République et canton de Genève

Grand Conseil

M 1268-A
19. a) Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la motion de Mmes et MM. Fabienne Bugnon, Alberto Velasco, Christian Ferrazino, Antonio Hodgers, Jeannine de Haller, Françoise Schenk-Gottret, Marie-Paule Blanchard-Queloz, Myriam Sormanni, Christian Brunier, Laurence Fehlmann Rielle, Anne Briol, Régis de Battista, Luc Gilly, Pierre Vanek, Caroline Dallèves-Romaneschi et Dominique Hausser concernant le retrait des troupes armées engagées pour assurer la sécurité des organisations internationales. ( -) M1268
Mémorial 1999 : Développée, 1750. Adoptée, 1766.
P 1241-A
b) Rapport de la commission des affaires communales, régionales et internationales chargée d'étudier la pétition pour le retrait immédiat des troupes de Genève et pour une médiation internationale à Genève en faveur du peuple kurde. ( -) P1241
Rapport de M. Alberto Velasco (S), commission des affaires communales, régionales et internationales
M 1298
c) Proposition de motion de Mmes et MM. Françoise Schenk-Gottret, Laurence Fehlmann Rielle, Georges Krebs, Luc Gilly, Christian Brunier et Christian Grobet : Les barbelés militaires : ça suffit ! ( )M1298

M 1268-A

Le Grand Conseil a été saisi, le 26 mars 1999, de la motion 1268 au Conseil d'Etat.

Qui invite le Conseil d'Etat :

« à revenir sur sa décision et à intervenir auprès du Conseil fédéral pour que celui-ci rappelle ses troupes armées ;

à nouer un dialogue avec les représentants du peuple kurde comme le Grand Conseil le lui a demandé ;

à faciliter la tenue sur territoire genevois de toute conférence pouvant participer au règlement pacifique du conflit opposant la Turquie au peuple kurde. »

Le Conseil d'Etat répond comme suit aux invites de la motion :

1. Recours à l'armée pour assurer la sécurité des organisations internationales

En tant que carrefour important de la coopération internationale et de la diplomatie multilatérale, Genève constitue un instrument important au service de la politique étrangère de la Suisse. Conformément aux obligations du pays hôte, selon les conventions de Vienne, il appartient à la Confédération d'assurer la sécurité des biens et des personnes bénéficiant du statut diplomatique.

C'est d'ailleurs en vertu d'une telle analyse de conformité au droit supérieur que le Tribunal fédéral vient d'annuler, dans un arrêt rendu le 21 avril 1999, la disposition de l'initiative populaire 109 « Genève, République de paix » qui demandait que le canton de Genève garantisse la sécurité des conférences internationales qui se déroulent sur son sol par des moyens non militaires.

Se fondant notamment sur les articles 57 et 58 de la nouvelle Constitution fédérale adoptée en votation populaire le 18 avril 1999 par le peuple et les cantons, le Tribunal fédéral a en effet estimé que la responsabilité de la sécurité de la Genève internationale était bel et bien une responsabilité partagée entre le canton et la Confédération.

La décision du Conseil d'Etat de solliciter l'appui de la Confédération afin de renforcer la sécurité de la Genève internationale découle ainsi de cette obligation. Elle a été prise en raison des événements qui se sont déroulés en Suisse et à l'étranger dès le mois de février 1999, alors que la communauté kurde se mobilisait à Genève, Berne et Zurich, de même dans toutes les capitales européennes suite à l'arrestation du leader kurde Abdullah Öcalan.

Dans la nuit du lundi 15 février, des manifestants pénétraient illégalement dans l'enceinte du Palais des Nations. Le mardi 16 février vers 18h30, d'autres manifestants kurdes pénétraient dans les locaux du parti socialiste genevois. A Berne, l'ambassade de Grèce était occupée.

Après s'être livré à une appréciation de situation, le Conseil d'Etat a adressé une lettre aux gouvernements des cantons de Fribourg, Neuchâtel, Vaud et du Valais sollicitant un appui en vertu du Concordat réglant la coopération en matière de police afin de renforcer la sécurité du milieu diplomatique.

Alors que le Conseil fédéral condamnait l'occupation de l'ambassade de Grèce à Berne ainsi que les autres actes de violence commis en Suisse, d'autres manifestants kurdes pénétraient illégalement le mercredi 17 février 1999 dans le bâtiment du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR). Fort heureusement, dans l'après-midi, les occupants quittaient pacifiquement les locaux occupés tant à l'ONU qu'au HCR.

Par le biais d'un communiqué de presse, le Conseil d'Etat exprimait son soulagement à la suite de l'évacuation sans heurts, grâce à une négociation fructueuse, du Palais des Nations et du bâtiment du HCR à laquelle ont participé certains membres de votre Conseil. Le Conseil d'Etat tenait alors à souligner l'engagement personnel et la volonté d'apaisement qui ont caractérisé l'action des intervenants. Le gouvernement exprimait en outre sa reconnaissance aux représentants de l'ONU et de la Confédération, ainsi qu'aux forces de police (genevoises et confédérées), et aux services sanitaires et de secours. Tous, par leur action concertée et mesurée, ont apporté une contribution importante à une solution pacifique de ces occupations.

Le Conseil d'Etat rappelait que si le droit de manifester devait être assuré - et il tient à le souligner ici - il ne pouvait en revanche accepter que des actes illégaux soient commis à l'égard des habitants de ce canton et des membres de la communauté internationale que Genève accueille sur son territoire. Le Conseil d'Etat en appelait à une solution négociée pour ce qui concerne le problème kurde et assurait le Conseil fédéral de sa disponibilité à accueillir toute démarche qu'il jugerait bon de faire dans le cadre d'une mission de bons offices.

S'agissant de la sécurité de la Genève internationale, des résidences et des missions diplomatiques établies dans le canton, il devenait patent que le corps de la police cantonale engagé sans discontinuité depuis le début des événements ne pouvait, à lui seul, faire face dans la durée à une telle situation, sachant que la police doit également pouvoir accomplir ses autres missions au service de la population et des hôtes de notre canton.

C'est toujours le cas aujourd'hui. Actuellement, la police genevoise et en particulier la gendarmerie, affecte en permanence plus de 120 collaborateurs, dont 80 % de gendarmes, aux missions de protection du milieu diplomatique. A cet effet, de nombreuses prestations sont toujours supprimées, notamment dans le domaine de la circulation. En outre, dans les quartiers, de nombreuses réquisitions, enquêtes et actions de sécurité publique ne peuvent plus être assurées ou ne peuvent l'être qu'avec des délais très importants.

Tous les cours de perfectionnement professionnel ont dû être suspendus au sein de la gendarmerie et du corps des gardes de sécurité pour les organisations internationales et les missions diplomatiques (GSD) et le personnel n'est plus autorisé à prendre de congés pour résorber les 311'000 heures supplémentaires accumulées au sein des services.

Enfin, en matière de recours au renfort de policiers confédérés pour exécuter les missions, force est de constater que les polices cantonales romandes, en dehors d'une assistance ponctuelle, ne peuvent mettre à disposition de notre canton des renforts significatifs pour une durée indéterminée.

Ce constat a conduit le Conseil d'Etat a solliciter l'appui de Berne, afin que la Confédération mette des troupes à disposition du canton pour renforcer la sécurité des milieux diplomatiques à Genève. Le Gouvernement tenait d'emblée à préciser que cette décision ne constituait en aucun cas une mesure de défiance visant spécifiquement la communauté kurde qui a trouvé dans notre pays et notre canton une terre d'accueil à laquelle elle s'est intégrée.

Le 1er mars 1999, le Conseil fédéral décidait d'attribuer à notre canton les moyens militaires nécessaires. Ce service d'appui aux autorités civiles s'inscrit dans le cadre des engagements de sûreté subsidiaires prévus par la loi sur l'armée et l'administration militaire (LAAM) du 3 février 1995, aux articles 65 et suivants.

Une telle mesure n'est pas extraordinaire à Genève puisque depuis 1954, l'armée a renforcé à 7 reprises la police dans le cadre d'un service d'appui, pour garantir la sécurité de la Genève internationale. Ce fut le cas lors des événements suivants :

Le 1er mars 1999, le commandant de troupe en la personne du divisionnaire André Liaudat, commandant de la division territoriale 1, a reçu sa mission directement du Conseil d'Etat. Cette mission d'appui et d'assistance exclut sans ambiguïté le recours à la troupe pour des tâches de maintien de l'ordre. Il en découle que la troupe doit éviter toute confrontation avec des éléments civils, les missions de protection incombant strictement à la police. En revanche, l'armée fournit à la police un appui indispensable en exerçant des tâches d'observation, de garde d'objectifs et de surveillance.

A ce jour, les services du Ministère public de la Confédération fixent les objectifs à protéger. Plus de 48 objectifs ont été assignés à la police genevoise et l'armée assure la surveillance de 14 d'entre eux, dont le vaste périmètre de l'ONU, le solde étant à la charge de la police. 600 militaires au total sont actuellement engagés. La mise en place du dispositif de sécurité militaire se fait en concertation permanente avec la Mission permanente de la Suisse près les Organisations internationales et, pour ce qui est des organisations internationales du système onusien, en concertation avec les services de sécurité des Nations Unies.

A Berne, les parlementaires ont confirmé le bien-fondé des mesures prises, puisque simultanément, en date du 20 et du 21 avril 1999, le Conseil des Etats puis le Conseil national adoptaient un arrêté autorisant le Conseil fédéral à prolonger l'engagement de la troupe pour une durée illimitée afin d'assurer la protection des diplomates, des ambassades, des résidences et des biens appartenant aux organisations internationales en Suisse.

Par leur présence ponctuelle à Genève, leur motivation et l'engagement personnel dont ils font preuve, les militaires présents à Genève depuis le début du mois de mars 1999 renforcent à n'en pas douter, la crédibilité de la politique de sécurité de la Confédération et contribuent efficacement à renforcer notablement la sécurité du milieu diplomatique à Genève, de concert avec la police cantonale. Le Conseil d'Etat tient à leur exprimer à cet égard sa vive gratitude.

A terme, il s'agit à l'évidence de mettre en oeuvre d'autres mesures pour assurer durablement la sécurité de la Genève internationale de façon à ce que le recours à la troupe n'intervienne que de façon exceptionnelle. Le Conseil d'Etat prône notamment le renforcement du corps des gardes de sécurité pour les organisations internationales et les missions diplomatiques (GSD), dont le financement est assuré par la Confédération à concurrence de 30 postes alors que l'objectif visé est de 120 gardes. Des contacts ont d'ores et déjà été pris avec les organes compétents de la Confédération afin d'examiner comment mettre en oeuvre ce projet.

2. Initiatives visant à favoriser le dialogue avec les représentants du peuple kurde

A la suite des événements du mois de février 1999, le Conseil d'Etat a décidé de constituer une structure de dialogue permettant d'être à l'écoute des préoccupations de la communauté kurde de Genève.

Ce groupe s'est déjà réuni à deux reprises, une troisième rencontre étant d'ores et déjà agendée. L'Etat est représenté par M. Claude Bonard, (chancellerie d'Etat), qui assure la présidence de la délégation constituée de MM. Christian Aguet (DIP), Bernard Gut (DJPT) et Paul-Olivier Vallotton (DASS). Pour sa part, la communauté kurde est représentée par une délégation constituée de représentants du Comité du Kurdistan à Genève, de la Fédération des associations kurdes de Suisse, du Mouvement des femmes libres du Kurdistan et du Croissant-Rouge du Kurdistan. Mme Fabienne Bugnon, députée, participe aux rencontres en qualité d'observatrice, assurant pour le surplus la liaison avec les représentants kurdes.

Outre la question des bons offices de la Suisse, divers autres sujets ont été évoqués, dont celui de la mise à disposition d'un local permettant à la communauté kurde d'organiser des activités culturelles et des cours de langue kurde aux enfants kurdes domiciliés à Genève.

3. Solution pacifique et négociée du conflit au Kurdistan

Le Conseil d'Etat a tenu à assurer le Conseil fédéral de sa disponibilité dans le cadre d'une initiative en matière de bons offices. Il l'a fait une première fois le 17 février 1999 puis une seconde fois, par le biais d'un courrier adressé au Conseil fédéral le 28 avril 1999. Le Conseil d'Etat réaffirmait alors sa disponibilité pour accueillir toute initiative que la Suisse jugerait utile de prendre dans le cadre d'une mission de bons offices liée à la résolution de la question kurde.

Se fondant sur sa tradition de lieu de dialogue et de médiation, le gouvernement rappelait qu'une telle contribution de Genève serait conforme à la tradition d'engagement humanitaire en faveur du respect des droits de l'homme qui caractérise notre canton. Elle traduit en outre la volonté des autorités genevoises de soutenir activement les efforts déployés par la Confédération dans la recherche d'une solution pacifique et négociée qui permette d'éviter de nouveaux déchirements au Kurdistan et de nouvelles tensions sur la scène internationale.

Enfin, au moment où l'inquiétude grandit au sein de la communauté kurde de Suisse en raison du prochain procès de M. Abdullah Öcalan, le Conseil d'Etat, soucieux de voir les droits les plus fondamentaux de la personne humaine respectés, a tenu à réaffirmer son soutien aux autorités fédérales dans le cadre des démarches entreprises par Berne, demandant que ce procès respecte les principes de l'Etat de droit et que des observateurs internationaux soient admis à en suivre le déroulement.

Au vu des explications données et des initiatives prises pour répondre aux attentes de la motion, le Conseil d'Etat vous prie, Mesdames et Messieurs les députés, de prendre acte du présent rapport.

P 1241-A

La Commission des affaires communales, régionales et internationales, sous la présidence de M. Alain Etienne, s'est réunie le 11 mai 1999, pour examiner la pétition 1241 déposée par M. Tobias Schnebli au nom du GSsA, le 26 mars 1999, auprès du Grand Conseil qui l'a transmise à la Commission des droits politiques, cette dernière s'étant dessaisie pour la renvoyer à notre commission. Le procès-verbal a été tenu par Mme Seyfried.

Introduction

La pétition, qui a recueilli 1285 signatures, tout en approuvant les différentes résolutions adoptées par le Grand Conseil sur le même thème, demande aux autorités genevoises le retrait immédiat des troupes et l'organisation, avec l'appui des autorités fédérales, d'une conférence internationale pour la recherche d'une solution pacifique du problème du Kurdistan.

Considérant que la mise en place de troupes équipées de munitions de guerre sous prétexte d'assurer la surveillance des bâtiments diplomatiques :

crée un climat d'état de siège dans notre canton, et comporte des risques majeurs de dérapages du fait que la troupe n'est pas formée à de telles tâches ;

tend à criminaliser tout le peuple kurde, accusé qu'il est, sans aucune forme de procès, de menacer la sécurité des organisations internationales ;

remplace la nécessaire logique de médiation pour résoudre la question kurde dans le sens du droit des peuples à l'autodétermination par une logique purement militaire ;

conforte la propagande du régime turc qui exploite le déploiement de troupes à Genève pour légitimer sa politique de répression du peuple kurde ;

crée un précédent dangereux en matière de sauvegarde de l'ordre public et s'inscrit directement dans l'offensive du Conseil d'Etat contre l'initiative « Genève république de paix » qui devra être prochainement soumise au peuple ;

Les soussigné/e/s :

approuvent les résolutions du Grand Conseil genevois demandant le retrait immédiat des troupes et appelant au dialogue pour favoriser une solution pacifique au problème kurde ;

appellent dans le même sens le Conseil d'Etat à revenir sur sa décision et à intervenir auprès du Conseil fédéral pour que celui-ci rappelle les troupes dans les plus brefs délais ;

invitent le Conseil d'Etat à affirmer publiquement la disponibilité de notre république à organiser une conférence internationale avec l'appui des autorités fédérales pour trouver une solution pacifique au problème du Kurdistan dans le respect des droits définis par la Charte des Nations Unies.

N.B. : 1285 signatures

GSsA, M. Tobias Schnebli, case postale 151, 1211 Genève 8

Travaux de la commission

Audition

Audition des pétitionnaires : M. Tobias Schnebli, membre du GSsA

M. Schnebli explique que la pétition contient deux volets, soit le retrait immédiat des troupes et une médiation internationale en faveur du peuple kurde.

S'agissant de cette présence armée à Genève et malgré son aménagement, on ne peut ni minimiser, ni banaliser cette présence, comme le font les autorités cantonales.

Concernant le dysfonctionnement des institutions politiques, le Tribunal fédéral (TF), se référant à l'initiative « Genève, République de paix » (Initiative 109), a déclaré que l'appel des troupes ne devait constituer que l'ultime moyen, après que tous les autres aient été épuisés. D'autre part, le Conseil d'Etat (CE) a décidé de passer outre la motion approuvée par le Grand Conseil (GC) demandant le retrait immédiat des troupes et ceci contrairement aux assurances données par Mme Brunschwig Graf quant à la durée de ce déploiement, ce dernier, excédant la limite des 4 mois prévus à l'origine. Parallèlement, les chambres fédérales ont décidé de prolonger sans limite la durée d'engagement de l'armée, et même d'augmenter, si cela était nécessaire, les effectifs.

Au sujet des témoignages recueillis lors de la récolte des signatures, selon M. Schnebli, il ressort que la présence de l'armée est perçue comme malsaine par une bonne partie de la population. Le GSsA a même reçu des appels et des témoignages provenants de parents d'élèves. C'est ainsi que la présence militaire à Bernex, liée aux images de guerre véhiculées par la télévision, pose un certain nombre de problèmes qui se manifestent chez les enfants par des réflexes de peur et des réactions malsaines. Autre cas signalé : l'école du Bon Secours où les gardes du bâtiment de la délégation yougoslave se rendent, ou du moins se rendaient, aux toilettes de l'école, avec leur arme chargée. M. Schnebli ne sait pas si un compromis a pu être trouvé entre-temps.

Pour M. Schnebli, c'est la banalisation qui est faite de cette présence armée qui est à dénoncer, car même si pour beaucoup de gens celle-ci est imperceptible, le climat a néanmoins changé. Ainsi, il se dit particulièrement interpellé par la normalisation d'un état d'exception, qui, paradoxalement se produit dans le climat de para-guerre qui semble s'installer en Europe.

Le volet de cette motion s'inspire de l'opinion d'un certain nombre de citoyens, qui considèrent qu'une médiation est le meilleur moyen de participer à une désescalade des conflits, d'une part, et de concrétiser l'image de la Genève internationale, d'autre part. Pour. M. Schnebli, il n'y a pas de similitude entre la situation des Kurdes, dont les manifestations ont entraîné la présence militaire, et celle de la communauté kosovare et albanaise. Les Kosovars avaient l'espoir d'une médiation internationale, tandis que les Kurdes, après 15 ans de guerre et des situations parfois pires que celles des Kosovars, ont vu leur espoir d'appui international s'évanouir. C'est ainsi qu'avec l'arrestation de leur chef, les Kurdes se retrouvent complètement isolés et n'ont d'autre choix que des manifestations dites « violentes » pour se faire entendre. Et c'est dans ce cadre que la Genève internationale peut et doit jouer un rôle.

A cela s'ajoute un argument supplémentaire, à savoir que le Parlement genevois a désormais les compétences et la légitimité pour intervenir auprès des institutions nationales et internationales dans le but de favoriser une désescalade du conflit kurde. En effet, la décision du TF à propos de l'initiative 109, dans ses considérants, reconnaît la compétence du canton pour intervenir dans le sens d'une solution civile pour la négociation du désarmement. Cette ouverture est donc légitimée et affirmée par les plus hautes instances juridiques. C'est donc là qu'il faudrait agir, plutôt que de construire une illusion de sécurité avec les risques qu'elle comporte en matière de provocation. Il s'agit d'une chance à saisir pour la sécurité du canton.

Certains commissaires ont de la peine à comprendre le lien qui est fait entre le dispositif de sécurité demandé par des organismes internationaux et le problème kurde. De même pour la description de l'état de siège qu'ils estiment sévère, s'agissant là d'une mission intéressante pour l'armée, et alors que les contacts entre celle-ci et la population semblent prouver le contraire ?

M. Schnebli pense que, politiquement, il y a un consensus assez large pour affirmer que c'est à des spécialistes formés que devrait revenir la prévention d'actes violents et que même les militaires reconnaissent que ce type d'intervention n'est pas de leur compétence. S'il reconnaît que des contacts puissent exister entre l'armée et les habitants, et que jusqu'alors il n'y a pas eu de problème ni d'incident, il est convaincu qu'à mesure que le temps passe, il est de plus en plus probable qu'un accident se produise. Ainsi, la question n'est pas de savoir si les militaires trouvent ce genre de cours de répétition sympathique, mais s'ils sont capables d'assumer des situations pour lesquelles ils n'ont pas été formés.

Selon M. Schnebli, les raisons pour lesquelles ce ne sont pas les gardes de sécurité de l'ONU - alors qu'ils sont entraînés pour - qui sont chargés de surveiller les ambassades, semblent être d'ordre économique.

S'agissant de la deuxième partie de la motion (l'organisation de pourparlers), et en réponse à la question d'un commissaire, M. Schnebli explique qu'en l'occurrence, cette démarche a déjà été réalisée. Par rapport à la décision du Tribunal fédéral, le canton a la légitimité et les compétences pour aller plus loin dans cette démarche. Il indique qu'il ne s'agit pas de faire de la politique étrangère à la place de la Confédération, mais d'utiliser la possibilité d'intervenir auprès des institutions internationales compétentes, y compris les ONG, pour favoriser la tenue de conférences. Le canton dispose désormais d'une marge supplémentaire.

La question du risque d'accident ne convainc pas certains commissaires qui affirment que les fusils ne sont pas chargés, même s'ils disposent de magasins, du moins pour ce qui concerne les écoles. M. Schnebli reste persuadé que les fusils sont chargés.

Discussion et vote

Lors de la discussion, il apparaît que la majorité des commissaires présents sont d'accord pour rappeler que, malgré leur formation express, les soldats ne seraient pas suffisamment préparés à intervenir en cas de nécessité. Le problème de savoir s'il y a des balles ou pas n'est pas une question que la commission doit trancher. Pour ce qui est de la réflexion quant à déléguer ce genre de tâche de sécurité à un groupe spécial de la police, cela semble être la meilleure solution, tant au niveau du risque de dérapages qu'au niveau de l'acceptation par la population. Concernant l'organisation d'une conférence, le Conseil d'Etat a déjà commencé une démarche dans ce sens. De ce fait, il serait bien que le Parlement soutienne cette démarche.

Etant donné l'importance de cette pétition, et considérant le GSsA comme n'étant pas l'organisme le plus objectif, ni le plus représentatif, certains commissaires proposent d'auditionner un représentant de l'armée afin que l'on soit informé sur le rôle des troupes, leurs directives et leur formation. Face à cette proposition, une partie de la commission est d'accord pour estimer qu'il n'est pas nécessaire d'entendre des représentants du département militaire, et suggère le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat, afin de donner un signe politique clair.

Le président soumet au vote la proposition d'audition :

L'audition du DAM est refusée par : 3 NON (1 AdG, 2 S)

 3 OUI (2 DC, 1 L)

 1 abstention (Ve)

Finalement, la Commission des affaires communales, régionales et internationales accepte le renvoi de la pétition 1241 au Conseil d'Etat par :

4 OUI (1 AdG, 2 S, 1 Ve)

3 NON (2 DC, 1 L)

Nous vous proposons donc, Mesdames et Messieurs les députés, de suivre les mêmes conclusions.

M 1298

EXPOSÉ DES MOTIFS

Les auteurs de la présente motion vous invitent à vous référer, quant aux motifs à l'appui de la présente motion, aux considérants qui l'accompagnent.

Nous espérons, Mesdames et Messieurs les députés, que celle-ci rencontrera un accueil favorable de votre part.

Débat

M. Luc Gilly (AdG). A lire le rapport du Conseil d'Etat, j'aurais facilement pu y souscrire. Mais, en fait, la réalité est autre, Madame Brunschwig Graf.

L'armée est effectivement bien en place à Genève. Elle assure la sécurité des organisations internationales avec un rare bonheur !

Une structure active de dialogue s'est instaurée à l'écoute des Kurdes de Genève. Bravo !

Deux messages ont été adressés à Berne pour annoncer que Genève est disponible pour accueillir une conférence internationale sur la question kurde. Tout cela est très bien.

Je pourrais m'arrêter là et accepter ce rapport. Pourtant, depuis le 4 mars 1999, date de l'arrivée des troupes à Genève pour la surveillance d'environ cinquante sites dits «sensibles», rien n'a changé. Il s'agissait d'abord de se protéger des Kurdes, ensuite de se protéger des Albanais du Kosove et des Serbes. Aujourd'hui, après plus de quatre mois et demi de siège de l'armée à Genève, aucun incident ne s'est produit. Par contre, au lieu de quatre mois de présence de l'armée, comme initialement prévu, c'est maintenant sans limite de temps et sans limite du nombre de soldats que Genève doit envisager l'avenir.

Genève anticipe ainsi les réactions possibles à l'issue de la condamnation à mort de M. Öcalan. Faut-il pour autant donner à Genève cette triste image d'une Genève menacée et militarisée à l'absurde ? Voir le dispositif du consulat de France derrière les Bastions me donne la nausée... Beaucoup de Genevois et de touristes partagent cet avis. Seule la détermination des Kurdes est à l'image de leur désespoir, et c'est manifestement compréhensible.

Le procès d'Öcalan touche à sa fin, et le Conseil d'Etat ainsi que sa police craignent le pire. Une certaine presse ne peut s'empêcher de bien montrer du doigt le danger kurde sans rappeler la réalité évidente. Mais le pire, Mesdames et Messieurs les députés, c'est toujours la situation catastrophique que vit le peuple kurde. Quelle que soit la sentence que le tribunal turc infligera à Öcalan, le problème kurde ne sera pas, et de loin, en phase de trouver une issue pacifiste, malgré les propositions et les engagements des diverses parties de la communauté kurde au niveau international.

Alors, va-t-on supporter la présence de l'armée ad vitam aeternam à Genève, pour se protéger des Kurdes et bientôt des Indiens, Pakistanais et autres peuplades en guerre ? Non ! Non, Madame ! Non, Messieurs ! Le Conseil d'Etat doit demander immédiatement la levée des troupes, d'abord là où elles n'ont jamais eu leur raison d'être, et nettoyer la ville le plus vite possible des barbelés qui défigurent Genève et sa vocation de paix.

Depuis fin avril, date à laquelle le Conseil d'Etat a fait sa dernière demande au Conseil fédéral pour lui proposer d'organiser une conférence sur le problème kurde, que s'est-il passé, Madame la conseillère d'Etat ?

Le Conseil fédéral a-t-il répondu ?

Le Conseil d'Etat a-t-il été actif devant l'urgence de mettre sur pied cette conférence, ou bien va-t-on encore attendre, comme dans les Balkans, que l'incendie soit suffisamment conséquent et que les horreurs d'un nouveau conflit s'abattent contre les populations pour intervenir ?

Comment l'Europe, et la Suisse comprise, peut-elle encore avoir l'image d'une Turquie laïque et moderne, ignorer la répression permanente sur les Kurdes et continuer à livrer des armes à ce régime militariste ?

Je rappelle que de nombreux députés et députées, issus des droits de l'homme, légalement élus, sont encore en prison en Turquie et que, depuis 1984, les morts ne se comptent plus. Des millions de personnes sont toujours déplacées, ou ont été déplacées, et des milliers de villages sont détruits, avec l'appui et le soutien discret des USA et de l'OTAN. Bizarre, si on se réfère à l'actualité récente : deux guerres, deux attitudes différentes, deux politiques contradictoires contre l'oppresseur...

Mesdames et Messieurs les députés, l'Alliance de gauche refuse ce rapport pour deux raisons majeures :

D'abord, il ne comporte aucun signe d'un quelconque éventuel retrait des troupes, même partiel. Cette attitude contribue et continue à banaliser cette mesure d'exception et renforce l'idée que l'agresseur est bien le peuple kurde et non la Turquie.

Ensuite, ignorer dans ce rapport l'urgence - je dis bien «l'urgence» - de tout mettre en oeuvre pour que Genève organise une véritable conférence de niveau international avec l'aide de la Confédération nous laisse perplexes et inquiets...

Vous l'aurez compris, nous ne pouvons accepter ce rapport peu courageux et d'autosatisfaction. Je me vois donc dans l'obligation, Madame la conseillère d'Etat, de vous renvoyer ce rapport. 

Mme Fabienne Bugnon (Ve). Nous demandions, par notre motion, deux choses totalement distinctes : d'une part, le retrait des troupes armées engagées pour assurer la sécurité des organisations internationales et, d'autre part, que le Conseil d'Etat entreprenne un dialogue avec la communauté kurde. Le rapport, comme il se doit, répond très distinctement à ces deux points. Je vais donc les séparer aussi.

Un point nous donne satisfaction, l'autre non. Je vais commencer par la partie qui nous a déplu.

Nous vous avions dit, Mesdames et Messieurs les conseillers d'Etat, que vous preniez un risque très grand de criminaliser le mouvement kurde et que nous ne pouvions pas l'accepter. La lecture de votre rapport révèle une incohérence assez importante pour expliquer la décision du Conseil d'Etat de solliciter l'appui de la Confédération. En effet, en page 2, il est dit : «La décision du Conseil d'Etat de solliciter l'appui de la Confédération, afin de renforcer la sécurité de la Genève internationale, découle ainsi de cette obligation. Elle a été prise en raison des événements qui se sont déroulés en Suisse et à l'étranger dès le mois de février 1999, alors que la communauté kurde se mobilisait à Genève, Berne et Zurich, de même que dans toutes les capitales européennes, suite à l'arrestation du leader kurde Abdullah Öcalan.» Puis, en page 4, il est écrit : «Le gouvernement tenait d'emblée à préciser que cette décision ne constitue en aucun cas une mesure de défiance visant spécifiquement la communauté kurde qui a trouvé dans notre pays et notre canton une terre d'accueil à laquelle elle s'est intégrée.»

Alors, il faudrait savoir, Mesdames et Messieurs les conseillers d'Etat : soit on fait venir l'armée parce qu'on craint les réactions de la communauté kurde, soit on ne la fait pas venir car ce n'est pas la peine. Ce n'est pas clair, et cette partie du rapport ne nous satisfait absolument pas.

Vous faites ensuite une comparaison avec d'autres événements en sept points. Il s'agit, sur chacun de ces points, de protection de personnalités et non pas de prévention. Cela relevait du domaine de la sécurité de personnes invitées sur notre territoire. Ces cas diffèrent donc énormément de ce qui est en train de se passer.

Vous parlez ensuite du renforcement de la crédibilité de la police de sécurité grâce à la présence de ces six cents militaires. Nous pensons plutôt que cela renforce le sentiment d'une ville assiégée à grand renfort de barbelés et de présence militaire visible et fortement armée. Vous nous avez toujours dit que les militaires se montreraient discrets, mais on les voit aux abords de toutes les routes, et très lourdement armés.

Je passe maintenant à la deuxième partie du rapport, qui concerne les initiatives visant à créer un dialogue avec la communauté kurde. A cet égard, je tiens à féliciter le Conseil d'Etat pour la rapidité avec laquelle il a nommé une délégation de hauts fonctionnaires qui se réunissent très régulièrement avec les représentants de la communauté kurde, en ma présence. Ces réunions - nous le devons sans doute à la présidence pleine d'humanité de M. Bonard - sont empreintes d'une grande ouverture d'esprit et d'une grande écoute. La plupart des demandes qui ont été initiées par les Kurdes ont trouvé une réponse, à part celles qui concernaient des demandes de financement ; les représentants du Conseil d'Etat ont accepté d'entrer en matière sur la majeure partie de ces demandes. Pour cela, en mon nom et au nom du groupe des Verts, je tiens à remercier le Conseil d'Etat.

Pour terminer, les Verts réitèrent leur demande et souhaitent, cette fois, être entendus pour que l'armée soit relevée de ses fonctions de sécurité préventive; que le Conseil d'Etat entende ce Grand Conseil; qu'il entende également la population et que, par ailleurs, il poursuive ses efforts dans le cadre des discussions avec la communauté kurde, pour arriver à la comprendre, la respecter et l'intégrer.

Pour revenir sur votre intervention, Monsieur Gilly, je tiens à préciser que le Conseil d'Etat a écrit au Conseil fédéral pour dire que Genève était tout à fait prête à recevoir la conférence. De ce côté-là, les démarches ont bien été effectuées. Le Conseil d'Etat a également accepté que le parlement en exil du Kurdistan puisse tenir ses assises ici à Genève, non pas dans la salle du Grand Conseil, mais dans la salle de Varembé. C'est le parlement en exil du Kurdistan qui n'a pas pu venir pour une raison de date, mais ces assises auront lieu en septembre.

Un effort a bel et bien été fait, il faut le relever. Mais nous demandons vraiment au Conseil d'Etat d'entendre nos autres demandes. 

M. Pierre Froidevaux (R). Mes collègues radicaux et moi-même avons lu avec grand intérêt la réponse du Conseil d'Etat donnée aux motionnaires. L'exercice était délicat mais rendu nécessaire par les défis à relever, imposés par une certaine population qui ne se sentait pas vraiment soumise à toutes nos lois. Ces personnes ont ainsi contraint notre gouvernement, au niveau fédéral et cantonal, à prendre des décisions à caractère ultime. Mais c'était assumer ses responsabilités.

Le groupe radical reconnaît ainsi l'adéquation des mesures prises en répondant aux besoins sécuritaires tant de la Genève internationale que de l'ensemble de nos citoyens. Le discours de la majorité est connu : il associe l'armée aux troubles; il inverse malicieusement la cause et l'effet. Cette contradiction volontaire, ce non-sens sémantique travestit la raison pour nous cacher quelque chose de plus grave encore... En dénonçant les faits, il refuse de voir la raison ! La gauche veut rester aveugle aux problèmes de notre temps. Pourtant, il n'y a pas pire situation pour nos citoyens qu'une politique amblyope.

Effectivement, on pourrait se laisser bercer par le constat qui caractérise tous les pays occidentaux, dans lesquels on remarque une diminution globale et constante de la violence collective depuis des siècles. Cette situation est-elle définitive ? Je voudrais le souhaiter avec vous...

Aujourd'hui, l'Etat moderne est devenu le détenteur monopolistique de la violence physique légitime. Ce monopole d'Etat habitue les citoyens à refouler leurs pulsions; à adopter un comportement rationnel et à contrôler leurs émotions. Il joue en fait le rôle du surmoi individuel à un niveau collectif. Certains historiens contemporains, en particulier certains polémologues, s'inquiètent cependant d'une remontée de la violence collective, telle que révélée aujourd'hui par la délinquance et la criminalité.

Ces statistiques, qui restent orientées à la baisse jusque vers le milieu des années 60, sont continuellement à la hausse dans toute l'Europe. Seule exception : la Suisse, mais jusqu'à la fin des années 80 seulement, moment auquel elles prennent l'ascenseur avec des taux d'accroissement comparables, voire supérieurs à ceux de nos voisins. Comme la Suisse a accumulé les bonnes notes, elle passe encore aujourd'hui pour relativement préservée, malgré une dégradation sensible, surtout dans les grandes villes alémaniques.

Comment expliquer cette évolution inquiétante ? Les Etats se voient reconnus depuis la reconnaissance du droit du monopole de la violence physique légitime. Sur ce principe s'est édifié l'ensemble de nos conceptions politiques. Les lois émises sur des principes démocratiques ont permis à l'ensemble de la population d'y adhérer librement. Aujourd'hui, les lois d'un pays peuvent être remises en cause par une partie de la communauté internationale. La souveraineté d'un Etat n'est ainsi plus garantie.

Les idéologies successives de nature religieuse ou liées à une compréhension particulière des droits de l'homme, comme récemment le communisme ou le national-socialisme, ont été la source d'innombrables conflits. Au nom de ces idéologies, les peuples aux traditions contraires ou à la culture simplement différente se sont affrontés. Aujourd'hui, la grande idéologie qui doit nous unir tous est l'ordre nouveau qui impose son bon droit avec le même mépris des minorités que toutes les idéologies dites révolues. Au nom de cet ordre nouveau, les Kurdes dont il est question dans cette motion auront raison ou bien tort. Pour cela, il suffira de décider à un niveau transnational si eux sont conformes aux droits de l'homme ou si, au contraire, ce sont les Turcs. Mais je crains que la communauté internationale ne prenne soin de leurs problèmes spécifiques respectifs, ce qui entraînera son lot de souffrances. Il sera sans doute plus aisé de choisir la souffrance de l'un et d'occulter médiatiquement la souffrance de l'autre, afin d'être conforme à un bon droit préalablement décidé...

Notre groupe n'a aucun goût pour une idéologie quelconque. Nous ne croyons que dans un parlement démocratique et souverain, et nous soutenons ainsi notre gouvernement qui ne tient pas à ce que notre pays puisse être l'enjeu d'affrontements d'une troupe étrangère à nos lois, telle que représentée par la menace du PKK. 

M. Pierre-Pascal Visseur (R). D'après ce que j'ai compris, la motion et la pétition sont traitées en même temps, Monsieur le président ?

Le président. Deux motions, même, Monsieur Visseur ! Nous traitons la motion 1268, la pétition 1241 et la motion 1298 qui a été ajoutée. Vous avez donc le choix... Madame Sormanni, vous avez la parole.

Mme Myriam Sormanni (S). Le Grand Conseil a demandé en date du 26 mars 1999 que la troupe se retire de Genève. Même s'il apparaît clairement que la police cantonale, dont les heures supplémentaires se comptent par milliers, est dépassée, est-il vraiment judicieux de maintenir un contingent de l'armée, afin de garder des missions diplomatiques et les organisations internationales ? Même s'il y a eu une occupation illégale dans l'enceinte du Palais des Nations, le 15 février 1999, ainsi qu'une occupation des locaux du parti socialiste le 16 février 1999, avec des personnes retenues malgré elles, la suite des événements nous a montré que les occupants ont quitté les lieux de leur plein gré et sans atteinte dommageable aux personnes. Dire que quatre-vingt-cinq gendarmes sont occupés quotidiennement à protéger des missions diplomatiques, ce qui les empêche de conduire certaines enquêtes ou simplement de vaquer à leurs tâches de police de proximité, n'est point ici le propos.

Mardi 9 juin 1999 a eu lieu la manifestation des quatre cents paysans indiens à l'OMC. Environ mille personnes avaient fait le déplacement. Cette manifestation s'est déroulée sans incident. De l'avis d'un policier avec lequel j'ai parlé, la façon dont cette manifestation s'est passée fut «agréable» pour eux. Je crois donc qu'il n'est pas nécessaire de brandir le spectre d'un risque - semble-t-il peu probable - pour maintenir l'armée et des barbelés autour de nos organisations internationales et de nos missions diplomatiques.

L'été approche... Genève doit-elle donner l'image d'une ville apeurée, «bunkerisée», inaccessible et «barbelisée» ? La majorité du Grand Conseil s'est prononcée, Mesdames et Messieurs du Conseil d'Etat, pour le retrait de l'armée en date du 26 mars 1999. Sommes-nous susceptibles d'être écoutés ? Peu nous importe qu'il y ait eu des précédents entre 1954 et 1984, à plusieurs reprises... Le groupe socialiste ne votera pas ce rapport ! 

M. Pierre-Pascal Visseur (R). Je m'exprimerai sur la pétition «Pour le retrait immédiat des troupes de Genève».

La manière avec laquelle cette pétition a été traitée est inacceptable, tout comme l'est la pétition elle-même. Qu'un millier de citoyens allergiques à toute couleur gris/vert s'expriment et expriment leur mécontentement est parfaitement légitime et digne de notre démocratie. Mais c'est précisément pour défendre notre démocratie, exemple mondial en la matière, qu'il faut défendre notre armée dans sa mission ! Car aujourd'hui à Genève, la présence de l'armée permet précisément que toutes les parties en présence puissent cohabiter, voire discuter si elles le souhaitent, en toute sécurité.

Les soldats postés devant la quinzaine d'objectifs sensibles n'ont pas de mission combattante, vous le savez très bien. Leur seule mission est d'observer et d'alerter les postes de police si cela est nécessaire, dans un dispositif dissuasif et non violent, selon l'adage qu'il vaut toujours mieux montrer sa force que devoir l'utiliser, et les barbelés font partie de cette démonstration... S'ils portent une arme, c'est pour se défendre légitimement, si cela devait être nécessaire. Et aucun défenseur de cette pétition, citoyen soldat potentiel, n'accepterait d'ailleurs une telle mission sans défense personnelle.

Dire que ces soldats ne sont pas formés à cette mission est tout simplement une insulte à leur égard et à celui des cadres qui les ont formés et entraînés durant au moins quatre mois, puis plusieurs semaines par année de service.

La protection d'installations fait partie des missions et de l'instruction des soldats d'infanterie. On pourrait même dire que le travail qu'ils exécutent aujourd'hui est largement au-dessous de leurs qualifications, étant également formés aux contrôles d'identité, aux patrouilles et aux interpellations, tâches que nos autorités n'ont pas souhaité leur confier, afin de ne pas heurter l'opinion publique.

La façon dont a été traitée cette pétition est inacceptable, car, après avoir entendu les représentants d'une Suisse sans armée, les commissaires n'ont même pas jugé utile d'entendre les représentants de l'armée... Non seulement la moitié de la commission ne comprend rien en matière de formation militaire mais elle refuse, fort démocratiquement, d'essayer d'y comprendre quelque chose... Finalement - cela a été évoqué lors des différents rapports, notamment le rapport du Conseil d'Etat sur la motion 1268 - tant les pétitionnaires que la commission ne proposent aucune alternative, à part celle de ne rien faire...

La police est déjà lourdement surchargée. Faut-il rappeler qu'actuellement, par manque d'effectif et en raison de missions spéciales, seuls deux gendarmes sont présents la nuit dans les postes, quand ils ne sont pas en patrouille ? Il ne saurait donc être question de leur confier, en plus, ces missions d'observation et d'alerte qui sont celles dévolues aux soldats.

C'est pour toutes ces bonnes raisons que nous vous suggérons de classer cette pétition.  

M. Alberto Velasco (S), rapporteur. Monsieur Visseur, la pétition a été traitée démocratiquement et a fait l'objet d'un vote démocratique... (L'orateur est interpellé.) Eh bien oui, il y a une majorité et une minorité ! Si ça ne vous plaît pas, il y a l'ordre nouveau, comme l'a proposé M. Froidevaux tout à l'heure... Peut-être qu'avec ce foutu «ordre nouveau», les choses seront différentes... Cette notion a d'ailleurs été utilisée par des démocrates plutôt louches...

Cela dit, Monsieur Visseur, il y a une alternative : c'est que l'armée quitte Genève et que la police reprenne sa place !

Je tiens ici à revenir sur deux faits que les pétitionnaires nous ont fait remarquer : d'abord, la banalisation de la présence de l'armée à Genève, ce qui est grave, et, ensuite, le fait que cette armée, qui utilisait les services de l'Ecole de Beauséjour, avait les armes chargées. Je ne sais pas ce qu'il en est de ce deuxième fait, mais il faudrait tout de même le savoir. D'après les pétitionnaires, il semblerait que c'est vrai... (Remarques.)

Une voix. C'est faux ! 

M. Luc Gilly (AdG). J'aimerais simplement apporter deux brèves réponses, à deux capitaines, je crois...

Monsieur le docteur Froidevaux, j'avais posé une question dont je n'ai pas trouvé la réponse dans le rapport du Conseil d'Etat. Je demandais si l'armée allait s'installer définitivement à Genève. Le problème kurde sera certainement suivi par d'autres, alors on peut imaginer que la Confédération installera définitivement l'armée à Genève. Je pense que vous êtes en train de jouer sur les mots et que vous nous faites une démonstration intellectuelle. Je me demande où vous avez été piquer cette théorie d'ordre nouveau, peut-être sur Internet, hier soir... En tout cas, ça ne vaut pas tripette ! Monsieur Froidevaux, le problème est de savoir ce que le Conseil d'Etat va décider par rapport au retrait progressif de l'armée avant qu'elle n'envahisse davantage Genève, car, comme tout le monde le sait, les effectifs peuvent être augmentés et la durée prolongée.

Monsieur Visseur, l'alternative est très claire, dans notre initiative «Genève, République de paix», dans la motion et aussi dans la pétition. Le Conseil d'Etat a commencé à y répondre, puisque des réunions ont lieu entre le représentant du Conseil d'Etat, la communauté kurde et vous, Madame Bugnon. C'est une démarche tout à fait intéressante. Mais la démarche essentielle est la mise sur pied d'une conférence internationale sur la question kurde, à Genève ou ailleurs - bien que Genève me semble l'endroit le plus approprié - dont le but est d'éviter qu'un nouveau drame ne surgisse au Kurdistan. Laisser aller les choses - vous le savez très bien, Monsieur Visseur et Monsieur Froidevaux - c'est courir le risque que des événements semblables à ceux qui se sont déroulés entre Serbes et Kosovars ne se répètent, même si les implications politiques sont différentes. Cela fait quinze ans qu'une guerre ravage une partie de ce pays et la répression est installée depuis très longtemps. Le but et l'alternative, pour nous, c'est d'éviter ce massacre et le mécontentement, évidemment, qui s'est exprimé à Genève.

Je le répète, l'alternative existe bel et bien, Monsieur Visseur... Il faut relire les papiers que vous avez sous les yeux ! 

M. Alberto Velasco (S), rapporteur. Monsieur Visseur, vous venez de confirmer que les armes des militaires sont bien chargées. Si c'est vrai, il faut en conclure que les pétitionnaires avaient raison : il y a bien un danger qu'un accident se produise...

Alors, Madame la présidente, peut-être avez-vous des informations plus pertinentes ?  

M. Pierre-Pascal Visseur (R). Monsieur Velasco, je vous ai confirmé que les armes étaient chargées, mais, si vous m'aviez correctement écouté, vous auriez entendu que ces armes ne devaient servir qu'en cas de légitime défense. Imaginez que votre fils ou vous-même, en tant que soldat, vous vous trouviez avec une arme non chargée et que vous ne puissiez même pas vous défendre en cas d'agression... C'est parfaitement absurde ! Ces armes sont chargées, bien évidemment, et c'est tout à fait normal ! Les soldats qui utilisent ces fusils sont formés pour se défendre. 

Mme Martine Brunschwig Graf, présidente du Conseil d'Etat. Je suis toujours intéressée lorsque les députés interpellent le Conseil d'Etat, particulièrement sa présidente, pour obtenir des informations... Toutefois, vous auriez pu obtenir certaines des informations que vous réclamez ce soir, vous les membres de la commission des pétitions, si une majorité d'entre vous n'avait pas manifestement refusé d'auditionner, à l'exception du Groupement pour une Suisse sans armée, la représentante du département des affaires militaires !

Tout d'abord, il n'est pas d'usage, quelles que soient les opinions des uns et des autres, de refuser d'auditionner les personnes qui demandent à l'être, encore moins s'il s'agit d'un conseiller d'Etat.

Cela étant dit, je vais essayer de répondre à un certain nombre de vos préoccupations. Je vous rappelle un fait qui figure dans le rapport, car il est déterminant pour comprendre la situation d'aujourd'hui. Nous ne sommes ni maîtres ni décideurs des objets qui doivent être surveillés, que ce soient des organisations internationales ou des missions diplomatiques. La décision, en l'occurrence, est de la seule compétence du Ministère public fédéral, sur la base des informations dont il dispose, décision qui est transmise aux cantons qui doivent en assurer la protection, selon des instructions bien précises. Ensuite, le canton est tenu de mettre en oeuvre ou de demander les moyens nécessaires pour remplir cette mission.

Vous connaissez les moyens du canton de Genève : nous avons une police performante, mais elle compte - cela figure dans le rapport - un grand nombre d'heures supplémentaires non reprises jusqu'à aujourd'hui - trois cent onze mille heures à la date du rapport. La police a été mise à très forte contribution et certains policiers ont dû accepter de supprimer leurs congés à plusieurs reprises. A juste titre, la police a montré des signes de fatigue et il n'était pas sain de l'ignorer, dans la mesure où vous désirez que ses missions - qu'elle remplit d'ailleurs à la satisfaction des citoyens lorsqu'on lui en donne les moyens - soient effectuées au quotidien.

Le Conseil d'Etat a donc estimé que l'instrument qu'est la police n'était pas suffisant pour pouvoir assurer la mission que nous a confiée le Ministère public fédéral. C'est la raison pour laquelle - j'ai déjà eu l'occasion de vous le dire - nous avons dû prendre des dispositions et faire appel aux troupes en cours de répétition. Le Conseil d'Etat l'a dit et le répète encore aujourd'hui : la solution telle qu'elle avait été envisagée parce qu'elle était urgente, nécessaire, et qu'il n'y en avait pas d'autre, n'est pas souhaitable dans la durée. C'est l'avis de la Confédération comme du canton.

Le Conseil d'Etat a donc d'ores et déjà fait une proposition en commission des finances d'augmenter durablement les effectifs de la police. Il a déjà procédé à l'engagement de gardes de sécurité diplomatiques, trente postes étant financés par la Confédération. Ce nombre devra augmenter progressivement et nous avons du reste discuté de cette question il y a à peine deux jours avec le secrétaire d'Etat, M. Kellenberger.

C'est vous dire, Mesdames et Messieurs les députés, que le Conseil d'Etat est parfaitement conscient que le provisoire ne doit pas durer mais que, pour pouvoir assumer la mission dans l'instant, certaines solutions sont nécessaires, même si personne n'avait voulu les imaginer. Des efforts ont été fournis, même s'ils ne sont pas tous visibles, pour alléger le dispositif et nous continuons à prendre des mesures dans ce sens, autant que faire se peut à chaque fois que cela est possible.

J'ajoute enfin que pour compléter les mesures déjà prises un dialogue s'est instauré avec la communauté internationale, afin que les mesures de sécurité soient réparties et prises en charge par ces organisations - mesures qui mériteront d'être renforcées dans le temps. Ce n'est donc pas de bon coeur qu'il a fallu se décider à faire appel à la troupe; ce n'était pas facile. Mais vous conviendrez qu'on ne peut pas à la fois se voir confier une mission sans pouvoir la remplir et renoncer aux seules solutions possibles, même si ces solutions peuvent paraître déplaisantes à beaucoup d'entre vous et à la population.

Par ailleurs, comme cela a été dit dans le rapport, et quoique peut-être interprété autrement, il ne s'agit pas de se braquer ni contre la communauté kurde ni contre les communautés que nous accueillons.

Je précise encore, Mesdames et Messieurs les députés, que si l'on veut assurer la sécurité dans la durée, les élus doivent aussi montrer l'exemple par rapport au respect de l'Etat de droit. Je profite de l'occasion pour lancer un appel aux députés que vous êtes : n'encouragez pas les citoyens à ne pas respecter le droit, en vous permettant, vous les élus, de le violer, même si vous avez des raisons que vous estimez légitimes pour défendre une cause ! Cela n'est pas acceptable par rapport au serment que vous avez prêté dans cette enceinte.

S'agissant du problème des armes qui seraient chargées, comme je vous l'ai déjà dit, elles sont chargées, certes, mais le cran de sécurité est engagé. C'est le moyen qui est utilisé pour effectuer la garde à la sortie des casernes. Il n'y a rien de changé par rapport à la formation qui est donnée. Je me suis du reste rendue sur le terrain pour constater quelle formation était prodiguée et quelle était la maîtrise des soldats chargés de la protection de ces missions. Je peux vous confirmer que la formation est bonne et la maîtrise des soldats aussi. Et en outre, si un soldat se sent incommodé, mal à l'aise ou opposé à cette mission spécifique, il en est dispensé : j'ai pu le constater moi-même !

Nous souhaitons vivement trouver une solution durable le plus rapidement possible, d'autant plus que la disponibilité des troupes n'est pas éternelle, une bonne partie des cours de répétition étant terminée. Il n'y aura donc pas, Monsieur Gilly, de plus en plus de soldats... Certainement pas ! Nous avons déjà de la peine à obtenir ceux qui sont là... Il n'est donc pas question de renforcer le dispositif. Nous voulons, au contraire - nous le souhaitons tous de tout coeur - l'alléger, puis le supprimer pour revenir à une situation normale.

Pour conclure, nous devons tout de même rester modestes en ce qui concerne la conférence internationale. La Suisse, pas plus qu'un autre pays et encore moins le canton de Genève, ne peut prétendre être celui qui convoque une conférence internationale. Notre canton doit répéter en tout temps qu'il est disponible, et il l'a fait immédiatement. Il peut aussi intervenir dans le cadre des dialogues bilatéraux avec le Conseil fédéral, pour que ce dernier prenne ses responsabilités. Mais je dois tout de même vous dire - et vous en conviendrez avec moi - que la communauté internationale s'est fortement mobilisée ces derniers temps sur les problèmes liés au Kosovo, qui nous préoccupaient en l'occurrence tous. Il me semble qu'il aurait été très prétentieux de notre part de vouloir mobiliser les forces internationales, quand bien même nous aurions été en mesure de le faire - mais nous ne l'étions pas - pour jouer le rôle de «grand organisateur» d'une conférence internationale.

Mesdames et Messieurs les députés, nous allons poursuivre le dialogue avec les Kurdes; nous allons continuer à prendre des mesures de sécurité durables, les normaliser en évitant de faire appel à l'armée dans le futur. Mais comprenez bien que le canton de Genève, pas plus qu'un autre canton, ne peut se permettre de se soustraire aux missions qui lui sont confiées, ni de surmener sa police au point qu'elle ne puisse plus remplir ses tâches sereinement. 

M. Alberto Velasco (S), rapporteur. J'en conviens, Madame la présidente, il serait tout à fait judicieux que toutes les personnes qui le désirent soient auditionnées en commission. Mais on m'a parfois refusé une audition pour des raisons économiques... C'est un des arguments qui a été avancé, en l'occurrence... (Remarques et rires. Le président agite la cloche.)

Le président. Nous allons passer au vote, Mesdames et Messieurs les députés... Monsieur Brunier, vous avez la parole ! (Brouhaha.) Pardon, Monsieur Brunier, M. le rapporteur n'avait pas terminé. Vous avez la parole, Monsieur le rapporteur !

M. Alberto Velasco (S), rapporteur. Par ailleurs, Madame la présidente, je vous fais remarquer qu'une sortie de caserne n'est pas comparable à la sortie d'un bâtiment public. Mais, puisque les événements du Kosove semblent s'apaiser, je vous suggère, Mesdames et Messieurs, de renvoyer la motion 1268-A et la pétition 1241-A au Conseil d'Etat et d'accepter la motion 1298.

M. Christian Brunier (S). Nous avons entendu un long et beau discours de la présidente du gouvernement, qui nous a dit, en substance, que la présence militaire ne devrait, à son sens, pas durer - nous sommes d'accord sur ce point - mais que l'armée partirait seulement quand les effectifs de la police seront suffisants... (Contestation.) C'est ce que vous avez dit tout à l'heure ! (Exclamations et remarques. Le président agite la cloche.) Nous attendions davantage, entre autres un planning très précis de l'évacuation de l'armée de Genève. La présence de l'armée devient intolérable... (Huées et exclamations. Le président agite la cloche.)

Cette présence n'est du reste pas adéquate dans bien des lieux. Par exemple, le beau Palais Wilson est gardé comme une caserne de CRS... C'est très décevant pour la Maison des droits de l'homme. Si vous pensez que les moyens de la police ne sont pas suffisants, peut-être faudrait-il mieux organiser l'emploi du temps de la police. Ceux qui fréquentent les manifestations peuvent dire que les moyens policiers utilisés sont toujours disproportionnés. Lorsque nous étions côte à côte avec les Kurdes qui étaient pacifiquement assis sur la place des Nations, un cordon de police est resté vingt-quatre heures sur vingt-quatre pour rien, puisqu'il ne se passait rien... Alors, quand les heures de la police seront mieux gérées, il ne sera peut-être plus nécessaire de recourir à l'armée pour assurer la sécurité ! (Exclamations.) 

Le président. Nous allons donc procéder aux trois votes. Le premier concerne le rapport sur la motion 1268 que M. Gilly a proposé de renvoyer au Conseil d'Etat.

M 1268-A

Mise aux voix, la proposition de renvoyer ce rapport au Conseil d'Etat est adoptée.

M 1298

Mise aux voix, cette motion est adoptée.

Elle est ainsi conçue :

Motion(1298)

Les barbelés militaires: ça suffit!

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant:

les dispositifs dits de sécurité mis sur la voie publique par l'armée devant certaines missions diplomatiques, notamment les consulats d'Italie et de France, dans certains parcs ou barrant des voies publiques comme le chemin de l'Impératrice ne se justifient plus du tout depuis l'accord de paix sur le Kosovo, si tant est qu'ils servaient à autre chose que de permettre à l'armée de marquer ostensiblement sa présence à Genève ;

ces dispositifs d'utilité très contestable sont non seulement mal perçus par de très nombreux citoyennes et citoyens, mais encore donnent une triste image de notre cité, avec l'impression d'une ville assiégée, au lieu de celle de ville de paix qu'elle incarne ;

invite le Conseil d'Etat

à intervenir auprès du Conseil fédéral pour que les dispositifs mis en place par l'armée en des lieux publics soient enlevés et que la troupe soit retirée de Genève.

P 1241-A

Mises aux voix, les conclusions de la commission des affaires communales, régionales et internationales (renvoi de la pétition au Conseil d'Etat) sont adoptées. 

Le président. Nous arrêtons nos travaux, qui reprendront à 20 h 30, avec les comptes 1998.

Je vous invite à participer à la verrée qui a lieu immédiatement dans la cour en l'honneur de Mme Hutter.

La séance est levée à 18 h 45.