Séance du vendredi 14 novembre 2014 à 15h
1re législature - 1re année - 13e session - 82e séance

P 1911-A
Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition pour que les habitants soient consultés lorsqu'un établissement public (café, restaurant, bar etc.) voudra s'installer dans la rue qu'ils habitent
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session XIII des 13 et 14 novembre 2014.
Rapport de M. Murat Julian Alder (PLR)

Débat

Le président. Nous passons à la P 1911-A, et je cède la parole au rapporteur, M. Murat Julian Alder.

M. Murat Julian Alder (PLR), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, chers collègues, comme son titre l'indique, cette pétition demande en substance qu'on procède systématiquement à une consultation préalable des habitants riverains et des associations de quartier lors de la création d'un établissement relevant de la restauration ou du débit de boissons. Après examen de cette pétition en deux séances, la majorité de la commission vous propose le dépôt sur le bureau du Grand Conseil, et ce pour les motifs suivants: d'abord parce que la majorité considère que le droit actuel permet d'ores et déjà aux associations de quartier mais aussi aux habitants de s'informer et de s'exprimer lorsque des projets d'ouverture d'établissements de ce type sont en cours. A ce titre, la FAO est considérée comme un moyen suffisant pour pouvoir s'exprimer. Aux yeux de la majorité, cette pétition ne ferait en outre qu'ajouter un obstacle supplémentaire sur le chemin de celles et ceux qui entendent faire vivre Genève en ouvrant un café, un bar, un restaurant ou une discothèque. Les propriétaires d'établissements, restaurateurs et cafetiers sont déjà confrontés à une bureaucratie insoupçonnable: il faut en effet remplir pas moins de 26 formulaires différents lorsqu'on veut ouvrir un restaurant dans ce canton ! Nous avons donc estimé qu'il n'était absolument pas justifié d'en rajouter une couche et de créer un obstacle ou une chicane supplémentaire de ce type. Enfin, une partie de la commission a émis des doutes quant à la faisabilité juridique d'un tel procédé car il s'agit d'une claire entrave à la liberté de commerce. Je vous remercie de votre attention.

Mme Jocelyne Haller (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, j'ai un regret dans le cadre de l'examen de cette pétition, c'est qu'on ait balayé d'un revers de main une demande somme toute légitime. Il ne s'agit pas d'opposer vie nocturne et habitants; la question est de trouver un juste équilibre entre le développement d'une vie nocturne dans notre canton et la tranquillité à laquelle peuvent aspirer légitimement les résidents des quartiers.

On nous dit que les associations n'ont qu'à instaurer une sorte de veille de la «Feuille d'avis officielle» afin de s'enquérir et de surveiller elles-mêmes si, par hasard, il n'y aurait pas soudain un établissement qui ouvrirait ses portes dans leur quartier. Ne serait-il pas plus simple de les en aviser, de façon à pouvoir les entendre et mesurer voire préparer l'ouverture d'un établissement nocturne ? Là, on préfère ne pas instaurer le dialogue. Quant à prétendre qu'il s'agit de mettre un obstacle à la vie nocturne... Comme je l'ai dit tout à l'heure, il ne s'agit pas de mettre en opposition tranquillité des habitants et vie nocturne, mais bien de mieux les concilier. Par ailleurs, il ne s'agit pas de développer la bureaucratie mais juste de s'assurer qu'un certain nombre de mesures préalables ont été prises pour que l'ouverture d'un établissement puisse se faire dans de bonnes conditions et non au détriment des locataires. Enfin, s'agissant du doute juridique, je laisserai les spécialistes s'exprimer sur cette question. C'est pourquoi, au contraire de la majorité de la commission, je vous invite à renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat, ne serait-ce que pour honorer le principe de concertation qui a été dûment mis en valeur par la nouvelle constitution. Je vous remercie de votre attention.

M. Christian Frey (S). Le groupe socialiste suit la majorité et recommande le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil. Non pas que la question du bruit nocturne ne soit pas à retenir, mais ce qui est proposé ici est tout simplement infaisable. Ce n'est pas tant la question de la liberté du commerce qui nous importe, mais celle du repos des citoyens. Un certain nombre de phrases ont été dites lors des auditions de la commission qui sont absolument inacceptables: on a par exemple entendu que si des gens veulent avoir le calme, ils n'ont qu'à s'établir à la campagne ou en périphérie. Vous connaissez la situation du logement à Genève; c'est purement impossible. Notre objectif serait de donner suite à la préoccupation d'un calme nocturne et d'ouvertures et de fermetures correctes, mais pas à travers cet objet. Dans une longue avenue - si on s'imagine cela - mettre toute ouverture d'établissement à la consultation de 50, 100 ou 1000 personnes nous semble tout simplement impraticable. Voilà pourquoi nous vous recommandons non pas d'abandonner cette préoccupation mais de déposer la pétition sur le bureau du Grand Conseil.

M. Pascal Spuhler (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, une concertation populaire pour l'ouverture de chaque bistrot de quartier, bar ou autre établissement public deviendrait vite un casse-tête. Comme on le sait, on est toujours d'accord sur tout, mais surtout pas devant chez soi ! On peut donc bien imaginer que ces éventuelles consultations mèneraient à un résultat zéro, c'est-à-dire à l'empêchement d'ouvrir un établissement et donc de la liberté de commerce. Devoir chaque fois consulter un groupement de quartier qui pourrait comporter de 50 à 1000 personnes paraît difficile et compliqué, et nous vous recommandons bien évidemment de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.

M. Raymond Wicky (PLR). Mesdames et Messieurs, chers collègues, j'aimerais revenir sur les propos de mes deux préopinants socialiste et MCG pour dire que je suis entièrement d'accord avec eux. Il s'agit d'une excellente idée, sympathique et logique mais dont la mise en oeuvre est malheureusement impossible. Encore une fois, suivons les conclusions de la commission et déposons cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.

Le président. Merci, Monsieur le député. J'appelle l'assemblée à voter.

Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (dépôt de la pétition 1911 sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées par 74 oui contre 6 non.