République et canton de Genève

Grand Conseil

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M 2339-A
Rapport de la commission de l'économie chargée d'étudier la proposition de motion de Mmes et MM. Sandro Pistis, François Baertschi, Danièle Magnin, Florian Gander, Thierry Cerutti, Sandra Golay, Pascal Spuhler, Jean-François Girardet : Taxons les frontaliers de manière équitable à 10 000 F le permis G
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session X des 14 et 15 décembre 2017.
Rapport de majorité de M. Jean-Marc Guinchard (PDC)
Rapport de minorité de M. François Baertschi (MCG)

Débat

Le président. Nous traitons à présent la M 2339-A en catégorie II, trente minutes. La parole échoit au rapporteur de majorité, M. Jean-Marc Guinchard.

M. Jean-Marc Guinchard (PDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, cet objet a été traité lors de deux séances de la commission de l'économie. Suite à l'audition du chef du département, la question essentielle qui s'est posée a été la définition de l'émolument. Le texte qui vous est soumis propose de porter le montant du permis G, c'est-à-dire le permis frontalier, à 10 000 F au lieu des 400 F et des poussières qu'il coûte à l'heure actuelle.

Il faut savoir qu'il existe une définition légale fédérale ainsi que des définitions légales cantonales de l'émolument, et que toute une série d'arrêts faisant jurisprudence tant cantonale que fédérale précisent qu'un émolument doit - j'insiste sur ce verbe - correspondre à un travail administratif précis et avéré. Il n'est donc pas possible de laisser aux cantons la possibilité de décider eux-mêmes ce qu'ils entendent percevoir comme somme. Dans le cas du permis G, un cadre est fixé par la Confédération et le canton dispose d'une certaine latitude s'il souhaite augmenter le montant de l'émolument, mais cette latitude est relativement restreinte et ne porterait en tout cas pas le plafond jusqu'à 10 000 F.

Comme vous l'aurez lu dans le rapport qui vous est soumis, le MCG a fait preuve d'une vision extensive des définitions de l'émolument et reproché à la majorité de la commission d'avoir une vision plutôt restrictive; il estime que le canton a toute latitude pour imposer les tarifs qu'il souhaite. Or rappelons qu'en droit, il n'y a pas de vision restrictive ou extensive, il y a simplement un respect de la légalité. J'ajouterai en conclusion, tout en vous recommandant de refuser ce texte, qu'il est quasiment impossible pour une petite entreprise de s'acquitter d'un montant de 10 000 F. Je vous remercie.

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, la situation actuelle à Genève est difficile, dramatique même: notre canton compte plus de 100 000 travailleurs frontaliers. Nous avons atteint un seuil critique qui crée une surconcurrence sur le marché de l'emploi, une baisse des salaires, une pression gigantesque sur les employés. Ce flot de main-d'oeuvre inonde le marché du travail genevois. Regardez la détresse, la difficulté tant des jeunes que des travailleurs âgés qui ont toutes les peines du monde à se réinsérer sur le marché, à trouver leur place dans la société. Cela inquiète beaucoup le MCG, et c'est la raison pour laquelle nous avons déposé cette motion.

Certes, 10 000 F représente beaucoup d'argent, mais quand on prend en compte le coût de l'aide sociale pour les personnes sans emploi ou exclues du monde professionnel, il s'agit d'une somme minime, d'autant plus qu'une partie de ces fonds pourrait justement servir à la réinsertion des travailleurs qui ont été exclus du marché de l'emploi, parce que c'est bien ça le gros problème auquel nous sommes confrontés, et nous devons impérativement trouver des solutions. Voilà pourquoi nous avons déposé ce texte dans lequel nous proposons que les montants prélevés servent au dispositif de retour à l'emploi, c'est clair et net. Cette motion a aussi le mérite de lancer le débat. Je vous demande donc de la soutenir.

M. François Lefort (Ve). Une fois n'est pas coutume - c'est extrêmement rare - je dirai un mot du rapport de minorité. Je suis d'avis que les rapports de minorité ne sont pas assez lus, alors que leur concision donne généralement une idée épurée de la pensée de leurs auteurs. Dans l'introduction du présent rapport, nous pouvons lire: «Soit le MCG en fait trop, soit il n'en fait pas assez. L'un et l'autre ne sont pas possibles simultanément sur le même sujet.»

Eh bien, Monsieur le rapporteur de minorité, permettez-moi de vous dire que c'est justement possible, et vous nous en donnez la preuve avec cette motion qui demande de fixer l'émolument du permis G à 10 000 F. En nous soumettant cette proposition, vous en faites trop; dans le même temps, vous ne faites rien, parce que personne ne suivra cette drôle d'idée qui ne règle en rien le problème de la surchauffe économique de notre région, surchauffe qui sous-tend évidemment le problème du besoin de travailleurs frontaliers.

Pourquoi personne ne vous suivra ? Parce que cette demande est inapplicable; et pourquoi est-elle inapplicable ? Parce qu'elle est contraire au droit fédéral, ce qui signifie qu'elle est illégale, malheureusement. Le Conseil d'Etat est venu vous le dire en commission, mais vous ne le croyez pas, parce que vous venez encore défendre votre texte devant nous. Très bien, nous en prenons acte.

Cela étant, nous vous rappelons que vous avez un conseiller national à l'Assemblée fédérale qui pourrait éventuellement porter cette drôle d'idée devant le Conseil national. Ici, nous ne pourrons que vous décevoir, car nous sommes impuissants à vous satisfaire: nous refuserons de prendre en considération votre proposition. Merci.

M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, certains qualifient cette proposition de drôle d'idée; pour ma part, je pense plutôt que de drôles de propos sont tenus ici, parce que la thématique est tout ce qu'il y a de plus actuelle. Voyez les difficultés que rencontre le Conseil fédéral à trouver un accord avec l'Europe, qui demande que nous baissions davantage encore la garde, que nous renoncions aux mesures de contrôle du marché de l'emploi en Suisse et à Genève - où on en fait plus qu'ailleurs, heureusement. Il reste beaucoup de travail à effectuer.

Quoi que vous en pensiez, nous avons délibérément placé la barre très haut pour provoquer le débat, et le débat a eu lieu, d'abord en commission, maintenant en plénière. On nous dit: «Rendez-vous compte, c'est dramatique, un petit employeur ne pourra pas payer 10 000 F !» (L'orateur hausse le ton.) Mais s'il engage un résident, Mesdames et Messieurs, il ne va pas les payer, ces 10 000 F ! (Exclamations.) Voilà, je vous réveille un peu avant la Revue ! Je le répète: s'il engage un résident, il n'aura pas à payer ces 10 000 F !

C'était bien là le but de la manoeuvre, à savoir inciter l'ensemble des employeurs de Genève à faire l'effort de recruter des résidents genevois en passant par l'office cantonal de l'emploi, qui a grandement amélioré ses performances: on trouve maintenant à l'OCE des candidats qui correspondent aux postes. Les entreprises du canton qui font cet effort n'auront pas à s'acquitter de la taxe, et celles qui ne le font pas - parce qu'il y en a toujours qui ne font pas l'effort, malheureusement, et même les employeurs le regrettent - eh bien elles payeront la taxe, c'est aussi simple que ça ! Lorsqu'on ne trouve pas les compétences sur le terrain, parce qu'il s'agit d'une profession qui ne connaît pas le chômage, ça se justifie, formidable, tant mieux, ça fera baisser le taux de chômage; là aussi, l'entreprise aura une justification et ne payera pas la taxe.

Aussi, Mesdames et Messieurs, vous avez tout faux quand vous pensez que ça va pénaliser les employeurs, ça pénalisera ceux qui ne veulent pas jouer le jeu, et il y en a encore beaucoup ! Nous voulons que toutes les sociétés jouent le jeu et passent par l'office cantonal de l'emploi ! Merci de soutenir cette motion !

M. Jacques Blondin (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, cette motion est un brin provocatrice - c'est un euphémisme. Son postulat est que les frontaliers sont responsables de tous les maux - ou en tout cas de beaucoup d'entre eux - et qu'il faut par conséquent tout mettre en oeuvre pour diminuer le recours à ce type de main-d'oeuvre. Or tant l'objectif que les moyens précisés dans l'exposé des motifs sont contraires à la réalité du terrain: les frontaliers ne sont pas responsables du chômage genevois, les syndicats l'admettent, l'observatoire genevois du marché du travail ne les désigne pas comme tels, et le nombre de chômeurs en regard de celui des frontaliers ne permet pas d'envisager de remplacer les uns par les autres par une simple analyse quantitative.

Les frontaliers sont nécessaires à notre économie, au fonctionnement de nos institutions. Que feraient l'hôpital, les cliniques, les EMS sans eux ? Ils représentent 30% des effectifs dans ces secteurs. Que feraient nos PME sans possibilité de trouver les spécialistes recherchés ? Je me permets de mentionner l'entreprise dans laquelle je travaille, où nous engageons des frontaliers par nécessité: même dans un secteur comme le mien, soit les fruits et légumes, nous avons besoin de vendeurs qui parlent allemand, et vous savez tous comme moi qu'à Genève, l'une des carences est la maîtrise de la langue allemande, donc nous avons souvent recours à des personnes de l'extérieur, notamment d'Alsace, et elles s'intègrent évidemment dans la périphérie.

Cette mesure ferait exploser le coût de ce qui reste tout de même un émolument, le multipliant par 25 - voire par 40, selon les références que l'on prend; elle est contraire au droit supérieur, exagérément prohibitive et à la seule charge des employeurs. Ce seraient des millions supplémentaires pour les entreprises genevoises dans un contexte déjà très coûteux. Par ailleurs, n'oubliez pas que dans le cadre de la mise en oeuvre de l'initiative contre l'immigration de masse, la mesure de l'annonce préalable à l'OCE fonctionne depuis le 1er juillet et peut amener quelques compensations s'agissant des problématiques liées aux chômeurs.

Enfin et surtout, évitons de monter la population genevoise contre les frontaliers, nous n'avons pas besoin d'un climat délétère et ce ne sont pas des boucs émissaires. Regardons la réalité économique en face et apportons les solutions adéquates. Le PDC rejette cette motion sans hésitation aucune. Merci.

Mme Jocelyne Haller (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, cette motion s'appuie sur le présupposé que le recours aux travailleurs frontaliers ne constitue qu'une charge. On ne peut que s'étonner de cette vision orientée qui ne prend pas en compte la réalité tangible que représente l'apport économique des frontaliers à Genève. S'ils ne faisaient que coûter, qui pourrait croire un seul instant que les entreprises et les autorités de ce canton ne s'en seraient pas rendu compte et auraient agi contre leur propre intérêt ?

En commission, l'essentiel des débats a tourné autour de la notion d'émolument, cela a été dit. Selon la constitution, celui-ci doit correspondre à la couverture des frais administratifs, ce dont on est bien loin avec le montant de 10 000 F proposé dans ce texte. Ce que les motionnaires demandent, ce n'est pas la couverture des frais administratifs, ils veulent en fait pénaliser les frontaliers pour des responsabilités qu'ils leur imputent dans la dégradation de la situation sociale d'une certaine partie de nos concitoyens. C'est une posture de mauvais aloi, c'est une manière, comme l'a dit M. Blondin, de désigner des boucs émissaires.

Mais surtout, il faut se rappeler le moment où cette motion a été déposée. Il s'agit d'un texte outrancier et propagandiste, qui n'est pas plus pertinent qu'il n'est légal, qui occulte la réalité économique transfrontalière de notre canton et attise la division entre travailleurs en opposant les personnes à l'aide sociale et les frontaliers. Il faut éviter ce genre d'amalgame, cela n'a aucun sens. Vous connaissez le contexte de l'emploi dans ce canton, les difficultés de recrutement, le fait que des politiques de priorité aux chômeurs s'appliquent, alors ne venons pas dire que les frontaliers sont les ennemis des personnes à l'aide sociale, c'est faux, c'est une manière particulièrement déplorable de considérer l'espèce humaine et c'est surtout le fondement d'une profonde injustice sociale à laquelle nous ne pouvons pas souscrire. Mesdames et Messieurs, nous vous invitons à refuser ce texte. Je vous remercie de votre attention.

M. Romain de Sainte Marie (S). Mesdames et Messieurs les députés, il y a d'abord l'aspect factuel: on parle ici d'un émolument que le MCG cherche à transformer en taxe, ce qui serait illégal et totalement disproportionné - l'argument juridique a été mentionné. La commission de l'économie a balayé cette motion justement en raison de cet argument juridique.

Mais là derrière, car il ne faut pas s'arrêter là, il y a le discours politique du MCG qui n'en est pas à sa première tentative; je pense qu'environ huit ou neuf objets sur dix du MCG comportent le terme «frontaliers» dans leur titre, tous les prétextes sont bons pour s'en prendre aux travailleuses et travailleurs frontaliers, peut-être pas pour les éliminer - le terme est fort - mais du moins pour les empêcher d'accéder à Genève. On a même entendu des arguments environnementaux, comme quoi il s'agirait de préserver la qualité de vie dans notre canton !

J'ai été particulièrement sensible aux propos de M. Sormanni tout à l'heure, qui disait que les employeurs doivent jouer le jeu; bien évidemment que les employeurs doivent jouer le jeu, mais il ne s'agit pas de monter les travailleurs genevois contre les travailleurs frontaliers. Nous constituons un seul et même bassin de population, et la croissance des frontaliers n'est pas liée à une décroissance de Genève, au contraire: nous connaissons une progression en matière d'emplois qui s'accompagne d'une augmentation des travailleurs frontaliers, et c'est tant mieux.

Si les entreprises doivent jouer le jeu, ce n'est pas en refusant d'embaucher des frontaliers, puisqu'ils contribuent au travail dans ce canton, c'est plutôt en instaurant un cadre économique qui fait défaut aujourd'hui. Le MCG se trompe dans son discours, car le réel problème vient d'un manque d'encadrement et de mesures d'accompagnement. Prenons l'exemple du commerce de détail que nous connaissons bien, puisqu'on en a débattu lors de la dernière session du Grand Conseil: le cadre est absent, il n'y a pas de conventions collectives de travail alors que c'est un secteur sinistré dans lequel les salaires subissent de fortes pressions en raison de la concurrence.

Eh bien c'est justement à la question du revenu et des conditions de travail qu'il faut apporter une réponse. Attiser la haine des travailleurs frontaliers ne sert à rien, c'est une erreur. A ce propos, je vous invite à signer le référendum contre le passage en force de la loi sur les horaires d'ouverture des magasins le dimanche. Nous devons retrouver un véritable esprit de partenariat social qui amènera la paix plutôt que de nous perdre dans le discours haineux du MCG. Je vous engage donc, Mesdames et Messieurs, à rejeter cette motion.

M. André Pfeffer (UDC). L'augmentation constante du nombre de frontaliers interpelle, et cette motion soulève un réel problème. Parallèlement à la forte progression d'octrois de permis G, le taux de chômage augmente tandis que de plus en plus de Genevoises et de Genevois sollicitent l'aide sociale. Certes, cette motion ne constitue pas la réponse adéquate, cela a déjà été relevé. Les règles liées aux permis G sont fixées dans la législation fédérale et le montant d'un émolument ne peut couvrir que les frais administratifs. Mais le problème existe.

Depuis l'entrée en vigueur des bilatérales, les frontaliers ne se limitent plus à la seule région limitrophe; les permis G sont dorénavant issus de l'ensemble des pays de l'Union européenne. Quelles sont les mesures adéquates ? Est-ce que le principe de préférence indigène est suffisant ? Nous ne le pensons pas. Le déséquilibre de revenus entre la France et la Suisse est trop grand: à Genève, un professeur de secondaire gagne trois fois plus que son collègue français; idem pour un chauffeur de bus et de nombreuses autres professions. L'offre est totalement déséquilibrée, le recrutement se fait maintenant dans un bassin qui contient des millions de personnes.

Je rappelle qu'en 2016, Genève a perdu 2,2% de ses emplois, soit 6800 postes sur un ensemble de 315 000 postes. Je répète: en 2016, Genève a perdu 6800 postes de travail ! Durant cette période, la population a crû de 8033 habitants, le nombre de frontaliers de 6,1%. La bonne réponse, pour l'UDC, c'est notre projet de loi «Genève d'abord», un texte réaliste, similaire à celui approuvé dans le canton du Tessin. Pour sauvegarder l'emploi, mais aussi le niveau des revenus et le pouvoir d'achat, Genève ne peut pas éviter la réintroduction d'un contingent. Merci de votre attention.

M. Serge Hiltpold (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, je vais commencer avec un petit commentaire sur le titre de cette motion, à savoir: «Taxons les frontaliers de manière équitable à 10 000 F le permis G». Décidément, nous n'avons pas la même notion de l'équité ! Ensuite, le deuxième considérant indique que les demandeurs d'emploi genevois se trouvent confrontés à une concurrence déloyale; voilà qui est intéressant. Je rappelle, Mesdames et Messieurs, que les secteurs conventionnés exigent des minimums salariaux; que vous soyez résident ou frontalier, le revenu minimum est le même pour tous, donc c'est absolument faux.

Venons-en maintenant au fond de la problématique économique. J'aimerais indiquer que les entreprises genevoises et romandes sont composées de différents travailleurs. Ce qui nous oppose complètement au MCG dans ce débat, c'est que pour nous, ces travailleurs fournissent les sociétés. Si vous n'avez plus de main-d'oeuvre, qui va réaliser les travaux, qui va remplir les mandats ? La concurrence à l'interne du pays, donc des autres cantons, ou la concurrence extranationale, ce qui engendre une diminution des effectifs.

J'ai souvent dit dans cet hémicycle que les employeurs ont un rôle à jouer, mais ils en ont assez d'être sans arrêt critiqués. Dans le domaine de la construction, par exemple, nous déployons de gros efforts pour la formation: les apprentis représentent plus de 10% de la main-d'oeuvre, un taux particulièrement stable. Or on critique nos conditions de travail à longueur de semaine, à longueur d'année, nous sommes des «négriers», entre guillemets, et au bout d'un moment, ce discours n'est plus audible. Nous faisons des efforts, nous collaborons avec l'office cantonal de l'emploi. Vous savez, j'ai 18 collaborateurs; avec douze employés, mon niveau de vie ne va pas changer, j'aurai simplement six emplois en moins, c'est tout. Voilà mon constat, et je crois que nous sommes plusieurs à le partager: il y en a marre des textes comme ça !

Regardez la réalité économique: que ce soit dans le secteur de la santé, de la construction, de l'agriculture ou de l'industrie, si on tient compte des personnes de la génération du baby-boom qui vont partir et des budgets qu'on alloue aux formations scientifiques et académiques, expliquez-moi comment vous allez faire tourner les entreprises ! Pour moi, il faut arrêter de rigoler avec des textes pareils. Cette motion ne mérite aucune considération et je vous remercie de bien vouloir la refuser.

Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Daniel Sormanni pour vingt-trois secondes.

M. Daniel Sormanni (MCG). Je serai très rapide, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés. Voyez la «Tribune de Genève» du jour: «Vu le nombre de frontaliers, il faut un contrôle, sinon c'est la porte ouverte au travail au noir et au dumping social.» Ce sont les syndicats européens qui le disent, il est nécessaire d'instaurer des contrôles. Ce n'est pas une mesure contre les frontaliers, mais bel et bien contre les employeurs qui ne jouent pas le jeu et ne recrutent pas dans le bassin local quand c'est possible...

Le président. C'est terminé, Monsieur le député...

M. Daniel Sormanni. Voilà la différence ! Ce n'est pas contre les frontaliers, c'est... (Le micro de l'orateur est coupé.)

Le président. Je vous remercie et donne la parole à M. François Baertschi.

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. J'aimerais juste ajouter un élément. Certains trouvent excessif le coût demandé par notre motion pour le permis G, mais si on calculait réellement ce que coûtent les frontaliers à notre société en regard du développement de l'aide sociale, du chômage et de la précarité dans notre canton, le résultat serait impressionnant. Or personne ne veut chiffrer ce coût. Si l'on prend cet élément en considération, notre motion a toute sa logique.

Le président. Merci. Monsieur Saudan, il vous reste onze secondes.

M. Patrick Saudan (PLR). Merci, Monsieur le président. Les propos de M. Baertschi sont intolérables. Il faut simplement lui rappeler, Monsieur le président, que les frontaliers scolarisent leurs enfants de l'autre côté de la frontière et que leurs frais de santé sont généralement assurés par la France, donc ils ne coûtent pas très cher à notre canton. Merci.

Le président. Je vous remercie... (Remarque.) Monsieur Baertschi, vous n'avez plus de temps de parole.

M. François Baertschi. Mais j'ai été mis en cause, Monsieur le président !

Le président. Il reste trente secondes à M. Guinchard.

M. Jean-Marc Guinchard (PDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Je précise juste que les frontaliers payent des impôts, eux, et que cette motion est tout simplement inapplicable, obsessionnelle, irréaliste et contraire au droit. Je vous remercie.

Le président. Merci. Monsieur Saudan, je vous demanderai de ne pas gifler votre pauvre micro quand vous avez terminé ! J'octroie encore quinze secondes à M. François Baertschi pour qu'il puisse répondre.

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. On tombe dans l'invective, c'est dommage. Je répète qu'il ne s'agit pas de lutter contre les frontaliers, mais d'aider les résidents genevois.

Le président. Je vous remercie, Monsieur le rapporteur de minorité, et je lance le vote sur la prise en considération de cette motion.

Mise aux voix, la proposition de motion 2339 est rejetée par 74 non contre 11 oui et 1 abstention.