République et canton de Genève

Grand Conseil

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PL 11222-A
Rapport de la commission du logement chargée d'étudier le projet de loi de Mmes et MM. Irène Buche, Salima Moyard, Christian Dandrès, Jean-Louis Fazio, Lydia Schneider Hausser, Anne Emery-Torracinta, Prunella Carrard, Marion Sobanek modifiant la loi générale sur le logement et la protection des locataires (LGL) (I 4 05)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session IV des 23 et 24 janvier 2014.
Rapport de majorité de M. Jacques Béné (PLR)
Rapport de minorité de M. Christian Dandrès (S)

Premier débat

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous reprenons le cours de notre ordre du jour et abordons le PL 11222-A. (Brouhaha.) Je prie l'assemblée de bien vouloir faire silence et passe la parole au rapporteur de majorité, M. Béné.

M. Jacques Béné (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Je serai rapide, parce que c'est un projet de loi somme toute assez technique. Je rappellerai simplement que la loi sur le revenu déterminant avait comme principe le non-cumul des aides. Pour le RDU, un franc est un franc. Ce projet de loi vise à modifier ce grand principe dans certains cas, à savoir en ce qui concerne les subventions personnalisées au logement. On parle, Mesdames et Messieurs, de très peu de cas: sur les 1800 personnes qui touchent des subventions personnalisées, il y en a 150 qui toucheraient des prestations complémentaires. Celles-ci ont, pendant plusieurs années, cumulé des aides, ce qui n'est plus possible avec le RDU. Il ne s'agit pas de leur demander de rembourser les aides qu'elles ont touchées à double, mais simplement de dire: «Stop, ça suffit !» L'office du logement a déjà pris des mesures pour des personnes qui posent - ou posaient - problème, en leur permettant de continuer à toucher des aides cumulées jusqu'au 31 mars 2016, soit trois ans de délai supplémentaires par rapport à ce qui était prévu au moment où l'OLO leur a annoncé qu'elles ne pourraient plus toucher de subventions personnalisées. On parle bien de subventions pour des gens qui touchent déjà des prestations complémentaires. Je tiens quand même à rappeler que ces personnes non seulement touchent des prestations complémentaires, mais également des subsides pour l'assurance-maladie à 100%, le remboursement des soins médicaux à 100%, l'abonnement TPG et, dans tous les cas, ne paient pas d'impôts. En votant non à ce projet de loi, il s'agit de confirmer le non-cumul des aides ainsi que la jurisprudence et la volonté de ce parlement lorsqu'il a voté la loi sur le revenu déterminant. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de majorité. La parole est au rapporteur de minorité, M. Christian Dandrès. (Brouhaha.) Je demande encore une fois à l'assemblée de bien vouloir faire silence !

M. Christian Dandrès (S), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Je vais expliquer pourquoi, contrairement à ce qu'a soutenu le rapporteur de majorité, ce projet a pour fonction de rétablir l'esprit initial des prestations complémentaires et du RDU. On est en train de parler de personnes qui bénéficient de prestations complémentaires en plus de rentes d'invalidité ou de retraite, ceci afin qu'elles puissent vivre dignement puisque ces rentes ne permettraient pas de garantir des minima qui ont été déterminés par ce Grand Conseil. Le problème, c'est que le budget théorique retenu pour les prestations complémentaires n'est pas adapté, en ce qui concerne le loyer, à la situation actuelle du marché. Je peux donner quelques chiffres, qui ont été publiés par l'OCSTAT. Par exemple, pour un cinq-pièces en loyer libre, le loyer est de 2277 F et, pour un cinq-pièces en HBM, le loyer est de 1683 F par mois. Or ce qui est pris en considération par les prestations complémentaires, c'est un montant de 1100 F charges comprises pour une personne seule et de 1250 F charges comprises pour un couple avec famille. On voit bien que s'il n'y avait pas d'allocations supplémentaires, ces personnes ne parviendraient pas à couvrir leur minimum vital, ni même le minimum vital absolu prévu dans la loi sur les poursuites. C'est la raison pour laquelle le cumul a été admis pendant assez longtemps. Avec la votation de la loi 9135 en 2007, un délai avait été octroyé jusqu'en 2013. Et en 2013, un certain nombre de bénéficiaires de ces allocations se sont vu signifier un refus d'allocation, ce qui les a plongés dans des situations terrifiantes, en particulier les familles. En effet, si vous avez des enfants, l'appartement sera naturellement plus grand. Or le loyer théorique pris en compte pour les PC ne tient pas compte de ce cas de figure; on parle uniquement de couple avec famille.

Je vous indiquais tout à l'heure que l'esprit du RDU n'était précisément pas celui-ci. Le projet de loi 9135 avait deux objectifs: le premier était de pouvoir garantir la couverture des besoins vitaux des habitants, et le second, de garantir le respect du principe de l'égalité de traitement. Il n'y avait pas la volonté de couper les prestations, mais de les coordonner, comme l'a du reste relevé le rapporteur de majorité. La question du loyer, des allocations logement et des subventions personnalisées n'a pas été considérée à l'époque. Une commission d'experts devait continuer à travailler au sein du département pour la régler, ce qui n'a malheureusement pas été le cas. Le problème qui se pose également, sous l'angle de l'égalité de traitement, c'est qu'il n'existe pas de distinction entre les différentes situations réelles des personnes. Une famille bénéficiant d'un revenu de 6000 F pourrait toucher une allocation logement, tandis qu'une même famille touchant 100 F de prestations complémentaires se verrait, elle, supprimer purement et simplement son allocation logement. La situation pécuniaire des gens n'est pas concrètement analysée; un problème que ce projet de loi permettrait de résoudre.

Un autre problème administratif s'est posé. La suppression ou le non-cumul de l'allocation logement et des PC sont connus depuis 2007. Or l'office du logement a continué à délivrer des décisions d'octroi d'allocations pendant presque six ans d'affilée, sans même prendre la peine d'informer les bénéficiaires que ces allocations logement seraient supprimées en 2013. Evidemment, ceci a soudain placé les gens dans des situations invraisemblables. Vous connaissez la chanson: trouver un logement en un délai de quelques mois est particulièrement difficile, voire impossible. De plus, ces personnes n'ont pas la possibilité de compléter leur revenu en travaillant davantage ou en trouvant d'autres aides, puisqu'elles sont bénéficiaires de rentes AI ou AVS. Ainsi que l'a très justement rappelé le rapporteur de majorité, le système actuel ne permet malheureusement aucun cumul avec une autre aide sociale. Le Conseil d'Etat a décidé d'une disposition transitoire qu'il a inscrite dans le règlement d'application, ce qui pose à mon avis des problèmes juridiques, parce que je ne pense pas que l'on puisse, par voie réglementaire, différer l'application d'une loi. Mais le problème, c'est surtout que cette disposition transitoire est très ciblée: elle concerne uniquement les personnes qui se sont vu proposer un logement par l'office du logement avec la garantie que des allocations leur seraient versées. Là, on est en somme dans un cadre strict de protection des droits acquis. Mais cela ne résout pas le problème des autres personnes. Ce problème ne concerne pas des dizaines de milliers de locataires et pourrait donc trouver sa solution assez simplement.

Il y a par ailleurs un autre point dont nous devons tenir compte - et c'est le problème principal - à savoir le budget théorique des PC. La Confédération a conscience que le budget théorique... (Brouhaha.)

Le président. S'il vous plaît, un peu de silence ! Monsieur Dandrès, je vous informe que vous empiétez sur le temps de votre groupe.

M. Christian Dandrès. Oui, pas de problème ! La Confédération a pris conscience du problème et du fait que l'on devait aussi tenir compte des spécificités du marché locatif des cantons, et s'apprête donc à revoir la question du budget théorique. C'est la raison pour laquelle il me semblerait intéressant que la commission du logement puisse se ressaisir de ce projet. Avec ces éléments nouveaux, elle pourrait tenter de résoudre la situation de quelques centaines de personnes qui sont aujourd'hui confrontées à des situations difficiles, étant rappelé que ces gens-là peuvent se trouver en dessous des minima vitaux absolus prévus dans la loi sur les poursuites. C'est la raison pour laquelle, compte tenu de ces éléments qui n'étaient pas connus de la commission lorsque nous avons voté ce projet, je vous propose un renvoi en commission.

M. Jacques Béné (PLR), rapporteur de majorité. S'agissant du renvoi en commission, je ne vois pas quels sont les éléments que M. Dandrès vient de citer qui n'étaient pas déjà connus. Tout cela a été débattu, la problématique des plafonds fédéraux a aussi été débattue. Nous avons évoqué cette question en disant que s'il fallait augmenter de 100 F le barème par tranche, cela représenterait 600 000 F de charges supplémentaires. Il a aussi été souligné que malgré la situation du logement, si des locataires restent dans des appartements avec un loyer trop important, il paraît totalement absurde de faire payer ce surplus aux autres contribuables. Je ne vois pas en quoi on pourrait améliorer la situation de ce projet de loi en le renvoyant en commission. Je vous propose donc de refuser le renvoi en commission.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de majorité. Je fais à présent voter l'assemblée sur le renvoi en commission.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 11222 à la commission du logement est adopté par 51 oui contre 29 non. (Commentaires du rapporteur de majorité pendant la procédure de vote.)