République et canton de Genève

Grand Conseil

M 918
17. Proposition de motion de MM. Bénédict Fontanet et Pierre-François Unger concernant la situation prévalant actuellement au Parquet. ( )M918

EXPOSÉ DES MOTIFS

Vous vous souviendrez qu'une modification de l'article 38 de la loi sur l'organisation judiciaire (LOJ) est intervenue en date du 28 novembre 1991, modifiant la composition du Parquet par la création de deux postes de procureurs, lesquels furent pris sur le contingent existant de sorte que le nombre de substituts serait dorénavant de 5 au lieu de 7 (voir rapport de la commission judiciaire chargée d'étudier les projets de loi 6516-A et 6517-A déposés le 12 avril 1991, pages 12 et suivantes).

La mission confiée à ces deux procureurs consistait essentiellement à accroître l'efficacité du Parquet en assistant le procureur général, jusqu'ici le seul «permanent» du Ministère public qui pourrait ainsi se trouver déchargé de certains dossiers complexes dont certains exigent un travail de plusieurs mois, voire de plusieurs années; le Grand Conseil avait surtout en vue la nécessité de lutter de façon accrue contre la criminalité économique.

Cette préocupation d'efficacité du Ministère public ne pouvait faire fi des impératifs budgétaires, ce qui explique que l'installation de ces deux magistrats expérimentés et permanents se ferait sans création de deux postes supplémentaires au sein du Parquet, la question devant «toutefois être revue à l'avenir en fonction de l'évolution du nombre des causes à traiter...» (voir rapport précité, ibidem).

Plus de deux ans après cette modification, des voix de plus en plus nombreuses se font entendre au sein du pouvoir judiciaire, et du Parquet en particulier, selon lesquelles les buts globalement exposés supra ne sont pas atteints, le Parquet souffrant d'un dysfonctionnement trouvant son origine dans sa sous-dotation en effectif, moyens et équipements.

La mise en place de la modification de la LOJ du mois de novembre 1991 sans création de postes supplémentaires a eu l'effet pervers de paralyser en grande partie les deux procureurs dans les tâches qui leur étaient normalement dévolues: ceux-ci sont, de fait, contraints d'assumer - en concours avec les 5 substituts restants - la charge laissée vacante par le départ des deux substituts non remplacés (jours de permanence par-devant la Chambre d'accusation, représentation du Parquet par-devant la Cour de cassation, rédaction d'ordonnances de condamnation, etc.).

Cette situation provoque une dégradation du climat entre les magistrats du Parquet, et d'autres effets pervers comme l'engorgement des procédures, l'augmentation des dossiers en suspens et l'absence de représentation du Parquet au Tribunal de police dans les affaires où l'ordre public est en cause ou dans lesquelles des prévenus peuvent être condamnés à des peines allant jusqu'à 5 ans de réclusion (affaires de stupéfiants).

Il appartient au Grand Conseil de faire preuve de cohérence en s'assurant de la réalisation effective des buts clairement énoncés dans le rapport à l'appui de la modification de la LOJ du mois de novembre 1991, et le cas échéant de s'en donner les moyens au nombre desquels figure la restitution des deux postes de substituts supprimés.

C'est pour toutes ces raisons que nous vous prions, Mesdames et Messieurs les députés, d'envoyer cette motion au Conseil d'Etat.

Débat

M. Pierre-François Unger (PDC). Notre Grand Conseil a voté en novembre 1991 une modification de la loi sur l'organisation judiciaire dans le but de créer deux postes de procureur. Cela avait pour but de permettre au Parquet d'avoir une efficacité plus grande. Les dossiers sont néanmoins de plus en plus nombreux, mais ils sont également de plus en plus complexes, particulièrement dans le domaine préoccupant de la criminalité économique. Tous se rappelleront que ces deux postes de procureur avaient été «prélevés» dans le «pool» des postes de substituts, par souci du respect des contraintes budgétaires, hélas déjà préoccupantes.

Qu'en est-il actuellement ? Le Parquet dispose-t-il des moyens pour faire face à l'augmentation de la charge de travail qui lui est confiée ? Le Parquet peut-il être partout, là où sa présence est indispensable ? Le but de cette motion est simplement d'obtenir un bilan trois ans après l'entrée en vigueur de cette modification législative, et de proposer, si besoin est, des mesures destinées à mettre à la disposition du Parquet les moyens qui lui sont nécessaires pour assurer l'intégralité de ses missions.

Mise aux voix, cette motion est adoptée.

Elle est ainsi conçue :

MOTION

concernant la situation prévalant actuellement au Parquet

LE GRAND CONSEIL,

considérant :

- la modification de l'article 38 de la loi sur l'organisation judiciaire (LOJ) intervenue le 28 novembre 1991 prévoyant la création de deux postes de procureurs;

- l'abaissement du nombre de substituts de deux unités ayant été opéré en vue de concilier ce qui précède avec les impératifs budgétaires de l'époque;

- les dysfonctionnements résultant de la situation actuelle au sein du Parquet;

- le réexamen de l'ensemble de ces problèmes en fonction de l'évolution du nombre des causes à traiter expressément réservé dans le rapport de la commission judiciaire à l'origine de la modification précitée;

- la nécessité de s'assurer que les buts clairement exprimés à l'occasion de la modification de la LOJ du 28 novembre 1991 soient concrètement atteints,

invite le Conseil d'Etat

- à rendre, en 1994 encore, un rapport sur la situation prévalant actuellement au sein du Parquet, principalement à la lumière des buts qu'a entendu poursuivre le Grand Conseil en décidant de la modification de la LOJ du 28 novembre 1991, qui permette notamment de décrire dans quelle mesure les deux procureurs ont actuellement la possibilité de mener leur mission, et d'évaluer l'incidence concrète de l'abaissement du nombre des substituts sur le fonctionnement du Parquet;

- à proposer le cas échéant divers remèdes aux dysfonctionnements constatés, en envisageant notamment la possibilité de faire remonter le nombre des substituts de 5 à 7.