République et canton de Genève

Grand Conseil

M 989-A
6. Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la motion de Mmes et MM. Mireille Gossauer-Zurcher, Gabrielle Maulini-Dreyfus, Geneviève Mottet-Durand, Thomas Büchi, Hervé Burdet, Jacques Boesch, Jean-Luc Ducret, Pierre Kunz, Pierre-François Unger et John Dupraz pour une actualisation de la politique d'approvisionnement en gravier dans le canton de Genève. ( -) M989
Mémorial 1995 : Développée, 1790. Adoptée, 1816.

A titre préliminaire, le Conseil d'Etat relève que la motion concerne non seulement la politique d'approvisionnement en gravier du canton, mais soulève aussi les problèmes liés aux gravières, aux décharges contrôlées et sauvages, ainsi qu'aux entreprises exerçant des activités en matière de traitement des déchets non conformes aux normes environnementales.

I. Le Conseil d'Etat tient tout d'abord à rappeler que le plan directeur des gravières, approuvé le 7 juin 1982, fut élaboré de la façon suivante:

Un plan général du canton a défini les secteurs géologiques recelant des sables ou des graviers sur la base des connaissances scientifiques de l'époque. Sur ce premier document ont été superposés les plans des contraintes relatives à la protection des eaux superficielles, des eaux souterraines, de la zone agricole, de la zone viticole, de la zone des bois et forêts, des futurs secteurs d'habitations et d'urbanisation.

En 1984, le département de l'intérieur, de l'environnement et des affaires régionales (ci-après : le département), compétent en la matière, a précisé l'ensemble de ces données dans un document intitulé : «Les ressources en gravier du canton de Genève», où l'on peut relever notamment les chiffres suivants:

- réserves totales: 4,86 milliards de m3 de gravier,

- réserves exploitables: 0,5% des réserves totales = 20 millions de m3.

Sont considérés comme gisements exploitables de sable et gravier ceux qui répondent aux contraintes suivantes:

a) Gisements situés à une distance suffisante des zones d'habitation.

b) Gisements qui ne sont pas le siège de nappes d'eau souterraine du domaine public, utilisée pour la distribution d'eau potable.

c) Gisements qui ne sont pas situés dans les falaises, ni en bordure de cours d'eau (pour éviter les éboulements et glissements de terrain).

d) Gisements qui ne sont pas situés en zone forestière où le paysage doit être protégé.

Ces contraintes réduisent énormément les réserves existantes, et pourraient les rendre nulles.

e) Gisement de sable et gravier recouverts de masses importantes de limon ou d'argile non utilisables dans le bâtiment. Economiquement, les frais de décapage peuvent rendre l'opération non rentable.

Les prévisions faites en 1984 se sont avérées assez précises puisque, actuellement, les réserves du plan directeur sont estimées à 12 millions de m3.

La réactivation du plan directeur des gravières est une des tâches que le département entend mener à bien. Cependant, celle-ci implique une amélioration des données géologiques qui nécessitera de nouvelles prospections à l'aide des méthodes géophysiques modernes afin d'obtenir des valeurs plus précises. On constate qu'en règle générale, les propriétaires et exploitants de gravières qui le souhaitent s'adressent aux bureaux spécialisés genevois en géophysique. Ceux-ci utilisent le plus souvent les méthodes géoélectriques, mais la sismique de réflexion à haute définition se développe également. Dans ces deux cas, il est cependant toujours nécessaire de procéder à des forages mécaniques, pour définir les paramètres permettant de rendre les méthodes géophysiques plus précises.

Selon les premières estimations du service de géologie, le montant du crédit de recherche, qui fera l'objet d'une demande ad hoc en temps opportun, devrait s'élever à 750 000 F, somme qui peut se décomposer comme suit:

Prospections complémentaires

Mensurations vibro-sismiques

10 km à 15 000 F/km

155 000

Mensurations géoélectriques

15 j. à 2 790 F/j

41 850

Forages de calageet contrôles granulométriques

15 forages 0-20,0 mà 400 F/m

120 000

10 forages 0-40,0 mà 500 F/m

200 000

Granulométries 40 u.à 450 F

18 000

Corrélations avec les mensurations de 1983

Géophysicien qualifié

120 h à 165 F/h

19 800

Géologue spécialiste des formations genevoises: établissement du plan des ressources

160 h à 165 F/h

26 400

Indemnités aux propriétaires touchés par les mensurations

25 emplacements de forage à 1 000 F

25 000

Remise en état après passage des équipes géophysiques

30 000

Base de travail (Cadastre et OFT)

1 600

Frais de reprographie

3 000

Après report des plans de contraintes sur le plan des réserves : préparation de l'enquête préliminaire et du cahier des charges pour les sites retenus. Bureaux spécialisés

100 000

Frais divers et imprévus

10 000

Total

750 650 F

Le département engagera une procédure de mise en soumission publique de ces travaux de manière à pouvoir comparer les diverses offres et, dès que des chiffres précis seront connus, demandera au Grand Conseil les crédits nécessaires à la réactualisation du plan directeur des gravières. Sur le plan juridique, la législation cantonale sera modifiée afin de donner à ce plan une base légale formelle, qui facilitera une gestion coordonnée limitant le plus efficacement possible les inconvénients des exploitations.

Le nouveau plan devrait être achevé d'ici un an et demi. Dans cet intervalle, le département refusera en principe toute nouvelle demande d'ouverture ou d'agrandissement de gravières, étant précisé qu'actuellement les gravières en exploitation ou autorisées couvrent largement les besoins immédiats en matière de construction à Genève. Il va de soi que des aménagements locaux en vue de la création de sites protégés ne sont pas à considérer comme des exploitations de gravier.

Bien entendu, il sera toujours loisible aux requérants d'interjeter des recours à l'encontre des décisions du département, comme c'est actuellement le cas pour une autorisation concernant la commune de Chancy, que ce dernier avait refusé de délivrer.

II. En ce qui concerne la deuxième invite de la motion qui demande d'intégrer dans l'étude l'appréciation des atteintes au paysage et de sa protection, deux aspects doivent être considérés: le premier relatif à la phase d'extraction, le second concernant la phase de remblayage.

On constate, dans la première phase, que l'impact paysager porte, d'une part, sur l'exploitation de surfaces trop grandes et, d'autre part, sur un stockage important de matériaux excavés sur le site. Pour remédier à ces atteintes paysagères, il conviendrait d'extraire le gravier par compartiments relativement modestes, au fur et à mesure de la demande d'approvisionnement en gravier du moment.

Cette manière de faire présente l'avantage de limiter dans le temps l'impact paysager et d'éviter l'installation de nouveaux biotopes, condamnés ensuite, en principe, à disparaître. Les exploitants devraient également implanter des haies sur le site, ce qui a pour effet de permettre de diminuer l'atteinte au paysage et de développer la nidification de nombreuses espèces d'oiseaux. Cet aspect est en principe traité dans un chapitre spécial de l'étude d'impact sur l'environnement, imposée par la législation fédérale pour un volume d'extraction supérieur à 300 000 m3.

La seconde phase, soit le remblayage, devrait permettre de retrouver l'état initial du site puisque, en fin d'exploitation, les surfaces utilisées pour les gravières doivent être rendues à l'agriculture. Ce principe est énoncé à l'article 33 du règlement sur les gravières et les exploitations assimilées, du 7 septembre 1977. Le Conseil d'Etat a modifié le 28 février 1996 ce règlement pour autoriser dorénavant une remise en état différente, pour autant qu'une étude paysagère et naturaliste le permette.

C'est ainsi que, dans les anciennes gravières des Teppes du Véré et du Biolay, sont prévues une remise en état des lieux et la création de sites naturels protégés et d'espaces de détente, voire pour la pêche.

Le Conseil d'Etat note cependant que certaines gravières n'ont pas été remblayées et rendues à l'agriculture dans les délais impartis, ce qui provoque à l'évidence une atteinte au paysage. Les raisons de ces retards sont parfois dues à un certain laxisme des exploitants mais, le plus souvent, c'est la conjoncture économique qui en est responsable et ralentit l'extraction de gravier, puis le remblayage. C'est pourquoi le département imposera plus souvent que par le passé la plantation d'une arborisation appropriée en vue d'améliorer l'esthétique des sites.

Il faut aussi relever que le remblayage immédiat n'est pas toujours souhaitable, car le canton a besoin de réserves destinées au stockage de matériaux inertes selon l'ordonnance fédérale sur le traitement des déchets du 10 décembre 1990 (ci-après OTD).

III. S'agissant de la demande des motionnaires visant à éviter que de nouvelles exploitations soient ouvertes à proximité d'habitations, le Conseil d'Etat admet que, jusqu'à l'entrée en vigueur de l'ordonnance fédérale relative à l'étude de l'impact sur l'environnement, du 19 octobre 1988, (ci-après: OEIE), l'impact d'une gravière sur l'habitat n'était pas une préoccupation première.

Force est donc de constater que, dans certaines circonstances, des constructions ont été autorisées en bordure d'exploitations, ou de lieux réservés à celles-ci, notamment en raison de la moins-value apportée de la sorte au prix du terrain.

Depuis l'entrée en vigueur de l'OEIE, en 1989, tous les impacts sur l'environnement sont pris en compte, en particulier ceux qui sont liés à l'aménagement du territoire. Le Conseil d'Etat veillera donc scrupuleusement à ce que de nouvelles constructions ne soient pas édifiées dans des secteurs déjà compris dans le plan directeur des gravières.

IV. La quatrième invite demande que le Conseil d'Etat veille au respect des lois et des règlements applicables en la matière.

A cet égard, il faut relever que, dans la phase d'extraction du matériau, les exploitants sont d'ores et déjà tenus de traiter sur place ou en zone industrielle autorisée le gravier extrait pour en faire un matériau fini, comme le sable, les graviers, etc. Ces produits finis doivent alors être acheminés par camion sur les chantiers.

Les principales nuisances causées dans cette phase sont, d'une part, visuelles pour le stockage des terres arables et des matériaux finis et, d'autre part, générées par le trafic routier, lequel provoque une pollution atmosphérique et sonore ainsi que la salissure des routes. La surveillance plus soutenue exercée par les autorités dans cette phase montre qu'on peut obtenir une meilleure application de la réglementation concernée.

En revanche, dans la phase de remise en état des gravières, il a été constaté que les trois décharges contrôlées du canton étaient toutes hors normes et devaient faire l'objet d'un assainissement et que quelques gravières stockaient des matériaux non autorisés.

Il en résulte que, si le remblayage des gravières est dans l'ensemble satisfaisant, le remblayage par des déchets de chantier inertes dans les décharges est, en revanche, plus complexe dès lors qu'il implique non seulement les exploitants de ces décharges, mais également les fournisseurs de ces résidus, qui sont eux-mêmes parfois exposés à des difficultés particulières telles que dépôts par des tiers de déchets de toutes sortes, parfois même toxiques, dans des bennes de chantiers.

Avant d'intervenir de manière sévère, le département a entrepris de nombreuses actions d'information aux fins de responsabiliser les exploitants et tous les protagonistes utilisant des déchets de chantier.

C'est ainsi que, depuis l'année 1995, des publications relatives à la gestion des déchets paraissent régulièrement dans la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève, des réunions ont lieu entre le département et des représentants du Groupement des entreprises genevoises d'extraction de gravier (GEG), des visites de l'ensemble des gravières et des décharges du canton ont été effectuées, suivies d'une rencontre avec les communes de la Champagne. Enfin, un séminaire d'information a été organisé le 13 mars 1996 pour exposer les nouvelles prescriptions du département pour la mise en décharge des déchets de chantier, résumées comme suit :

a) un premier tri si possible efficace selon la disposition du site devra être fait sur le chantier;

b) les matériaux destinés à être mis en décharge devront être acheminés sur des véhicules munis de filets pour éviter la salissure des routes. A cet effet, les véhicules dont les roues sont boueuses devront être lavés soit par jets d'eau, soit par un laveur de roues approprié, en quittant le chantier ou la décharge;

c) sur le site des décharges, les exploitants devront trier les déchets de sorte que seuls les matériaux inertes soient stockés, les autres résidus devant être acheminés chez des récupérateurs pour valorisation ou à l'Usine des Cheneviers pour traitement;

d) les décharges feront désormais l'objet d'inspections régulières de la part du département et, en cas de non-respect de la législation applicable, celui-ci prononcera des amendes ou d'autres mesures justifiées par les circonstances.

Il est bien évident que l'ouverture prochaine du centre cantonal de tri des déchets de chantier dans la zone industrielle de la Praille-Acacias permettra non seulement de traiter ces résidus d'une manière totalement conforme à l'OTD, mais permettra également d'éviter de longs transports puisque l'installation sera située en zone urbaine, et non pas, comme cela avait été convenu en 1991, dans la région du Bois-de-Bay, à Satigny. Il faut aussi signaler qu'à proximité de ce centre, le département a demandé la création d'un deuxième espace de récupération de déchets, en plus de celui situé au Nant-de-Châtillon; il permettra de desservir cette fois notamment le centre-ville et Carouge. C'est l'un des moyens d'éviter que les bennes de chantiers soient de véritables décharges sauvages avec tous les inconvénients que cela entraîne.

V. Enfin, s'agissant plus précisément de la politique de transport, il faut relever que les transports par camion resteront nécessaires pour l'alimentation des chantiers. En revanche, le transport ferroviaire devra être développé pour l'horizon 2010. En effet, lorsque les réserves exploitables toucheront à leur fin, il faudra importer des sables ou des graviers hors du territoire cantonal. Les deux quais minéraliers actuels deviendront alors insuffisants et de nouvelles installations en zones industrielles desservies par chemin de fer devront être réservées.

Le Conseil d'Etat a la ferme volonté de conduire une politique d'information et de responsabilisation des milieux concernés, qui touche finalement toute la population. Les mesures de police resteront l'ultime démarche, à laquelle, nous l'espérons, il ne faudra recourir qu'exceptionnellement.

Tels sont donc l'ensemble des moyens dont le canton entend se doter afin d'inscrire sa politique en matière de gravières, de décharges et d'exploitations assimilées, dans le cadre de son concept environnemental respectueux de la nature et de la qualité de la vie dans notre canton.

Débat

Mme Mireille Gossauer-Zurcher (S). Je tiens à remercier M. Haegi pour l'évolution positive de la politique du département en matière de décharges contrôlées de gravières.

En effet, il y a un peu plus d'une année, lors du débat à propos de cette motion, vous accusiez davantage nos concitoyens d'indiscipline que les exploitants de ces entreprises de remplir d'objets divers les containers des chantiers. Or, vous avez pu constater de vos propres yeux que trois décharges contrôlées du canton étaient hors normes et devaient faire l'objet d'un assainissement et que quelques gravières stockaient des matériaux non autorisés.

Ce rapport comporte une erreur que je tiens à relever; s'agissant de Chancy, le recours actuellement pendant devant le Tribunal administratif a été interjeté contre une décision du département qui avait autorisé l'ouverture d'une gravière durant l'été 1995. Si la politique du département avait été aussi claire que celle développée dans le présent rapport, il y a six mois, six recourants pourraient utiliser leur énergie dans des activités plus amusantes !

Enfin, s'agissant de la troisième invite de la motion, visant à éviter que de nouvelles exploitations soient ouvertes à proximité d'habitations, je peux lire : «Le Conseil d'Etat veillera scrupuleusement à ce que de nouvelles constructions ne soient édifiées dans des secteurs déjà compris dans le plan directeur des gravières.» Or cela ne répond pas à l'invite qui demande exactement l'inverse.

Sachant que des gisements importants se trouvent en bordure d'habitations, en autorisez-vous quand même l'exploitation ? Je vous remercie d'ores et déjà de votre réponse.

M. Max Schneider (Ve). Très brièvement. S'agissant des approvisionnements en gravier de Genève, n'y aurait-il également pas une politique à mettre en place - M. le chef du département me répondra peut-être tout à l'heure - par le recyclage des matériaux de «déconstruction» ? Il me semble qu'il y a là un énorme potentiel, puisque plusieurs entreprises genevoises ont actuellement des stocks relativement importants de gravier concassé, provenant de démolition d'immeubles; cette activité est génératrice d'emplois et encouragerait l'industrie genevoise. N'y aurait-il pas des pistes à imaginer et à suivre ? En effet, ce rapport ne parle pratiquement pas de cette possibilité.

Pour éviter de continuer à creuser le Salève et d'exploiter à outrance les gravières genevoises, il faudra bien mener une politique de recyclage du gravier et encourager les Services industriels à l'utiliser partout où cela est possible au lieu de concasser du verre. Ces pistes doivent donc être examinées et étudiées dans l'avenir.

M. Pierre Kunz (R). Les radicaux remercient le Conseil d'Etat de son rapport relatif à la motion 989, et c'est avec satisfaction qu'ils prennent acte de la volonté du gouvernement de réactualiser, avant fin 1997, le plan directeur des gravières. Les radicaux sont également très heureux de savoir que tout prochainement, soit au début de 1997, le centre cantonal de tri de déchets de chantiers sera opérationnel. Il nous apparaît en effet que le comblement des gravières se déroulera, dès lors, dans de bien meilleures conditions qu'aujourd'hui, et le trafic de camions, lié à ce comblement, s'en trouvera ainsi nettement amélioré.

Pourtant, s'agissant du trafic général lié à cette exploitation des gravières et des nuisances sonores qui en résultent pour les habitants de la Champagne, nous regrettons que le Conseil d'Etat n'ait pas été un peu plus précis dans son rapport. En effet, en août 1995, au nom des centaines d'habitants de la Champagne directement concernés, j'avais expressément demandé à notre exécutif qu'il se penche sur cette question, car il faut savoir que six cent trente à huit cent cinquante camions empruntent chaque jour la route de Laconnex, avec des pointes de cent vingt poids lourds par heure.

Ces mouvements génèrent bien évidemment des nuisances considérables pour les bordiers de la route, que ce soit à Bernex, à Sézenove ou à Laconnex. Or, Mesdames et Messieurs les députés, les trois quarts de ce trafic pourraient s'effectuer sur la route de Chancy plus large, plus sûre et qui n'est bordée d'aucune habitation; cela à un coût additionnel quasiment nul pour les transporteurs routiers.

Je demande donc au Conseil d'Etat s'il a les moyens et s'il a l'intention de se saisir de ce problème qui restera tout de même important même après la mise en exploitation du centre de tri de la Praille. Merci d'avance de votre réponse.

M. John Dupraz (R). En 1977, M. Roch, actuellement directeur de l'Office fédéral de l'environnement et des forêts, et moi-même avions déposé une motion pour demander que l'on mette de l'ordre dans l'exploitation des gravières. Depuis, une réglementation a été mise en place, qui a justement permis de mettre de l'ordre dans cette exploitation, le principe suivant ayant été notamment établi : il ne serait délivré d'autorisation d'ouvrir de nouvelles gravières que pour autant qu'une surface équivalente ait été comblée. Or, ces derniers mois, j'ai pu constater que le Conseil d'Etat avait autorisé plusieurs gravières sur le territoire de la commune du président du Grand Conseil et de la commune d'Avusy. Je n'ai pas l'impression que le principe d'égalité, s'agissant des «surfaces des trous», si je puis m'exprimer ainsi, ait été respecté.

J'aimerais donc bien que le Conseil d'Etat nous donne quelques renseignements sur la politique qui est la sienne dans la manière de délivrer les autorisations d'ouverture de nouvelles gravières. Je le répète, à mon sens, une nouvelle gravière ne doit s'ouvrir que pour autant qu'une surface équivalente ait été restituée à la culture agricole.

Je voudrais également soulever le problème des réserves potentielles de matériaux de construction dans ce canton. A mon avis, le Conseil d'Etat est pessimiste. Il existe des gisements importants, notamment dans la zone industrielle de la ZIMEYSA, et, à l'époque, si le Conseil d'Etat avait donné les autorisations d'exploiter ces zones le gravier serait extrait à l'heure qu'il est. Les grands chantiers ouverts pour l'aéroport, la gare CFF, Cointrin, Palexpo, l'autoroute, auraient pu utiliser ces matériaux. Maintenant, je ne sais pas ce qu'il va advenir de ces réserves.

Une réserve importante est en main de l'Etat, dans la presqu'île de Loëx - «vache sacrée» du canton - et j'avais déposé une motion, en son temps, qui n'avait pas été acceptée par ce parlement. Un jour où l'autre, cette réserve devra être exploitée, vu l'évolution du phénomène d'approvisionnement de notre canton, pour l'industrie de la construction en matériaux de construction. Nous ne devons pas repousser les problèmes et faire chez les autres ce que nous ne voudrions pas chez nous. Nous devons exploiter de façon optimum et judicieuse les réserves dont nous disposons, notamment celles qui sont en main de l'Etat; cela dans l'intérêt général du canton.

Le président. Cela ne vous rajeunit pas, Monsieur le député, de parler de votre motion de 1977 !

M. John Dupraz. Mais vous êtes un gamin, Monsieur le président !

Le président. Eh oui, eh oui !

M. John Dupraz. Moi, je suis un grand-père !

M. Claude Haegi, conseiller d'Etat. En deux mots, M. Dupraz a raison d'évoquer la nécessité qu'il y avait de mettre de l'ordre dans ce domaine. C'est ce à quoi nous nous sommes employés depuis un certain temps, en collaboration étroite avec les autorités des communes les plus concernées. J'ai eu l'occasion, lors d'une séance dans la région de la Champagne, de rencontrer tous les exécutifs des communes en question. Nous nous sommes fixé un prochain rendez-vous pour ces prochaines semaines, afin de faire le point de la situation et d'évaluer les modifications apportées depuis cette rencontre.

J'ai appliqué une politique restrictive en matière d'autorisations d'ouverture. Je ne vois d'ailleurs pas très bien à quelle autorisation, délivrée par moi, vous faites allusion.

M. John Dupraz. Je vous le dirai !

M. Claude Haegi, conseiller d'Etat. Volontiers ! J'ai récemment autorisé le prolongement d'une exploitation déjà ouverte, et je l'ai fait après m'être entretenu avec le maire de la commune directement concernée. Rien n'a été fait, depuis un certain nombre de mois, sans le consentement des autorités des communes directement concernées. En effet, comme cela a été dit, une procédure de recours a été engagée, dans les conditions que vous connaissez, après que j'ai refusé l'ouverture d'une exploitation sur le site mentionné tout à l'heure.

J'ai même signalé au Tribunal administratif, sans être sûr de la portée de la démarche, que je souhaitais pratiquer un moratoire dans l'attente de la réactivation du plan directeur des gravières. Ce faisant, Monsieur le député Dupraz, nous pourrons vous redonner les précisions que vous attendez, que nous attendons, concernant le potentiel d'exploitation de notre canton. Nous le connaissons dans les grandes lignes, bien sûr, mais nous savons surtout qu'il n'y a pas une exploitation qui ne soit pas de nature à provoquer quelques inconvénients pour ceux qui habitent à proximité. Notre rôle est d'en diminuer les effets.

Le problème est complexe. Tout à l'heure, M. le député Schneider a parlé de «technologies nouvelles». Sachez que ces sujets nous intéressent et que nous en discutons avec les différents professionnels de ces métiers. J'ai bon espoir d'atteindre l'objectif que nous nous étions fixé, tout en ne perdant pas de vue, je le répète, qu'une exploitation engendre inévitablement certains effets négatifs sur l'environnement le plus proche. Nous pouvons être optimistes - j'en suis convaincu - vu les résultats obtenus. En effet, certaines communes nous disent avoir déjà remarqué des changements.

M. John Dupraz (R). Je vous remercie de votre réponse, Monsieur Haegi !

En ce qui me concerne, je ne suis pas opposé à l'exploitation des ressources naturelles de ce canton, bien au contraire, mais cela doit se faire dans le respect de certaines règles que vous affirmez avoir établies. Vous voulez également réactiver le plan directeur. Néanmoins, je suis inquiet, car vous dites que vous n'avez jamais rien fait sans l'accord des communes. J'ose supposer que cela ne veut pas dire que vous délivrez systématiquement une autorisation, si une commune est d'accord d'exploiter une gravière pour une raison x ou y, dans un secteur !

Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.