République et canton de Genève

Grand Conseil

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M 2450
Proposition de motion de Mmes et MM. François Lefort, Frédérique Perler, Yves de Matteis, Guillaume Käser, Boris Calame, Sarah Klopmann, Emilie Flamand-Lew, Mathias Buschbeck, Magali Orsini, Delphine Klopfenstein Broggini, Pierre Gauthier, Olivier Baud : Rétablissons l'équité devant l'impôt : pour une déductibilité de loyer de 7,9%
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session XII des 22, 23 février et 1er mars 2018.

Débat

Le président. L'ordre du jour appelle la M 2450, que nous traitons en catégorie II, trente minutes. La parole est demandée par son auteur, M. François Lefort.

M. François Lefort (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, un peu d'histoire. Au mois de janvier 2018, tous les propriétaires immobiliers habitant dans leur bien du canton de Genève ont reçu une lettre de l'administration fiscale cantonale - l'AFC - les informant de l'augmentation de la valeur locative de leur actif immobilier de 7,9% dès la période fiscale 2017. Fin janvier 2018, le MCG a déposé une motion demandant un moratoire sur l'application de cette hausse de la valeur locative, en dérogation à la loi fédérale. Ce texte, largement suivi par les partis de droite, a été renvoyé au Conseil d'Etat par 60 oui contre 30 non le 25 janvier 2018. Le conseiller d'Etat Serge Dal Busco - alors chargé des finances - a accueilli favorablement la motion, assurant lors de sa prise de parole que le gouvernement allait surseoir à cette hausse qu'il proposait lui-même, ce qu'il fit avec diligence, à notre grand étonnement... (Brouhaha.)

Le président. Monsieur Lefort, une seconde, s'il vous plaît, on ne vous entend pas ! Un peu de calme, Mesdames et Messieurs ! (Un instant s'écoule. Le silence revient.) Voilà, vous pouvez poursuivre.

M. François Lefort. Merci, Monsieur le président. ...puisque le moratoire sur l'augmentation de la valeur locative a été décidé par la majorité du Conseil d'Etat lors de sa séance du 7 février 2018. L'administration fiscale - avec diligence elle aussi - a donc informé les contribuables que, dès lors, les valeurs locatives 2017 qui avaient été communiquées par l'AFC à chaque propriétaire par courrier n'étaient plus valables et que c'étaient les valeurs locatives non indexées, soit celles de 2016, qui devaient être reportées pour les déclarations 2017.

Voilà une décision tout à fait exceptionnelle - et certainement à l'époque très électoraliste - qui a évidemment eu comme conséquence des pertes fiscales pour l'Etat de Genève. Il s'agissait toutefois d'une mesure réglementaire, et nous n'avons que peu de pouvoir sur de telles mesures prises à la majorité du Conseil d'Etat. La M 2450 qui nous occupe était donc une réponse humoristique et désespérée à une décision désespérante.

Dans la même foulée électoraliste, la droite élargie a annihilé en 2018 le PL 12403 du Conseil d'Etat relatif à la réévaluation de la valeur fiscale des immeubles, réévaluation qui n'avait pas été effectuée depuis quatorze ans à l'époque, soit depuis seize ans maintenant. Le Conseil d'Etat proposait une réévaluation de 20%, basée sur des analyses professionnelles de la valeur des immeubles à Genève, et ce projet de loi était juste, puisqu'il permettait de traiter équitablement les propriétaires des anciens immeubles dont la valeur fiscale n'avait pas été réévaluée depuis quatorze ans - seize ans aujourd'hui - et ceux des nouveaux immeubles construits depuis la dernière réévaluation. Le Conseil d'Etat proposait donc une réévaluation de 20%, que la droite élargie a réduite à 7%. Cette loi a été promulguée par le gouvernement le 30 janvier 2019. Exit la réévaluation de la valeur fiscale, d'où de nouvelles pertes fiscales pour l'Etat de Genève. En l'occurrence, on parle facilement de dizaines de millions par an, qui représentent la différence entre 20% et 7%. C'est certainement en partie cette somme qui a manqué au budget 2020 - déficitaire, comme vous le savez - et qui pourrait encore manquer en 2021 ainsi qu'aux prochains budgets si le Grand Conseil ou le Conseil d'Etat ne met pas en oeuvre la récente décision de la Chambre constitutionnelle. Cette dernière, saisie par le citoyen Locciola en raison de la violation de l'égalité de traitement entre anciens et nouveaux propriétaires introduite par les trois amendements au PL 12403 votés ici en plénière par la majorité, a en effet donné raison au recourant le 23 décembre 2019. Elle a constaté la violation de l'égalité de traitement et a invité le Grand Conseil à la rétablir le plus rapidement possible en modifiant la loi 12403 dans le sens initial d'une réévaluation de 20% de la valeur fiscale des immeubles.

Ce point de l'ordre du jour offre donc l'occasion de rappeler cette décision de la Chambre constitutionnelle, qui est passée un peu inaperçue en cette période de Noël, personne ne s'en étant vraiment rendu compte. Je le mentionne également à l'intention des journalistes qui nous écoutent ! Il convient du reste de préciser que cette décision de la Chambre constitutionnelle doit être mise en oeuvre au plus vite, puisque c'est le sens de cette dernière. Pourquoi ? Tout simplement parce que l'Etat ne peut pas violer l'égalité de traitement qu'il doit aux citoyens. Nous serions donc reconnaissants au Conseil d'Etat - plus précisément à Mme la conseillère d'Etat chargée des finances - de nous proposer très rapidement non pas une modification de la loi 12403, mais un projet de loi générale de réévaluation du patrimoine immobilier plus conforme au droit. Cette réévaluation représente une somme estimée à environ 200 millions de francs par les milieux autorisés, un montant qui serait bienvenu pour les prochains budgets, car nous ne pouvons nous priver plus longtemps de ce genre de ressources.

Pour le surplus, Mesdames et Messieurs les députés, je vous informe que nous retirons cette motion puisque, vous l'avez compris, son objet est obsolète. Je vous remercie. (Applaudissements.)

Le président. Merci bien. Il est pris acte de ce retrait.

La proposition de motion 2450 est retirée par ses auteurs.