République et canton de Genève

Grand Conseil

Chargement en cours ...

La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de M. Antoine Barde, président.

Assistent à la séance: MM. Serge Dal Busco et Mauro Poggia, conseillers d'Etat.

Exhortation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme et MM. François Longchamp, président du Conseil d'Etat, Anne Emery-Torracinta, Pierre Maudet, Luc Barthassat et Antonio Hodgers, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Cyril Aellen, Murat Julian Alder, Anne Marie von Arx-Vernon, François Baertschi, Michel Baud, Olivier Cerutti, Christian Dandrès, Emilie Flamand-Lew, Nathalie Fontanet, François Lance, Pierre Ronget, Jean Sanchez, Ivan Slatkine, Pierre Weiss, Salika Wenger, Ronald Zacharias et Daniel Zaugg, députés.

Députés suppléants présents: Mmes et MM. Geneviève Arnold, Alexis Barbey, Jean Batou, Maria Casares, Gilbert Catelain, Christian Decorvet, Jean-Charles Lathion, Magali Origa, Françoise Sapin, Charles Selleger et Yvan Zweifel.

Annonces et dépôts

Néant.

R 781
Proposition de résolution du Conseil d'Etat pour modifier la loi fédérale sur l'assurance-maladie, du 18 mars 1994 (initiative du canton à l'Assemblée fédérale)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session I des 22, 23 et 29 janvier 2015.

Débat

Le président. Nous prenons l'urgence votée tout à l'heure, la proposition de résolution 781. Nous sommes dans un débat de catégorie II, trente minutes. Je passe la parole à M. le député Thomas Bläsi.

M. Thomas Bläsi (UDC). Merci, Monsieur le président. Le président de la commission de la santé m'a demandé de faire une communication: à l'unanimité, la commission vous demande de lui renvoyer ce point sans débat, que nous puissions le traiter demain. La motion socialiste traitant du même sujet, cela nous permettra de faire l'économie de deux débats sur la même thématique.

Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Je vais donc vous faire voter ce renvoi à la commission de la santé.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de résolution 781 à la commission de la santé est adopté par 43 oui (unanimité des votants).

PL 11328-A
Rapport de la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat chargée d'étudier le projet de loi de Mmes et MM. Roger Deneys, Irène Buche, Lydia Schneider Hausser, Jean-Charles Rielle, Christian Frey, Salima Moyard, Cyril Mizrahi, Isabelle Brunier, Thomas Wenger, Romain de Sainte Marie, Caroline Marti modifiant la loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l'Etat, du pouvoir judiciaire et des établissements hospitaliers (LTrait) (B 5 15) (Suppression du 14e salaire des cadres supérieurs, dans un esprit de partage et de solidarité)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session XV des 18 et 19 décembre 2014.
Rapport de majorité de M. Jean-François Girardet (MCG)
Rapport de minorité de M. Roger Deneys (S)

Premier débat

Le président. Nous reprenons l'ordre du jour normal avec le PL 11328-A. Est-ce que les rapporteurs prennent la parole ? (Remarque.) Monsieur Girardet, c'est à vous.

M. Jean-François Girardet (MCG), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat a consacré sept séances à l'étude du PL 11328 demandant une modification de la loi B 5 15. Je lis simplement l'article 23A qui concerne les cadres supérieurs. La loi présentée par le parti socialiste et d'autres signataires, peut-être, demandait simplement l'abrogation de cet article 23A que je lis: «Dès le 1er janvier 2009 et jusqu'à l'entrée en vigueur d'une nouvelle évaluation des fonctions, les cadres dès la classe 27 exerçant des responsabilités hiérarchiques peuvent percevoir une indemnité égale à 8,3% de leur salaire annuel versée en 13 mensualités. Le traitement, indemnité incluse, ne peut dépasser le montant correspondant à la classe 33, position 21, de l'échelle des traitements. Le Conseil d'Etat fixe par règlement la liste des bénéficiaires.»

Les titre et préambule de ce PL 11328 disaient viser la suppression du quatorzième salaire. En cette période de préparation du budget et de restrictions budgétaires, on comprend que c'était peut-être une bonne idée que de vouloir trouver des économies pour en faire bénéficier les classes inférieures de l'échelle des salaires de l'Etat en supprimant précisément cet article 23A de la loi B 5 15. Cet article avait été voté sur le siège en novembre 2008 et il est entré en vigueur, comme je viens de le lire, le 1er janvier 2009. C'était donc une indemnité pour encadrement d'au minimum sept personnes, fixée à 8,3% du salaire annuel pour les classes 27 et supérieures, jusqu'à l'entrée en vigueur d'une nouvelle évaluation des fonctions. Ça tombe bien, puisque le Conseil d'Etat nous a annoncé l'entrée en vigueur prochaine du fameux SCORE - en tout cas avant la fin de la législature.

Les auditions ont permis aux commissaires de prendre conscience des conséquences de l'acceptation du projet de loi tel que présenté. Tout d'abord, cette abrogation remettait en question un droit acquis, avec l'effet rétroactif de cette loi, en regard de la jurisprudence. Les difficultés relevées incluaient également la démotivation des cadres supérieurs, avec les effets collatéraux de démotivation, qu'on comprend bien, sur l'ensemble de la pyramide des salariés. C'est ce que sont venus nous expliquer ces cadres supérieurs. Cela entraînerait également une difficulté pour recruter des hauts fonctionnaires tels que les médecins ou professeurs des HUG, des hauts fonctionnaires à l'université ou encore des directeurs de l'administration fiscale qui pourraient être intéressés par le secteur privé ou éventuellement par l'appel d'autres cantons. De même, le Conseil d'Etat rencontrerait dans ce contexte des difficultés pour faire avancer la nouvelle évaluation des fonctions avec son projet SCORE. Comme une majorité des commissaires annonçait vouloir entrer en matière sur ce projet de loi socialiste, moyennant quelques amendements, le Conseil d'Etat a quelque peu anticipé cette volonté en proposant un amendement général qui se résume en trois points: on maintient l'article 23A que je viens de lire et il devient l'alinéa 1 de cet article; l'alinéa 2 prévoit de ne plus verser l'indemnité prévue à l'alinéa 1 pour les nouveaux cadres engagés après l'entrée en vigueur de la présente loi; l'alinéa 3 dit qu'en cas de changement d'affectation, le versement de l'indemnité aux cadres ne remplissant plus les conditions de son octroi cesse le deuxième mois après le changement; enfin, un alinéa 4 stipule: «Le versement de l'indemnité aux cadres qui étaient bénéficiaires après un changement d'affectation, bien que ne répondant plus aux conditions de son octroi, cesse le deuxième mois après le [date d'entrée en vigueur de la présente loi]».

Cet amendement général démontre que le Conseil d'Etat a réalisé que l'indemnité est probablement versée de manière abusive dans quelques cas et que des hauts fonctionnaires ne répondent pas aux conditions initiales d'octroi.

Le président. Il vous reste trente secondes.

M. Jean-François Girardet. En fin de débat et juste avant le vote de l'amendement général du Conseil d'Etat, le PLR présentait un amendement demandant ceci: «Dès le [date d'entrée en vigueur de la présente loi], les nouveaux cadres remplissant les conditions décrites à l'alinéa 1, à l'exception des cadres des HUG et de l'Université de Genève, ne perçoivent pas l'indemnité et aucune nouvelle fonction ne peut être ajoutée à la liste.» Cette option a été rejetée en vote avec 7 voix pour, 7 contre et 1 député PLR s'abstenant. Nous aurons probablement l'occasion de revenir sur le sujet puisqu'il est question de présenter un nouvel amendement allant dans cette direction. Pour l'heure, Mesdames et Messieurs, nous vous demandons de bien vouloir accepter ce projet de loi tel qu'amendé par le Conseil d'Etat et adopté par une majorité des commissaires présents.

M. Roger Deneys (S), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi 11328 déposé par les socialistes a effectivement pour but de supprimer l'indemnité de 8,3% décidée en novembre 2008 par une majorité de ce Grand Conseil alors que les finances cantonales étaient, disons, bien différentes de celles d'aujourd'hui. L'excédent des comptes 2007 était supérieur à 400 millions de francs. A l'époque, on pouvait imaginer donner un supplément aux cadres de la fonction publique pour essayer de recruter des personnes compétentes, mais aujourd'hui, il faut se rendre à l'évidence que la perspective n'est plus du tout la même. Je crois qu'il est important de le rappeler: désormais, chaque année, au moment du budget, on se bat pour équilibrer les comptes, en mettant en jeu des prestations sociales destinées aux personnes défavorisées, comme le subside d'assurance-maladie, le CASI ou l'aide au logement. On est en train de se battre au sujet de montants parfois inférieurs à un million de francs, qui représentent des sommes modestes. On en a parlé tout à l'heure avec le CASI, pour un montant de moins de cent francs, alors que c'est important pour les personnes à bas revenus qui en bénéficient. Or, ici, alors qu'il ne l'avait pas demandé à l'époque, le Conseil d'Etat défend ce principe d'une indemnité de 8,3% pour les cadres supérieurs de la fonction publique, indemnité qui coûte aujourd'hui plus de sept millions de francs par année pour le grand Etat. Cette prime devait être accordée de façon circonstanciée, c'était écrit dans la loi, mais le Conseil d'Etat n'en a pas tenu compte et il l'a distribuée tous azimuts ! Aujourd'hui, quasiment l'ensemble des cadres en classe 27 et plus touche cette indemnité.

En particulier, il y a une dérive que je trouve absolument anormale, c'est relevé dans l'annexe 2 au rapport, pages 90 et 91: une part non négligeable de ces indemnités a été attribuée au sein des Hôpitaux universitaires de Genève, non pas pour des cadres supérieurs exerçant des fonctions hiérarchiques, mais pour compenser les différences de salaires de médecins qui avaient des postes de médecin chef, de médecin adjoint, etc. Vous avez les chiffres à la page 91 de ce rapport; cela représente un montant total supérieur à 4 millions de francs. Ce sont les chiffres de 2012, et il est tout simplement choquant de voir que les HUG ont détourné l'usage de cette prime. En réalité destinée à favoriser la reconnaissance des fonctions d'encadrement hiérarchique, là, cette prime a été utilisée pour compenser des différences de salaires avec d'autres hôpitaux suisses. Les HUG en sont entièrement responsables et c'est une partie du problème. C'est là quelque chose que nous, socialistes, n'avions pas anticipé et cela mérite un traitement circonstancié, parce qu'il ne s'agit pas de faire fuir les bons médecins. Toutefois, sur le fond, on peut se poser des questions sur la pertinence de cette prime, quand on demande des efforts à l'ensemble de la fonction publique, aux associations subventionnées, aux personnes à bas revenus. Pourquoi et au nom de quoi les cadres supérieurs de la fonction publique touchent-ils un quatorzième salaire, c'est-à-dire un montant supérieur à 11 000 F par année ? Parce que la classe 27, annuité 0, c'est 11 000 F au minimum et, évidemment, c'est bien supérieur avec les annuités ! Pourquoi ces cadres supérieurs n'auraient-ils pas au moins la décence et le sens des responsabilités de faire un effort supplémentaire quand on demande des efforts à tout le monde pour équilibrer le budget ?

Mesdames et Messieurs les députés, les socialistes demandaient la suppression pure et simple de ce quatorzième salaire. Un amendement a été déposé pour réduire la portée de ce projet de loi et en exclure le personnel médical. Je pense que c'est une solution de compromis, dans la mesure où on a proposé un délai pour qu'au sein des HUG on ait le temps de trouver une solution qui soit conforme à ce que la situation devrait être aujourd'hui: c'est-à-dire qu'il y ait une grille salariale qui permette de rémunérer les médecins de façon correcte et qu'on n'utilise pas des primes qui ne sont pas prévues pour cela pour compléter leurs salaires. Je vous invite donc dans tous les cas à accepter l'entrée en matière sur ce projet de loi et à voter l'amendement permettant de supprimer ce quatorzième salaire à l'exception du personnel médical au sein des HUG pour une durée limitée à trois ans, parce que cela nous semble un délai bien suffisant pour proposer une solution correcte et conforme, avec une grille salariale appropriée, et supprimer cette manipulation avec le quatorzième salaire aux HUG, qui n'aurait jamais dû exister. Mesdames et Messieurs les députés, votez l'entrée en matière de ce projet de loi et soutenez l'amendement; il en réduit certes la portée, mais il permet de confirmer que l'effort demandé aux cadres supérieurs de la fonction publique est nécessaire aujourd'hui, correct et légitime par rapport aux efforts qu'on demande aux autres fonctionnaires et autres contribuables genevois.

Mme Lisa Mazzone (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, je trouve assez cocasse de discuter de la suppression du quatorzième salaire, alors qu'à l'instant, à 19h, un collègue PLR parlait de la réalité des chiffres et de la nécessité de prendre ses responsabilités face aux enjeux budgétaires qui nous obligent à nous serrer la ceinture et à faire des choix - des choix pour enfin gérer mieux les deniers publics... Ici, on parle d'un gisement d'économies de plus de 2 millions de francs pour le petit Etat et de près de 7 millions de francs pour le grand Etat. Il est assez paradoxal de voir que les groupes qui parlent justement de réduire les charges de l'Etat soutiennent encore le maintien de ce quatorzième salaire, en tout cas pour les personnes qui en bénéficient aujourd'hui ! Ces groupes soutiennent le maintien du quatorzième salaire alors que l'on coupe et prend dans l'assiette des plus pauvres, en particulier dans l'assiette des personnes au bénéfice de l'aide sociale. On réduit les budgets pour la formation, on réduit les budgets pour l'environnement, on réduit les budgets pour la mobilité. On réduit aussi - eh oui - les budgets pour l'énergie en coupant de près de 80% dans les subventions aux énergies renouvelables. C'est assez incohérent de voir ce genre de positions !

Si on en vient au fond, ce quatorzième salaire, ou plutôt cette prime a été introduite en 2008. Est-ce à dire qu'avant 2008, les fonctionnaires et employés de l'Etat étaient des incompétents ? Absolument pas ! Donc, avant 2008, il y avait des personnes qui s'intéressaient aux charges proposées par l'Etat sans ce «susucre» qu'on nous présente aujourd'hui comme une condition sine qua non pour attirer des personnes qui autrement choisiraient plutôt le secteur privé où les conditions seraient meilleures. Non, les personnes employées avant 2008 ont choisi l'Etat malgré tout ! Par ailleurs, à l'époque, ni le Conseil d'Etat ni les cadres eux-mêmes ne demandaient ce quatorzième salaire, je pense qu'il est très important de le rappeler. C'est un choix du Grand Conseil d'introduire un quatorzième salaire, ce n'était pas une revendication des cadres. Je me distancie un tout petit peu des propos de M. Deneys, ce n'est pas qu'ils ne veuillent pas faire un effort eux-mêmes, c'est à l'origine un choix du Grand Conseil d'introduire ce quatorzième salaire auquel on est maintenant attaché mordicus.

Enfin, dans le détail, il faut quand même relever que le plus bas salaire concerné par ce quatorzième mois est un revenu à 144 000 F par an et, par conséquent, à plus de 11 000 F par mois. C'est un revenu confortable et qui nous semble aussi important dans la mesure où il s'inscrit dans le cadre d'autres avantages qu'on a à travailler à l'Etat, au-delà de la mission de service public à accomplir. Ce sont aussi des avantages en termes de vacances: il me semble qu'il y a peu d'entreprises privées dans lesquelles six semaines de vacances sont offertes aux cadres ! Il me semble aussi qu'il y a une certaine stabilité de l'emploi à l'Etat et des conditions qui sont bonnes.

Dans ce contexte, les Verts soutiennent évidemment le projet de loi du parti socialiste pour la suppression de ce bonus. Ils soutiennent également l'amendement déposé pour le cas un peu particulier des Hôpitaux universitaires de Genève et des médecins puisqu'on avait fait une «maniclette» pour utiliser ce quatorzième mois afin de fausser les salaires et d'être concurrentiel par rapport aux autres hôpitaux suisses. Aujourd'hui, il nous semble important de réadapter ces salaires à leur juste valeur pour que les HUG restent toujours un hôpital de pointe, un hôpital qui accueille des médecins à la pointe. Par conséquent, nous soutiendrons cet amendement qui permet de laisser le temps nécessaire pour cet ajustement et vous invitons à faire de même et à soutenir ce projet de loi.

M. Christo Ivanov (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, ce projet de loi 11328 demande donc la suppression du quatorzième salaire des cadres supérieurs de l'Etat à partir de la classe 27. Il faut relever que 62% des personnes touchées par ce texte sont des médecins ou des cadres hospitaliers de notre canton. Nous voulons une administration de qualité de même que des hôpitaux de pointe à tous les niveaux. Pour cela, il faut bien payer cette élite et attirer d'autres hauts cadres afin de poursuivre sur la voie de l'excellence. La commission a accepté un amendement qui propose de maintenir le quatorzième salaire pour celles et ceux qui, contractuellement, l'ont déjà, mais de ne plus le donner aux nouveaux arrivants, aux nouveaux hauts cadres qui viendraient grossir les rangs de l'administration. Le groupe UDC soutiendra l'amendement déposé car il va dans le bon sens. Pour toutes ces raisons, le groupe UDC vous demande de voter le projet de loi tel qu'amendé en commission et de voter également l'amendement qui a été présenté.

M. Alberto Velasco (S). Comme l'a dit le rapporteur de minorité, nous, socialistes, avions présenté une mesure d'économie pour le budget et c'était cela: 7 millions de francs sur les rétributions données aux hauts cadres. Malheureusement, on n'a pas voulu en discuter dans le cadre du budget et cette mesure n'a pas été introduite alors qu'on aurait très bien pu gagner 7 millions de francs ici. Par contre, effectivement, nous avons introduit des mesures linéaires qui ont vraiment prétérité les catégories les plus faibles, soit en prestations soit en salaires, et vous voyez la bagarre qu'il y a eu pour 300 000 F ou 400 000 F. Or, là, il y avait 7 millions de francs à prendre et on n'y a pas touché ! Il y a quand même une notion de classes, il faut le dire ! Comment est survenue cette histoire ? C'est un coup syndical du PLR ! J'étais rapporteur de minorité pour le budget. En face de moi, il y avait Weiss comme rapporteur de majorité et, tout d'un coup, pratiquement en fin de débat, M. Hohl est venu avec un amendement demandant 8%. Il l'a déposé là, comme ça, un soir de fin décembre, juste avant Noël. Paf ! Un vote pour les cadres supérieurs ! C'était quand même incroyable, ce petit coup syndical pour les hauts cadres.

Ensuite, ce qui est extraordinaire, c'est qu'on nous balance qu'il faut comprendre que ce sont ces cadres qui dirigent l'Etat. Mais, Messieurs, sans le personnel qui doit travailler avec eux, ces cadres ne peuvent absolument rien faire ! Vous aurez beau être un bon cadre, un type très intelligent et très compétent, si vous n'avez pas du personnel en dessous, qui participe aux projets que vous mettez en place, vous ne faites rien, mais rien !

Monsieur le président du département des finances, vous l'avez indiqué, nous comprenons que, pour les agents fiscaux, vous ayez besoin de personnel de qualité. On n'en trouve pas beaucoup sur le marché et, malheureusement, il faut les payer bien. Monsieur le président, on peut comprendre que, dans ce cas-là, on puisse faire une petite entorse, mais faire une contribution unilatérale comme ça, pour le simple fait d'être cadre, c'est quand même assez extraordinaire !

Le plus extraordinaire toutefois, c'était quand on nous a parlé de démotivation. C'est la DRH des HUG qui est venue nous expliquer que les agents de la fonction publique n'avaient plus le sens du sacrifice et du service public, contrairement aux associations de cadres qui ont tout le temps indiqué leur dévouement à l'Etat. Ça, il fallait oser le dire ! Avancer la démotivation de la fonction publique et dire qu'aujourd'hui, ce sont seulement les cadres qui s'engagent, c'est quand même un problème et c'est quand même inadmissible !

Par ailleurs, je veux rappeler que vous avez attaqué les annuités des fonctionnaires ! On est arrivé jusqu'à 7 ou 8 millions de francs d'économies, après préservation des annuités des classes inférieures. Là, ça ne vous fait rien du tout et vous laissez ça comme ça ! Qu'on s'attaque aux annuités en disant que le personnel de l'Etat est trop rétribué, qu'il gagne trop...

Le président. Il vous reste trente secondes.

M. Alberto Velasco. Merci, Monsieur le président. Par contre, s'agissant des cadres, il n'y aurait pas de problème ? Effectivement, en ce qui concerne les socialistes, nous étions pour éliminer purement et simplement cette prébende donnée un soir à l'orée de Noël, le 18 ou le 20 décembre. Oui, c'était comme ça, Monsieur le président ! Nous sommes favorables à l'élimination de cela. Alors il y a une mesure qui est un pis-aller du président, que nous accepterons, évidemment: mieux vaut ça que rien du tout !

Le président. Il vous faut conclure.

M. Alberto Velasco. Il y a des gens qui ont reçu cette prébende sans la demander. La leur enlever maintenant, ça pourra poser certains problèmes, mais enfin, on doit quand même dénoncer de telles attitudes !

Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. le premier vice-président, M. Jean-Marc Guinchard.

M. Jean-Marc Guinchard (PDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, chers collègues, durant les travaux de la commission et en particulier durant les auditions auxquelles nous nous sommes livrés, nous sommes arrivés à un certain nombre de constats. Le premier constat est que manifestement, l'Etat n'est pas concurrentiel, du moins lorsqu'il s'agit d'engager des cadres relativement pointus ou, par exemple, des cadres supérieurs qui ont déjà fait une partie de leur carrière dans le privé. Le deuxième constat est que si l'Etat est généreux par rapport au privé - on peut le dire - avec certaines classes de fonctions se situant dans la fourchette moyenne ou basse, il ne peut pas l'être pour des cadres supérieurs très qualifiés et il fait face ici à une très forte concurrence, que ce soit dans l'administration en général ou pour les médecins dont on vient de parler, notamment par rapport à des hôpitaux comme le CHUV ou celui de Zurich. Je ne parlerais toutefois pas ici d'arrosage - le mot a été utilisé par M. Deneys tout à l'heure - puisque ces indemnités ne sont pas données à tout le monde et doivent correspondre à un certain nombre de critères. C'est vrai, le chef du département l'a reconnu en séance: certains dossiers pouvaient prêter à certains doutes et il s'agira dorénavant de mieux cadrer les choses, afin que le quatorzième soit réellement mérité. Une suppression de ce quatorzième salaire aurait des conséquences graves sur la motivation et sur la qualité des prestations des personnes qui seraient concernées. En matière de ressources humaines, c'est relativement bien connu et toutes les études le prouvent: ce n'est pas forcément une augmentation de salaire qui motive les gens, mais une diminution de salaire est un critère de démotivation important, quelle que soit la quotité de la diminution appliquée. Comment, en effet, expliquer cela à des cadres que vous avez engagés, que vous avez attirés d'un autre secteur où ils étaient éventuellement mieux payés ? Vous leur avez fait miroiter des avantages comme une bonne caisse de retraite et, éventuellement, un quatorzième salaire, pour leur annoncer après quelques années que, ma foi, tant pis, en raison d'une décision du Grand Conseil, cette indemnité... (Commentaires.) Je ne vous ai pas interrompu, Monsieur Deneys ! ...cette indemnité serait purement et simplement supprimée, alors qu'elle leur avait été accordée par ce même Grand Conseil et non pas, comme le prétend M. Velasco, un soir de lassitude, au bout d'un débat interminable.

Nous sommes également en plein contexte des fameux acquis. Durant les débats que nous avons consacrés au budget, la gauche nous a beaucoup parlé des fameux acquis absolument intouchables. Là, nous nous trouvons en face d'une certaine forme d'acquis, mais, évidemment, pour la gauche, ces acquis n'ont vraisemblablement pas la même valeur selon qu'il s'agit de cadres supérieurs ou des fonctions plus modestes. Dans ce contexte, le conseiller d'Etat a proposé au nom du Conseil d'Etat un amendement général avec les objectifs qui ont été détaillés par le rapporteur de majorité, je n'y reviendrai pas.

La conclusion du groupe démocrate-chrétien est d'entrer en matière et d'accepter le projet de loi, mais bien tel qu'il est sorti des travaux de la commission. Cela évitera de créer une distorsion entre des cadres de l'administration et des cadres des HUG, une distorsion inégalitaire qui serait extrêmement mal comprise. On attendra ensuite l'entrée en vigueur de SCORE afin d'arriver à des critères d'attribution qui soient plus clairs et plus transparents.

M. Pierre Conne (PLR). J'aimerais qu'on fasse un tout petit peu d'histoire, pour vous dire premièrement qu'il ne s'agit pas d'un quatorzième salaire. Vous ne trouverez ça dans aucun texte, c'est une invention de je ne sais pas qui, première chose ! Ensuite, d'où vient cette augmentation de 8,3% des salaires ? Elle vient des débats de 2008 sur la loi sur le treizième salaire. Dans le cadre des travaux de la commission des finances, sur proposition de l'administration, avait été présentée la comparaison de la progression des salaires à Genève par rapport aux autres cantons, dans la fonction publique et dans le privé. Et le constat avait été que la progression des salaires était la plus faible dans la fonction publique à Genève entre les basses classes et les classes plus élevées. L'introduction d'un treizième salaire allait aplatir encore plus cette courbe de progression, et c'est M. Hiler lui-même qui a proposé cette augmentation de 8,3%, de manière à éviter que cette situation ne s'aggrave avec l'introduction du treizième salaire; effectivement, il l'a proposé en disant qu'à partir de 2010, si la nouvelle grille des salaires n'était pas introduite, à ce moment-là, on devrait avoir une prime de 8,3% pour les cadres supérieurs. Vous pouvez revoir le rapport de la commission des finances à ce sujet. Ce n'est donc pas une prébende inventée à la dernière minute ni un coup de Jarnac, comme le disait tout à l'heure M. Velasco; c'est un rétablissement, légitime et équitable, de la progression des salaires pour la fonction publique. Pour cette raison, le PLR refusera l'entrée en matière sur ce projet de loi.

M. Lionel Halpérin (PLR). Pour replacer dans son contexte ce qu'on est en train de voter aujourd'hui, il y a une position, celle du parti socialiste, ou en tout cas de certains de ses membres, qui consiste à dire qu'à partir du moment où une tête dépasse un tout petit peu et que quelqu'un touche un salaire un peu meilleur qu'un autre, alors c'est bien de lui couper la tête; que c'est probablement mieux comme ça, parce que tout le monde est à égalité quant aux salaires. C'est au fond la volonté du parti socialiste et c'est celle-là que nous combattons. Le fait est qu'à partir du moment où cette augmentation de salaire avait été décidée, il fallait vérifier si elle était utile et si elle fonctionnait bien. Si elle ne fonctionnait pas bien, il était effectivement légitime de la remettre en question. C'est dans le cadre du projet SCORE et de toute la réflexion à mener sur les salaires que cette réflexion aurait dû et devrait être menée. On doit réfléchir et repenser la grille salariale de manière générale. Ce qu'on essaie de nous faire faire ce soir, c'est au contraire de discuter en regardant la grille salariale par le petit bout de la lorgnette, avant même qu'on se soit lancé dans ce projet de réforme SCORE, avec pour conséquence de démotiver l'administration. En réalité, on est en train de saborder le fonctionnement de l'Etat et ce n'est pas un bon projet. C'est pour cela que nous refuserons l'entrée en matière.

Cela dit, je note qu'un amendement a été déposé par MM. Deneys et Stauffer; il s'inspire directement d'un amendement que j'avais moi-même déposé en commission pour dire qu'il fallait protéger les médecins, et pas seulement les médecins, mais aussi le personnel académique de l'université. Parce que les uns comme les autres doivent être les meilleurs possible et qu'il faut pouvoir attirer les meilleurs à Genève. Ce n'est pas rendre service à la qualité de notre médecine, ni à la qualité de nos prestations universitaires que de nous priver de cette possibilité-là. Ayant remarqué que l'amendement ne visait que les médecins, nous avons déposé un sous-amendement qui visait à rétablir les choses, c'est-à-dire à intégrer également le personnel académique. Ce n'est pas la solution idéale pour le PLR qui préférerait ne pas entrer en matière sur ce projet de loi, parce qu'il faut réfléchir dans la globalité, mais si on le fait, préservons au moins de manière aussi large que possible les professions académiques qui sont au coeur du fonctionnement de notre cité et dont on doit autant que possible maintenir l'excellence. (Applaudissements.)

M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, vous m'appellerez Copperfield, ce soir, vous savez, ce magicien qui veut modifier les choses, changer les équations. J'ai le grand plaisir de vous annoncer que notre excellent rapporteur de majorité Jean-François Girardet deviendra ce soir rapporteur de majorité...

Une voix. Minorité !

M. Eric Stauffer. Non, non ! Majorité ! Il deviendra rapporteur de la majorité. Et, la magie, c'est que M. Deneys se retrouvera aussi dans la majorité. Vous voyez comme tout arrive dans ce parlement ! Et voilà !

J'aimerais dire, pour être un tout petit peu plus sérieux, qu'il y a effectivement des arguments qui font sens. Le quatorzième salaire était un peu un sujet tabou, c'est vrai, nous l'admettons bien volontiers, au Mouvement Citoyens Genevois. Mais comme nous sommes soucieux d'une équité par rapport aux responsabilités, nous disons que le quatorzième salaire n'est pas du tout équitable. Vous avez des hauts fonctionnaires de l'Etat qui dirigent 1900 personnes, d'autres un millier et d'autres sept ! Et encore, on pourrait presque les diviser par deux, c'est sur le papier qu'ils dirigent sept personnes. Or, ils touchent exactement la même indemnité ! Là, effectivement, il y a un problème. On est bien d'accord que, dans la motivation, ça devient une rente de situation et nous, on n'aime pas vraiment ça, au Mouvement Citoyens Genevois. Le Mouvement Citoyens Genevois a donc décidé de mettre un terme à l'ère du quatorzième salaire, et c'est ce que nous allons faire ce soir !

Maintenant, certains services du grand Etat doivent demeurer des pôles d'excellence et le changement serait par trop brutal si on l'assimilait aux exemples que je viens de vous donner. Le Mouvement Citoyens Genevois dépose donc un amendement - vous l'avez déjà reçu - qui dit que, pendant une période transitoire allant jusqu'en 2017 au maximum, le conseiller d'Etat en charge des Hôpitaux universitaires de Genève devra modifier la grille des rétributions pour qu'il n'y ait plus de quatorzième salaire; charge au Conseil d'Etat de refaire cette grille des salaires en incluant par exemple - je donne quelques pistes - des primes d'encadrement pour que les gens comme les médecins qui ont des spécificités que nous recherchons pour notre magnifique hôpital universitaire de Genève ne soient pas tentés d'aller dans le privé parce que les salaires y seraient meilleurs. Et s'il y a un endroit à Genève où nous devons maintenir des rémunérations qui sont proches de celles du privé, c'est bien aux Hôpitaux universitaires de Genève, mais, encore une fois, pas de manière automatique, de manière ciblée: pour cela, nous faisons confiance au conseiller d'Etat Mauro Poggia. Alors j'enjoins à la minorité restante, ce soir, de rallier la majorité et de voter l'abolition du quatorzième salaire...

Le président. Il vous reste trente secondes.

M. Eric Stauffer. Je vais conclure ! ...de soutenir l'amendement déposé par mon collègue Roger Deneys et moi-même et de refuser l'amendement déposé par M. Halpérin.

Une voix. Le sous-amendement !

M. Eric Stauffer. Le sous-amendement, effectivement. Comme ça, nous pourrons avancer dans la machine Etat, réaliser des économies substantielles et, surtout, réparer une iniquité par rapport à ceux qui ont de vraies responsabilités.

Le président. Il vous faut conclure !

M. Eric Stauffer. J'ai dit !

Mme Jocelyne Haller (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, le moins qu'on puisse constater ici, c'est qu'il y a deux poids deux mesures; cela a déjà été mis en évidence tout à l'heure. Il y a moins d'une semaine, ceux-là même qui refusaient de rétablir les 75 F manquant à des gens bouclant leur budget avec environ 2800 F par mois défendent aujourd'hui le quatorzième salaire de fonctionnaires de la classe 27 et plus dont le salaire débute à 144 000 F par an, rappelons-le, soit près de 11 000 F par mois ! Il faut juste prendre acte de cette différence et du fait que la réalité des uns n'est de loin pas celle des autres.

Je veux simplement rappeler qu'en 2008, alors que la fonction publique ployait déjà sous la charge, que les effectifs étaient réduits, que la fonction publique et le service public étaient sous pression, ici, dans ce même parlement, on octroyait une augmentation de salaire de 8,3%. Oui, 8,3% alors qu'on demande aux autres de se serrer la ceinture ! Là, les chantres de la politique d'économie budgétaire, on ne les entend pas pérorer sur cette question !

J'aimerais rappeler que cette mesure est inéquitable; c'est une inégalité de traitement, parce qu'on nous a beaucoup parlé de la motivation des cadres, qu'il fallait absolument préserver et encourager par le maintien de ce quatorzième salaire, de cette augmentation de salaire de 8,33%. Et la motivation des autres, de la base, de tous les membres de la fonction publique et du secteur subventionné ? La motivation de ceux-là sans qui le service public ne pourrait être assuré n'est-elle pas importante ? Avec eux, on n'hésite pas: on réduit non seulement les effectifs, mais aussi les moyens dont ils disposent pour répondre aux besoins de la population. Là, la motivation devient quelque chose de secondaire, et ce n'est pas acceptable; c'est injuste et c'est dommageable pour les finances de l'Etat.

Le Conseil d'Etat a présenté un amendement et, de son propre aveu, il a dit qu'il avait un effet quasi inexistant. Vous voyez donc bien le sort qu'on pourrait réserver à un amendement de ce type-là. C'est pourquoi nous entrerons en matière sur ce projet de loi, parce qu'il est important et qu'il tente de rétablir une certaine égalité de traitement pour l'ensemble du personnel de la fonction publique, pas simplement pour certains, pas simplement pour les hauts salaires. (Commentaires.)

Aujourd'hui, on nous présente un nouvel amendement. Il ne nous satisfait que très partiellement, parce qu'il préserve une catégorie de membres de la fonction publique, il préserve les avantages de certains, voire leurs privilèges, n'hésitons pas à les qualifier ainsi. En même temps, il permet de faire un pas vers l'égalité de traitement à laquelle nous aspirions, il permet de se rapprocher aussi du texte de loi, et c'est important, parce que la loi a été dévoyée, comme l'a expliqué M. Deneys tout à l'heure. Enfin, nous refuserons le sous-amendement présenté par le PLR, parce que ce n'est qu'une manière de réduire encore l'impact du premier amendement présenté par le parti socialiste et par le MCG. C'est pourquoi je vous invite à entrer en matière sur ce projet de loi et à voter l'amendement de MM. Deneys et Stauffer. (Applaudissements.)

Le président. Je vous remercie, Madame la députée. Je passe la parole à Mme la députée Lisa Mazzone pour vingt-cinq secondes.

Mme Lisa Mazzone (Ve). Merci, Monsieur le président. Je voulais juste vous faire part de mon étonnement quant au discours pour le moins alarmiste de l'Entente sur les conséquences des décisions du Grand Conseil sur des salaires qui sont effectivement fixés dans une loi. Je n'ai jamais entendu de tels discours quand il s'agissait de couper l'annuité, ce que l'Entente décide de faire assez régulièrement ! Je rejoins donc ma préopinante sur le fait qu'il y a deux poids deux mesures. Alors un peu de cohérence !

M. Marc Falquet (UDC). C'est vrai que l'Union démocratique du centre a soutenu les mesures d'économies du Conseil d'Etat sur le social, mais là nous partageons totalement vos vues pour toucher aussi les gens les plus favorisés de l'Etat. Dire qu'on va porter préjudice aux gens qui sont déjà les mieux payés en leur enlevant un bonus, leur quatorzième salaire, alors que dans le privé le treizième salaire n'est déjà pas acquis et que les gens doivent se serrer la ceinture !

Je trouve que c'est grave de devoir motiver les gens, surtout les médecins qui ont signé le serment d'Hippocrate, ne l'oublions pas ! Ce serment a été modifié pour des raisons économiques, mais un ancien serment d'Hippocrate disait à la base: «Je ne me laisserai pas influencer par la soif du gain ou la recherche de la gloire.» Et aussi: «Je donnerai mes soins à l'indigent et à quiconque me le demandera.» Donc, si les gens partent parce qu'ils n'ont plus ce bonus, qu'on les laisse partir ! Moi, je préfère des gens qui soient vraiment au service de la communauté sans qu'ils aient besoin d'être motivés par un quatorzième salaire, ce qui est vraiment scandaleux à mon avis !

M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, ce que ce parlement s'apprête à voter me cause de gros soucis, franchement. Et je vais vous dire pourquoi... (Commentaires.) Je vais vous dire pourquoi ! Tout d'abord, il est très facile de mettre en rapport notre souci de rétablir les finances publiques cantonales et de faire des économies et - comme au marché de Brive-la-Gaillarde dans la fameuse chanson de Brassens, où tout le monde se réconcilie lorsqu'il s'agit de taper sur les rosses, en l'occurrence les policiers - de fustiger les collaborateurs, de taper sur ceux qui sont les plus formés et les plus responsabilisés de la fonction publique, celles et ceux avec qui nous travaillons en direct, celles et ceux qui ne comptent pas leurs heures, qui ne sont pas soumis au décompte des heures. Je peux vous le garantir... (Commentaires.)

Le président. S'il vous plaît !

M. Serge Dal Busco. Ecoutez celui qui vous parle, Mesdames et Messieurs les députés ! D'abord, il vous a écoutés religieusement et très calmement, et il parle avec la conviction de la connaissance que lui ont apportée ces douze à treize mois dans cette fonction. Ce sont des gens que l'on côtoie tous les jours et parfois même une bonne partie de la nuit lorsque c'est nécessaire. Je peux vous garantir que mon collègue ici présent et moi-même, nous savons de quoi nous parlons.

Que se passe-t-il avec l'échelle de rémunération actuelle, normale, dirais-je, celle qui est inscrite dans la loi de l'Etat de Genève ? Si on la compare - ce que nous avons fait - avec tous les autres cantons suisses, nous avons jusqu'à une certaine classe... (Commentaires.) Vous permettez que je vous explique la réalité - telle que je la vois moi, en tout cas ? Jusqu'à une certaine classe de salaire, en l'occurrence pour les salaires en dessous de cette classe, nous sommes très clairement concurrentiels par rapport aux autres cantons et par rapport au secteur privé. Cela ne veut pas dire dans l'absolu que ces salaires soient excessifs, mais nous sommes concurrentiels. En moyenne, nous sommes au-dessus, mais à partir d'un certain niveau et en particulier pour les collaborateurs qui ont des tâches dirigeantes, nous sommes très nettement en dessous. Les chiffres sont disponibles, vous pouvez les vérifier !

L'indemnité octroyée depuis 2009 - ce n'est pas un quatorzième salaire ! - vise à corriger cette anomalie et nous permet de garder dans notre administration des talents - Dieu sait si on en a besoin ! - et également d'en attirer. C'était le cas lorsqu'on a introduit, lorsque vous avez introduit cette disposition en 2008 ou 2009; il s'agit de gens qui pourraient gagner beaucoup plus d'argent. Cela concerne une administration que je connais bien, l'administration fiscale cantonale dont on a parlé tout à l'heure. Les mêmes bancs qui fustigent aujourd'hui les dirigeants de cette administration ont critiqué son manque d'efficacité. Je peux vous garantir que ces gens-là font un boulot fantastique; je parle en tout cas du département que je connais le mieux. Ces personnes-là, Mesdames et Messieurs les députés, vous vous apprêtez à leur enlever quelque chose qui est une partie de leur revenu à l'Etat de Genève, peut-être pas uniquement. Toutefois, aujourd'hui, si vous l'enlevez, cela risque d'être une source non pas de démotivation mais de déconsidération. A l'heure où dans cette république et dans cette administration fiscale en particulier, nous avons besoin de toutes les énergies, nous demandons à ces personnes en charge de responsabilités de faire preuve d'inventivité, de créativité et d'un engagement encore accru parce que nous devons réformer cet Etat. Nous devons le rendre plus fort et plus souple en veillant à des prestations de qualité. Or, vous vous apprêtez précisément à faire exactement le contraire de ce qu'il faudrait. Je vous le dis de manière très solennelle au nom du Conseil d'Etat: réfléchissez bien ! Otez de vos réflexions des considérations autres que celles que je vous invite à faire, je vous en prie. Réfléchissez bien aux conséquences, d'autant plus qu'un amendement général que nous vous avons proposé a été voté, il y a eu une majorité pour cela en commission. Cet amendement prévoit de régir les mois qui vont s'écouler jusqu'à l'entrée en vigueur d'une nouvelle réévaluation, d'une nouvelle grille salariale qui tiendra compte précisément dans chaque fonction des cahiers des charges, qu'elle soit dirigeante ou qu'elle ne soit pas dirigeante. On va affiner, pour chaque poste, et on va déterminer, pour chaque poste, au niveau du salaire et de la classification, si les personnes qui l'exercent sont dans une position de direction et si elles méritent en quelque sorte qu'on considère cette position avec les responsabilités qui vont avec.

C'est quelque chose sur quoi le Conseil d'Etat s'est engagé à aller vite. Nous vous avons promis de déposer à la fin de cette année un projet de loi qui va permettre pour chacune de ces fonctions un calibrage fin, précisément. Donc, franchement, ce que nous vous proposons avec cet amendement, avec cette loi issue des travaux de la commission, c'est précisément cette transition jusqu'à cette échéance toute proche. On a mis des limites: on ne va plus octroyer cette indemnité pour les nouveaux engagements. Les nouveaux collaborateurs engagés à partir d'aujourd'hui jusqu'à l'entrée en vigueur de cette nouvelle loi sur SCORE vont entrer au service de l'Etat de Genève en connaissance de cause, en sachant quel sera leur traitement. Ce n'est pas du tout la même chose que pour ceux qui en bénéficient aujourd'hui.

S'agissant des amendements, nous sommes dans le premier débat. Je vous invite à entrer en matière et à voter le projet de loi tel qu'issu de la commission. En ce qui concerne les amendements, Mesdames et Messieurs, il est de la responsabilité du Conseil d'Etat d'organiser son administration de la manière adéquate. Il est assez cocasse d'entendre M. le rapporteur de minorité fustiger les Hôpitaux universitaires de Genève en disant qu'on s'est livré à je ne sais quelles manoeuvres et soutenir aujourd'hui un amendement qui conserve précisément cette prérogative dans les Hôpitaux universitaires de Genève ! Ensuite, d'autres amendements viennent proposer la même chose avec je ne sais quel autre secteur - oui, en l'occurrence, le secteur académique. Mais enfin, qu'est-ce que c'est que ce marchandage ? Qu'est-ce que vous faites avec d'autres services, d'autres directions qui méritent tout autant ?

Franchement, Mesdames et Messieurs les députés, encore une fois, je vous dis que la proposition qui vous est faite provient du Conseil d'Etat et que c'est une bonne proposition. Elle est limitée dans le temps et le Conseil d'Etat est décidé à réévaluer complètement ces fonctions. Tout cela sera intégré dans un système cohérent qui ne souffrira d'aucune critique, je peux vous l'assurer. Encore une fois, réfléchissez bien avant de voter sur cette question. Votez le projet de loi raisonnable qui sort de commission, sinon, cela risque de nous causer de gros problèmes avec notre administration, celle précisément que l'on appelle maintenant à plus d'engagement, à plus de motivation, à plus de travail, à plus d'inventivité, à plus de créativité et à plus d'agilité, comme nous l'avons précisé dans notre programme de législature. Je vous remercie de nous suivre dans ces conclusions. (Applaudissements.)

Le président. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat. Je vais donc vous faire voter l'entrée en matière sur ce projet de loi.

Mis aux voix, le projet de loi 11328 est adopté en premier débat par 63 oui contre 26 non.

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.

Le président. Nous sommes saisis d'un amendement de MM. Stauffer et Deneys que vous avez tous dû recevoir à vos places, mais je vous fais d'abord voter l'abrogation de l'article 23A, puis nous passerons au sous-amendement de MM. Conne et Halpérin. Monsieur le conseiller d'Etat, vous voulez reprendre la parole sur l'abrogation de l'article 23A ?

M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Je voudrais vous dire à propos de cet amendement que le charcutage - pardonnez-moi l'expression - ou cette espèce d'arrangement consistant à faire du bricolage est précisément une chose à ne pas faire, parce que ce que nous voulons, c'est donner de la cohérence à notre échelle des traitements. C'est ce que nous allons engager avec le projet SCORE, précisément, et aller dans le sens de privilégier les uns au détriment des autres, ce n'est pas souhaitable. Je vous invite donc à refuser cet amendement.

Le président. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat. (Remarque.) Vous n'avez plus de temps de parole, je vais donc faire voter l'assemblée sur l'abrogation de l'article 23A.

Mis aux voix, cet amendement (abrogation de l'article 23A) est adopté par 58 oui contre 28 non et 3 abstentions.

Le président. Nous passons donc au sous-amendement de MM. Conne et Halpérin, qui consiste à insérer à l'article 23B, après «jusqu'au 31 décembre 2017», les mots suivants: «le personnel académique de l'université de Genève y compris les médecins des HUG exerçant une fonction académique, dès la classe 27». (Remarque.) Non, vous n'avez plus de temps de parole. Je donne une minute aux rapporteurs.

M. Jean-François Girardet (MCG), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. J'étais étonné de ne pas pouvoir m'exprimer sur le premier amendement, parce que j'aurais pu éviter de m'abstenir puisque je suis représentant de la majorité, et la majorité refusait normalement cet amendement. J'aurais pu expliquer ma position et celle de ceux qui le refusaient, éventuellement, pour dire que cet amendement avait été présenté sans l'université, évidemment. L'amendement qui va être présenté par M. Deneys et par M. Stauffer pour le MCG a été présenté en commission, je l'ai dit: un PDC, trois PLR et trois MCG l'avaient soutenu, avec bien sûr l'exception pour les cadres non seulement des HUG, mais également de l'Université de Genève. On était donc très proche de ce qui est proposé dans l'amendement socialistes-MCG.

Par contre, je peux dire aussi que des erreurs ont été commises. Je ne vais pas prendre la défense du Conseil d'Etat, mais dans l'amendement général, il n'y a pas de maintien de ce quatorzième salaire puisque l'alinéa 2 prévoit que les nouveaux cadres ne touchent plus ce quatorzième salaire et qu'il serait retiré à ceux des cadres qui ne remplissent plus les conditions.

Je voulais également dire que, dans la perspective de l'élaboration de SCORE, ce principe d'indemnisation devrait être revu et corrigé, et il a également été confirmé qu'il y aurait éventuellement la possibilité de faire des contrats de droit privé pour mettre en valeur les fonctions avec charges administratives et de personnel des hauts fonctionnaires. Il faut constater que le versement de cette indemnité, aujourd'hui, induit une inégalité de traitement, et je crois que le Conseil d'Etat en était totalement conscient. C'est une inégalité de traitement entre les cadres supérieurs, du fait que cette indemnité est versée systématiquement, dès la classe 27, que le haut fonctionnaire dirige zéro, sept ou plus de collaborateurs subordonnés. Je pense que l'amendement général du Conseil d'Etat tentait de corriger cette inégalité de traitement.

M. Roger Deneys (S), rapporteur de minorité. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je crois qu'en déposant cet amendement qui concerne les HUG, le MCG et les socialistes font preuve d'un sens des responsabilités qu'il faut vraiment reconnaître dans ce Grand Conseil. Aujourd'hui, parmi les bénéficiaires de ce quatorzième salaire, il y a 63 médecins chefs de service, 68 médecins adjoints agrégés et responsables d'unités, 31 médecins adjoints responsables d'unités, 72 médecins adjoints agrégés. Ce sont les chiffres de 2012, cela a encore pu changer, et j'aimerais insister sur le fait que les HUG ont dévoyé le but de ce quatorzième salaire prévoyant une indemnité de 8,3% pour les cadres de la classe 27 exerçant des responsabilités hiérarchiques: Mesdames et Messieurs les députés, les HUG l'ont utilisé autrement, pour compenser des différentiels de salaires par rapport à d'autres hôpitaux universitaires.

Le sens des responsabilités des députés socialistes, MCG et de ceux qui soutiennent cet amendement, c'est de dire que nous ne voulons pas que des médecins compétents quittent l'hôpital cantonal, et nous demandons que le Conseil d'Etat prenne ses responsabilités pour établir une nouvelle grille salariale adéquate, appropriée, pour les médecins; et vous avez trois ans pour le faire avec cet amendement ! (Brouhaha.) Ce qui est bien suffisant, Monsieur le conseiller d'Etat ! Nous avons le sens des responsabilités et c'est pour ça que nous ne supprimons pas immédiatement cette catégorie de bénéficiaires !

M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Monsieur le président, selon les critères qui appartiennent aux auteurs de cet amendement, on devrait préserver l'indemnité pour cette catégorie de personnel, quand bien même on a fustigé l'attitude des HUG ? Mais quid d'autres collaborateurs tout aussi méritants, dans d'autres services de l'administration ? Je peux vous garantir que j'en connais quelques-uns ! Qu'allez-vous faire par rapport à ceux-là ? Vous allez leur enlever des éléments qui, en termes financiers, revêtiront une importance peut-être variable selon les individus, mais qui, en termes de considération, auront un effet dévastateur. Dévastateur, Monsieur Deneys ! Ce que j'essaie de défendre ici, c'est la qualité de notre administration et la motivation de gens sur lesquels nous comptons tous les jours et aussi parfois une partie de la nuit. Vous tenez des considérations qui ne reflètent absolument pas la réalité ! Monsieur le président, vous me pardonnerez de m'emporter quelque peu, je sais que ce n'est pas du tout ce qui doit être fait, mais c'est pour vous exprimer ma conviction qu'en votant ce projet de loi, vous voulez emprunter une fausse route ! (Applaudissements.)

Le président. Je vous remercie d'exprimer vos convictions, Monsieur le conseiller d'Etat. Je vais vous faire voter en premier lieu sur le sous-amendement de MM. Conne et Halpérin, que je viens de lire.

Mis aux voix, ce sous-amendement est rejeté par 68 non contre 17 oui et 3 abstentions.

Le président. Je vous fais voter l'amendement de MM. Stauffer et Deneys, dont voici la teneur:

«Article 23B Personnel médical (nouveau)

Dès l'entrée en vigueur de la présente loi et jusqu'à l'entrée en vigueur d'une nouvelle évaluation des fonctions mais au plus tard jusqu'au 31 décembre 2017, les médecins des HUG dès la classe 27 exerçant des responsabilités hiérarchiques peuvent percevoir une indemnité, égale à 8,3% de leur salaire annuel, versée en 13 mensualités. Le traitement, indemnité incluse, ne peut dépasser le montant correspondant à la classe 33, position 14, de l'échelle des traitements. Le Conseil d'Etat fixe par règlement la liste des bénéficiaires.»

Mis aux voix, cet amendement (création d'un article 23B) est adopté par 59 oui contre 25 non et 3 abstentions.

Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté, de même que l'article 2 (souligné).

Troisième débat

La loi 11328 est adoptée article par article en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 11328 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 57 oui contre 27 non et 4 abstentions.

Loi 11328

PL 11403-A
Rapport de la commission fiscale chargée d'étudier le projet de loi de Mmes et MM. Stéphane Florey, Bernhard Riedweg, Christo Ivanov, Thomas Bläsi, Eric Leyvraz, Marc Falquet, Michel Amaudruz, Patrick Lussi, Michel Baud, Norbert Maendly, Christina Meissner, Pascal Spuhler, Jean Sanchez, Sandra Golay, Jean-François Girardet, Francisco Valentin, Thierry Cerutti modifiant la loi sur l'imposition des personnes physiques (LIPP) (D 3 08) (Pour une politique familiale accrue en matière de fiscalité)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session XI des 18 et 19 septembre 2014.
Rapport de majorité de Mme Magali Orsini (EAG)
Rapport de minorité de M. Christo Ivanov (UDC)

Premier débat

Le président. Nous attaquons maintenant le PL 11403-A en catégorie II, quarante minutes. Je prie les rapporteurs de bien vouloir s'installer à leur table... (Un instant s'écoule.) ...et je cède la parole à la rapporteure de majorité, Mme Magali Orsini.

Mme Magali Orsini (EAG), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président... (Brouhaha.)

Le président. Mesdames et Messieurs, merci de regagner vos places et de faire silence pour que nous puissions écouter l'oratrice !

Mme Magali Orsini. Merci, Monsieur le président... (Un instant s'écoule.) C'était un projet de loi de l'UDC, non ? (Remarque.) Oui, il s'agit d'un projet de loi de l'UDC. En ce qui nous concerne, il nous a paru d'emblée comme susceptible - je dirai ça assez directement - de renvoyer les femmes à la maison. (Rires.) Dès l'abord, nous avons donc dit que nous refuserions toute incitation de ce genre et avons été soutenus par une commissaire Verte qui a balayé l'argument selon lequel ce serait de plus en plus souvent le mari qui reste à la maison et témoigné du fait qu'elle ne parvenait pas à s'épanouir personnellement dans son rôle de femme au foyer.

Voici l'argumentaire des auteurs: la pénurie des places de crèche atteint des niveaux préoccupants, les coûts de structures d'accueil de la petite enfance sont très importants, c'est la famille qui est en premier lieu responsable de l'éducation et du développement des enfants et aucun mode de garde ne doit être discriminé par l'Etat. L'idée est de favoriser fiscalement les parents qui gardent eux-mêmes leurs enfants et font par conséquent des efforts considérables, par exemple en diminuant leur taux d'activité ou en renonçant à toute activité professionnelle. Il faudrait que je retrouve ce document... (Un instant s'écoule.) Les initiants du projet de loi proposent la nouvelle teneur suivante à l'article 35 de la loi sur l'imposition des personnes physiques: «Les contribuables mariés ou liés par un partenariat enregistré vivant en ménage commun, peuvent déduire, pour chaque enfant jusqu'à l'âge de 12 ans au cours de la période fiscale, un montant de 4000 F par année. La même déduction est octroyée aux contribuables célibataires, veufs, divorcés, séparés de corps ou de fait, lorsqu'ils tiennent ménage avec leurs enfants mineurs dont ils ont la garde.» L'entrée en matière a été refusée par la majorité des commissaires, et nous vous recommandons de faire de même en plénière.

M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, le PL 11403 propose la chose suivante: «Les contribuables mariés ou liés par un partenariat enregistré vivant en ménage commun, peuvent déduire, pour chaque enfant jusqu'à l'âge de 12 ans au cours de la période fiscale, un montant de 4000 F par année. La même déduction est octroyée aux contribuables célibataires, veufs, divorcés, séparés de corps ou de fait, lorsqu'ils tiennent ménage avec leurs enfants mineurs dont ils ont la garde.» Ce projet de loi propose une alternative à la pénurie de places de crèche à Genève, qui atteint un niveau préoccupant. Les coûts des infrastructures d'accueil de la petite enfance sont très importants pour la collectivité, principalement pour les communes qui en assument le financement. Dans un rapport sur la petite enfance, la Cour des comptes parlait d'un coût pour les finances publiques supérieur à 100 millions de francs par an, en sus de ceux assumés par la famille, soit 10% du revenu familial brut. A Genève, le prix d'une place de crèche varie entre 30 000 F et 35 000 F en raison des charges de personnel, qui représentent 85% du coût. Il faut relever l'échec de la loi sur les structures d'accueil de la petite enfance et sur l'accueil familial de jour, qui n'atteint pas l'objectif d'adapter les offres de places d'accueil à la demande et risque de compromettre la concrétisation du contreprojet à l'IN 143 voté par le souverain le 17 juin 2012. Le PL 11403 veut mettre la famille au centre des préoccupations, car c'est elle qui est responsable de l'éducation et du développement de ses enfants. Pour toutes ces raisons, le groupe UDC et la minorité que je représente vous demandent d'accepter l'entrée en matière sur ce projet de loi.

Mme Sophie Forster Carbonnier (Ve). Ce projet de loi ne porte pas essentiellement sur la question de savoir si les femmes au foyer s'épanouissent ou non... (Rires. L'oratrice rit.)

Le président. Est-ce que ça va aller, Madame ?

Mme Sophie Forster Carbonnier. Je suis personnellement extrêmement épanouie... (L'oratrice rit.) Excusez-moi !

Le président. Reprenez votre respiration !

Mme Sophie Forster Carbonnier. Les motivations qui ont poussé la majorité de cette commission à refuser très clairement ce projet de loi sont les suivantes: nous venions d'être consultés sur le plan fédéral avec une initiative allant dans le même sens et que la population suisse avait refusée très clairement, tout comme la population genevoise. Nous avons donc trouvé un peu étrange que l'UDC revienne à la charge avec un projet de loi visant à contourner une décision populaire extrêmement récente. C'est la raison pour laquelle je vous appelle, Mesdames et Messieurs, non pas pour l'épanouissement des femmes mais pour le respect du vote populaire, à refuser ce projet de loi. Je vous remercie, Monsieur le président. (L'oratrice rit. Applaudissements.)

Le président. Merci, Madame la députée, de mettre un peu de bonne humeur dans notre bac à sable ! Je donne la parole à M. le député Stéphane Florey.

M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Monsieur le président. Ce projet de loi a été déposé quasi au lendemain de la votation sur les crèches, que la gauche s'est appliquée à faire capoter en refusant par là même d'augmenter significativement le nombre de places en crèche. Voilà pourquoi ce texte a été déposé, il s'agissait d'amener une autre solution pour lutter contre la pénurie qui va malheureusement perdurer encore un bon moment. Notre groupe propose des solutions en faveur des familles qui n'ont pas de possibilités de faire garder leurs enfants.

D'accord, on a voté au niveau fédéral. Mais - vous transmettrez à Mme Forster Carbonnier, Monsieur le président - il ne faut pas confondre le niveau fédéral avec le cantonal puisque, comme c'est mentionné dans l'exposé des motifs et le rapport, quatre cantons appliquent actuellement ce procédé au niveau cantonal: Zoug, Lucerne, le Valais et Nidwald. Ça fait des années qu'ils l'appliquent, et la population en est entièrement satisfaite. Il faut d'ailleurs relever que ces mêmes cantons précisément ont refusé l'initiative fédérale parce qu'ils ont été sensibles aux arguments du Conseil fédéral, qui conseillait de la rejeter. Mais ils n'ont en aucun cas remis en cause le principe de la baisse de fiscalité proposé au niveau cantonal; cet argument ne tient donc absolument pas la route.

Je suis entièrement d'accord avec Mme Orsini: le seul argument qui soit vraiment ressorti de nos débats, ce n'était pas celui de l'initiative mais bel et bien celui des mauvaises intentions que la gauche essaie de prêter à notre groupe en prétendant que nous prônons le retour des femmes au foyer. Cet argument ne tient pas non plus la route puisque, comme c'est également mentionné dans le projet de loi, si vous jetez un oeil aux statistiques, de plus en plus d'hommes «se sacrifient» - entre guillemets - pour rester à la maison, et c'est de plus en plus souvent la femme qui rapporte le plus gros salaire. Vu la situation des ménages en Suisse actuellement, il n'y a pas photo: c'est celui qui gagne le plus - que ce soit l'homme ou la femme - qui conserve son activité à 100%, et c'est celui qui gagne le moins - que ce soit l'homme ou la femme - qui reste à la maison. C'est ça, la réalité ! Vous la niez purement et simplement, et pourquoi ? Parce que, comme d'habitude, ce projet de loi ne vous plaît pas, et vous essayez de lui prêter toutes les mauvaises intentions du monde. Voici le résultat: malheureusement, ce projet de loi va probablement être refusé, la situation des familles ne sera pas améliorée pour autant, il n'y aura de toute façon pas davantage de places en crèche demain qu'aujourd'hui...

Le président. Il vous faut conclure.

M. Stéphane Florey. ...et la situation va ainsi rester figée encore pour un bon nombre d'années. Malgré tout, je vous demande d'accepter ce projet de loi, et on verra ce qu'il en adviendra.

Mme Marie-Thérèse Engelberts (MCG). Je pense qu'il est très agréable d'être une femme au XXIe siècle, surtout quand on regarde un petit peu en arrière. Actuellement, on a la chance de pouvoir faire des choix; peut-être pas toutes les femmes, mais quand même la plupart. Alors c'est très ingénieux, au vu de l'actualité fiscale, d'arriver avec un projet de loi sous l'angle du porte-monnaie, c'est très intéressant. Pour ma part, je trouve ça plutôt insidieux. C'est comme pour les personnes à l'assistance sociale à qui on dit qu'on va donner un emploi mais qui vont gagner moins que ce qu'elles pourraient toucher à l'assistance. C'est un peu la même chose, et je trouve ça très pervers. Mes chères compagnes, combien de dizaines d'années a-t-il fallu pour ne serait-ce qu'espérer un brin de liberté de choix dans ce que l'on veut faire, que ce soit au niveau professionnel, personnel, politique, culturel ou de nos enfants ? Mais qui va encore me dicter si je dois rester à la maison pour éduquer mes enfants ?

Et surtout, pourquoi jusqu'à l'âge de 12 ans ? La période de l'adolescence est très critique, et quand on est mère de famille, qu'on travaille et qu'on fait de la politique en même temps, c'est sûr qu'on ne réussit pas tout très bien. Mais les hommes ne feraient pas mieux ! J'aimerais préciser que les périodes critiques des enfants ne se situent pas forcément entre 0 et 4 ans juste parce qu'un psychologue l'a dit. J'aime beaucoup Mme Dolto, mais depuis, on a quand même trouvé autre chose. La petite enfance n'a pas lieu que de 0 à 4 ans. Vous qui avez voulu placer davantage d'enfants dans les crèches par rapport au personnel professionnel qualifié pour s'en occuper, qu'en est-il finalement ? Vous dites tout et son contraire ! C'est vraiment très insidieux, et je regrette que cette proposition vienne de la part de messieurs. Votre femme gagne plus, et alors ? «And so what ?» Vous mélangez tout ! Vous pouvez décider de rester à la maison si vous le voulez, il n'y a aucun problème ! Quant à moi, je n'ai pas trouvé celui qui voulait rester à la maison, mais peut-être que vous trouverez parce qu'il y a plus de femmes qui sont sensibles à ça. J'aurais voulu rester à la maison quand mes filles étaient adolescentes, ça oui ! Avoir plus de temps au moment de leur adolescence, au moment où elles passaient du secondaire à l'université ou à la vie professionnelle, de même qu'à d'autres moments où il y avait un deuil ou des choix à faire au niveau familial.

Ce projet, c'est vraiment regarder les choses par le petit bout de la lorgnette. Celles qui veulent rester à la maison pour s'occuper des enfants le font, elles ne vous le demandent pas ! Elles ne vous demandent même pas forcément de les payer pour ça, parce qu'il y a encore une certaine tradition et un certain nombre de valeurs dans notre pays. Je suis d'origine italienne et toute ma vie, j'ai été entourée par des gens qui disaient que la «mamma» doit rester à la maison. Eh bien non, la «mamma» décide ce qu'elle veut, quand elle veut, et on nous a donné les moyens et les lois pour le faire ! Je trouve ça vraiment très agaçant. (Quelques applaudissements.)

M. Thomas Wenger (S). Mesdames et Messieurs les députés...

Une voix. C'est le papa qui parle !

M. Thomas Wenger. ...chers collègues... (L'orateur rit.) C'est le papa, effectivement ! Tout d'abord, j'entends bien ce qu'a dit ma préopinante MCG mais, du coup, je n'ai pas très bien compris ce que le groupe MCG allait faire étant donné qu'il a quand même signé ce projet de loi. Est-ce là de nouveau un retournement de veste ? Si c'est le cas, tant mieux !

Que propose ce texte ? Il propose 4000 F de déduction par enfant jusqu'à l'âge de 12 ans aux parents qui gardent leurs enfants à la maison. Il se trouve que quand on parle des parents qui restent à la maison - et malgré ce qu'on vient d'entendre - il s'agit bien entendu la plupart du temps des femmes. On connaît bien cette problématique, notamment au sein de la classe moyenne et des ménages à bas revenus. Mais la femme reste également à la maison au sein des foyers à hauts revenus parce que, bien souvent, c'est l'homme qui travaille et gagne davantage d'argent. Pour ma part, j'appellerais cette proposition le «projet de loi Ballenberg», Mesdames et Messieurs ! Ballenberg, c'est ce musée suisse de l'habitat rural vers Brienz, en Suisse allemande, qui permet de faire un retour aux XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles: on se rend dans des fermes pour voir comment on faisait le pain, une femme en costume avec un rouet nous montre comment les femmes confectionnaient les habits, etc. - je vois Mme Engelberts qui fait aussi le geste de la lessive ! Dans le même ordre d'idées, je suis allé le week-end passé à Kandersteg, très joli village que vous devez certainement connaître en face, notamment à l'UDC, où avait lieu la semaine Belle Epoque. C'est une semaine où on vit comme en 1900: il y a des tours en calèche, des femmes en costume qui font la lessive avec les savons comme à l'époque, etc. Voilà ce que veut ce projet de loi, Mesdames et Messieurs, et c'est justement ce que nous ne voulons pas, au parti socialiste !

Cela a été dit auparavant: une initiative au niveau fédéral avait exactement le même but, et elle a été refusée par le peuple suisse et par deux tiers de la population genevoise le 24 novembre 2013. Les collectivités publiques ne doivent pas perdre fiscalement pour que les femmes restent à la maison à garder leurs enfants, elles doivent investir dans les places d'accueil pour la petite enfance. Voilà pourquoi les socialistes avaient lancé, avec les Verts, l'initiative pour une véritable politique de la petite enfance, qui demandait que chaque enfant en âge pré-scolaire puisse bénéficier, si les parents estiment qu'ils en ont besoin, d'une place d'accueil, car c'est là que la collectivité publique doit mettre les moyens. On peut d'ailleurs saluer ici la politique de la Ville de Genève, qui a créé des milliers de places en dix ans, notamment grâce à Manuel Tornare.

Pour terminer, parce que j'imagine que le président va bientôt me couper, j'aimerais faire un lien avec la réforme de l'imposition des entreprises, qui va nous faire perdre des centaines de millions, Mesdames et Messieurs. On pourrait demander aux entreprises de faire un effort pour financer les places d'accueil pour la petite enfance, ainsi que cela se pratique dans le canton de Vaud. Je pense, et le parti socialiste avec moi, qu'il est très important de pouvoir proposer cela dans le canton de Genève, et j'espère qu'on ira dans ce sens. Je vous demande de refuser ce projet de loi Ballenberg, Mesdames et Messieurs. Merci beaucoup. (Quelques applaudissements.)

M. Benoît Genecand (PLR). Mesdames et Messieurs, le PLR est également opposé à ce projet de loi. En commission, on nous a assez rapidement dit qu'il était incompatible avec la LHID; on aurait pu s'arrêter à ce moment-là. La deuxième raison est que ça représente tout de même 55 millions de francs en moins dans les caisses de l'Etat ! Même s'il semble maintenant y avoir une sorte de courant où tout est remis en question, il nous paraît quant à nous très raisonnable de garder le cap. Le budget 2015 va être assez difficile à tenir: il a été conçu avant la parité de l'euro et du franc suisse et prévoit un tout petit excédent de 7 millions; ça m'étonnerait que cet excédent soit encore là à la fin de l'année. Proposer tout simplement d'enlever 55 millions sans se soucier de savoir comment ils seront remplacés ne correspond pas à la vision du PLR en matière budgétaire.

Dernière chose, pour rebondir sur ce qu'a dit M. Wenger - j'exprime ici mon opinion, pas forcément celle de mon parti: je ne suis pas convaincu par cette tendance de plus en plus fréquente qui consiste à garder des impôts élevés et à multiplier les déductions. Nous sommes défavorables à la proposition du PDC concernant les allocations familiales, nous sommes défavorables à ce projet de loi, nous sommes défavorables aussi - en tout cas je le suis - à l'idée évoquée par M. Wenger tout à l'heure consistant à faire un marché avec les entreprises à 13% mais en ajoutant dans le panier par un autre biais. Je pense qu'il est beaucoup plus solide financièrement et démocratiquement d'avoir une taxation plus basse - si on estime, comme c'est notre cas, que la taxation est trop élevée - plutôt que de multiplier les niches, les exceptions et les retours d'ascenseur. Nous plaidons pour une fiscalité responsable. Nous ne voyons pas comment le canton pourrait se passer de ces 55 millions, les auteurs du projet ne nous ont pas expliqué comment ils procéderaient. Nous ne sommes pas non plus favorables à cette orientation de la fiscalité vers une catégorie de comportements privés et vous encourageons donc à refuser ce projet de loi.

Mme Béatrice Hirsch (PDC). Les auteurs de ce projet de loi nous disent qu'il y a des exceptions cantonales et citent quelques cantons où cette politique fiscale est appliquée. Certes, ce n'est pas parce que l'initiative a été refusée sur le plan fédéral qu'on ne peut pas essayer dans le canton de Genève. Mais j'aimerais juste rappeler que le 24 novembre 2013, 66% de la population genevoise a refusé l'initiative. Alors j'aimerais que les auteurs du projet, qui nous rappellent très souvent le poids de la parole du peuple, renoncent à leur projet sachant que le peuple genevois en a déjà refusé le principe. Le parti démocrate-chrétien n'entrera pas en matière sur ce projet de loi. Je vous remercie.

Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. le député Patrick Lussi, à qui il reste quatorze secondes.

M. Patrick Lussi (UDC). Je me lève, Monsieur le président, et rappelle à mon préopinant M. Wenger qu'à Kandersteg réside aussi M. Adolf Ogi, qui est l'un de mes maîtres à penser. J'aimerais simplement dire, Mesdames et Messieurs, que vous nous faites des salades alors que ce projet de loi propose simplement un choix. On n'impose rien, les gens ont le droit de choisir. Je rappelle la chose suivante, que vous admettriez si vous étiez honnêtes: quand on voit le nombre de couples au sein desquels la femme hésite à retourner travailler...! Ces femmes comparent ce qu'elles vont gagner par rapport à ce que va leur coûter la crèche et à ce que ça va générer en termes d'augmentation d'impôts, et elles hésitent.

Le président. Il vous faut conclure.

M. Patrick Lussi. Mesdames et Messieurs, merci d'accepter ce projet de loi.

Une voix. Bravo !

Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. le député Pascal Spuhler pour trente secondes.

M. Pascal Spuhler (MCG). Merci, Monsieur le président. J'aimerais juste dire que je trouve un peu étonnants les propos de M. Wenger, qui fait le culte de cette image réductrice de la femme au foyer. D'autant plus que M. Wenger - tout comme moi, d'ailleurs - est connu pour s'occuper comme il faut de ses enfants. Je pense donc qu'il partage cette tâche avec son épouse, ce que tout un chacun apprécie quand il peut le faire. Il faut arrêter avec cette image que vous vous amusez à cultiver.

Le président. Merci, Monsieur le député. Je cède la parole à M. le député Thomas Wenger, à qui il reste vingt-sept secondes.

M. Thomas Wenger (S). Merci, Monsieur le président. Pour répondre à M. le député Lussi - vous transmettrez, Monsieur le président - le problème, Mesdames et Messieurs, est que les familles à bas revenus et celles de la classe moyenne dite inférieure - même si on ne sait jamais vraiment ce que cette expression signifie - n'ont pas le choix, ne peuvent même pas se demander si elles placent leurs enfants dans des crèches, parce que les parents doivent être deux à travailler. D'autant plus que ce ne sont pas 4000 F de déduction qui vont vous permettre de faire ce choix quand vous gagnez ce que vous gagnez. Pour terminer, Monsieur le président, refuser ce projet de loi en hommage à Adolf Ogi, ce serait formidable !

M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de minorité. Vous me permettrez, Monsieur le président, de faire une petite remarque. En effet, il est reproché à ce projet de loi de revenir sur une votation fédérale de juin 2012 alors que notre Conseil d'Etat n'a pas hésité à déposer récemment une résolution sur la caisse unique, que le peuple suisse a pourtant refusée il y a quelques mois. Deux poids, deux mesures ! Par conséquent, je vous demande de bien vouloir voter l'entrée en matière de ce projet de loi. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Voumard, vous n'avez plus de temps de parole. (Remarque.) Je vous en prie ! Madame la rapporteure de majorité, c'est à vous.

Mme Magali Orsini (EAG), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Je voudrais faire remarquer à M. Ivanov qu'en matière d'impôts directs, la loi d'harmonisation fiscale rend impératif l'alignement sur le droit fédéral, ce qui n'est pas le cas avec l'exemple de la caisse unique que vous venez de citer. En l'occurrence, nous n'avons aucune marge de manoeuvre, cela nous a été précisé par le département, qui nous a expliqué qu'il n'y avait pas de marge de manoeuvre pour déduire autre chose que des frais de garde effectifs. Dans la mesure où c'est le droit fédéral qui le stipule via la LHID, nous ne pouvons pas faire autrement que de déduire uniquement ces frais-là.

Vous avez dit que cela se passait dans certains cantons. Or la réponse qui nous a été donnée, c'est que le Tribunal fédéral n'a jamais eu à trancher ce genre de cas et qu'il existe effectivement des cantons où le contrôle de la LHID n'est pas appliqué. Mais ce n'est pas parce que certains cantons sont hors la loi que nous devons nous empresser d'en faire autant. Ça, c'est une première chose. La seconde chose importante, c'est que, une fois de plus, ce montant unique qui serait versé à tout le monde profiterait proportionnellement davantage aux hauts revenus, il faut en être conscient. Non seulement il s'agit de couples dont l'un des deux parents peut se permettre de rester à la maison, mais les 4000 F leur procureraient proportionnellement davantage d'argent qu'aux personnes à revenus plus bas. Voilà, je ne reviendrai pas sur la perte complètement idiote de 55 millions dont on souffrirait énormément, surtout en ce moment, et je vous propose à nouveau de refuser l'entrée en matière.

M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Je vais vous communiquer la position du Conseil d'Etat s'agissant de ce projet de loi - j'ai d'ailleurs le plaisir de relever que j'exprime un avis tout à fait concordant avec celui émis par Mme Orsini, du moins dans la première partie de son intervention ! La raison du refus du Conseil d'Etat tient au non-respect du droit fédéral, à savoir de la LHID. Son article 9, alinéa 2, lettre m, est absolument clair: on parle bien de frais de garde effectifs. C'est écrit noir sur blanc, et c'est une raison suffisante pour que le Conseil d'Etat ne vous conseille pas d'adopter en toute connaissance de cause une disposition contraire au droit fédéral. Il y a effectivement trois cantons - Zoug, Lucerne et le Valais - qui présentent de telles dispositions, mais elles sont précisément contraires au droit fédéral. J'ignore pour quelles raisons cette situation subsiste, probablement parce qu'il n'y a pas eu de recours, peut-être pas de contrôles, je n'en sais rien; toujours est-il que le Conseil d'Etat ne peut décemment pas vous conseiller de légiférer de manière contraire au droit fédéral.

La deuxième raison est d'ordre financier: l'adoption de ce projet de loi induirait un manque à gagner de 55 millions de francs. Oui, 55 millions de francs ! Vous connaissez toutes et tous - je crois que sommes d'accord là-dessus - les difficultés que nous avons à boucler nos budgets, et je fais aussi référence à ce qui a occupé le début de ma journée, c'est-à-dire des communications sur la réforme de la fiscalité des entreprises et la présentation de la position des cantons de Genève et Vaud. Si on renonçait à cet argent, il manquerait encore davantage dans le cadre de cette pourtant très nécessaire réforme dont vous savez qu'elle devra nous mobiliser de manière décisive. Cet argent, nous en avons besoin; il ne faut pas y renoncer, de surcroît en prenant une disposition contraire au droit fédéral. Je vous invite donc à ne pas accepter l'entrée en matière sur ce projet de loi.

Le président. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, j'ouvre le scrutin sur l'entrée en matière.

Mis aux voix, le projet de loi 11403 est rejeté en premier débat par 61 non contre 27 oui.

M 2177
Proposition de motion de Mmes et MM. Béatrice Hirsch, Michel Forni, Bertrand Buchs, Vincent Maitre, Anne Marie von Arx-Vernon, Guy Mettan pour un Etat efficient
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session I des 7 et 8 novembre 2013.

Débat

Le président. Nous abordons la M 2177 et je passe la parole à son auteure, Mme Béatrice Hirsch, tout en signalant que ce débat est classé en catégorie II, trente minutes.

Mme Béatrice Hirsch (PDC). Merci, Monsieur le président. Je n'ai pas l'habitude de parler très longtemps !

L'article 9 de notre constitution, qui traite des principes de l'activité publique, dit ceci à son alinéa 4: «Elle doit être pertinente, efficace et efficiente.» Je pense que jusque-là, grosso modo, à quelques exceptions près, nous serons tous d'accord, et c'est bien au moment d'étudier les moyens pour y parvenir que peut-être nous divergerons. (Brouhaha.)

Le président. Excusez-moi, Madame la députée, on n'entend rien, ici ! Est-ce que les députés qui tiennent des conciliabules pourraient soit se taire soit se rendre dans une autre salle ? Merci ! Vous pouvez poursuivre, Madame.

Mme Béatrice Hirsch. Merci beaucoup, Monsieur le président. L'efficience se mesure sous la forme d'un rapport entre les résultats obtenus et les ressources utilisées. Pour rendre notre Etat plus efficient, il faudra prendre des mesures et, auparavant, faire un état des lieux. C'est une tâche sur laquelle je pense que beaucoup de partis ont planché, comme certainement de nombreux conseillers d'Etat, et il est très difficile de s'y mettre, parce que, Monsieur le président, le travail enclenché aujourd'hui n'aura vraisemblablement pas de résultat avant plusieurs années, et c'est un aspect difficile dans notre rythme politique.

On pourrait imaginer que cet article constitutionnel ainsi que, reconnaissons-le, l'état des finances de notre canton et la dette, qui plombe les années à venir, seraient de nature à nous inciter à avoir le courage d'entreprendre ce travail. Mais j'aimerais tout d'abord préciser à l'intention de ceux qui diront que le Conseil d'Etat a déjà commencé à travailler dans ce sens - et je le reconnais, ce dernier a bel et bien déjà oeuvré dans ce sens - que cette proposition de motion date de la précédente législature. Et elle insiste sur un point qui me tient personnellement très à coeur, à savoir l'implication des personnes concernées. En l'occurrence, il s'agit des collaborateurs et collaboratrices de l'Etat ainsi que des administrés. Chacun et chacune, aussi bien les administrés que celles et ceux qui connaissent, ce qui est le cas de tout le monde dans cet hémicycle, des collaborateurs et des collaboratrices de l'Etat, quel que soit leur niveau, a des idées concernant la façon d'améliorer l'efficience au niveau de l'Etat. Dès lors, en lançant une concertation de taille et en demandant au Conseil d'Etat de nous rendre un rapport dans les six mois, ce qui est certes un projet ambitieux, mais qui lui imposera de fixer de vraies priorités, on pourrait peut-être avancer dans cette recherche d'efficience. C'est pourquoi le parti démocrate-chrétien, soucieux de cette efficience de l'Etat, vous demande de renvoyer cette proposition de motion au Conseil d'Etat. Je vous remercie, Monsieur le président. (Quelques applaudissements.)

M. François Lefort (Ve). Cette motion nous propose une longue, très longue liste d'actions à mener pour améliorer l'efficience de l'Etat. C'est une motion de prime abord innocente, finalement, qui ne demande de faire que ce que le Conseil d'Etat devrait faire, nous promet de faire, a fait ou est en train de faire - et peut-être même qu'il le fait mal. A la première lecture, on se dit qu'il s'agit encore d'un de ces textes pétris de bonnes intentions, un texte qui enfonce des portes ouvertes, un de ces textes, même, qui parfois concourent aux Olympiades de l'enfoncement de portes ouvertes, et quand je parle d'Olympiades, je pense évidemment au palais chinois des dix mille portes, et non pas à la porte des Pas-Perdus...

A priori, nous ne pourrions qu'être d'accord, à brûle-pourpoint, avec cette motion. Mais nous avons appris à nous méfier dès que pointe le terme «efficience». L'efficience, c'est l'optimisation des outils de mise en oeuvre pour parvenir à un résultat, c'est le rapport de l'efficacité sur le coût, et personne ne peut être contre un Etat efficace. Oui, à priori, personne ne peut être contre un Etat efficient ! On peut donc être tous d'accord sur le résultat à obtenir, sur l'objectif, à savoir l'efficacité, mais on ne va peut-être pas tomber d'accord sur les moyens à mettre en oeuvre pour arriver au résultat, et par conséquent à cette efficience. Et il est fort possible qu'on ne le soit pas !

Voyons un peu en détail les actions proposées. Réviser l'appareil de l'Etat pour évaluer l'efficience de l'administration cantonale et assainir nos finances publiques cantonales. Pourquoi pas ? Consulter les membres du personnel, solliciter leurs suggestions et les associer à la recherche de l'efficience. Alors là, oui, certainement, mais cela devrait déjà être le cas à l'heure actuelle, et pourtant il y avait aujourd'hui une grève de la fonction publique ainsi qu'une belle manifestation dans les rues de Genève. Et cela devrait aussi être le cas en particulier pour la réévaluation des fonctions au sein de l'Etat, qui n'a pas été faite depuis 1974. Voilà des exemples sur lesquels nous pourrions être d'accord. Autre action demandée: solliciter les suggestions des administrés, pour tenir compte de leur point de vue dans la mesure de l'efficience. Pourquoi pas, cela devrait être fait, vérifions-le. Enfin, la dernière invite vise à faire un inventaire des procédures qui ralentissent les processus décisionnels. Pourquoi pas, faisons-le, très bien ! Finalement, en regardant cette motion innocente, nous pourrions donc avoir une lecture différente de ce qu'elle propose, et pour cette raison les Verts soutiendront le renvoi de cet objet en commission, de façon que nous puissions...

Une voix. Laquelle ?

M. François Lefort. Laquelle ? Eh bien la commission de l'économie !

Mme Christina Meissner (UDC). A la lecture de cette motion déposée par le PDC, on pourrait croire que c'est une bonne idée, mais en l'occurrence le groupe UDC pense qu'il s'agit d'une fausse bonne idée. Je ne reviendrai pas sur l'inventaire fait par mon préopinant, auquel je souscris parfaitement. Pour ce qui est de la recherche d'efficience visée par cette motion, avec la proposition qui est faite de procéder à des inventaires et de chercher par la réflexion ou les procédures, etc., à rendre l'Etat plus efficient, il me semble véritablement qu'on est en train d'ajouter une couche au mille-feuille. En effet, des évaluations ont déjà lieu aujourd'hui, et je rappelle que tous les employés de l'Etat font l'objet d'évaluations régulières. A cette occasion, ils ont l'opportunité de se prononcer sur leur cahier des charges mais aussi bien au-delà. Ils peuvent du reste proposer des idées tous les jours dans le cadre de leur travail. Mais encore faut-il les écouter ! Je ne suis pas sûre qu'après un questionnaire ou une nouvelle évaluation - qui va d'ailleurs la faire ? - on les écoutera forcément. Car il faut arriver ensuite à dire: «Bien, nous avons eu des idées. Mais est-on capable d'en faire quelque chose ?» Nous ressentons vraiment que, avec cette nouvelle couche au mille-feuille, on risque non pas de faire des économies, mais bien de créer une nouvelle usine à gaz.

La bonne piste - et je regrette de le dire, mais ce soir nous ne l'avons pas vraiment prise - consiste à donner plus de marge de manoeuvre aux directeurs des services, afin qu'ils puissent gérer leurs services comme de véritables entreprises, offrir de réelles possibilités d'épanouissement à leurs employés, mais aussi avoir de véritables moyens pour mener à bien leur mission.

Dès lors, le groupe UDC ne veut pas entrer en matière sur cette motion; il votera à la rigueur du bout des doigts un renvoi à la commission de l'économie, ne serait-ce que pour que vous alliez peut-être faire un tour dans les services pour voir comment ils fonctionnent et constater que les idées ne manquent pas, de sorte qu'il n'y a pas besoin d'une évaluation supplémentaire, mais d'une plus grande écoute de la part du Conseil d'Etat et du Grand Conseil à l'égard de ces managers qui font leur possible tous les jours avec les moyens qu'on leur donne.

M. Alberto Velasco (S). Chers collègues, vous savez qu'il y a plusieurs années, nous avons investi des dizaines de millions dans la fameuse étude NPM, c'est-à-dire «new public management», qui a donc coûté extrêmement cher, mais dont l'efficacité n'a pas été exemplaire, preuve en est que la majeure partie des recommandations n'ont même pas été appliquées. Or ce soir on nous invite à faire la même chose ! Tout à l'heure nous avons discuté de la Cour des comptes pendant je ne sais combien de temps, Mesdames et Messieurs, mais savez-vous que nous avons au Grand Conseil une commission appelée «commission de contrôle de gestion», laquelle est précisément chargée entre autres d'examiner les rapports d'audit interne et ceux de la Cour des comptes, d'évaluer tout cela et de voir avec le Conseil d'Etat comment mettre en place les mesures ? Et savez-vous, chers collègues, que le Conseil d'Etat ainsi que les cadres dont nous avons discuté tout à l'heure et qui étaient si bien payés ont justement pour mission de veiller à l'efficacité de l'Etat ? Faut-il encore le répéter ? Parce que si ce qu'on nous dit ici est vrai, Mesdames et Messieurs, ça veut dire que ces cadres sont trop payés ! S'il est vrai que la gestion de l'Etat n'est pas très efficace, alors ces cadres sont effectivement trop payés et le débat que nous avons eu tout à l'heure avait toute sa raison d'être !

Mesdames et Messieurs, je trouve vraiment qu'il s'agit d'une mesure superfétatoire: on ajoute encore des couches, on en parle, et comme l'a dit Mme Meissner, c'est encore une fois une usine à gaz qu'on met en place, comme celle du contrôle externe qu'on voulait instaurer, avec des AIMP, et vas-y que je t'en donne ! Or dans le même temps, Mesdames et Messieurs, on demande de diminuer de 150 F - 150 F, Monsieur le conseiller d'Etat ! - le supplément d'intégration de l'aide sociale octroyé aux personnes qui sont à l'assistance publique, parce que vous pensez bien qu'elles touchent trop d'argent, alors on leur enlève 150 F ! Mais là, en revanche, on peut mettre du pognon, là il n'y a pas de problème: sur le contrôle interne ou externe on y va, on ajoute des couches, là il n'y a pas de souci, on peut mettre des millions !

Mesdames et Messieurs, je crois qu'il faut revenir à beaucoup plus d'humilité et exiger du Conseil d'Etat qu'il fasse son travail et de l'administration qu'elle fasse le sien. Et puis vous pouvez saisir la commission de contrôle de gestion pour qu'elle se rende dans les services ! Elle a cette possibilité, Mesdames et Messieurs, mais elle ne va plus dans les services, alors qu'avant elle le faisait: elle revenait avec un rapport et, après en avoir discuté dans la commission, on convoquait le Conseil d'Etat pour savoir ce qu'il en était. Or elle ne le fait plus ! Elle ne fait qu'auditionner le Conseil d'Etat et on se dit bonjour, on boit un verre et on se tire... Ça ne va plus ! Mais ce n'est pas cette motion qui va arranger les choses: nous devons, nous les députés, recommencer à travailler comme il faut. Mesdames et Messieurs, pour ce qui est des socialistes, nous n'avons pas besoin de cette motion; je considère que c'est encore du travail superfétatoire pour les commissions, or on n'a pas besoin de ça, car elles ont déjà suffisamment de travail. En conséquence, nous n'entrerons pas en matière sur cet objet. (Applaudissements.)

M. Serge Hiltpold (PLR). Je pense que pour avoir un Etat efficient, il faudrait aussi qu'on ait des institutions un peu plus efficientes, or en ce qui concerne le travail parlementaire que nous avons effectué ce soir, je crois que nous devrions nous-mêmes, avec une certaine humilité, émettre une critique à l'égard de ce qu'on peut faire en matière de réformes de l'Etat, dans la mesure où nous renvoyons pas mal d'objets en commission et qu'on est prêt à sacrifier un objectif politique pour des objectifs personnels.

Au niveau des réformes qu'on peut mettre en place pour rendre l'Etat efficient, il est assez paradoxal de voir que les réformes en général sont lancées par une structure qui à l'Etat est pyramidale; on demande plus d'investissement aux cadres, mais on vient de voter la suppression de leur quatorzième salaire ! Pourtant, ce sont ces gens mêmes qui vont réfléchir à l'efficience, ce sont ces gens mêmes qui sont prêts à porter des réformes de l'Etat. En effet, vous savez tous que, lorsque nous faisons des projets de lois parlementaires, encore faut-il qu'ils soient soutenus par l'administration, or on a malheureusement envoyé tout à l'heure un bien mauvais message aux personnes qui portent les réformes et qui promeuvent cette efficience dans les services, c'est-à-dire les cadres.

Je pense donc que cette motion part d'une bonne intention, mais que l'impulsion qu'on a donnée tout à l'heure est contradictoire. Je vous invite simplement à lire le rapport sur la motion 2070 qui avait été assez largement adoptée le 19 avril 2012. Il s'agissait d'une motion PLR contre les excès de la bureaucratie, et à mon sens le Conseil d'Etat a donné de bonnes réponses, lesquelles se retrouvent un peu dans les questions posées ici. Dès lors, si l'on veut faire un travail plus ou moins correct, on pourrait renvoyer ce texte à la commission de l'économie, raison pour laquelle j'appuierai la proposition de mon collègue François Lefort.

M. Pierre Vanek (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, je serai très bref ! J'avais résolu dans un premier temps, pour des raisons d'efficacité et d'efficience de ce parlement, de ne pas intervenir sur cette motion pétrie de bonnes intentions et de langage technocratique, une motion bien PDC, un parti qui a deux conseillers d'Etat et qui donne toutes sortes de leçons en disant qu'il faut bien faire, s'appliquer à bien faire et bien faire en consultant tout le monde pour bien faire, etc. Non, mais sérieusement, tout cela est très bidon ! Mais je me suis quand même levé pour dire ceci, et après je me rassieds, parce que je ne veux pas faillir à ma bonne intention de me taire ou, disons, y déroger le moins possible. L'une des invites au Conseil d'Etat consiste à effectuer une consultation des collaboratrices et collaborateurs de l'Etat, petit et grand, afin de solliciter leurs suggestions et commentaires, ainsi qu'à veiller à les associer à la recherche de l'objectif d'une efficience optimale. Mesdames et Messieurs, il y avait un moyen très simple d'entendre ce que la fonction publique avait à dire, c'était d'ouvrir la fenêtre tout à l'heure quand elle manifestait sur la promenade de la Treille ! (Exclamations.) Vous auriez pu écouter ces discours et on aurait obtenu un gain d'efficacité et d'efficience, puisqu'on aurait précisément entendu très directement l'avis d'une grande majorité de ces fonctionnaires à propos desquels on nous baratine en nous disant qu'il faudrait les consulter. (Applaudissements.)

Une voix. Bravo !

M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, comme l'a dit Mme Hirsch, première signataire de ce texte, cette proposition de motion a été déposée sous l'ancienne législature. Et je déduis de ses propos que l'engagement qui est celui du Conseil d'Etat actuel à rendre l'Etat efficient devient probablement une évidence, puisque nous nous battons tous les jours pour y parvenir, avec succès ou insuccès, comme il y a quelques minutes lorsque ce parlement a précisément donné un signal allant exactement dans le sens contraire, mais je ne veux pas revenir sur ce point, au risque de paraître désagréable.

Ce que je peux dire à ce propos, c'est que le Conseil d'Etat a fait siennes nombre des invites qui figurent dans ce texte; nous essayons de les appliquer tous les jours, et quel que soit le sort que le parlement va réserver à cet objet, qu'il soit renvoyé en commission ou au Conseil d'Etat ou même qu'il soit refusé - ce qui serait dommage, parce qu'il contient de bonnes choses, et je pense qu'un renvoi en commission pourrait être intéressant, car cela nous permettrait de vous expliquer ce que nous sommes en train de faire actuellement - eh bien le Conseil d'Etat est plus déterminé que jamais à oeuvrer pour que cet Etat soit efficient et le soit toujours plus.

Le président. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons tout d'abord voter sur le renvoi de cet objet à la commission de l'économie.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 2177 à la commission de l'économie est rejeté par 51 non contre 32 oui. (Commentaires.)

Le président. Monsieur Maitre, on va vérifier si votre boîtier fonctionne ! Nous allons maintenant nous prononcer sur cette proposition de motion.

Mise aux voix, la proposition de motion 2177 est rejetée par 61 non contre 25 oui.

M 2226
Proposition de motion de Mme et MM. Bertrand Buchs, Jean-Marc Guinchard, Vincent Maitre, Jean-Luc Forni, Anne Marie von Arx-Vernon, Philippe Morel : Le fait d'enseigner une langue nationale comme première langue étrangère doit être intégré dans le calcul de la RPT
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session XI des 18 et 19 septembre 2014.
R 769
Proposition de résolution de Mmes et MM. Romain de Sainte Marie, Cyril Mizrahi, Jean-Charles Rielle, Isabelle Brunier, Christian Frey, Salima Moyard : Il faut revoir la péréquation intercantonale
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session XI des 18 et 19 septembre 2014.

Débat

Le président. Nous passons au point suivant de notre ordre du jour, soit les points liés M 2226 et R 769, en catégorie II, quarante minutes. Je donne la parole à l'auteur de la proposition de motion, M. Bertrand Buchs.

M. Bertrand Buchs (PDC). Merci beaucoup, Monsieur le président. Le débat au sujet de la RPT a déjà eu lieu depuis longtemps, notre conseiller d'Etat s'est d'ailleurs démené pour défendre les intérêts du canton de Genève. On a vu que les cantons contributeurs n'arrivaient pas à modifier la répartition financière. Lorsque ce débat a été lancé il y a quelques mois, on a également beaucoup parlé d'une autre question, à savoir l'enseignement d'une langue étrangère nationale en Suisse. On s'est rendu compte - et c'est pour ça que le PDC a décidé de déposer cette motion - que l'un des cantons qui refusaient d'enseigner le français en premier lieu au profit de l'anglais était celui de Thurgovie. Or c'est justement le canton de Thurgovie qui reçoit le plus d'argent via la péréquation financière ! La RPT est un système extrêmement précis et compliqué, à la suisse. De nombreuses heures sont nécessaires pour comprendre comment cela fonctionne, parce qu'on met plusieurs choses dans le panier. On se rend compte que les cantons contributeurs, souvent des cantons villes, ont des hôpitaux universitaires et des universités, mais on ne tient pas tellement compte des investissements qu'ils font pour pouvoir accueillir des personnes d'autres cantons. Certes, on est d'accord sur la question d'une solidarité entre cantons, sur le fait que les cantons qui ont «moins de chance», entre guillemets, reçoivent de l'argent de la part des cantons «riches», entre guillemets, et qu'un équilibre doit être créé.

Quand on sait que ce qui fait la Suisse, c'est d'avoir quatre langues nationales, la décision de promouvoir une langue nationale comme première langue avant l'anglais est hautement symbolique. Et ces cantons qui réclament plus d'argent et veulent toucher le maximum de la part des contributeurs mettent l'anglais en premier lieu ? Là, nous ne sommes plus d'accord ! Nous pensons que dans le cadre du calcul de la RPT, l'enseignement d'une langue nationale pourrait être intégré comme un plus ou un moins s'agissant de la contribution. Le canton qui ne veut pas être solidaire du reste de la Suisse en refusant d'enseigner une langue nationale comme première langue devrait soit payer plus s'il est contributeur, soit percevoir moins s'il est bénéficiaire. Pour nous, c'est symbolique. Si on commence à enseigner l'anglais avant le français ou l'allemand, c'est une perte en termes de cohérence alors que ce qui fait la force de la Suisse, c'est justement d'accepter les différences qui sont les siennes. Le canton de Genève, quant à lui, n'a jamais remis en cause l'enseignement de l'allemand comme première langue; on aurait très bien pu dire que ça ne nous intéresse pas, que de toute façon on ne parlera jamais l'allemand. C'est un faux débat, et je pense qu'il faut donner un message fort au reste de la Suisse par rapport à la solidarité confédérale, ce qui pourrait aussi aider notre Conseil d'Etat à négocier avec la Confédération. Il s'agit de montrer qu'on n'est plus d'accord de payer alors que certains cantons ne veulent pas participer à cette solidarité. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Romain de Sainte Marie, auteur de la proposition de résolution.

M. Romain de Sainte Marie (S). Merci, Monsieur le président. Je vais vous expliquer, Mesdames et Messieurs les députés, le but de cette résolution. Je ne vais pas revenir sur le fait que, comme M. Buchs l'a très bien signalé, la péréquation intercantonale est particulièrement injuste, on peut le dire, puisqu'elle repose principalement sur la contribution des cantons villes, moteurs de l'économie suisse, aux cantons plus ruraux.

Dans cette résolution, je m'attaque à l'un des deux piliers de la péréquation: d'une part la péréquation dite des ressources, et d'autre part, celle dite des compensations des charges excessives, qui représente un axe totalement indépendant. Je vais vous donner une brève explication pour que vous compreniez bien la chose. Dans le cadre de la péréquation des compensations des charges excessives, on en distingue deux types: celle des charges excessives dites géotopographiques, qui concernent les cantons ruraux et alpins et servent à construire des routes, des moyens de transport et d'accès, et la compensation des charges excessives dites sociodémographiques. Ce dernier cas s'applique aux cantons urbains tels que celui de Genève, qui développent certaines problématiques - écarts sociaux, insécurité - et nécessitent le développement de différentes infrastructures propres aux cantons urbains.

Aujourd'hui, la Confédération injecte 680 millions de francs pour ces deux types de compensations de charges excessives, qu'elle divise en deux, soit 50% pour chacune. Pourtant - c'est là où on peut rejoindre ce que M. Buchs a dit préalablement - de nombreuses études, notamment depuis 2006, ont montré à multiples reprises que la juste répartition devrait être la suivante: 75% pour les charges excessives des zones urbaines - c'est-à-dire les charges excessives sociodémographiques - et seulement 25% pour les charges rurales dites géotopographiques. Le problème, c'est que nous sommes figés dans une répartition 50/50. Or la troisième réforme de l'imposition des entreprises va bientôt se faire, réforme qui touchera principalement les cantons contributeurs et urbains comme celui de Genève, lesquels font marcher l'économie. Cette résolution propose de revoir cet axe de la péréquation de sorte que le financement de la part de la Confédération corresponde à la juste réalité, c'est-à-dire à 75% pour les cantons urbains et 25% pour les cantons ruraux. J'espère avoir été clair et que cette résolution recevra un accueil favorable de la majorité du Grand Conseil. Il faut faire peser les intérêts des cantons urbains ! Aujourd'hui plus que jamais, c'est essentiel dans le contexte de la réforme de l'imposition que nous allons connaître. Merci beaucoup. (Quelques applaudissements.)

Mme Christina Meissner (UDC). Nous avons à examiner aujourd'hui deux textes qui concernent cette fameuse RPT. Sans être complet - parce que, pour pouvoir l'être, il faudrait justement travailler dessus en commission - M. Romain de Sainte Marie nous a montré par son discours toute la complexité de cette péréquation financière. En répartissant les finances entre les cantons, la péréquation atteint toutes les politiques publiques. C'est un calcul extrêmement complexe, basé sur un nombre assez incroyable de facteurs. Dans certains cas, nous sommes contributeurs; dans d'autres, nous sommes bénéficiaires. La proposition de résolution socialiste, qui propose justement de revoir la péréquation financière à la lumière des facteurs sociodémographiques mais également de la réforme de la fiscalité des entreprises, mérite véritablement d'être renvoyée en commission, sans doute à la commission fiscale. Parce que je ne crois pas que tout le monde ait saisi à quel point c'est important.

J'en viens à l'autre texte, la proposition de motion du PDC. Elle rappelle que la RPT est basée sur cinq mécanismes: péréquation des ressources, compensation des charges, attribution claire des tâches entre les cantons, rationalisation des tâches communes et renforcement des coopérations intercantonales. Comment pouvez-vous imaginer que cela puisse se réduire simplement au fait de demander au Conseil fédéral que l'enseignement d'une langue nationale entre comme critère majeur dans le calcul de la RPT ? On n'est pas au même niveau ! Il y a là quelque chose d'extrêmement réducteur par rapport à ce qu'est véritablement la RPT. Ce n'est pas en agissant sur la péréquation qu'on va renforcer l'envie d'enseigner telle ou telle langue nationale. Non, on n'est pas dans un esprit de revanche, on ne dit pas: «Ils désavantagent le français, eh bien on va leur couper les vivres !» C'est d'une mesquinerie qui mérite que cette motion finisse simplement à la poubelle. Je suis désolée d'être aussi franche ! Par contre, en ce qui concerne la résolution des socialistes, il est clair que nous la prendrons en considération pour son étude à la commission fiscale. Je vous remercie.

M. Lionel Halpérin (PLR). Monsieur le président, chers collègues, cette motion et cette résolution ont été déposées dans un contexte émotionnel lié à différentes questions, notamment celle des langues. Je crois qu'il serait très dangereux de vouloir mélanger les sujets. Faire ce que propose la motion, à savoir, au fond, ajouter le critère de la langue dans le cadre du calcul de la péréquation, est un processus dangereux, qui aura pour conséquence que chacun va avancer ses propres critères. On prendrait là un risque important. Le système est prévu pour être basé sur des critères objectifs, et ce qui semble important à nos yeux l'est peut-être beaucoup moins pour d'autres cantons. Les cantons alémaniques qui souhaitent enseigner en premier d'autres langues que le français ont probablement tort, mais le fait est qu'à partir du moment où ils ont pris leur décision, ils ne vont pas soutenir l'élan que nous prenons. Prendre le risque de remettre en question la péréquation par cet angle me semble mauvais. Notre groupe, de manière générale, s'opposera à la motion.

S'agissant de la proposition de résolution, qui, elle, ne lie pas deux sujets différents, il y a en tout cas un fond juste dans les propos qui nous sont apportés en ce sens que la péréquation n'est certainement pas favorable à un canton comme Genève dans la situation et l'état actuel des choses. Il y a donc vraisemblablement une nécessité d'essayer de revoir cette péréquation. Mais il faut le faire de manière à obtenir la meilleure efficacité possible, et je ne suis pas sûr qu'en déposant une motion qui remontera d'une manière ou d'une autre jusqu'aux arcanes de l'Assemblée fédérale, nous arrivions réellement à améliorer le système. De ce point de vue là, je pense qu'il est juste, comme l'a proposé Mme Meissner, de renvoyer cette proposition de résolution à la commission fiscale, ce qui nous permettra d'étudier les conséquences des démarches que nous ferons et de discuter avec le Conseil d'Etat pour déterminer si cela l'aidera dans ses négociations avec la Confédération pour obtenir une meilleure répartition des financements. Une fois que nous aurons pu nous assurer qu'il s'agit de la bonne démarche, nous pourrons envisager de soutenir la résolution. A ce stade, c'est encore prématuré, et c'est pourquoi nous voterons le renvoi en commission.

M. Benoît Genecand (PLR). Mesdames et Messieurs, il a été dit ici que la péréquation fédérale était complexe; je ne suis pas certain que ce soit le cas. Pour ceux d'entre vous qui êtes allés à Lausanne à l'initiative de Gabriel Barrillier pour participer au FIR - le Forum interparlementaire romand, c'est bien ça ? - vous vous souviendrez que nous avons eu une présentation de M. Gaillard. Selon lui, la péréquation fédérale est beaucoup moins complexe, Mesdames et Messieurs, que la péréquation intercommunale genevoise. En fait, elle prévoit et calcule le potentiel de chacun des cantons et répartit ensuite selon les différences, le minimum de ceux qui gagnent le moins étant à 85%. D'ailleurs, on pourrait s'en inspirer pour assainir un peu ou en tout cas repenser notre fiscalité communale.

Juste quelques chiffres, Mesdames et Messieurs, parce qu'il est vrai qu'on a beaucoup parlé de péréquation dans ce canton - vous les trouverez dans notre budget 2015 aux pages 39 et 44 pour ceux que ça intéresse: Genève reçoit 507 millions de la Confédération...

Le président. Il vous reste trente secondes.

M. Benoît Genecand.  Ça me suffira, Monsieur le président. Genève reçoit 507 millions de la Confédération - 299 millions de subventions, 125 millions de RPT et 83 millions de dédommagements - et contribue à hauteur de 368 millions. Aujourd'hui, le net est donc en faveur de Genève de 139 millions. Nous recevons plus que nous ne donnons, ceci encore avant la répartition de l'impôt fédéral direct - 17% - de 448 millions. Mesdames et Messieurs, ça ne me paraît pas être une très bonne stratégie, vu l'état de nos finances et notre prospérité, de dire à nos confédérés...

Le président. Il vous faut conclure.

M. Benoît Genecand. ...que nous avons un problème avec la péréquation. Merci, Monsieur le président.

Mme Sophie Forster Carbonnier (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, je dois dire que je m'inscris un peu en faux contre ce que vient de dire M. Genecand, à savoir que le système de péréquation fédérale serait quelque chose de si simple que cela. Si son concept général est en effet assez facile à saisir, il devient cependant d'une complexité effarante quand on commence à entrer dans les détails. Voilà d'ailleurs pourquoi nous refuserons la motion du PDC: comme cela a déjà été précisé, je trouve en effet assez maladroit de vouloir mélanger un débat sur les langues avec un autre sur la péréquation financière.

En revanche, tout ce que la résolution socialiste indique découle du bon sens et nous a même été présenté par les cadres de l'administration cantonale à la commission de contrôle de gestion, et je crois même à la commission fiscale. Ce qui est dit là n'est que pure et stricte vérité, et c'est la position qu'a défendue la députation genevoise à Berne, c'est-à-dire que les critères géotopographiques sont complètement surestimés par rapport aux critères sociodémographiques et que les villes pâtissent de ce système. Ce système doit être modifié, des études le prouvent. C'est la raison pour laquelle je pense que travailler sur cette résolution en commission est superflu; tout nous a déjà été dit, nous pouvons donc la renvoyer directement au Conseil d'Etat. Je vous remercie, Monsieur le président.

M. Patrick Lussi (UDC). Je ne vais pas trop en rajouter. Chacun aura peut-être eu l'occasion de lire la presse aujourd'hui. On a parlé des cantons qui payaient le moins dans le cadre de cette péréquation. Or l'un de ceux qui paient le plus est le canton de Zoug, et figurez-vous que le parlement zougois vient de décider cet après-midi même de lancer une initiative cantonale pour demander à payer moins. Ils estiment qu'ils donnent trop d'argent à la Confédération et qu'ils doivent en garder pour eux. Je pense que la résolution socialiste est à suivre et à renvoyer directement au Conseil d'Etat. S'ils peuvent se le permettre à Zoug, alors pourquoi pas nous ?

M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés... Ah, la RPT ! Mon Dieu, il s'agit là d'un sujet vraiment compliqué et qui occupe à Berne plus souvent qu'à son tour le conseiller d'Etat genevois en charge des finances que je suis. Ce système, qui a été introduit il y a quelques années, vise simplement à renforcer la solidarité entre les cantons en redistribuant des richesses entre ceux réputés financièrement forts et les autres réputés moins bien lotis d'un point de vue financier. C'est un mécanisme d'une complexité assez folle, et je remercie d'ailleurs M. de Sainte Marie d'avoir réussi, en quelques mots, à expliquer en quoi consistaient les charges sociodémographiques d'une part et géotopographiques d'autre part.

C'est un sujet sur lequel le groupe des neuf cantons donateurs - dix, parfois - se bat. Ce chiffre suffit à vous faire comprendre que nous sommes une minorité, et le système lui-même fait en sorte que les cantons contributeurs représentent une minorité. Cela signifie que c'est malheureusement la majorité qui décide à chaque fois qu'une volonté est exprimée par la minorité des cantons donateurs. On dit que celui qui paie décide; ce n'est pas du tout vrai dans le cadre de la RPT. Le système ne bouge pas, et nous avons beau essayer de le faire changer, nous n'y arrivons pas. Lors de la prochaine session de cette année, les Chambres fédérales - en particulier le Conseil national - vont justement être saisies de ce qu'on appelle le rapport d'efficacité, c'est-à-dire le rapport effectué par le Conseil fédéral sur le système de la péréquation financière. Il s'agit de déterminer si celui-ci doit être changé, ses paramètres modifiés. Il se trouve précisément maintenant aux Chambres, et le Conseil des Etats a déjà tranché: niet, on ne touche rien ! Il y a même eu pour la première fois - la presse s'en est d'ailleurs fait l'écho - des échanges de propos très véhéments au sein de ce sénat d'ordinaire très feutré - j'allais presque dire des propos qui sont l'habitude de ce Grand Conseil ! Cela montre bien combien les positions sont exacerbées.

Les deux textes qui vous sont soumis ici, la motion 2226 et la résolution 769, relèvent de deux registres assez différents, il faut le reconnaître. Vous nous demandez d'intervenir, de négocier, de faire en sorte que les choses changent. Mais, Mesdames et Messieurs, c'est précisément ce que nous faisons, je peux vous le garantir ! Et nous ne sommes pas tout seuls, il y a encore neuf autres cantons avec nous. Nous nous battons comme de beaux diables, mais ne parvenons pas à changer quoi que ce soit. Je vous le dis franchement, je doute que l'un ou l'autre de ces textes - et en particulier la résolution - permette de changer quoi que ce soit, malheureusement. Cette réalité et ces éléments qui figurent dans la résolution, je les ai personnellement répétés à moult et réitérées reprises - et je ne suis pas le seul, mes collègues dans la même situation aussi: rien n'y fait, nous parlons à des sourds. C'est pourquoi je doute vraiment que ceci ait un quelconque effet. Faites-en l'usage que vous voulez, mais je pense en tout cas que cela n'aura aucun effet pour cette révision-là. Peut-être - certainement, même - faudra-t-il essayer de faire pression lors de la prochaine révision, qui aura lieu et entrera en vigueur dans quatre ans. A ce moment-là, plus opportun, il vaudra sans doute la peine de revenir avec un texte. Mais en l'occurrence, nous sommes quelque peu en dehors des délais avec ces deux propositions.

S'agissant du texte relatif aux langues, il est évidemment louable et, d'une certaine manière, il y a en effet un lien entre la solidarité qui sous-tend et que veut renforcer la RPT d'un point de vue financier et la solidarité confédérale, qui tient à la connaissance des autres langues nationales. Il n'est donc pas tout à fait faux de faire un lien entre les deux. Mais là encore, s'il s'agissait de... Comment dirais-je ? De suivre ce souhait exprimé par les motionnaires, cela aurait probablement un effet encore moindre que le texte de la résolution, et peut-être nous attirerions-nous de surcroît des commentaires peu amènes à ce sujet. Je pense que le combat des langues doit se mener au sein des conférences des directeurs cantonaux, en particulier de ceux en charge de l'instruction publique. Je sais que notre collègue Anne Emery-Torracinta est très attentive à cela et que beaucoup de cantons alémaniques soutiennent la position des cantons latins. A mon sens, c'est donc dans ce cénacle-là que le débat doit être mené, et pas forcément par le biais de la RPT. Néanmoins, si votre parlement devait voter ce texte, nous le ferions évidemment valoir auprès de nos collègues confédérés. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons d'abord voter sur la proposition de motion.

Mise aux voix, la proposition de motion 2226 est rejetée par 73 non contre 9 oui.

Le président. Concernant la résolution 769, nous avons été saisis d'une demande de renvoi à la commission fiscale, que je soumets à vos suffrages.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de résolution 769 à la commission fiscale est rejeté par 71 non contre 14 oui.

Le président. Il s'agit donc maintenant de vous prononcer sur le texte de la résolution.

Mise aux voix, la résolution 769 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 69 oui contre 14 non et 2 abstentions.

Résolution 769

Le président. Mesdames et Messieurs, je vous remercie, vous souhaite une bonne fin de soirée et un bon retour dans vos foyers. Rendez-vous le mois prochain !

La séance est levée à 22h45.