Séance du vendredi 12 mai 2023 à 14h
3e législature - 1re année - 1re session - 4e séance

P 2159-A
Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition pour des mesures de réduction du bruit routier à Pont-Rouge et au groupe Mallet
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session I des 11 et 12 mai 2023.
Rapport de majorité de M. Stéphane Florey (UDC)
Rapport de minorité de M. Sylvain Thévoz (S)

Débat

La présidente. Nous traitons à présent la P 2159-A. Je passe la parole à M. Stéphane Florey.

M. Stéphane Florey (UDC), rapporteur de majorité. Merci, Madame la présidente. Je souhaite juste vous signaler que certains commissaires sont convoqués dans quinze minutes; je pensais donc qu'on arrêterait là.

La présidente. Je vous remercie, je lèverai la séance le moment venu.

M. Stéphane Florey. Cette pétition, qui concerne le groupe Mallet et le quartier Pont-Rouge au Grand-Lancy, va un peu dans la continuité des pétitions qui nous parviennent régulièrement à propos de la circulation routière: les habitants se plaignent du bruit occasionné, ou qui serait occasionné par la mobilité, et ils souhaitent bien évidemment des réductions de la vitesse à 30 km/h et subsidiairement la fermeture de certaines rues.

En l'occurrence, des habitants aimeraient placer un axe cantonal, à savoir la route du Grand-Lancy, à 30 km/h. C'est une aberration complète, quand on sait l'importance qu'a cette route: elle est le seul point d'accès qui permet de monter depuis la ville à Lancy et de rejoindre, éventuellement, Onex, Bernex et la Champagne. Cette route a toute son importance, et la majorité comprendrait mal qu'on la mette à 30 km/h, pour des raisons somme toute assez futiles évoquées par les pétitionnaires. Voilà pourquoi la majorité vous recommande de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil. Je vous remercie.

M. Sylvain Thévoz (S), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, encore une pétition sur le bruit et les problèmes liés aux nuisances routières. Je pense que sur les 170 pétitions que nous avons traitées lors de la législature précédente, peut-être 100 ou 120 portaient sur cet enjeu-là. On le voit, c'est un enjeu majeur pour nos concitoyens et nos concitoyennes, qui va revenir d'une manière lancinante tant que des solutions ne seront pas trouvées.

On est là en présence d'un habitant qui a acheté un bien nouveau; un revêtement phonoabsorbant est posé sur la route du Grand-Lancy, en tout cas sur le tronçon en face de chez lui; l'immeuble est moderne et comprend une fermeture de fenêtre adéquate. Tout est pensé, tout est neuf. Pourtant, ce pétitionnaire, qui n'a rien, je dirais, d'un farfelu, clame: «C'est invivable ! C'est invivable pour ma famille, pour mes enfants. Je souffre du bruit; nous souffrons du bruit et nous en avons marre !» A notre sens, cela doit être entendu et relayé au Conseil d'Etat pour que des mesures créatives et de tout ordre soient prises.

La pétition ouvre le champ; elle demande qu'une «étude complète du trafic motorisé sur cet axe» soit réalisée - quoi de plus normal ? - et que les pics de bruit routier fassent l'objet de mesures spécifiques; elle demande également au Conseil d'Etat «d'étudier tous les moyens à sa disposition pour réduire le bruit [...] sur cet axe». La pétition émet trois petites propositions: un passage à 30 km/h diurne et/ou nocturne; la pose de radars de vitesse ou antibruit; et «toute autre mesure susceptible d'améliorer la situation en matière d'émission de bruit routier». On ne pourrait pas faire plus simple, on ne pourrait pas faire plus généreux ni plus pressant pour le Conseil d'Etat. C'est une question de bon sens. Certaines mesures sont d'ailleurs en cours de développement par le Conseil d'Etat. Les radars antibruit, vous le savez, sont en développement: quand vous émettez un bruit trop fort, un petit smiley s'allume. Malheureusement, il n'y a encore aucune homologation au niveau fédéral, il n'est donc pas possible de mettre des amendes. Tout ça, ce sont des mesures qui peuvent être prises. C'est pourquoi nous vous invitons à renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat. Merci.

Mme Christina Meissner (LC). Ces nouveaux habitants arrivent dans un quartier très, très récent, nouvellement construit, et ils découvrent qu'il y a du bruit. Ce bruit était déjà là: il est inhérent à ce quartier. Les mesures de construction prises ont été ma foi bonnes, mais les gens ne vivent pas dans un bocal: à un moment donné, ils ouvrent la fenêtre et entendent certains bruits, provenant non seulement de la route du Grand-Lancy, sur laquelle un revêtement phonoabsorbant a effectivement été posé, mais aussi de la route des Jeunes, voire des voies ferrées. Monsieur Thévoz, on ne va quand même pas arrêter le train, j'ose espérer !

Cela étant, le bruit a une physique très compliquée et la réverbération sur les surfaces dures est quelque chose de réel; il n'est pas facile d'y faire face. Ajoutons, en outre, une dimension subjective inhérente au bruit, surtout pendant la nuit. Venir se loger au centre-ville, il faut bien l'admettre, c'est aussi accepter un certain degré de bruit propre à un environnement construit et très dense. C'est pourquoi il faut vraiment réfléchir à l'orientation des bâtiments dans le quartier du PAV, lors de sa construction future, au revêtement qu'on va utiliser et à une végétalisation maximale de ces quartiers, parce que ça fera une différence sur la qualité de vie qu'il y aura au PAV. Mais ça, c'est le futur; aujourd'hui, ce quartier est construit et on ne peut malheureusement pas y faire grand-chose d'autre. Le Centre déposera donc cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.

Mme Marjorie de Chastonay (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, comment ne pas soutenir une telle pétition ? Elle est au centre des préoccupations d'une grande partie de la population genevoise: elle traite du fléau du bruit, véritable enjeu de santé publique - on l'a déjà dit tout à l'heure - qui concerne en tout cas 120 000 habitantes et habitants.

Cette pétition a été lancée par un groupe d'habitants du quartier de Pont-Rouge qui demandent la mise en oeuvre de moyens nécessaires pour éviter les pics de bruit sur la route du Grand-Lancy. Il s'agit, toutefois, de distinguer le fléau des nuisances sonores liées au bruit routier de manière générale du fléau des nuisances sonores liées aux pics de bruit routier, et c'est justement sur ce point que le texte devient intéressant. La requête des habitants et habitantes est simple: la pétition demande que le Conseil d'Etat fasse réaliser une étude complète du trafic motorisé sur cet axe-là en particulier, avec une mesure des vitesses et des bruits, afin de pouvoir mettre en place des mesures concrètes.

Je ne crois pas à la fatalité dont Mme Meissner a parlé tout à l'heure: ce n'est pas parce qu'on habite dans un milieu urbain ou contenant des routes que la santé doit souffrir en raison de nuisances sonores, alors qu'il existe des moyens extrêmement efficaces, en plus du revêtement phonoabsorbant déjà mis en place, des moyens gratuits, efficients et immédiatement applicables: il s'agit bien évidemment de la mesure de diminution de la vitesse à 30 km/h, qui a été en consultation et qui est attaquée directement par voie de justice, ce dont nous attendons l'issue.

Nous comprenons la problématique et on peut, bien sûr, soutenir cette pétition, parce qu'elle différencie les bruits routiers des pics de bruit routier. Concernant ceux-ci, il faut mettre l'accent sur les fameux radars antibruit, les radars de vitesse, sur les comportements des automobilistes, des comportements qui sont soit nerveux soit agressifs, qui augmentent le bruit lors du démarrage, mais aussi sur les nuisances des pics de bruit liés aux deux-roues motorisés et aux voitures non réglementaires. Je pense donc que c'est une pétition extrêmement intéressante et qu'il faut la soutenir; elle demande des mesures totalement acceptables et proportionnées. C'est pour ça que nous nous opposerons au dépôt sur le bureau du Grand Conseil et que, bien sûr, nous soutiendrons le renvoi au Conseil d'Etat. Merci.

M. Sylvain Thévoz (S), rapporteur de minorité. J'ai entendu: «Vous n'allez quand même pas arrêter les trains !» On a entendu avant: «Vous voulez empêcher tout passage des voitures.» Je suis désolé, ce n'est absolument pas de ça qu'il s'agit dans ces pétitions. Elles sont mesurées, elles sont pondérées, et les habitants cherchent des solutions en disant: «On met des radars antibruit.»

En politique, il y a une désagréable tendance à caricaturer et à renforcer les choses; alors je l'utilise peut-être aussi, certes... (Rires. Exclamations.)

Une voix. Oh oui ! Pas peut-être, enlève le «peut-être».

M. Sylvain Thévoz. Il faut le faire en certaines occasions, certainement, mais là, franchement, personne ne demande ni d'arrêter les trains ni de bloquer les voitures, Madame Meissner. Des habitants souhaitent simplement avoir une meilleure qualité de vie en réduisant le bruit de ceux qui mettent les gaz de manière excessive ou trafiquent leur pot. Tout le monde sera d'accord avec ça; ça me semble important de le rappeler.

Dire à ceux qui sont en ville: «Vous n'avez qu'à aller vivre ailleurs; vous avez voulu venir vivre en ville et maintenant vous allez en subir les nuisances, parce que si vous êtes en ville, vous l'avez choisi», est quand même, à mon avis, assez choquant, quand on connaît le prix des loyers, la difficulté à se loger, l'impossibilité de bouger lorsque vous avez un bail. Dire aux gens: «Vous n'avez qu'à subir, et on fera mieux dans le PAV» est extrêmement violent et choquant pour notre groupe. Ce n'est pas notre solution; la nôtre est d'aménager, de discuter. Il s'agit, en effet, de trouver des solutions qui ne sont pas des solutions miracles. C'est pour cela qu'on a un exécutif, qui pourra, on l'espère, dans sa nouvelle forme, être créatif - et nous saluons le nouveau ministre qui prendra en charge la mobilité et la santé, parce qu'il y a beaucoup à faire dans ce domaine-là. Nous espérons que des solutions seront trouvées de ce côté-là. Nous vous remercions donc de renvoyer à ce futur ministre et au Conseil d'Etat cette pétition pour qu'il puisse faire ses preuves. Merci. (Applaudissements.)

M. Stéphane Florey (UDC), rapporteur de majorité. J'aimerais juste rappeler deux choses. La route du Grand-Lancy a déjà fait l'objet d'un assainissement: il y a quelques années, le revêtement a été complètement refait et on a posé du phonoabsorbant. De plus, les nouveaux immeubles construits bénéficient déjà de toutes les mesures possibles et imaginables pour les isoler du bruit: double vitrage, isolant phonique et thermique, toutes les mesures qu'on peut imaginer aujourd'hui pour bloquer le bruit.

Le vrai problème - Mme Meissner l'a dit - c'est que les gens qui vont habiter dans ces nouveaux quartiers doivent accepter un certain désagrément. On est exactement dans la même problématique que la personne venant de la ville qui, un jour, a la chance de pouvoir vivre à la campagne et qui, habitant malheureusement à côté d'un champ, se plaint des cloches des vaches. C'est exactement ça. Il y en a même maintenant qui arrivent à se plaindre des clochers, ou d'autres choses de ce genre. Je veux dire, à un moment, vous changez de quartier, vous changez d'habitation, vous devez alors aussi accepter l'environnement qui va avec.

Cette pétition est parfaitement représentative de la problématique: aujourd'hui, les gens ne sont plus prêts... Ils veulent tout, mais pas accepter les contraintes qui vont avec. A un moment, il faut qu'ils se mettent d'accord avec eux-mêmes. On ne peut pas tout avoir, ma foi. Ces personnes ont eu la chance d'avoir un logement, un logement neuf en l'occurrence, mais dans un ancien quartier industriel, dont la gare CFF des marchandises occupait tout le site. Actuellement, le Léman Express passe par là, en dessous des fenêtres, et ces gens ont même bénéficié d'un mur antibruit, d'un mur de protection contre les transports de marchandises dangereuses. Tout ça fait que oui, il y a encore du bruit dans ce quartier; les personnes qui vivent devront malheureusement apprendre à faire avec, parce que, comme vous l'avez dit, Monsieur Thévoz, on ne va ni arrêter de faire circuler les trains ni arrêter de vivre. Ma foi, c'est la vie ! (Commentaires. Rires.) Je vous recommanderai donc de déposer... Eh oui, avec les années, on devient philosophe. (L'orateur rit.) Je vous recommanderai donc de suivre le rapport de majorité en déposant cette pétition sur le bureau du Grand Conseil. Je vous remercie. (L'orateur rit.)

La présidente. Merci, Monsieur le rapporteur de majorité. Je lance le vote sur le dépôt.

Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission des pétitions (dépôt de la pétition 2159 sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées par 56 oui contre 31 non (vote nominal).

Vote nominal