJPT le 2 février. Etonnés que la commission n'ait pas été saisie de cet objet, les pétitionnaires transmettent copie de la correspondance échangée avec le Conseil d'Etat (annexe 1) , en précisant que le fond du problème est identique à la pétition 1237.

Cette pétition exprime la réaction rencontrée à travers la population des communes concernées après l'annonce de la fermeture du poste de police de Versoix, ou tout du moins d'une restructuration réduisant fortement l'effectif policier du poste. Inquiètes de l'insécurité croissante dans la région et de la perspective d'une diminution de la présence policière dans le même secteur, les autorités communales estiment que les mesures envisagées sont inadéquates. Avec une population d'environ 20 000 habitants et un vaste territoire étendu sur les communes de Bellevue, Céligny, Collex-Bossy, Genthod, Pregny-Chambésy et Versoix, ce secteur de la rive droite de notre canton est en droit d'attendre une présence policière fixe et permanente. En tenant compte de l'évolution constatée du nombre de cas d'interventions, il conviendrait de renforcer les effectifs plutôt que de les diminuer. Une présence fixe de gendarmes dans un secteur offre de nombreux avantages, notamment une meilleure connaissance du secteur, tant au niveau de la topographie qu'à celui de la population, un meilleur suivi de problèmes récurrents, ainsi qu'une plus grande rapidité d'intervention.

La capacité d'intervention, affirmée par le commandement de la gendarmerie, des patrouilles du poste de police de Blandonnet est pour les pétitionnaires une vue de l'esprit, tant les distances et la circulation à certaines heures empêchent toute rapidité d'intervention. Cette rapidité d'intervention est d'autant plus nécessaire, notamment dans les cas de cambriolages pour lesquels on constate une nette recrudescence, que les passages frontières sont de moins en moins contrôlés, facilitant ainsi le retrait sur sol étranger des auteurs des délits.

Dans un échange de correspondance relatif à ce sujet (annexe 1), le président du DJPT assurait que les mesures envisagées par la hiérarchie de la police ne seraient pas concrétisées sans l'avis des communes. Contrastant très nettement avec les informations du commandant Baer confirmant que la décision était prise, les garanties du chef du DJPT, M. Ramseyer, conseiller d'Etat, sont de nature à rassurer en partie les communes. Cependant, il ressort également de la réflexion du président du DJPT que l'Etat doit trouver des solutions pour faire face à l'augmentation du nombre de cas nécessitant l'intervention de la police et que les ASM (agents de sécurité municipaux) peuvent répondre en partie à cette évolution. Du point de vue des pétitionnaires, ce système n'est pas souhaitable puisqu'il reporte sur les communes une tâche attribuée jusqu'à présent au canton et qu'il instaure deux polices au lieu de renforcer les effectifs de la police actuelle. Les communes auraient bien envisagé le recours aux ASM, si le statut de ces derniers avait été mieux défini et plus tôt. En l'occurrence, Versoix s'est organisée par l'engagement d'un service privé de sécurité pour la surveillance du secteur Port-Choiseul et celui du centre sportif. Il n'en reste pas moins que les coûts de cette surveillance sont pris en charge par la commune, alors que la vocation de la plage est largement cantonale.

Audition de MM. Jacques Dessibourg, maréchal, chef du poste de police de Versoix, Marcel Magnin, maréchal, chef du poste de police de Blandonnet

Pour le maréchal Dessibourg, par les précédentes diminutions d'effectifs dans son poste et les prochaines envisagées dans le cadre de la restructuration qui entrera en vigueur dès le 1er septembre 1999, il n'est tout simplement plus raisonnable de continuer à gérer la gendarmerie dans ces conditions. Prenant l'exemple éloquent de la dernière nuit, un gendarme a effectué seul la permanence pour un secteur de 20 000 habitants de 19h30 à 6h00. En plus des interventions de routine, le gendarme s'est vu confronté à une situation à risques en devant poursuivre en solitaire deux cambrioleurs lyonnais qui avaient volé une voiture à Bellevue. La fuite des malfrats a été interrompue grâce aux renforts de la Ville et du poste de Blandonnet.

Pratiquement, la restructuration prévoit que le poste de police ne sera désormais ouvert que deux heures le matin et deux heures l'après-midi du lundi au samedi midi. La nuit et le week-end dès samedi 12h00, le poste sera fermé.

Le maréchal Dessibourg se demande si le statut du gendarme, garant de la sécurité des habitants, consiste à endosser et se surcharger de multiples tâches totalement annexes comme par exemple la distribution des 2159 commandements de payer délivrés sur le secteur au courant 1998. Toujours durant cette année, le poste a enregistré un total de 2187 heures supplémentaires sur l'ensemble des douze collaborateurs. Parmi les nombreuses tâches attribuées au poste de police, il n'est pas envisageable de déléguer un certain nombre d'entre elles, comme la réception au poste des dépôts de plainte, ainsi que de diverses doléances. D'autre part, les gendarmes sont affectés aux formalités des constats d'accidents de la circulation dont l'établissement des rapports prend un temps précieux pendant lequel le gendarme est derrière un ordinateur plutôt que d'être occupé à une tâche pratique sur le terrain.

Le maréchal Magnin explique que le poste de Blandonnet a été ouvert en 1997 en remplacement de ceux de l'aéroport et de Châteleine, représentant un effectif total de 55 gendarmes dont 48 travaillant en rotation. Actuellement, le poste ne fonctionne qu'avec 46 gendarmes dont 37 en rotation, dont il faut retrancher 6 hommes réquisitionnés pour la surveillance des missions diplomatiques. En fin de compte, l'effectif avant le décompte des absences vacances, maladies et autres est de 28 gendarmes pour le travail dans la rue, que le maréchal n'hésite pas à qualifier d'effectif misérable en regard du secteur à couvrir. Concrètement, la nuit est assurée en moyenne par trois gendarmes pour une population de 61 000 habitants, avec des quartiers sensibles tels Meyrin et Vernier ainsi que les Avanchets et le Lignon pour des problèmes de drogue. Ce à quoi il faut ajouter le Grand-Saconnex, fréquemment en proie aux vandales, sans oublier les trois communes du Mandement, plus tranquilles mais à surveiller tout de même. Comme le chef de poste de Versoix, le maréchal Magnin déclare : « Actuellement, ce n'est plus gérable. »

A propos de la future restructuration, sans y être particulièrement favorable, le maréchal pense que le processus est inéluctable. En contrepartie du rattachement de nouvelles communes à couvrir, le poste devrait récupérer quelques hommes de la fusion des brigades motorisée et autoroutière.

Pourtant, sur le principe, cette restructuration entraînera certains paradoxes. L'idée d'une police de proximité, connaissant bien son secteur tant au niveau topographique qu'à celui de la population, est largement acquise. Cependant, à l'exemple du poste de Versoix ouvert deux heures le matin et deux heures l'après-midi, la capacité d'intervention de cette police est extrêmement limitée. En cas de nécessité, lorsque le poste de Blandonnet sera occupé ailleurs, il sera fait appel à des pelotons mobiles de gendarmerie (PMG) dont la structure et les méthodes d'intervention se rapprochent plus d'une unité élite commando que d'une police de proximité, eux qui n'ont connaissance ni du terrain ni de sa population. A cet égard, M. Dessibourg insiste sur les liens que les policiers entretiennent d'une part avec la population dont ils sont finalement assez proches et d'autre part avec les autorités communales et leurs services sociaux. Le rôle social du gendarme est donc réel et précieux. Ces paradoxes se résument en une police à deux vitesses ; une police de proximité, quatre heures par jour au rôle social, et le reste du temps les PMG comme police d'intervention.

Discussion et vote

La police doit faire face à l'évolution constante du nombre de réquisitions lui étant adressées. Le nombre d'heures supplémentaires auxquelles les gendarmes sont astreints le confirme, la police est surchargée. Lorsqu'une entreprise croule sous les commandes, c'est plutôt bon signe et elle engage de nouveaux collaborateurs pour être en mesure d'honorer ses commandes. Au contraire d'une entreprise, lorsque la police est submergée de demandes, c'est mauvais signe et il n'est pas si simple pour elle d'augmenter ses effectifs, puisqu'il faut pour cela que notre Parlement modifie la loi sur la police.

On se retrouve donc dans un contexte auquel la conjoncture actuelle nous a habitués ; il faut faire plus avec moins. Relevant le défi avec réalisme, la hiérarchie de la police propose logiquement une restructuration qui a pour but de recentrer les ressources d'intervention. Prévue dans le cadre de cette restructuration, la diminution des effectifs dans les postes de police de périphérie et celui de Versoix en particulier soulève de vives réactions de la population et des autorités communales.

Les auditions ont permis aux commissaires de mesurer les préoccupations et les inquiétudes de chacun. Ils ont été convaincus par la nécessité de maintenir une présence permanente de la force de l'ordre, notamment en raison de l'étendue du territoire, l'importante population (20 000 habitants), la proximité de la frontière, ainsi que la recrudescence des délits de tous genres dont les cambriolages. Ils sont également totalement opposés à une période d'essai qui, d'une part, risquerait de se prolonger indéfiniment et, d'autre part, permettrait très difficilement de rétablir la sécurité après avoir lâché la bride aux malfaiteurs pendant un certain temps. Convaincus que le risque de ce phénomène irréversible est beaucoup trop important pour que notre Etat puisse tenter une expérience en situation réelle et non fictive, les commissaires voient une piste de solutions dans le réexamen des tâches de la police. Différents exemples démontrent que l'on charge la police d'un certain nombre de tâches administratives pouvant être attribuées à des collaborateurs d'un autre service ou d'une autre formation. Il y a lieu de réexaminer ces attributions et de les redéterminer en distinguant les tâches administratives des tâches d'autorité et en déléguant certaines d'entre elles à d'autres collaborateurs. Les situations délictuelles ayant évolué dans leur gravité et leur nombre, le cadre du maintien de l'ordre doit suivre cette évolution et il y a lieu de se demander s'il est encore judicieux d'attribuer aux gendarmes, formés dans le cadre d'une école de police à des missions à risques, des tâches telles que la levée des urnes dans les locaux de votations, la levée des fiches d'hôtel, la notification des commandements de payer, le renouvellement des permis de frontaliers, le contrôle de patentes, planton de circulation, planton de garde aux séances du Grand Conseil, etc.

Considérant la part administrative importante et le suivi par de fréquents témoignages devant les tribunaux, même les constats d'accidents peuvent faire l'objet d'une réflexion dans le sens d'une délégation de tâches.

Notre population réclame la présence de gendarmes dans la rue et non derrière un bureau. Il ne faut pas voir dans cette revendication une demande de police répressive, mais au contraire d'un certain rôle préventif par une présence et une surveillance dissuasives.

Conséquence parallèle à l'évolution des délits et à la surcharge actuelle de la police, le recours aux services dits « polices privées » est de plus en plus fréquent. Les commissaires sont persuadés de la raison d'exister de ces polices dans un contexte complémentaire à la gendarmerie et par un rôle se limitant à l'observation et à l'appel à la force de l'ordre. Cependant, la nécessité absolue pour ces polices privées de respecter la limitation de leur rôle n'est pas si simple et sera d'autant plus délicate si elles ne peuvent compter sur la gendarmerie lorsqu'il le faut. Pour éviter tout risque de dérapage de ces polices privées, la police doit être disponible pour intervenir rapidement lorsque la sécurité est mise en cause.

Sans adapter ses attributions à l'évolution de la situation, la police restera confrontée à un défi proche de la quadrature du cercle. Réalisant parfaitement cela, les commissaires saluent la détermination de la hiérarchie de la police qui, malgré les contraintes des limites légales et des contingences, réagit pour être en mesure de faire face à cette évolution. Il est à relever d'autre part la valeur des témoignages des chefs de poste qui, outre l'évocation du problème, ont permis aux commissaires de se persuader de la nécessité pour les hommes du terrain d'être orientés de manière durable pour être motivés à travailler sur leur secteur auprès de la population dans une perspective à long terme.

Le traitement de cette pétition dépasse de loin la seule problématique du maintien ou non d'un poste de police, car les solutions se trouvent dans une restructuration générale d'un service à la population, dont d'ailleurs l'organisation et la charge sont du ressort du canton et non des communes.

En conclusion, la détermination des commissaires pour le maintien du poste de police ouvert en permanence et sans diminution d'effectifs est claire. Ils sont également vigoureusement opposés à une période d'essai devant débuter le 1er septembre, c'est pourquoi, compte tenu de la brièveté des délais, ils demanderont à ce que notre Conseil se prononce à ce sujet dans sa prochaine séance.

Compte tenu de ce qui précède, la Commission des pétitions à l'unanimité des membres présents (2 AdG, 2 DC, 2 R, 3 S, 2 Ve) vous recommande, Mesdames et Messieurs les députés, de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat.

9

Débat

M. Pierre-Pascal Visseur (R). Nul n'est besoin de grand discours pour décrire les problèmes de sécurité auxquels Genève est confrontée depuis de nombreuses années.

Le nombre de policiers est fixé par la loi et n'a pas évolué depuis dix ans, alors même que le nombre de leurs missions n'a cessé de croître, ce qui explique les quelque quatre cent mille heures supplémentaires qu'ils n'ont pour l'instant pas les moyens de récupérer ni en temps ni en salaire. Nous en discuterons plus tard, lors de cette session.

Pire, alors que tous les départements ont dû procéder à des diminutions d'effectifs, seuls les fonctionnaires administratifs de la police ont pu être touchés, sans que leurs attributions diminuent. De ce fait, toutes les missions de ces fonctionnaires administratifs se sont reportées sur le travail quotidien des gendarmes et des inspecteurs. De nombreuses tâches dévolues aujourd'hui aux policiers ne sont plus justifiées, tout au moins lorsqu'elles sont exécutées par des agents qui sont formés au maintien de l'ordre avec des équipements et des méthodes modernes et sophistiquées. Délivrer des commandements de payer, surveiller des portes d'entrée, ramasser des urnes de votation, établir des attestations administratives, surveiller des détenus hospitalisés, transporter des personnes valides, assumer des tâches administratives pour le bureau des automobiles, exécuter des transports de courrier - pour le Conseil d'Etat notamment - accompagner l'office des poursuites lors des saisies, voire établir des constats de collision pour de simples dégâts matériels - tâches que les policiers des pays voisins n'assument plus depuis longtemps - ne sont que quelques exemples des travaux qui pourraient parfaitement être délégués à d'autres services, ou simplifiés.

Croyez-vous que le policier qui est assis à l'entrée de la tribune au-dessus de moi, en ce moment, est engagé selon ses véritables compétences, alors que nous avons dans cette salle des huissiers fort compétents et que de toute façon, en cas de problème sérieux, il faudrait faire appel au poste voisin du Bourg-de-Four ?

Croyez-vous qu'il faille deux ans de stage et dix mois intensifs d'école de police pour assumer de telles missions ? Près de deux cents gendarmes sur huit cents ne quittent jamais leur bureau, qu'il s'agisse de cadres ou de policiers attachés à des tâches administratives. Sur ce point aussi, la population genevoise et les policiers eux-mêmes souhaitent une présence policière dans la rue principalement préventive, mais aussi répressive lorsque cela est nécessaire, et non des gratte-papiers ou des simples plantons. Rappelons qu'un gendarme ou un inspecteur coûte à l'Etat plus de 80 F par heure, si on tient compte de toutes les charges, de la formation et des assurances sociales.

Une réforme a été décidée par le Conseil d'Etat; elle devrait déployer ses effets dans les années à venir. Mais nous pensons qu'il faut aller encore plus loin, notamment en connaissant le cahier des charges exact des policiers et en demandant que toute tâche qui n'est pas une véritable mission de police au service direct de la population et pour sa sécurité soit simplifiée ou attribuée à d'autres services.

C'est la raison pour laquelle nous vous invitons à renvoyer cette motion directement au Conseil d'Etat. 

Le président. Monsieur le rapporteur, avez-vous quelque chose à dire avant de poursuivre le débat ?

M. Jean-Marc Odier (R), rapporteur. Non, Monsieur le président, ce n'est pas nécessaire étant donné que la proposition de renvoi au Conseil d'Etat a été votée par la commission, à l'unanimité. Je n'ajouterai donc rien au rapport. 

M. Jean-Pierre Restellini (Ve). Cette motion soulève indiscutablement des questions importantes, je dirai même essentielles.

Ce n'est plus un secret pour personne, notre police, et plus particulièrement notre gendarmerie, croule sous la tâche. Par conséquent, il est logique et légitime de se demander avant toute chose dans quelle mesure les activités qui sont pratiquement aujourd'hui les siennes sont bien celles qui lui incombent. La réponse est facile : il existe effectivement une multitude de tâches administratives et autres qui ne doivent pas forcément figurer au cahier des charges des policiers. Par exemple, les Verts ont toujours estimé que les activités telles que celles d'ambulancier ne devaient pas consommer du temps police, alors qu'il n'y a pas assez de policiers et trop d'ambulanciers.

Vous nous avez approchés, Monsieur le député Visseur, avec votre proposition de motion et, je crois que nous pouvons le révéler, nous aurions éventuellement pu vous suivre en la cosignant si vous aviez accepté d'y apporter quelques modifications... Sans trop rentrer dans les détails, vous évoquez dans votre premier considérant, je cite : «l'inquiétude légitime - à votre avis - d'une grande partie de la population face à la violence croissante lors de réunions sur la voie publique;». Au cas où nous arriverions à économiser du temps police, je ne suis pas du tout sûr qu'il faille - passez-moi l'expression - le reconsommer dans de grands déploiements de forces de police lors de manifestations publiques...

Venons-en à votre deuxième invite qui prévoit de confier des tâches de police à des tiers. Heureusement, vos propos viennent de me rassurer un peu ! A ce sujet, il convient d'être extrêmement prudents. Mesdames et Messieurs, je vous l'ai déjà dit, nous nous sommes mobilisés jusqu'à notre conseiller d'Etat pour que la police renonce à ses activités de professionnels de la santé.

Mais nous nous battrons avec la même énergie pour qu'en aucun cas des tâches de maintien de l'ordre et de sécurité ne soient confiées à des polices privées et, par conséquent, échappent à notre police - la vraie - c'est-à-dire la publique. Il est intolérable - parce qu'on touche au fondement même de l'Etat de droit démocratique - d'accepter que des privés interviennent sur le domaine public, dans une perspective de lutte contre la criminalité. Les fameuses brigades de défense ou d'auto-défense, par exemple communales, représentent non seulement un danger concret, car il s'agit de personnel qui n'a pas une formation adéquate, mais encore ces brigades concrétisent indubitablement une dérive sournoise de notre Etat républicain.

Mesdames et Messieurs, une raison de plus pour étudier cette motion un peu composite avec beaucoup de soin en commission judiciaire. 

Mme Jacqueline Cogne (S). Il nous paraît nécessaire, voire indispensable, de maintenir à leur place les postes de police de quartier, ne serait-ce déjà qu'en raison de leur effet dissuasif, mais aussi pour répondre aux besoins de la population de ces quartiers.

Pour faire un parallèle avec le problème de Versoix, je vais vous parler du poste d'Onex, ma commune, dont mon collègue Visseur a parlé en évoquant le fait que les gendarmes sont sollicités pour distribuer et reprendre les urnes lors des votations-élections. Je vous rappelle, par ailleurs, que le canton de Genève n'a que 3,5 kilomètres de frontière avec la Suisse et 144 avec la France, dont beaucoup de douanes, ce qui fait qu'ils sont sollicités par les douanes environnantes pour des encaissements d'argent et pas seulement pour des délits. Ils doivent fermer fréquemment les postes de police, parce qu'ils sont très nombreux sur les stades et que la nuit il n'y a que trois ou quatre gendarmes - je crois d'ailleurs que M. Ramseyer en sait quelque chose. A Onex, un postulat vient du reste d'être déposé à ce sujet.

Au vu de ce que je viens de vous exposer et tant il est vrai qu'il manque de gendarmes, il nous paraît nécessaire et idéal de répartir les tâches de manière plus adéquate. Ce qui fait plutôt défaut, c'est une aide administrative, à mon sens, sous forme de secrétariat pour assurer les nombreuses tâches de bureau. Enfin, nous aimerions que les auteurs de la motion 1296 retirent le premier considérant, que nous trouvons pour le moins excessif. Ensuite, nous demanderons le renvoi en commission de la motion et de la pétition... Au Conseil d'Etat, pardon ! En commission ? J'ai un doute, effectivement ! En commission, d'accord !

Le président. Quelle commission, Madame ?

Mme Jacqueline Cogne. La commission judiciaire !  

Mme Dolorès Loly Bolay (AdG). Comme l'a dit M. Restellini, cette motion met en lumière les graves dysfonctionnements dans la gendarmerie genevoise, notamment en ce qui concerne le nombre incroyable de tâches administratives auxquelles les gendarmes sont astreints.

Il y a, à l'heure actuelle, sept cent septante-six gendarmes, mais, sur ce nombre, seuls quatre cents effectuent véritablement un travail de police. Les trois cent septante-six autres sont confinés à des tâches administratives. M. Visseur l'a dit : contrôle des plaques de bistrots, distribution des commandements de payer, brigades des chantiers, etc. De surcroît, il leur arrive parfois de faire aussi les secrétaires...

L'effectif de la gendarmerie se rétrécit donc comme une peau de chagrin. C'est dire que les gendarmes sont peu nombreux dans les rues, et dans le même temps on renforce un dispositif commando, le PMG, Pelotons mobiles de gendarmerie, que j'appelle : les «Rambo» du commandant Baer...

Mesdames et Messieurs les députés, il faut canaliser la violence par le dialogue et la prévention, et non par la répression ! Le PMG, c'est un leurre : il ne sert à rien ! J'aimerais tout de même vous donner l'exemple de Jean-Pierre Chevènement qui vient de mettre en place en France un dispositif appelé le PUP, Police urbaine de proximité, qui est une police à laquelle nous voulons nous identifier, une police citoyenne, une police prête au dialogue, une police proche des gens.

En ce qui concerne la pétition 1237 sur la fermeture du poste de Versoix, je dirai ce qui suit. Il y a actuellement beaucoup de postes qui sont fermés - nous avons eu l'occasion de vous le dire, Monsieur Ramseyer, à propos de la gare. Nous sommes très préoccupés, parce que c'est un lieu stratégique. Le poste de la gare est fermé la nuit, ainsi que celui de Carl-Vogt. Par voie de conséquence, toutes les personnes qui s'adressent à ce poste sont obligées d'aller dans les autres quartiers et l'effectif de nuit pour le canton de Genève est actuellement de cinquante-cinq policiers, dont douze font partie intégrante de la brigade motorisée, ce qui est largement insuffisant.

C'est la raison pour laquelle nous acceptons que cette motion soit adressée au Conseil d'Etat et que nous soutenons la pétition en question.

M. Michel Balestra (L). Je remercie Mme Bolay de soutenir le renvoi de cette motion au Conseil d'Etat, mais je ne partage pas son catastrophisme au niveau de l'image. Il faut reconnaître que beaucoup de choses ont été faites : des îlotiers, des cyclistes, des cavaliers, de la présence dans les grandes manifestations, etc. Reconnaissons aussi que les membres de la police sont appelés à effectuer des milliers d'heures supplémentaires, que les congés sont supprimés, que le moral des troupes s'en ressent.

Nous venons de voter de nouvelles tâches de délégation de police aux agents de sécurité municipaux et nous devons aujourd'hui appuyer une réforme des tâches sur l'ensemble des agents affectés à la sécurité au sens large, sans sombrer, bien entendu - et je partage les réserves de M. le député Restellini - dans les dérives des polices privées. L'unanimité qui s'est faite au sujet du concordat sur les professions d'agents de sécurité et le maintien des spécificités genevoises prouve que personne ne souhaite une dérive de cet ordre dans ce parlement.

Je ne doute pas non plus que le département ait déjà prévu ou commencé cette réforme, mais, Mesdames et Messieurs les députés, le sujet est important. Cette motion vise à conforter la démarche entreprise par le département, à assurer la police de notre soutien et à demander un rapport, afin d'être tenus au courant de l'évolution de ce dossier. Mesdames et Messieurs, Monsieur le député Restellini, vu la simplicité et l'aspect peu polémique des invites, je pense que nous gagnerions beaucoup de temps en envoyant directement cette motion au Conseil d'Etat, puisqu'une motion ne demande rien d'autre qu'un rapport, que ce rapport doit être effectué dans les six mois - je demanderai au département de le faire le plus rapidement possible pour que nous puissions ensuite discuter de l'opportunité ou non de réformes qui, elles, devraient avoir l'appui législatif de notre parlement.

C'est pourquoi je vous demande de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat et non à la commission judiciaire, qui, par ailleurs, est chargée de projets qui ont un degré d'urgence important. Nous risquerions, en renvoyant ce projet de motion à cette commission, de finir nos travaux quand la réforme sera terminée sans pouvoir la contrôler. Et, là, Monsieur Restellini, je crois que ce serait pour nous un autogoal ! 

M. Claude Blanc (PDC). Contrairement à ce qui vient d'être dit par M. Balestra, je ne pense pas que le groupe démocrate-chrétien puisse accepter sans autre que cette motion soit renvoyée au Conseil d'Etat.

En effet, comme l'a dit tout à l'heure M. Restellini, cette motion comporte quelques invites pour le moins équivoques. Par exemple une des invites dit, je cite : «à décharger la police des tâches pouvant être assumées par du personnel administratif, par des agents de sécurité municipaux ou des tiers;».

Moi, Mesdames et Messieurs les députés - Merci de bien vouloir me laisser parler, Monsieur Balestra ! - je voudrais dire, contrairement à M. Balestra, qu'il ne s'agit pas ici de demander au Conseil d'Etat de faire un rapport, mais d'agir ! Certaines choses me paraissent contestables qui méritent que ce projet de motion soit renvoyé en commission, de façon qu'on en détermine bien les contours. En effet, aux yeux du parti démocrate-chrétien, les tâches du maintien de l'ordre et de la sécurité sont des tâches exclusives de la police. Il ne doit pas y avoir d'autres intervenants dans ce domaine. C'est beaucoup trop important.

Et pendant que nous y serons, nous pourrons aussi discuter de l'ensemble du système. Il est évident que notre police cantonale, de dérive en dérive, a fini par avoir dans ses rangs un certain nombre de fonctionnaires qui ne sont plus des policiers tout en bénéficiant du statut de policier. Cela n'est pas acceptable ! La population genevoise est d'accord que les policiers bénéficient du statut de policier, car il veut une police efficace, ce qui lui coûte plus cher que pour un fonctionnaire ordinaire. Il veut bien continuer sur cette base, mais, en contrepartie, les bénéficiaires de ce statut de policier doivent être de vrais policiers et non des fonctionnaires administratifs. Il est nécessaire de revoir la situation sur ce point. D'ailleurs, les policiers du front se plaignent souvent de compter dans leurs effectifs des gens qu'ils qualifient aimablement de «planqués» - il faudra toutefois vérifier ce terme.

Pendant que nous y serons et que la commission examinera tous ces problèmes, je souhaiterais que nous nous penchions également sur le problème des douanes. Vous n'êtes en effet pas sans connaître le drame qui s'est passé tout près de chez moi, il y a quelques jours - j'ai le privilège d'habiter tout près de la frontière et j'y passe tous les jours - je veux parler du douanier qui est mort après avoir été renversé volontairement.

Ce drame a mis en exergue le fait qu'une partie non négligeable de la sécurité dans ce canton est assumée la nuit par des douaniers, alors que ce n'est pas leur travail. Les douaniers - d'ailleurs ce n'est pas un hasard s'ils dépendent du Département fédéral des finances - étaient jusqu'à présent essentiellement des agents fiscaux chargés de prélever divers droits à la frontière. C'est vrai, ces droits ont tendance à diminuer, voire même à être supprimés. Alors maintenant que font les douaniers ? Ils surveillent la frontière la nuit, ce qui est en réalité un travail de policier. De plus, ils ne sont ni armés ni préparés en conséquence, ce qui les expose inutilement à des risques, alors que ce n'est pas de leur compétence. Je crois que le département de justice et police et des transports devrait saisir l'occasion pour discuter avec la directions des douanes et voir comment la sécurité pourrait être assumée mieux et plus efficacement et avec un risque moindre pour les fonctionnaires concernés. 

M. Pierre Meyll (AdG). Si on veut reporter sur les ASM, les agents de sécurité municipaux, toutes les tâches de la police, il faudrait aussi donner aux communes les moyens de se les offrir ! Les communes pauvres ne le peuvent pas. Nous avons quelques problèmes de coopération entre communes à ce sujet. Il est évident aussi que les ASM ne peuvent intervenir que sur le plan administratif, pour des tâches telles que le contrôle des voitures en stationnement, qui sont des tâches annexes aux tâches spécifiques de la police.

Pour les communes assez éloignées, comme c'est le cas de Versoix - puisque le secteur du poste de Versoix va jusqu'à Céligny et Pregny - il est nécessaire que des patrouilles puissent intervenir. Mais l'expérience m'a appris que lorsque les patrouilles doivent intervenir la nuit, par exemple, depuis Blandonnet jusqu'à Dardagny et Céligny, elles ont pas mal de peine, malgré leur connaissance du terrain, à avoir une juste appréciation de certaines situations locales, qui pourraient très rapidement empirer. Bien que quatre agents aient été détachés à Blandonnet, je vous rappelle que Blandonnet ne compte que quarante-cinq hommes partagés en six groupes. Vous devez considérer les hommes en vacances, et ceux qui sont hors service, ce qui fait que l'effectif est plutôt réduit pour les patrouilles d'intervention. Je ne crois pas vous faire injure, Monsieur le conseiller d'Etat, en disant que lorsqu'il y a eu un cambriolage chez vous, les premiers sur place ont été les policiers de Versoix, et ils étaient tout seuls, hélas ! S'ils avaient été plus nombreux, ils auraient pu être sur place plus rapidement.

Ce n'est pas le seul cas où l'intervention de la police locale est plus rapidement sur les lieux que la patrouille, qui peut être appelée ailleurs, et être empêchée de se déplacer tout de suite, même si certaines fois elle arrive avant.

Il faut aussi penser que les essais - six mois - vont se terminer à la fin du mois de février 2000, qu'en janvier vous allez établir une statistique sur la petite criminalité - j'espère qu'il n'y aura pas de grande criminalité... - dans les postes de police, et notamment celui de Versoix, pour savoir si oui ou non il faut maintenir le poste de Versoix. Mais il est clair qu'il n'est pas possible de continuer à maintenir le poste de Versoix avec six policiers seulement, compte tenu des périodes de vacances et autres paramètres : maladies, heures supplémentaires, etc., d'autant que le secteur s'étend de Céligny à Pregny. Pour s'occuper du poste de Versoix, on a estimé qu'il fallait au moins dix-huit hommes, compte tenu des rotations sur vingt-quatre heures, pour qu'il reste ouvert jour et nuit. Dans ces conditions, il faut savoir que le chef de poste est prêt à prendre encore la commune du Grand-Saconnex, ce qui permettrait de décharger Blandonnet. Cette répartition est nécessaire pour que les communiers se sentent en sécurité.

Vous voulez des polices parallèles - les «Rambo», comme les a appelés ma collègue Bolay - soit, mais alors il faudra que les gens des communes pauvres - je l'ai déjà réclamé - puissent aller coucher dans les communes riches pour être tranquilles. Est-ce ce que vous voulez ? Je crois que la constitution genevoise prévoit une police - hélas, nécessaire - mais il faut qu'elle soit présente. Les «Rambo» ne peuvent pas faire grand-chose, lorsqu'ils interviennent, ils ne peuvent pas dresser procès-verbal, ils ne peuvent que retenir les personnes qui ont été interpellées. Leur utilité est donc relative et la crainte qu'ils peuvent inspirer est un luxe que certaines communes ne peuvent pas s'offrir.

Il faut revoir fondamentalement la gestion de la police, et c'est votre travail ! Les polices d'intervention se développent de telle manière que le nombre d'heures va considérablement augmenter - c'est clair. Quand l'armée fait de la surveillance dans certaines occasions et dans des conditions plutôt «rigolotes», on peut se demander s'il ne serait pas utile d'approcher la Confédération pour obtenir des fonctionnaires fédéraux pour qu'ils effectuent certaines gardes d'ambassades et de missions. De plus, ces gardes seraient certainement mieux assurées qu'elles ne le sont actuellement.

La police de proximité doit être disponible à toute heure. Les gens qui appellent un poste de police doivent pouvoir trouver quelqu'un sur place et non pas être déviés sur un autre poste pour tomber sur une personne qui n'est pas en mesure de répondre, car elle ne connaît pas la situation locale. Le fait qu'il n'y ait pas de policier pour répondre désarçonne pas mal de personnes âgées et d'autres qui se sentent perdues et qui ne savent plus comment faire face. Ouvrir les postes selon des horaires de bureaux comme c'est le cas et essayer de compenser en ayant recours à des ASM n'est certainement pas la solution. Il faut vraiment améliorer la situation : les îlotiers doivent servir à quelque chose, la police d'intervention doit pouvoir se déplacer en patrouille, mais les postes de police doivent absolument rester ouverts en permanence, sinon ils ne servent à rien ! Vous avez cité le cas de Denner à Versoix, mais c'est un cas tout à fait fortuit. Il est bien clair qu'on peut faire un cambriolage sans trop de problème à côté d'un poste de police qui est fermé !

Il faut vraiment tenir compte de tous ces éléments pour revenir à une situation de sécurité, pas en remettant l'église au milieu du village, mais le poste de police, pour un village qui compte tout de même maintenant dix mille habitants ! J'ajoute que le secteur dévolu au poste de Versoix compte plus de vingt mille habitants - vingt-cinq mille en incluant le Grand-Saconnex. Je pense que cela mérite un peu de réflexion et de respect pour les personnes concernées.  

M. Olivier Vaucher (L). Tout le monde est d'accord : la police croule sous les tâches administratives, alors que son vrai rôle est d'être une police de proximité, d'être dans la rue pour défendre les citoyens. Je pense qu'il faut se rallier aux motionnaires. Les invites de cette motion sont particulièrement claires et simples. M. Blanc a critiqué un mot, aussi je propose l'amendement suivant à la deuxième invite qui consiste simplement à supprimer «ou des tiers», ce qui donne :

«à décharger la police des tâches pouvant être assumées par du personnel administratif ou par des agents de sécurité municipaux;»

Peut-être qu'ainsi tout le monde sera d'accord de voter cette motion, ce qui permettra de la faire passer au Conseil d'Etat. En effet, la renvoyer en commission retarderait le travail qu'il faut effectuer rapidement et qui est nécessaire si on veut donner les moyens à la police de mieux servir le citoyen.

Monsieur Blanc, vous semblez ne pas savoir qu'il y a une différence entre les douaniers et les garde-frontières. Et, contrairement à ce que vous avez dit tout à l'heure, ceux-ci sont parfaitement entraînés pour la tâche qu'ils effectuent.

Je vous demande instamment, Mesdames et Messieurs les députés, d'accepter l'amendement que je vous ai proposé et de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat. 

Le président. Je vous remercie, Monsieur Vaucher. Je vous informe que l'amendement que vous venez de nous proposer nous a déjà été transmis par M. Balestra, à qui je cède la parole !

M. Michel Balestra (L). Monsieur le président, si je me suis permis d'interrompre M. Blanc, c'est parce que je sais que lorsqu'il s'exprime, c'est avec une certaine sécurité dans le propos.

Effectivement, on peut interpréter la deuxième invite de manière large, mais il s'agit d'une erreur de plume et non d'une volonté politique.

La première invite demande une liste exhaustive des tâches et un rapport sur l'évolution. Pour la deuxième, nous avons présenté un amendement qui a été expliqué par M. Vaucher et que j'ai déposé auprès du président. Elle demande de «décharger la police des tâches pouvant être assumées par du personnel administratif ou par des agents de sécurité municipaux;». Vous savez que la loi que nous avons votée au sujet des agents de sécurité municipaux définit très clairement les compétences des différents groupes. Il n'y a donc pas de risques que ce soit interprété comme une volonté politique de changer la donne ou les règles du jeu. Les modifications réglementaires ou législatives doivent être discutées et votées - il n'y a donc pas de problème non plus - et les modifications réglementaires vont de pair avec la réflexion sur la réforme.

Je crois que les restrictions que vous avez exprimées n'ont plus lieu d'être avec le projet d'amendement que je vous ai proposé. Croyez bien que nous n'avions pas l'intention de créer des milices privées, mais qu'il s'agissait seulement d'élargir un peu le spectre des gens qui pouvaient donner un coup de main pour effectuer des tâches administratives, comme, par exemple, la présentation des commandements de payer. 

M. Christian Brunier (S). J'aimerais appuyer la proposition de ma collègue Jacqueline Cogne de renvoyer cette motion en commission, et je vais vous en expliquer la raison.

Cette motion contient un certain nombre de points positifs, que certains députés ont soulevés, mais elle est néanmoins insuffisante sur bien d'autres points. Monsieur Vaucher, vous trouvez cette motion fort simple, eh bien, moi je la trouve trop simple par rapport au débat qu'elle suscite !

En effet, depuis un certain nombre d'années, il y a une dérive sécuritaire à Genève, et je crois que ce sujet mérite un vrai débat de société, que cette motion nous donne peut-être l'occasion d'aborder en commission pour mener une réflexion. Pourquoi dérives séricutaires ? Aujourd'hui, la sécurité ne règne pas de façon égale selon les quartiers. Vous le savez, certaines communes font appel à des polices privées pour maintenir la sécurité. Cela ressemble quasiment au système américain en matière de sécurité - heureusement, on n'y est encore pas tout à fait - c'est-à-dire que certains quartiers sont sûrs, alors que règne de plus en plus l'insécurité dans d'autres. Il n'est pas tolérable d'accepter ces différences !

Il faut également vraiment s'interroger sur l'adéquation entre les besoins de la population et l'offre de la police. On sait que les postes de quartiers sont de plus en plus démunis, et il est vrai qu'on est en train de former des bataillons de «Rambo» qui se baladent dans des fourgons à travers Genève, ce qui déplaît à la population, car cela crée un sentiment d'insécurité, mais qui déplaît aussi aux syndicats de la police.

Il est aussi urgent de redéfinir les tâches de la police, qui est astreinte à toutes sortes de tâches administratives - beaucoup en ont parlé - car aujourd'hui on veut que les policiers soient sur le terrain et pas forcément derrière leur bureau. Il faut encore redéfinir les compétences entre l'Etat et les communes et d'autres institutions, comme, par exemple, la Fondation des parkings qui pourrait notamment prendre à sa charge le contrôle des macarons. Cela doit donner lieu à un débat, de même que la réglementation des polices privées qui échappent aujourd'hui, d'une certaine façon, à une réglementation sérieuse. Le parti socialiste proposera un certain nombre de projets en janvier, pour réglementer, délimiter et limiter les pouvoirs de ces polices.

Il y a urgence à réorganiser la police. La motion peut contribuer au débat mais, parallèlement, M. Ramseyer a le devoir de réorganiser au plus vite la police. Je vous rappelle qu'en commission des finances - on y reviendra au budget - presque tous les partis - on peut le dire - ont sévèrement critiqué l'organisation de la police et n'ont accordé que partiellement les postes que vous demandiez, Monsieur Ramseyer. Pourquoi partiellement ? Parce que nous estimons que les effectifs de la police sont suffisants et que nous voulons vous obliger, Monsieur Ramseyer, à réorganiser les services de la police. Je crois que cette demande émane de la majorité de ce parlement, mais aussi de la majorité de la population et de la police elle-même.

Mme Salika Wenger (AdG). J'ai été frappée de constater, au cours du travail sur la pétition 1237 sur le poste de Versoix ainsi que celle traitant du passage Malbuisson, que les mêmes qui lancent une initiative pour vider les caisses de l'Etat et réduisent ainsi ses moyens, les mêmes qui pleurent à la moindre création de poste pour le service du tuteur général, par exemple, les mêmes qui refusent toute solidarité aux membres les plus défavorisés de notre société, les mêmes, donc, se plaignent du manque d'effectif de la police...

Peu leur chaut que les instituteurs soient en sous-effectif, que les services psychiatriques croulent sous le travail ou que la justice se rende dans des conditions dignes d'une république bananière... Non ! Ce qui les intéresse en premier lieu, c'est que la police puisse accomplir son office de surveillance de leurs biens... A les entendre, il faudrait un policier à la porte de chaque commerce, chaque villa, chaque immeuble de bureaux, et personne ne discuterait de la nécessité de ce service public... Je tiens au passage à remercier M. Ramseyer pour avoir précisé qu'il y avait pour la police d'autres priorités que la surveillance exclusive des biens.

En ce qui concerne le rapport de M. Odier, même si nous partageons ses conclusions, il nous est totalement impossible de souscrire à quelques remarques de la page 5. En effet, on peut y lire ce qui suit : «Concrètement, la nuit est assurée en moyenne par trois gendarmes pour une population de 61 000 habitants, avec des quartiers sensibles, tels Meyrin et Vernier ainsi que les Avanchets et le Lignon pour des problèmes de drogue. Ce à quoi il faut ajouter le Grand-Saconnex fréquemment en proie aux vandales, sans oublier les trois communes du Mandement, plus tranquilles mais à surveiller tout de même.» Ce ne sont pas les communes suburbaines de Genève que vous nous décrivez, Monsieur Odier, c'est le Bronx à la nuit tombée !

Les problèmes rencontrés dans les quartiers populaires ne sont pas toujours liés à la drogue. La population qui y vit est principalement constituée de travailleuses et de travailleurs qui gagnent durement leur vie et qui, comme les autres habitants du canton, des communes du Mandement par exemple, méritent de vivre tranquilles, en sécurité, même s'ils n'ont pas, eux, les moyens de s'offrir une police privée.

A ce propos, Monsieur Ramseyer, il y a un an une motion avait été renvoyée au Conseil d'Etat sur le rôle des polices privées, et le Grand Conseil n'a reçu aucune réponse à ce jour. Par ailleurs, j'aimerais rappeler que l'Alliance de gauche vous avait interpellé sur la fermeture du poste de police de la gare. Il nous avait été répondu que la sécurité dans ce quartier était prise en charge par le poste de Pécolat... Résultat de cette opération : de nuit, la gare est devenue un véritable coupe-gorge; certains commerçants envisagent même de fermer leur établissement. Quant au poste de Pécolat, avec 40% de travail en plus, pour le même effectif, il s'avère incapable de faire face aux nombreux problèmes du quartier.

Quatre cent mille heures supplémentaires dans la police pour arriver à un résultat aussi contestable : il serait peut-être temps de penser à d'autres solutions, comme par exemple, dans un premier temps, rendre à la rue les gendarmes cantonnés à des tâches administratives, ce qui aurait l'avantage de nous éviter le recours aux pelotons mobiles, dont les allures de commandos, un rien provocatrices, risquent de faire plus de dégâts que de bien et ne résoudront en tout cas pas les problèmes d'une société à deux vitesses !

M. Claude Blanc (PDC). Si le Grand Conseil désire renvoyer cette motion directement au Conseil d'Etat, à la limite, moyennant l'amendement proposé, je n'y verrai pas d'inconvénient, mais à ce moment-là j'aimerais tout de même ajouter une invite.

Je reviens sur ce que je disais tout à l'heure au sujet de la collaboration entre la police et les garde-frontières. Ce qui s'est passé à Meyrin il y a dix jours est inacceptable, parce que les garde-frontières en question n'étaient manifestement pas préparés à ce genre d'intervention. La presse a relaté qu'ils avaient essayé d'appeler du secours, mais la patrouille de police la plus proche se trouvait à Vireloup... Ce n'est pas loin, mais pour aller de Vireloup à Mategnin il faut traverser Ferney-Voltaire, ce qui n'était pas possible. Il y a dont de réels problèmes qui se posent. Ces garde-frontières se sont trouvés un peu démunis, et, malheureusement, l'un d'eux est mort. Cette mort attire notre attention, mais c'est toutes les nuits que la région frontière est en proie au trafic des Lyonnais... Je vois des voitures immatriculées 69 plus ou moins maquillées, presque tous les soirs dans le quartier où j'habite, proche de la frontière. Il faut tout de même savoir que la frontière verte est complètement abandonnée la nuit. Les postes de douane sont fermés et tout le monde peut faire ce qu'il veut, et nous devons aussi nous prémunir contre ces gens. Nous ne pouvons pas être le lieu des exploits des malfrats lyonnais !

C'est pourquoi, pour le cas où cette motion serait directement renvoyée au Conseil d'Etat, je propose d'ajouter une cinquième invite, comme suit :

«à entrer en contact avec la direction des douanes pour déterminer de manière plus sûre la collaboration des policiers et des garde-frontières dans les régions frontalières.» 

Mme Madeleine Bernasconi (R). Si certaines communes et certains quartiers ne ressemblent pas au Bronx, il faut quand même reconnaître - car à certains endroits de la zone frontière, malheureusement, les postes de douane ne sont plus surveillés - qu'il y a une augmentation de la délinquance. M. Claude Blanc a évoqué les voitures qui viennent d'autres régions et qui traversent la ville... C'est vrai ! Dans mon mandat de magistrat communal, chaque année, une fois au moins, voire deux ou trois fois, je rencontre les chefs de postes de douanes, parce qu'il est toujours important de savoir ce qui se passe sur sa commune, aussi largement que possible. J'ai pu constater - en les écoutant - que les problèmes se sont amplifiés ces derniers mois. Comme vous avez pu le lire dans la presse, c'est un jeu pour les jeunes de ces banlieues - quasiment des mandats - qui sont désoeuvrés, de venir chez nous pour commettre des casses.

Une certaine partie de la population qui se trouve près du poste de douane ne se sent pas vraiment en sécurité, c'est vrai et c'est fort dommage, parce que c'est un lieu extrêmement privilégié, puisque c'est près d'un hameau où il devrait faire bon vivre... (L'oratrice est interpellée.) Je n'ai pas dit qu'il faut les transporter ailleurs ! Cette motion a le mérite de demander au Conseil d'Etat de voir comment la police pourrait travailler encore plus efficacement. En effet, les hommes de terrain - ou les femmes - de la gendarmerie font un excellent travail. Nous avons une très bonne répartition des tâches dans notre commune qui compte également des agents de sécurité. Le travail se fait parfaitement bien dans la complémentarité, et il n'y a pas de doublons. Mais ils ne peuvent pas tout faire, et s'il était possible de renforcer leur action avec les postes de douane et des garde-frontières, je suis persuadée que l'ensemble du territoire genevois retrouverait une certaine sérénité.

Les motionnaires demandent le renvoi de cette motion au Conseil d'Etat, mais s'il est tout de même possible d'en parler en commission, tant mieux ! Mais l'important c'est de savoir qu'il y a un problème et de se donner les moyens de le résoudre. Nous ne pourrons pas le faire seuls. Il faudra se concerter avec la direction des douanes, ce qui ne peut pas se faire au niveau genevois, mais le Conseil d'Etat pourra certainement apporter une amélioration.

On a voulu tout ça, mais les situations changent, et il faut savoir faire marche arrière et peut-être décider d'ouvrir à nouveau les postes de douane. Quand vous pensez au parcours que doivent faire les douaniers aux frontières - à deux équipes seulement - pour faire le tour du canton, ça me paraît un peu léger ! Il y a vraiment un travail à faire. (L'oratrice est interpellée.) Mais, Madame, ça n'empêchera pas de faire tout le travail de prévention que nous devons faire, et qui ne doit pas forcément être fait par le monde politique, d'ailleurs ! 

M. Gérard Ramseyer. Il va de soi que chaque fois qu'on demande des moyens de police supplémentaires, je ne peux qu'applaudir.

Cette motion demande de faire un état des tâches de la police. L'article 3 vous donne ces tâches de manière exhaustive. Seulement huit tâches supplémentaires sont allouées à la police, qui ne sont pas dans la loi... Je ne voudrais pas faire outrage à M. Blanc, ni à M. Brunier, en rappelant que ce sont mes prédécesseurs qui ont donné à la police des tâches de police du commerce, puis des tâches de police sur les étrangers : ce n'est pas moi ! Mon travail consiste donc à défaire ce que mes prédécesseurs ont fait...

Mesdames et Messieurs, il y a de quoi se demander si on n'est pas en train de marcher sur la tête ! S'il y a un département de l'Etat de Genève qui a scrupuleusement fait l'effort de réduire les effectifs, c'est bien la police ! En six ans, nous avons réduit le personnel administratif de cent cinquante unités. Nous avons respecté loyalement ce que ce Grand Conseil nous a dit : moins 2% des effectifs chaque année ! La conséquence a été qu'une toute petite partie du travail administratif a été reportée sur des gendarmes, et vous avez raison de dire qu'ils ont trop de tâches à effectuer. Mais ils ne font pas que ça : chaque gendarme effectue une petite partie administrative dans son activité ! Elle est encore trop grande, mais nous travaillons à ce qu'elle diminue.

Je n'ai pas attendu cette motion, n'en déplaise à ses auteurs, pour lancer une réforme ! Cette réforme baptisée «Police 21» - 21, c'est pour le siècle - a été lancée il y a une année et demie et est maintenant achevée. Le premier signe clair est le retour aux OPF de la distribution des commandements de payer, c'est le retour à l'OCP de la police des étrangers, c'est le retour à mon département, avec des administratifs non policiers, de tâches «population» et «commerce».

Il va de soi que si je dois reprendre dix postes de policiers dans mon département, il faut me donner dix postes ! Vous ne me donnerez jamais dix postes, alors il faut que je trouve ailleurs les personnes capables d'effectuer ce boulot. Cela ne se fait pas en trois mois. Je regrette chaque jour davantage d'avoir été loyal et honnête en réduisant mes effectifs de cent cinquante unités police.

Ensuite, je voudrais dire que j'ai entendu à peu près tout et son contraire... Il faut des gens dans les postes... Il faut des patrouilles supplémentaires... Il faut de la mobilité dans les interventions... Vous pouvez bien prendre le problème comme vous voulez, si chacun veut sa police de proximité à lui, nous n'y arriverons pas !

Monsieur Meyll, vous avez parlé du poste de Versoix. Vous connaissez cette circulaire comme moi. Vous dites qu'un poste de police est dissuasif. Je vous rappelle qu'il y a effectivement eu deux hold-up en une semaine à 150 mètres seulement du poste de police... Qui a arrêté les types qui faisaient ce mini hold-up ? Ce sont des patrouilles venues de Blandonnet qui se sont occupées de cette affaire avec beaucoup de succès... Et on voudrait maintenant laisser le poste ouvert ! Mais un poste ouvert, cela signifie qu'il y a un type bloqué dans un poste qui ne fait qu'attendre un téléphone ou une visite... Pour maintenir des postes de police ouverts en campagne, il faut des effectifs !

Sans entrer trop dans les détails, parce qu'il y en aurait pour une heure, je voudrais évoquer le problème budgétaire. Mesdames et Messieurs, vous pouvez bien discuter de ce qu'il faudrait faire et ne pas faire, le 17, ici, vous devrez voter un budget, et nous verrons bien si vous me donnez les forces de police que je demande ! La réponse est d'ores et déjà non : alors, vous en supporterez, vous, la conséquence ! (Exclamations.)

Madame Bolay, vous me dites que les pelotons ne servent à rien... Vous savez qui consulte le site Internet de la police, ces temps ? La police de Seattle ! Vous voyez pourquoi ? Allez demander aux gens de Seattle comment a été réglée la sécurité, et vous me direz si nous exagérons vraiment ! (Le président agite la cloche.)

Dans la prochaine FAO, Madame Bolay, figurera le discours que j'ai prononcé à la cérémonie de prestation de serment des policiers. Vous verrez comment évolue la police. Je pense que vous serez satisfaite, du moins je l'espère ! Vous avez aussi fait allusion à l'armée qui sert à rien... Je constate simplement que nous n'avons pas eu de problèmes à Genève, alors qu'il y en a ailleurs... Vous dites que trop de policiers sont sollicités pour les manifestations sportives et autres à Genève : n'empêche que nous n'avons jamais eu de problèmes, alors qu'il y en a eu ailleurs... Ma foi, c'est comme ça, il faut savoir ce qu'on se veut !

Quelqu'un m'a parlé des douanes... Mais le débat sur les douanes n'est pas ouvert par Genève; il est ouvert au niveau de la Confédération, depuis maintenant plus d'une année ! Il y a des discussions pour transférer des compétences de police à des garde-frontières, et le travail est en cours. Il se fait au niveau suisse. C'est M. Walpen, chef de la police genevoise, qui est délégué pour la Suisse romande, et je peux vous dire que cela fonctionne bien. Plus vite la Suisse sera dans l'Europe, mieux ce sera ! Nous serons peut-être bientôt à Schengen, cela m'économisera du monde ! Tout est en route, mais au niveau suisse - pas au niveau genevois.

Enfin, vous avez discuté pour savoir s'il fallait renvoyer cette motion au Conseil d'Etat ou à la commission judiciaire. J'ai fait une proposition que tous les présidents de parti ici présents ont reçue, à savoir de me déléguer un îlotier politique chargé des liaisons avec la police, pour améliorer votre connaissance du problème. Un seul parti, Mesdames et Messieurs les députés, m'a répondu non : le parti socialiste, sous la signature de M. Brunier ! (Exclamations.) Comprenne qui pourra ! (Le président agite la cloche.) Je le dis surtout pour le Mémorial, Monsieur Brunier ! Vous pouvez bien dire ce que vous voulez, en tout cas j'ai bien reçu votre lettre, Monsieur !

Je fais la proposition suivante : vous venez de renvoyer à la commission judiciaire un dossier pénible, difficile, délicat, qui va prendre du temps, et vous savez que trente points sont en attente. Si vous renvoyez cette motion en commission, vous recevrez des nouvelles dans deux ou trois ans, ce qui sera de toute façon trop tard, et ce n'est certainement pas ce que vous voulez ! Par contre, vous pouvez la renvoyer au Conseil d'Etat. Je pense, pour ma part, que vos informations sont tellement lacunaires qu'il serait souhaitable que je puisse, dans une commission ad hoc ou en plénum, vous présenter dans le détail la situation telle qu'elle est vécue sur le terrain.

En fait, vous parlez de violence et moi aussi : nous avons la même volonté. Je le répète, je n'ai simplement pas les moyens de faire plus et de faire mieux. Vous devez me donner ces moyens, mais vous ne me les donnez pas : il faut donc que nous discutions !

Monsieur le président, si cet objet est renvoyé en commission judiciaire c'est deux ans de perdus. Par contre, j'accepte tout à fait de traiter cette motion, si elle est renvoyée au Conseil d'Etat. Je trouverai le moyen, avec les présidents de parti et les chefs de groupe, de mettre sur pied une séance dans laquelle je pourrai vous exposer la situation exacte sur le terrain, pour que vous révisiez votre opinion et pour confirmer la volonté qui est la nôtre. Franchement, Madame Bolay, si j'avais été à votre place j'aurais dit ce que vous avez dit... Il n'est donc pas utile de discuter pendant des heures et d'émettre des critiques les uns sur les autres. Vous voulez tout à la fois et partout, et je n'ai pas suffisamment de moyens. A moi de vous prouver que j'en ai besoin. J'espère à mon tour pouvoir vous convaincre !  

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je mets aux voix le renvoi de la motion 1296 à la commission judiciaire. (Exclamations.)

Mise aux voix, la proposition de renvoyer cette proposition de motion à la commission judiciaire est rejetée.

Le président. Nous sommes en présence de deux amendements. Je mets tout d'abord aux voix l'amendement proposé par M. Balestra, qui consiste à supprimer «ou des tiers» à la deuxième invite de cette motion.

M. Gérard Ramseyer. Je comprends bien le sens de l'amendement, mais il me semble que si le texte a été rédigé ainsi c'est qu'on voulait parler du personnel administratif de la police, des agents de sécurité municipaux - ce qui est autre chose - et des tiers, qui pourraient être, par exemple, les six postes que je dois trouver pour effectuer la notification des commandements de payer qui seront les employés de l'Etat, non de la police mais de l'office des poursuites et faillites - d'où cette terminologie.

Le président. Je mets donc aux voix l'amendement proposé par M. Balestra, qui consiste à supprimer «ou des tiers» à la deuxième invite de cette motion, ce qui donne :

«à décharger la police des tâches pouvant être assumées par du personnel administratif ou par des agents de sécurité municipaux;»

Mis aux voix, cet amendement est adopté.

Le président. Monsieur Meyll, c'est un geste d'humeur, ou vous voulez parler ?

Je mets maintenant aux voix l'amendement proposé par M. Blanc, qui consiste à ajouter une 5e invite, dont la teneur est la suivante :

«à entrer en contact avec la direction des douanes pour déterminer de manière plus sûre la collaboration des policiers et des garde-frontières dans les régions frontalières.»

Mis aux voix, cet amendement est adopté.

Mise aux voix, cette motion ainsi amendée est adoptée.

Elle est ainsi conçue :

Motion(1296)concernant la répartition des tâches de la police

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant :

l'inquiétude légitime d'une grande partie de la population face à la violence croissante lors de réunions sur la voie publique ;

la multitude de tâches administratives et d'autorité incombant aujourd'hui à la police ;

la présence souhaitée de policiers sur la voie publique, en plus grand nombre ;

le grand nombre d'heures supplémentaires effectuées par la police ;

les projets de nouvelle utilisation des postes de police ;

la demande d'augmenter le nombre de policiers ;

invite le Conseil d'Etat

à établir et à publier la liste exhaustive des tâches confiées actuellement à la police, à publier la nouvelle répartition du travail de la police, telle qu'imaginée par la réforme en cours ;

à décharger la police des tâches pouvant être assumées par du personnel administratif ou par des agents de sécurité municipaux;

à proposer au Grand Conseil les modifications législatives y relatives ;

à adopter lui-même les modifications réglementaires nécessaires ;

à entrer en contact avec la direction des douanes pour déterminer de manière plus sûre la collaboration des policiers et des garde-frontières dans les régions frontalières.

P 1237-A

Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (renvoi de la pétition au Conseil d'Etat) sont adoptées.

 

La séance est levée à 19 h.