République et canton de Genève

Grand Conseil

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P 1877-A
Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition pour soutenir l'agrandissement de la Maison Internationale des Associations
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session V des 13 et 14 février 2014.
Rapport de majorité de M. Murat Julian Alder (PLR)
Rapport de minorité de Mme Isabelle Brunier (S)

Débat

Le président. Nous abordons la P 1877-A. Je passe la parole au rapporteur de majorité, M. Murat Julian Alder.

M. Murat Julian Alder (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, j'aimerais d'abord, au nom de la majorité, remercier la commission, son président, M. le député Pascal Spuhler, ses membres, de même que Mme Mina-Claire Prigioni, secrétaire scientifique, et M. Christophe Vuilleumier, procès-verbaliste.

La pétition de la Fondation pour l'expression associative demande une participation de l'Etat au financement de l'agrandissement de la Maison internationale des associations. Même si elle reconnaît pleinement le rôle joué par cette maison, la majorité de la commission considère que cette requête correspond en réalité à une demande de subvention déguisée. Elle propose dès lors le dépôt sur le bureau du Grand Conseil.

Mme Isabelle Brunier (S), rapporteuse de minorité. L'Association genevoise de hand-ball, l'Organisation mondiale contre la torture, la Fédération genevoise d'échecs, Médecins du monde, la Société genevoise de photographie, Stop suicide, la Ligue suisse des droits de l'homme, les Erythréens de Genève, l'Association romande des crèches d'entreprise, la Maison culturelle kurde: quel est le point commun entre ces groupements choisis au hasard parmi une soixantaine ? Leur point commun, c'est qu'ils ont tous leur siège à la Maison des associations.

Quel autre endroit en Suisse, en Europe voire au monde regroupe-t-il autant d'associations issues de la société civile et cohabitant en bonne intelligence ? La Maison des associations est un lieu unique, et ce rapport de minorité se devait d'exister pour reconnaître cette unicité, pour s'y arrêter un instant et lui rendre hommage. (Brouhaha. Le président agite la cloche.)

J'ai déjà rappelé dans mon rapport que cette riche vie associative s'inscrit dans une continuité, une tradition genevoise qui remonte au moins au XVIIIe siècle. A l'heure des contrats d'intégration chers à Pierre Maudet - qui n'est pas là - il me semble important de relever également que la vie associative en est un maillon important et que cette activité nécessite, comme toutes les autres, un lieu adéquat pour s'ancrer dans la société et pour se développer. La Maison des associations répond à un besoin avéré, son succès n'est pas usurpé. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Ce projet, qui pouvait sembler utopique lorsqu'il a été lancé, à la fin des années 90, s'est concrétisé, et notre ville comme notre région en bénéficient, même si certains se refusent à l'accepter.

Les bâtiments qui abritent la Maison des associations, majoritairement propriété de l'Etat, sont relativement vétustes et ne respectent pas les standards énergétiques. De plus, il existe des possibilités d'agrandissement et de nombreuses associations aimeraient s'y installer. Certains financements avaient même été trouvés. Mais la réalité des finances de l'Etat et la situation catastrophique de locaux lui appartenant, tels un certain nombre d'établissements scolaires dont la rénovation a été repoussée dans le temps, relativise en effet l'urgence de s'occuper de la Maison des associations. Cependant, en demandant le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat et plus particulièrement, contrairement à ce qui est dit dans le rapport, au conseiller d'Etat en charge des finances, M. Serge Dal Busco - puisque désormais l'office des bâtiments dépend de lui - la minorité de la commission attendait une réponse plus politique et prospective que technique et financière.

Le président. Il vous reste trente secondes.

Mme Isabelle Brunier. Si ce renvoi n'est pas accepté, j'espère au moins que ce rapport de minorité posera quelques jalons pour le futur et que son sujet, légitime, ne sera pas totalement oublié. (Quelques applaudissements.)

Mme Magali Orsini (EAG). Conscient de tout ce que la Maison des associations apporte à notre canton en matière de rencontres et de vie associative, le groupe Ensemble à Gauche soutiendra le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat.

M. Boris Calame (Ve). Monsieur le président, chères et chers collègues, la Maison des associations est une institution reconnue et de rayonnement international. Elle héberge de nombreuses structures, à l'exemple de la Fédération internationale des ligues des droits de l'homme, de la Fondation pour l'hébergement des personnes handicapées psychiques, de l'association Raizes pour la langue et la culture brésilienne de notre collègue Beatriz de Candolle - et encore bien d'autres. Ce sont en fait plus de soixante structures et associations, un restaurant, une dizaine de salles de réunion, une soixantaine d'associations qui organisent près de 1200 conférences et réunions par année. Ce sont des acteurs associatifs, économiques ou encore politiques. Par exemple, l'Assemblée constituante a siégé à la Maison des associations.

Le bâtiment ne leur appartient pas, mais ils ont réalisé une étude et des projets pour optimiser le fonctionnement des bâtiments loués, notamment par un agrandissement et un assainissement énergétique. La FEA - Fondation pour l'expression associative - est porteuse de ce projet. Elle ne bénéficie d'aucune subvention, mais souhaiterait que le canton et la Ville s'organisent ensemble pour porter cette réalisation. Nous avons entendu du conseiller administratif en charge des travaux que la Ville pourrait consentir un prêt sans intérêt. Le but de cette pétition est donc bien que les exécutifs du canton et de la Ville de Genève proposent une solution pour mener à bien ce projet. C'est pour ces raisons que nous vous invitons à renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat afin qu'il puisse se saisir de ce dossier. Si tel n'était pas le cas, nous souhaiterions le renvoi en commission des pétitions pour auditionner le Conseil d'Etat. Je vous remercie de votre attention.

Mme Lydia Schneider Hausser (S). Mesdames et Messieurs les députés, à l'origine du projet de la Maison des associations, une synergie a existé entre l'Etat, la commune et les divers partenaires associatifs qui voulaient la faire émerger. Il en a résulté un espace qui permet d'une part une certaine richesse dans le débat démocratique, par la tenue de dizaines de conférences - on note 1800 conférences dans le rapport de majorité - d'autre part un lieu d'ancrage pour des dizaines d'associations, surtout de petites associations qui ne peuvent pas à elles seules louer un local indépendant et se tournent vers des locaux collectifs. (Brouhaha.) Actuellement et depuis un certain nombre d'années existe un mouvement en lien avec la Maison internationale des associations qui permet à des mouvements internationaux d'y tenir des colloques, cela en complémentarité avec les organismes internationaux qu'abrite Genève, la Maison des associations représentant plutôt le versant population, le versant société civile des pays qui sont aussi représentés dans le cadre des Nations Unies.

Ici, il ne s'agit pas d'une demande de subvention - on ne saurait d'ailleurs pas pour qui tant il y a d'entités différentes qui interviennent dans cette Maison des associations; on demande en revanche une participation de l'Etat à un investissement donné, à un moment précis, qui est une rénovation du complexe qui abrite cette maison. Il peut s'agir d'un prêt, il peut s'agir simplement d'une garantie donnée, cela reste à déterminer. Il serait dommage et dommageable pour la Genève internationale et cette ouverture que nous avons voulue pour la Genève internationale alternative, c'est-à-dire associative ou de la société civile, de tirer simplement un trait sur cette demande des pétitionnaires. C'est pourquoi nous soutiendrons le renvoi au Conseil d'Etat.

M. Stéphane Florey (UDC). Au-delà du fait qu'il s'agit d'une demande de subvention déguisée au travers d'une pétition - comme l'a dit le rapporteur - un problème n'a pas été relevé jusqu'à présent: le fait que la Maison des associations, à part demander de l'argent à bon nombre d'institutions, n'ait pas cherché véritablement à en gagner à travers les autres associations. Elle loue ses locaux à d'autres associations mais pour des loyers tellement dérisoires qu'il ne faut pas s'étonner si elle ne s'en sort pas elle-même. Quand on lui a demandé si elle avait véritablement cherché des solutions pour gagner un peu plus d'argent, elle nous a répondu que non, que les associations n'ont pas beaucoup de moyens et blablabla. Il est tellement plus simple de venir frapper à la porte de l'Etat en demandant de l'argent ! C'est donc ce qu'ils ont fait: ils se sont dit qu'ils allaient écrire une pétition, demander des moyens et attendre le résultat. Malheureusement, la commission n'a pas été convaincue par ces arguments, elle a donc préconisé - et nous le faisons aussi - le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.

M. Renaud Gautier (PLR). Mesdames et Messieurs, ce qu'on a entendu est tout à fait touchant, mais c'est essentiellement faux, il faut bien le dire ici. Lorsqu'on affirme que la Maison des associations représente la partie population, populaire de la Genève internationale, c'est faux: les petites associations oeuvrant dans le cadre de la Genève internationale sont représentées et aidées ailleurs. Il s'agit ici essentiellement d'institutions genevoises ou locales, dans un bâtiment qui en son temps fut le fleuron d'un journal de meilleure qualité que ceux qu'on voit actuellement à Genève, racheté par l'Etat et mis à disposition. Oui, le rapporteur de majorité a raison: ce qu'on essaie de vous dire ici, c'est qu'il faut encore une subvention pour des locaux, pour des associations qui elles, ne font pas forcément l'effort de payer, contrairement à un millier d'autres associations à Genève qui participent à la vie locale, qui participent à la vie internationale, mais qui de leur côté paient leur loyer. Alors oui, il s'agit d'une demande déguisée de subvention, et c'est ainsi que vous devez le voir. Dans ce sens-là, la proposition du rapporteur de majorité de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil est parfaitement justifiée.

M. Guy Mettan (PDC). Comme vous le savez certainement, le parti démocrate-chrétien a toujours soutenu la réalisation de la Maison des associations. Nous sommes, de plus, régulièrement usagers de ces locaux, nous connaissons donc très bien le fonctionnement de cette entité. En tant qu'usagers, nous pouvons certifier que cette maison est très bien gérée, contrairement à ce qui a été dit tout à l'heure. Le problème de cette pétition ne vient pas de là, mais de deux éléments; nous avons procédé à de nombreuses auditions au cours de cet examen, et il nous est en effet apparu deux choses: la première, c'est que toutes les possibilités de recourir au financement par le secteur privé - un fonctionnement économique de la maison, au fond - n'ont pas été étudiées à fond par les organisateurs. La seconde, c'est que la coordination entre la Ville de Genève, propriétaire d'une partie des locaux - on a procédé aussi à des échanges d'appartements avec le service des bâtiments... Tout cela n'avait pas non plus été très bien coordonné. Nous avons aussi auditionné M. Pagani à ce sujet. En fait, pour nous, démocrates-chrétiens, ce dossier ne semble pas encore très mûr, raison pour laquelle nous nous sommes ralliés au dépôt.

Nous souhaitons que la Maison des associations prenne contact avec le service des bâtiments et la Ville de Genève et revienne vers nous avec un projet de loi qui tienne compte de tous ces facteurs et soit présenté si possible par le département des finances. Si cela n'est pas le cas, nous sommes éventuellement prêts à soutenir une motion qui demanderait que cela se fasse, parce que nous pensons que le fonctionnement de cette maison est tout à fait utile non seulement à la Genève internationale, mais aussi à la Genève des associations et à la Genève d'en bas - parce qu'il est vrai que si certaines associations ont des moyens, d'autres en ont moins. Dans ce sens-là, cette maison remplit une fonction sociale très importante dans notre cité.

Mme Jocelyne Haller (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, je ne ferai pas l'apologie de la Maison des associations, elle a largement été faite aujourd'hui. En revanche, je voudrais procéder à deux rappels. (Brouhaha.) Tout d'abord, préciser que ce que demande la Maison des associations n'est pas une subvention, mais une contribution au projet de rénovation et de valorisation des bâtiments. Par ailleurs, trois séances de la commission des pétitions ont été consacrées au traitement de cette pétition, dont deux lors de la dernière législature. De fait, la commission telle que nous la connaissons aujourd'hui n'y a consacré qu'une seule séance, au cours de laquelle de nombreuses questions sont apparues sur ce projet, qui ont suscité diverses demandes d'audition. Elles ont toutes, systématiquement, été rejetées. Dès lors, il est difficile de se départir de l'impression qu'on n'a finalement pas tant examiné le projet de rénovation que fait plutôt le procès de cette maison. C'est injuste et inopportun, et je vous invite, pour que cette pétition soit réellement traitée dans le détail de ses différentes composantes, à la renvoyer au Conseil d'Etat comme cela a été demandé par les partis de l'Alternative. Je vous remercie de votre attention.

M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat partage l'avis exprimé par un certain nombre d'entre vous sur le caractère très utile de cette Maison internationale des associations. C'est le siège d'un grand nombre d'associations aussi diverses que variées, que Mme la rapporteuse de minorité a énumérées en partie. Nous en sommes parfaitement conscients et saluons le travail effectué par les associations hébergées dans cette maison.

Appelons cela une demande de subvention, une demande de participation, une demande d'aide: tous les termes conduisent à la même chose, c'est un engagement de l'Etat qui est demandé en espèces sonnantes et trébuchantes; c'est absolument cela.

Je vous rappellerai juste quelque chose - c'est peut-être le caractère transversal du département que j'ai l'honneur de présider maintenant qui m'y pousse: il y a des questions liées aux bâtiments, à leur construction, à leur rénovation, et aussi des questions liées aux finances et au caractère sain que ces finances de l'Etat doivent avoir sur le long terme. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Je ne peux pas m'empêcher, évidemment, de faire le lien entre les choses et, dans ce cas, entre la réalité décrite s'agissant de cette maison et celle, avérée, d'un certain nombre de bâtiments propriétés de l'Etat, qui servent à l'exercice direct de son action publique et politique - on peut penser aux bâtiments scolaires. Je cite deux exemples qui ont presque fait la une de la presse en ce début d'année: Uni Bastions et le collège du Renard. Des moyens sont engagés pour la rénovation de ces bâtiments, pour leur assainissement énergétique - puisque c'est un des arguments utilisés par les pétitionnaires. Je prends juste ces exemples, car il y en a d'autres, il y en a beaucoup. Eh bien, il y a des moyens nécessaires qui nous manquent aujourd'hui, assurément, et que nous ne pouvons malheureusement pas engager comme nous voudrions pouvoir le faire. Nous sommes obligés de faire des choix. Ces choix passent, bien sûr, par des priorités de ce type-là, que nous allons devoir examiner et réexaminer à la lumière des disponibilités financières qui seront les nôtres au cours des prochaines années.

Force est de constater que malgré la reconnaissance que nous pouvons avoir pour cette Maison des associations, celle-ci ne fait pas partie des priorités du Conseil d'Etat. Le Conseil d'Etat et l'Etat de Genève, ne l'oublions pas, participent aujourd'hui directement au maintien de cette infrastructure. Comme cela a été dit, la mise à disposition de ces locaux se fait à titre gratuit. C'est déjà quelque chose de conséquent, me semble-t-il; cela permet, par ailleurs, aux utilisateurs et à la fondation d'amortir le prêt qu'elle a dû demander pour faire les travaux. C'est un effort dont d'aucuns pourraient penser qu'il est trop modeste; nous pensons qu'il est aujourd'hui approprié, en tout cas qu'il est adapté aux moyens de l'Etat.

Voilà ce que je peux vous dire, Mesdames et Messieurs les députés. Si tant est que votre Conseil soit déterminé à nous renvoyer la pétition, c'est très probablement la réponse et le traitement que nous lui apporterions, avec les éléments que je viens de vous indiquer. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vais vous faire voter, dans l'ordre, la recommandation de la commission dans sa majorité, soit le dépôt sur le bureau du Grand Conseil. Si celui-ci est refusé, je ferai voter le renvoi au Conseil d'Etat. Dans le cas d'un refus, nous passerons à la demande de renvoi en commission. Nous commençons donc par la conclusion majoritaire de la commission: le dépôt sur le bureau du Grand Conseil.

Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission des pétitions (dépôt de la pétition 1877 sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées par 51 oui contre 29 non et 1 abstention.