République et canton de Genève

Grand Conseil

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P 2020-A
Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition : Les médecins genevois en faveur de la pratique quotidienne du vélo
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session XIII des 22 et 23 mars 2018.
Rapport de M. Olivier Baud (EAG)

Débat

Le président. J'ouvre le débat sur la P 2020-A en cédant la parole au rapporteur, M. Olivier Baud.

M. Olivier Baud (EAG), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais juste dire deux mots pour souligner l'intérêt de cette pétition assez importante de notre collègue médecin Patrick Saudan. En effet, elle montre que la sédentarité et le surpoids, tout le monde le sait, sont des fléaux dans notre société et qu'il ne suffit pas de dire qu'il faut bouger pour que ça aille mieux, parce que dans les faits les gens qui travaillent ou qui ont d'autres activités n'ont pas suffisamment de temps. Le vélo peut donc justement constituer un moyen intéressant, parce que même sur une courte durée, l'activité physique développée par la pratique du vélo est appréciable pour la santé. Cela dit, il ne s'agit pas de jouer la marche à pied contre le vélo: bien sûr que la marche est également une bonne activité, mais elle n'est pas aussi praticable, en quelque sorte, que le vélo. Cette pétition vise donc à ce que les aménagements cyclables du canton soient davantage sécurisés, parce que si en principe on peut se déplacer à pied sur les trottoirs sans être trop en danger, ce n'est pas tout à fait le cas en ce qui concerne la pratique du vélo, et d'aucuns y renoncent à cause de cette dangerosité. Je vous invite par conséquent à renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat. Je vous remercie.

M. Christian Frey (S). Les membres de la commission des pétitions ont été frappés par l'expression «serial killer»: la sédentarité et le surpoids représentent effectivement un danger très très important, et la démonstration qui nous a été faite par M. Saudan est évidente. Certains se sont demandé si la marche apportait également des bénéfices, mais M. Saudan - vous lui transmettrez, Monsieur le président - nous a indiqué qu'il fallait alors marcher de manière très soutenue, voire faire du walking.

Dans cette pétition, on insiste sur le fait qu'il s'agit d'aménagements cyclables sécurisés. Nous avons donc demandé à la déléguée à la mobilité, Mme Peracino, ce qu'elle entendait par «aménagements sécurisés», et elle nous a répondu qu'ils ne disposaient pas de statistiques différenciées entre les bandes cyclables et les pistes cyclables, par exemple. C'est regrettable, parce qu'il est tout à fait évident pour ceux d'entre nous qui font de la bicyclette qu'il existe une différence en termes de sécurité entre les bandes et les pistes cyclables. Il est donc urgent, Mesdames et Messieurs les députés, de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat pour que la sécurité des cyclistes soit assurée. Je vous remercie.

Mme Delphine Klopfenstein Broggini (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais féliciter les pétitionnaires et saluer l'accueil quasi unanime de la commission, qui est favorable à cette pétition. Cette dernière apporte un éclairage essentiel, parce qu'enfin on parle du vélo sous l'angle de la santé, et ce ne sont pas les lobbies qui le disent, mais bien les médecins, avec leur expertise. On le voit dans le rapport, où il est bien sûr précisé que la sédentarité, soit le fait de ne pas bouger plusieurs heures par jour, est particulièrement néfaste, tandis qu'une activité régulière - trente minutes par jour - diminue largement les risques de développer de l'hypertension, du diabète ou de l'obésité. Le vélo constitue donc un moyen de pallier ce problème. On conclura en disant que les cyclistes roulent pour leur santé, mais aussi pour celle des autres, de manière générale, tout en faisant largement baisser les coûts de la santé de notre société. On voit donc à quel point il est important de développer nos aménagements cyclables, parce que plus il y en aura, plus il y aura de cyclistes sur les routes. Cet éclairage était évidemment capital, et j'espère que ce parlement, de même que le suivant, s'en souviendra lors des prochains débats sur la mobilité. Je vous remercie.

M. Bertrand Buchs (PDC). Le parti démocrate-chrétien va bien sûr accepter avec enthousiasme cet objet. Je dirais qu'en tant que médecin, je suis soumis à l'article 24, mais je vais quand même voter cette pétition... (Commentaires.) ...et j'aimerais remercier M. Saudan de l'avoir déposée et soutenue. C'est un point essentiel quand on discute des coûts de la santé et du prix de nos primes d'assurance-maladie, car on se rend compte qu'avec du bon sens on peut faire baisser de façon impressionnante les coûts de la santé. C'est simplement du bon sens, et ce bon sens commande de bouger. On doit avoir une activité physique, quelle qu'elle soit, et il ne faut pas la négliger. Si les gens se mettent dans la tête qu'il faut avoir une activité physique et qu'ils en pratiquent une régulièrement, on parviendra à diminuer énormément les coûts de la santé, et la qualité de vie des gens sera très grandement améliorée, simplement grâce à leur musculature. En effet, on sait que lorsqu'on est âgé, on perd de la musculature et on risque de chuter. Eh bien la pratique du vélo est excellente parce qu'elle améliore non seulement la musculature mais aussi l'équilibre, qui est essentiel à partir d'un certain âge. En outre, il n'y a pas d'âge pour en faire: j'ai des patients de plus de 80 ans qui viennent à vélo ! Il faut donc absolument que l'Etat prenne en charge ce problème de prévention en promouvant l'activité physique, parce que c'est grâce à celle-ci qu'il sera possible de diminuer le coût des primes d'assurance-maladie. Je vous remercie.

M. Pascal Spuhler (HP). Mesdames et Messieurs les députés, eh bien voilà une pétition qui est de la poudre aux yeux ! Oui, c'est de la poudre aux yeux électoraliste, parce que tout le monde sait très bien qu'il est bon pour la santé de faire un peu de sport. Il n'est quand même pas nécessaire de l'écrire dans une pétition ! C'est un peu ridicule ! Pourtant des médecins viennent dire ici dans ce parlement, la bouche en coeur, qu'il faut faire du sport, parce qu'on ne le savait pas... On ne le savait pas, alors il a fallu déposer une pétition, et M. Saudan, le professeur Saudan est venu nous le répéter en commission. Mais, Mesdames et Messieurs, évidemment qu'il faut faire du vélo ! Evidemment qu'il faut faire de la marche à pied ! Evidemment qu'il faut faire de la natation ! C'est bon ! Allez respirer ! On nous dit donc qu'il faut faire du vélo et qu'il convient dès lors d'installer des pistes cyclables en conséquence. Mais je vous ferai remarquer, Mesdames et Messieurs, que les trois quarts des gens qui utilisent le vélo à Genève le font pour se déplacer, pas pour faire du sport ! Et la plupart, s'ils en ont les moyens, achètent aujourd'hui un vélo électrique ! Alors le vélo électrique pour faire du sport, c'est magnifique ! En conclusion, Mesdames et Messieurs, cette poudre aux yeux, je la mets à la poubelle ! (Exclamations.)

M. Raymond Wicky (PLR). Mesdames et Messieurs, chers collègues, j'aimerais dire que le PLR a évidemment été convaincu par les arguments médicaux qui ont été fournis, et ce non pas parce qu'il s'agissait d'un collègue de parti, mais tout simplement parce qu'ils étaient parfaitement fondés. Nous ne pouvons donc que soutenir cette pétition. En revanche, pour aller peut-être un peu dans le sens de M. Spuhler, qui s'est exprimé il y a quelques instants, il faudrait effectivement que cela s'inscrive dans une parfaite maîtrise de l'implantation des différentes infrastructures qui seraient nécessaires, et en particulier aussi dans une maîtrise des coûts, mais malgré ces petites objections nous serons favorables au renvoi au Conseil d'Etat. Je vous remercie.

M. Stéphane Florey (UDC). Il est toujours étonnant de voir la propension que certains ont à retourner leur veste à la dernière minute parce qu'une caméra pourrait les filmer et qu'on pourrait éventuellement voir ce que les gens vont voter. Je trouve ça toujours étonnant, surtout en période électorale... Pour notre part, nous allons nous abstenir sur cette pétition, parce que finalement on s'aperçoit que tout ce qui a été dit est un constat. Alors oui, on doit faire du sport, oui, c'est bon pour la santé, mais ce que demande la pétition, on ne peut pas l'accepter, parce que ça reviendrait à dire qu'il faut soi-disant tout mettre pour le vélo afin d'aller de l'avant avec l'IN 144, alors que le constat qui figure dans cette pétition au sujet de cette initiative est faux, c'est un mensonge. En effet, depuis l'acceptation de l'IN 144, ce parlement a voté presque 100 millions, voire plus, en faveur de la construction de pistes cyclables. Le département en est quasiment à plus de 70% de réalisations du réseau cyclable pour ce qui est de la part cantonale, tandis que les communes en sont à peu près à 60% pour la part qui les concerne. On voit donc que malgré tout les choses avancent, et plutôt bien, mais c'est vrai que l'avancement de certains travaux peut aussi parfois poser problème. En effet, on ne va pas créer une piste cyclable pour ensuite tout à coup s'apercevoir qu'on n'a malheureusement pas pensé aux tuyaux qui passaient dessous et qu'on a oublié qu'il s'agissait d'une route qui devait être refaite de fond en comble, de sorte qu'il faudra tout casser et recommencer. On va d'ailleurs le voir très prochainement - enfin, si les travaux se réalisent - à Lancy. La commune a dépensé des centaines de milliers de francs pour refaire les trottoirs à l'avenue Curé-Baud, avec des pistes cyclables, des bordures et tout ce que vous voulez. Alors ça fait joli, ça fait propre, mais la moitié de l'avenue va être totalement défoncée en raison du futur tram, si bien que tout ce qui a été réalisé jusqu'à présent va être réduit à néant. On va devoir tout reprendre et tout recommencer ! Sur ce plan, on peut donc reprocher à l'IN 144 de produire des effets néfastes par ce qu'elle demande, parce qu'on ne peut pas tout avoir en même temps. Il faut laisser du temps au temps et, ma foi, si ce n'est que dans dix ans qu'on arrivera à tout faire, eh bien on attendra dix ans. Pour toutes ces raisons, nous nous abstiendrons aujourd'hui lors du vote sur cette pétition. Je vous remercie.

Mme Marie-Thérèse Engelberts (HP). Je ne me permettrai pas de nier un point de vue de la faculté, mais j'aimerais quand même dire que, pour que la population puisse garder un poids adéquat - qui est totalement individuel, d'ailleurs - on pourrait aussi, en plus de recommander la pratique du vélo, penser à regarder quelle partie de la population est obèse. En général, et dans nos contrées aussi, la population qui se nourrit le plus mal n'est pas celle qui est la plus aisée, bien au contraire, et si l'on regarde à la Migros ou ailleurs ce que contiennent les caddies des personnes en situation de précarité, eh bien on voit que ce qui s'ensuit est presque toujours une certaine obésité, pour elles-mêmes et pour leurs enfants. Il est donc bon de faire du vélo, c'est une bonne intention, je ne vais pas le nier, mais c'est une lapalissade ! Je crois que si on veut traiter la question de l'obésité... (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) ...même du point de vue de la faculté, il faut le faire sérieusement. En effet, il y a des causes à cela, il y a des conséquences, et ce ne sont pas les voies cyclables qui vont régler tous les problèmes. En outre, je voudrais quand même rappeler ici que dans vingt ou trente ans un pourcentage certain de la population aura plus de 80 ans, et je vous assure qu'en ville, entre les bus, les trams, les autres vélos et les quelques voitures qu'il y aura encore, il sera très difficile de garder l'équilibre à vélo. Soyons donc un peu sérieux ! Je vous remercie.

M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, bien que cette pétition ait été attribuée à mon excellent collègue Luc Barthassat, il s'agit manifestement ici d'un sujet en lien avec la promotion de la santé, je voudrais donc simplement vous rappeler que mon département, avec l'appui du Conseil d'Etat, soutient tout ce qui concerne la prévention des maladies et la promotion de la santé. Nous avons du reste lancé en février dernier la campagne «Changeons un peu, vivons mieux !», que vous avez certainement déjà suivie et qui est visible dans les lieux publics comme sur les réseaux sociaux. Le but n'est pas d'opérer une révolution, mais d'inciter par exemple à descendre de nos autobus un arrêt plus tôt afin d'effectuer la fin du trajet à pied, à prendre un peu moins l'ascenseur et un peu plus les escaliers, etc., tous ces petits changements anodins faisant une grande différence. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons maintenant nous prononcer sur les conclusions du rapport, soit le renvoi au Conseil d'Etat.

Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (renvoi de la pétition 2020 au Conseil d'Etat) sont adoptées par 58 oui contre 1 non et 13 abstentions.