République et canton de Genève

Grand Conseil

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La séance est ouverte à 17h, sous la présidence de M. Antoine Droin, président.

Assistent à la séance: MM. François Longchamp, président du Conseil d'Etat, Serge Dal Busco, Mauro Poggia, Luc Barthassat et Antonio Hodgers, conseillers d'Etat.

Exhortation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: M. Pierre Maudet et Mme Anne Emery-Torracinta, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Murat Julian Alder, Olivier Baud, Irène Buche, Edouard Cuendet, Jean-Louis Fazio, Lionel Halpérin, Philippe Joye, Salima Moyard, Pierre Ronget et Patrick Saudan, députés.

Députés suppléants présents: MM. Christophe Aumeunier, Alexis Barbey, Florian Gander, Georges Vuillod et Yvan Zweifel.

Discussion et approbation de l'ordre du jour

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, suite à l'ajout puis au refus hier à 17h de la discussion immédiate sur le PL 11460 divisant en deux lois distinctes la loi 10697 sur les taxis de service public et autres transports professionnels de personnes, le PL 11460 est renvoyé à la commission législative.

Annonces et dépôts

Néant.

Questions écrites urgentes

Le président. Vous avez trouvé sur vos places les questions écrites urgentes suivantes:

Question écrite urgente de M. Christo Ivanov : Faculté d'économie et de management : la composition de l'équipe dirigeante est-elle optimale ? (QUE-204)

Question écrite urgente de Mme Christina Meissner : Développement durable, économise-t-on sur les moyens ? (QUE-205)

Question écrite urgente de M. Jean Romain : L'école à l'ère du numérique : le coût de cette mutation ? (QUE-206)

Question écrite urgente de M. Christo Ivanov : Eco-quartier de la Jonction : quand les travaux de dépollution démarreront-ils ? (QUE-207)

Question écrite urgente de Mme Lisa Mazzone : Combien d'accidents devront encore survenir avant la création d'itinéraires cyclables sécurisés, dans le respect de la volonté populaire ? (QUE-208)

Question écrite urgente de M. Jean Sanchez : Qui protège les citoyens des chenilles processionnaires ? (QUE-209)

Question écrite urgente de M. Romain de Sainte Marie : Salaire minimum : quelles économies pour le canton de Genève ? (QUE-210)

Question écrite urgente de M. Serge Hiltpold : Occupation du domaine public lors de travaux : responsabiliser les maîtres d'ouvrages, notamment publics (QUE-211)

Question écrite urgente de M. François Baertschi : Parkings en France: les communes concernées doivent d'abord régler leurs problèmes avant de réclamer l'argent des contribuables genevois (QUE-212)

QUE 204 QUE 205 QUE 206 QUE 207 QUE 208 QUE 209 QUE 210 QUE 211 QUE 212

Le président. Ces questions écrites urgentes sont renvoyées au Conseil d'Etat.

QUE 182-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Christo Ivanov : Pollution sous la rampe d'accès du parking « Carré-Vert » : à qui incombe la prise en charge de la dépollution ?
QUE 183-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Daniel Sormanni : Mutation au quai Gustave-Ador, nouveaux bouchons en préparation ?
QUE 184-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Thierry Cerutti : Kilomètres routiers et véhicules immatriculés !
QUE 185-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Thierry Cerutti : Qui touche quoi, combien et pourquoi !
QUE 186-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de Mme Jocelyne Haller : La Tulette : coin des bonnes affaires et plus encore
QUE 187-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Alberto Velasco : Quelles contreparties dans le dossier de la Tulette dans le cadre du « deal » de la charte éthique ?
QUE 188-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Alberto Velasco : Demande de précisions sur les réponses imprécises ou éludées aux QUE 144 à 149
QUE 189-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Alberto Velasco : Demande de précisions sur la réponse à la question « Télétravail au sein de l'administration » déposée en février 2014
QUE 190-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Olivier Baud : L'opacité et le coût exorbitant du projet SCORE sont-ils confirmés et cautionnés par le Conseil d'Etat ?
QUE 191-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Bertrand Buchs : Faut-il croire à un non-dépassement des coûts du CEVA avec 2 ans de retard ?
QUE 192-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de Mme Christina Meissner : Elèves clandestins, élèves suisses : quelles sont les priorités du Conseil d'Etat en matière de scolarisation ?
QUE 193-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Thierry Cerutti : Les propriétaires de chien sont-ils des vaches à lait ?!
QUE 194-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Thierry Cerutti : Le contribuable est tondu toujours un peu plus !
QUE 195-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Thierry Cerutti : Des automobilistes plumés !!!
QUE 196-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Alberto Velasco : Un peu de lumière sur toutes les autres « Tulette » depuis 2000
QUE 197-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Alberto Velasco : Que le Conseil d'Etat fasse transparence dans l'intérêt public !
QUE 198-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Alberto Velasco : Acquisition en zone de développement d'appartements en PPE par des sociétés : l'esprit de la loi est-il respecté ?
QUE 199-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. François Lefort : Application de la loi sur la biodiversité (LBio) (M 5 15) : quels moyens se donne le Conseil d'Etat ?
QUE 200-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Guy Mettan : Est-ce vraiment écologique de laisser pourrir les troncs d'arbres ?
QUE 201-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Guy Mettan : Quand le Service des forêts envisage-t-il de dégager le chemin le long de la Versoix ?
QUE 202-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Roger Deneys : Baisser les impôts, combien ça coûte ? (Impact de la baisse d'impôts voulue par la droite en 2009 sur les recettes fiscales cantonales)
QUE 203-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de M. Pierre Vanek : Le Conseil d'Etat compte-t-il maintenir M. Charles Spierer dans des conseils d'administration ou de fondation d'institutions publiques ?
PL 10499-B
Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier le projet de loi de Mmes et MM. Geneviève Guinand Maitre, Laurence Fehlmann Rielle, Françoise Schenk-Gottret, Alain Etienne, Alain Charbonnier, Anne Emery-Torracinta, Alberto Velasco relative aux espaces publics
Ce texte figure dans le «Recueil des objets déposés et non traités durant la 57e législature».
Rapport de majorité de Mme Beatriz de Candolle (PLR)
Rapport de première minorité de M. Alain Charbonnier (S)
Rapport de deuxième minorité de Mme Christina Meissner (UDC)

Premier débat

Le président. Nous poursuivons notre ordre du jour et passons au PL 10499-B. Nous sommes en catégorie II, cinquante minutes. Le rapport de majorité est de Mme de Candolle. Le rapport de première minorité est de M. Alain Charbonnier, remplacé par M. Alberto Velasco. Le rapport de seconde minorité est de Mme Christina Meissner. Je passe la parole à la rapporteure de majorité.

Mme Beatriz de Candolle (PLR), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, aujourd'hui on ne peut plus dire que le projet de loi 10499 n'a pas eu un traitement approprié. Après son deuxième renvoi, le 15 mars 2012, la commission d'aménagement du canton lui a consacré six séances et a auditionné tous les milieux actifs dans ce domaine.

Ce projet de loi n'est pas plébiscité. En outre, depuis son dépôt le 8 juin 2009, de l'eau a coulé sous les ponts et le texte est dépassé. Si tous s'accordent à dire que la question de l'espace public est fondamentale, force est de constater qu'en cinq ans l'approche des espaces publics d'importance est autre. En effet, elle tient compte de l'enseignement de certaines erreurs du passé, telles que l'aménagement des places de Cornavin et Bel-Air.

Nombre de concours d'architecture et d'urbanisme sont lancés; par exemple, en ce qui concerne les espaces publics aux interfaces CEVA, les communes ont leur mot à dire à toutes les étapes: cahier des charges, avant-projet, projet, autorisation de construire. Des ateliers fonciers sont mis en place, les principes sont actés au travers de conventions. D'ailleurs, la fiche A10 du plan directeur cantonal 2030 prévoit ces modalités. Une nouvelle base légale serait superflue. Comme cela a si bien été dit par l'architecte Patrice Bezos, membre de la FAI, lors de son audition: «La commune, et en particulier son action concertée avec le canton, est l'instance la mieux placée pour assurer la cohérence de l'ensemble.»

Certains diront que peut-être la problématique se pose différemment pour des espaces publics plus petits, liés à des opérations immobilières uniques ou intégrées dans un PLQ. Il est vrai que la commune a un petit contrôle qualité, mais celui-ci reste assez restreint. Nous réceptionnons souvent des projets dessinés par les services cantonaux et les promoteurs et émettons une fois que tout est ficelé un préavis que les services cantonaux suivent ou non. Le projet de loi 11305 modifiant la loi générale sur les zones de développement, actuellement à l'étude à la commission d'aménagement du canton, met en avant l'idée que l'espace public structure le bâti et est une condition à la qualité globale du projet.

Mesdames et Messieurs les députés, des outils existent et le département de l'aménagement, du logement et de l'énergie nous en propose d'autres pour bien faire. C'est donc en toute connaissance de cause que la majorité de la commission d'aménagement vous invite à refuser ce projet de loi.

M. Alberto Velasco (S), rapporteur de première minorité ad interim. J'aimerais tout d'abord rendre hommage à deux dames: la première est ma camarade Geneviève Guinand Maitre, que je remercie pour son excellent projet de loi, que j'avais déjà étudié à l'époque et qui est toujours d'actualité, et également Mme Meissner pour son excellent rapport de minorité, qui m'a vraiment servi pour entrer dans le sujet. Il faut relever qu'il s'agit effectivement d'un excellent rapport de minorité.

Mesdames et Messieurs les députés, je suis étonné que les libéraux prennent cette position, parce que nous avons débattu avant-hier, je crois, sur le PPP. Or, si vous lisez le projet de loi de ma camarade, l'un des articles - il me semble que c'est l'article 9 - incite à cela. Le projet de loi invite donc l'Etat, avec les privés, à faire du PPP en matière d'aménagement de l'espace public.

Or, je trouve que rien que pour cet article-là, les libéraux, s'ils étaient cohérents, auraient pu entrer en matière pour travailler là-dessus. Les socialistes ont fourni là une ouverture incroyable et vous auriez même pu dire aux socialistes qu'ils ne sont pas cohérents avec leurs autres positions sur le PPP, puisque voilà qu'ils le proposent concernant l'espace public ! Mais vous n'avez même pas saisi cette perche, et cela m'a étonné.

Enfin, Mesdames et Messieurs, celles et ceux qui connaissent les espaces publics genevois, et notamment les quartiers les plus déshérités, comprendront qu'à Genève, c'est à géométrie variable: en fonction des lieux où vous allez, vous avez des espaces publics plus ou moins de qualité, tandis que dans d'autres endroits, c'est vraiment le Tiers-Monde. Et quand vous voyez, Mesdames et Messieurs, que ce Grand Conseil a passé presque deux ans à travailler sur des projets de lois pour mettre en place des dispositions sur l'affichage public... On a passé beaucoup de temps sur l'affichage public, parce que ce thème est fondamental, c'est vrai. En revanche, le projet de loi sur les espaces publics, on le balaie ! Et c'est vrai, Madame la rapporteure de majorité, Mesdames et Messieurs, après quatre ans de travail, on en revient au point de départ.

Mais si la majorité disait: «Ecoutez, ce projet ne nous intéresse pas, parce qu'on a tout fait, les espaces sont parfaits et maintenant nous avons des dispositions parfaites, on n'a pas besoin de votre projet de loi !»... Or, dans le cas présent, il n'y a rien ! C'est le désert total ! Et devant le désert total, vous nous proposez le Sahara en matière d'espaces publics ! Pour des députés qui ont en tête, comment dire, ce qu'on appelle l'intérêt public... L'intérêt public, Mesdames et Messieurs, c'est avoir des égards envers les citoyennes et citoyens de ce canton où qu'ils soient, quels qu'ils soient, et que ceux-ci bénéficient de la même qualité d'espaces publics !

Madame la rapporteure de majorité, vous n'allez pas me dire que l'espace public de Cologny, par exemple, est identique à celui que l'on voit à Vernier, ou dans certains quartiers ! Parce qu'à ce moment-là, je... Non, c'est impossible, ce n'est pas vrai ! Donc, eu égard à cela, effectivement l'Etat se doit d'intervenir. A mon avis, on n'est pas là dans une économie ou une politique sociale à deux vitesses, mais dans des espaces publics à plusieurs vitesses, à Genève !

Pour ces raisons, Mesdames et Messieurs, je ne comprends pas que vous refusiez ce projet de loi. Il m'est impossible de comprendre. J'ai relu le projet de loi: il donne toute une série de possibilités qui permettent justement de travailler. Or, aujourd'hui, face au PAV, il y a un problème. Ne serait-ce qu'en pensant au PAV, à ce projet qui nous tient à coeur à tous et qui suscite un grand débat, ne serait-ce que, justement, en vue du financement de ce grand projet, vous devriez entrer en matière sur ce projet de loi, quitte, peut-être, à y apporter des aménagements. Je ne dis pas que le projet vous convienne totalement, mais enfin, entre dire qu'il ne convient pas totalement et dire qu'il ne convient pas du tout, il y a un espace ! Et je ne comprends pas, Mesdames et Messieurs, que face à la responsabilité que nous avons envers les quartiers déshérités, face à la responsabilité que nous avons envers le PAV, on refuse ce projet de loi.

Pour ceux d'entre vous qui connaissent le quartier de la Tambourine à Carouge: il y a quatre ou cinq ans, lorsque je siégeais à la commission des travaux, nous nous sommes déplacés là-bas à l'invitation des habitants de ces immeubles, qui souhaitaient que nous, députés, puissions voir dans quelle situation ils étaient. Il n'y avait rien, Mesdames et Messieurs, même pas une place. Rien ! Rien du tout ! Même pas un arrêt de bus !

Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.

M. Alberto Velasco. Oui, Monsieur le président. Même pas un arrêt de bus ! Aujourd'hui, après cinq ou six ans, rien n'a changé à la Tambourine. L'Etat doit intervenir avec les communes pour exiger un minimum de qualité de l'espace public ! Mesdames et Messieurs, je souhaite que nous entrions en matière sur ce projet de loi et que nous le renvoyions en commission pour travailler vite, ou que nous l'acceptions.

Mme Christina Meissner (UDC), rapporteuse de deuxième minorité. Mesdames et Messieurs les députés, l'espace public est tout ce qui fait la ville et donne une centralité au village. C'est l'espace de rencontres et d'échanges formé par les places, les parcs, sans oublier les pôles d'échanges et les voies que l'être humain utilise pour se déplacer à pied, à vélo, en voiture ou en transports publics; mais c'est aussi l'espace qu'emprunte la nature qui partage notre milieu de vie: ces allées, ces haies, ces espaces riverains ou ces plans d'eau qui permettent à la nature de traverser et de pénétrer jusqu'au coeur de nos cités, les rendant belles, vivantes, verdoyantes et agréables.

Force est de constater qu'à Genève, la situation en matière d'aménagement d'espaces publics est très inégale en fonction des quartiers. Situés à l'écart des enjeux ou des grands projets de renouvellement urbain, il y a des quartiers oubliés: place Sturm ou place des Charmilles. D'autres ont plutôt subi qu'embelli, suite à l'attention qui leur a été portée: parc Baud-Bovy, place de Cornavin, Bel-Air, etc. Et le résultat n'est pas à la hauteur des deniers qui y ont été investis. A tel point d'ailleurs que tous s'accordent aujourd'hui pour remettre en cause l'aménagement de la place de Cornavin.

La gestion des espaces publics souffre de trop d'acteurs et de trop de complexité, elle pâtit de l'absence de coordination et de bon sens, sans oublier le manque de moyens financiers. Tout le monde s'accorde à reconnaître que la situation actuelle n'est pas satisfaisante.

Le projet de loi que nous discutons aujourd'hui propose des pistes pour améliorer la situation. Certes, il n'est pas parfait, mais il a le mérite d'exister. En septembre 2009, il n'a pas trouvé grâce auprès de la commission d'aménagement qui l'a balayé. Le 15 mars 2012, le Grand Conseil, dans un sursaut réunissant une majorité inattendue dont l'UDC, a refusé le rapport déposé en février 2012 et a renvoyé le projet de loi à la commission d'aménagement.

Le retour en commission de ce projet de loi a permis d'éclairer le sujet, ce qui n'avait pas été fait lors du premier examen. Mais les discussions et auditions auront été vaines, puisque au final, plutôt que de construire sur les bases que proposait le projet de loi, la majorité de la commission, engluée dans des débats par trop politisés, a refusé d'entrer en matière, enterrant une deuxième fois le projet de loi. A l'issue des débats, la majorité des députés a préféré suivre sagement le conseiller d'Etat Longchamp qui renvoyait les députés au projet de plan directeur cantonal 2030, conditionnant à son adoption la concrétisation d'une base légale relative aux espaces publics ! Courageusement, les Verts se sont abstenus... Et depuis un an, on l'attend toujours, cette base légale !

Seule aux côtés des socialistes, l'UDC a soutenu l'entrée en matière, estimant que le sujet des espaces publics était suffisamment important pour mériter une loi et que le projet de loi proposé offrait cette opportunité. Le projet de loi 10499 n'est pas parfait et aurait pu être amendé pour répondre aux problèmes avérés auxquels se heurte la construction d'espaces publics de qualité répondant aux besoins des habitants. A l'aune des transformations et de la croissance très, voire trop rapides, envisagées au niveau de notre environnement urbain, à l'aune des espaces publics d'ampleur prévus dans le projet la Praille-Acacias-Vernets, l'UDC estimait urgent d'agir plutôt que de repousser le problème plus loin, plus tard, à d'autres.

D'autres qui, d'ailleurs, ont entre-temps décidé de s'en préoccuper, mais comment ? Le Conseil d'Etat a décidé de créer une délégation pour répartir les compétences entre canton et communes. Il cite les domaines du sport, de la culture et... des espaces publics ! Mais il déclare d'emblée que la question de la répartition financière sera traitée plus tard. Sans moyens financiers, il est illusoire de croire que des solutions seront trouvées.

Le PLR, constatant lui aussi qu'il faut bien que ces infrastructures, ces espaces publics trouvent leur financement pour pouvoir être construits, propose d'aller le chercher dans un fonds, celui dédié aux LUP. Alors ne me dites pas que l'idée portée par ce projet de loi de créer un fonds est mauvaise ! Si c'est sa forme qui dérange, eh bien renvoyons-le en commission pour le travailler de manière constructive et pour arriver enfin à un résultat. Je vous remercie, Mesdames et Messieurs.

M. François Lefort (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, pour les Verts, les espaces publics sont fondamentaux pour l'aménagement du territoire et nous partageons bien sûr les constats des auteurs de ce projet de loi, et même certains constats émis par les rapporteurs de minorité. Les espaces publics sont souvent négligés, voire mal intégrés, surtout dans les projets passés, d'ailleurs, dont nous espérons maintenant que les autorités tant communales que cantonales ont tiré les leçons. Mais bien sûr, nous ne partageons pas le qualificatif de «Tiers-Monde» utilisé par le député Velasco pour en affubler les espaces publics actuels à Genève; il est même un peu insultant pour des espaces publics qui peuvent être de qualité dans certaines villes du Tiers-Monde.

Ce projet de loi traite de la qualité des espaces publics, de leur financement et de la répartition des compétences. Quelle est la réalité aujourd'hui ? La réalité est que si les communes prennent en charge les espaces publics à l'exception des petits espaces publics liés aux opérations immobilières, nombreux sont les partenaires étatiques qui interviennent déjà au niveau des PLQ, des autorisations de construire ou de la commission de l'urbanisme.

La nécessité d'un contrôle de qualité supplémentaire n'est donc pas patente et a fortiori, n'est pas utile non plus, à moins, bien sûr, de considérer que l'Etat ne fait pas son travail. Les normes et directives n'engendrent pas la qualité architecturale, sinon cela se saurait déjà, au vu des normes déjà existantes. En revanche, la qualité, sans qu'on la décrète, peut être renforcée par les concours sur les espaces publics dans les projets d'aménagement, et ces systèmes existent déjà, on y recourt d'ailleurs de plus en plus. Ce recours plus fréquent doit se voir encouragé par le département.

Par ailleurs, le projet de plan directeur cantonal 2030 contient maintenant une fiche qui s'appelle «Développer et valoriser les espaces publics d'importance cantonale» et, pour le financement, un certain nombre de taxes y sont affectées. Mais un vide persiste sur ce financement, en particulier lorsque la capacité financière des communes est dépassée. Par exemple, la taxe d'équipement ne couvre pas l'aménagement extérieur, ni les espaces publics. Il faudra donc trouver une solution à ce problème, car si on demande à un entrepreneur d'y pourvoir, il y aura un impact défavorable sur les prix des loyers, ce qui est contraire à la politique en matière de logement que nous, les Verts, soutenons à Genève.

La mise en oeuvre de ces mesures prévues par le plan directeur cantonal 2030 doit succéder immédiatement - vous le savez - à l'approbation de ce plan directeur par la Confédération, ce qui signifie que des modifications de deux lois genevoises, la LGZD et la loi d'application de la loi sur l'aménagement du territoire doivent être préparées dès maintenant, et nous profitons bien sûr de ce débat pour attirer l'attention du département sur cette échéance et sur la préparation des bases légales nécessaires au financement des espaces publics.

Voilà la méthode rationnelle qu'il faut appliquer en attendant que le département nous propose rapidement ces modifications des lois existantes pour résoudre le problème de financement des espaces publics. Pour favoriser la création de ces espaces publics de qualité, nous, les Verts, nous abstiendrons sur ce projet de loi que nous jugeons ancien et tout à fait inapproprié.

M. Bertrand Buchs (PDC). Le parti démocrate-chrétien refusera ce projet de loi, parce que, pour lui, il constitue de nouveau une réglementation supplémentaire qui ne va rien changer à la prise de conscience actuelle concernant les espaces publics. Il faut remettre l'église au milieu du village ! Les communes doivent s'occuper des espaces publics et, souvent, l'Etat ne les laisse pas faire ce travail nécessaire.

Je reprends l'exemple de M. Velasco concernant la Tambourine. Monsieur Velasco, c'est l'Etat de Genève qui n'a pas permis que l'on crée une place publique dans cet espace, ce n'est pas la commune de Carouge, qui l'avait prévu. (Commentaires.) Non, si vous faites une loi, cela ne changera strictement rien !

Une prise de conscience a eu lieu: c'est le point positif de ce projet de loi. Durant les travaux de la commission, un bon débat a eu lieu et une prise de conscience s'est opérée. A présent, plus aucun projet ne se fait sans une prise en charge crédible des espaces publics. Il n'y a plus un seul projet d'urbanisme dans lequel on ne parle pas des espaces publics. J'en veux pour preuve le projet Praille-Acacias-Vernets: les communes de Lancy, Genève et Carouge ainsi que l'Etat se sont réunis pour discuter des espaces publics, afin de savoir où ils se situeraient et ce qu'on allait y faire.

Cette prise de conscience existe actuellement. On va donc faire des espaces publics de qualité. Il ne faut pas toujours penser au passé, lorsqu'on a raté certains endroits: cela n'est pas lié à une loi, mais à un mauvais travail et à une mauvaise coordination. Ajouter des lois n'apporte absolument pas de solution au problème. Il revient aux gens des quartiers et aux communes de se battre pour avoir des espaces publics de qualité et c'est aux communes de se battre pour obtenir un financement cohérent de ces espaces publics, mais cela n'entre pas dans le cadre de cette loi.

Mme Caroline Marti (S). Comme vous pouvez le voir par le biais de ce projet de loi, le parti socialiste est particulièrement attaché à la création et à la promotion d'espaces publics de qualité. Pourquoi ? Parce que des espaces publics au service de la population augmentent incontestablement la qualité de vie des habitants du canton, mais également des usagers de ces espaces publics qui peuvent être des visiteurs, des gens qui viennent travailler dans ces quartiers, des touristes, et j'en passe. Les espaces publics tels qu'on les conçoit doivent, selon le parti socialiste, être des espaces de vie, de rencontres ou d'échanges, de convivialité et de détente. Cette fonction de renforcement de la cohésion sociale doit être rendue aux espaces publics et nous devons créer des lieux qui donnent envie aux habitants de les investir et de se les approprier, ce qui ne manquera pas de créer une plus-value pour la collectivité et pour la création de lien social. Or, le constat que je partage avec les deux rapporteurs de minorité est que les espaces publics que l'on connaît aujourd'hui laissent à désirer. Je prends pour exemple la place Bel-Air ou celle de Cornavin. Ce sont des espaces publics qui ont tendance à être pensés sous l'angle de leur fonctionnalité. Par exemple, à Cornavin, on a pensé aux endroits où devaient passer les trams, les voitures, la sortie du parking, l'espace de dépose-minute pour accéder à la gare, mais pas du tout à la fonction sociale de la place. C'est pour cela que nous devons sortir d'une vision purement fonctionnelle de la création des espaces publics et de leur aménagement pour se diriger vers une vision clairement sociale.

Le deuxième constat est qu'il y a une réelle et importante inconstance et inégalité des aménagements des différents espaces publics à travers notre canton, et cela peut s'expliquer par un manque de coordination de ces aménagements. Cela nécessite donc que le canton prenne le rôle de coordinateur, de pilotage de la création de ces espaces publics, et c'est ce que vise ce projet de loi que je vous recommande d'accepter.

M. Benoît Genecand (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, on a une fâcheuse tendance dans ce parlement: c'est de penser que les rédacteurs du projet de loi ont trouvé la solution du problème une fois qu'on a décrit un problème existant. Une confusion assez fréquente consiste à dire que la description est correcte et que, puisqu'on a une description correcte, on a rédigé un projet de loi qui va améliorer la situation. Ici, il s'agit d'un cas assez typique: tout le monde s'accorde à dire - mais peut-être un peu facilement - que les espaces publics ne sont pas de bonne qualité. Je crois qu'il y a pas mal d'exemples qui prouvent le contraire. Il me semble que cette opinion est un peu convenue, mais il est vrai qu'on pourrait faire mieux.

On sait où se situe le problème: selon toute vraisemblance, c'est avant tout un problème de financement, notamment dans le cadre des grands projets. En effet, les communes doivent en général supporter ce financement alors qu'elles n'en ont pas les moyens. Or, ce projet de loi ne change absolument rien à cette question. Je suis d'ailleurs étonné que les socialistes le soutiennent. Je vais juste vous lire un extrait d'une audition de M. Bürgisser, qui disait: «En outre, le projet de loi prévoit que les aménagements publics, donc ouverts à tous, soient supportés par ceux qui habiteront dans les constructions réalisées, ce qui impactera le prix des logements.» En gros, cela veut dire que les socialistes sont pour que l'on augmente les loyers pour financer les espaces publics, ce qui est surprenant.

Quant à la remarque de M. Velasco, qui voulait que le PLR soutienne ce projet de loi, parce qu'il y a un article 9 qui s'appelle «Collaboration avec le secteur privé»: je me suis dit alors que j'avais peut-être mal lu. Mais en fait j'avais bien lu ! Je vais vous lire un extrait de cet article - c'est la version socialiste du PPP...

M. Alberto Velasco. Il faut le voter, mon vieux !

M. Benoît Genecand. La version PPP du parti socialiste, quand il est gentil, c'est: «L'Etat peut recourir aux ressources privées dans le cadre de projets développés en partenariat.» Ça, c'est quand il est gentil. Il met un point et après il dit: «Il peut également exiger des contributions spécifiques aux aménagements de la part des propriétaires et entreprises privées, par exemple lorsque ceux-ci sont susceptibles d'en tirer un avantage économique.» Ça s'appelle l'impôt. Ça ne s'appelle pas un PPP, ça s'appelle l'impôt, Monsieur Velasco.

Vous avez donc identifié un bon problème. A ce problème-là, vous avez une solution qui paraît extrêmement primaire, mais qui évidemment est la solution socialiste. Vous ajoutez une couche étatique à un domaine qui est déjà sur-bureaucratisé: et hop, on crée une instance supplémentaire, un guichet unique, un machin !

La deuxième solution, c'est qu'on crée un fonds. Et où est-ce que ce fonds va prélever de l'argent ? Il va le prélever, en fait, sur les dépenses pour les aménagements extérieurs dans les projets déjà autorisés. Or, on sait qu'aujourd'hui, quand il reste un peu d'argent pour les aménagements passé à travers le tamis de l'office du logement, ce n'est vraiment pas grand-chose. Que va-t-on faire ici ? On va encore en piquer un bout pour le mettre dans un autre fonds censé améliorer l'aménagement. Je m'excuse, mais je m'étonne même que ce projet de loi soit revenu encore une fois ! Il n'aurait jamais dû être renvoyé en commission quand on a voté la première fois. Ce parlement aurait dû avoir, à ce moment-là, la présence d'esprit de faire ce qu'il aurait toujours dû faire avec ce projet de loi, c'est-à-dire fermer les écoutilles et le renvoyer à ses auteurs.

M. François Baertschi (MCG). Les espaces publics sont quelque chose de nécessaire - je dirais les espaces verts plutôt, parce que mélanger espaces publics ordinaires, espaces bétonnés, espaces goudronnés, parfois sans talent, sans qualité, avec des espaces verts de qualité... Ce que demandent principalement les Genevois, ce sont des espaces verts.

Je me souviens de combats, notamment pour les parcs de Carouge, les platanes, le parc des Acacias et autres. Il y a vraiment des combats à mener afin de travailler sur du concret et non pas sur des principes généraux, parce que le gros problème de cette loi, ce n'est pas son idée: quelque part, l'idée de base est une bonne idée, elle permet peut-être de susciter une prise de conscience. Le problème, c'est la loi en elle-même. C'est pour cela que nous nous y opposons: en réalité, même si elle est faite de bonnes intentions, cette loi ne sert à rien. C'est une loi de trop. Et trop de loi tue la loi, pourrait-on dire, comme on le dit par exemple pour l'impôt.

Ce projet de loi, nous ne pouvons pas lui donner suite, parce que cela va créer une confusion supplémentaire dans notre ordre juridique déjà suffisamment confus. Il n'apporte rien de véritablement signifiant, étant donné qu'une bonne partie des décisions sont prises soit par les communes, soit par le canton au niveau des plans directeurs.

Alors, aller dans le sens d'une meilleure qualité de l'espace public: oui; oeuvrer pour davantage d'espaces verts ou des espaces verts de meilleure qualité: oui; mais pour cette loi, malheureusement, désolés. Nous ferons peut-être mieux la prochaine fois !

M. Rémy Pagani (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, ce projet de loi a six ans, c'est dire si notre Grand Conseil traite les objets avec diligence ! Toujours est-il que nous nous sommes penchés sur ce projet et pensons qu'il a du bon en proposant que l'Etat se détermine sur la qualité des espaces publics. Vous savez comme moi que certains espaces sont publics, certes, mais dans un état - comme le dirait mon ancien collègue - assez crapoteux.

Il est certain que le problème existe, que certaines places qui devraient être publiques ne sont que des giratoires, alors qu'elles pourraient se voir embellies, que certaines autres ont dû essayer de limiter l'aspect parking - je parle des places que je connais, de la place Longemalle, par exemple, ou de la place du Rhône, un parking permanent - et bien évidemment nous sommes en faveur du principe que l'Etat se penche sur cette problématique. J'aurais eu toute une série d'amendements à soumettre, parce que je pense que ce projet de loi doit être amélioré; comme nous n'avons pas eu l'occasion de faire ce travail en commission, puisque nous n'étions pas présents, je vous proposerai à la fin de mon intervention de renvoyer ce projet de loi en commission, parce que cela me paraît de bon aloi, Mesdames et Messieurs.

Certains ont parlé - et d'ailleurs cela est évoqué dans ce projet de loi - de la mise à contribution financière des personnes qui profitent de ces aménagements. Je pense que ce sont des questions que nous devons nous poser, pas de manière à racketter, si j'ose dire, les riverains de ces places, mais de manière à envisager d'avoir les moyens d'aménager des places dont la population s'empare et qui servent à son bien-être. Cela se fait d'ailleurs dans de nombreuses villes européennes.

Je vous donne l'exemple de la place Longemalle sur laquelle se trouvait un guichet des CFF. Aujourd'hui, il y a une grande marque multinationale qui s'est installée du fait de l'embellissement de cette place publique; peut-être qu'il faudrait envisager un mécanisme pour que cette grande multinationale puisse être mise à contribution. Je ne parle pas des petites et moyennes entreprises qui étaient là bien avant, depuis trente ans, qui vaquent à leurs occupations quotidiennes sur ces places et qui, elles, ont subi des désagréments, mais des nouvelles qui viennent s'installer: à mon avis, il serait de bon aloi de les faire contribuer, d'une manière ou d'une autre, par la participation à l'installation de mobilier public, par exemple, ou à des installations d'embellissement des places en général.

Je pense qu'il faudrait qu'on réfléchisse à ce type de mécanisme, sans qu'on arrive à des perceptions qui sont, comme M. Genecand l'a imaginé, de nouveaux impôts. Je ne crois pas qu'il est question d'envisager de nouveaux impôts pour ce type d'infrastructure là. Mais il me semble en définitive que les places publiques le méritent, Mesdames et Messieurs, parce que la ville n'est pas simplement un lieu de consommation. Elle doit être un lieu poétique, la poésie fait aussi partie de l'agrément que doit offrir la ville. La ville, au sens architectural, doit aussi être une oeuvre, et de ce point de vue là, je pense qu'il est intéressant que l'Etat se penche sur les moyens de favoriser les conditions concrètes à la mise en place de cette oeuvre qu'est l'urbanité et ne réglemente pas simplement en indiquant les calibres des lampadaires et ainsi de suite, mais qu'il donne les conditions adéquates.

Aujourd'hui, Mesdames et Messieurs, à moins d'avoir des municipalités qui soient très riches, nous n'avons pas les moyens, à l'Etat et à la Ville, de donner cette qualité à l'espace public. Pour toutes ces raisons et bien d'autres qui ont été citées jusqu'à présent, je vous propose le renvoi de ce projet de loi en commission. J'ai de nombreuses propositions pour régler ce problème de manière intelligente. Je ne dis pas que ce projet de loi n'est pas intelligent, je dis qu'il a six ans de retard sur la réalité d'aujourd'hui. Merci de votre attention.

Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs les députés, nous avons donc une demande de renvoi en commission. Seuls peuvent intervenir les trois rapporteurs et le conseiller d'Etat. Je passe la parole à Mme la rapporteure de majorité.

Mme Beatriz de Candolle (PLR), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, on cite toujours les mêmes exemples: Longemalle, Bel-Air, Cornavin, places qui comme par hasard sont toutes sur le territoire de la Ville de Genève. (Brouhaha.)

Le président. Attendez, Madame, vous n'avez pas le bon micro allumé. Vous pouvez recommencer, ainsi on entendra mieux.

Mme Beatriz de Candolle. On cite toujours les mêmes exemples: Longemalle, Bel-Air, Cornavin. Comme par hasard, ce sont des espaces publics sis sur le territoire de la Ville de Genève. Mme Meissner parle du trop grand nombre d'acteurs, or ce projet de loi propose une couche supplémentaire au mille-feuille administratif de notre canton. M. le rapporteur de minorité oppose, lui, deux communes: Cologny et Vernier. Sachez, Monsieur, que les espaces publics de Chêne-Bourg sont reconnus de qualité, alors même qu'il s'agit d'une commune qui est au troisième rang en matière de précarité à Genève.

Mesdames et Messieurs, ce projet de loi est dépassé et ne devrait plus faire partie de notre ordre du jour, raison pour laquelle je vous incite à ne pas le renvoyer en commission. Je propose plutôt aux deux rapporteurs de minorité de revenir avec une proposition qui soit plus à même de correspondre à la réalité d'aujourd'hui.

M. Alberto Velasco (S), rapporteur de première minorité ad interim. Monsieur le président, permettez-moi de dire à M. Genecand, qui a relevé des éléments libéraux dans le projet de loi socialiste, que nous n'étions pas tous d'accord, mais une majorité l'a décidé ainsi. Cependant, vous, vous auriez dû aller dans ce sens-là puisqu'il s'agit d'éléments très libéraux. Je ne comprends pas que vous vous opposiez. Vous auriez pu améliorer le projet de loi, mais non, vous l'avez refusé. Ensuite, M. Fuchs me dit que la Tambourine, c'est de la faute de l'Etat. Mais justement, Monsieur Fuchs, vous allez dans ce sens-là...

Des voix. Buchs ! M. Buchs !

M. Alberto Velasco. Excusez-moi, Monsieur Buchs. Je vous prie de m'excuser. Mais vous allez dans mon sens ! S'il y avait eu des dispositions, peut-être qu'on n'en serait pas là ! Ensuite, M. Lefort me dit qu'il trouve un peu indélicats mes propos comparant Genève et les pays en développement: mais M. Lefort va dans mon sens, puisqu'il pense que dans les pays en voie de développement les places sont de meilleure qualité et mieux adaptées que chez nous. Mais bravo ! Il va donc dans mon sens ! Allez vous promener à la place des Augustins, Monsieur Lefort, vous verrez comme cette place est bien aménagée ! Il y a des espaces extraordinaires, il y a un jardin, une fontaine, les enfants peuvent y aller... Rendez-vous là-bas, Monsieur Lefort, vous m'en direz des nouvelles ! (Brouhaha.) Je vois que les Verts nous proposent une fiche. Ils disent que ce projet de loi est mauvais et ils nous proposent une fiche. Bravo ! Cette solution est merveilleuse !

Mesdames et Messieurs, eu égard à tout ce qui a été dit, à savoir que ce projet de loi n'est pas parfait: effectivement, mais il s'agit d'une base de travail sur laquelle on peut se pencher en commission et c'est pour cela que nous, socialistes, accepterons le renvoi en commission.

Mme Christina Meissner (UDC), rapporteuse de deuxième minorité. Je constate que dans ce parlement tout le monde cite les espaces publics, notamment verts, comme étant d'importance. En effet, ils sont absolument importants. C'est le lieu où l'on se rencontre, où l'on vit et où l'on partage. Mais ensuite, quand on en arrive au point de savoir comment on va faire, comment on y parvient, c'est là qu'on n'est plus d'accord, alors même qu'il me semble nécessaire de fixer ce cadre qui permet de dire qui va faire quoi et avec quels moyens. C'est bien la loi qui le fixe ! D'ailleurs, même le Conseil d'Etat l'a dit: le plan directeur cantonal doit effectivement présenter une base légale relative aux espaces publics.

Cependant, on l'attend toujours, cette base légale ! Alors que nous avons ici un projet de loi qui n'est certes pas parfait, mais qui a le mérite d'exister et qu'on peut renvoyer là, maintenant, tout de suite, en commission pour pouvoir faire un travail intelligent. Je vous rappelle que ce ne serait pas la première fois qu'il y aurait des amendements conséquents qui seraient proposés à un projet de loi. A ce moment-là, nous pourrons dire qu'il s'agira d'un projet de loi que nous portons tous et auquel nous allons tous adhérer.

Je vous rappelle que les problèmes aujourd'hui sont avérés ! La directrice de l'office de l'urbanisme confirme que les problèmes de répartition de compétences existent en particulier quant à l'organisation de la maîtrise d'ouvrage entre canton et communes. M. Kaufmann, que nous avons auditionné en commission, a lui-même aussi dit que le problème à Genève est qu'on ne regarde que la dimension fonctionnelle en oubliant totalement le côté convivial et social des places. Vraiment, dans ces conditions, je crois qu'il faut maintenant fixer le cadre et arrêter de dire toujours qu'on va le faire plus tard, qu'on fait confiance à l'Etat, etc. Nous avons ici, au parlement, la possibilité d'exercer notre pouvoir de législateur et de dire qu'on a une loi, qu'on la renvoie en commission où on l'amende et on travaille ! Peut-être que le projet a six ans, mais nous sommes un nouveau parlement et ce parlement peut prendre ses responsabilités.

Le président. Merci, Madame la rapporteure de deuxième minorité. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons procéder au vote sur le renvoi en commission.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 10499 à la commission d'aménagement du canton est rejeté par 56 non contre 27 oui.

Le président. Nous poursuivons nos débats et je passe la parole à Mme la députée Anne Marie von Arx-Vernon à qui il reste trois minutes et dix secondes.

Mme Anne Marie von Arx-Vernon (PDC). Monsieur le président, cela sera tout à fait suffisant. J'ai entendu des choses terrifiantes: zones sinistrées, Tiers-Monde, enfin que les places seraient des catastrophes absolues à Genève, comme s'il n'y avait qu'une loi qui pouvait remettre en place le développement et une urbanisation harmonieuse.

On parle de créativité, on parle de talent, on parle d'imagination, on parle de tout ce qui peut rendre plus convivial, de tout ce qui concerne la qualité de vie, la convivialité, l'esthétique, l'harmonie, des aménagements réussis pour rendre heureux les habitants et les touristes. Mais, Monsieur le président, il y a un magnifique exemple depuis quelque temps en Ville de Genève: ce qu'a fait M. Barazzone ! (Exclamations.) C'est bizarre qu'on oublie de le citer, parce qu'il y a eu des choses extrêmement intéressantes qui à l'époque ont pu être temporaires, mais qui vont être un peu plus durables. C'est dommage de ne pas le citer, parce que ce n'est pas un projet de loi qui a permis cela, c'est juste une volonté politique, avec des personnes compétentes autour d'un talentueux conseiller administratif. C'est tout simplement possible et il n'y a pas besoin de projet de loi pour cela !

Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. le député Michel Ducret, à qui il reste une minute et cinquante-trois secondes.

M. Michel Ducret (PLR). Merci, Monsieur le président. Il est tout de même étonnant d'entendre des gens dire qu'on préfère l'utilité à l'apparence, etc. Demandez aux utilisateurs des transports publics s'ils pensent vraiment que les places de Genève sont particulièrement bien conçues à leur usage ! Ce n'est pas cela la vérité, Mesdames et Messieurs. La place manque à Genève pour faire certains aménagements, certes. Mais cette place, ce n'est pas une loi qui va la créer, excusez-moi ! Vous n'allez pas démolir des immeubles pour créer des espaces publics !

Il est vrai que ce manque d'espace est un problème à gérer, parce qu'on se trouve au sein d'une agglomération qui a pris des dimensions qui ne sont pas à l'échelle de l'époque où s'est créée notre ville. Il faut vivre avec cette réalité ! Alors quelle est la question suivante ? Est-ce qu'une loi va créer, par exemple, des oeuvres d'art de qualité ? Mesdames et Messieurs, la réponse est très simple ! Il n'y aura pas d'oeuvre de qualité avec une loi ! Certainement pas avec un service chargé de vérifier si les oeuvres sont de qualité ! A part qu'on dépensera un peu plus d'argent, cela ne changera rien à ce qui se passe aujourd'hui. Il revient simplement aux communes...

Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.

M. Michel Ducret. ...de vérifier que leurs espaces publics soient réalisés avec qualité en pensant aux divers usagers. Ce n'est pas une loi qui va condamner les communes à faire des espaces publics de qualité, Mesdames et Messieurs, c'est simplement leur responsabilité. Il est bien suffisant de dire que c'est aux gens des communes...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.

M. Michel Ducret. ...et aux usagers d'imposer leurs besoins par rapport à la réalité.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Roger Deneys, à qui il reste deux minutes et trente-neuf secondes. (Brouhaha.)

Une voix. C'est trop !

M. Roger Deneys (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais d'abord dire que les places du centre-ville qu'on évoque aujourd'hui, comme la place Longemalle, ne sont franchement pas des réussites, quoi qu'on en pense. C'est le manque d'espace pour une part, mais c'est aussi le fait qu'on veut absolument ménager tous les intérêts: les automobilistes, les taxis, les commerçants avec leur vision...

Une voix. Les vélos !

M. Roger Deneys. Les cyclistes, peut-être aussi. Et il est vrai que le résultat, c'est qu'on aménage des places qui ne sont, ma foi, pas forcément très convaincantes en termes de convivialité et d'utilisation de l'espace public pour des usages récréatifs. En l'occurrence, j'ai été assez frappé lorsque la place Longemalle a été inaugurée, parce que, tout de suite, on se rend compte que ce n'est pas vraiment une place. C'est différent d'avant, mais ce n'est pas vraiment une place. Au demeurant, la qualité des aménagements, comme le fait de mettre des pavés, a aussi des conséquences sur les moyens de mobilité douce contemporains comme la trottinette, le «inline» et les autres moyens de se déplacer aujourd'hui. En fait, on ne peut pas vraiment le faire sur cette place, on est donc dans un usage un peu à l'ancienne. Pour le cheval et le cortège de l'Escalade, c'est parfait, mais pour le reste, ce n'est pas fantastique !

Concernant la proposition de ce projet de loi disant que des privés pourraient être mobilisés pour amener aussi des capitaux, voire être contraints d'en amener dans certains cas: je pense que cela est aujourd'hui réellement un problème. Vous refuserez ce projet de loi, si j'ai bien compris, mais en même temps il faut répondre à cette question: dans un périmètre comme celui des Cherpines - où le terrain vaut dix francs le mètre carré aujourd'hui et est revendu à 1000 F le mètre carré pour des projets immobiliers - venir dire ensuite aux communes qu'il n'y a pas d'argent pour les aménagements publics, qu'on ne sait pas où trouver l'argent pour faire des parcs, c'est tout simplement scandaleux ! Et c'est la réalité d'un périmètre comme celui des Cherpines aujourd'hui ! Plan-les-Ouates a des moyens, mais pas Confignon. Et Confignon est en train de chercher de l'argent pour financer les espaces publics. Vous trouvez cela normal, quand le terrain vaut dix francs le mètre carré et qu'il est revendu 1000 F ?

Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.

M. Roger Deneys. Les promoteurs s'en mettent plein les poches et les habitants peuvent pleurer sur des espaces publics de qualité médiocre ! Nous devons donc trouver des réponses à ces problèmes. Ce ne sera pas avec ce projet de loi, manifestement, mais je vous invite à ne pas simplement pleurer et à proposer aussi des solutions.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Pagani, à qui il reste vingt secondes.

M. Rémy Pagani (EAG). Oui, Monsieur le président, il me reste vingt secondes, donc je tiens à protester contre cette pratique qui vise à contraindre le débat. On a là un débat essentiel pour l'espace public et visiblement on nous coupe la parole, et...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.

M. Rémy Pagani. ...je le regrette.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme la rapporteure de deuxième minorité. Il vous reste dix-sept secondes, Madame.

Mme Christina Meissner (UDC), rapporteuse de deuxième minorité. Dix-sept ! Alors je vais être très rapide. On veut faire un parc sur le PAV: avec quel argent ? On veut remettre à ciel ouvert les cours d'eau, sur le PAV: avec quel argent ? Je constate une chose, c'est que le Conseil d'Etat n'hésite pas à remettre l'ouvrage sur le métier...

Le président. Il vous faut conclure, Madame la députée.

Mme Christina Meissner. ...en remettant ses propres lois en question en commission. Ce parlement, à l'évidence, ne se sent pas compétent...

Le président. C'est terminé, Madame.

Mme Christina Meissner. ...pour faire son travail de législateur !

Le président. Merci, Madame la députée. Madame Beatriz de Candolle, vous avez la parole et il vous reste deux minutes et vingt secondes.

Mme Beatriz de Candolle (PLR), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, le problème de financement des équipements publics n'est en aucun cas réglé par ce projet de loi. Mais il doit être réglé. Les communes le demandent et espèrent que le Conseil d'Etat fera diligence pour répondre à cette demande-là.

Il est vrai qu'on peut toujours faire mieux, mais, en l'occurrence, force est de constater qu'à quelques rares exceptions, les efforts consentis par les communes pour répondre aux attentes et aux besoins de leurs habitants sont à bien des égards exemplaires. Tant les aménagements pour les personnes âgées, pour les enfants et les personnes souffrant d'un handicap, qu'un éclairage adéquat et une utilisation de matériaux respectueux de l'environnement font partie des éléments déterminants lorsqu'une commune initie l'aménagement d'un espace public sur son territoire. Mesdames et Messieurs, au risque de me répéter: les outils existent, le département de l'aménagement, du logement et de l'énergie nous en propose d'autres pour faire encore mieux. Je vous demande donc, s'il vous plaît, de suivre la majorité de la commission d'aménagement du canton et de refuser ce projet de loi.

Le président. Merci, Madame la rapporteure. Je passe enfin la parole à M. le conseiller d'Etat Antonio Hodgers.

M. Antonio Hodgers, conseiller d'Etat. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, cela a été dit plusieurs fois dans ce débat, les espaces publics sont fondamentaux dans le cadre des travaux d'aménagement du territoire et il faut admettre qu'ils ont souvent été négligés par le passé, même si on constate depuis quelques années une attention accrue à leur égard.

Il s'agit, Mesdames et Messieurs, d'un changement culturel, notamment du côté des professionnels: trop longtemps, l'aménagement du territoire n'a été dévolu qu'aux architectes pour construire le bâti et aux ingénieurs pour construire ce qui prend place entre le bâti à des fins essentiellement fonctionnelles. Or, les espaces publics, cela a été dit aussi, sont des lieux de rencontre, des lieux de partage et des lieux de vie. C'est pourquoi, depuis quelques années maintenant, mon département s'efforce, mais avec les communes et les autres acteurs de l'aménagement du territoire, de renforcer ce qu'on appelle l'urbanisme. L'urbanisme s'occupe du vide, là où l'architecte s'occupe du plein, et l'idée de s'occuper du vide d'abord est une notion fondamentale, parce que le vide est ensuite rempli de gens, d'activités et non pas simplement de matériaux de construction.

Cela étant posé, il est évident que ces espaces publics doivent être de qualité. Mais là, permettez-moi de dire ceci aux initiants: à lire l'essentiel de leurs articles, on se dit que s'il fallait une loi pour garantir la qualité de quelque chose, cela se saurait ! Malheureusement, la qualité, ce n'est pas vous, législateurs, qui pouvez la décréter. La qualité doit être le fruit d'un processus de concertation avec les communes. Le plus souvent, les communes, qui connaissent leur territoire, savent mieux que le canton ce qui est nécessaire, quels sont les espaces de vie, comment ça marche, comment le quartier s'organise. La qualité vient aussi des concours que le département de l'aménagement, du logement et de l'énergie organise de plus en plus souvent.

On vient d'obtenir le résultat d'un concours d'urbanisme pour la parcelle où se situe actuellement la caserne des Vernets, et on en voit la qualité. Je vous invite à venir découvrir dans quelques jours au pavillon Sicli les projets de l'ensemble des lauréats, pour que vous vous rendiez compte à quel point les urbanistes aujourd'hui s'occupent de créer cette qualité urbaine.

La qualité dépend aussi des choix fonctionnels que l'on fait, et cela a été évoqué: trop souvent à Genève, notamment en matière de différents modes de transport, on veut faire passer tout le monde. On est donc dans une approche extrêmement fonctionnelle pour faire passer tous les modes de transports et par conséquent, la qualité urbanistique de l'ensemble en pâtit.

Ces considérations sont importantes, mais elles ne dépendent pas d'une loi, elles dépendent d'une volonté politique et de processus bien compris.

L'autre élément soulevé par ce projet de loi, c'est la clarification des rôles du canton et des communes. Là, la question est pertinente et il est vrai que certains parcs, s'ils sont petits, relèvent clairement de la compétence communale, mais certains, plus importants, donnent une responsabilité au canton. Je pense bien évidemment au grand parc que l'on prévoit au PAV, magnifique parc, énorme, un vrai poumon au coeur du PAV, que le canton a accepté de placer dans le cadre du plan directeur de quartier, à la demande des communes; ce parc est effectivement d'une telle envergure qu'il nécessitera un apport du canton d'une manière ou d'une autre.

La clarification des rôles sera, elle, à l'ordre du jour du travail mené par le département présidentiel, par M. Longchamp, dans le projet que le Conseil d'Etat s'est donné pour désenchevêtrer les tâches entre communes et canton. Ce sujet-là n'a donc pas fait l'objet d'un projet de loi tel qu'il a été évoqué, parce qu'il fait partie du cahier des charges de ce groupe de travail Ville-canton visant à clarifier le rôle de chacun.

Enfin, concernant le financement, il est vrai que dans ce projet de loi le seul article qui amène quelque chose de concret, au-delà des déclarations sur la beauté urbanistique de nos espaces publics, c'est celui du fonds pour l'espace public: je dois admettre là que le diagnostic effectué par les initiants et qui a été repris ce soir est pertinent. Bien souvent, dans les projets d'aménagement, on n'a pas assez de ressources pour financer les espaces publics, puisqu'on se concentre essentiellement sur le construit. Mais j'irai plus loin: on n'a pas assez d'argent pour les espaces publics, mais on n'a pas non plus assez d'argent pour les infrastructures ! Il n'y a pas que les espaces publics dans le cadre d'un quartier. Il y a aussi les crèches à construire, les lieux culturels, il y a toute une série d'infrastructures qui font vivre ces nouveaux quartiers et sans lesquelles on créerait des quartiers sans âme.

C'est pourquoi j'entends aller, durant cette législature, dans le sens d'un fonds qui vienne soutenir les communes, notamment celles qui assument et assumeront d'autant plus, dans la mise en oeuvre du plan directeur cantonal, des constructions de nouveaux quartiers avec des densités conséquentes, de nombreux nouveaux habitants et par conséquent la nécessité d'avoir des espaces publics et des infrastructures adéquates.

Ces mécanismes financiers exigeront d'être imaginatif, Mesdames et Messieurs les députés, et je reviendrai vers vous ces prochains mois et ces prochaines années avec des propositions, parce qu'effectivement ils impliquent d'une part le foncier: que vaut le sol ? Qu'est-ce qu'on paie au propriétaire ? Qu'est-ce qui est collectivisé pour l'ensemble du quartier ? Ils impliqueront évidemment les communes qui construisent, mais peut-être aussi celles qui ne construisent pas et qui pourraient peut-être aider les communes qui construisent. Ils impliqueront bien évidemment aussi le canton et ils impliqueront, comme le proposent les initiants de ce projet de loi, les plans financiers de construction, à savoir aussi les promoteurs et in fine les locataires.

Un des aspects intéressants soulevés par ce projet de loi du parti socialiste, soutenu par Ensemble à Gauche, c'est que ces partis, qui jusqu'à présent ont contesté l'idée que la mutation territoriale doit intégrer l'aménagement du territoire et des équipements dans la réalisation des plans financiers... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...eh bien, à travers ce projet de loi, ces partis-là se joignent - et je m'en réjouis - à l'idée que les bénéficiaires de ces espaces publics doivent aussi participer à la réalisation de ces espaces à travers les budgets de promotion et de construction qui sont validés par mon département. C'est donc bien un ensemble de ressources que nous devons mobiliser pour arriver à la qualité souhaitée.

En l'état, Mesdames et Messieurs, vous l'avez compris, ce projet de loi n'amène rien de concret si ce n'est ce fonds, mais ce fonds, il l'amène de manière très partielle, vu qu'il n'évoque qu'une seule source de financement, celle des locataires. Autant je pense que les locataires devront aussi d'une manière ou d'une autre contribuer, autant je pense qu'ils ne peuvent pas être les seuls à payer l'ensemble de ces espaces publics, et par conséquent, je vous invite à refuser ce projet de loi.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous passons au vote sur l'entrée en matière.

Mis aux voix, le projet de loi 10499 est rejeté en premier débat par 51 non contre 27 oui et 10 abstentions.

PL 10637-A
Rapport de la commission de l'énergie et des Services industriels de Genève chargée d'étudier le projet de loi de Mme et MM. Eric Stauffer, Mauro Poggia, Roger Golay, Jean-François Girardet, Pascal Spuhler, Sandro Pistis, Henry Rappaz, Dominique Rolle, André Python, Guillaume Sauty, Olivier Sauty, Jean-Marie Voumard modifiant la loi sur l'énergie (L 2 30) (Energie verte : un devoir pour l'Etat ! Eliminons la consommation d'énergie d'origine fossile !)
Ce texte figure dans le «Recueil des objets déposés et non traités durant la 57e législature».
Rapport de majorité de M. Serge Hiltpold (PLR)
Rapport de minorité de M. Florian Gander (MCG)

Premier débat

Le président. Nous abordons le PL 10637-A. Nous sommes en catégorie II, avec quarante minutes. Je passe la parole au rapporteur de majorité, M. Hiltpold.

M. Serge Hiltpold (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je reviens sur ce projet de loi qui a été traité en 2012, c'est dire l'efficience de nos travaux parlementaires, avec les diverses urgences et objets qui traînent plus de deux ans à l'ordre du jour - j'en suis assez navré.

De manière succincte, que propose ce projet de loi ? Il propose une modification de la loi sur l'énergie, la L 2 30, et plus précisément de son article 19, avec deux axes qui ont été présentés en commission: premièrement, l'encouragement de l'approvisionnement électrique issu des énergies renouvelables et non fossiles par le canton et les communes et, deuxièmement, l'obligation que les bâtiments publics ou de droit public ne consomment que de l'énergie électrique issue de l'énergie renouvelable ou non fossile. Si le but, sur le fond, est parfaitement louable, le projet de loi est inefficient, et je souligne que la constitution genevoise proscrit la consommation d'électricité de provenance nucléaire.

Ce projet de loi toucherait toutes les communes genevoises, notamment dans leur autonomie. Actuellement, toutes les communes sont fournies par les SIG par défaut en «Vitale Bleu», en «Vitale Vert» ou une combinaison des deux. Il n'y aurait pas de grand changement dans la pratique. L'alinéa 2 semble donc caduc. De plus, ce projet de loi qui modifie l'article 19 de la nouvelle loi sur l'énergie réduit l'effort à la seule électricité et n'est pas réalisable pour le chauffage, ce qui est très dommage. Pour terminer - et je crois qu'il s'agit d'un élément important à préciser pour les personnes qui n'ont pas suivi les travaux - un seul établissement public serait touché avec un tarif de 0,3 centime pour «Initial»: vous comprendrez qu'il s'agit des TPG, un grand consommateur d'électricité.

En conclusion, en termes d'efficience, les efforts sur les assainissements énergétiques sont bien plus efficaces et porteurs tant pour les collectivités publiques que pour les acteurs privés. C'est bien le but de cette nouvelle loi sur l'énergie qui ne demande qu'à être mise en pratique, avec des retombées intéressantes pour notre économie genevoise. Je vous invite donc à refuser ce projet de loi.

M. Florian Gander (MCG), député suppléant et rapporteur de minorité. Chers collègues, je commencerai par un petit historique. Le groupe MCG a déposé ce projet de loi en février 2010, et à l'époque, rappelez-vous, pour ceux qui étaient là, ce projet de loi était considéré comme inefficace ou ne servant à rien.

Entre-temps, malheureusement, l'histoire a connu un événement qui restera dans nos mémoires, le 11 mars 2011: c'est l'événement de Fukushima, qui a changé catégoriquement la politique fédérale de la Suisse, qui souhaite maintenant un arrêt complet de tout ce qui concerne les centrales nucléaires pour en arriver à des solutions d'énergie propre. Alors si le MCG devait être une personne et avoir une profession, je dirais que le MCG serait une voyante ou un voyant, puisque à l'époque où le projet de loi a été déposé, nous avions déjà cette vision d'avenir et cette volonté de fournir nos régies publiques autonomes, nos communes et notre canton en énergie à 100% propre.

L'actualité a fait que la Confédération a emboîté le pas automatiquement, suite aux événements de Fukushima, que nous pouvons regretter puisqu'il s'agit d'un événement tragique. Mais dans ce malheur, le côté positif est que nous allons maintenant vers du 100% renouvelable, vers de l'énergie propre, et je vous rappelle le fort attachement du MCG à la géothermie, à l'éolien; on le voit en ce moment avec les SIG qui nous ont fait le plaisir de racheter Ennova - pour ne pas rappeler des articles récents dans la presse. Mais voilà ! Nous devons investir, nous devons faire en sorte que les établissements du canton s'approvisionnent en énergie propre, et ce projet de loi a toute sa raison d'être. On sait qu'aujourd'hui 94%-95% des régies publiques autonomes utilisent l'énergie propre, mais il reste encore un 10% à 15% qui pourrait aussi le faire. Je vous remercie donc de soutenir ce projet de loi.

M. François Lefort (Ve). Alors là, Mesdames et Messieurs les députés, respect ! Je vous demande un instant de silence, car nous n'avons pas coutume d'étudier d'aussi beaux projets de lois ! Celui-ci est un modèle, c'est un monument de légistique ! Vous, d'habitude, vous êtes comme moi, vous êtes tétanisés devant la feuille blanche du projet de loi. Vous n'osez pas, vous vous retenez. Eh bien, faites comme eux ! Ne vous retenez pas ! Lâchez-vous ! Voici la recette, elle est simple: vous prenez une loi toute fraîche, ici en l'occurrence la loi sur l'énergie, combattue par référendum, et, en pleine campagne référendaire, vous déposez un projet de loi pour la modifier. Bien sûr, jamais l'idée ne vous était venue de proposer cette modification pendant les débats, non, bien sûr ! Vous y mettez maintenant un titre ronflant et mensonger qui n'a rien à voir avec le corps du projet de loi: «Energie verte: un devoir pour l'Etat ! Eliminons la consommation d'énergie d'origine fossile !» Moi, quand j'entends ça, j'entends: «Eliminons toutes les voitures, les camions, les chaudières à gaz, à mazout, pas demain, tout de suite, maintenant !» Plus vert que vert ! Retenez-moi, je vais le voter, ce projet de loi ! (Rires.) Ensuite, c'est de la tarte à la crème: vous prenez un article, n'importe lequel, et vous changez un mot. Par exemple, vous remplacez «énergie» par «électricité». C'est tout le génie de ce projet de loi. Il ne vous reste plus maintenant qu'à pomper un document des SIG en guise d'exposé des motifs et c'est prêt ! Voilà, vous le voyez, faire un projet de loi, c'est facile ! C'est plus facile que de faire de la pâtisserie, ne vous retenez plus, Mesdames et Messieurs les députés !

Plus sérieusement maintenant, que dit l'article original de la loi sur l'énergie que veut modifier ce projet de loi ? Article 19, «Encouragement aux économies et à la diversification»: «Le canton et les communes encouragent une consommation d'énergie» - d'énergie - «économe, rationnelle et respectueuse de l'environnement. Ils favorisent la diversification énergétique, la recherche, l'essai et l'application d'énergies renouvelables.»

Que propose ce projet de loi à la place ? Article 19, «Encouragement aux économies et à la consommation d'énergie renouvelable»: «Le canton et les communes encouragent une consommation électrique» - maintenant - «rationnelle et respectueuse de l'environnement basée sur des approvisionnements issus de l'énergie renouvelable et non fossile.» Là, nouveau concept: l'énergie renouvelable et non fossile - on imagine qu'il y a donc de l'énergie fossile qui serait renouvelable. «Ils favorisent la diversification énergétique, la recherche, l'essai et l'application des énergies renouvelables.» Alinéa 2: «Les bâtiments des collectivités et établissements de droit public ne peuvent utiliser que des approvisionnements issus de l'énergie renouvelable non fossile pour leur consommation d'électricité.»

Vous comprenez tout de suite, Mesdames et Messieurs les députés, que le but de cet article et de ce projet de loi est de couler en douce les encouragements aux économies d'énergie en remplaçant «consommation énergétique» par «consommation électrique». Le deuxième alinéa novateur cible la consommation électrique des bâtiments publics, mais pas le chauffage, et c'est toute la subtilité de ce projet de loi. Rappelez-vous, Mesdames et Messieurs, que le principal de la consommation d'énergie fossile est dû au chauffage en Suisse, pas à la production d'électricité, qui ne s'utilise que très marginalement pour faire du chauffage.

Ce projet de loi ne sert à rien, il ne nous a servi qu'à perdre du temps, trois séances de commission quand même ! Vous me direz que ce n'est pas beaucoup. Eh bien si ! C'était trop ! Trois séances de commission surréalistes où l'on a tenté de nous faire croire que ce projet de loi, comme d'habitude, s'apparente à un acte visionnaire, alors que c'est du grand n'importe quoi ! Et derrière ce grand n'importe quoi, il y a surtout une grave attaque de la loi sur l'énergie. Ne soyez pas dupes, Mesdames et Messieurs les députés, surtout ne votez pas - bien que j'aie manqué de le faire... (Rires.)

Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.

M. François Lefort. Ne votez pas ce projet de loi ! (Applaudissements.)

M. Philippe Morel (PDC). Aïe aïe aïe ! Aïe aïe aïe ! (Rires.) Je n'ai pas appuyé sur le bouton assez tôt, là ! (Rires.) Monsieur le président, que dire de plus ? Au fond, ce projet de loi, s'il ne survenait pas derrière ou devant ou après une loi, serait certainement voté à l'unanimité sous la direction et avec l'enthousiasme et le leadership de mon préopinant qui, à l'évidence, est en faveur de l'énergie verte - même si elle est électrique - et de l'utilisation d'énergie renouvelable dans les bâtiments également.

Effectivement, il s'agit d'un projet de loi qui cadre parfaitement avec la volonté politique, puisqu'il est contenu déjà dans une autre loi entrée en vigueur le 7 novembre 1987. Cela fait quelques années que l'Etat se préoccupe des sources d'énergie renouvelable, qu'il se préoccupe des bâtiments malgré les problèmes financiers, qu'il se préoccupe non seulement de l'alimentation en électricité des bâtiments mais surtout de leur isolement.

Alors oui, nous sommes en faveur de l'énergie renouvelable, qu'elle soit électrique ou autre. Oui, nous sommes en faveur de l'isolement des bâtiments. Oui, nous voulons éviter le gaspillage. Oui, nous sommes en faveur de ce projet de loi et je suis, comme mon préopinant, enthousiaste pour le voter, mais malheureusement, quatorze ans plus tôt, un autre projet de loi a été voté. Il s'agit d'une loi en vigueur, la loi sur l'énergie. Nous sommes donc devant une situation qui existe depuis quatorze ans, à mon avis sans modification significative. Nous vous recommandons, avec un peu d'hésitation, de ne pas voter ce projet de loi, pourtant fort intéressant.

M. Eric Stauffer (MCG). Il est fort intéressant d'écouter les Verts, qui se prétendent écologistes. Je prétends plutôt que les Verts sont doctrinaires et essaient de tromper la population genevoise. Lorsqu'on entend ce soir leur représentant nous dire qu'il faut éliminer toutes les voitures et tout le diesel... Evidemment, on peut lire un projet de loi, mais encore faut-il avoir la faculté de le comprendre. Nous ne pensons pas aux véhicules, Monsieur le député - vous transmettrez, Monsieur le président. Nous nous occupons de la consommation électrique.

Il faut savoir comment fonctionne cette consommation. C'est effectivement une multitude de choses. Cela peut être une centrale à gaz, par exemple, comme les Services industriels voulaient la créer à Vernier. Tout le monde se souviendra de la centrale à gaz de Vernier que le MCG a refusée, parce que nous nous refusons, par idéologie cette fois, à investir pour les dix ou vingt prochaines années des sommes en dizaines de millions pour de l'énergie fossile, le gaz étant une énergie fossile.

Nous voulons privilégier l'énergie renouvelable. Qu'est-ce qu'une énergie renouvelable ? C'est quelque chose qui provient d'un barrage hydroélectrique, qui provient de la géothermie, qui provient des éoliennes, qui provient de l'énergie solaire. Ce sont des énergies renouvelables. (Commentaires.) Partant de ce principe, Mesdames et Messieurs... (Brouhaha.)

Le président. Chut !

M. Eric Stauffer. On sait bien que quand le MCG propose un projet de loi, surtout il faut tout faire pour le faire capoter. Que demande ce projet de loi ? Il demande deux choses relativement simples: c'est d'encourager, comme cela est indiqué, la consommation d'énergie renouvelable, mais pas une en particulier, parce que c'est une multitude de sources d'énergies renouvelables qui donne une totalité qui fait que la consommation et la planète ne pourraient s'en porter que mieux. Et c'est cela que nous voulons, puisque aujourd'hui il y a encore de l'énergie qui peut provenir de centrales à gaz, par exemple, c'est-à-dire de l'énergie fossile que nous combattons. On sait bien que l'Allemagne utilise beaucoup d'usines à charbon, comme les Etats-Unis. C'est de l'énergie fossile que nous voulons combattre, et je pense que le MCG et le parlement peuvent donner cette impulsion pour utiliser de l'énergie renouvelable.

Demander d'inscrire dans la loi que les bâtiments des collectivités et des établissements de droit public ne puissent utiliser qu'un approvisionnement en énergie renouvelable, c'est inscrire en lettres d'or dans la loi quelque chose qui dans la pratique a effectivement un certain sens. Mais de nouveau, Mesdames et Messieurs - et que la population m'en soit témoin - lorsque le MCG présente quelque chose, évidemment quand on n'a rien à en dire sur le fond, on attaque sa forme.

Je lis dans le rapport que le président de l'époque de l'Association des communes genevoises disait qu'il ne comprenait pas, je cite: «la différence entre "énergie renouvelable" et "énergie non fossile"». Permettez-moi de vous dire que quand on en est au point de ne pas savoir faire la différence entre de l'énergie renouvelable et de l'énergie fossile, il faut se demander si on occupe la bonne fonction...

Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.

M. Eric Stauffer. ...au sein du canton de Genève. Je reviendrai après, Monsieur le président.

M. Bernhard Riedweg (UDC). L'objectif fixé par le Conseil d'Etat est de doubler tous les cinq ans la production d'énergie solaire du canton par le photovoltaïque, afin d'atteindre 12% de la consommation d'électricité en 2035. Toutefois, freiner la consommation d'électricité reste l'un des objectifs de la conception de l'énergie 2013, soit la société à 2000 watts, sans nucléaire. Il s'agit donc de réduire la consommation par personne de 2% par rapport à 2000 d'ici 2020 et de 9% d'ici 2035. Le canton ne produit qu'environ 25% de l'électricité consommée, ce qui veut dire que nous devons augmenter notre production notamment par la construction du barrage transfrontalier de Conflan qui, semble-t-il, n'est plus à l'ordre du jour pour le moment. Cet ouvrage augmenterait de 9% la production hydraulique du canton. Genève devra aussi améliorer le rendement de la production de chaleur et d'électricité à partir de l'incinération des déchets et exploiter tous les autres potentiels d'énergie renouvelable, comme le biogaz, la biomasse ou la géothermie profonde. Ce projet de loi représente un recul par rapport à la loi sur l'énergie. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) L'UDC refusera l'entrée en matière.

M. Pierre Conne (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, si vous le permettez, j'aimerais juste reprendre les propos... (Brouhaha.)

Le président. Chut !

M. Pierre Conne. ...de notre préopinant du MCG qui, citant son projet de loi, ne l'a finalement pas cité, s'arrêtant à mi-chemin, car que dit le projet de loi ? Il dit ceci: «Les bâtiments des collectivités et établissements de droit public ne peuvent utiliser que des approvisionnements issus de l'énergie renouvelable.» (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Et tout à l'heure le préopinant MCG s'est arrêté là. Mais le projet de loi va beaucoup plus loin: «non fossile pour leur consommation d'électricité». Cela veut dire que ce projet de loi, dans le fond - et cela a déjà été dit tout à l'heure à travers l'excellente analyse de texte qu'a faite notre préopinant Lefort - en limitant la consommation d'électricité d'origine non renouvelable, n'empêcherait pas les communes de décider de chauffer toutes leurs salles avec des cheminées au charbon. Soit c'est une erreur de plume, soit c'est une incohérence, mais si le MCG est voyant, ce n'est sûrement pas un voyant lumineux. En l'état, tel qu'est libellé le projet... (Brouhaha.)

Le président. S'il vous plaît, un peu de silence !

M. Pierre Conne. ...il réduirait effectivement tout le sens qui a été donné à la loi sur l'énergie, faite pour la situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd'hui, qui, vous le savez, est une situation de transition énergétique; et le libellé actuel - je ne vais pas vous le relire, parce que notre préopinant Lefort l'a déjà fait - le libellé actuel de la loi sur l'énergie, par cet article 19 et l'article 20 suivant, contient toutes les dispositions pour favoriser l'utilisation de toutes les sources d'énergie renouvelable et propose à l'article 20 tous les incitatifs, notamment fiscaux et tarifaires, pour aller dans le sens de cette transition.

Je conclurai donc comme l'a fait le rapporteur de majorité en vous demandant de refuser l'entrée en matière sur ce projet de loi.

M. Roger Deneys (S). Mesdames et Messieurs les députés, je dois dire qu'à la commission de l'énergie, à l'époque, avec M. Gander, nous avions, il est vrai, accueilli avec un certain intérêt cette proposition, parce que les travaux se passaient dans un état d'esprit constructif et assez consensuel. On avait déjà eu l'occasion d'expérimenter cela à l'époque des discussions sur la centrale chaleur-force. Il y avait quelques nuances dans la façon d'exprimer nos points de vue, mais cela se passait de façon assez sereine et il est vrai que ce projet de loi, ma foi, était un peu particulier, parce qu'on pensait que l'intention était louable, en tout cas on pouvait le penser à sa première lecture. Mais dans son application, on avait quand même plutôt l'impression qu'il s'agissait d'une régression par rapport à la loi sur l'énergie actuelle. Ce n'était pas forcément l'intention du MCG quand il a déposé ce projet de loi: certes, on l'a exprimé peut-être de façon un peu sèche à M. Gander ou aux représentants du MCG, qui le prennent à titre personnel, mais je crois que c'était, de façon pragmatique, une volonté de dire que ce projet de loi veut restreindre l'application de la loi sur l'énergie à la question de l'électricité. M. Gander le relève d'ailleurs dans son rapport de minorité, c'est un peu dommage: il dit qu'on ne peut pas appliquer ce projet de loi au chauffage, car ce n'est pas réalisable à ce jour. Au fond, il s'agit bien d'une régression par rapport à la situation actuelle et, dans ce sens-là, nous ne pouvons pas le souhaiter.

J'ai entendu tout à l'heure M. Stauffer qui comme d'habitude vient faire de grandes déclarations et nous dire qu'il est contre les énergies fossiles. Je rappellerai juste qu'il roule toute l'année en 4x4 - un véhicule qui est plutôt un grand consommateur d'énergie fossile. Avant de faire de grandes déclarations devant ce Grand Conseil, il serait bien de commencer par passer à l'acte dans sa vie privée et quotidienne. Je l'invite donc à renoncer à son 4x4 et à passer au vélo: cela lui fera beaucoup de bien et c'est aussi très bon pour la tête, cela permet de réfléchir sereinement, et je suis sûr qu'après quelques mois de pratique du vélo, on aura un meilleur état d'esprit dans ce Grand Conseil.

Je vous invite à refuser ce projet de loi, parce qu'il s'agit d'une régression par rapport à la situation actuelle, et j'encourage les représentants du MCG à combattre les énergies fossiles en passant au vélo !

Le président. Merci, Monsieur le député. Je salue à la tribune nos anciennes collègues, Mmes Danielle Oppliger et Nathalie Schneuwly. (Applaudissements.) Je passe la parole à M. Benoît Genecand. Il vous reste une minute et cinquante-cinq secondes, Monsieur le député.

M. Benoît Genecand (PLR). Merci, Monsieur le président. Je vais utiliser cette minute pour évoquer un point de cet article qui est l'attitude des collectivités publiques en matière d'économie d'énergie. Le texte proposé dit que «les bâtiments des collectivités et établissements de droit public ne peuvent utiliser que des approvisionnements issus de l'énergie renouvelable non fossile pour leur consommation d'électricité». On a vu tout à l'heure que cette idée d'énergie électrique non renouvelable et non fossile était peu claire. Je me suis demandé ce que la loi sur l'énergie prévoyait pour ces mêmes bâtiments. La loi sur l'énergie - je pense qu'il est intéressant de le rappeler - dit en son article 16, alinéa 1: «Les constructions de bâtiments et installations des collectivités publiques, des établissements et fondations de droit public et de leurs caisses de pension doivent être conçues et maintenues de manière à satisfaire à un standard de haute performance énergétique, conforme aux prescriptions fixées dans le règlement.» Je pense que la version actuelle est plus précise et meilleure que celle proposée, mais ce n'est pas tellement le sujet de mon intervention. Dans la réalité, ce que font les autorités aujourd'hui en matière de gestion de l'énergie au sein de leur patrimoine immobilier est à mon avis loin de ce que prévoit la loi existante et s'il y a une vertu à ce débat, c'est peut-être celle de leur rappeler cette responsabilité d'être exemplaires en matière d'énergie, de s'appliquer à elles-mêmes toutes les prescriptions qu'elles veulent imposer à l'ensemble de la population à juste titre et de commencer déjà par gérer leur patrimoine de manière exemplaire. Merci de votre attention.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Eric Leyvraz, à qui il reste deux minutes et quarante secondes.

M. Eric Leyvraz (UDC). Merci, Monsieur le président. Nous avons actuellement une loi sur l'énergie extrêmement ambitieuse, mais c'est une loi sur l'énergie ambitieuse et réaliste ! Nous avons des échéances en 2035, en 2050 et même au-delà ! Alors, Monsieur Gander, j'apprécie beaucoup votre engagement et votre enthousiasme concernant toutes ces questions énergétiques, mais on ne peut pas proposer un projet de loi comme celui-ci qui n'est tout simplement pas réalisable ! Quand on a encore 40% à 45% de notre électricité qui est produite par le nucléaire, penser qu'on va pouvoir éliminer d'un simple revers de la main l'énergie d'origine fossile, c'est un doux rêve et cela n'est tout simplement pas réaliste de proposer un tel projet de loi dans un parlement comme le nôtre. J'apprécie votre engagement plein d'énergie - c'est le cas de le dire - mais on ne peut pas accepter ce projet de loi, j'en suis désolé.

M. Michel Ducommun (EAG). Le point sur lequel j'avais envie d'intervenir, c'était d'abord une analyse de l'énergie fossile, parce que c'est l'énergie qu'actuellement on développe prioritairement partout dans le monde. Si on observe les grandes compagnies pétrolières, il est intéressant de voir qu'elles investissent à peu près 2% par an pour l'énergie renouvelable et le reste pour l'énergie fossile.

Ensuite, l'énergie fossile pose trois problèmes: premièrement, elle est à l'origine des gaz à effet de serre et des désastres climatiques qui nous attendent. Se dire que tout va très bien, qu'on fait des beaux bénéfices sur le pétrole ou sur le charbon est un problème ! Deuxièmement, on sait que ces réserves d'énergie fossile sont très limitées. Le pic du pétrole a été dépassé. De quoi s'agit-il ? C'est drôle, parce que c'est un chimiste américain qui a prévu l'avènement de ce pic, qui a d'ailleurs été observé: il s'agit du fait que la production de pétrole va en augmentant jusqu'au moment où elle arrive à son sommet, puis redescend. On se trouve actuellement dans la redescente. Un des problèmes lié à cela est qu'on effectue des recherches pour trouver des substituts au pétrole. Et le substitut qui amène certains bienfaits économiques aux Etats-Unis, c'est le gaz de schiste.

Je pense que vous avez vu certains films diffusés sur Arte ou sur d'autres chaînes, montrant les dégâts provoqués par la recherche de gaz de schiste. Ces dégâts sont visibles: lorsqu'on laisse passer de l'eau dans un robinet et qu'on y met une allumette ou un briquet, la flamme apparaît ! Dans les régions où de nombreuses recherches sur le gaz de schiste ont lieu, ces dégâts se traduisent par le développement des cancers et la mort de certains animaux. Il y a donc un problème et heureusement, au niveau de la France voisine et de la Suisse, un mouvement assez fort tente et réussit pour le moment à s'opposer à la recherche de gaz de schiste dans notre région. Le deuxième problème est donc que cette énergie fossile va disparaître, mais qu'on essaie de poursuivre dans la même voie.

Par rapport au problème de l'électricité, il est intéressant de voir que le gaz de schiste aux Etats-Unis a permis d'exporter d'autres énergies fossiles. Si le prix de l'électricité a diminué en Europe, particulièrement en Allemagne, c'est parce que le prix du charbon, suite à l'arrivée du gaz de schiste américain, a diminué, alors qu'il s'agit d'une des pires ressources fossiles du point de vue des émissions de gaz à effet de serre et de CO2. Il devient très important dans la production d'électricité, ce qui explique la diminution récente du coût de l'électricité.

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.

M. Michel Ducommun. Pardon ?

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député, il vous reste trente secondes.

M. Michel Ducommun. Alors, pour conclure, je dirai deux choses: d'abord, quand on dit que l'actuelle loi sur l'énergie est fantastique, je rappelle que sur la question de l'énergie, la constitution comportait un article 160E lié au refus du nucléaire qui contenait l'interdiction du chauffage électrique, mais il a été supprimé. Et donc...

Le président. C'est terminé, Monsieur le député.

M. Michel Ducommun. Je termine, parce que je n'ai presque plus de temps. Il est vrai que je ne suis pas convaincu que tout soit résolu par le projet du MCG...

Le président. Merci, Monsieur le député.

M. Michel Ducommun. Je suis surpris que le MCG aille dans une direction qui est quand même positive... (Le micro de l'orateur est coupé.)

Le président. C'est terminé, Monsieur, merci. Je passe la parole à M. François Lefort, à qui il reste vingt-deux secondes.

M. François Lefort (Ve). Merci, Monsieur le président. Vous voudrez bien transmettre à M. Stauffer que l'expression «consommation d'énergie» contient au sens commun la consommation électrique. Je ne ferai pas, comme mon collègue Deneys, le bon et gentil naïf...

Le président. Il vous faut déjà conclure, Monsieur le député !

M. François Lefort. ...qu'il joue très bien. Cette loi a comme unique but de réduire le champ d'application de la loi actuelle sur l'énergie et de la couler. C'est un projet dangereux et non écologiste et il faut le refuser.

Le président. Merci, Monsieur. Je passe la parole à M. Eric Stauffer, pour vingt-cinq secondes.

M. Eric Stauffer (MCG). Merci, Monsieur le président. Vous transmettrez, ils se reconnaîtront: c'est parce que la vitesse de la lumière est supérieure à celle du son que certains paraissent brillants avant d'avoir l'air con. (Rires. Exclamations.)

Mesdames et Messieurs les députés, lorsque M. Deneys vient me dire que je devrais laisser mon 4x4, j'aimerais lui rappeler qu'à réitérées reprises, lorsque nous nous rendons en commission de l'autre côté du canton, il me demande de venir le chercher avec le même 4x4...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !

M. Eric Stauffer. ...à Plan-les-Ouates ! (Exclamations.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Roger Deneys, à qui il reste une minute et vingt-quatre secondes. (Commentaires. Rires.)

M. Roger Deneys (S). Monsieur Stauffer, vous devriez me remercier, parce qu'en l'occurrence, je vous permets de diviser par deux votre consommation par passager ! (Remarque.) C'est par souci écologique que je me propose, que je me sacrifie pour venir à bord de votre véhicule ! (Hilarité.) Je crois donc qu'on doit me remercier: je contribue par mes gestes écologiques du quotidien à sauver la planète et vous aide à en faire de même. Remerciez-moi, Monsieur Stauffer ! (Commentaires.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole au rapporteur de minorité, M. Florian Gander, pour une minute et quarante-quatre secondes.

M. Florian Gander (MCG), député suppléant et rapporteur de minorité. Je vous remercie, Monsieur le président. D'abord, permettez-moi de rappeler à M. Lefort que les Verts n'ont pas le monopole des bonnes idées en matière d'énergie renouvelable. Le MCG a déposé ce projet de loi, je vous le rappelle, en février 2010. Le projet de loi dont tous mes préopinants ont parlé a été voté par le peuple en août 2010. Le jour où nous avons déposé ce projet de loi, la loi existante - qui est effectivement bonne aujourd'hui - n'avait pas été votée par le peuple. Maintenant, avec le recul, vous pouvez donc effectivement dire quelque chose, mais alors, le projet de loi, pour nous, avait tout son sens visionnaire. (Commentaires.) Je vous remercie de me laisser terminer. Permettez-moi de vous rappeler, à titre personnel et ayant présidé cette commission de l'énergie, que suite au voyage que nous avons effectué pour aller voir les sites de géothermie, une motion interpartis a été élaborée allant dans le sens de faire de la recherche en matière de géothermie. Nous allons donc de toute façon dans le bon sens. Effectivement, vous pouvez dire que maintenant, après que le nouveau projet de loi a été voté par le peuple, il est peut-être caduc...

Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.

M. Florian Gander. Je vais terminer. Je vous invite toujours à soutenir ce projet de loi. Cela met encore en avant la volonté de ce canton d'avoir de l'énergie propre pour les régies publiques autonomes et les bâtiments administratifs.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de minorité. Pour terminer, je passe la parole à M. le rapporteur de majorité. Monsieur Serge Hiltpold, vous avez la parole. Il vous reste une minute et quarante secondes.

M. Serge Hiltpold (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous avons passé un bon moment grâce au projet du MCG ! J'ai trouvé ce parlement détendu, j'ai trouvé qu'il y avait beaucoup de légèreté dans ce débat et je me permettrai de faire un petit clin d'oeil à mon ami Renaud Gautier. Nous avons eu dans cette comédie: François Lefort dans le rôle du pâtissier, Philippe Morel dans celui du président, Bernhard Riedweg, évidemment, dans le rôle du comptable, Pierre Conne dans le rôle du professeur, Roger Deneys dans le rôle de l'éco-citoyen, Benoît Genecand dans celui de consultant, Eric Leyvraz dans celui de viticulteur ou administrateur, éventuellement, Michel Ducommun dans le rôle du combattant, du bavard, Eric Stauffer dans le rôle de Madame Irma la visionnaire, Florian Gander dans le rôle de la victime, et les décors étaient de Serge Hiltpold. Je vous invite à rejeter ce mauvais vaudeville.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur, pour cette pointe d'humour. Mesdames et Messieurs les députés, je vais vous faire voter l'entrée en matière.

Une voix. Vote nominal !

Le président. Est-ce que vous êtes soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent.) Oui, le vote nominal est soutenu.

Mis aux voix, le projet de loi 10637 est rejeté en premier débat par 64 non contre 23 oui (vote nominal).

Vote nominal

PL 10843-A
Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant les limites de zones sur le territoire de la commune de Vernier (création d'une zone de développement 3 entre l'avenue Louis-Casaï et le chemin des Corbillettes)
Ce texte figure dans le «Recueil des objets déposés et non traités durant la 57e législature».
Rapport de majorité de M. Christian Dandrès (S)
Rapport de minorité de Mme Christina Meissner (UDC)
P 1801-A
Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier la pétition invitant les députés à ne pas accepter le projet de loi du Conseil d'Etat N° 10843 modifiant les limites de zones sur le territoire de la commune de Vernier
Ce texte figure dans le «Recueil des objets déposés et non traités durant la 57e législature».
Rapport de majorité de M. Christian Dandrès (S)
Rapport de minorité de Mme Christina Meissner (UDC)

Premier débat

Le président. Pour le point suivant, le PL 10843-A et la P 1801-A, nous sommes en catégorie II, quarante minutes. Monsieur Dandrès, je vous passe la parole.

M. Christian Dandrès (S), rapporteur de majorité. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, j'ai le plaisir ce soir de vous présenter ce projet de loi qu'on peut considérer comme un texte modèle suite à la votation par le peuple, au mois de mars de l'année dernière, de la modification de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire. Je serai assez rapide et j'aimerais tout d'abord passer en revue les grandes lignes de ce projet. Nous parlons d'un périmètre composé de 144 parcelles qui offre un potentiel d'environ 1500 logements, lesquels sont destinés aux besoins prépondérants de la population, puisque le projet de loi prévoit que le déclassement sera fait en zone de développement.

La commission a auditionné un certain nombre de personnes et a forgé son opinion principalement sur les éléments suivants: tout d'abord, il y a la crise du logement; le taux de vacance... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...reste aujourd'hui très en deçà des 2% nécessaires pour que le marché puisse fonctionner normalement, puisque nous sommes actuellement à un taux de vacance de 0,36%. L'autre argument est que ce secteur se situe à proximité d'importantes zones d'activité comme la ZIMEYSA ou l'Aéroport international de Genève et le CERN. Il permettra donc d'éviter d'augmenter le trafic pendulaire, puisqu'on pourra loger des personnes à proximité d'emplois. Le dernier élément qu'il me semblait primordial de rappeler, c'est la proximité des axes de transport importants, puisque le bus et le tram sont accessibles.

Ce projet a fait couler passablement de salive et d'encre et des oppositions ont déjà été soulevées, matérialisées par la pétition 1801: j'aimerais donc revenir sur les arguments soulevés par les opposants. J'aborderai tout d'abord la question de la défense de la zone villas. Mme Meissner en a parlé et j'imagine qu'elle reviendra sur cette thématique un peu plus tard. Je crois qu'il faut préciser qu'avec la votation de mars 2013 et la modification de la loi sur l'aménagement du territoire, le peuple a donné mandat au Grand Conseil de densifier la couronne urbaine, et celle-ci est composée principalement - à Genève en tout cas - de zones villas. Il est donc absolument essentiel de pouvoir construire les logements à cet endroit-là et je crois que les arguments qui ont été relevés dans le discours de M. Lefort lors des extraits sont un élément important à conserver à l'esprit, puisque le plan directeur cantonal que nous avons voté risque de se heurter, dans sa concrétisation, au problème des surfaces d'assolement. Il est donc essentiel de pouvoir densifier cette couronne urbaine.

La commune de Vernier a indiqué qu'elle était favorable au déclassement en zone de développement, mais qu'elle souhaitait que le déclassement se fasse uniquement sur les parcelles contiguës à l'avenue Louis-Casaï en indiquant que le Conseil d'Etat avait donné quelques assurances quant au fait qu'il n'y aurait pas de déclassement sur les autres parcelles.

Là encore, il faut rappeler que lorsque l'accord - ou prétendu accord - aurait été passé avec la commune de Vernier, accord dans le cadre duquel des assurances auraient été données, on était à la fin des années nonante, et que depuis lors, la crise du logement s'est aggravée de manière considérable. Il est donc essentiel que le Conseil d'Etat et le Grand Conseil acceptent de modifier cet accord, puisque les paramètres ont également changé, et de manière conséquente.

Le président. Il vous reste une minute, Monsieur le député.

M. Christian Dandrès. Oui, Monsieur le président, je vous remercie. L'autre argument qui a été soulevé par la commune concerne les difficultés à financer les infrastructures. Le problème, c'est qu'on ne peut pas conditionner la réalisation de logements et le déclassement de terrains à la question du financement. Il faut trouver une solution à ce problème de financement. On peut le faire, par exemple, par le biais de la taxe sur la plus-value foncière. Le magistrat Hodgers a parlé également dans son discours de tout à l'heure de la possibilité de jouer sur le bénéfice de la promotion, qui est considérable. Il faut rappeler qu'il représente entre 15% et 20% du coût total des immeubles. Il est inacceptable à mon sens et au sens de la majorité de la commission de ne pas déclasser en raison de ces problèmes de financement.

Le dernier argument qui a été soulevé consiste à dire que tant que l'on n'aura pas résolu le problème de l'asymétrie entre les constructions rive gauche-rive droite, il s'agirait de ne pas continuer à déclasser et à densifier la rive droite. Effectivement, il est souhaitable que l'asymétrie soit corrigée, mais cet argument ne doit pas servir de prétexte pour ne pas densifier la rive droite. Il faut densifier au contraire la rive gauche.

Voilà les arguments soulevés par les personnes auditionnées par la commission, qui a donné une réponse claire que je vous ai résumée tout à l'heure. C'est la raison pour laquelle la commission a accepté ce projet de loi et c'est aussi pourquoi j'espère que le Grand Conseil l'acceptera également ce soir. Concernant la pétition qui matérialise les oppositions des personnes propriétaires de ces parcelles, la commission vous recommande son dépôt sur le bureau du Grand Conseil.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Je vous ai laissé un peu plus de temps, il sera pris sur celui de votre groupe. Je passe la parole à Mme la rapporteure de minorité, Mme Meissner.

Mme Christina Meissner (UDC), rapporteuse de minorité. Merci, Monsieur le président. Je prendrai aussi une part du temps de mon groupe, j'imagine. Mesdames et Messieurs les députés, les travaux de la commission d'aménagement sur le déclassement dit des Corbillettes se sont arrêtés le 2 novembre 2011: cela remonte donc à un certain temps. Les auditions ont mis en avant l'opposition de l'association Pic-Vert et celles de la Chambre genevoise immobilière, des associations d'habitants et de la commune de Vernier. Cette dernière soulignait par ailleurs que le projet de déclassement ne respectait pas son plan directeur communal qui, lui, ne prévoyait que la densification du front de rue de l'avenue Louis-Casaï.

A fin novembre 2011, j'ai repris pour une année la présidence de la commission d'aménagement. J'ai souhaité savoir s'il n'y avait pas une manière de mener sur ce périmètre un processus participatif constructif, plutôt que de s'engager dans un processus d'opposition stérile. Existait-il des propriétaires prêts à construire ? La commune était-elle pour sa part prête à s'engager dans un tel processus participatif avec les habitants ? Une rencontre a ainsi été organisée entre Vernier et les habitants en juin 2012 et le processus participatif a été accepté et a démarré.

D'autre part, les services cantonaux qui travaillaient parallèlement sur le périmètre dans le cadre du grand projet PSD Tête GVA Casaï-Aéroport se sont également montrés intéressés par la démarche qui s'inscrivait dans la prolongation des tables rondes qui avaient été initiées. Cela leur permettait de tester certaines hypothèses développées dans le cadre du grand projet. Communes, habitants et associations ont joué le jeu et dès lors le travail a commencé. Cependant, il s'avérait nécessaire, pour que le travail se fasse dans les meilleures conditions, de suspendre la modification du régime de zone demandée par ce projet de loi. C'est ainsi que la commune a écrit au conseiller d'Etat, M. Longchamp, pour lui demander de permettre que ce processus participatif puisse avoir lieu et de geler le projet de loi. Tout le monde attendait une réponse positive comme un signal fort d'écoute, propice à l'engagement de tous. La réponse de François Longchamp est tombée le 17 septembre 2012, elle était négative: pas question de remettre à plus tard la procédure de déclassement. Cette réponse du Conseil d'Etat a stupéfait la commune comme les propriétaires. Comment en effet imaginer qu'un processus participatif puisse se mettre en place dans de bonnes conditions, alors que ceux qui y prenaient part auraient en même temps fait recours contre l'une des parties prenantes du processus, en l'occurrence l'Etat ?

Que s'est-il passé depuis que le 5 décembre 2012 - sitôt que je n'ai plus eu la présidence de la commission d'aménagement - nous avons voté ce projet de loi, que seuls l'UDC et le MCG ont refusé ? Que s'est-il passé depuis ? Eh bien, nous pouvons remercier l'équipe des grands projets, car à la demande de la commune et de moi-même, elle a enclenché le processus participatif malgré tout. (Commentaires.) Les ateliers ont eu lieu de janvier à avril 2014. Après des débuts empreints de méfiance, les habitants se sont pris au jeu, ont participé à ces ateliers, qualifiés par l'Etat même, contre toute attente, de processus PLQ participatif.

Mesdames et Messieurs les députés, si aujourd'hui vous votez ce projet de loi en l'état, nous pourrons dire adieu à ce processus participatif. Alors comment faire pour obtenir la confiance des habitants et de la commune ? Il y a deux solutions: vous pouvez retirer le projet de loi sous sa forme actuelle - c'est plutôt le Conseil d'Etat qui devrait le faire, puisque le projet émane de lui - ou nous pouvons le renvoyer en commission pour l'amender. L'amendement est simple: il consisterait en ce que la modification de zone, dans un premier temps, ne s'applique que sur le front de rue de l'avenue Louis-Casaï, ce qui permettrait au processus participatif de se poursuivre sur le sol du périmètre. Tout le monde est d'accord là-dessus. J'ai proposé cela au conseiller d'Etat Hodgers. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Il a dit non. Il n'en a pas voulu ! Je suis désolée, mais si aujourd'hui nous entrons dans un blocage, il durera longtemps et ni l'ensemble, ni même l'avenue Louis-Casaï ne pourront être développés, ce qui sera regrettable. Je vous remercie.

Mme Caroline Marti (S). Je ne vais pas revenir sur les caractéristiques de ce projet de loi de déclassement, puisqu'elles ont été détaillées par le rapporteur de majorité principalement, mais aussi par la rapporteure de minorité. Je souhaite tout simplement vous rappeler que ce terrain représente un potentiel de 1500 nouveaux logements qui seraient de plus très bien desservis par les infrastructures préexistantes et les transports publics.

Ce projet de loi, à mon sens, nous amène à un questionnement un peu plus global sur la situation de l'aménagement de notre canton. Nous sommes actuellement dans une situation de pénurie de logements, comme vous le savez toutes et tous, mais nous attendons également une augmentation de la population résidente au cours des prochaines années: c'est ce que révèle... (Brouhaha.) ...une étude de l'office cantonal de la statistique qui estime que d'ici 2030, le canton de Genève verra sa population augmenter de 40 000 à 88 000 personnes. J'aimerais vous poser la question, Mesdames et Messieurs les députés: où va-t-on loger ces nouveaux habitants, étant donné que nous avons déjà de la peine à loger les habitants actuels ?

Le potentiel des constructions prévues sur les anciennes zones villas de la couronne urbaine déclassées lors des dernières décennies est quasiment atteint. La construction de logements par l'extension urbaine, c'est-à-dire le déclassement de zones agricoles, arrive également à ses limites, puisque nous atteindrons dans les prochains mois notre quota limite de SDA. Les solutions sont donc peu nombreuses et la densification de la couronne urbaine via le déclassement de la zone villas en zone de développement 3 est absolument nécessaire; il s'agit d'une des seules voies possibles pour construire tous les logements dont Genève a besoin aujourd'hui et pour les prochaines années.

M. François Lefort (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi est une promesse de pouvoir construire 1500 logements - certainement plus, d'ailleurs, depuis que la loi de densification a été votée le 9 février dernier. C'est la promesse de construire des logements à proximité des voies de transports et d'autres infrastructures publiques, à proximité de zones d'activités importantes et riches en emplois: l'aéroport, la ZIMEYSA, Palexpo, le CERN et les organisations internationales. Il s'agit d'un projet qui permettra pour de nombreux habitants, en fournissant ces logements, de limiter les déplacements entre les lieux de travail et l'habitat. C'est donc un projet qui souscrit aussi aux objectifs des écologistes. En revanche, comme l'a souligné la commune de Vernier lors des auditions, cet afflux de population viendra certainement saturer les infrastructures existantes pour l'éducation et les transports publics et il faudra que cela soit accompagné par l'Etat.

A propos des positions minoritaires dont nous avons entendu parler qui voudraient déclasser en zone ordinaire 3, il faut être clair sur les conséquences que cela aurait: cela signifierait qu'il n'y aurait plus de zone de développement, plus de PLQ, et bien sûr plus de contrôle de l'Etat sur les prix; cela aurait donc des conséquences incalculables sur ce projet de loi.

En ce qui concerne l'amendement de Mme Meissner pour un déclassement partiel le long de l'avenue Louis-Casaï: si vous le votez, vous allez bien sûr anéantir l'effort d'aménagement dans ce périmètre, vous allez mettre à bas un projet de 1500 logements. Il faut avoir cela à l'esprit et il faudra l'assumer devant la population genevoise.

La question centrale dans ces procédures de déclassement est toujours la détermination des profits admissibles lors d'une opération immobilière. C'est ce que résout justement le régime de la zone de développement en offrant une valeur satisfaisante au propriétaire tout en permettant de construire des logements à prix abordables. L'office du logement propose aussi l'échange de parcelles contre des appartements dans les futurs immeubles et cela devrait pouvoir répondre à une partie des préoccupations des nombreux opposants.

Il s'agit donc pour les écologistes d'un bon projet qui entre dans le cadre du plan directeur cantonal. Un projet rationnel de par sa localisation et qui permettrait - je l'ai dit - la construction d'au moins 1500 logements dont la population genevoise a besoin maintenant et non plus tard, sinon elle continuera de se déverser en France voisine pour rejoindre les 70 000 Genevois qui y habitent déjà légalement.

Concernant la pétition 1801 qui accompagne cet objet, les Verts soutiendront son dépôt sur le bureau. Nous soutiendrons bien sûr ce projet de loi et vous demandons de le voter.

M. Rémy Pagani (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...nous avons eu il y a quelques années un vote très clair sur la densification des zones villas en Ville de Genève et nous avons eu un vote très clair sur les indices minimaux de densification lors de déclassements au niveau du canton. Je crois que le corps électoral a très clairement dit dans quel sens il voulait aller. C'est un sens contraire qu'on nous propose avec les amendements.

Ce projet de loi va dans le bon sens. Il a pris acte du fait que la population genevoise veut créer des logements et se donner les moyens d'en créer. Bien évidemment, il s'agit d'une zone villas et il ne faut pas se faire beaucoup d'illusions: quand il s'agira de mettre en oeuvre les plans localisés de quartier idoines dans cette région de notre canton, les autorités auront toutes les peines du monde à les réaliser. Toujours est-il qu'il s'agit de prendre des options pour les dix ans à venir et de faire en sorte que ces logements bon marché tant attendus par la population genevoise et par nos enfants soient créés d'une manière ou d'une autre. Qu'ils soient sur la rive droite ou sur la rive gauche, la question n'est pas là: aujourd'hui, la question est de créer des logements et je trouve un peu hors de propos qu'on vienne nous dire que c'est parce qu'il y a le tram ou pas de lignes de bus ou pas les conditions idoines qu'on ne peut pas construire. A mon avis, ce sont des décisions qui doivent être prises sur l'avenir en fonction de ces déclassements.

Pourtant, Mesdames et Messieurs, il y a quand même une réalité qui ne peut nous échapper, ce sont les moyens mis à la disposition des autorités pour créer ces logements. Là, il y a véritablement carence. Je m'apprête à déposer une question écrite pour savoir si un règlement d'application du déclassement de la zone agricole est effectivement en force et nous permettrait au moins d'avoir dans la caisse de l'argent de manière à donner le pouvoir aux autorités cantonales comme municipales d'aménager, de créer des plans localisés de quartier et d'aménager les espaces publics, les crèches et toute l'infrastructure qui sera nécessaire pour créer ces logements. En effet, il n'est pas question pour nous de créer des zones dortoirs et de la ségrégation, il est question de créer de l'urbanité, de l'urbain, de la ville, et il faut s'en donner les moyens, Mesdames et Messieurs. Or, aujourd'hui, c'est un fait, les communes n'ont pas les moyens et les opérateurs, bien qu'ils se dégagent des marges appréciables qu'il s'agira de discuter, n'ont pas les moyens de prendre en charge l'ensemble des infrastructures nécessaires à ces logements de qualité que nous réclamons et à ces logements bon marché que nous réclamons aussi pour la population qui en a bien besoin.

Toujours est-il que nous soutiendrons ce projet de loi, car il va dans le bon sens, et nous le soutiendrons aussi en ce qui concerne les déclassements...

Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.

M. Rémy Pagani. ...que nous appelons de nos voeux en ce qui concerne l'autre rive qui, elle, ne fait pas les efforts nécessaires ou, quand il s'agit de faire les efforts requis, baisse la densité.

M. Benoît Genecand (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, nous avons devant nous un projet de déclassement, mais j'aimerais juste rendre attentifs les membres de ce parlement qui ne siègent pas à la commission d'aménagement au fait que la plupart des projets de déclassement ne sont pas discutés: on ne les voit quasiment pas, ils passent aux extraits. Trois sont passés aux extraits aujourd'hui encore, sans débat. Lors de la dernière législature, la plupart des projets de déclassement sont passés aux extraits. S'il y a débat, c'est donc qu'il y a une opposition. En l'occurrence, on a une opposition assez attendue des habitants des 144 parcelles. C'est une zone villas, une zone construite et il est rare que les gens soient d'accord. On a aussi une opposition assez massive et déterminée de la commune.

Mesdames et Messieurs, Genève a urbanisé et construit en créant des zones de développement depuis la fin des années cinquante. Elle l'a fait sur toute la zone villas urbaine avec un certain succès, puisque plus de 50 000 logements sont sortis de terre grâce à cette méthode. Seulement, depuis les années cinquante, nous n'avons plus fait que cela, c'est-à-dire qu'à aucun moment nous n'avons essayé le déclassement en zone ordinaire. C'est ce que le PLR va vous proposer pour ce projet.

Pourquoi estimons-nous que nous devons réessayer le déclassement en zone ordinaire ? Parce que la zone de développement, malgré ses vertus, a quand même quelques inconvénients. Le premier a été mentionné tout à l'heure, c'est l'asymétrie du développement de ce canton. C'est pourquoi nous estimons judicieux, si on veut tester de la zone primaire, de le faire à Vernier, qui est la commune qui a le plus contribué au logement LUP en matière de développement ces dernières années. S'il y a un endroit où l'on doit tester la zone ordinaire, c'est bien Vernier, et ce projet se situe précisément sur cette commune. Cela relève de la question de l'asymétrie.

Une deuxième question me paraît importante, celle de l'uniformité: on a beaucoup entendu parler de la monotonie et de l'uniformité du bâti à Genève. Une des raisons, Mesdames et Messieurs, en est le contrôle étatique d'une part par les PLQ et d'autre part par le contrôle de l'OLO, l'office du logement. Le nombre de prescriptions que l'office du logement doit remplir - je ne lui en fais aucun grief - rend pour lui impossible une autre solution que celle de la barre avec cette uniformité que nous déplorons.

Un préopinant a dit que si nous faisions de la zone ordinaire, nous allions perdre le PLQ et le contrôle de l'office du logement. Je dirais que ce n'est pas ce qui m'effraie le plus; cela va nous faire économiser trois ans et d'une certaine manière ce n'est pas forcément un risque aussi grave qu'on l'imagine.

Je vous rappelle qu'il n'y a pas si longtemps, on a eu de la part de la Cour des comptes - rapport 62, février 2013 - un audit de légalité sur l'office de l'urbanisme concernant les PLQ et qui concernait aussi, incidemment, l'OLO. Je vais vous résumer une partie de cet audit, page 73: «Le plan financier», qui est donc l'outil principal de l'office du logement, «n'est pas un outil d'analyse adéquat de la véritable économicité des projets. La Cour observe que le prix de revient est inscrit dans les premiers plans financiers» et que c'est davantage un instrument de négociation qu'un instrument de contrôle des prix. La Cour a vérifié: «Sur 7 dossiers analysés par la Cour, il ressort que les recommandations de l'OLO n'ont pas permis de faire baisser le coût inscrit dans le plan financier initial.» Non seulement l'OLO est pris dans toute une législation qui rend extrêmement compliquée son action rapide, mais en plus il crée une uniformité...

Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.

M. Benoît Genecand. Pardonnez-moi, Monsieur le président, j'avais pensé intervenir plus longuement. Est-ce que je peux reprendre la parole plus tard ?

Le président. Vous n'aurez plus de temps.

M. Benoît Genecand. Alors, je vous demande juste une chose, Mesdames et Messieurs: osez prendre le risque de la zone ordinaire ! Il me semble que s'il y a un endroit où il faut le faire, c'est bien là. Il est sûr que la zone ordinaire présente certaines questions et c'est pourquoi nous vous demandons le renvoi en commission. On répondra aux questions de manière positive, comme on l'avait fait pour le projet sur la PPE. S'il n'est pas répondu de manière positive aux questions...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.

M. Benoît Genecand. ...nous reviendrons ici et nous déclasserons en zone de développement.

Le président. Merci, Monsieur le député. Nous avons donc une demande de renvoi en commission. Les rapporteurs peuvent s'exprimer, ainsi que le conseiller d'Etat. Nous voterons ensuite. Je vais passer la parole à la rapporteure de minorité. Madame Meissner, vous avez la parole.

Mme Christina Meissner (UDC), rapporteuse de minorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, j'ose rappeler à ce parlement que ce n'est pas en votant un projet de déclassement que l'on construit du logement, mais c'est avec l'accord des propriétaires que l'on y arrive concrètement. Aujourd'hui, si vous votez ce déclassement, il y aura zéro logement et 250 oppositions, dont celle de la commune.

Pour rappel, j'avais proposé au conseiller d'Etat qu'il fasse lui-même une proposition d'amendement pour n'appliquer le déclassement que sur une partie du plan, c'est-à-dire le long de l'avenue Louis-Casaï. Cela aurait permis de travailler et de construire sur cette avenue, car tout le monde était d'accord et cela permettrait de poursuivre le processus participatif sur l'arrière. Vu le refus du conseiller d'Etat de débloquer la situation, je crois qu'il faut être raisonnable et accepter ce renvoi en commission proposé par le PLR qui, comme d'ailleurs la CGI à l'époque quand nous avions examiné le projet de loi, suggère le retour en zone ordinaire. L'UDC votera cette solution, car elle est la seule, puisqu'il n'y en a pas d'autre qui ait été proposée ni par ce parlement, ni par le Conseil d'Etat, pour respecter les droits des propriétaires et pour permettre effectivement de construire au moins sur Louis-Casaï. Je crois donc que nous sommes tout à fait d'accord pour cette proposition de renvoi en commission.

M. Christian Dandrès (S), rapporteur de majorité. Déclasser ces terrains en zone ordinaire serait effectivement la meilleure manière pour construire peu, pour construire mal et pour favoriser la spéculation. Il faut rappeler ici que, sans zone de développement, la loi 10965 qui prévoit les indices de densité minimale ne s'appliquerait pas. Je précise que le groupe socialiste avait proposé à la commission d'appliquer ces indices de densité minimale en zone ordinaire, ce qui avait été refusé, notamment par le PLR.

On construira mal, parce que l'on construira des logements qui ne répondront pas aux besoins de la majorité de nos concitoyens, mais des logements de luxe qui mettront à mal la politique que le Conseil d'Etat s'était engagé à mettre en oeuvre - suivi en cela par le Grand Conseil lorsque le protocole d'accord sur le logement a été signé - à savoir de construire aussi des logements d'utilité publique. De plus, nous allons créer un dangereux précédent et un signal désastreux pour les autres terrains qui seront déclassés dans le futur, notamment dans le cadre de la mise en oeuvre du plan directeur cantonal. En somme, ce que le PLR est en train de proposer et d'indiquer ce soir à ces propriétaires, c'est que s'ils arrivent à faire front, s'ils arrivent à s'organiser et à menacer de blocages, alors ils auront une prime et pourront bénéficier du pactole, parce qu'on déclassera en zone ordinaire et non pas en zone de développement. (Remarque.)

Ce mécanisme-là serait... Vous êtes - si vous me permettez, parce que je pense que le temps arrive à terme - vous êtes les fossoyeurs du plan directeur cantonal. Ce projet-là, l'un des premiers grands projets traités par cette législature, doit être irréprochable ! Et le projet irréprochable, c'est pouvoir donner à l'Etat et aux collectivités la possibilité de mener une politique du logement qui réponde aux besoins des gens et non une politique qui permettra à un certain nombre de promoteurs et aux propriétaires des terrains de pouvoir se faire un maximum de bénéfices. (Quelques applaudissements.)

M. Antonio Hodgers, conseiller d'Etat. Depuis que je suis entré en fonction, on me demande souvent pourquoi il est aussi long de construire à Genève. Voilà un parfait exemple, Mesdames et Messieurs les députés: la modification de la zone des Corbillettes, cela fait onze ans qu'on en parle ! Onze ans ! Vous avez ici un projet de loi déposé par le Conseil d'Etat le 23 juin 2011. Nous sommes en mai 2014. Il arrive devant vous et on a une proposition de renvoi en commission ! Imaginez-vous les délais, simplement institutionnels ? Alors après, je veux bien entendre toutes les doléances: les autorisations de construire, c'est long; cela ne se passe pas aussi vite que souhaité; les lois sont compliquées. Mais si le premier pouvoir de cette république n'est pas capable de traiter un projet simple, qui correspond au plan directeur cantonal - que dans votre majorité vous avez voté il y a à peine six mois ! - plan qui dit que dans une zone située entre l'aéroport et le centre-ville, à savoir une zone urbaine, dense, desservie par des infrastructures de transports publics conséquentes, on doit favoriser la densité, comme l'ont confirmé les Genevois en votation populaire, eh bien si ce parlement n'est pas capable de le voter ce soir, je ne sais pas que vous dire ! (Commentaires.)

En tout cas, ce que je dirai, non pas à vous, mais à la population, c'est qu'il n'y a pas une majorité dans ce parlement pour construire du logement à Genève, parce que si vous n'arrivez pas à voter un projet aussi simple, aussi clair, aussi cohérent avec le plan directeur cantonal, comment est-ce que vous voulez qu'on y arrive par la suite ?

Pourtant, ce projet - Mme Meissner l'a relevé - est difficile au départ. C'est vrai, c'est compliqué, les gens sont attachés à leur villa dans cette zone, comme dans beaucoup d'autres ! Il est vrai aussi que la commune de Vernier est attachée à cet espace de villas, même s'il y a quand même deux millions de mètres carrés de zones villas à Vernier. Toutefois, le processus participatif engagé ne s'arrêtera pas avec la modification de zone, parce que - j'aimerais le dire à Mme Meissner, mais également à tous les autres qui sont attachés à la concertation - il ne faut pas mentir aux gens, en matière de concertation ! Le fait que cette aire des Corbillettes est appelée à être densifiée par modification de zone, cela a déjà été décidé par vous, Mesdames et Messieurs les députés ! Pas par vous, Madame Meissner, mais par la majorité de ce parlement ! Cette même majorité que j'appelle aujourd'hui à prendre ses responsabilités ! Vous ne pouvez pas me demander d'aller dire aux habitants que, peut-être, on ne va pas modifier la zone ou peut-être que oui, cela dépend. Non ! La modification de zone est liée au plan directeur cantonal. Cela est clair !

A présent, on a une nouvelle proposition de déclassement en zone ordinaire. La première conséquence, si on allait dans le sens de M. Genecand, serait un retard de deux ans. Le projet de loi qui vous est soumis ici a fait l'objet de procédures techniques, d'enquêtes publiques, et le déclasser en zone ordinaire impliquerait de le reprendre à zéro. La deuxième conséquence, cela a été dit, est qu'il n'y aurait pas de densité minimale. La volonté de la population d'appliquer un minimum de densité dans les espaces que l'on construit serait très certainement bafouée. Il n'y aurait pas de LUP. Nous avons réalisé 9% de LUP dans ce canton, la loi nous en demande 20%... (Commentaires.) ...mais peu importe que la classe moyenne et la classe modeste se logent ! (Brouhaha.)

Le président. S'il vous plaît !

M. Antonio Hodgers. Nous disions avant, tous ensemble dans cette enceinte, qu'il fallait des moyens pour équiper. Or, avec une zone ordinaire il n'y aurait pas de taxe d'équipement ! La commune n'aurait pas les moyens d'équiper cet espace ! Il n'y aurait de possibilité ni pour le canton, ni pour la commune de préempter. Mesdames et Messieurs, la zone ordinaire n'est pas un instrument que je veux exclure totalement dans les politiques d'aménagement, mais elle doit être mesurée; elle doit s'adresser aux plus petites parcelles. On ne peut pas faire de zone ordinaire sur une grande parcelle, parce que nous avons besoin de cette mixité sociale, les LUP - je l'ai dit - et nous avons besoin de cette taxe d'équipement. Les communes ont besoin de cette taxe d'équipement pour équiper des nouveaux quartiers importants, et, de ce fait, la zone ordinaire appliquée à une trop grande parcelle est néfaste à la mutation territoriale. Au sujet des petites parcelles, nous pouvons prendre l'exemple sur nos voisins vaudois: ils déclassent en zone ordinaire, mais quel est le corollaire ? Il existe des conventions conséquentes avec les propriétaires immobiliers qui s'engagent à faire du logement social, qui s'engagent à verser une part de leurs revenus pour faire de l'équipement et par conséquent, qui compensent l'absence de l'outil lié à la zone de développement avec une convention. Cela n'est pas prévu ici.

Mesdames et Messieurs, je vous en prie, ne jouez pas aux apprentis sorciers avec un projet qui a mis autant de temps à arriver devant vous... (Commentaires.) ...et - je parle pour la majorité de ce parlement - soyez cohérents avec votre vote du plan directeur cantonal. Cela n'engage pas que cette zone-là. Le message qui serait donné aux autres zones villas que nous voulons densifier serait désastreux. Ce message serait: «Plaignez-vous auprès du parlement, il vous suivra et arrêtera la modification de zone !»

Un autre message va arriver, Mesdames et Messieurs: celui de Berne. Pas plus tard que la semaine passée, j'étais dans les bureaux de Doris Leuthard, conseillère fédérale... (Exclamations.) ...pour discuter de notre plan directeur cantonal. Si nous avons de bonnes chances de le voir approuvé par le Conseil fédéral d'ici à la fin de l'année, le message de notre conseillère fédérale est clair: le canton ne peut pas continuer de prendre sur la zone agricole et plus particulièrement sur sa surface d'assolement s'il ne fait pas des efforts conséquents sur la zone à bâtir, à savoir les surfaces déjà bâties. Vous le savez, la zone villas à Genève regroupe 50% de la surface à bâtir pour seulement 10% de la population. (Brouhaha. Commentaires.) Je tiens donc à être clair...

Le président. S'il vous plaît !

M. Antonio Hodgers. Si nous n'arrivons pas à prouver pendant cette législature que nous nous donnons les moyens de densifier, pas à pas et avec concertation, la zone villas, la réponse de Berne sera un blocage des déclassements sur la zone agricole. Par conséquent, le bilan en termes de construction sera de zéro. Le canton n'aura que ses yeux pour pleurer et les Genevoises et les Genevois qui souffrent aujourd'hui de la pénurie de logements seront vraiment les laissés-pour-compte. Mesdames et Messieurs les députés, je vous en prie, je m'adresse à cette majorité qui a voté le plan directeur cantonal: assumez vos responsabilités, soyez conséquents avec vos choix et votez ce projet de loi ce soir. (Quelques applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Monsieur Dandrès ? C'est pour le vote nominal ?

M. Christian Dandrès (S), rapporteur de majorité. Oui, je demande le vote nominal.

Le président. Etes-vous soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent.) Vous êtes largement soutenu, il en sera fait ainsi. Mesdames et Messieurs les députés, nous procédons au vote sur le renvoi en commission des deux objets, le projet de loi et la pétition.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 10843 et la pétition 1801 à la commission d'aménagement du canton est adopté par 55 oui contre 28 non et 2 abstentions (vote nominal).

Vote nominal

PL 11460
Projet de loi de MM. Edouard Cuendet, Murat Julian Alder, Michel Amaudruz, Boris Calame, Jean-Marc Guinchard divisant en deux lois distinctes la loi 10697 sur les taxis de service public et autres transports professionnels de personnes
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VIII des 15, 16 et 17 mai 2014.

Ce projet de loi est renvoyé sans débat à la commission législative.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je lève la séance. Nous reprenons à 20h30. Bon appétit !

La séance est levée à 19h05.