République et canton de Genève

Grand Conseil

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La séance est ouverte à 16h10, sous la présidence de M. Jean Romain, président.

Assistent à la séance: MM. François Longchamp, président du Conseil d'Etat, Pierre Maudet, Serge Dal Busco et Luc Barthassat, conseillers d'Etat.

Exhortation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme et MM. Mauro Poggia, Anne Emery-Torracinta et Antonio Hodgers, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Delphine Bachmann, Marko Bandler, Fabienne Monbaron, Patrick Saudan, Stéphanie Valentino et Salika Wenger, députés.

Députés suppléants présents: Mmes et MM. Olivier Baud, Pierre Bayenet, Diego Esteban, Sylvie Jay, Christina Meissner et Vincent Subilia.

Annonces et dépôts

Le président. La commission des pétitions nous informe qu'elle désire renvoyer les pétitions suivantes:

Pétition : NON à la destruction du poumon de verdure de Collex-Bossy par la mise en place d'une décharge à ciel ouvert de déchets toxiques et OUI à des solutions alternatives de valorisation des mâchefers (P-2035)

Pétition contre des sites de décharge bioactive en zone agricole (P-2036)

Pétition : Une décharge à ciel ouvert ? NON ! (P-2037)

Pétition : Non à la destruction de terres agricoles de grande valeur à Satigny par l'installation d'une décharge à ciel ouvert de déchets toxiques et OUI à des solutions alternatives de valorisation des mâchefers (P-2038)

à la commission de l'environnement et de l'agriculture.

Questions écrites urgentes

Le président. Vous avez trouvé sur vos places les questions écrites urgentes suivantes:

Question écrite urgente de M. Marko Bandler : Débours : le protocole d'accord entre le Conseil d'Etat et la police est-il respecté ? (QUE-839)

Question écrite urgente de M. Marko Bandler : Police genevoise : à quoi sert le « détachement protocolaire » ou « peloton d'honneur » ? (QUE-840)

Question écrite urgente de M. Marko Bandler : Académie de police de Savatan : quelle instruction reçoivent nos futur-e-s policier-ère-s ? (QUE-841)

Question écrite urgente de M. Christo Ivanov : Pollution au radium : quel est l'état de la situation à Genève ? (QUE-842)

Question écrite urgente de Mme Isabelle Brunier : Les arbres des Feuillantines (QUE-843)

Question écrite urgente de Mme Isabelle Brunier : Ronflements exagérés et volontaires des moteurs des voitures et motos (QUE-844)

Question écrite urgente de Mme Isabelle Brunier : Différences de traitement lors de renvois d'élèves du secondaire II (QUE-845)

Question écrite urgente de M. Christo Ivanov : 80 emplois locaux menacés de substitution au CERN : que compte faire le Conseil d'Etat ? (QUE-846)

Question écrite urgente de M. Boris Calame : Les trottoirs sont-ils aussi dévolus au parcage des deux-roues motorisés ? (QUE-847)

Question écrite urgente de M. Boris Calame : Signalisation des voies de bus « multi-usagers » et signaux lumineux, quid du respect du cadre normatif et d'une éventuelle responsabilité de l'Etat en cas d'accident ? (QUE-848)

Question écrite urgente de M. Bertrand Buchs : Que peut-on faire pour que les nouveaux horlogers formés à l'Ecole d'horlogerie de Genève trouvent du travail sur le canton ? (QUE-849)

Question écrite urgente de M. Yvan Rochat : Centre de détention d'Aïre, quelles sont les étapes ? (QUE-850)

Question écrite urgente de M. Jean Batou : A propos du voyage « privé » de M. Pierre Maudet, de sa famille, de son chef de cabinet et d'un homme d'affaires à Abu Dhabi, du 26 au 30 novembre 2015 (QUE-851)

Question écrite urgente de M. Olivier Baud : Pourquoi contraindre les élèves ? et leurs parents ? à aller s'inscrire au cycle d'orientation (CO) ? (QUE-852)

Question écrite urgente de Mme Caroline Marti : Maisons de vacances : comment en optimiser l'usage pour le bien de leurs utilisateurs ? (QUE-853)

QUE 839 QUE 840 QUE 841 QUE 842 QUE 843 QUE 844 QUE 845 QUE 846 QUE 847 QUE 848 QUE 849 QUE 850 QUE 851 QUE 852 QUE 853

Le président. Ces questions écrites urgentes sont renvoyées au Conseil d'Etat.

Questions écrites

Le président. Vous avez également trouvé sur vos places les questions écrites suivantes:

Question écrite de M. Boris Calame : Quel bilan en 2018 pour les composts genevois ? (Q-3809)

Question écrite de M. Boris Calame : Quelles sont les mesures de dédommagement prévues pour les entreprises impactées par des chantiers d'importance réalisés par les collectivités publiques et leurs opérateurs ? (Q-3810)

Question écrite de M. Boris Calame : Une communication active et renouvelée de l'Etat, il y a urgence en la matière... (Q-3811)

Q 3809 Q 3810 Q 3811

Le président. Ces questions écrites sont renvoyées au Conseil d'Etat.

QUE 831-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Thierry Cerutti : La république des copains, quand tu me tiens par la barbichette...

Annonce: Séance du vendredi 27 avril 2018 à 16h

Cette question écrite urgente est close.

QUE 831-A

QUE 832-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Roger Deneys : Bouclier fiscal : peut-on connaître le détail de l'impact actuel réel de cette mesure ?

Annonce: Séance du vendredi 27 avril 2018 à 16h

Cette question écrite urgente est close.

QUE 832-A

QUE 833-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Stéphane Florey : Contrôle par le département de la sécurité et de l'économie des diffuseurs de courses, notamment de la société Uber, en respect de la loi sur les taxis et les voitures de transport avec chauffeur (LTVTC)

Annonce: Séance du vendredi 27 avril 2018 à 16h

Cette question écrite urgente est close.

QUE 833-A

QUE 834-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Guy Mettan : Bouchon de Bardonnex et accès aux gares du Léman Express : quid ?

Annonce: Séance du vendredi 27 avril 2018 à 16h

Cette question écrite urgente est close.

QUE 834-A

QUE 835-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Jean Romain : Statut des épreuves communes en 8e année (8P)

Annonce: Séance du vendredi 27 avril 2018 à 16h

Cette question écrite urgente est close.

QUE 835-A

QUE 836-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de Mme Isabelle Brunier : Est-ce qu'avec le départ de l'actuel président du Conseil d'Etat l'existence et l'application de règles non écrites vont cesser ?

Annonce: Séance du vendredi 27 avril 2018 à 16h

Cette question écrite urgente est close.

QUE 836-A

QUE 837-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de Mme Sarah Klopmann : Traitement des demandes d'autorisation d'exploitation LRDBHD

Annonce: Séance du vendredi 27 avril 2018 à 16h

Cette question écrite urgente est close.

QUE 837-A

QUE 838-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Olivier Baud : L'évaluation des élèves de l'enseignement spécialisé ne devrait-elle pas se faire au moyen d'un outil adéquat, correspondant aux besoins des professionnels et des familles, dans un contexte où la protection des données serait garantie, au lieu de faire les frais d'une logique bureaucratique et administrative délétère ?

Annonce: Séance du vendredi 27 avril 2018 à 16h

Cette question écrite urgente est close.

QUE 838-A

Q 3804-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite de M. Roger Deneys : 19es Assises européennes de la transition énergétique à Genève : pourquoi le Conseil d'Etat fait-il travailler des bénévoles via l'entreprise Symporg SA plutôt que de faire engager et payer ces personnes ? (Les jeunes ne sont pas des esclaves ! Ils veulent du travail, pas la charité !) (BIS)
Q 3805-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite de M. Boris Calame : Un peu de neige à Genève et les trottoirs et pistes cyclables deviennent impraticables ?
Q 3806-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite de M. Boris Calame : Un peu de neige à Genève et les trams sont bloqués. Existe-t-il un plan neige aux TPG ?
M 2358-A
Rapport de la commission des affaires communales, régionales et internationales chargée d'étudier la proposition de motion de Mmes et MM. François Baertschi, Danièle Magnin, Florian Gander, Sandra Golay, Pascal Spuhler, Jean-Marie Voumard, Christian Flury, Jean-François Girardet, Sandro Pistis, André Python, Francisco Valentin : Genève d'abord : défendons notre canton face à Berne et à Paris !
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session II des 6, 7 et 24 avril 2017.
Rapport de majorité de Mme Salika Wenger (EAG)
Rapport de minorité de M. François Baertschi (MCG)

Débat

Le président. Nous passons à la M 2358-A, que nous traitons en catégorie II, quarante minutes. Le rapport de majorité est de Mme Salika Wenger, qui pour l'heure n'est pas remplacée. Le rapport de minorité est de M. François Baertschi, à qui je passe la parole.

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Ecoutez, je remarque que la présentation du rapport est à l'image du traitement de cette motion, qui a été étudiée de manière cavalière, pour ne pas dire plus, en un temps record et sans rien examiner du tout ! Pourtant, le sujet est central: il s'agit - c'est une des invites de la motion - de ne pas dilapider l'argent versé par les contribuables genevois à l'extérieur du canton, c'est-à-dire en le donnant aux communes de France voisine au travers d'une compensation qui est tout à fait injuste et trop généreuse, au détriment, une fois de plus, de Genève. Il y a également le problème de la péréquation intercantonale. Au total, on arrive au minimum à un demi-milliard de francs - voire plus, mais la somme est déjà conséquente ! Ça veut dire que, de manière un peu générale, Genève se fait plumer, autant par la France voisine que par les cantons suisses, en raison d'une pseudo-générosité. Une pseudo-générosité ! Il faut d'ailleurs bien voir qu'on ne nous rend pas la pareille. Regardons pour l'assurance-maladie: la générosité dont on nous demande de faire preuve en Suisse en contribuant à cette péréquation qui saigne nos budgets, cette générosité, on ne nous l'accorde pas pour les primes d'assurance-maladie qui sont beaucoup plus élevées à Genève que dans les autres cantons ! Le canton de Genève continue véritablement à se fait plumer.

Nous pensions qu'il serait intéressant d'avoir une réflexion générale sur le sujet, d'autant plus qu'une pression se fait sentir de manière constante, ou s'est fait sentir de manière constante, sur la fonction publique - sur les employés de l'Etat - qui a quand même dû faire face à des tentatives répétées de coupes pendant toute la législature. L'austérité pour les uns, la générosité excessive pour les autres ! C'est une chose qui, pour les signataires de la motion, n'est pas acceptable en soi. Nous aurions voulu examiner la situation point par point, parce que ce sont des questions importantes pour le budget de l'Etat, qui devront être gérées par la nouvelle équipe du Conseil d'Etat et en particulier par la nouvelle titulaire des finances, Mme Nathalie Fontanet. Je lui souhaite bonne chance, ayant vu qu'elle n'était pas très enthousiasmée par cette fonction - et je la comprends ! Je la comprends d'autant plus qu'on n'a pas voulu affronter cette question. Bon, je dois faire un petit rectificatif: le président du Conseil d'Etat, M. Longchamp, s'en est quand même préoccupé et M. Serge Dal Busco également. Tous deux se sont préoccupés du problème de la péréquation et ont mené des négociations, mais il faut aller plus loin. C'est quand même un problème fondamental qu'il faut traiter si on veut des finances équilibrées, si on veut conserver à la fois les prestations à la population et les conditions générales de vie à Genève. Merci, Monsieur le président.

Le président. Merci, Monsieur le député. Madame Haller, souhaiteriez-vous prendre la parole maintenant ou dans un moment ? (Remarque.) Tout à fait. Je cède donc le micro à M. le député Grégoire Carasso.

M. Grégoire Carasso (S). Merci, Monsieur le président. Ce texte met à l'index la contribution de Genève à la péréquation fédérale et la compensation financière aux communes françaises. Sur le premier point, Monsieur le président, le texte enfonce une porte ouverte, puisque le Conseil d'Etat travaille de longue date à une plus juste répartition de la péréquation, expression de la solidarité intercantonale. Pour le second point, et en faisant écho au vocabulaire des auteurs - que nous condamnons dans son contexte - cette motion est carrément une faribole.

Vous le savez, aux niveaux suisse et européen, tant entre les 26 cantons que dans la plupart des régions transfrontalières, lorsqu'il y a une activité salariée et un domicile de part et d'autre de la frontière, c'est l'imposition au lieu de domicile qui prévaut. C'est malheureux pour Genève, car les confédérés et notamment les quelque 30 000 Vaudois qui viennent travailler à Genève ne paient pas d'impôts ici mais, selon le principe évoqué, sur leur lieu de domicile. Toutefois, et c'est là l'absurdité de ce texte, grâce à l'accord de 1973 entre Genève, Berne et Paris - la France - Genève connaît un régime d'exception. Les salariés qui habitent en France sont en effet imposés à la source, donc dans notre canton, par le biais d'un prélèvement sur la masse salariale dont une partie, soit 1%, est reversée non à Paris, mais directement aux communes frontalières afin que ces ressources bénéficient à l'ensemble de la région. Pour Genève, remettre ce système en cause serait véritablement se tirer une balle dans le pied. Les Genevois ne sont d'ailleurs pas dupes puisqu'ils n'ont pas même donné le nombre suffisant de signatures à une initiative du MCG qui cherchait à remettre ce système en question en 2016.

Le résultat des dernières élections, aux yeux du groupe socialiste, montre aussi que le fonds de commerce anti-frontaliers commence à s'user, pour la bonne et simple raison que la région fait partie de notre ADN. La rejeter en cherchant des boucs émissaires n'apporte aucune solution. Le groupe socialiste pense au contraire que la région doit être soutenue, tant pour son dynamisme économique qu'au regard de la solidarité historique à laquelle notre collègue Alberto Velasco faisait référence pas plus tard qu'hier soir. Le groupe socialiste pense que la région doit être soutenue par le développement d'infrastructures de qualité. Le Léman Express en sera naturellement la colonne vertébrale dont nous manquons actuellement. Au vu du nombre de logements prévu, le projet Praille-Acacias-Vernets apportera aussi une contribution essentielle en matière d'infrastructures. Puisqu'une votation à ce sujet a lieu le 10 juin prochain, je vous invite à voter oui au PAV - c'est aussi un enjeu transfrontalier, un enjeu pour la région. En conclusion, Monsieur le président, vous l'aurez compris, le groupe socialiste vous invite avec conviction à rejeter cette motion, absurde pour une partie et nuisible pour une autre. (Quelques applaudissements.)

M. François Lance (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, cette proposition de motion demande au Conseil d'Etat de poursuivre les négociations à Berne afin de revoir le montant de la péréquation intercantonale, et d'entreprendre une réforme de la rétrocession aux communes frontalières qui, selon les auteurs de cette motion, utilisent les sommes versées à mauvais escient. D'une part, après l'examen de ce texte en commission, le groupe PDC estime que le Conseil d'Etat mène déjà des négociations avec les autorités fédérales concernant la révision de la péréquation et qu'il est inutile de revenir là-dessus avec une motion. D'autre part, la commission a traité durant plusieurs séances le rapport du Conseil d'Etat sur la région et la question de la rétrocession a été abordée et étudiée à plusieurs reprises. Il s'avère que les communes frontalières bénéficiaires doivent déjà justifier de l'utilisation des fonds qu'elles reçoivent de manière très précise. Nous estimons donc que les invites de cette motion sont superflues; le groupe PDC refusera cet objet et continuera à soutenir la région. (Quelques applaudissements.)

Mme Simone de Montmollin (PLR). Chers collègues, contrairement à ce que dit le rapporteur de minorité, les invites de cette proposition de motion ont déjà fait l'objet de moult débats dans cette enceinte lors de la précédente législature, notamment à l'occasion du traitement du rapport du Conseil d'Etat sur la politique régionale, que ce Grand Conseil a très largement soutenu. Ces thèmes faisaient l'objet du rapport de minorité du MCG et ont donc déjà reçu le refus de ce Grand Conseil d'entrer en matière. Il est donc faux de dire qu'ils n'ont pas été traités correctement.

La motivation de l'auteur de ce texte serait aujourd'hui purement financière, dans la perspective d'équilibrer les comptes et le budget de l'Etat. On se réjouit de voir la position et le sens des responsabilités de son groupe lorsqu'on traitera le budget 2019, et s'il aura la même priorité à vouloir assurer son équilibre.

En fait, les motivations qui sous-tendent cette motion sont une fois de plus plutôt d'ordre identitaire - une tentative de repli sur soi, un manque de vision quant à la solidarité régionale et confédérale, seule garante de cohésion entre les populations. C'est regrettable, et le PLR ne peut pas y souscrire. On considère la majorité de la commission qui a refusé cette motion comme, je cite, «une large coalition des ennemis de la liberté» qui «démontre la médiocrité de certains», ou encore, on voit dans ce refus, je cite à nouveau, le fait de «certaines femmes députées [...] incapables de faire deux choses à la fois»: comprenne qui pourra, mais soyez certains que pour le PLR, ces propos sont pour le moins paradoxaux, voire déplacés.

Sur le fond, on l'a dit, les trois invites ont déjà fait l'objet d'un traitement approfondi et exhaustif. S'agissant de la péréquation intercantonale, le sujet a été traité de manière satisfaisante par les Chambres, en collaboration avec les 26 cantons, et il n'y a pas lieu pour le canton de Genève d'en remettre encore une couche à Berne. Sur la rétrocession faite à la France, faudra-t-il répéter combien la convention de 1973 qui nous lie est favorable à Genève et combien les cantons soumis à celle de 1983 nous l'envient ? Vouloir la renégocier est pour le moins suicidaire; là aussi, la question a donc été tranchée. S'agissant de la bonne gestion des deniers transmis à la France, expliquez-moi comment un parti comme le MCG peut proposer qu'un Etat s'immisce dans la gestion financière d'un autre Etat ! Là encore, je crois que le Conseil d'Etat, par le rapport qu'il a fait sur ces questions, a été tout à fait clair quant au suivi des fonds transmis à la France voisine: ils sont utilisés à bon escient et surtout par les communes concernées, ce qui n'est par exemple pas le cas des fonds versés par le Tessin dans le cadre des accords avec l'Italie.

Je rappellerai enfin que ce parlement a voté cette politique régionale et que le PLR est attaché à son développement - à un développement harmonieux. J'aimerais citer ici le consul général de France, M. Olivier Mauvisseau, qui disait à l'occasion de la fête nationale 2017 que «c'est cette proximité qui, avant toute chose, et bien au-delà des aléas politiques, doit constituer le ciment avec lequel façonner l'espace transfrontalier qui est, qu'on le veuille ou non, notre cadre de vie» commun. Le PLR vous encourage à refuser cette motion une fois pour toutes. Je vous remercie. (Quelques applaudissements.)

M. Philippe Poget (Ve). Chers collègues, je vais reprendre très rapidement ce qui a déjà été dit par tous mes préopinants. Les commissaires ont vu qu'il n'était pas du tout judicieux de tenter de renégocier la rétrocession de la partie que nous reversons sur l'impôt à la source. Les cantons qui l'ont fait s'en mordent les doigts; si on pense à l'exemple du Tessin, on voit bien que ce n'était pas une très bonne idée. Je pense que nous sommes plutôt favorisés et que ce n'est pas le moment de changer cette convention de 1973. Concernant ce que nous payons à la Confédération, à mon sens, le Conseil d'Etat fait tout ce qu'il peut pour bien négocier et arriver à des solutions acceptables pour le canton. Nous soutiendrons donc le canton et le Conseil d'Etat dans ces négociations.

Un point me dérange particulièrement: la motion propose quasiment une ingérence dans la manière dont les communes voisines gèrent les fonds qu'elles reçoivent. A mon avis, on n'accepterait pas que les voisins veuillent s'ingérer et savoir comment nous gérons, nous, nos propres fonds. Le rapport du Conseil d'Etat a par ailleurs donné très clairement le détail des dépenses et de la manière dont elles ont été imputées en France; nous avons l'assurance que ces fonds sont bien utilisés et nous n'allons certainement pas demander plus à ce niveau. C'est encore une fois une attaque contre la région, et les Verts aussi soutiennent vraiment le développement de la région. C'est également à ce titre-là que nous vous proposons de refuser clairement cette motion. Je vous remercie.

Une voix. Bravo !

M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, drôle de débat que nous avons là aujourd'hui. On peut bien en parler. On va commencer par la péréquation intercantonale: effectivement, Genève paie ! Et, sauf erreur, Genève est le seul canton romand qui paie encore. Même le canton de Vaud ne paie plus maintenant; il touche de l'argent. Expliquez-moi les différences entre Vaud et Genève ! Il y a donc quelque chose à faire. Je ne dis pas que le Conseil d'Etat ne fait rien, et il semble d'ailleurs que le PLR a aussi déposé un texte: on dirait que ceux du MCG puent pour le PLR, alors il ne veut pas les voter.

Je crois qu'il y a quelque chose à faire. Il n'est quand même pas normal qu'un certain nombre de cantons - je ne vais en citer aucun mais certains se reconnaîtront peut-être - aient une fiscalité extrêmement basse et puis qu'ils se retrouvent du coup à recevoir de l'argent de la Confédération. Enfin, pas de la Confédération, mais des cantons, à travers la péréquation intercantonale. Ce n'est pas normal ! Il y a quelque chose qui ne marche pas dans le système actuel et il doit par conséquent être révisé. C'est évidemment compliqué, parce que le nombre de ceux qui paient est de plus en plus restreint et que ceux qui reçoivent sont les plus nombreux ! C'est comme dans ce parlement: il y a une majorité écrasante qui fait que comme on touche quelque chose, on ne veut rien changer, on ne veut pas régler le problème. Ce sont donc les fondements mêmes de cette péréquation qui doivent être révisés. Il faut que le Conseil d'Etat travaille sans relâche - sans relâche - à amener des propositions pour que les principes mécaniques de cette péréquation intercantonale soient revus; il en va aussi de la cohésion de la Suisse, et je pense que ça a son importance.

Concernant la contribution à la France, on peut tout dire sur le sujet ! Genève a en effet une convention particulière; dans les autres cantons, les conditions sont inversées. C'est Genève qui a raison puisque, selon les directives de l'OCDE, c'est sur le lieu de travail que doit être imposé le revenu du travail. Mais la France a des obligations ! Nous ne nous occupons pas de la fiscalité française, mais de ce que la France fait de l'argent que Genève lui consent à travers cette convention. Elle est censée nous indiquer régulièrement, chaque année, comment il est dépensé dans chaque commune et pour quoi - il y a des règles très précises à respecter. Mais il ne me semble pas l'avoir vu chaque année; nous avons reçu cela une fois ou l'autre, en tout cas deux ou trois fois mais pas souvent, et pendant longtemps nous n'avons rien reçu du tout ! Je pense que la France a des obligations, et elle devrait les respecter ! Ce qu'elle ne fait pas !

Deuxième chose: oui, cette convention peut être renégociée. Bien entendu qu'elle doit être renégociée ! Il n'y a pas d'obstacle juridique ou autre à rediscuter cette convention; il n'y a pas de raison que Genève soit si pénalisée et verse 280 millions par année. Ce ne sont pas 2,75 F, ce sont 280 millions ! Les communes paient aussi: la Ville de Genève verse 30 millions ! Je vous le dis en passant, comme ça, vous le savez. Tout ça péjore les budgets. Alors peut-être oui à une contribution, mais à une contribution révisée. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Parce que je ne pense pas qu'on va refaire tous les giratoires et toutes les salles communales de toutes les communes françaises tous les deux ans ! A mon avis, il y a des choses qui doivent pouvoir être remises sur le tapis sans qu'il y ait forcément un risque. Et je ne crois pas qu'il y ait de risque juridique, même si certains avancent qu'au lieu d'encaisser l'impôt et de faire une rétrocession, Genève ne l'encaissera du coup plus: ce sera la France...

Le président. C'est terminé, Monsieur le député.

M. Daniel Sormanni. J'ai tout de suite terminé. ...ce sera la France...

Le président. Non, pas tout de suite: maintenant, Monsieur le député.

M. Daniel Sormanni. Oui, deux secondes quand même ! Laissez-moi conclure, Monsieur le président. Je crois que ce n'est pas raisonnable et je vous invite, Mesdames et Messieurs, à voter cette motion... (Le micro de l'orateur est coupé. Commentaires. Rires.)

Le président. Je passe la parole à Mme Jocelyne Haller. (Un instant s'écoule.) Vous avez la parole, Madame la députée Haller.

Mme Jocelyne Haller (EAG), rapporteuse de majorité ad interim. Je vous remercie, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, je vous prie de m'excuser, je remplace au pied levé Mme Wenger et j'ai un peu de peine à reconstituer les débats qui ont agité la commission sur cette question. Ce que je constate, à tout le moins, c'est que la majorité de la CACRI n'a pas retenu l'invitation à ne pas «dilapider l'argent des contribuables» en ne respectant pas, au prétexte des difficultés budgétaires de notre canton, les engagements envers la France voisine et les autres cantons. A ce qu'a dit M. Baertschi tout à l'heure - assurer les recettes de l'Etat, rechercher un équilibre financier pour Genève, garantir la couverture des besoins de la population - je réponds certes oui ! Mais en aucun cas au prix de la solidarité confédérale, pas plus qu'en rallumant les feux d'une prétendue menace frontalière.

Pour le reste, il nous paraît particulièrement présomptueux et douteux de qualifier de dilapidation les effets de la péréquation et de la rétrocession à la France voisine. Il s'agit d'une immixtion dans la gestion d'autres Etats, ce qui n'est pas acceptable et que nous ne tolérerions pas à notre encontre.

Ce que j'ai constaté dans ce rapport, c'est que d'aucuns admettent que les accords établis avec la France ne sont finalement pas en notre défaveur, et qu'il n'y a pas lieu de jouer les Calimero ni de considérer que nous pouvons utiliser cet élément pour essayer d'équilibrer un budget dont nous devons sans doute chercher les déséquilibres ailleurs. En l'état, la majorité vous invite fermement à rejeter cette proposition de motion.

Le président. Merci, Madame la députée. Monsieur Baertschi, vous avez la parole pour dix secondes.

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Très rapidement: quand on voit les primes d'assurance-maladie, quand on voit comme les prestations ont été rognées, quand on voit que les annuités n'ont pas été attribuées certaines années, on doit se poser des questions...

Le président. C'est terminé.

M. François Baertschi. ...on doit se poser ces questions !

Le président. Je vous remercie. Madame Jocelyne Haller, vous avez encore un petit peu de temps de parole. Je vous cède le micro.

Mme Jocelyne Haller (EAG), rapporteuse de majorité ad interim. J'aimerais simplement que l'on prenne garde de ne pas mélanger les sujets et, à plus forte raison, de ne pas profiter de cette occasion pour essayer de jouer la fonction publique et les besoins de la population contre les frontaliers. Parce que c'est de ça qu'il s'agit; il s'agit d'un discours que nous connaissons bien ici, auquel nous ne pouvons pas consentir. Je réfute donc avec énergie les derniers propos de M. Baertschi ! (Applaudissements. Remarque.)

M. François Longchamp, président du Conseil d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, cette proposition de motion aborde deux sujets bien distincts: la péréquation intercantonale d'un côté, la compensation financière vis-à-vis de la France voisine de l'autre. On essaie ici d'accréditer l'idée que nos problèmes financiers viennent de ces différents éléments. En effet, on peut constater que le canton de Genève - un canton opulent à l'échelle de la Suisse et de la région - applique au pied de la lettre notre devise nationale: «un pour tous, tous pour un». Il est de fait le seul canton romand et l'un des rares cantons suisses à contribuer à la péréquation - les contributeurs sont, dans l'ordre, Zoug, Genève, Zurich, Bâle, Schwytz et Nidwald. Il le fait sur la base de critères qui vous sont connus et vous ont été expliqués en commission, reposant sur la capacité à produire des recettes fiscales; l'élément déterminant est en gros le dynamisme économique, la capacité que nous avons à collecter des impôts.

J'aimerais ici rendre hommage à mon collègue Serge Dal Busco, pas seulement parce qu'il est le seul avec moi à siéger sur le banc du Conseil d'Etat, mais parce qu'il a consacré il y a deux ans une partie de ses vacances d'été à participer à d'obscures séances dans d'obscurs cantons pour aller défendre... (Commentaires.) Pardon ? (Remarque.) Dans d'obscurs cantons, oui: ce sont des cantons très éloignés... (Rires.) ...des cantons plus petits que la commune de Vernier, qui, dans un pays fédéral, pèsent évidemment lourd, puisque chaque canton a droit à une voix. Quand vous prenez la liste des cantons que j'ai tout à l'heure cités et que vous additionnez leur population, vous arrivez sans conteste à quelque chose d'assez puissant; Bâle-Ville, Zurich, Zoug - canton plus petit mais très riche - et Genève englobent déjà une part de population importante. Mais la négociation est un peu délicate quand vous avez en face des cantons comme Appenzell - c'est là... (Remarque.) ...que M. Dal Busco avait dû se rendre - qui compte moins d'habitants que la commune de Vernier, qui n'est elle-même pas la plus grande du canton. M. Dal Busco, seul représentant romand dans ce groupe suisse allemand où l'on parle avec d'obscurs concepts qui nécessitent... (Commentaires.)

Une voix. Encore ?

M. François Longchamp. Oui, d'obscurs concepts, parce que quand on parle de la péréquation financière... (Commentaires. Rires.) ...et qu'on doit traduire ça en français, eh bien, je vous assure qu'il faut brillamment maîtriser le suisse allemand... (Rires. Remarque.) ...ce que notre collègue a fait ! Il a défendu la cause des cantons contributeurs et a obtenu des résultats significatifs: la conférence des cantons a ratifié les propositions de la commission dans laquelle Serge Dal Busco siégeait, malgré ce rapport de force qui nous est totalement défavorable, et à partir de l'exercice 2020... C'est bien ça, n'est-ce pas ? (M. François Longchamp s'adresse à M. Serge Dal Busco. Remarque.) 2021 ! Entrée en vigueur de la loi en 2020 pour l'exercice 2021. A partir de ce moment, donc, il y aura des corrections assez significatives de la facture des cantons contributeurs, qui va baisser. Mais j'aimerais vous rappeler que nous sommes effectivement six sur vingt-six.

J'ai déjà abusé sur ce point, Monsieur le président, en lui consacrant la moitié de mon temps de parole, et je renonce, Monsieur Sormanni, à répondre à votre question relative aux différences - puisque vous estimez qu'il n'y en a pas - entre le canton de Vaud et le canton de Genève. Ce parlement doit me rendre hommage à 19h, je ne souhaiterais pas louper ce rendez-vous... (Rires. Commentaires.) ...en vous expliquant pendant deux heures et demie les différences entre les cantons de Genève et de Vaud. (Rires.) Elles sont très importantes; le canton de Vaud reçoit notamment chaque début d'année de l'argent alors que nous signons, nous, des chèques à son intention et à l'intention de tous les autres. Je vous assure sincèrement que M. Dal Busco a donné le meilleur de lui-même, et les résultats obtenus - évidemment avec le soutien, il faut le dire aussi, des cantons de Zurich et de Bâle - ont été à la hauteur des espoirs que nous avions placés en lui et que le peuple vient d'ailleurs de confirmer en lui accordant à nouveau sa confiance !

Deuxième sujet: la compensation financière vis-à-vis des communes et départements français. Cet accord remonte à 1973 et n'a pas été conclu entre le canton de Genève et les départements, respectivement les communes: il s'agit d'un accord entre la Confédération suisse et la République française. La République française est un Etat centralisé, jacobin, dans lequel le pouvoir est à Paris, alors que la Confédération suisse est un Etat fédéral dont les compétences se limitent à celles que les cantons lui ont cédées. La Confédération a défendu nos intérêts et le canton de Genève, qui lui a demandé en 1973 de négocier en ce sens, a obtenu un accord qui lui est en réalité extrêmement favorable, Monsieur le député Sormanni. Pourquoi extrêmement favorable ? D'abord parce qu'il permet que Genève prélève les impôts et les reverse ensuite aux autorités françaises, alors que l'accord général liant tous les autres cantons à la France - onze ont des frontaliers français - prévoit que c'est la France qui prélève les impôts pour les reverser ensuite aux cantons. L'avantage de notre situation ne vous aura pas échappé - Monsieur Baertschi, vous avez déposé il y a quelques années une motion pour nous demander de voler au secours du canton de Vaud puisque celui-ci n'encaissait plus l'argent des Français: ces derniers avaient tellement de retard dans le versement de la compensation qu'il y avait quasiment une année de décalage entre les différents exercices. Dieu merci, dans le cadre de la péréquation intercantonale, Genève a pourvu cette année-là aux besoins de trésorerie du canton de Vaud comme il le fait d'ailleurs chaque année. Cet accord nous est donc déjà très favorable du point de vue de la méthode; il l'est également sur le plan des taux. Il l'est tellement que la population d'un autre canton suisse, sous l'impulsion de l'UDC locale, a lancé une initiative pour que s'applique sur son territoire le même accord qu'à Genève plutôt que l'accord fiscal général qui prévaut pour les autres cantons. Si notre accord était si mauvais que cela, je vous assure que les autres cantons ne se dépêcheraient pas d'essayer de le copier.

Enfin, quand on nous explique que cet accord n'est pas transparent, que l'utilisation des sommes n'est pas claire et qu'elle n'est pas traçable, je dis non. Non, Monsieur Sormanni ! Nous avons publié régulièrement la totalité des comptes depuis que je suis devenu président du Conseil d'Etat: je les ai demandés en application d'un article de l'accord qui, je vous le concède, n'avait jamais été appliqué jusqu'alors, et nous les avons obtenus. Nous avons remis aux députés et à tout citoyen intéressé la totalité de ces comptes, département par département, commune par commune, en fonction de la population et de l'importance des recettes fiscales qui y sont prélevées. Nous voyons donc très exactement comment ces fonds sont utilisés: ils permettent des investissements qui nous sont favorables à nous aussi, parce qu'un certain nombre d'investissements nécessaires dans ces différentes communes profite en fin de compte à l'ensemble de l'agglomération. Ces chiffres ont été donnés, communiqués; je me suis moi-même rendu devant le Conseil général du département de l'Ain -  l'organe qui à l'époque s'en occupait - pour l'inciter à modifier certaines règles et l'encourager à privilégier le Pays de Gex par rapport au reste du département. Tout cela a été fait. Ces chiffres sont transparents et clairs, cet accord est juste. Il est tellement juste que les autres cantons nous l'envient. C'est un accord qui permet à cette région de se construire et de se développer, c'est un accord que le Conseil d'Etat a toujours défendu et défendra toujours, Monsieur Baertschi, malgré vos appels démagogiques à expliquer à toute personne qui dépend du budget de l'Etat que les sommes qui lui sont nécessaires ne sont pas accordées à cause de cela. Vous savez très bien que ce n'est pas le cas.

Mesdames et Messieurs, au nom du Conseil d'Etat, je vous invite donc à refuser cet objet, parce que Genève est un canton suisse, fier de l'être - nous avons renouvelé avec vigueur notre attachement à la Confédération lors des manifestations du bicentenaire - et, n'en déplaise à une partie de ce parlement, parce que nous nous trouvons au coeur d'une région qui existait déjà en 1602, du temps de l'Escalade, et qui profite à l'ensemble des collectivités et des citoyens suisses ou français qui y habitent. Cette motion ne mange pas de pain, disiez-vous, Monsieur Sormanni; cela me rappelle le sketch de Fernand Raynaud sur le boulanger. (Rires. Remarque.) Vous vous en souvenez ? «Je m'appelle Koulakerstersky du côté de ma mère et Piazanobenditti du côté d'un copain de mon père.» (Rires.) C'était le Français qui parlait ainsi et qui s'attaquait à un éminent concitoyen étranger de sa commune parce qu'il venait manger le pain des Français, jusqu'au jour où ce type est parti et où on s'est aperçu qu'il était boulanger ! (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le président du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons au vote.

Mise aux voix, la proposition de motion 2358 est rejetée par 80 non contre 17 oui.

M 2397-A
Rapport de la commission de l'économie chargée d'étudier la proposition de motion de MM. Patrick Lussi, Michel Baud, Marc Falquet, Bernhard Riedweg, Stéphane Florey, Christo Ivanov, André Pfeffer : Emploi : arrêtons les discriminations envers nos concitoyens astreints à des obligations militaires !
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session XI des 25 et 26 janvier 2018.
Rapport de majorité de M. Jean-Marc Guinchard (PDC)
Rapport de minorité de M. André Pfeffer (UDC)

Débat

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous poursuivons nos débats avec la M 2397-A, classée en catégorie II, trente minutes. Je passe la parole à M. le rapporteur de majorité Jean-Marc Guinchard.

M. Jean-Marc Guinchard (PDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, chers collègues, sous la présidence experte de M. le député Jacques Béné, la commission de l'économie a consacré tout ou partie de quatre de ses séances à examiner le contenu de cette motion. Je tiens à cet égard à remercier encore une fois Mme Noémie Pauli, procès-verbaliste, pour la rigueur et l'exactitude du travail qu'elle nous transmet.

Je dirai en préambule que nous pourrions peut-être porter a priori un regard assez positif sur les objectifs de la motion; mais, au fil des différentes auditions que nous avons organisées, les membres de la commission se sont très vite aperçus qu'il était extrêmement compliqué de la mettre en oeuvre. Il s'agit en effet d'une compétence qui est fédérale par essence et qui, de plus, échappe complètement aux dispositions du droit du travail: précisément parce qu'il y a une discrimination à l'embauche, nous ne sommes pas dans le domaine du contrat de travail - il faudrait intervenir avant la signature de celui-ci, ce qui paraît extrêmement difficile à réaliser.

Au cours des travaux de notre commission, la possibilité d'une révision de la loi sur l'égalité a été envisagée, ce qui pourrait parfaitement se concevoir, mais il est apparu aussi que cette modification pourrait être très problématique, dans la mesure où des propositions similaires ont systématiquement été refusées par le Parlement fédéral. A cet égard, je doute qu'une xième résolution de plus émanant du Grand Conseil genevois soit acceptée à Berne, puisque, comme vous le savez, un très petit pourcentage de ces résolutions font l'objet d'une attention de la part des Chambres.

Nous avons examiné également, en auditionnant l'office cantonal de l'inspection et des relations du travail - l'OCIRT - s'il n'était pas possible que celui-ci intervienne, or ce n'est pas le cas: cet office a clairement expliqué que son intervention n'était pas possible dans ce contexte. Dès lors, il s'agirait plutôt d'inciter le Conseil d'Etat à procéder à des actions sensibilisatrices qui pourraient être semblables à celles qu'il mène en vue de protéger et de mettre en valeur les travailleurs considérés comme âgés en rappelant que certaines pratiques peuvent constituer des discriminations.

En conclusion - je reprendrai peut-être la parole plus tard - si cette motion est dictée par un certain nombre de sentiments respectueux de nos institutions, en l'occurrence l'armée, les travaux de la commission montrent clairement...

Le président. Vous parlez sur le temps de votre groupe, Monsieur le rapporteur.

M. Jean-Marc Guinchard. Tout à fait, merci, Monsieur le président. ...qu'elle cumule les obstacles: non-conformité avec le droit supérieur, difficulté d'application et de contrôle, liste de discriminations à développer. Il faut garder à l'esprit qu'une campagne d'information large pourrait suffire dans ce domaine. Je déplore enfin le côté réactif de cette motion, puisque le premier signataire a indiqué qu'il avait simplement vu une annonce... (L'orateur insiste sur le mot «une».) ...qui pouvait revêtir ce caractère discriminatoire et que c'est sur cette base que nous avons passé des heures à travailler. Je vous remercie de votre attention.

M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de minorité. Effectivement, une annonce d'emploi a choqué beaucoup de nos concitoyens. Celle-ci mentionnait spécifiquement que les citoyens soumis à des obligations militaires étaient exclus. Cette dérive doit être combattue, d'autant plus qu'elle est pratiquée depuis longtemps. Même si ce critère figure rarement dans une annonce publiée, certaines entreprises, surtout des sociétés étrangères, appliquent régulièrement cette discrimination. Cette situation est absolument inacceptable. Nos jeunes rencontrent déjà des difficultés pour entrer sur le marché du travail et sont, pour beaucoup trop d'entre eux, durement touchés par le chômage. Cette motion vise à ce que l'Etat de Genève prenne conscience de ce problème et prenne des mesures. Nous voulons que l'Etat stoppe immédiatement cette injustice au sein de l'administration cantonale et au sein des instituts subventionnés. En outre, l'Etat doit tout entreprendre pour informer et renseigner les entreprises privées afin que ces discriminations envers nos concitoyens astreints aux obligations militaires cessent. A Genève, il existe de très nombreuses sociétés et instituts étrangers et il est absolument nécessaire que ces employeurs connaissent les responsabilités et devoirs de nos concitoyens. Cette motion a un objectif réaliste; appliquer des règles au sein des services de l'Etat est tout à fait faisable. Par ailleurs, elle demande simplement d'améliorer l'information et les renseignements auprès des sociétés privées et surtout des sociétés étrangères, et cela, c'est une tâche absolument nécessaire, vu que beaucoup de nos jeunes concitoyens sont discriminés.

M. François Lefort (Ve). Cette motion demande au Conseil d'Etat de mettre fin à des pratiques discriminatoires qui précisent comme conditions d'embauche l'absence d'obligations militaires. Partant d'une annonce parue dans la presse - une unique annonce - l'UDC aborde une problématique importante, une situation qui n'est pas acceptable et qui doit être améliorée. C'est le problème de pratiques discriminatoires grises ou moins grises, cachées ou ouvertes. Dans le cas cité, ce sont des hommes soumis à des obligations militaires. Cela pourrait être le cas de frontaliers, comme constaté récemment dans des annonces parues à Genève. Ce n'est jamais le cas des femmes enceintes, lesquelles subissent une discrimination beaucoup plus pernicieuse, puisque des femmes au bénéfice d'un contrat à durée déterminée ne se voient pas renouveler leur contrat par certains employeurs lorsque ceux-ci apprennent qu'une grossesse est en cours. Dans ce cas, comme dans celui des hommes soumis aux obligations militaires, ces personnes n'ont aucun argument juridique pour s'opposer à cette situation, car il n'existe pas de droit à voir son contrat renouvelé, comme il n'existe pas de droit à être engagé.

Et pourquoi cela n'existe-t-il pas ? Parce que nous n'avons pas de base légale. La loi fédérale sur l'égalité n'est pas une base légale suffisante pour interdire les offres d'emploi discriminatoires, que ce soit en raison du sexe ou pour d'autres caractères sexuels secondaires, comme le fait d'être soumis aux obligations militaires, parce que l'Assemblée fédérale n'a pas voulu inclure l'offre d'emploi dans la liste des discriminations interdites, alors que cela avait été proposé par le Conseil fédéral ! La discrimination à l'embauche, elle, bien sûr, est interdite; mais à l'embauche, pas dans l'offre d'emploi. Il faut donc qu'une personne fasse acte de candidature pour que les sanctions prévues justement par la LEg puissent entrer en ligne de compte, pour autant que cette personne décide encore d'agir auprès des tribunaux, se dise atteinte dans sa personnalité, etc., etc., pour prouver qu'elle a subi un dommage.

Vous voyez, la situation est un peu compliquée, c'est extrêmement difficile, et la protection contre les offres d'emploi discriminatoires est quasiment inexistante; oui, elle est tout à fait inexistante. Nous n'avons donc actuellement aucune possibilité de mettre fin à ces discriminations, pas non plus par le droit cantonal. Il faudrait réviser la loi sur l'égalité pour interdire, dans les offres d'emploi, toute possibilité de discrimination. Cette problématique doit donc être traitée à nouveau, et rapidement, au Parlement fédéral, car cela relève de sa compétence.

Nous avons un message pour l'UDC genevoise. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Nous la remercions d'avance de transmettre à sa fraction fédérale son souci de la discrimination dans les offres d'emploi - souci que nous, les Verts, à Genève, nous partageons, et que la fraction Verte à Berne partage aussi; celle-ci sera d'ailleurs un grand soutien de l'UDC pour revenir à la proposition initiale du Conseil fédéral que l'UDC fédérale avait refusée. Pourquoi ? Pour mettre fin à toute discrimination dans les offres d'emploi. Pour le reste, nous faisons le même constat que le rapport de majorité: il n'y a pas de possibilité de...

Le président. C'est terminé, Monsieur le député.

M. François Lefort. Merci. Rapidement sur les amendements: nous accepterons les amendements du parti socialiste...

Le président. Merci.

M. François Lefort. ...juste pour vérifier qu'il est quand même possible de faire quelque chose à ce niveau-là.

M. Christian Flury (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, le concept du citoyen-soldat est un des fondements de notre pays, de notre Confédération. Oui, le jeune Suisse est astreint aux obligations militaires. Il peut y satisfaire de plusieurs manières: soit avec une école de recrue de quelques mois, suivie de quelques cours de répétition, jusqu'à sa libération à l'âge de 30 ou 32 ans, ou alors en optant pour la filière en service long, à savoir une année entière sous les drapeaux. Enfin, s'il suit les cours de cadre de l'armée et accède à un grade d'officier, sa durée de service sera allongée et il ne sera libéré que vers l'âge de 50 ans, voire plus. En revanche, le jeune qui ne remplit pas ses obligations militaires est pénalisé par l'obligation de verser une taxe, quelques pour-cent prélevés sur son salaire brut jusqu'à l'âge correspondant à sa libération.

A l'heure où le MCG promeut l'engagement prioritaire de résidents genevois, il est inadmissible que des annonces mentionnant «pas d'obligations militaires pour les candidats masculins» puissent être publiées dans les journaux locaux. C'est clairement une discrimination à l'embauche des jeunes Suisses qui servent leur pays, notre patrie ! C'est également une dérive de nature à favoriser l'embauche d'étrangers, domiciliés sur sol genevois ou non. Genevois, réveillez-vous avant qu'il ne soit trop tard ! Nous invitons le Conseil d'Etat à adapter la législation genevoise afin de mettre un terme à la publication de ces offres d'emploi discriminatoires envers les jeunes qui servent leur pays. Le groupe MCG vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, à adresser cette motion au Conseil d'Etat. Je vous remercie.

Mme Jocelyne Haller (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, vous connaissez l'inclination de mon groupe à s'ériger assez systématiquement contre toute discrimination; c'est d'ailleurs pour cela que nous avons considéré cette motion avec une certaine circonspection. Or, finalement, il s'est avéré qu'elle ne reposait que sur la parution d'une annonce et que selon les représentants du bureau de l'égalité, il n'y avait pas de situation avérée de discrimination pour ce motif.

C'est vrai que notre premier réflexe a été de dire: ce n'est pas parce que cette discrimination est particulièrement ciblée qu'il ne faudrait pas la dénoncer. Oui ! Mais à ce moment-là, comme d'autres l'ont dit avant moi, il conviendrait d'élargir cette motion à toutes les discriminations; il n'y en a pas qui soit plus acceptable que les autres, il n'y a pas de hiérarchie à établir entre les discriminations. D'autant plus que nous n'avons pas entendu autant de zèle quand il s'agissait d'autres discriminations d'ordre politique, syndical, de genre ou d'orientation sexuelle ! Combien de fois des femmes se sont vu poser la question «êtes-vous enceinte» ou «avez-vous l'intention d'avoir un enfant bientôt» ? Ces questions sont tout à fait illégales, mais nombre d'employeurs ne se privent pas de les poser et peu de gens protestent: nous n'avons pas vu de texte ici à ce propos, ou en tout cas pas depuis un moment.

Pour nous, la seule idée qui peut être intéressante dans la démarche qui nous est proposée, c'est d'élargir cette proscription des discriminations à toutes les discriminations et c'est pour cela que nous accepterons bien volontiers l'amendement proposé par MM. de Sainte Marie et Mizrahi. A défaut de l'acceptation de cet amendement, nous vous inviterons à rejeter cette motion. Je vous remercie.

M. Romain de Sainte Marie (S). Effectivement, cette motion est quelque part piquante, et M. Flury l'a parfaitement montré: à vouloir condamner une discrimination, on la remplace par une autre. Selon ce qui a été dit précédemment, il s'agit de privilégier l'embauche des Genevois en discriminant les personnes selon leur lieu d'origine, en disant «les Genevois d'abord, les étrangers dehors». C'est cela qui est terrible dans cette motion - qui vient de l'UDC et non du MCG, mais vous me direz, c'est presque bonnet blanc et blanc bonnet - cette discrimination que l'on souhaite combattre dans cette motion, qui provient d'un parti qui, à longueur d'année, encourage ce type de discours ! On l'a vu lors de campagnes de votations pour des initiatives qui prônaient des discriminations en fonction du lieu d'origine ou de l'appartenance religieuse, stigmatisant certaines parties de la population. Ici, s'attaquer à cette discrimination... Car c'en est une, mais elle est minime, Mme Haller l'a très justement rappelé; on l'a constaté également lors des travaux de la commission de l'économie: aucun cas de ce type de discrimination n'avait été rapporté au bureau de promotion de l'égalité. En revanche, comme Mme Haller l'a très bien exprimé, des cas de discrimination à l'embauche pour des femmes en raison de questions sur la maternité notamment sont beaucoup plus fréquents et sont problématiques tant sur le plan cantonal que fédéral.

Par conséquent, et c'est la volonté de notre amendement, il convient de ne surtout pas s'attaquer à une unique discrimination dans cette proposition de motion. De plus, au regard des discours qui remplacent une discrimination par une autre, ce serait une erreur que d'accepter ce texte. Non, à ce moment-là, s'il faut s'attaquer à une discrimination, il faut aussi s'attaquer à toutes les autres, quelles qu'elles soient, il faut agir de façon proactive au niveau cantonal tant qu'on le peut, et cela - je laisserai M. Mizrahi s'expliquer sur ce point - sur des aspects juridiques qui aujourd'hui existent déjà et nous permettent d'agir efficacement contre les discriminations. Je vous remercie.

M. Serge Hiltpold (PLR). J'aimerais tout d'abord revenir sur les propos de M. de Sainte Marie que j'accepte volontiers, en tout cas s'agissant des plaintes. Lors de son audition, Mme Fry a relevé que le bureau de la promotion de l'égalité n'avait reçu aucune plainte d'homme qui se serait vu discriminé pour ses obligations militaires. La vraie problématique et le coeur du sujet, c'est que le Parlement fédéral n'a pas souhaité inclure l'offre d'emploi dans les discriminations à l'embauche. Le sujet est là, il n'est pas ailleurs. Cette motion, qu'elle soit amendée ou non, est contraire au droit fédéral. C'est la première chose, et c'est pourquoi je vous demande de rejeter les amendements, même si ceux-ci sont, en théorie, frappés au coin du bon sens. En effet, dans cette réflexion, il existe une discrimination par rapport au service militaire, mais que dire d'une personne qui fait le service civil et qui est occupée deux fois plus longtemps que pour le service militaire ? Ce n'est donc pas du tout la bonne direction.

Pourquoi le Parlement fédéral n'a-t-il pas choisi ce champ d'application ? Parce qu'entre employeurs et employés - le partenariat social est basé là-dessus - il y a des relations contractuelles. Qu'on effectue un contrôle du marché du travail ? Tout à fait d'accord ! C'est le but du partenariat social, mais lorsqu'il y a un contrat de travail établi. Je vous demande d'être pragmatiques par rapport à cela: qu'allez-vous faire en 2018 lorsqu'il s'agira de mettre en pratique une telle motion ? Engager une personne qui passera ses journées sur Jobup.ch et dans la presse à lire des offres d'emploi pour trouver une éventuelle erreur ? C'est décalé par rapport à la réalité. Le meilleur moyen selon moi est la sensibilisation des employeurs. C'est vrai, vous l'avez relevé, des questions se posent et d'autres questions ne se posent pas. La réalité, c'est qu'à la fin, l'employeur ne dira rien du tout, mais choisira la personne qu'il souhaite. Vous pouvez intervenir comme vous voulez en amont, cela ne changera strictement rien. Je vous invite donc vraiment à refuser ces deux amendements qui sont logiques par rapport à la question de la discrimination, je comprends cela, mais qui ne sont pas applicables et contraires au droit fédéral. Nous avons bien étudié cette problématique à la commission de l'économie et je demande que la plénière nous suive, en tout cas sur cet objet.

M. Patrick Lussi (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, c'est toujours un régal de vous écouter dans ces débats et de voir la discrimination que vous faites contre l'UDC; qu'est-ce qu'on entend comme quolibets ! Il est dommage que, par cette hargne que vous avez contre nous ces temps, vous en oubliiez l'objet principal. Je vois que des gens sourient, pourtant, oui, on parle de discrimination. Nous, nous avons simplement voulu mettre le doigt sur une chose que beaucoup de gens n'ont pas, à savoir l'obligation constitutionnelle pour les citoyens suisses d'effectuer un service militaire ! Cela est fixé dans la Constitution, et il n'y a pas le choix.

Alors oui, c'est vrai, cette motion est partie d'une annonce, mais, Mesdames et Messieurs, si vous avez l'honnêteté - et vous ne le direz pas ici - de dire combien vous avez de jeunes au sein de vos partis... Nous, à l'UDC, nous en avons quelques-uns, qui étaient en plein parcours militaire et qui ne trouvaient pas d'emploi. La question n'est pas de dire que les employeurs sont anti-militaires, la question est simplement de dire: oui, Mesdames et Messieurs, nos obligations constitutionnelles créent un manque d'efficience pour les entreprises et obligent entre trois à quatre semaines d'absence au travail en plus des vacances auxquelles les gens ont droit. Il faut que nous ayons le courage de dire que nous vivons en Suisse, que nous avons tout un cortège d'avantages sociaux et autres, et pour les citoyens de ce pays qui ont un passeport rouge - cela vous déplaît, Monsieur avec la barbe là-bas, je le sais ! - il y a des obligations militaires. Le but était donc de souligner cela.

Pour le reste, oui, Monsieur de Sainte Marie, vous avez raison, nous avons parlé des discriminations, nous avons parlé aussi des femmes qui font le service militaire - elles n'en ont pas l'obligation légale mais certaines le font - oui, il y a toute une série de discriminations. Et qu'est-ce qui est le plus important ? Je pense que c'est d'arriver à se dire que quand on vit dans notre pays - vous me direz que vos amendements peuvent à ce titre être positifs, mais nous rejoignons le MCG - il est clair qu'il est plus facile pour les employeurs d'engager des gens qui n'ont pas d'obligation et qui ne sont pas citoyens de ce pays. C'est le vaste débat, quelques-uns en ont déjà parlé. En ce qui nous concerne, nous pensons que, s'agissant de cet objet qui vise à empêcher qu'une obligation constitutionnelle soit contournée et que les jeunes ne puissent pas être engagés, pour quelques députés conscients qui sont élus par des citoyens suisses, parce que je crois qu'à Genève, même s'il y a beaucoup d'étrangers, pour le moment il n'y a que les citoyens suisses qui peuvent élire le parlement... Est-ce que vous voulez bouder cela ? Le score le montrera, mais ce ne sera pas forcément à l'honneur de ce parlement. Merci, Monsieur le président.

Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. le député François Baertschi pour une minute dix.

M. François Baertschi (MCG). Merci, Monsieur le président. Je suis quand même très surpris quand on nous dit que ce type de discrimination n'existe pas et que seule une annonce est parue dans la presse, alors qu'un certain nombre de discriminations de ce type nous a été rapporté. (Remarque.) Un certain nombre ! (Remarque.) Malheureusement ! Même tout récemment dans une commune genevoise, où il y a des PLR, des PS et d'autres personnes. (Commentaires.) C'est quelque chose de courant, malheureusement... (Commentaires.) ...et certains rient bien sûr, parce qu'ils se fichent complètement de ces discriminations ! (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Il faut être cohérent et se dire que, à ce moment-là, on est pour le GSsA, pour la suppression de l'obligation de servir... (Remarque.) ...même si ce n'est pas ce qu'a voulu le peuple, et puis on fait ce genre de discrimination ! (Commentaires.) Mais si on soutient le principe du citoyen-soldat, ce type de discrimination est insupportable ! Merci, Monsieur le président.

Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. le député Cyril Mizrahi pour cinquante secondes.

M. Cyril Mizrahi (S). Merci, Monsieur le président. Rapidement, le problème de ce texte est politique. Ce n'est pas, contrairement à ce qu'a soutenu le PLR, un problème juridique. Pourquoi ? Parce que tout à coup, l'UDC et le MCG découvrent que oui, la discrimination, c'est quand même pas sympa ! (Rire.) Si cette motion avait un mérite, ce serait au moins celui-là. Mais que peut-on penser du PLR... (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) ...qui nous dit que cette motion est contraire au droit fédéral alors que nous avons deux dispositions centrales... (Remarque.) Alors bien sûr, on peut jouer sur les mots, mais on ne peut pas dire que la discrimination à l'embauche est autorisée dans ce pays ! Elle est explicitement interdite par l'article 3 de la loi sur l'égalité et par l'article 328 du code des obligations. Ce n'est pas moi qui le dis, il y a de la jurisprudence et le Conseil fédéral va dans le même sens. Il est donc tout à fait légitime que le canton...

Le président. C'est fini, Monsieur Mizrahi.

M. Cyril Mizrahi. J'en viens à ma conclusion, Monsieur le président. ...sensibilise les employeurs, voire amende les entreprises...

Le président. Vous êtes arrivé au bout de votre temps.

M. Cyril Mizrahi. ...qui ne jouent pas le jeu. Je vous remercie, Monsieur le président. (Quelques applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. le député Pierre Vanek pour une minute dix.

M. Pierre Vanek (EAG). Merci, Monsieur le président. Si je suis descendu, c'est pour dire combien j'étais d'accord avec François Baertschi. Il a raison ! Il a raison de dire qu'il faudrait en effet supprimer l'armée suisse... (Commentaires.) ...et en effet supprimer ces milliards dépensés... Combien de budget pour l'armée récemment, Messieurs les spécialistes ? (Commentaires.) 5 à 6 milliards dépensés par an, et on veut nous faire dépenser, Monsieur Baertschi, 8 milliards pour de nouveaux avions de combat, alors que systématiquement le peuple n'en veut pas; la dernière fois, le peuple n'en a pas voulu et on revient avec cela. Vous avez dit dans votre intervention que le peuple n'avait pas voulu de cette suppression de l'armée ! (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Vous oubliez, Monsieur Baertschi, que le canton de Genève est un canton particulier, avec des traditions particulières, avec un engagement particulier de ses citoyennes et citoyens qui à l'époque se sont prononcés à une majorité - certes modeste, mais à une majorité... Des citoyens genevois, non pas des étrangers établis ou des frontaliers qui seraient venus voter ici ! Une majorité de citoyens genevois qui se sont mis en mouvement - à l'époque il fallait se mettre en mouvement pour aller glisser le bulletin de vote dans l'urne... (Commentaires.)

Le président. Voilà, Monsieur Vanek, vous arrivez au bout.

M. Pierre Vanek. ...et qui ont voté pour la suppression de l'armée...

Le président. Monsieur Vanek...

M. Pierre Vanek. ...à laquelle vous appelez, Monsieur François Baertschi... (Le micro de l'orateur est coupé.)

Le président. Je passe la parole à M. Murat Alder pour vingt-quatre secondes.

M. Murat Julian Alder (PLR). Merci, Monsieur le président. Je ne peux quand même pas laisser M. Vanek dire de pareilles choses. (Commentaires.) Il faut lui rappeler que chaque pays a une armée, la sienne ou celle d'un autre pays. (Remarque.) J'aimerais aussi lui rappeler qu'en 2001, quand la deuxième initiative anti-armée a été soumise aux citoyens de ce pays, le canton de Genève, comme tous les autres cantons, a voté non à la suppression de l'armée, donc il ne faut pas avoir la mémoire sélective comme M. Vanek. (Remarque.)

M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de minorité. Cette motion ne demande rien d'autre que d'essayer d'atteindre un objectif réaliste: nous aimerions qu'au sein des départements de l'Etat et des institutions subventionnées, cette discrimination soit supprimée. En plus de cela, nous ne demandons rien d'autre qu'on fournisse des renseignements, qu'on entreprenne une campagne d'informations ou Dieu sait quelle stratégie pour que, dans le secteur privé et dans le secteur international, on prenne conscience de ce type de discrimination et qu'on y responsabilise ces secteurs.

Le dernier point que j'aimerais soulever porte sur l'amendement proposé par le groupe socialiste. Cet amendement propose simplement de supprimer la mention d'obligations militaires mais demande le maintien du principe qui consiste à supprimer toute discrimination lors de l'embauche. Pour cette raison, le groupe UDC soutiendra ces deux modifications proposées par l'amendement du groupe socialiste.

M. Jean-Marc Guinchard (PDC), rapporteur de majorité. J'aimerais terminer en rappelant les conclusions de la majorité de la commission qui ont été évoquées à plusieurs reprises et qui convergent toutes - à part pour le MCG et l'UDC - vers un refus de cette motion. Pour ce qui est de l'amendement modifiant les deux invites, au nom du groupe démocrate-chrétien en particulier, j'aimerais vous inciter à le refuser. Pourquoi ? Parce que je trouverais dommage qu'il soit accolé à une motion de piètre qualité, où on nous dit: «Certains militants nous ont dit que...», «Nous avons entendu que...», «Une commune genevoise prétend que...» (Remarque.) Tout est basé sur des on-dit, sans que l'on n'ait jamais de preuve formelle. Je vous conjure... (Commentaires.) Je vous conjure, Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, de... (Commentaires.)

Le président. Monsieur Florey, merci de laisser parler M. Guinchard, s'il vous plaît ! (Commentaires continus.) S'il vous plaît ! On vous a bien entendu ! On vous a bien entendu, Monsieur Florey, ça suffit ! Monsieur Guinchard, c'est à vous.

M. Jean-Marc Guinchard. Merci, Monsieur le président. Voilà un exemple typique de discrimination à la prise de parole ! Je rappelle donc les conclusions de la commission: je vous incite à refuser cette motion ainsi que l'amendement déposé par le groupe socialiste qui, à mon avis, devrait faire l'objet d'un autre texte libéré de tout contexte lié à cette motion, qui, je le répète, est de piètre qualité. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de majorité. Nous sommes donc saisis d'une demande d'amendement du parti socialiste, modifiant les deux invites de la motion. Je vais vous faire voter en deux fois, une fois sur chaque invite. (Brouhaha.) Je remercie toutes les personnes qui tiennent d'incessants conciliabules d'y mettre un terme.

Le premier amendement qui vous est proposé remplace la première invite actuelle par la suivante: «à mettre fin à toutes les pratiques discriminatoires et illégales d'employeurs en matière de condition d'embauche.»

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 56 oui contre 37 non et 2 abstentions.

Le président. Nous passons au deuxième amendement, qui reformule ainsi la deuxième invite: «à rendre rapport sur la façon dont il applique la LEg et sur sa stratégie pour combattre toutes les formes de discriminations à l'embauche.»

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 49 oui contre 38 non et 11 abstentions.

Mise aux voix, la motion 2397 ainsi amendée est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 59 oui contre 38 non et 1 abstention. (Quelques applaudissements à l'annonce du résultat.)

Motion 2397

R 847
Proposition de résolution de Mmes et MM. Jocelyne Haller, Claire Martenot, Salika Wenger, Christian Zaugg, Olivier Baud, Pierre Vanek, Bertrand Buchs, Delphine Klopfenstein Broggini, Yves de Matteis, Frédérique Perler, Esther Hartmann, François Lefort, Mathias Buschbeck, Christian Frey, Guillaume Käser, Boris Calame, Caroline Marti : Donner aux cantons les moyens de réaliser l'égalité entre femmes et hommes (Résolution du Grand Conseil genevois à l'Assemblée fédérale exerçant le droit d'initiative cantonale)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session XIII des 22 et 23 mars 2018.

Débat

Le président. Nous passons à la R 847. Cet objet est classé en catégorie II, trente minutes. Je passe la parole à Mme la députée Jocelyne Haller.

Mme Jocelyne Haller (EAG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, ce n'est sans doute pas la première fois que vous entendez parler de discrimination hommes-femmes. Effectivement, le sujet nous a beaucoup occupés ces derniers temps et vous avez vu aussi quelles tentatives ont été...

Des voix. On n'entend rien !

Le président. Une seconde, Madame ! Je pense qu'il est assez normal et fort civil d'écouter ceux qui présentent des motions ou des résolutions ! Madame Haller, c'est à vous !

Mme Jocelyne Haller. Je vous remercie. Vous avez donc tous constaté quelles ont été les tentatives avortées au niveau fédéral pour inscrire véritablement l'égalité dans les faits. A plus forte raison, vous avez pu mesurer aussi le caractère timoré des mesures du Conseil d'Etat proposées à la commission des affaires sociales et de la santé. En effet, celles-ci préconisaient simplement que les entreprises puissent réaliser en leur sein une enquête sur leurs propres pratiques et en tiennent les personnes informées: aucune mesure contraignante, aucune possibilité de s'assurer que le principe inscrit depuis trente-sept ans dans la Constitution et les dispositions légales existant depuis vingt-trois ans puissent enfin être respectés et réalisés dans les faits ! Alors aujourd'hui, ce que nous demandons, c'est d'user de votre droit de résolution à l'attention de l'Assemblée fédérale et de demander que des mesures dynamiques soient prises, des mesures qui consistent à mettre en place un suivi de l'application de la loi sur l'égalité, mais aussi la possibilité de sanctionner les entreprises qui ne se conforment ni à la Constitution fédérale ni à cette loi.

Nous avons reçu à nos places un amendement proposé par Mme Bocquet qui nous propose de modifier la deuxième invite en supprimant précisément cette possibilité de sanctionner les employeurs. Je suis navrée, mais cette proposition d'amendement vide simplement de sa substance la résolution que nous vous proposons; si la loi sur l'égalité souffre aujourd'hui d'une tare, c'est précisément qu'elle n'est pas contraignante: aujourd'hui, les entreprises sont libres de respecter ou pas le principe de l'égalité hommes-femmes puisqu'elles n'encourent aucune sanction en cas d'infraction à ce principe essentiel. Nous vous appelons donc à refuser l'amendement qui nous est proposé et à accepter le renvoi de cette résolution à l'Assemblée fédérale. (Applaudissements.)

Mme Delphine Klopfenstein Broggini (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, depuis 1981, sous l'égide de l'article 8 de la Constitution fédérale, le droit suisse a été modifié régulièrement en faveur de l'égalité. Des modifications importantes et notoires ont été apportées, mais, évidemment, de nombreuses injustices demeurent et persistent dans notre société, des injustices qu'il faut combattre au quotidien en menant une veille sans relâche dans bien des domaines. L'égalité entre femmes et hommes est loin d'être atteinte et la question de l'égalité salariale est au coeur de ce débat. Les femmes gagnent en moyenne 20% de moins que les hommes; précisément, à Genève, à travail égal, les femmes sont en moyenne payées 7,9% de moins que les hommes - si on fait le calcul sur une année, les femmes doivent travailler jusqu'au 24 février de l'année suivante pour obtenir le salaire annuel moyen des hommes ! Ainsi, chaque année en Suisse, les femmes touchent environ 7 milliards de francs de moins que ce qu'elles devraient toucher. Cet argent manque non seulement dans le porte-monnaie des femmes et des ménages, mais de manière générale dans les caisses des assurances sociales et des impôts. Il ne s'agit donc pas d'un débat de femmes, ni d'un débat féministe, mais du débat d'une société entière, et j'aimerais bien que les hommes aussi s'expriment sur de tels sujets !

La situation ne s'améliore pas avec le temps, quand on voit la dernière décision du Conseil des Etats qui a renvoyé en commission le projet pourtant bien léger du Conseil fédéral qui visait à imposer la transparence salariale aux moyennes et plus grandes entreprises. On se rend compte qu'il y a encore du chemin à parcourir et que cette résolution fait pleinement sens ! De nombreux leviers sont à activer et la question de la résolution est évidemment extrêmement importante, mais d'autres textes sont aussi en préparation ou ont été déposés, notamment pour agir au niveau cantonal et en ce qui concerne le contrôle sur les salaires, avec l'OCIRT; également pour renforcer le bureau de la promotion de l'égalité entre femmes et hommes et de prévention des violences domestiques, qui fait un travail énorme et mérite un soutien accru.

Cette résolution, accompagnée par d'autres textes, est totalement justifiée. Nous vous proposons de la soutenir en refusant l'amendement, qui la vide complètement de son intérêt: accepter cet amendement, c'est rester au statu quo. Or, nous voulons aujourd'hui faire un pas de plus et nous souhaitons évidemment que cette assemblée accepte cette résolution. (Applaudissements.)

M. Charles Selleger (PLR). Que demande ce texte ? Il demande à Berne de permettre à Genève d'appliquer un principe qui semble évident, celui de l'égalité entre les hommes et les femmes en matière de salaire. Je viens personnellement d'une profession où, tant au niveau institutionnel qu'au niveau indépendant, les hommes et les femmes gagnent strictement, au centime près, la même chose pour un travail égal.

Je pense que cette résolution s'adressant à Berne ne souffre pas d'opposition; personnellement, je la soutiendrai. Par contre, si tant est que le parlement désire la renvoyer en commission, je ne m'y opposerai pas, mais je ne voterai pas le renvoi. A l'interne, cette résolution a fait l'objet de discussions assez importantes. Voilà mon point de vue, j'espère que mon groupe me suivra.

Mme Claude Bocquet (PDC). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, la proposition d'amendement ne vise pas du tout à enlever de sa substance à cette résolution, mais plutôt à faire en sorte que plus de monde soit d'accord de la voter afin qu'elle ait une chance d'arriver à Berne. Nous avons en effet remarqué que le mot «sanctionner» provoquait une réaction épidermique et amenait à un refus de nombreux députés. J'aimerais beaucoup qu'on obtienne l'égalité et le groupe des femmes PDC a aussi mis ça à l'ordre du jour. Je pense que nous pouvons utiliser la carotte au lieu du bâton. Bientôt, il y aura le PF 17; un excellent moyen de pousser les gens et les entreprises à mettre en place l'égalité salariale est par exemple de proposer un taux d'imposition différent pour les entreprises qui pratiquent l'égalité salariale, je sais que ce n'est pas à l'ordre du jour... J'aimerais dire que l'égalité salariale, pour moi, n'est pas une question de gauche ou de droite, c'est juste la nécessité de rendre justice aux femmes et à leur travail. C'est pourquoi je vous demande, par respect pour les femmes, d'adopter cet amendement qui permettra une plus large acceptation de cette résolution - j'espère que tout le monde pourra être d'accord - et ensuite son adoption. (Applaudissements.)

Mme Caroline Marti (S). Mesdames et Messieurs les députés, que s'est-il passé depuis 1981, quand a été adopté l'article constitutionnel sur l'égalité salariale, et 1995 avec l'adoption de la loi sur l'égalité ? Malheureusement, force est de constater que la situation ne s'est que très peu améliorée: comme l'a rappelé ma collègue Delphine Klopfenstein, aujourd'hui, à Genève, on constate un écart salarial de près de 8% entre les hommes et les femmes. De plus, 40% de ces écarts et inégalités salariales entre hommes et femmes ne s'expliquent par aucun critère objectif et sont imputables exclusivement à la question du sexe de l'employé ou de l'employée. Par ailleurs, les études montrent que les écarts salariaux se réduisent de 0,3% par année. Mesdames et Messieurs les députés, à ce rythme-là, nous devrons attendre 2045 avant d'obtenir l'égalité salariale, soit soixante-cinq ans après l'adoption de l'article constitutionnel ! Et ça, Mesdames et Messieurs les députés, c'est si tout va bien ! Si on progresse effectivement très légèrement vers l'égalité année après année, on a pu constater qu'entre 2010 et 2012, les écarts salariaux ont de nouveau augmenté.

Face à ce constat, nos autorités fédérales ont pris les choses en main en proposant une réforme de la loi sur l'égalité, sans prévoir ni contrôle ni sanction mais en misant sur l'incitation et l'autocontrôle. Or, Mesdames et Messieurs les députés, combien de temps devrons-nous encore attendre avant que nos autorités fédérales et la majorité bourgeoise et conservatrice comprennent que ça ne fonctionne pas ? L'autocontrôle et les règles d'incitation ne marchent pas, parce que ça ne marche qu'avec les entreprises qui sont de bonne volonté - il y en a. Or, ce n'est pas au sein de ces entreprises-là qu'on rencontre des problèmes d'inégalités salariales ! Ça ne fonctionne pas non plus parce que c'est sur les femmes que repose le fardeau de porter les affaires en justice, d'aller devant les tribunaux pour faire constater un cas d'inégalité salariale. C'est un fardeau que beaucoup de femmes n'arrivent pas à porter par peur de représailles si elles se lancent dans ce type d'actions judiciaires. Aujourd'hui, nous faisons face à l'immobilisme des Chambres fédérales et de nos autorités, et cette résolution revendique tout simplement pour le canton de Genève le droit d'être exemplaire et pionnier en la matière; elle revendique tout simplement le droit de faire appliquer un article constitutionnel vieux de trente-cinq ans. Pour ces raisons, le groupe socialiste vous invite à accepter ce texte. (Applaudissements.)

Mme Françoise Sapin (MCG). Bien que sa portée reste un peu illusoire, la proposition de résolution 847 du Grand Conseil genevois à l'Assemblée fédérale est une bonne chose. En effet, l'égalité des salaires pour les postes similaires à compétences égales doit enfin être mise en vigueur. Il existe une loi fédérale depuis 1995, mais elle n'est tout simplement pas appliquée. D'une manière générale, comme cela a déjà été relevé par mes préopinants, les salaires des femmes sont encore et toujours à peu près 20% inférieurs aux salaires des hommes. Cela veut dire que nous vivons en 2018 une discrimination de sexe, en l'occurrence une discrimination de sexe envers les femmes. Je suis très contente d'apprendre par M. Selleger que les médecins du canton de Genève gagnent la même chose. En ce qui me concerne, dans ma vie professionnelle, j'ai vécu à plusieurs reprises des discriminations pour des postes similaires, à compétences et formations égales. Cette injustice doit cesser: pour toutes ces raisons, le MCG soutiendra l'envoi de cette résolution du Grand Conseil genevois à l'Assemblée fédérale.

Mme Jocelyne Haller (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais répondre à notre collègue du PDC qu'il ne s'agit pas d'obtenir l'égalité: nous l'avons obtenue, par deux fois ! Dans la Constitution en 1981 et dans la loi sur l'égalité en 1995 ! Ce dont il s'agit aujourd'hui, c'est de faire en sorte que ce que nous avons obtenu devienne effectif. C'est de ça qu'il s'agit ! (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.)

J'aimerais aussi revenir sur cette démarche d'adresser une résolution à l'Assemblée fédérale. Nous savons que certains ici doutent de l'efficacité de ce genre de mesures: ils n'ont pas forcément tort, parce que certaines de nos résolutions n'ont pas obtenu toute l'attention qu'elles méritaient. Ce n'est pas une raison pour se priver de cet instrument démocratique, à plus forte raison parce que nous ne sommes pas les seuls à l'utiliser; de plus, nous savons que, sur cette question de l'égalité hommes-femmes, le Grand Conseil vaudois a d'ores et déjà été saisi d'une démarche similaire.

Le président. Voilà, Madame...

Mme Jocelyne Haller. Je conclus: si les cantons s'allient sur cette question et insistent auprès de l'Assemblée fédérale...

Le président. S'il vous plaît !

Mme Jocelyne Haller. ...nous aurons peut-être des chances de voir enfin aboutir cette aspiration... (Le micro est coupé. Applaudissements.)

Le président. Je passe la parole à M. le député Cyril Aellen.

M. Cyril Aellen (PLR). Merci, Monsieur le président. Le PLR votera cette résolution avec l'amendement proposé par le PDC que nous remercions, parce qu'il y a des objectifs, des méthodes et des façons de faire différents, et je ne doute pas que nous soyons nombreux à penser que le terme «mettre activement en oeuvre» est quelque chose de tout à fait positif: on ne fait pas contre les entreprises, on fait avec !

Mme Anne Marie von Arx-Vernon (PDC). L'amendement PDC avait aussi pour but de relever à quel point nous sommes attachés au partenariat social. Nous faisons confiance aux partenaires sociaux sous cet angle-là et je m'étonne que la gauche ne soit pas aussi engagée que moi dans ce domaine. Franchement, c'est quand même avec le partenariat social qu'on a obtenu - justement - des avancées. C'est la meilleure résolution du monde; si elle est rejetée, évidemment qu'elle n'aura servi à rien ! Donc, nous vous invitons à soutenir nos amendements qui ont pour but de faire avancer avec vous cette volonté de faire appliquer l'égalité hommes-femmes. Vous pouvez compter sur le parti démocrate-chrétien pour le rappeler aussi souvent que nécessaire. Merci !

M. Thomas Bläsi (UDC). Malgré notre confiance relativement limitée dans les textes que nous envoyons à l'Assemblée fédérale, notre groupe estime que c'est une question de principe et nous y sommes éminemment favorables. Nous soutiendrons donc cette résolution, de même que l'amendement du PDC.

Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs, je vais d'abord vous faire voter sur l'amendement PDC portant sur la deuxième invite. Je vous le lis: «de réviser la législation fédérale afin de permettre aux cantons de mettre activement en oeuvre auprès des employeurs, avec les partenaires sociaux, le principe d'égalité salariale entre femmes et hommes».

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 49 oui contre 41 non et 2 abstentions.

Mise aux voix, la résolution 847 ainsi amendée est adoptée et renvoyée à l'Assemblée fédérale par 83 oui et 1 abstention.

Résolution 847

Le président. Je vous retrouve à six heures exactement, après la pause.

La séance est levée à 17h35.