Séance du jeudi 7 novembre 2019 à 8h
2e législature - 2e année - 6e session - 32e séance

La séance est ouverte à 8h, sous la présidence de M. Jean-Marie Voumard, président.

Assistent à la séance: Mmes et M. Anne Emery-Torracinta, Mauro Poggia et Nathalie Fontanet, conseillers d'Etat.

Exhortation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. Antonio Hodgers, président du Conseil d'Etat, Serge Dal Busco, Pierre Maudet et Thierry Apothéloz, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Jacques Apothéloz, Claude Bocquet, Pablo Cruchon, Christian Dandrès, Amanda Gavilanes, Jean-Marc Guinchard, Katia Leonelli, Fabienne Monbaron, Isabelle Pasquier, Patrick Saudan et Céline Zuber-Roy, députés.

Députés suppléants présents: Mmes et MM. Christian Bavarel, Pierre Bayenet, Emmanuel Deonna, Joëlle Fiss, Patrick Malek-Asghar, Yves de Matteis, Françoise Nyffeler, Souheil Sayegh et Helena Verissimo de Freitas.

Annonces et dépôts

Néant.

RD 1297
Hommage à Mme Delphine KLOPFENSTEIN BROGGINI, députée démissionnaire

Le président. Je vous informe que nous avons reçu la démission de Mme Delphine Klopfenstein Broggini de son mandat de députée. Je prie Mme Bachmann de bien vouloir nous lire sa lettre, le courrier 3908. (Applaudissements après la lecture.)

Courrier 3908

Le président. Il est pris acte de cette démission à l'issue de cette séance.

Mme Delphine Klopfenstein Broggini a siégé sur les bancs des Verts pendant six ans, d'abord comme suppléante, puis comme titulaire dès 2015 suite au départ de Mme Lisa Mazzone pour Berne. Au cours de son mandat, elle a été membre des commissions de l'environnement, des affaires communales, des pétitions et des transports.

Très engagée en faveur de nombreuses causes, elle s'est notamment battue pour l'environnement, l'égalité hommes-femmes ainsi qu'une politique d'asile digne et humaine. Elle a été à l'origine de plusieurs objets adoptés par notre parlement, dont certains à l'unanimité, comme le PL 12397 visant à interdire la mise à disposition gratuite de sacs plastiques. Elle a en outre déposé tout récemment un projet de loi en vue de renforcer les congés maternité et paternité à Genève.

Nous formons tous nos voeux pour la suite de sa carrière politique à Berne et lui remettons, comme d'habitude, notre fameux stylo souvenir. (Applaudissements. Le président descend de l'estrade, embrasse Mme Delphine Klopfenstein Broggini et lui remet le stylo souvenir.)

Je passe la parole à M. le député Pierre Eckert.

M. Pierre Eckert (Ve). Merci, Monsieur le président. L'avantage me revient de présenter notre hommage à Mme Delphine Klopfenstein Broggini. Comme vous l'avez dit, Delphine est entrée au Grand Conseil comme députée suppléante en 2013. Au moment du départ de Lisa Mazzone pour Berne, elle a pris sa place comme députée titulaire. Elle va retrouver Lisa à Berne, tout trouve une bonne fin ! Elle avait été réélue au Grand Conseil au printemps 2018, malgré une position extrêmement basse sur la liste: tout le mérite lui en revient.

Comme vous le savez, c'est une écologiste engagée, qui n'hésite pas à braver les frimas avec sa bicyclette pour nous rejoindre depuis le presque vaudois Versoix. Elle s'est illustrée au sein de ce Conseil non seulement par sa participation active dans les commissions, mais aussi par le dépôt de nombreux textes, comme vous l'avez dit, notamment sur l'environnement, la biodiversité, le mitage du territoire. Elle s'est aussi engagée pour la protection des abeilles, à travers l'interdiction d'un type de substances que personne n'a jamais réussi à prononcer, ce que je vais quand même essayer de faire: je veux parler des néonicotinoïdes. (L'orateur prononce le mot lentement.) Je me suis exercé pendant un certain temps ! Elle a également pris une part importante dans les discussions autour des transports; une motion de sa plume sur le développement des voies vertes nous occupera prochainement. Elle a aussi été très active dans le domaine de l'égalité hommes-femmes: vous vous souvenez certainement de son texte sur l'égalité dans les commissions extraparlementaires.

Depuis plus d'une année, elle s'est placée sur les rails du Conseil national et y a été brillamment élue le 20 octobre dernier. C'est une femme de convictions qui ne lâche rien. Ces qualités lui seront fort utiles à Berne, avec l'espoir de faire bouger les lignes, un peu trop figées ces dernières années.

Ich kenne Delphine seit einer Weile und habe sie mehrfach nach Bern begleitet. La sua conoscenza della lingua tedesca e della lingua italiana le sarà molto utile per creare collegamenti nella capitale federale. (Rires.) Je me suis laissé dire qu'elle maîtrisait également le rhéto-romanche, mais ne comptez pas sur moi pour lui rendre un hommage dans cette langue, elle le fera elle-même !

Le groupe des Verts, et, j'espère, l'ensemble du parlement, remercient vivement Delphine pour son engagement tout au long de ces six années avec nous. Nous lui souhaitons une belle suite de carrière à Berne. (Applaudissements.)

Une voix. Bravo !

Le président. Merci. Monsieur Marc Fuhrmann, vous avez demandé la parole ?

M. Marc Fuhrmann. Oui, finalement !

Le président. Je vous la passe.

M. Marc Fuhrmann (UDC). Merci, Monsieur le président. Au nom du groupe UDC, je souhaite plein succès à nos élus de tous bords à Berne. Je tiens malgré tout à leur rappeler ceci: au lieu de vous battre pour des causes uniquement idéologiques, qu'elles soient de gauche, de droite ou même vertes, battez-vous aussi pour Genève ! Genève a besoin d'être soutenue à Berne sur toute une série de facteurs. Ne parlons que des transports, notamment le rail, ou à la limite une traversée du lac... (Rires.) Enfin bref, je tiens à leur rappeler qu'il s'agit aussi de défendre Genève et pas seulement une idéologie, qu'elle soit de gauche ou de droite. Bonne chance à tous et merci en tout cas pour le travail déjà effectué ici. (Applaudissements.)

RD 1298
Hommage à Mme Stéphanie VALENTINO, députée démissionnaire

Le président. Je vous informe que nous avons reçu la démission de Mme Stéphanie Valentino de son mandat de députée. Je prie Mme Bachmann de bien vouloir nous lire sa lettre, le courrier 3912. (Applaudissements après la lecture.)

Courrier 3912

Le président. Il est pris acte de cette démission avec effet immédiat.

Mme Stéphanie Valentino a été élue au Grand Conseil sur la liste d'Ensemble à Gauche en mai 2018. Au cours de son mandat, elle a participé aux travaux des commissions de l'enseignement supérieur et des pétitions. Elle a en outre déposé un projet de loi en faveur d'un remboursement des frais de garde des députés, actuellement à l'étude à la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil. Nous formons nos meilleurs voeux pour la suite de ses activités et lui enverrons, fidèles à la tradition, un stylo souvenir.

Je passe la parole à M. le député Pierre Bayenet.

M. Pierre Bayenet (EAG), député suppléant. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, compte tenu du fait que j'ai régulièrement remplacé ma collègue et camarade de parti Stéphanie Valentino, c'est moi qui vais lui rendre un hommage appuyé, appuyé parce qu'elle a été particulièrement courageuse - peut-être un peu téméraire aussi - de se lancer dans la course au Grand Conseil alors qu'elle attendait un bébé, alors qu'elle était enceinte. Les choses ont malheureusement fait qu'il était particulièrement difficile pour elle de concilier la maternité avec un emploi à temps presque plein et une vie politique très intense. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Cela fait trois choses qu'elle avait l'ambition de concilier, et malheureusement, vous savez tous et toutes, comme moi, que notre Grand Conseil n'est pas fait pour les jeunes parents; c'est d'ailleurs un combat que nous devons mener pour éviter qu'à l'avenir, d'autres jeunes parents comme elle ne nous quittent parce qu'ils préfèrent ou ont l'obligation de se consacrer à leurs enfants et à leur métier.

D'ailleurs, Stéphanie Valentino n'a pas simplement démissionné, elle nous a laissé un héritage sur lequel il va falloir travailler pour aller dans son sens, la question des frais de garde: elle a déposé avant son départ un projet de loi visant à ce que les frais de garde des jeunes parents soient payés lorsque ceux-ci siègent au Grand Conseil. Je sais que cette question suscite pas mal de sarcasmes, mais en réalité, il existe une nécessité impérative d'aborder ces questions et de répondre à ces problèmes si nous voulons être représentatifs de toute la population genevoise. Stéphanie Valentino était représentative d'une partie de la population qui n'est quasi pas représentée aujourd'hui, c'est-à-dire des employés qui travaillent à temps presque complet et qui ont des enfants. A l'avenir, nous devrons y songer et nous devrons tout faire pour qu'ils puissent rester et continuer à représenter la population.

Stéphanie Valentino a également déposé un projet de loi relatif à quelque chose qu'elle connaissait très bien, la situation du personnel des HUG - elle y travaille - et le problème des absences non remplacées.

Pour toutes ces raisons, bien que Stéphanie Valentino ait été peu présente, je pense que nous devons garder à l'esprit sa présence comme un rappel constant de notre but qui consiste à ce que toutes et tous les citoyens se sentent représentés par notre assemblée. Je rends hommage à Stéphanie Valentino d'avoir eu le courage de se lancer dans cette aventure. Je ne lui en veux pas - et je pense que personne ne peut lui en vouloir - d'avoir constaté que malheureusement, pour elle, à titre personnel, c'était trop difficile. Je vous remercie. (Applaudissements.)

Le président. Merci. (Brouhaha. Le président attend un instant.) Voilà, il y a du silence !

RD 1299
Hommage à M. Vincent MAITRE, député démissionnaire

Le président. Je vous informe que nous avons reçu la démission de M. Vincent Maitre de son mandat de député. Je prie Mme Bachmann de bien vouloir nous lire sa lettre, le courrier 3913. (Applaudissements après la lecture.)

Courrier 3913

Le président. Il est pris acte de cette démission avec effet immédiat.

Conformément au souhait de M. Maitre, il n'y aura pas d'hommage. Néanmoins, je passe la parole à Mme Anne Marie von Arx-Vernon. (Rires.)

Mme Anne Marie von Arx-Vernon (PDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, il n'y aura pas d'hommage, puisque M. Maitre l'a souhaité ainsi, mais s'il y avait eu un hommage, j'aurais pu dire juste deux petites choses: merci infiniment à Vincent d'oeuvrer pour le parti démocrate-chrétien depuis vingt ans; merci à Vincent de s'être engagé comme il l'a fait aux niveaux municipal et cantonal. Nous nous réjouissons que sa vision de la société lui permette de continuer à défendre à Berne une économie éclairée et un humanisme sans faille. Merci, Vincent ! (Applaudissements.)

E 2663
Prestation de serment de la remplaçante de M. Vincent MAITRE, député démissionnaire
E 2662
Prestation de serment du remplaçant de Mme Stéphanie VALENTINO, députée démissionnaire

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, l'ordre du jour appelle la prestation de serment de députés. Je prie le sautier de les faire entrer et l'assistance de bien vouloir se lever. (Mme Christina Meissner et M. Olivier Baud entrent dans la salle et se tiennent debout, face à l'estrade.)

Madame Christina Meissner et Monsieur Olivier Baud, vous êtes appelés à prêter serment de vos fonctions de député au Grand Conseil. Je vais vous donner lecture de la formule du serment. Pendant ce temps, vous tiendrez la main droite levée et, lorsque cette lecture sera terminée, à l'appel de votre nom, vous répondrez soit «je le jure», soit «je le promets». Veuillez lever la main droite.

«Je jure ou je promets solennellement:

- de prendre pour seuls guides dans l'exercice de mes fonctions les intérêts de la République selon les lumières de ma conscience, de rester strictement attaché aux prescriptions de la constitution et de ne jamais perdre de vue que mes attributions ne sont qu'une délégation de la suprême autorité du peuple;

- d'observer tous les devoirs qu'impose notre union à la Confédération suisse et de maintenir l'honneur, l'indépendance et la prospérité de la patrie;

- de garder le secret sur toutes les informations que la loi ne me permet pas de divulguer.»

Ont prêté serment:

Mme Christina Meissner et M. Olivier Baud.

Veuillez baisser la main. Le Grand Conseil prend acte de votre serment. La cérémonie est terminée. Dès maintenant, vous pouvez siéger. (Applaudissements.)

RD 1300
Rapport oral de la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil sur la compatibilité du 2e député suppléant (Ve)
Rapport oral de M. Pierre Vanek (EAG)

Le président. Je passe la parole à M. Pierre Vanek.

M. Pierre Vanek (EAG), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Il y a huit jours, la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil a examiné attentivement, sous la présidence de Pierre Conne... (Brouhaha.)

Le président. Un instant, Monsieur Vanek. J'aimerais un peu moins de bruit, Mesdames et Messieurs, s'il vous plaît. (Le silence revient.) Merci. Je vous laisse continuer.

M. Pierre Vanek. Merci, Monsieur le président. A la commission des droits politiques, nous avons examiné il y a huit jours les liens d'intérêts et la question de la compatibilité de M. Boris Calame, appelé à occuper la fonction de suppléant dans le groupe des Verts. Vous connaissez Boris Calame, je ne vous le présente donc pas en détail. Selon la fiche que nous avons reçue, il est designer et écologue. Il fait partie de différents conseils dont aucun n'entraîne une quelconque incompatibilité ou un soupçon d'incompatibilité. Je vous recommande donc d'accepter sa prestation de serment.

Le Grand Conseil prend acte de ce rapport oral.

Le président. M. Calame prêtera serment lors de notre séance de 10h.

Liens d'intérêts de M. Boris Calame (Ve)

Cercle du Grand Genève - Membre du comité

Commission cantonale de protection contre le bruit - Membre

Conseil du développement durable - Président

Etablissements Publics pour l'Intégration (EPI) - Membre du Conseil d'administration

Groupement des Entrepreneurs et Indépendants Progressistes (GEIP) - Vice-président

Les Verts de la Ville de Genève - Membre du Bureau et du comité

Les Verts genevois - Membre

Plateforme du commerce - Membre du comité

RD 1301
Rapport oral de la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil sur la compatibilité du 2e député suppléant (EAG)
Rapport oral de M. Pierre Vanek (EAG)

Le président. Je passe la parole à M. Pierre Vanek.

M. Pierre Vanek (EAG), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Nous avons examiné hier à la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil la situation du point de vue des liens d'intérêts de Mme Françoise Nyffeler, appelée à prendre place au sein du groupe Ensemble à Gauche suite à la démission de Mme Stéphanie Valentino. Mme Nyffeler est enseignante au cycle d'orientation et siège dans différents conseils professionnels ou civils, dont aucun n'est de nature à entraîner une incompatibilité quelconque. La commission vous appelle donc à l'unanimité à accepter son accession au statut de députée suppléante.

Le Grand Conseil prend acte de ce rapport oral.

Le président. Mme Nyffeler prêtera serment après le point suivant.

Liens d'intérêts de Mme Françoise Nyffeler (EAG)

Association de lutte contre la gravière de Cartigny

Association du personnel du CO Vuillonnex

Collectif genevois pour la grève féministe des femmes, le 14 juin 2019

Protection des animaux - Refuge de Darwyn

SSP-VPOD

RD 1302
Rapport oral de la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil sur la compatibilité du 2e député suppléant (PDC)
Rapport oral de M. Pierre Vanek (EAG)

Le président. Je passe la parole à M. Pierre Vanek.

M. Pierre Vanek (EAG), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Hier également, nous avons examiné la situation du point de vue de l'incompatibilité hypothétique de M. Sébastien Desfayes, que vous connaissez, ancien président du parti démocrate-chrétien, sauf erreur, et avocat au sein d'une étude de la place. Il siège au sein d'un conseil qui ne présente pas le moindre problème du point de vue de la compatibilité. La commission unanime vous appelle donc, comme pour les précédents députés suppléants, à l'accepter sans objection dans nos rangs.

Le Grand Conseil prend acte de ce rapport oral.

Le président. M. Desfayes va prêter serment immédiatement.

Liens d'intérêts de M. Sébastien Desfayes (PDC)

Section des Vieux-Zofingiens de Genève - Trésorier

E 2665
Prestation de serment de la députée suppléante (EAG)
E 2666
Prestation de serment du député suppléant (PDC)

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, l'ordre du jour appelle la prestation de serment de députés suppléants. Je prie le sautier de les faire entrer et l'assistance de bien vouloir se lever. (Mme Françoise Nyffeler et M. Sébastien Desfayes entrent dans la salle et se tiennent debout, face à l'estrade.)

Madame Françoise Nyffeler et Monsieur Sébastien Desfayes, vous êtes appelés à prêter serment de vos fonctions de député suppléant au Grand Conseil. Je vais vous donner lecture de la formule du serment. Pendant ce temps, vous tiendrez la main droite levée et, lorsque cette lecture sera terminée, à l'appel de votre nom, vous répondrez soit «je le jure», soit «je le promets». Veuillez lever la main droite.

«Je jure ou je promets solennellement:

- de prendre pour seuls guides dans l'exercice de mes fonctions les intérêts de la République selon les lumières de ma conscience, de rester strictement attaché aux prescriptions de la constitution et de ne jamais perdre de vue que mes attributions ne sont qu'une délégation de la suprême autorité du peuple;

- d'observer tous les devoirs qu'impose notre union à la Confédération suisse et de maintenir l'honneur, l'indépendance et la prospérité de la patrie;

- de garder le secret sur toutes les informations que la loi ne me permet pas de divulguer.»

Ont prêté serment:

Mme Françoise Nyffeler et M. Sébastien Desfayes.

Veuillez baisser la main. Le Grand Conseil prend acte de votre serment. La cérémonie est terminée. Dès maintenant, vous pouvez siéger. (Applaudissements.)

E 2667
Tirage au sort d'une ou d'un membre suppléant de la commission de grâce, en remplacement de Mme Stéphanie VALENTINO, députée démissionnaire

Le président. Est tiré au sort: M. Christian Zaugg (EAG). (Applaudissements.)

PL 12133-A
Rapport de la commission de l'économie chargée d'étudier le projet de loi de Mmes et MM. Jocelyne Haller, Roger Deneys, Pierre Vanek, Christian Zaugg, Jean Batou, Salika Wenger, Claire Martenot, Thomas Wenger modifiant la loi sur l'inspection et les relations du travail (LIRT) (J 1 05) (Pour un répertoire des entreprises du canton de Genève plus complet)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session III des 20 et 21 septembre 2018.
Rapport de majorité de M. André Pfeffer (UDC)
Rapport de minorité de Mme Jocelyne Haller (EAG)

Premier débat

Le président. Nous traitons maintenant le PL 12133-A en catégorie II, quarante minutes. Le rapport de majorité est de M. André Pfeffer...

M. Stéphane Florey. Où est-ce qu'il est ?

Mme Salima Moyard. Il n'a pas l'air d'être dans la salle.

M. Stéphane Florey. Mais il était là tout à l'heure ! (Remarque.) Non, non.

Mme Salima Moyard. Salut, le groupe UDC ! (L'oratrice rit. Un instant s'écoule.) Ah, le voilà. Allez, André ! (Un instant s'écoule.)

Le président. Bon, patientons le temps que M. Pfeffer s'installe, puis je lui passerai la parole. (Un instant s'écoule.) Allez-y, Monsieur Pfeffer.

M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Ce projet de loi relaie une demande exprimée par les syndicalistes. L'objectif est de compléter le répertoire des entreprises du canton de Genève. Si l'idée peut paraître respectable, les coûts et le travail requis seraient totalement disproportionnés. Les auteurs du texte souhaitent que nos 20 000 entreprises, qui emploient 245 000 salariés, transmettent les informations suivantes: le nombre de collaborateurs et, pour chacun d'eux, l'âge, le sexe, la nationalité, le domicile, les fonctions, les qualifications, le taux d'occupation et évidemment le salaire. En plus, elles devraient fournir chaque mois diverses données relatives aux licenciements et aux nouveaux engagements.

Ce projet de loi est inacceptable pour plusieurs raisons. Tout d'abord, la finalité du répertoire des entreprises de Genève serait dénaturée. Aujourd'hui, cet instrument sert à planifier, à étudier et à rationaliser la gestion de notre marché du travail; il permet par exemple de piloter l'action de l'Inspection paritaire des entreprises. Avec ce projet de loi, le REG se transformerait en outil pour contrôler nos sociétés et leurs employés. Ensuite, comme je l'ai dit, les coûts et la charge administrative seraient disproportionnés. Le système informatique actuel ne serait pas en mesure d'accueillir ces nouvelles données, il faudrait en prévoir un nouveau. Enfin, le répertoire des entreprises donne satisfaction et remplit déjà le rôle pour lequel il a été créé. C'est grâce aux informations de ce registre qu'on édicte les contrats types de travail, qu'on fixe les usages professionnels, qu'on peut par exemple constater de la sous-enchère salariale et bien d'autres choses encore.

Genève effectue déjà à la fois quantitativement et qualitativement plus de contrôles que les autres cantons suisses. Pour la majorité, il faut un marché du travail qui fonctionne de manière harmonieuse avec un sain équilibre entre les contrôles et les libertés. Pour ces raisons, je vous recommande de refuser ce projet de loi. Merci.

Mme Jocelyne Haller (EAG), rapporteuse de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, après cette vision apocalyptique, permettez-moi de vous apporter un autre éclairage sur ce projet de loi, qui propose une modification de la loi sur l'inspection et les relations du travail afin de compléter le répertoire des entreprises du canton de Genève. Celui-ci existe d'ores et déjà, il s'agit surtout d'y ajouter des informations afin de réunir en un même registre l'ensemble des données relatives au marché de l'emploi.

L'une des principales objections des opposants à ce projet est la surcharge administrative dont il accablerait les sociétés. Cet argument affirmé avec force est étonnant: on se demande pour quelle raison une compilation de renseignements connus et disponibles représente un tel repoussoir, à plus forte raison à l'ère informatique où un simple clic permet de déplacer et d'enregistrer des données en série. Il ne s'agit pas de générer une nouvelle charge administrative, mais bien de rationaliser la gestion des ressources.

Plus encore, et les auteurs ne s'en cachent pas, le nouveau registre permettrait d'observer les pratiques salariales et, partant, de mieux lutter contre la sous-enchère salariale, objectif dont chacun se prévaut ici, mais qu'on peine à poursuivre avec assiduité, voire avec détermination. Ce texte nous offre l'opportunité d'améliorer un outil déjà existant pour atteindre ce but. Ce faisant, passé l'effort de départ pour sa mise en place, il simplifiera les multiples démarches administratives qui incombent aux entreprises en rassemblant, en enrichissant et en rationalisant les données relatives au personnel.

Pour bien saisir l'utilité d'un tel instrument dans la gestion d'un pan de la politique économique de notre canton, il est nécessaire de prendre conscience des failles de notre système statistique, qui impose trop souvent un décalage temporel: les représentants de la CGAS nous ont indiqué qu'il aura fallu attendre le printemps 2017 pour disposer des données 2014 de l'enquête suisse sur la structure des salaires ! Selon le directeur de l'OCSTAT, un tel outil constituerait un avantage et nous permettrait de disposer d'une vue en continu des données des entreprises. Actuellement, a-t-il imagé, nous ne disposons sur le plan cantonal que d'une photo tous les deux ans, car l'enquête se déroule tous les deux ans et nécessite de longs délais de livraison des données. Avec ce projet de loi, nous vous proposons de recueillir les informations chaque année et ainsi de bénéficier d'un film et d'une vision en continu.

Le registre tel qu'amélioré facilitera et allégera la tâche de l'OCIRT et de l'IPE, qui indiquent que les vérifications sont trop souvent menées à l'aveugle, ce qui ne favorise pas une utilisation rationnelle des ressources. Ajouter au REG les données salariales nous permettra d'établir une sorte de répertoire des rétributions; il sera ensuite plus simple de vérifier l'application de la réglementation en vigueur, de cibler les contrôles et d'optimiser les ressources disponibles.

Après l'argument administratif, les opposants au projet de loi lui ont fait le reproche de ne pas respecter la confidentialité. Or outre sa soumission naturelle et systématique à la LIPAD, le projet énonce clairement à son article 40, alinéa 5, que les éventuelles limites à l'accessibilité des données au public seront définies par voie réglementaire. Par ailleurs, des dispositions supplémentaires ont été expressément prévues pour protéger la confidentialité. De nombreux députés de la majorité se sont focalisés sur ce risque de violation bien qu'il leur ait été assuré que seuls les résultats et les éléments statistiques seraient accessibles au public, et en aucun cas des données permettant d'identifier travailleurs ou entreprises. Compte tenu de cette crainte et dans une perspective d'apaisement, pour réitérer l'intention des auteurs de préserver comme il se doit les données confidentielles, je vous proposerai, au nom de la minorité, un amendement de nature à écarter tout danger.

Cela étant, c'est moins la question de la protection des données qui a été au coeur des discussions que le spectre invoqué par certains commissaires d'un Etat fouineur - voilà, les choses sont dites. Une notion un peu particulière, si l'on considère qu'il ne s'agit là que de transparence et de contrôle quant à l'application de la réglementation en vigueur. Cette mise en question est suspecte, comme si l'Etat n'était pas habilité à veiller à l'application des lois, comme si un délinquant pouvait dire que la police se mêle de ce qui ne la regarde pas lorsqu'elle exerce son pouvoir de surveillance pour éviter des infractions à la loi.

Mesdames et Messieurs les députés, le projet de loi 12133 vous propose de doter l'Etat et ses instances déléguées - l'OCIRT, l'IPE - d'un véritable outil de surveillance du marché du travail. Nous ne pouvons pas nous plaindre à longueur d'année de la détérioration du marché professionnel, de l'appauvrissement d'une partie croissante de la population et, dans le même temps, ne pas être prêts à protéger l'emploi et à lutter contre la sous-enchère salariale. C'est pourquoi la minorité vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, moyennant l'acceptation de l'amendement que je vous présenterai, d'adopter ce projet de loi... Ou est-ce que je donne tout de suite la teneur de l'amendement ? Ah non, c'est bon, il est projeté à l'écran. Merci.

M. Jacques Béné (PLR). Mesdames et Messieurs, ce projet de loi, il faut le dire, a été initié par la Communauté genevoise d'action syndicale. Encore une fois, il s'agit d'une attaque frontale contre le partenariat social: les syndicats cherchent le combat à tout prix alors que, de l'autre côté, les entreprises visent la paix du travail, souvent au prix de concessions difficiles à accepter. Pour les syndicats, il est beaucoup plus facile de faire dire non à leurs membres en leur laissant miroiter des avantages supplémentaires qu'ils entendent négocier plutôt que de faire consentir les sociétés à des concessions qui sont toujours d'ordre financier, et ce alors qu'elles sont de plus en plus ponctionnées.

Ce texte vise clairement à faire du REG un instrument de contrôle du marché du travail alors qu'il constitue actuellement un simple outil d'information. Au-delà des conséquences et de la surcharge administrative que ce projet représenterait pour les entreprises, son coût n'a pas été calculé; or celui-ci est très élevé, c'est ce qu'on nous a dit en commission. De plus, il modifierait considérablement le rôle de l'Etat, mettant en péril un organe qui vient d'être créé, à savoir l'Inspection paritaire des entreprises, et le CSME, lesquels fonctionnent à satisfaction.

Contrairement à ce qu'a soutenu Mme Haller... Bon, il y a une part de vérité: certes, M. Montfort, directeur de l'OCSTAT, souhaiterait disposer d'un système pour mesurer l'évolution des salaires, mais il n'est pas du tout favorable à ce projet de loi qui ne représente pas la bonne méthode à son sens. Le REG, je le répète, est simplement un outil d'information. Pour le PLR, Mesdames et Messieurs, ce sera non à une nouvelle police des entreprises; y en a marre, laissez travailler les entreprises, laissons-les travailler et refusons ce projet de loi...

Une voix. Très bien !

M. Jacques Béné. ...ainsi que l'amendement qui sera proposé par la minorité de ce parlement. Je vous remercie. (Applaudissements.)

Mme Ana Roch (MCG). Le REG, c'est-à-dire le répertoire des entreprises du canton de Genève, est un registre qui donne des informations. L'Etat n'a pas à s'immiscer dans l'activité des entreprises privées, on l'a souligné, celles-ci doivent pouvoir travailler de manière sereine. Nous subissons déjà, je pense qu'aucun entrepreneur ici ne me contredira, une charge administrative élevée: il y a des formulaires sur les salaires et d'autres documents à remplir pour l'office cantonal de la statistique, les différents décomptes liés aux employés, les commissions paritaires, les conventions collectives... Nous subissons déjà des charges très importantes, les PME le savent et le dénoncent. On ne va pas en rajouter ! L'OCIRT et les syndicats effectuent leur travail de contrôle en cas de problème en lien avec les salaires, on ne va pas s'immiscer dans la bonne marche des sociétés. Encore une fois, les entrepreneurs ne peuvent pas se consacrer uniquement aux tâches administratives, ils doivent pouvoir travailler de manière sereine, et ce n'est pas possible avec ce projet de loi. Pour ces raisons, le MCG le refusera ainsi que la demande d'amendement. Merci.

M. Thomas Wenger (S). Mesdames les députées, Messieurs les députés, comme il a été dit, ce projet de loi vise à compléter le répertoire des entreprises du canton de Genève avec un certain nombre d'informations sur les employés. On parle des données somme toute assez ordinaires que sont le nombre, l'âge, le sexe, la nationalité et le domicile, mais également le taux d'activité et le salaire; ajoutez à cela l'annonce, dans un délai de trente jours, de tout licenciement avec les motifs et le salaire de la personne licenciée, ainsi que de tout nouvel engagement avec le montant du revenu également.

Toutes ces informations sont indispensables, Mesdames et Messieurs: indispensables pour le Conseil de surveillance du marché de l'emploi, indispensables pour l'Observatoire genevois du marché du travail qui bénéficiera ainsi d'une vraie vision du marché de l'emploi - salaires, engagements, licenciements - indispensables pour l'Inspection paritaire des entreprises qui réalise un travail très important aux côtés de l'OCIRT, indispensables pour les différentes commissions paritaires.

Il ne s'agit pas, comme on a pu l'entendre, de créer un monstre bureaucratique ou une police de l'Etat qui viendrait fouiner dans les entreprises; non, ces données sont d'ores et déjà en possession des sociétés qui les communiquent au cas par cas à différentes institutions, que ce soit à l'office cantonal de l'emploi, à l'OCIRT, à l'administration fiscale ou aux caisses de compensation. L'idée, c'est de récolter l'ensemble de ces renseignements afin d'obtenir, comme je viens de le dire, une véritable cartographie de la situation. Aujourd'hui, Mesdames et Messieurs, avec les avancées technologiques et les différents outils numériques, ne me dites pas que transmettre des données poserait un problème fondamental aux entreprises !

La rapporteure de minorité, Mme Haller, l'a souligné: aujourd'hui, l'OCIRT et l'IPE ne disposent pas de suffisamment de ressources pour contrôler les salaires et les conditions de travail. Ainsi, par manque d'information, ces organismes sont amenés à effectuer des vérifications à l'aveugle. Ce n'est vraiment pas productif, surtout en ce qui concerne des entreprises qui sont parfaitement en règle et qui doivent quand même passer un temps conséquent à fournir l'ensemble des documents dont ont besoin l'OCIRT ou l'IPE, tout ça en raison du manque d'information à la base. Compléter le répertoire est extrêmement important, cela permettra de mener un travail beaucoup plus rationnel et productif.

Vous savez, Mesdames et Messieurs, qu'il y a encore de nombreux abus aujourd'hui s'agissant des conditions de travail, des salaires, des licenciements, notamment dans les domaines de la restauration, de l'hôtellerie, de la construction et du nettoyage. Il est essentiel que nous puissions mieux contrôler le marché du travail, autant pour les salariés que pour les entreprises. N'oublions pas que lutter contre la sous-enchère salariale, c'est également lutter contre la concurrence déloyale menée par quelques compagnies qui jouent le rôle de brebis galeuses. Il s'agit ici d'un projet «win-win», comme on dit en anglais - «gagnant-gagnant» en français - à la fois pour les employeurs et pour les employés. Merci beaucoup.

M. Jacques Blondin (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi demande, sous couvert de relevés statistiques plus fiables et actuels ainsi que d'une lutte accrue contre la sous-enchère salariale, que les entreprises communiquent un certain nombre d'informations, ce qui ressemble fâcheusement à du flicage: les sociétés sont perçues comme des fraudeuses en puissance à qui il convient d'exiger des comptes, c'est malheureux. Le répertoire des entreprises deviendrait ainsi un registre des travailleurs, ce qui n'est plus du tout la même chose. Cela pose des problèmes, il faudrait fournir toutes les informations sur les politiques salariales et les licenciements, et je ne parle même pas de la confidentialité - je pense que l'amendement évoqué a été fait dans ce sens.

Je me plais à relever que quand différentes personnes lisent un rapport, elles n'en tirent pas forcément les mêmes conclusions. Pour ma part, en effet, j'avais cru comprendre à la lecture du rapport que le directeur de l'OCSTAT jugeait le projet certes intéressant, mais que les obstacles à la collecte des informations étaient trop importants et que, par conséquent, il donnait un préavis négatif.

De l'avis de nombreux auditionnés, les registres actuels sont suffisants, une couche de bureaucratie supplémentaire serait disproportionnée. Inutile d'en rajouter, car pour les entreprises et les PME, les sollicitations sont déjà nombreuses en matière de recensements et requêtes diverses: OCSTAT, OCIRT, OFS, enquêtes conjoncturelles, COF et j'en passe. Pour toutes ces raisons, le parti démocrate-chrétien vous invite à refuser ce projet de loi. Merci.

Mme Jocelyne Haller (EAG), rapporteuse de minorité. Monsieur le président, vous voudrez bien transmettre à M. Béné que je trouve quelque peu particulier de faire passer les syndicats pour des bellicistes forcenés et les milieux patronaux pour de doux émissaires de la paix. Nous savons très bien que sur le marché du travail, la situation n'est pas aussi binaire. Quand il le faut, les deux parties parviennent à se mettre d'accord, ainsi qu'elles l'ont fait pour instituer l'Inspection paritaire des entreprises, organe qui aurait justement besoin d'un instrument comme celui-ci pour mieux faire son travail, tout comme l'OCIRT.

En fait, ce qu'il serait intéressant de savoir, c'est ce qu'il y a à cacher. Toutes ces données sont disponibles, alors qu'on ne vienne pas nous dire que les rassembler représenterait un travail astronomique. Elles existent, les employeurs en disposent déjà ! Alors, qu'y a-t-il à cacher ? Cette crainte du flicage est pour le moins étonnante. La vraie question qui se pose est la suivante: voulons-nous réellement lutter contre la sous-enchère salariale et la dérégulation du travail ? Parce que c'est de ça qu'il s'agit, de se doter d'un meilleur outil de contrôle et de surveillance des entreprises pour mieux cibler le travail de l'OCIRT et de l'IPE.

Pour finir, M. Blondin évoquait la position de l'OCSTAT vis-à-vis de ce nouvel outil; je le remercie d'avoir admis qu'il s'agissait bien d'un préavis positif, le directeur ayant relevé qu'aujourd'hui déjà, les entreprises rechignent à fournir les éléments nécessaires à l'établissement de l'enquête suisse sur la structure des salaires. Le problème est là, c'est celui de la résistance des milieux patronaux à donner des indications indispensables au canton, à la fois pour suivre l'activité économique, mais également pour protéger les droits des travailleurs qui, vous voudrez bien nous le concéder, Mesdames et Messieurs, constituent un élément fondamental de la cohésion sociale. Je vous remercie de votre attention et surtout de voter l'amendement, puis d'accepter ce projet de loi.

M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de majorité. La question que pose ce projet de loi est fondamentale: faut-il collecter des données supplémentaires afin que l'Etat contrôle et planifie davantage ou faut-il laisser une marge de manoeuvre à l'économie de marché ? Dans ce sens, le projet de loi pose une question vraiment essentielle.

J'aimerais ajouter deux choses à ce sujet. Nous avons auditionné la responsable de l'office cantonal de l'inspection et des relations du travail, qui a clairement dit que la collecte de toutes ces informations était peu opportune - cela figure à la page 7 du rapport. Toujours selon cette personne, le coût et le travail à réaliser seraient excessifs, et il faudrait modifier complètement l'actuelle organisation du répertoire des entreprises, notamment en prévoyant un nouveau système informatique.

Au final, souhaitons-nous vraiment que notre Etat contrôle et planifie absolument tout ? La majorité ne veut pas de ce projet cher et inutile, elle ne veut surtout pas affaiblir notre partenariat social. Pour ces raisons, Mesdames et Messieurs, je vous recommande vivement de refuser ce projet de loi. Merci.

M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi a été déposé dans un contexte d'interrogations légitimes quant à la pertinence de l'enquête suisse sur la structure des salaires. En effet, malgré les réformes mises en place, nous constatons que cette étude ne permet que très partiellement d'observer l'évolution des politiques salariales en Suisse, car elle est d'ordre structurel, et non conjoncturel. A cet égard, nous comprenons que certains milieux s'en inquiètent. Cette enquête fournit suffisamment d'éléments pour établir un calculateur des salaires, mais peu de données sur les tendances actuelles. En matière de licenciements, par exemple, nous ne disposons d'aucune information, si ce n'est en cas de licenciements collectifs, donc là encore, nous comprenons qu'on cherche à obtenir davantage de renseignements.

Cependant, ce projet de loi introduirait à Genève ce qui n'existe nulle part ailleurs; ce n'est pas encore une raison pour y renoncer, mais cela pourrait être perçu comme une genevoiserie par l'ensemble des cantons suisses. Les informations sollicitées sont extrêmement détaillées, ce qui exigerait un travail conséquent. On demande le nombre de collaborateurs, ce qui en soi est encore faisable, ainsi que l'âge, le sexe, la nationalité, le domicile, la qualification, le taux d'activité et le salaire de chaque employé; mais il faut encore annoncer chaque licenciement, en indiquer les motifs, le salaire de la personne remerciée, puis communiquer l'engagement de celle venant en remplacement de même que le montant de son revenu, ceci afin que l'on puisse constater si on licencie quelqu'un pour engager quelqu'un d'autre meilleur marché.

Naturellement, tout cela me met un peu l'eau à la bouche, puisque cela m'intéresse de connaître les politiques salariales menées dans le canton de Genève, mais soyons raisonnables et pragmatiques. Ce projet de loi part sans doute d'une bonne intention, mais il va largement trop loin et créerait une véritable usine à gaz: il faudrait embaucher de nombreux fonctionnaires supplémentaires pour récolter ces informations, sans que l'on sache exactement ce que l'on en fera.

Cela étant, nous ne pouvons pas rester dans la situation actuelle. A titre informatif, sachez qu'au sein de mon département, puisque nous disposons tout de même d'un certain nombre d'offices qui ont accès à des informations particulièrement sensibles dans le domaine des politiques salariales et économiques de nos entreprises, nous travaillons à la mise en place de structures de récolte d'informations, que ce soit par l'office cantonal de la population et des migrations, le service de la main-d'oeuvre étrangère ou encore l'office cantonal de l'emploi. Nous obtenons déjà des renseignements intéressants, et je suis certain que le CSME en fera bon usage. C'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs, le Conseil d'Etat vous demande de ne pas soutenir ce projet de loi.

Le président. Merci bien. Nous passons au vote d'entrée en matière.

Mis aux voix, le projet de loi 12133 est rejeté en premier débat par 48 non contre 38 oui.

PL 12234-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat accordant des indemnités et des aides financières aux établissements médico-sociaux (EMS) accueillant des personnes âgées d'un montant total de 547 825 667 F pour les exercices 2018-2021
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session IX des 28 février et 1er mars 2019.
Rapport de M. Alberto Velasco (S)

Le président. Le point suivant est classé en catégorie II, cinquante minutes. Il s'agit du PL 12234-A. Le rapport est de M. Alberto Velasco... Monsieur Velasco, normalement les rapporteurs s'installent à la tribune. (Remarque.) Ah, vous ne prenez pas la parole ? Bien, alors si personne d'autre ne souhaite s'exprimer, nous procédons directement au vote.

Mis aux voix, le projet de loi 12234 est adopté en premier débat par 68 oui contre 12 non.

Le projet de loi 12234 est adopté article par article en deuxième débat.

Mise aux voix, la loi 12234 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 84 oui et 1 abstention.

Loi 12234

PL 12262-A
Rapport de la commission des affaires sociales chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi en matière de chômage (LMC) (J 2 20) (allocation cantonale complémentaire - allocation-pont)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session IX des 28 février et 1er mars 2019.
Rapport de majorité de Mme Jocelyne Haller (EAG)
Rapport de minorité de Mme Ana Roch (MCG)
M 2440-A
Rapport de la commission des affaires sociales chargée d'étudier la proposition de motion de Mmes et MM. Frédérique Perler, Guillaume Käser, Boris Calame, François Lefort, Yves de Matteis, Delphine Klopfenstein Broggini, Mathias Buschbeck, Jocelyne Haller, Claire Martenot, Olivier Baud, Christian Frey, Roger Deneys, Nicole Valiquer Grecuccio pour la création d'une rente-pont en faveur de personnes proches de l'âge de la retraite ayant épuisé leur droit aux indemnités de chômage
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session IX des 28 février et 1er mars 2019.
Rapport de majorité de Mme Jocelyne Haller (EAG)
Rapport de minorité de Mme Ana Roch (MCG)

Premier débat

Le président. Nous abordons à présent le PL 12262-A et la M 2440-A en catégorie II, quarante minutes. La parole est à Mme Jocelyne Haller, rapporteuse de majorité.

Mme Jocelyne Haller (EAG), rapporteuse de majorité. Je vous remercie, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, l'examen d'un projet de rente-pont ou d'allocation-pont à Genève est une première particulièrement attendue par de nombreux milieux. Le PL 12262 a été traité en même temps que la M 2440 de Mme Perler, qui demande l'instauration d'une rente-pont sur le modèle vaudois. Il faut préciser que ces travaux ont largement devancé le processus parlementaire concernant le projet du Conseil fédéral relatif à l'introduction d'une rente-pont pour les chômeurs en fin de droit dès l'âge de 60 ans, allouée aux ayants droit jusqu'à concurrence du montant correspondant aux prestations complémentaires fédérales. A noter que le Conseil fédéral a décidé d'aller de l'avant à ce propos et que les sénateurs devraient se prononcer en décembre prochain sur cet objet. Il apparaît dès lors que l'allocation-pont telle que prévue par le PL 12262 fait pâle figure face au projet du Conseil fédéral ou au PL 12567, déposé fin août dernier, instaurant une rente-pont à Genève pour les demandeurs d'emploi dès 57 ans révolus.

S'agissant des deux textes parlementaires dont nous débattons aujourd'hui, j'évoquerai tout d'abord le contenu de la M 2440, qui a devancé de quelques mois le PL 12262 du Conseil d'Etat. Cette dernière invite très clairement le gouvernement à élaborer un projet de rente-pont s'inspirant du système vaudois pour les chômeuses et chômeurs en fin de droit proches de l'âge de la retraite légale. Cette motion a été soutenue par les partis de l'Alternative et le PDC, tandis que le projet de loi a pour sa part été rejeté avec un score assez sévère, puisque hormis le MCG et l'UDC, tous les groupes ont refusé d'entrer en matière sur cet objet. Il faut relever à cet égard que tant l'UAPG que les syndicats se sont inscrits en faux contre ce projet de loi, qui prévoit deux mesures phares.

La première institue une allocation cantonale complémentaire de chômage intitulée A50+, une disposition qui devrait, dans l'esprit de ses instigateurs, favoriser l'engagement des chômeurs âgés de plus de 50 ans au bénéfice d'une décision d'octroi d'une allocation d'initiation au travail - AIT. Cette mesure permettrait d'allonger de six mois l'AIT, dont la durée passerait ainsi de douze à dix-huit mois; il s'agit concrètement d'une participation de six mois supplémentaires au salaire du chômeur de l'ordre de 40%. Je rappelle toutefois que pour qu'un chômeur puisse bénéficier d'une AIT, il faut qu'il ait été formellement engagé par une entreprise. Dans ces conditions, il paraît particulièrement inadapté de prolonger ladite allocation. La majorité n'a pas été convaincue par cette proposition, estimant que la durée actuelle de l'AIT - soit douze mois - suffit amplement pour déterminer si un collaborateur fait l'affaire ou non. Elle considère que ces six mois supplémentaires sont artificiels et inutiles; ils ne sont pas dans l'intérêt de la personne en emploi et risquent en outre de provoquer un effet d'aubaine pour les employeurs.

La seconde mesure, quant à elle, concerne l'institution d'une allocation-pont pour les chômeurs ayant épuisé leur droit à l'assurance-chômage. Cette allocation, perceptible sur les trente-six mois qui précèdent l'âge légal de la retraite, aurait une durée totale de dix-huit mois au maximum. (Le président agite la cloche pour indiquer que l'oratrice parle sur le temps du groupe.) Elle serait calculée sur la base de la dernière indemnité journalière de chômage et ne serait absolument pas soumise à des conditions liées au revenu. Si le projet ne fixe pas de plancher pour cette allocation, puisque son montant dépend des dernières indemnités de chômage perçues, qui pourraient être très modestes, il définit en revanche un plafond de 4000 francs, selon les indications du département.

Cette allocation présente une autre caractéristique: le chômeur ou la chômeuse de 62 ou 63 ans devra poursuivre ses recherches d'emploi et en fournir la preuve, puisque cette nouvelle prestation repose sur le postulat que même si cela peut sembler difficile, il reste toujours possible de trouver du travail après 62 ou 63 ans.

Quant à la non-couverture de la totalité des trente-six mois, elle est destinée à inciter les personnes à continuer de chercher un emploi. Elle vise également - et c'est quand même paradoxal - à éviter d'éventuels abus commis par des employeurs qui seraient tentés de licencier des collaborateurs à trois ans de la retraite sous prétexte qu'ils pourraient bénéficier de cette allocation-pont. J'en profite pour relever que ce ne sont pas des bellicistes forcenés qui ont établi cette cautèle, mais bien le Conseil d'Etat.

Les dix-huit mois d'allocation ne seraient pas forcément versés de façon linéaire: ils pourraient être modulés, de sorte qu'un chômeur ou une chômeuse en fin de droit pourrait percevoir pendant trente-six mois la moitié de ses dernières indemnités.

Cette mesure vise à valoriser le travail en incitant les personnes concernées à rester sur le marché de l'emploi. D'après les indications fournies par le département, elle représenterait une somme relativement modeste, soit environ six millions, car elle ne toucherait qu'un nombre extrêmement limité de potentiels bénéficiaires. Selon le département, elle serait d'autant plus envisageable que des économies ont d'ores et déjà été réalisées sur l'allocation de retour en emploi - ARE - dont la durée a été diminuée.

Quelques péripéties ont émaillé les travaux de la commission: à un moment donné, l'allocation-pont a été supprimée du projet de loi - ce qui le vidait quasiment de la moitié de sa substance - puis réintégrée, pour finalement être rejetée avec l'ensemble du texte.

Une autre particularité mérite quand même d'être relevée, à savoir l'intégration par le département d'un amendement qui introduirait une brèche importante dans le principe de subsidiarité et créerait un précédent non négligeable qui, outre le fait qu'il ouvrirait la porte à une inégalité de traitement, ébranlerait drastiquement le principe de l'aide sociale. En effet, il faut le rappeler, certaines personnes n'ont pas le choix et doivent sortir de l'aide sociale à tout prix, quitte à accepter un travail pénible et sous-payé, alors qu'avec l'allocation-pont les bénéficiaires pourraient soudain choisir entre ces deux régimes celui qui leur conviendrait le mieux. Il a été dit que cette allocation viserait à faire sortir un certain nombre de personnes de l'aide sociale, or à considérer le dernier montant des indemnités de chômage, on peut supposer qu'il pourrait y avoir un cumul des deux prestations - allocation-pont et aide sociale - pour ceux qui se trouvent au-dessous des normes de l'aide sociale.

S'il fallait retenir un point saillant des travaux sur la M 2440 et le PL 12262, ce serait indubitablement la préoccupation - partagée par tous les membres de la commission - relative à la question du chômage, en particulier celui qui touche les travailleurs seniors, et la nécessité de leur offrir une alternative autre que l'aide sociale. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.)

Enfin, les experts - au rang desquels on peut sans conteste ranger la Conférence suisse des institutions d'action sociale - estiment que les prémisses de ce projet de loi et de cette allocation devraient être reconsidérées, notamment en ce qui concerne la durée des prestations, leur montant et l'âge d'entrée en matière.

Pour toutes ces raisons, la majorité de la commission vous invite à refuser le PL 12262 et à soutenir en revanche la M 2440. Je vous remercie de votre attention.

Mme Ana Roch (MCG), rapporteuse de minorité. Les motionnaires invitaient le Conseil d'Etat à élaborer un projet de rente-pont pour les demandeurs d'emploi en fin de droit proches de l'âge de la retraite. Le gouvernement a répondu à cette requête par le PL 12262, qui introduit une allocation complémentaire et un prolongement de six mois pour l'AIT.

La gauche a été très réticente à l'égard de l'allocation-pont, car elle estime que sa limitation à dix-huit mois la rend insuffisante et, selon elle, incapable de garantir une prestation jusqu'à la retraite. Quant à la droite, elle a émis des doutes concernant l'efficacité de ces prestations en invoquant l'argument selon lequel elles seraient coûteuses sans garantir de résultats. Si le Conseil d'Etat a essayé de tenir compte de ces critiques dans son projet, il n'a pu trouver de meilleure solution. Etant donné l'importance du sujet, il a préféré proposer une allocation rente-pont afin que nous puissions apporter un soutien plutôt que d'abandonner le projet de loi.

En effet, augmenter l'allocation rente-pont - et donc sa portée ainsi que son coût - par l'institution d'une allocation à hauteur de 4000 francs par mois sur trente-six mois aurait des effets pervers, évoqués tout au long des séances de commission. Cela induirait une situation proche de celle de la France: les départements de Rhône-Alpes et d'Auvergne, par exemple, ont un nombre considérable d'allocataires pour des montants tout aussi importants, et seuls 15% des personnes de plus de 60 ans travaillent dans la région. Ces prestations étant sans limitation dans le temps, cette catégorie de la population n'a aucun intérêt à chercher un emploi. C'est bien une situation que nous ne désirons en aucun cas voir à Genève ! Les seniors ne doivent pas croire qu'ils sont une cause perdue sur le marché de l'emploi. La solution qui nous est proposée est respectueuse des travailleurs, car elle représente une mesure d'insertion et non d'aide sociale.

La gauche persévère dans une politique de terre brûlée en refusant ces mesures, bien qu'elles puissent être adaptées tout au long de leur application pour répondre au mieux aux besoins du terrain. Elle estime en effet, contre toute évidence, que ce projet de loi n'est pas abouti et que les allocations constituent un cadeau fait aux entreprises.

La minorité souligne qu'une demi-mesure est tout de même une mesure, bien qu'imparfaite. Donnons à ce dispositif innovant sa chance afin de voir si les entreprises sont preneuses des six mois supplémentaires pour l'allocation. Il convient en outre de mentionner que des dispositions légales claires prévoient un bilan après deux ans de mise en oeuvre. Le travail parallèle de l'office de l'emploi auprès des employeurs reste nécessaire, mais deux ans suffisent largement pour évaluer l'efficacité de la mesure.

Relevons encore que ce dispositif est très intéressant, notamment pour les personnes en reconversion professionnelle, car il permet d'intervenir en douceur. Il ne faut pas considérer la rente-pont comme une demi-mesure ! Rappelons-nous également qu'elle est très attendue par la population concernée, qui souffre de la situation actuelle.

Certains souhaiteraient scinder le projet de loi en deux, mais cela demanderait d'en retirer un certain nombre d'articles et de recommencer le processus. Le but étant de proposer plusieurs mesures non seulement pour combler un manque à gagner, mais aussi pour favoriser l'employabilité des 50 ans et plus. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) La minorité pense que le principe visant à accorder une allocation d'une durée de dix-huit mois au lieu de trente-six mois permet de préserver l'autonomie et la responsabilité individuelle des chômeurs. Ajoutons que les six mois supplémentaires par rapport aux douze mois des AIT de la Confédération ont été proposés pour que les employeurs ne fassent pas un acte de charité lorsqu'ils décident d'embaucher une personne éloignée du marché du travail qui ne serait pas à la hauteur de leurs attentes. Il ne s'agira pas d'une subvention aux entreprises, car des contrôles seront mis en place afin d'éviter de potentielles dérives.

Au vu de ce qui précède, le MCG demande que ce projet de loi soit renvoyé à la commission de l'économie pour qu'il puisse éventuellement être modifié puis accepté. Merci.

Le président. Merci bien. Je passe la parole à la rapporteuse de majorité sur cette demande de renvoi en commission.

Mme Jocelyne Haller (EAG), rapporteuse de majorité. Je vous remercie, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, ce renvoi n'a aucun sens ! C'est la commission des affaires sociales qui a réalisé les travaux sur ces objets, et il s'agit de mesures non pas économiques, mais de politique sociale. Je rappelle que c'est vous-mêmes, dans ce parlement, qui avez voulu que ce soit la LIASI qui s'applique pour les chômeurs en fin de droit plutôt qu'un autre dispositif...

Le président. Je vous remercie, Madame Haller !

Mme Jocelyne Haller. Nous refuserons donc ce renvoi en commission.

Le président. Merci bien. Nous allons maintenant nous prononcer sur la demande de Mme Ana Roch.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12262 et la proposition de motion 2440 à la commission de l'économie est rejeté par 37 non contre 35 oui.

Le président. Nous continuons le débat et je passe la parole à M. Murat Julian Alder.

M. Murat Julian Alder (PLR). Merci beaucoup, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, comme le disait l'ancien président du Conseil d'Etat François Longchamp, «une politique sociale ne se mesure pas au nombre de personnes qui touchent une prestation sociale mais, au contraire, au nombre de celles qui n'en ont plus besoin». Nous ne sommes naturellement pas insensibles au sort des personnes qui ne demandent qu'à se réinsérer sur le marché de l'emploi, et c'est notre rôle de créer les conditions favorables à cette fin, mais instaurer de nouvelles allocations, de nouveaux arrosoirs à prestations sociales, comme nous savons si bien le faire dans notre canton, n'est pas une solution. C'est le lieu de rappeler que l'Etat social genevois est le plus obèse de Suisse, sans oublier la propension de la Ville de Genève en particulier à s'ériger en Etat socialiste dans l'Etat social. (Remarque.)

Le conseiller fédéral Alain Berset a récemment présenté un projet de rente-pont fédéral qui aurait vocation à déployer des effets uniformément dans toute la Suisse. Il est dès lors exclu pour notre groupe de mettre en place des prestations sociales supplémentaires, lesquelles viendraient s'ajouter à celles que le législateur fédéral aura élaborées. Voilà pourquoi nous refuserons ce projet de loi et cette motion. Je vous remercie de votre attention.

M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, à mon sens on est face à un projet de loi qui apporte un progrès, et pourtant aussi bien la droite que la gauche de ce parlement le refusent. On a de la peine à comprendre cette attitude ! Je crois que des deux côtés on veut maximiser les choses. Ce n'est pas assez pour les uns, tandis que c'est trop pour les autres. Je pense pour ma part qu'il faut justement prendre un certain nombre de mesures, dans un contexte où certains ici - notamment les jeunes PLR - désirent augmenter l'âge de la retraite, alors que les gens perdent leur emploi bien avant. (Commentaires. Brouhaha.) C'est totalement inconsistant !

Mesdames et Messieurs, le Conseil fédéral a effectivement saisi cette opportunité et souhaite précisément mettre le turbo, comme il le dit, s'agissant de l'introduction d'une rente-pont. En conséquence, la meilleure chose à faire consiste à renvoyer ces deux textes en commission - et j'en refais la demande - pour que l'on réétudie tout ça à l'aune du projet fédéral et de ce que Genève peut faire. Je redemande donc formellement le renvoi aussi bien du projet de loi que de la motion à la commission de l'économie. Merci.

Des voix. De l'économie ? (Commentaires.)

Une voix.  Ça a déjà été demandé !

M. Daniel Sormanni. Oui, je l'ai dit ! Deux fois !

Le président. Monsieur Sormanni, vous êtes sûr que vous voulez renvoyer ces objets à la commission de l'économie ?

M. Daniel Sormanni. Oui !

Le président. D'accord. Je passe la parole à Mme Haller sur cette demande de renvoi en commission.

Mme Jocelyne Haller (EAG), rapporteuse de majorité. Comme je l'ai dit tout à l'heure, c'est une mauvaise idée, qui n'a aucun sens ! Il s'agit simplement d'une tactique permettant de voir si plus de députés sont présents dans la salle. Je refuse donc le renvoi en commission.

Le président. Bien. Je vais mettre une nouvelle fois aux voix cette demande de renvoi en commission.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12262 et la proposition de motion 2440 à la commission de l'économie est rejeté par 46 non contre 42 oui.

Le président. Le débat se poursuit et je donne la parole à Mme Léna Strasser.

Mme Léna Strasser (S). Merci, Monsieur le président. Le groupe socialiste en est convaincu, le fait qu'à 50 ans on soit aujourd'hui considéré comme trop âgé par de nombreux employeurs doit être une source de préoccupation. Il est également convaincu qu'il faut des mesures pour endiguer cette problématique. Mais les responsables de cette exclusion des plus de 50 ans du marché du travail ne sont pas les candidats et candidates à l'emploi qui, dans leur écrasante majorité - malgré ce qu'on a pu entendre en commission - ne souhaitent qu'une chose: retourner sur le marché du travail jusqu'à leur retraite. En effet, l'emploi, en plus d'amener un salaire, constitue une reconnaissance et permet de s'intégrer dans la société. Etre exclu du monde du travail après 50 ans représente donc plus qu'un manque à gagner financier: c'est une identité professionnelle qui est remise en cause.

Le projet de loi proposé par le Conseil d'Etat est un dragon à deux têtes: la première, l'allocation cantonale complémentaire, a été surnommée «oreiller de paresse pour les entreprises» par des commissaires assis bien plus à droite que moi, c'est dire si la mesure n'atteint pas sa cible. La deuxième, l'allocation-pont, porte mal son nom dans ce texte. Elle y est réduite à un rondin de bois glissant et trop court pour rejoindre l'autre rive: elle soutient les premiers pas des personnes ayant épuisé leur droit au chômage dans les trois ans précédant la retraite, mais les laisse en plan au milieu de la traversée si leur recherche n'aboutit pas. Ils et elles ont besoin d'un réel soutien leur permettant de continuer à chercher du travail dans des conditions dignes, non d'une stigmatisation supplémentaire.

Vous l'aurez compris, ce projet de loi nous semble une fausse réponse. Nous le refuserons donc, tout en soutenant la M 2440 ainsi que le projet de loi déposé par les syndicats et l'Alternative. Merci. (Applaudissements.)

Mme Frédérique Perler (Ve). Les interventions des rapporteuses de majorité et de minorité étaient très exhaustives, je ne vais donc pas y revenir. J'aimerais simplement relever que si l'on souhaite mettre en place une véritable politique sociale, Monsieur le président, il existe deux moyens de le faire: soit on présente des mesures pour pouvoir dire qu'on agit, soit on propose un dispositif cohérent et viable. En l'occurrence, le dispositif qui nous est soumis ici ne l'est pas ! On nous propose en effet une demi-rente-pont qui nous laisse un sentiment d'inachevé, puisque à la moitié de ces fameux trente-six mois - soit après dix-huit mois - il n'y a plus moyen d'atteindre l'autre rive pour les chômeurs en fin de droit. Ceux-ci devront donc, après avoir fait plouf, nager très péniblement pour rejoindre la rive opposée. Il n'est pas correct de faire de telles propositions ! Cela dit, je ne vais pas m'étendre sur cette mesure, car celles et ceux qui ont lu le projet de budget 2020 auront observé qu'elle est abandonnée au profit du dispositif à l'étude au niveau fédéral. Ce dernier souffre certes de quelques défauts, mais il n'y a pas lieu d'en débattre ici.

S'agissant de la proposition consistant à prolonger de six mois le versement d'une part du salaire, eh bien je suis vraiment navrée, chers collègues, mais si douze mois ne suffisent pas pour évaluer la capacité d'un travailleur ou d'une travailleuse, je ne vois pas en quoi le fait d'ajouter six mois entraînera une plus grande efficacité. Nous vous invitons donc à refuser ce projet de loi et à accepter naturellement la motion déposée par le groupe des Verts. Celle-ci garde effectivement toute sa pertinence, puisqu'elle va aussi permettre d'appuyer le projet de loi de la gauche actuellement à l'étude à la commission des affaires sociales, qui lui représente notre vision d'une rente-pont. Je rappelle du reste qu'elle est nécessaire ! Si le Conseil fédéral s'est activé sur cette question, c'est bien qu'il considère qu'il s'agit d'une préoccupation d'actualité - il la présente d'ailleurs ainsi - qui vise à combler une lacune dans notre système de politique sociale. Voilà qui démontre bien l'urgence de mettre en place un tel dispositif, chers collègues ! On ne va toutefois pas attendre cinq ou six ans que les Chambres fédérales terminent leur travail: notre proposition est déjà en cours d'examen.

Pour toutes ces raisons, je vous invite à rejeter sèchement ce projet de loi et à adopter la motion signée par différents groupes, dont les Verts. Je vous remercie. (Applaudissements.)

Mme Patricia Bidaux (PDC). Mesdames les députées, Messieurs les députés, la gravité de la problématique du chômage des personnes de plus de 50 ans n'a à aucun moment été remise en question, et elle ne l'est pas plus aujourd'hui. Cela dit, le projet de loi tel que proposé - dont la commission des affaires sociales a longuement discuté - n'a pas convaincu le PDC. L'allocation cantonale complémentaire destinée aux chômeurs de plus de 50 ans au bénéfice d'une décision d'octroi d'une allocation d'initiation au travail permettrait certes de prolonger la durée de l'AIT de six mois, mais les situations exigent bien plus qu'une solution aussi simple que ces six mois supplémentaires. En conclusion, ce projet de loi n'est qu'une pâle réponse aux recommandations émises par la Conférence suisse des institutions d'action sociale en 2018, de sorte que le PDC comme la majorité de la commission le refuseront en l'état et vous invitent à faire de même.

S'agissant de la M 2440, tous les partis ont relevé que la question du chômage - en particulier celui qui touche les seniors - représentait une réelle préoccupation. Le PDC souhaite donc une prise en considération de cette problématique. La motion qui vous est proposée confirme la nécessité de trouver une solution genevoise qui constitue un vrai plus pour les seniors au chômage proches de la retraite.

Le Conseil fédéral - on en a parlé - a adopté le 30 octobre dernier le message et le projet de nouvelle loi fédérale sur les prestations transitoires pour les chômeurs âgés. Il s'agit donc bien d'une urgence, mais même si la Confédération est ouverte au projet susmentionné, sa réalisation au niveau fédéral demandera du temps. La M 2440 permettrait dès lors à Genève de prendre de l'avance, raison pour laquelle le PDC l'acceptera et vous remercie d'en faire autant.

Une voix. Très bien ! Bravo !

M. François Baertschi (MCG). On se trouve ici face à deux visions de la société. Il y a d'abord l'assistanat absolu de la gauche, cette conception du monde où chacun doit être assisté d'une manière ou d'une autre, où l'Etat est omniprésent, tout-puissant et partout. Cette approche, que la gauche défend, n'est pas celle du projet de loi. Il y a d'autre part la vision de la droite qui, elle, demande que l'on n'apporte absolument aucune amélioration dans le domaine social. Voilà la demande de la droite ! Quant à la rapporteure de majorité, elle me fait un peu penser à Beckett et son «En attendant Godot»: elle attend une hypothétique loi utopique, qui de toute manière ne trouvera pas de majorité dans ce parlement. Elle attend aussi des dispositions fédérales, qui arriveront quand elles arriveront, si par hasard elles arrivent un jour... Espérons, on peut toujours rêver !

On se trouve donc dans une situation où deux extrêmes s'autodétruisent par leur côté dogmatique - une droite irresponsable, une gauche qui l'est tout autant. C'est cet ensemble qui nous mène droit dans le mur, alors qu'actuellement il y a des personnes de plus de 50 ans qui souffrent, qui sont écartées du marché du travail, qui sont mises de côté et qu'il faut à tout prix intégrer. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Or ce projet de loi, même s'il n'est pas parfait - et personne n'a dit qu'il l'était - permet d'aller en partie dans la bonne direction. Heureusement, deux groupes parlementaires - le MCG et l'UDC - souhaitent se diriger vers un progrès, mais les autres groupes, que demandent-ils ? Ils restent dans des postures idéologiques et ne pensent pas du tout à la population ! Ils ne pensent pas du tout aux chômeurs en fin de droit, aux chômeurs de plus de 50 ans qui se trouvent dans des situations catastrophiques. Pensez à eux et votez ce projet de loi car, même s'il n'est pas parfait, il permet un progrès. Merci, Monsieur le président.

M. André Pfeffer (UDC). La situation du chômage est effectivement grave à Genève. D'après les données du SECO, le taux de chômage genevois se monte à 4,8%. Il s'agit quand même du taux le plus élevé de Suisse ! Cela dit, si l'on se base sur les critères européens, soit les mêmes critères qu'applique la France, notre taux de chômage atteint 11,8%. A titre de comparaison, le taux de chômage en France voisine est inférieur à celui que nous connaissons à Genève, dans la mesure où il s'élève seulement - enfin, c'est tout de même conséquent ! - à 6,9%, ce qui correspond pratiquement à un tiers de moins que chez nous. En plus de cela, notre canton compte 5000 chômeurs seniors, soit de 50 ans et plus, qui sortent du dispositif du chômage chaque année et dont une partie va à l'aide sociale.

La situation est donc grave et demande une réaction. Mais dans quel sens faut-il réagir ? Je rappelle qu'il existe effectivement la possibilité - c'est ce qui nous est proposé aujourd'hui - d'augmenter continuellement les aides et les subsides. On parle maintenant de rente-pont, etc. Mais on pourrait aussi opter pour la deuxième solution, qui consiste à agir sur le marché du travail. Pour sa part, l'UDC suggère plutôt d'étendre la préférence cantonale. Il faut savoir en effet qu'il se crée chaque année à Genève entre 8000 et 10 000 postes de travail, de sorte qu'il n'est pas normal, avec une économie aussi florissante et dynamique que la nôtre, que notre taux de chômage ne baisse pas - et surtout qu'il soit supérieur à celui de la France voisine. En conséquence, l'UDC propose plutôt de s'attaquer au marché de l'emploi et d'étendre la préférence cantonale de manière plus significative et plus efficace. Merci.

Une voix. Bravo !

Une autre voix. Oui, bravo !

M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous venons d'assister à une remarquable expression de ce que j'appellerais l'hypocrisie politique. Tout le monde constate le problème et reconnaît que nos demandeurs d'emploi de plus de 50 ans sont prétérités sur le marché du travail, mais on ne parvient pas à s'accorder sur la manière d'agir. Le seul vainqueur de ce débat, Mesdames et Messieurs, sera l'inertie. Quant aux seuls perdants, ce seront ces demandeurs d'emploi de plus de 50 ans, qui attendent que l'on fasse un pas. Le projet de loi déposé par le Conseil d'Etat n'est certes pas parfait, puisque nous pourrions faire davantage, comme toujours, mais il constitue un pas dans la bonne direction.

Ce projet se décline en deux variantes qui se complètent. La première, qui s'adresse aux plus de 50 ans, consiste à ajouter six mois de prestations cantonales aux douze mois d'allocation d'initiation au travail pris en charge par la Confédération. A cet égard, j'ai entendu dire - et cela sur les bancs de la gauche - que si un employeur n'arrivait pas à savoir au bout de douze mois si la personne engagée faisait l'affaire, il ne servait à rien de prolonger la mesure de six mois. Il faut rappeler que l'allocation d'initiation au travail n'est pas accordée par la Confédération dans le cadre de la loi sur l'assurance-chômage pour permettre à l'employeur d'apprécier l'adéquation au poste de la personne engagée: elle vise précisément à donner à cette dernière les moyens nécessaires pour se remettre à niveau, soit dans la profession qui était la sienne, soit dans le contexte d'une réorientation. En effet, le gros problème des chômeurs de plus de 50 ans, c'est que souvent ils n'ont pas bénéficié de formations continues; ils se retrouvent ainsi décalés par rapport aux besoins de l'économie et donc en concurrence avec des travailleurs plus jeunes, plus efficaces et sans doute meilleur marché. Il s'agit dès lors de leur donner les moyens d'être compétitifs sur ce marché du travail.

Ce que nous proposons ici, c'est de faire ensuite un point de situation afin de voir si ces six mois supplémentaires - par rapport aux douze mois qui ne coûtent pas un centime au canton - vont amener davantage d'employeurs à recourir à ces personnes. J'aurais du reste aimé entendre du côté des bancs de la droite que l'on encourage fermement nos entreprises à faire appel aux compétences locales des travailleurs de plus de 50 ans, parce qu'elles sont bien présentes. Le but étant de s'assurer que ces personnes, en dix-huit mois, puissent acquérir la rentabilité - puisque c'est de cela qu'il s'agit lorsqu'on dirige une société - et l'employabilité nécessaires.

Vous ne voulez pas de ces six mois supplémentaires, parce que vous considérez que c'est un cadeau inutile accordé à certaines entreprises. De l'autre côté, vous estimez qu'il est peut-être préférable de ne rien faire et que la responsabilité individuelle de chacun va suppléer aux difficultés du marché. Le résultat, c'est que nous n'allons effectivement rien faire, Mesdames et Messieurs ! Nous n'allons tout simplement rien faire. Voilà le message qui va sortir de ce parlement.

Pour ce qui est de la deuxième mesure résultant de ce projet de loi - à savoir l'allocation pour les personnes de plus de 60 ans qui sont à trois ans de l'âge de la retraite au moment où elles ont épuisé leurs prestations de chômage - elle vise à leur donner le moyen de trouver, le cas échéant, des emplois complémentaires afin d'atteindre dignement l'âge de la retraite, selon un planning qu'elles pourront organiser elles-mêmes. Pourquoi ces allocations sont-elles versées durant dix-huit mois et pas trente-six mois, nous demande la gauche ? Elle estime en effet que lorsqu'on est à trois ans de la retraite, il reste trente-six mois avant de l'atteindre, et qu'il faut donc que l'Etat assure une prise en charge pendant toute cette période. Nous considérons pour notre part que c'est un faux message ! D'ailleurs, il ne repose pas sur la réalité des chiffres, puisque selon les statistiques LAMDA-SECO des années 2014, 2015 et 2016 - soit celles dont nous disposons jusqu'ici - 75% des chômeurs de plus de 60 ans retrouvent un emploi avant d'avoir épuisé la totalité des prestations de chômage. Cela signifie, Mesdames et Messieurs, que l'on peut avoir plus de 60 ans et obtenir un travail. C'est le message que le Conseil d'Etat souhaite donner ! Il ne s'agit pas de dire - comme le font ceux qui ont déposé un projet de loi dans ce sens - que l'on est perdu pour la collectivité si l'on n'a pas retrouvé un emploi après 60 ans et qu'il faudrait donc accorder, sur le modèle vaudois, des prestations d'aide sociale «plus». Non, Mesdames et Messieurs ! Et vous, Mesdames et Messieurs de la droite, qui refusez cette proposition, vous ne faites qu'alimenter le projet de loi qui a été présenté par la gauche, précisément pour renvoyer ces gens à l'assistance sociale. C'est un faux message ! C'est un message de démission de notre société que nous ne pouvons pas cautionner. Le Conseil d'Etat, lui, considère que les personnes de plus de 60 ans ont indiscutablement des compétences et qu'elles doivent continuer à rechercher un travail - de manière moins assidue, certes, puisque la difficulté est croissante. Baisser les bras pour ces demandeurs d'emploi, c'est reconnaître notre impuissance !

Mesdames et Messieurs, j'ai bien compris dans quel sens allaient ces débats. Pour des raisons différentes, vous estimez qu'il ne faut pas agir de cette façon. Certains ne proposent rien de plus, du côté de la droite, tandis que d'autres, du côté de la gauche, suggèrent tout simplement de passer par l'assistance sociale. Ce n'est pas l'image de la société que souhaite le Conseil d'Etat, et il déplore qu'il en soit ainsi. Je vous remercie. (Applaudissements.)

Une voix. Bravo !

Une autre voix. Très bien !

Le président. Merci. Mesdames et Messieurs les députés, je vais mettre aux voix l'entrée en matière sur le PL 12262.

Mis aux voix, le projet de loi 12262 est rejeté en premier débat par 72 non contre 18 oui.

Le président. Nous allons maintenant nous prononcer sur la M 2440.

Mise aux voix, la motion 2440 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 51 oui contre 41 non.

Motion 2440

M 2286-A
Rapport de la commission de l'économie chargée d'étudier la proposition de motion de Mmes et MM. Sophie Forster Carbonnier, François Lefort, Boris Calame, Yves de Matteis, Jean-Michel Bugnion, Frédérique Perler, Jean-Marc Guinchard, Bertrand Buchs, Anne Marie von Arx-Vernon, Jean-Luc Forni, Béatrice Hirsch pour plus de proportionnalité et d'inclusion dans la directive sur la préférence sociale en matière d'emploi
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session III des 29 et 30 août 2019.
Rapport de majorité de M. Edouard Cuendet (PLR)
Rapport de première minorité de M. Sandro Pistis (MCG)
Rapport de deuxième minorité de M. André Pfeffer (UDC)

Débat

Le président. L'objet suivant de l'ordre du jour est classé en catégorie II, quarante minutes de temps de parole. Je passe la parole à M. Edouard Cuendet.

M. Edouard Cuendet (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Nous parlons ici d'un sujet important, un sujet que j'apprécie tout particulièrement: on parle du merveilleux monde associatif, social, solidaire et, surtout, subventionné ! Pour les signataires de ce projet, on vit dans un monde où règne encore une pureté originelle et dans lequel les vulgaires contingences financières et de gouvernance ne doivent pas s'appliquer, contrairement à ce qui se passe pour d'autres structures ploutocratiques. Il s'agit ici de l'application dans ce merveilleux monde social subventionné et solidaire de la directive dite de préférence cantonale. Cette proposition de motion propose de réduire le champ d'application de la directive pour qu'elle ne concerne que les organismes subventionnés à plus de 200 000 francs par année et dont plus de 80% des ressources financières proviennent du canton de Genève. Malheureusement, je dois briser un tabou: dans ce monde merveilleux ne règne pas... (Brouhaha.) Monsieur le président, est-ce que vous pouvez faire taire le représentant du monde merveilleux ? Ce monde merveilleux ne présente pas un paysage idéal, c'est pour ça que je vous propose de revenir sur terre et de quitter ce ciel éthéré.

Celui qui nous aide le mieux à revenir sur terre, c'est le conseiller d'Etat Mauro Poggia qui, lors des auditions, nous a clairement expliqué qu'en écartant toutes ces merveilleuses associations, eh bien, on en toucherait environ 65 sur 218, ce qui est absolument considérable. M. Poggia nous a aussi fait remarquer que la mise en place du système proposé était une véritable usine à gaz: il faudrait analyser chaque situation pour déterminer si elle tombe ou non dans le cadre d'application du rapport. Pour être beaucoup plus concret - vous ne m'en voudrez pas, les gens qui sont éthérés - M. Charles Vinzio, responsable du service employeur à l'OCE, nous a clairement dit que l'application de cette directive se faisait de manière peu administrative et qu'un clic suffisait pour remplir ses exigences.

C'est pour cette raison que la commission n'a évidemment pas suivi les motionnaires éthérés et a rejeté sèchement ce texte, non sans lui avoir apporté deux intéressants amendements. Le premier, venant d'Ensemble à Gauche, prévoit d'élargir le cercle des bénéficiaires de la directive en ouvrant la mesure aux personnes en recherche d'emploi inscrites à l'aide sociale et prises en charge à ce titre par l'Hospice général et le service des prestations complémentaires familiales. Un certain consensus s'est fait sur cet amendement qui a été accepté. Ensuite, un deuxième amendement UDC, beaucoup plus pragmatique et terre à terre, visait simplement à supprimer la deuxième invite de la motion et la vidait ainsi de son sens. Cet amendement a également été accepté.

En résumé, ne soyons pas naïfs et constatons que même dans le merveilleux monde associatif, social et subventionné, certaines règles doivent prévaloir et qu'on peut tout à fait appliquer la directive en question sans lourdeur administrative excessive. La majorité vous invite donc à rejeter cette proposition de motion. (Applaudissements.)

M. Sandro Pistis (MCG), rapporteur de première minorité. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, ce texte a été traité en 2017, pendant l'ancienne législature. Lors de son étude, il a été porté à notre connaissance que la première invite - l'élargissement du cercle des bénéficiaires de la directive aux personnes prises en charge par l'Hospice général mais également par le service de réinsertion professionnelle - est une pratique d'actualité.

Concernant la deuxième invite, le groupe MCG s'était refusé à octroyer une certaine souplesse à ces organismes: les associations subventionnées doivent également se plier aux directives puisqu'elles bénéficient de soutiens qui ne sont pas négligeables de la part du Conseil d'Etat, comme l'a très bien rappelé le rapporteur de majorité.

La troisième invite demandait que l'on transmette au Grand Conseil un rapport sur l'efficience et l'efficacité de la directive après deux ans de mise en oeuvre. Je pense que l'efficience et l'efficacité de cette directive ne sont pas à remettre en question. Pour cette raison, le rapport de minorité de l'époque du groupe MCG n'est plus d'actualité. Certaines invites étant déjà mises en oeuvre, le groupe MCG vous invite également à refuser cette proposition de motion.

M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Monsieur le président, cette motion parle de la préférence cantonale. La directive relative à la préférence cantonale n'est pas contestée et, à mon avis, l'immense majorité des partis ne demande aucun changement. Cette directive existe depuis le 13 octobre 2014 et s'applique à la fonction publique et à quelque 250 organismes subventionnés par l'Etat. Cette préférence cantonale doit être soutenue et maintenue.

Pour revenir sur le texte de la proposition, amendé et modifié en commission, il faut rappeler les points suivants. La première invite n'est pas contestée, elle est déjà mise en oeuvre. Les personnes inscrites à l'Hospice général et suivies par le service de réinsertion professionnelle s'inscrivent à l'office cantonal de l'emploi. L'OCE tient compte des personnes qui touchent des indemnités et des demandeurs d'emploi inscrits qui ne touchent rien. Il n'y a donc aucun changement, tout ce qui est écrit dans cette invite est déjà appliqué.

La deuxième invite posait, elle, problème, y compris aux initiants de la motion. Pour cette raison, elle a été purement et simplement refusée et annulée.

La modification de la troisième invite, je le rappelle, a été adoptée à l'immense majorité des commissaires. Il n'y a qu'un seul et unique commissaire qui s'est abstenu.

Cette proposition de motion ne change quasiment rien à la pratique actuelle, sauf, éventuellement, cette troisième invite acceptée à la quasi-unanimité. Pour cette raison, la minorité invite tous les partis à soutenir ce texte, surtout ceux qui se trouvent à l'origine de celui-ci. Je rappelle qu'il s'agit des socialistes, des Verts et du parti démocrate-chrétien. Non seulement ces partis étaient les initiateurs, mais ils ont également obtenu satisfaction avec les modifications et les amendements. (Commentaires.) Désolé ! Merci de soutenir quand même cette motion !

M. Jacques Blondin (PDC). Monsieur le président, les considérants de la proposition de motion visant à maintenir un tissu associatif, à ne pas fragiliser certaines structures en manque de moyens et à faciliter la réinsertion professionnelle sont tout à fait louables. Malheureusement, les invites proposées au Conseil d'Etat n'améliorent en rien la situation. Simplifier les procédures administratives pour les petites structures et celles peu subventionnées par l'Etat crée certains problèmes par rapport aux limites de subventionnement et de pourcentage d'argent reçu.

M. Pfeffer parle d'amendement modifiant les directives, mais quand on commence à catégoriser les entreprises, on crée un certain nombre de problèmes. Par rapport à l'idée de limiter à 80% les subventions, il faut savoir que des grosses entreprises telles que les TPG ne seraient pas prises en compte, ce qui pose problème.

Finalement, comme il a été dit, c'est une usine à gaz jugée d'autant plus inutile qu'il n'y a pas de plainte quant au fonctionnement de la directive en vigueur et que de plus en plus d'entreprises annoncent sur une base volontaire les postes vacants. A nouveau, il est proposé plus de directives et des contrôles supplémentaires aux entreprises et organismes concernés, ce qui conduit évidemment à plus de bureaucratie. Pour toutes ces raisons, le parti démocrate-chrétien vous invite à refuser cette proposition de motion.

M. François Baertschi (MCG). Monsieur le président, cette proposition de motion n'avait qu'un but: torpiller la directive de préférence cantonale initiée par François Longchamp, rappelons-le ! S'il faut lui rendre ce mérite, cette directive a toutefois été développée et a trouvé toute sa substance grâce au conseiller d'Etat Mauro Poggia. Pour le MCG, la préférence cantonale est véritablement un élément clé; c'est cela qui mène notre politique et c'est pour ça que nous soutenons la directive actuelle du Conseil d'Etat. Elle a donné des résultats assez fabuleux, à tel point que la Confédération a voulu nous copier avec la préférence indigène.

Cette pâle copie est malheureusement faite de manière un peu légère et pas très cohérente. L'essentiel ici est de soutenir la directive actuelle et de balayer ce texte qui n'a qu'un but, créer la confusion pour que les gens s'y perdent. Avec la directive ceci ou cela - préférence sociale, préférence cantonale - on ne sait plus de quoi on parle ensuite. Le problème est qu'il y a à Genève 11% de chômeurs, comme l'a dit un préopinant. Ce sont les chiffres de l'OIT. C'est la situation gravissime que nous avons parce que nous sommes ouverts sur le monde. C'est actuellement dramatique pour les travailleurs genevois, ce sera dramatique pour les professions libérales comme les avocats et médecins, nombreux dans cette salle, qui devraient se faire du souci pour leur avenir. L'entier de la population risque de souffrir, et très cruellement, de la nouvelle donne dans laquelle nous nous trouvons.

C'est pour cela qu'il faut soutenir l'actuelle directive cantonale de préférence cantonale, comme elle s'intitule. Parce que c'est l'élément essentiel et la clé de voûte de notre politique, de la politique du Conseil d'Etat, de la politique de notre Etat genevois, pour essayer de protéger les Genevois. C'est cela que nous devons soutenir. Allons droit au but et balayons cette motion qui n'a qu'un seul but: troubler les esprits et semer la confusion dans la vie politique. (Applaudissements.)

M. François Lefort (Ve). Monsieur le président, aujourd'hui, la confusion semble régner sur les bancs où siègent les rapporteurs de majorité et de minorité: chose rare, nous avons ici la réunion d'un rapporteur de majorité et de deux rapporteurs de minorité qui sont contre cette motion des Verts ! C'est un acte assez rare que je vous prie d'admirer: le représentant des motionnaires affronte à la fois trois rapporteurs en un !

Cette proposition de motion part du constat que la directive sur la préférence sociale en matière d'emploi serait contreproductive et s'apparenterait plutôt à une fausse promesse propre à décevoir les demandeurs d'emploi. Par ailleurs, cette directive s'applique sans distinction à tous les organismes subventionnés, quelle que soit leur taille et le montant de la subvention. Et si cela ne pose aucun problème aux grosses associations ou aux établissements autonomes subventionnés comme les HUG, parce qu'ils peuvent mettre en oeuvre facilement cette directive, cela pose bien sûr problème à toute une kyrielle de petites associations subventionnées. A titre d'exemple, le CSP - qui n'est d'ailleurs pas une petite association - est soumis à cette directive alors que sa subvention ne représente que 8% de son budget.

Enfin, ce n'est que justice, cette directive doit s'appliquer non seulement aux demandeurs d'emploi inscrits à l'OCE, mais aussi aux personnes inscrites à l'aide sociale et prises en charge par l'Hospice général. Il n'y a aucune raison de les laisser de côté. Sur ce constat, la motion demande donc d'élargir le cercle des bénéficiaires de la directive aux personnes inscrites à l'aide sociale et de réduire son champ d'application pour qu'elle ne concerne que les organismes subventionnés à plus de 200 000 francs ou dont la subvention représente plus de 80% du budget. Enfin, la motion demande de rapporter, ce qui est quand même nécessaire, sur l'efficience de cette directive sur la préférence sociale en matière d'emploi que nous vantait tout à l'heure mon préopinant MCG.

Cette motion a été amendée en commission, puis elle y a été refusée. C'est donc bien sûr maintenant sur les propositions initiales des Verts - que je viens de vous rappeler - que vous allez vous prononcer: nous vous demandons de les soutenir. Bien sûr, vous n'allez pas du tout vous prononcer sur les amendements des rapporteurs de minorité - qui, d'ailleurs, en représentent juste un, extrêmement important parce qu'il vide complètement la motion de son sens. Nous avons donc ici un amendement proposé à nouveau par un rapporteur de minorité dont le but ultime est en fait le même que celui du rapporteur de majorité: détruire cette motion ! (Applaudissements.)

Mme Jocelyne Haller (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, l'intention de cette motion est peut-être louable, mais elle pèche par une vision trop étroite du potentiel de réinsérabilité des personnes à l'aide sociale. Il faut rappeler que depuis 2016, grâce au rapport Evaluanda, nous savons que les personnes à l'aide sociale sont réinsérées, et de manière non exhaustive, contrairement à l'idée qui prévalait antérieurement, à savoir que seules les personnes bénéficiaires du service de réinsertion professionnelle de l'Hospice général étaient, entre guillemets, «réinsérables». De plus, nous avions souhaité dans un premier temps élargir cette mesure aux bénéficiaires des prestations complémentaires familiales, dont vous savez qu'ils sont pénalisés puisqu'ils ne bénéficient pas d'un temps de travail suffisamment élevé et qu'ils se voient imposer la déduction d'un revenu virtuel au motif qu'ils ne travaillent pas à 100%.

Quoi qu'il en soit, notre groupe était réticent à adopter cette motion qui visait avant tout à aménager voire à parer de nouvelles vertus une directive dont nous désapprouvons les fondements relatifs à la préférence cantonale. Toutefois, après l'avoir considérée sous l'angle d'une priorité aux chômeurs, d'une préférence sociale, nous avons tenté d'en modifier le contenu afin qu'elle soit moins restrictive pour les personnes à l'aide sociale ou bénéficiaires de prestations complémentaires familiales et, surtout, qu'elle tienne compte des doléances des divers organismes subventionnés qui estimaient que la charge administrative qui leur était imposée était trop lourde; nous demandions donc que cette charge soit allégée.

Au final, tous les amendements proposés sont tombés à l'eau puisque cette proposition de motion a été rejetée. C'est pourquoi nous l'avons refusée; nous continuerons à le faire aujourd'hui et vous invitons à la refuser aussi, Mesdames et Messieurs les députés.

Le président. Merci. La parole est à M. le député Daniel Sormanni pour une minute trente.

M. Daniel Sormanni (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, non, cette proposition de motion est une mauvaise idée ! Vous voulez réduire le champ d'activité de la directive de préférence cantonale et c'est une erreur. Il ne faut surtout pas écouter ce que vient de nous dire le député François Lefort, parce que cette directive a bien montré son efficacité et il faut absolument qu'elle s'applique à toutes celles et ceux qui entrent aujourd'hui dans son champ, quel que soit le montant de leur subvention. Il est donc absolument important de ne rien changer à la directive actuelle. Elle a démontré l'efficacité de ses dispositions et elle ne pose aucun problème d'application à toutes les associations concernées, quel que soit le montant de leur subvention. Il n'y a pas de raison de vouloir limiter ça en fixant un montant minimum de subvention pour son application: il faut qu'elle s'applique à tout le monde. Ceux qui cherchent un emploi, les chômeurs de Genève vous en sauront gré. Ne touchons rien de cette directive et ne votons surtout pas cette motion qui vise à réduire son champ d'application !

M. Cyril Mizrahi (S). Le groupe socialiste rejettera également cette proposition de motion. Nous étions opposés à la deuxième invite car elle restreint d'une manière qui ne nous semble pas opportune le champ d'application de la motion et opère des distinctions entre les différentes sortes d'associations. Nous soutenions donc la suppression de cette deuxième invite. Or, dans la version proposée ici, cette deuxième invite y figure toujours. Nous n'y sommes pas favorables.

On voit que la première invite semble faire consensus. Cela dit, depuis les travaux, nous avons voté en mars la loi 12387 qui modifie la loi J 2 05 sur le service de l'emploi et la location de services avec l'obligation d'annoncer les postes vacants. Les socialistes ont amendé cette loi d'une manière qui élargit encore en réalité la première invite qui, elle, ne fait référence qu'à certains bénéficiaires de l'Hospice général. Nous, nous avons ajouté dans cette loi votée un article 22, alinéa 2 nouveau qui prévoit que «les personnes susceptibles de bénéficier d'une aide au placement, notamment celles qui s'adressent à l'Hospice général ou à l'office cantonal de l'assurance-invalidité, sont informées par les autorités compétentes de leur droit de s'inscrire au fichier de l'emploi». Cette disposition ayant été adoptée, la proposition de motion nous semble inopportune avec sa deuxième invite et inutile sans cette deuxième invite. C'est pourquoi le groupe socialiste vous invite à la refuser.

M. Marc Falquet (UDC). Monsieur le président, la priorité dans l'emploi doit être une politique de l'Etat pas seulement pour les associations, mais pour chaque citoyen évidemment ! Nous pouvons remercier le conseiller d'Etat Mauro Poggia... (Brouhaha.)

Le président. Un instant, Monsieur Falquet ! On peut avoir un peu de silence, s'il vous plaît ? Je vous laisse continuer.

M. Marc Falquet. Pour les conscientiser, je rappellerai aux employeurs d'engager des Genevois en priorité. Surtout, je ne comprends pas pourquoi on n'exige pas des nouvelles sociétés qui s'installent à Genève qu'elles emploient pour partie des Genevois. Ce serait la moindre des choses ! Je rappelle qu'il y a des dizaines de milliers de personnes qui cherchent un emploi à Genève. Il ne faut pas s'étonner que le commerce local ne marche plus quand les gens n'ont plus d'argent. 60 000 personnes ne paient pas d'impôts, cela veut dire que 60 000 personnes ne gagnent quasiment rien à Genève. Donc, ces gens ne consomment rien et nous sommes en train d'enrichir toute la région frontalière pendant que nous appauvrissons Genève. Il y a de l'argent à Genève, mais il y a aussi de la pauvreté. Quelque chose ne joue pas, la richesse part dans l'Union européenne. Ça, il faut en prendre conscience; chaque employeur devrait normalement s'intéresser aux citoyens genevois et aux citoyens suisses avant d'aller chercher du monde à l'extérieur. La gauche a raison: pensez aux associations, pourquoi pas, mais pensez également aux Genevois !

Le président. Merci. La parole est à Mme la députée Jocelyne Haller.

Mme Jocelyne Haller (EAG). Je vous remercie, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés... (Un instant s'écoule.) Excusez-moi, j'étais déjà intervenue ! J'étais un peu distraite ! (Rires. Applaudissements.)

Le président. C'est parfait, je passe la parole à M. le député André Pfeffer.

M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Merci, Monsieur le président. Je dois revenir sur le principe de ce texte. Au départ, les initiants de cette motion souhaitaient effectivement réduire le champ d'action de la préférence cantonale; ils souhaitaient qu'elle ne s'applique pas à certaines associations et autres organismes. Or, en commission, cette invite a été supprimée à une très large majorité: sept commissaires l'ont refusée, deux souhaitaient simplement qu'elle reste et quatre s'étaient abstenus. C'est pour ça que j'ai repris cet amendement que je vais proposer au vote. Une fois que l'invite sera supprimée, je pense qu'il faudra absolument soutenir cette motion, parce qu'elle est nécessaire. Elle parle de la préférence cantonale, dont une très large majorité de nos concitoyens ont besoin. Pour les personnes qui sont dans le besoin et qui peuvent en bénéficier, je vous recommande d'accepter ce texte après avoir voté l'amendement sur la deuxième invite. Merci !

M. Sandro Pistis (MCG), rapporteur de première minorité. Monsieur le président, le groupe MCG soutiendra le biffage de la deuxième invite ainsi que cela a été proposé. Je voudrais également faire une remarque au groupe des Verts qui fustige les rapporteurs de majorité et de minorité: en commission, ce groupe s'était abstenu - c'est pour son information !

M. François Lefort (Ve). Il faut quand même préciser que le commissaire Vert de l'époque s'est abstenu sur une motion qui était modifiée et avec laquelle il n'était pas d'accord, Monsieur le rapporteur de minorité !

M. Edouard Cuendet (PLR), rapporteur de majorité. Suite aux explications de mon excellent collègue Pfeffer, je dirai, réciproquement, que je n'ai pas tout compris ! (Il rit.) Humour mis à part, là où je rigole moins, c'est suite à l'intervention de mon excellent collègue Lefort, vous transmettrez, Monsieur le président ! Je lui rappellerai avec un certain humour que l'amendement visant la suppression de la deuxième invite a été accepté par quatorze membres de la commission et que les Verts ne s'y sont pas opposés. Pendant tout le débat, les Verts étaient extrêmement mal à l'aise avec ce texte qui n'avait que peu de sens et qui était très compliqué à appliquer: je me permets d'attirer votre attention sur ce point important.

Comme cela est ressorti des travaux de commission, la majorité vous invite à accepter l'amendement visant la suppression de la deuxième invite et, après cela, à refuser la motion dans son ensemble.

M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, la seule existence de cette proposition de motion qui n'émane pas du MCG ou de l'UDC est déjà remarquable en soi. Elle traduit une évolution significative des mentalités et une reconnaissance du fait qu'il y a chez nous des personnes qui doivent pouvoir obtenir un coup de pouce de l'Etat pour se retrouver non pas favorisées, mais sur un pied d'égalité avec une concurrence dans le domaine de l'emploi particulière au canton de Genève.

Il se trouve cependant que les invites qui vous sont proposées sont, pour l'une, déjà réalisée et donc inutile, pour l'autre, inopportune à notre sens. Que le cercle des bénéficiaires de ces directives entrées en vigueur, vous le savez, à la fin de l'année 2014, soit élargi aux personnes à l'Hospice général mais suivies par le service de réinsertion professionnelle, est déjà une réalité. C'est tellement une réalité qu'à Genève, le taux de chômage qui est communiqué chaque mois prend précisément en considération aussi les personnes inscrites à l'office régional de placement mais suivies par l'Hospice général et ne recevant donc pas d'indemnités de chômage. Cette invite reprend donc quelque chose qui est une réalité, elle est inutile.

La seconde invite demandant de réduire le champ d'application aux entités qui reçoivent une subvention de plus de 200 000 francs n'est pas opportune. Pourquoi ? Nous considérons que nous avons des compétences à l'office cantonal de l'emploi et que les personnes pourvues de ces compétences ne demandent qu'une chose: pouvoir travailler au sein de notre économie. Il n'est pas juste ni raisonnable qu'une entité qui reçoit de l'argent - ne serait-ce qu'un franc, pour prendre une somme volontairement provocante - ne fasse pas bénéficier du retour de monnaie l'Etat qui la soutient. Il est donc parfaitement logique que toute entité qui demande un soutien financier à l'Etat fasse l'effort d'annoncer les postes vacants à l'office cantonal de l'emploi et qu'elle engage, lorsque les compétences sont réunies, les personnes présentées.

En ce qui concerne la troisième invite, en tout temps, vous le savez, nous pouvons vous rendre des comptes sur l'effectivité des directives. Sachez qu'à Genève, dans le grand Etat, 77% des personnes sont engagées par l'intermédiaire de l'office cantonal de l'emploi - c'est un réel succès de ces directives - contre 15% par le secteur privé, selon les chiffres du SECO. Il est vrai que l'Etat de Genève n'est pas celui qui embauche le plus, malgré certaines critiques récurrentes lorsqu'il s'agit de voter le budget. Nous attendons évidemment que ces directives soient intégrées aussi par l'économie privée, sur une base volontaire. Vous voyez qu'entre 15% et 77%, la marge de progression existe, et nous comptons sur vous pour qu'elle se réduise !

Le président. Merci. Nous passons en premier lieu au vote sur l'amendement demandant de biffer la deuxième invite.

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 72 oui contre 21 non.

Le président. A présent, nous votons sur la proposition de motion amendée.

Mise aux voix, la proposition de motion 2286 ainsi amendée est rejetée par 84 non contre 6 oui et 1 abstention.

Le président. Je vous donne rendez-vous à 10h15 pour continuer le travail.

La séance est levée à 10h.