République et canton de Genève

Grand Conseil

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M 2104-D
Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la motion de Mmes et MM. Jean Romain, Charles Selleger, Pierre Conne, Jacques Jeannerat, Eric Bertinat, Nathalie Fontanet, Francis Walpen, Beatriz de Candolle, Mauro Poggia, Pierre Ronget, Mathilde Chaix, Christina Meissner, Vincent Maitre, Christo Ivanov, Bernhard Riedweg, Patrick Lussi, Stéphane Florey, Claude Aubert, Guy Mettan, Jean-François Girardet, Antoine Barde, Patrick Saudan pour une révision de l'application genevoise de l'ordonnance fédérale sur les certificats de maturité (ORM 95)

Débat

Le président. A présent, nous abordons la M 2104-D. Monsieur Jean Romain, vous avez la parole.

M. Jean Romain (PLR). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, juste un mot. Notre motion date de 2012, et il s'agit là de la troisième réponse du département de l'instruction publique - nous avions, vous vous le rappelez peut-être, refusé et renvoyé ses deux précédents rapports. Nous sommes ici en présence de quelque chose de différent, parce qu'entre 2012 et aujourd'hui, une réflexion importante a été menée sur ce que nous souhaitions dans le cadre des certificats de maturité, le but de la motion étant au fond de synthétiser la diversité des profils de maturité possibles, que nous jugeons excessive. A cet égard, nous demandions deux choses, qui ont été acceptées: commencer dès la première année la discipline fondamentale et entrer en matière sur la question des options liées - on a commencé à le faire, et pour notre part, on aurait aimé un peu plus.

Un élément tout à fait nouveau est apparu, l'obligation faite dans l'ORM - c'est-à-dire l'ordonnance fédérale sur les certificats de maturité - d'introduire l'informatique, ce qui n'était pas le cas à l'époque du dépôt de cette motion. Il y a dans ce rapport quelque chose d'assez intéressant, une réponse à une question qui n'a pas été posée concernant l'introduction de l'informatique. Je vous lis une phrase et je ferai ensuite un commentaire à son sujet: «Les notions de culture numérique seront étudiées durant la 2e année dans le cours d'informatique, mais aussi au sein des disciplines "classiques" (langues, sciences humaines, philosophie, économie et droit, arts et naturellement dans les disciplines scientifiques).»

Ce qui semble contestable, c'est le concept de «culture numérique» qui n'a aucune valeur, notamment en philosophie; il s'agit d'une notion quelque peu passe-partout qui ajoute à la confusion quant à ce que doit être la culture. Il existe en revanche une «pratique numérique» qui correspond à l'évolution de la technologie. Comme avec toutes les grandes inventions de l'histoire, comme avec tout ce qui a changé profondément les habitudes des hommes, on constate que des difficultés apparaissent. Disons les choses plus précisément: le numérique ouvre le champ des possibles de manière sidérante, mais dans ce qui est possible, qu'est-ce qui est souhaitable ? Il serait préférable d'indiquer que diverses questions liées au numérique peuvent être abordées dans le cadre des cours de philosophie, comme les problèmes moraux, les problèmes épistémologiques.

A Genève, la philosophie a le statut de discipline fondamentale dans le cadre de l'ORM et selon une dérogation accordée à l'époque par la Commission suisse de maturité. L'inquiétude des profs de philo, si on manque de précision dans l'enjeu induit par l'obligation d'introduire des cours d'informatique, Madame la cheffe du département de l'instruction publique, c'est qu'avec le retour des options liées, que nous saluons par ailleurs, la philosophie perde son statut de discipline fondamentale.

Nous allons accepter cette troisième réponse, parce qu'on a là quelque chose de suffisamment cossu pour calmer les inquiétudes qui s'exprimaient en 2012 déjà. Je vous remercie.

Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat. Vous l'avez rappelé, Monsieur Romain, cette motion date d'une législature antérieure; entre-temps, les choses ont évolué. Ce n'est pas que le Conseil d'Etat n'a pas souhaité répondre, il y a eu plusieurs allers-retours, mais l'introduction de l'informatique a quelque peu bouleversé la donne, c'est vrai, il fallait que nous puissions stabiliser les choses.

Cela étant, j'aimerais rassurer le député Romain: il n'est pas question d'enlever à la philosophie son statut de discipline fondamentale, qui constitue d'ailleurs une particularité genevoise. L'ordonnance fédérale le permet, mais ne l'impose pas. Nous avons été dans ce sens, nous allons continuer, car les philosophes peuvent amener un regard extrêmement intéressant sur la société et son évolution, sur le tout-numérique, sur la façon dont nous nous comportons face aux outils digitaux, et je pense que l'éthique du numérique pourrait tout à fait être abordée dans le cadre des cours de philosophie. Mais ne vous inquiétez pas, nous irons de toute façon dans la direction indiquée ici.

Nous mettrons en oeuvre cette grille horaire à la rentrée 2020, mais il faut souligner que la CDIP travaille déjà sur la future ordonnance de reconnaissance des maturités, donc dans un certain temps - je ne sais pas s'il est proche ou lointain, parce qu'on commence parfois les débats sur des ordonnances fédérales et on met vingt ans pour les faire aboutir - dans un temps plus ou moins proche, la maturité connaîtra d'autres changements. Aujourd'hui, il est beaucoup question de transversalité, ce qui va dans le sens que vous avez bien connu, Monsieur le député, au collège Rousseau. Je vous remercie de votre attention.

Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat.

Le Grand Conseil prend acte du rapport du Conseil d'Etat sur la motion 2104.