République et canton de Genève

Grand Conseil

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M 2203-A
Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la motion de Mmes et MM. Christina Meissner, Bernhard Riedweg, Patrick Lussi, Bertrand Buchs, Anne Marie von Arx-Vernon, Béatrice Hirsch, Jean-Luc Forni, Philippe Morel, Marc Falquet, Christo Ivanov : Augmentons le taux de participation aux votations et aux élections avec « easyvote »
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session II des 19 et 20 février 2015.

Débat

Mme Christina Meissner (UDC). «La première fois, je l'attendais avec impatience. J'étais un peu excitée. (Exclamations. Brouhaha.) J'avais un peu le trac. (Exclamations.) Je ne savais pas si je faisais juste. J'ai écouté mon coeur, quelques coups de langue... (Exclamations.) ...et je l'ai fourrée. J'ai voté. Toi aussi, glisse-la... ton enveloppe de vote !» Je salue l'imagination des auteurs de ce clip osé, MM. Matthias Köhler et Jérémy Seydoux, ainsi que la chancellerie pour avoir, avec CinéCivic, introduit le sujet. Mais permettez-moi de dire que je reste sur ma faim. L'acte de voter n'est pas un flirt virtuel sans lendemain, pas davantage qu'un manga rappelant que chaque voix compte.

Au-delà de donner l'envie, encore faut-il savoir pour quoi voter. Et là, CinéCivic n'aide pas celui qui a fait le premier pas. Easyvote, élaboré par le Parlement des jeunes, par des jeunes, pour des jeunes, apporte cette aide par le biais d'un site Internet et d'une brochure. Avec une explication simple et axée sur les sujets des votations, easyvote permet de comprendre pourquoi il est important de passer à l'acte et de voter, non pas une fois mais toutes les fois où le jeune est appelé à remplir son devoir civique. Easyvote est soutenu au niveau fédéral pour donner des informations sur les sujets fédéraux. Pour les sujets cantonaux, c'est aux cantons d'apporter leur soutien. C'est ce que demandait la motion 2203. La réponse du Conseil d'Etat est surprenante: il reconnaît la qualité du travail de l'équipe easyvote, les encourage vivement, mais n'entre pas en matière pour des raisons juridiques ! En effet, contrairement au droit fédéral, le droit cantonal ne permet pas de fournir les textes explicatifs suffisamment à l'avance. On parle là de deux semaines. Le Conseil d'Etat le dit lui-même, une adaptation de la loi sur l'exercice des droits politiques est nécessaire. Mais il ne dit pas qu'il va la mettre en oeuvre ! Pourquoi ? Pour la diffusion de la brochure easyvote, le Conseil d'Etat recommande aux jeunes de s'adresser aux communes. Alors qu'il salue la qualité de ladite brochure, on attendrait pour le moins que le Conseil d'Etat intervienne auprès d'elles par le biais d'un soutien plus ferme à la démarche. Dès lors, la réponse du Conseil d'Etat n'apporte pas à l'auteur de la motion la satisfaction attendue. Après trois ans de préliminaires CinéCivic, il est temps de s'engager dans la durée et de concrétiser le propos au niveau cantonal sans renvoyer la balle à d'autres. Easyvote doit obtenir davantage que le soutien délivré du bout des lèvres par la chancellerie. Ainsi, afin de lui donner la possibilité de revoir son engagement sur la question, je vous propose de renvoyer son rapport au Conseil d'Etat !

Le président. Je vous remercie, Madame la députée, d'avoir chauffé la salle ! Je passe la parole à Mme la députée Frédérique Perler.

Mme Frédérique Perler (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, les Verts ne peuvent qu'abonder dans le sens des propos tenus par la première signataire de cette motion, motion largement soutenue par ce parlement, je le rappelle, avec tout de même quatre-vingts voix positives. Les Verts se réjouissaient également de la réponse qu'allait apporter le Conseil d'Etat à ce sujet d'actualité et d'importance qui est de favoriser le vote des jeunes. Dans l'entrée en matière, le Conseil d'Etat, par la voix de M. le conseiller d'Etat Longchamp, nous disait qu'il accueillait cette motion avec bienveillance. De ce fait, on s'attendait à une réponse un peu plus circonstanciée que celle que nous avons reçue. Je ne parlerai pas de l'historique fort bien relaté, mais des deux invites qui, bien qu'elles soient simples, n'ont trouvé aucune réponse. Et comme le rappelait Mme Meissner à l'instant, nous ne savons pas quelles sont les intentions du Conseil d'Etat, puisque dans sa réponse il réitère sa volonté de collaborer avec easyvote. Nous attendions donc pour le moins, puisque cela s'avère nécessaire, une proposition d'adaptation à la LEDP, ainsi qu'une vraie réponse sur les collaborations avec easyvote, plutôt que des explications sur les contacts qui ont eu lieu par le passé et qui ont montré qu'il n'était pas possible d'accéder à la demande de l'association qui porte easyvote. Le groupe des Verts renverra donc également cette motion au Conseil d'Etat.

M. François Longchamp, président du Conseil d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, la presse, aujourd'hui, nous annonce un nouveau recours contre une brochure officielle de votation. Le Conseil d'Etat est saisi systématiquement de recours contre les brochures de votation, qui sont considérées par les uns ou par les autres comme partiales, insuffisantes, alors même qu'une procédure extrêmement précise existe, à laquelle le Bureau du Grand Conseil est associé. Chacun des termes de ces brochures électorales est pesé, mais malgré cela nous devons systématiquement, à chaque votation, affronter des tribunaux, des citoyens - et c'est leur droit - virulents pour certains, bien intentionnés pour d'autres, qui font recours contre ces brochures. Or, Mesdames et Messieurs, le Grand Conseil demande que nous officialisions un support écrit sur lequel nous n'avons aucun contrôle, auquel nous entendrions, par le fait qu'il serait estampillé par la chancellerie, donner un caractère officiel. Est-ce qu'il y a quelqu'un, dans cette salle, qui pense sincèrement qu'alors que nous sommes systématiquement confrontés à des recours contre les brochures électorales officielles, qui sont élaborées avec l'appui de votre Grand Conseil, avec l'appui des minorités du Grand Conseil dont le point de vue doit être exprimé avec clarté et diligence, nous pouvons prendre le risque d'officialiser un support certes de qualité, mais dont nous ne contrôlons absolument pas le contenu, et qui rendrait évidemment un recours extraordinairement aisé si la façon dont les choses étaient présentées ne plaisait pas à un seul des 245 000 citoyens de notre canton ? C'est la raison pour laquelle nous vous avons expliqué - et je l'avais d'ailleurs fait au moment du vote en plénière sur cette motion - qu'il ne nous était pas possible d'officialiser une brochure qui ne soit pas celle réalisée dans le cadre de l'application de la loi sur les droits politiques.

Alors vous pouvez évidemment renvoyer la motion au Conseil d'Etat pour que nous vous redisions une deuxième fois que c'est ainsi que nous devons procéder, mais il s'agit malheureusement d'un processus qui est l'élémentaire garantie de la bonne sécurisation de nos opérations électorales. Et il suffit de lire la «Tribune de Genève» d'aujourd'hui, ou d'autres journaux encore, pour se rendre compte qu'il s'agit d'un problème très actuel. Nous avons expliqué que nous pouvions faire un renvoi sur le site en indiquant qu'il n'avait pas un caractère officiel, mais que nous ne pouvions pas, avec la meilleure volonté du monde, assumer une brochure dont nous n'avons pas le contrôle. Voilà, Mesdames et Messieurs, les raisons pour lesquelles le Conseil d'Etat vous invite à ne pas entrer en matière sur ce point. Si vous venez à lui renvoyer la motion une deuxième fois, sauf à suggérer des modifications de la brochure électorale, de la loi sur les droits politiques, à se résoudre, finalement, à permettre d'informer la population sans aucun contrôle, de manière partiale, eh bien le Conseil d'Etat ne pourra donner une suite favorable à cette proposition.

Le président. Je vous remercie, Monsieur le président du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais donc voter sur le renvoi au Conseil d'Etat de son rapport.

Mis aux voix, le renvoi au Conseil d'Etat de son rapport sur la motion 2203 est rejeté par 50 non contre 29 oui.

Le Grand Conseil prend donc acte du rapport du Conseil d'Etat sur la motion 2203.