République et canton de Genève

Grand Conseil

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PL 11489-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat de bouclement de la loi 9975 ouvrant un crédit d'investissement de 5'200'000F au titre de participation permanente en faveur de la Fondation de la Cité Universitaire de Genève et un crédit de fonctionnement annuel de 714'000F en faveur de la Fondation de la Cité Universitaire de Genève au titre d'aide financière pour l'exploitation de l'extension de la Cité Universitaire
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session III des 12, 13 et 19 mars 2015.
Rapport de majorité de M. Ivan Slatkine (PLR)
Rapport de minorité de Mme Lydia Schneider Hausser (S)

Premier débat

Le président. Nous nous penchons sur le PL 11489-A classé en catégorie II, quarante minutes. Le rapporteur de majorité Ivan Slatkine est remplacé par M. Edouard Cuendet, à qui je passe la parole.

M. Edouard Cuendet (PLR), rapporteur de majorité ad interim. Merci, Monsieur le président. Les projets de lois de bouclement ne sont pas toujours de longs fleuves tranquilles et nous réservent parfois quelques surprises. En l'occurrence, la surprise a été mauvaise, c'est un euphémisme de le dire. Nous avons découvert dans la conduite de ce projet un problème de gouvernance grave, et même très grave. Evidemment, personne n'en conteste le fondement puisqu'il s'agissait de créer des lits supplémentaires à la Cité universitaire, et tout le monde sait bien qu'il y a un besoin criant de logements pour les étudiants à Genève. Mais cela n'excuse pas tout.

Petit rappel historique: ce projet de loi visant à créer des chambres a été soumis à la commission des finances en 2007; devisé à l'époque à 22,4 millions, il comportait une subvention de 5,2 millions. La participation de l'Etat était donc importante, il en était le principal bailleur extérieur. Or, lorsqu'on est venu nous présenter le projet de loi de bouclement, quelle ne fut pas notre surprise d'apprendre que le coût du projet, initialement devisé à 22,4 millions, avait explosé pour atteindre - je vous le donne en mille, ou plutôt en millions - 33,977 millions, c'est-à-dire près de 34 millions, avec un surcoût de plus de 11 millions, un surcoût d'environ 50% ! Voilà qui est invraisemblable !

Nous avons alors demandé des éclaircissements. La bouche en coeur, les représentants de la fondation nous ont expliqué que certes, le projet de loi avait été voté sur la base d'un projet concret et défini, mais qu'on leur avait proposé après coup des améliorations et que, sans en informer le Grand Conseil, ils avaient cru bon de se lancer dans ce projet différent. Ils nous ont dit, toujours la bouche en coeur - je vous cite leurs propos: «L'importante différence entre le plan initial, chiffré à CHF 22,4 millions, et le projet final, se montant à CHF 33,9 millions, soit plus de 11 millions, s'explique par le fait que les deux projets sont totalement différents.» Totalement différents ! Comment peut-on accepter que l'Etat de Genève subventionne un montant important - 5,2 millions - pour un projet et qu'en fin de course, le projet soit, des dires mêmes de ses promoteurs, totalement différent ! C'est inacceptable !

On nous a expliqué que trente-cinq lits supplémentaires avaient été créés; c'est louable, mais cela n'excuse pas le changement de direction. On se réjouit également que les étudiants aient accès à des salles de bain privatives, mais cela engendre un surcoût de près de 2 millions. On nous précise encore qu'un jardin et un barbecue ont été ajoutés; vous me voyez ravi que les étudiants puissent griller des saucisses à la Cité universitaire l'été, mais cela n'explique pas non plus le surcoût de 11 millions. Enfin, on nous explique qu'il y a 9,5 millions de surcoût de construction et 2 millions de surcoût de frais généraux, de frais d'accompagnement - il faudra qu'on m'explique une fois ce que ça veut dire. C'est un scandale absolu, et la commission des finances ne s'est pas gênée pour le dire.

On nous a dit que la Cité universitaire, sans en informer le Grand Conseil, avait trouvé des financements extérieurs et que ça ne coûtait dans le fond pas plus cher à l'Etat. Ceci n'est pas tout à fait exact parce que ces financements extérieurs ont notamment consisté en un prêt bancaire pour lequel la Cité universitaire doit payer des intérêts; on ne peut ainsi pas dire que c'est neutre en termes de financement. De plus, quiconque ayant siégé quelque temps dans ce Grand Conseil sait que tout projet d'investissement induit des frais de fonctionnement, donc cet important agrandissement du projet qui a été fait sans notre accord va entraîner des frais de fonctionnement plus importants...

Le président. Vous prenez sur le temps du groupe.

M. Edouard Cuendet. Oui, merci, mais ce n'est pas grave ! (L'orateur rit.) Que va-t-il se passer ? La fondation va certainement revenir, toujours la bouche en coeur, nous demander dans les années qui suivent une rallonge parce qu'elle n'arrive plus à faire face aux frais de fonctionnement.

C'est ainsi très courroucée que la commission des finances a rejeté l'entrée en matière sur ce projet de loi de bouclement. J'espère qu'aucun projet n'est mené de cette manière à l'Etat; M. Hodgers pourra peut-être nous rassurer sur ce point. Il est inacceptable que la fondation de la Cité universitaire ait pris de telles libertés avec des deniers publics et trompé le Grand Conseil. Je vous remercie et vous invite à ne pas entrer en matière sur ce projet de loi.

Mme Lydia Schneider Hausser (S), rapporteuse de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, nous perdons notre bon sens ! Pendant des années, plusieurs objets émanant de divers partis ont été déposés dans ce parlement, qui demandaient des logements pour les étudiants dont nous manquons à Genève. Ce projet de loi, comme il a été dit, était chiffré à 5,2 millions en termes de participation de l'Etat, et il n'y a pas eu de dépassement. Au lieu des 259 lits prévus, il y en aura in fine 294, en plus d'une crèche pour les étudiants également ouverte au quartier, et des locaux communs. Comme M. Cuendet l'a relevé, les logements ont évolué en termes de qualité, et pour le même prix. Le courroux qu'il a exprimé - ou l'agacement, le mécontentement - est, ne lui en déplaise, basé sur des arguties, et la relation entre les auteurs du projet, c'est-à-dire la fondation, et la commission des finances. Le département a bien suivi les travaux et leur évolution avec des gens sur le terrain, qui étaient au courant de ce qui se passait et qui, tant que le montant dû par l'Etat dans ce projet n'était pas dépassé, en acceptaient les changements.

Certes, on peut parler d'argent, on peut parler de choses qui ne jouent pas, comme M. Cuendet l'a exprimé au nom de la majorité de la commission des finances. Mais il y a aussi, et c'est bien plus grave, une sorte de déni: les gens engagés dans des fondations comme celle de la Cité universitaire voulaient faire au mieux, encore mieux que ce qui était prévu au départ. Vous devez savoir, à droite peut-être encore plus qu'à gauche, que quand on crée un projet, on fait un business plan prévisionnel. Si des évolutions de ce business plan peuvent intervenir pour aller vers le mieux, qu'au passage on reçoit des fonds privés pour ce faire et qu'on sent qu'un projet d'ampleur différente peut être réalisé, personne ne se gêne, d'autant qu'on garde le sens et le but du projet initial, à savoir la création de logements pour étudiants, qu'on en construit même davantage.

Refuser l'entrée en matière sur ce projet de loi, c'est nier le fait que des gens dans cette république passent du temps et déploient de l'énergie pour améliorer la condition générale d'un certain nombre d'habitants, en l'occurrence d'étudiants; c'est nier le fait que certaines personnes s'engagent encore pour la collectivité publique. Ne pas entrer en matière ici, c'est nier cette possibilité et cet état de fait, et je trouve que c'est déplorable, juste parce qu'on est mécontent, parce qu'on ne nous a pas informés... C'est vrai, ils ne sont pas venus dire à la commission des finances que le projet avait évolué, mais les prestations étaient les mêmes, et avec le souci de ne pas dépasser le budget alloué par l'Etat à ce projet.

Mesdames et Messieurs les députés, afin de reconnaître l'implication et les efforts de gens qui ont envie de faire le bien dans cette république, je vous enjoins d'entrer en matière et d'accepter ce projet de loi de bouclement. Allez voir ce qu'est devenu le projet initial et admettez - on ne peut pas le nier - que c'est un meilleur projet. Il a aussi été réalisé avec beaucoup plus d'heures de travail pour toutes les personnes qui y ont participé que ce qu'il en était prévu au départ. Le business plan final tient la route et est homologué en termes financiers, ce n'est pas une catastrophe comme le dit M. Cuendet.

M. Eric Leyvraz (UDC). Je rappelle que, comme pour Saint-Gervais, nous parlons là de finances, et non pas de l'utilité avérée de nouveaux logements pour les étudiants. Le coût du projet de départ était de 22,4 millions et celui du projet final s'élève à 33,9 millions, presque 40 millions. De plus, le projet final ne correspond plus du tout au projet initial. Si la fondation avait fait du bon travail, le Grand Conseil aurait dû au minimum être saisi de la nouvelle évolution du projet. La fondation a dû se financer auprès d'établissements bancaires avec un taux d'emprunt qui n'était évidemment pas prévu et des charges de fonctionnement plus élevées.

On a besoin de places pour les étudiants, d'accord; mais les règles financières doivent être respectées par cette fondation comme par tous les subventionnés. Des dérives de ce type ne sont pas admissibles ! Une règle de base lie l'Etat et le subventionné, et le subventionné se permet de faire un projet totalement différent du projet initial pour lequel il a reçu de l'argent. Mais, Mesdames et Messieurs, c'est une dérive tout à fait inadmissible, c'est la porte ouverte à tout et n'importe quoi ! Comme nous sommes là pour contrôler que les règles des finances soient respectées, nous ne pouvons faire qu'une seule chose, c'est refuser ce projet de loi.

Mme Sophie Forster Carbonnier (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, les Verts accepteront ce projet de loi de bouclement. Nous nous réjouissons en effet que le projet ait évolué, que davantage de logements pour étudiants aient été créés, qu'une crèche ait même été construite, et nous ne comprenons pas du tout le procès que certains entendent mener dans cette salle à l'encontre de ce projet. Nous connaissons tous la situation du logement dans le canton, en général et en particulier pour les étudiants; nous savons que pour que Genève et sa place universitaire restent attractives, il faut en construire davantage.

Or, qu'est-ce qu'une majorité est en train de dire ici ? Surtout, ne faites rien, bridez-vous ! En refusant ce projet de bouclement, on va brider toute créativité, toute possibilité pour des acteurs de chercher davantage de fonds. Au lieu de les féliciter et de les remercier pour le travail accompli, on joue les petits comptables et on se vexe de ne pas avoir été tenu informé. Je trouve ça particulièrement minable, au vu de la situation du logement pour étudiants dans le canton, et je vous invite à accepter ce projet de loi en l'acclamant ! Je vous remercie.

M. François Baertschi (MCG). Voilà une affaire très embarrassante: d'un côté, il y a un conseil de fondation qui a fait ce qu'il croyait être le mieux, c'est-à-dire améliorer un projet en cours de route en trouvant des solutions qui, il est vrai, sont convaincantes; de l'autre, il y a un parlement qui doit quand même contrôler la destination des projets de lois votés - c'est quelque chose de contraignant - qui doit être informé d'une manière ou d'une autre des évolutions afin qu'il y ait un minimum de contrôles et non pas que ça se fasse à la légère, parce que c'est la désagréable impression que nous avons eue à la commission des finances. Nous sommes donc dans une situation délicate. Cela dit, d'une certaine façon, que l'on vote oui ou non, ça ne changera rien, l'immeuble est déjà construit, c'est purement symbolique.

Si, pour notre part, nous votons non, et nous le faisons de manière renforcée, c'est que nous voulons donner un signal en soulignant le fait qu'il y a un grand trou dans les finances et que nous ne pouvons plus faire n'importe quoi. Je sais bien que ça ne dépendait pas de vous, Monsieur le conseiller d'Etat, et que ça a été décidé à une époque où vous n'étiez pas encore là - une fois de plus, c'est la continuité de l'Etat qui pose problème parce que vous héritez des quelques erreurs commises auparavant. Nous étions très partagés parce que nous aurions voulu voter ce projet de bouclement, mais cela aurait créé un précédent. Nous avons donc voulu montrer un signal fort en disant: attention, il faut cesser ce genre de choses, il faut une plus grande transparence auprès des institutions et qu'en cas de dépassement, ça passe au minimum par une lecture à la commission des finances, où tous les partis sont représentés, où toutes les grandes catégories de l'opinion publique sont représentées, où le peuple genevois est représenté. Je pense que c'est le minimum. Malheureusement, la personne concernée, qui a été un serviteur d'institutions para-étatiques - je ne vais pas dévoiler son nom parce qu'il s'agit d'une personne de qualité par ailleurs - est passée à côté de cet élément, et je le déplore. Notre vote sera très clair: c'est un signal. Je vous remercie d'en prendre bonne note.

Mme Anne Marie von Arx-Vernon (PDC). Pour le parti démocrate-chrétien, il est évident que c'est encore une affaire de mauvaise humeur, et à juste titre parce que la commission des finances a été mise devant le fait accompli, Monsieur le président. Mais en même temps, on ne peut que reconnaître que c'est une bonne chose d'avoir augmenté la capacité d'accueil des étudiants ainsi que créé des espaces de loisirs, ce n'est pas forcément négatif. Il y a même une crèche, on ne peut que s'en réjouir ! Tout cela s'est passé avant, Monsieur le président, à une époque où il y a peut-être eu des initiatives malheureuses, et il s'agissait pour la commission des finances d'un crime de lèse-majesté que le département ne vienne pas nous tenir au courant. Aujourd'hui, ça ne se ferait plus, Monsieur le président, c'est ce qu'on peut espérer, c'est ce qu'on peut souhaiter et c'est ce qu'on attend.

Mais il n'y a jamais eu de mauvaise utilisation des deniers publics, ils n'ont juste pas été utilisés comme nous, à la commission des finances, attendions qu'ils le soient. Peut-être même aurions-nous dit oui si ce projet avait été présenté de la manière protocolaire à laquelle nous sommes habitués et que nous exigeons maintenant. Mais il n'empêche, et je le redis, qu'il n'y a pas eu de mauvaise volonté ni de mauvaise utilisation des deniers publics. Le département a peut-être même pu penser que la commission des finances aurait retardé le mouvement - c'est évidemment une erreur, jamais la commission des finances ne retarde de projets importants pour Genève ! Pour notre part, nous disons oui aux étudiants parce que ce sont ces mêmes étudiants qui sont utiles et dont nous avons besoin pour la renommée et le prestige de Genève. Je vous remercie.

M. Frédéric Hohl (PLR). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je tiens à remercier le rapporteur de majorité, dont je partage pleinement l'analyse. Il ne s'agit pas de mauvaise humeur, il s'agit clairement de mauvaise gouvernance. Certes, le produit final est excellent; si c'était un projet privé, je saluerais le fait d'avoir utilisé un levier pour améliorer la construction, mais nous parlons bien là d'un projet public. Il y a donc un grave problème de gouvernance.

Est-ce que le département a fait son travail de suivi, est-ce qu'il aurait dû venir nous alerter, tout comme le conseil de fondation ? Clairement, le Grand Conseil aurait dû être informé de ces dépassements, et je pense qu'on ne peut pas laisser passer cela. On sait bien que, qu'on vote ou qu'on ne vote pas ce projet, ça ne va rien changer, mais on ne peut pas simplement être là, en tant que députés, pour appuyer sur un bouton; notre rôle est également de contrôler la bonne utilisation des deniers publics, ce qui n'est pas le cas ici même si le résultat final, je le rappelle une fois de plus, est très bon. C'est la raison pour laquelle le PLR ne votera pas l'entrée en matière et vous incite à faire de même.

M. Roger Deneys (S). Mesdames et Messieurs les députés, ce Grand Conseil doit arrêter de penser que la commission des finances est le centre de l'univers ! Nous ne pouvons pas faire passer la moindre dépense de cette république devant la commission des finances, surtout quand elle est modifiée pour des éléments concrets particuliers, il faut arrêter de vouloir sans cesse ajouter des séances, des auditions, des plénières pour parler de sujets pareils. Nous avons la chance d'avoir une université comme la nôtre, qui est placée 58e au classement mondial établi par Shanghai. Il faut se rendre compte que l'Université de Genève est un instrument de qualité et de rayonnement international qu'il faut à tout prix maintenir.

Alors quand on peut réaliser davantage de logements pour étudiants en améliorant un projet et que ça coûte certes un peu plus cher mais pas pour la république, je crois qu'on ne peut pas parler de dépassement, on doit simplement se féliciter des initiatives privées - ou presque privées parce que c'est une fondation qui regroupe des représentants d'à peu près tous les milieux politiques genevois. Il faut arrêter de couper les cheveux en quatre, il faut essayer d'avancer dans cette république. Ce projet était excellent et il n'y a pas eu de dépassement puisque le projet a été amélioré sans coûter plus cher au canton. Il faut arrêter cette lecture pinailleuse qui retarde Genève !

Mme Marie-Thérèse Engelberts (HP). Je suis étonnée d'entendre une proposition de non-entrée en matière même si la commission des finances n'approuve pas ce projet de loi. Quand on élabore un projet, chacun l'a dit et Mme Hausser nous l'a rappelé, il suit toujours une évolution et on peut l'améliorer. Il est quand même mentionné dans le rapport de majorité que le président de la fondation a régulièrement informé l'office cantonal du logement de l'avancement de cette opération. Si les informations ne passent pas au sein du département, il ne faut pas en imputer la faute à la fondation.

Deuxième point: il y a un conseil de fondation, ces personnes sont nommées par le Conseil d'Etat et la Ville de Genève, elles travaillent de manière bénévole, ce qui n'est pas le cas de tous les conseils de fondation, comme on le sait. Bien sûr, ce n'est pas parce qu'elles sont bénévoles qu'elles sont incompétentes, mais il est clair qu'elles font rapport uniquement au département concerné, c'est le propre du fonctionnement d'un conseil de fondation.

Enfin, même si ça doit en vexer certains à la commission des finances, il est notoire que le projet final est bien meilleur que le projet initial puisqu'il assure plus de chambres aux étudiants et améliore leur confort, ce qui n'est pas dommage vu la nature des études actuellement ainsi que la difficulté de travailler à côté par exemple. Il me semble donc que s'il y a un jardin, il ne faut pas s'en priver. Compte tenu de cela, je soutiendrai l'entrée en matière tout comme ce projet de loi.

Mme Magali Orsini (EAG). Ensemble à Gauche votera ce projet de loi même s'il est vrai qu'on a eu affaire à une attitude quelque peu irritante a priori. Le trésorier de la fondation a indiqué qu'il n'avait jamais prétendu cacher quoi que ce soit, qu'il avait toujours tenu l'office cantonal du logement au courant de l'évolution de ce projet. Manifestement, il y a eu une carence d'informations quelque part relativement à la commission des finances. Je pense qu'un dépassement de cette importance méritait tout de même que cette commission en soit informée et j'espère bien que de tels dysfonctionnements ne se reproduiront plus à l'avenir. La position d'Ensemble à Gauche est motivée par le fait que, comme cela a été dit, il s'agit malgré tout d'une amélioration notoire du projet en faveur des étudiants, il n'y a eu aucune malversation, personne ne s'est enrichi de façon illégitime et, de toute façon, l'office du logement était régulièrement tenu au courant. Voilà la position d'Ensemble à Gauche. Je vous remercie.

M. François Baertschi (MCG). J'aimerais ajouter deux précisions. Concernant d'abord ce conseil de fondation, on voit que les partis politiques du Grand Conseil ne sont pas représentés et qu'il y a un dysfonctionnement. Ça devrait peut-être nous conduire à mener une réflexion plus générale sur la composition de certains de ces conseils - mais c'est une réflexion globale.

Je voudrais encore transmettre autre chose à certaines personnes qui font preuve d'une sorte de légèreté dans la gestion des finances de l'Etat qui me laisse un peu pantois, surtout quand ces personnes figurent dans des conseils d'administration d'institutions publiques. J'ai vraiment de grandes craintes. On a un trou de plusieurs centaines de millions de francs dans les comptes de cette année et j'ai peur, en entendant certains dans cette assemblée, qu'on se retrouve avec plusieurs milliards de dette...

Le président. Il vous reste trente secondes.

M. François Baertschi. Je vous remercie, Monsieur le président.

M. Antonio Hodgers, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, encore une fois, il s'agit ici avant tout d'un problème de gouvernance. Quelques mots sur le fond du projet: nous pouvons tous convenir que la nouvelle mouture est finalement meilleure que la première parce qu'elle offre davantage de lits, maximise l'espace en créant une meilleure densité et, cela a été dit, offre une meilleure qualité de vie aux étudiants qui passent là quelques années importantes de leur existence. Maintenant, je reconnais parfaitement que ce projet, que j'estime meilleur et que j'aurais pu défendre, aurait dû être soumis à la commission des finances. Il est certain que, sur le principe, un dépassement de cette envergure aurait dû revenir au législateur et à la commission des finances, du moins par le biais d'une information, parce qu'il y a réellement un coût lié à l'emprunt, même s'il est marginal vu les gains. Les représentants du conseil de fondation auraient dû vous dire ceci: «Il y avait un projet initial mais nous avons entre-temps organisé un concours d'architecture qui a fait émerger un nouveau projet, lequel nous paraît meilleur. Il coûte certes un peu plus cher mais a de meilleures fonctionnalités, et c'est celui-ci que nous voulons réaliser.»

Nous ne pouvons pas, Monsieur Baertschi, faire le procès de la fondation de la Cité universitaire. Elle a informé la commission des finances, au moment des débats sur le crédit initial, qu'elle était en train d'organiser un concours d'architecture et qu'à l'issue de celui-ci, elle aurait une vision plus claire du projet qu'elle entendait développer. Ensuite, une fois que le concours a abouti et que son conseil a choisi l'option qui a finalement été réalisée, elle a informé le département de manière régulière. Dès lors, je vous présente à nouveau les excuses du département quant au traitement de cette affaire. L'interlocuteur de la commission des finances, à savoir le conseiller d'Etat de l'époque en charge de cette fondation, n'est pas venu devant la commission des finances informer celle-ci de l'évolution du projet et lui demander son aval pour aller de l'avant. Il s'agit, chacun l'aura compris, de mon cher et estimé prédécesseur Mark Muller, PLR s'il en est. Je lui transmettrai évidemment la mauvaise humeur de son groupe et visiblement d'une majorité du Grand Conseil ainsi que tout le soutien que la gauche parlementaire lui accorde aujourd'hui à travers le vote de ce projet de loi !

Plaisanterie mise à part, Mesdames et Messieurs, je comprends votre mauvaise humeur; elle est écrite noir sur blanc dans le rapport, elle est manifestée ici. Je comprends également que vous vouliez donner des signaux au Conseil d'Etat mais, Mesdames et Messieurs les députés, vous êtes le législateur, vous êtes saisis d'une loi et pas d'une demande d'humeur, on ne vous demande pas de faire des gesticulations ou des signaux de fumée dans un sens ou dans un autre. Vous êtes saisis d'une loi de bouclement, qui a pour vocation essentielle que ce Grand Conseil, dans son activité de contrôle de l'activité exécutive, puisse valider ou invalider le cas échéant la bonne tenue des comptes. Autrement dit, y a-t-il eu malversation ou enrichissement ? A nouveau, je comprends vos déclarations, mais si celles-ci se traduisent, comme cela a été annoncé par plusieurs groupes, par un vote négatif, vous quittez finalement votre rôle de législateur pour endosser celui de client du bistrot du commerce, qui consiste à partager ses humeurs. A ce moment-là, cela pose un problème institutionnel qui n'aura certes pas de conséquences légales ou budgétaires immédiates, mais sur lequel on peut tout de même s'interroger au vu du serment que vous avez prêté et du rôle qui est le vôtre, c'est-à-dire celui de légiférer. In fine, vous êtes ici appelés à vous prononcer sur une loi, c'est pour cela que vous appuyez sur votre bouton. Dans les déclarations, on peut faire part de nos humeurs; mais vous avez une responsabilité lorsque vous votez des lois. Nous tenons d'ailleurs ce même discours lors des dimanches de votation. De plus en plus dans ce pays, on dit que les gens votent avec leurs tripes; non, quand le souverain est législateur un dimanche de votation, il vote sur des lois qui ont des effets réels. Vos humeurs, je les entends, je les partage; il s'agit maintenant d'une loi et je vous prie d'assumer votre rôle de législateur.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à vous prononcer sur cet objet.

Mis aux voix, le projet de loi 11489 est rejeté en premier débat par 43 non contre 40 oui et 3 abstentions.